COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
21e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 06 JUILLET 2023
N° RG 21/02337 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UUWP
AFFAIRE :
[Z] [P]
C/
S.A.S. PLASTYL
Décision déférée à la cour : Jugement rendu
le 29 Juin 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de RAMBOUILLET
N° Chambre :
N° Section : I
N° RG : F19/00221
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Sandra RENDA de
la SCP MERY - RENDA - KARM - GENIQUE
Me Alexandrine DUCLOUX
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SIX JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [Z] [P]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par : Me Sandra RENDA de la SCP MERY - RENDA - KARM - GENIQUE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000018 - Représentée par : Me Emilie GATTONE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 693
APPELANTE
****************
S.A.S. PLASTYL
N° SIRET : 559 800 404
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Alexandrine DUCLOUX, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 556
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 30 Mai 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique PITE, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Thomas LE-MONNYER Président,
Madame Véronique PITE, Conseiller,
Madame Odile CRIQ Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [Z] [P] a été engagée par contrat à durée indéterminée, à compter du 30 avril 2017, avec reprise d'ancienneté au 1er décembre 2016, en qualité d'assistante commerciale, par la société par actions simplifiée Plastyl, qui a pour activité la fabrication de plaques, feuilles, tubes et profilés en matières plastiques et relève de la convention collective nationale de la plasturgie.
A la suite d'un entretien tenu le 1er août 2018, avec le directeur du site et le directeur des ressources humaines, Mme [P] a été placée en arrêt pour accident de travail, à compter du 2 août 2018, de manière continue.
Le 29 octobre 2018, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) refusait sa prise en charge au titre des maladies professionnelles.
Lors de la visite de reprise du 4 avril 2019, le médecin du travail, au visa de l'article L.4624-4 du code du travail, a déclaré Mme [P] inapte à son poste ajoutant que " la salariée pourrait exercer une activité similaire dans une autre entreprise. La salariée peut bénéficier d'une formation compatible avec ses capacités restantes susmentionnées ".
Le 24 avril 2019, la société Plastyl l'avisait de l'impossibilité de son reclassement.
Convoquée le même jour à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 7 mai suivant, Mme [P] a été licenciée par lettre datée du 14 mai 2019 énonçant une impossibilité de reclassement à la suite d'une inaptitude d'origine non professionnelle.
Mme [P] a saisi, le 28 octobre 2019, le conseil de prud'hommes de Rambouillet aux fins de demander la nullité de son licenciement et de solliciter la condamnation de la société au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire, ce à quoi l'employeur s'opposait.
Le 21 novembre 2019, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles concédait l'origine professionnelle de sa maladie.
Par jugement rendu le 29 juin 2021, notifié le 5 juillet suivant, le conseil a statué c
omme suit :
Déboute Mme [P] de sa demande en nullité de son licenciement.
Juge que le licenciement de Mme [P] pour impossibilité de reclassement suite à inaptitude d'origine non professionnelle est fondé car reposant sur une cause réelle et sérieuse.
Déboute Mme [P] de ses demandes en paiements subséquents.
Condamne Mme [P] aux entiers dépens.
Déboute la société Plastyl de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Déboute les parties de toutes autres demandes différentes, plus amples ou contraires au présent dispositif.
Le 18 juillet 2021, Mme [P] a relevé appel de cette décision par voie électronique.
Selon ses dernières conclusions remises au greffe le 18 août 2021, Mme [P] demande à la cour de la déclarer bien fondée et recevable en son appel et de :
Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 29 Juin 2021,
Et statuant à nouveau
Juger son licenciement nul.
En conséquence,
Condamner la société Plastyl à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement.
Condamner la société Plastyl à lui payer la somme de 4.401,46 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents, soit la somme de 440,14 euros.
Subsidiairement, condamner la société Plastyl à lui payer la somme de 15.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Juger que l'intégralité des sommes sus énoncées sera assortie des intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la demande, soit le 29 octobre 2019.
Voir ordonner à la société Plastyl la remise d'un certificat de travail portant mention du préavis et d'une attestation Pôle Emploi rectifiée sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt,
Juger que la Cour se réservera expressément le droit de liquider ladite astreinte,
Dire qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et qu'en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par la société défenderesse.
Condamner la société Plastyl à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens lesquels comprendront les frais et honoraires d'exécution de la présente décision.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 3 mai 2023, la société Plastyl demande à la cour de :
Confirmer le jugement rendu par le conseil des prud'hommes le 29 juin 2021.
Y ajoutant,
Condamner Mme [P] à lui payer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamner Mme [P] aux dépens.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.
Par ordonnance rendue le 24 mai 2023, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 30 mai 2023.
MOTIFS
Sur la nullité du licenciement
La salariée considère que les règles protectrices des victimes d'accident du travail s'appliquent dès lors que l'employeur a eu connaissance de l'origine professionnelle de l'accident, même si elle devait être déniée par la CPAM. Elle souligne qu'après l'entretien du 1er août 2018 durant lequel lui était proposée une rupture conventionnelle alors qu'elle était très investie et travaillait beaucoup dans de mauvaises conditions, elle fut en état de choc, puis arrêtée et que le 21 novembre 2019, la nature professionnelle de sa maladie fut reconnue aux termes d'une procédure dont l'employeur avait connaissance pour avoir été sollicité le 9 avril précédent. Elle en déduit la nullité de son licenciement, intervenu en méconnaissance de ces règles.
Cela étant, comme l'observe l'employeur, le moyen de Mme [P] manque en droit, puisque la visite de reprise met fin à la protection contre le licenciement, peu important l'origine de l'inaptitude, et qu'elle ne se prévaut d'aucun fait hors cette origine. En tout état de cause, comme l'a justement relevé le conseil de prud'hommes, le contrat de travail n'était plus suspendu quand l'intéressée fut licenciée pour impossibilité de reclassement suite à son inaptitude.
Les prétentions de la salariée seront rejetées par confirmation du jugement qui l'a déboutée de sa demande de nullité du licenciement.
Sur le défaut de cause réelle et sérieuse
La salariée reproche à l'employeur de n'avoir pas recherché à la reclasser et ne lui avoir pas proposé non plus de formation, ce à quoi celui-ci objecte la vaine interrogation de son groupe et le temps pris de sa recherche.
L'article L.1226-2 du code du travail dans sa version applicable au litige énonce que " lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.
Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel lorsqu'ils existent, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail. "
C'est à l'employeur d'apporter la preuve de l'impossibilité où il se trouve de reclasser le salarié.
Par mail du 10 avril 2019, la société Plastyl, qui est comprise dans le groupe dominé par la holding Lafourcade dont les contours ne sont pas disputés par la salariée, a adressé à chacune de ses entités, sans la holding, une lettre circulaire, citant le poste occupé, la date d'embauche, le régime de son contrat, ses principales activités, son niveau de formation, l'avis du médecin du travail, et sollicitant l'avis des postes vacants ou prévus dans les trois mois, sous la remarque que l'emploi proposé devait être aussi comparable que possible avec le précédent.
Elles répondirent toutes n'avoir aucun poste disponible répondant à ces conditions, ce que confirme globalement leurs registres d'entrée et de sortie du personnel.
Il n'est pas spécialement querellé que la holding n'occupait personne, et l'employeur produit les documents sociaux laissant voir que la société Satim développement n'a plus de salarié depuis l'automne 2018.
Le reclassement ne pouvait se faire dans la société Plastyl, Mme [P] devant, selon l'avis du médecin du travