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06/07/2023 | FRANCE | N°21/02847

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15e chambre, 06 juillet 2023, 21/02847


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



15e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 06 JUILLET 2023



N° RG 21/02847 -

N° Portalis DBV3-V-B7F-UYGZ



AFFAIRE :



[P] [C]



C/



S.A.R.L. EPS









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Février 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de RAMBOUILLET

N° Section : C

N° RG : 19/00058



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Karema OUGHCHA



Me Anne-Lise ROY







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SIX JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt su...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 06 JUILLET 2023

N° RG 21/02847 -

N° Portalis DBV3-V-B7F-UYGZ

AFFAIRE :

[P] [C]

C/

S.A.R.L. EPS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Février 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de RAMBOUILLET

N° Section : C

N° RG : 19/00058

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Karema OUGHCHA

Me Anne-Lise ROY

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [P] [C]

né le 01 Janvier 1957 à [Localité 5] (MALI)

de nationalité Malienne

Chez Coallia, [Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Karema OUGHCHA, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 149

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/004203 du 01/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)

APPELANT

****************

S.A.R.L. EPS

N° SIRET : 501 449 714

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me François PETIT de la SELAS FPF AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de BORDEAUX, vestiaire : 789 - Représentant : Me Anne-Lise ROY, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 343

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 Mai 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier en pré-affectation lors des débats : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI,

Greffier lors du prononcé : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI,

Par contrat de travail à durée indéterminée du 1er décembre 2011, M. [C] a été engagé par la société EPS en qualité d'agent de tri.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés.

La société EPS avait conclu un contrat de sous-traitance avec la société Sita-Suez, qui a été rompu le 31 décembre 2017.

Par courrier recommandé avec demande d'avis de réception du 28 mars 2018, M. [C] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement s'étant déroulé le 9 avril 2018 en présence du salarié.

Par courrier recommandé avec demande d'avis de réception du 18 avril 2018, la société EPS a notifié à M. [C] son licenciement pour motif économique.

M. [C] a accepté le contrat de sécurisation professionnelle le 26 avril 2018 ; son contrat de travail a pris fin le 30 avril 2018.

Par requête reçue au greffe le 17 avril 2019, M. [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Rambouillet aux fins d'obtenir la requalification de son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre le versement de diverses sommes.

Par jugement du 11 février 2021, auquel renvoie la cour pour l'exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud'hommes de Rambouillet a :

- Dit que le licenciement prononcé repose sur une cause réelle et sérieuse et porte le caractère de licenciement pour motif économique,

- Dit qu'il n'y a pas lieu à retenir le défaut d'obligation de formation,

En conséquence,

- Débouté Monsieur [C] de l'ensemble de ses demandes,

et,

- Débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné Monsieur [C] aux entiers frais et dépens.

Par déclaration au greffe du 30 septembre 2021, M. [C] a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 9 mai 2022, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Versailles a donné acte à la SAS EPS de son désistement d'incident.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 16 décembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens, M. [C] demande à la cour de:

- Infirmer le jugement du 11 février 2021 du conseil de prud'hommes de Rambouillet ayant dit que le licenciement prononcé repose sur une cause réelle et sérieuse et porte le caractère de licenciement pour motif économique et ayant débouté Monsieur [C] de l'ensemble de ses demandes,

Statuant à nouveau,

- Juger que le licenciement de Monsieur [C] est sans cause réelle et sérieuse

- Juger que l'ordre des licenciements n'a pas été respecté,

En conséquence,

- Condamner la société EPS à payer à Monsieur [C] les sommes suivantes :

*16.452,59 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

*3.770,38 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

*4.700,74 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

*470,07 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

*2.000 euros au titre de l'article 37 de la loi de 1991 combiné à l'article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonner la remise de l'attestation d'employeur destinée à Pôle emploi sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

- Dire que les sommes seront augmentées de l'intérêt légal à compter de la saisine ;

- Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;

- Condamner la société EPS aux entiers dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 14 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens, la SAS EPS demande à la cour de :

- Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes du 11 février 2021 dans toutes ses dispositions ;

Par conséquent,

- Débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamner Monsieur [C] à payer à la société EPS la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner Monsieur [C] aux entiers dépens.

'

La clôture de l'instruction a été prononcée le 19 avril 2023.

SUR CE,

Sur le licenciement

En application de l'article L. 1233-3 du code du travail, «constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

1 0 A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu 'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de I 'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de I 'année précédente, au moins égale à :

(') c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d 'au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;

(...)

2 0 A des mutations technologiques,

3 0 A une réorganisation de l 'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;

4 0 A la cessation d'activité de l 'entreprise.

La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail s 'apprécie au niveau de I 'entreprise.

Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de I 'entreprise s 'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n 'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude. (...)».

M. [C] souligne l'importance du chiffre d'affaires de l'entreprise, contestant qu'elle soit en difficultés économiques et estimant qu'elle a agi afin de réaliser des économies et d'améliorer sa propre rentabilité de sorte que sa réorganisation n'était pas justifiée.

La société EPS rappelle et souligne que le licenciement économique de M. [C] a été prononcé, aux termes de la lettre de licenciement, afin de sauvegarder sa compétitivité.

Elle justifie en premier lieu avoir été informée le 5 octobre 2017 de la rupture du contrat de sous-traitance qui la liait à la société Sita-Suez, et que cette dernière n'a pas donné suite à sa demande de transfert de ses salariés affectés à ce marché au regard de la cessation d'activité du client Sytcom sur le centre de tri concerné.

Les premiers juges ont en outre justement relevé que l'entreprise EPS a aussi perdu un autre marché, avec la société CIE et que la perte cumulée desdits marchés CIE et SUEZ est évaluée à 2 millions d'euros de chiffre d'affaires, ce qui représentait près de 30 % de son chiffre d'affaires, qu'elle justifie avoir mis en place une mesure d'activité partielle, dûment validée par la DIRECCTE, dès le premier trimestre 2018, après avoir reçu l'aval de la délégation du personnel consultée en novembre 2017, sans parvenir à être retenue par ailleurs sur de nouveaux marchés, avoir consulté la délégation du personnel les 6 mars 2018et 27 mars 2018, quant aux mesures économiques envisagées et que celle-ci a validé par « avis favorable » les projets de restructuration et de licenciement de 9 salariés « agents de tri », outre que la société EPS s'est aussi vu désigner, via le tribunal de commerce, un mandataire « ad hoc », afin de négocier des aménagements de créances.

Il est enfin justifié qu'un accord de conciliation a été homologué dans ce cadre par le tribunal de commerce le 24 octobre 2018 et qu'au 31 décembre 2018 la société EPS subissait, dans un contexte de forte concurrence dans le secteur considéré, outre la perte de chiffre d'affaires susvisée, un résultat courant avant impôts très largement déficitaire.

Alors que la restructuration d'une entreprise ne vise pas à résoudre uniquement les difficultés économiques présentes, mais s'inscrit aussi dans l'anticipation et vise à garantir le maintien et la pérennité de l'entreprise dans le temps, la nécessité de la réorganisation mise en 'uvre par la société EPS et par suite le motif économique du licenciement de M. [C] sont ainsi établis.

S'agissant du reclassement, M. [C] affirme que ses fonctions d'agent de tri « ont certainement évolué », qu'il était « parfaitement reclassable » au sein d'une société comptant plus de 100 salariés et que son employeur n'a pas procédé à tous les efforts nécessaires pour le reclasser.

Il invoque en outre le non-respect de l'ordre des licenciements en indiquant qu'il remplissait les critères d'ancienneté et d'âge de l'article L. 1233-5 du code du travail, soulignant qu'il était âgé de 61 ans et avait deux enfants à charge.

La société EPS, qui produit son registre du personnel, justifie de l'absence de poste disponible susceptible d'être proposé à M. [C] en son sein et avoir interrogé les autres entreprises du groupe et, au-delà, la société Sytcom en charge du service public du tri de la région et la société MSN et des réponses négatives qui lui ont été adressées en retour.

Elle justifie avoir défini et appliqué les critères d'ordre, faisant ressortir que M. [C] obtenait un nombre de points inférieur aux 5 autres agents de même catégorie non visés en conséquence par la procédure de licenciement économique.

Elle démontre encore que la délégation du personnel, informée et consultée, a aussi, dans son avis, « analysé les possibilités de reclassement » et validé par « avis favorable » l'absence de reclassement identifié ainsi que l'ordre de licenciement proposé dans le cadre du licenciement économique des 9 salariés dont M. [C].

Compte tenu de ces éléments, il n'est pas établi de manquement de l'employeur ni au titre de son obligation de reclassement ni au titre des critères d'ordre.

En conséquence, le jugement sera aussi confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement prononcé repose sur une cause réelle et sérieuse débouté Monsieur [C] de l'ensemble de ses demandes.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens d'appel seront mis à la charge de M. [C].

Il convient, au regard des circonstances de l'espèce, de laisser à la charge de chacune des parties les frais par elles exposés en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris,

Condamne M. [P] [C] aux dépens d'appel,

Laisse à la charge de chacune des parties les frais par elles exposés en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15e chambre
Numéro d'arrêt : 21/02847
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;21.02847 ?
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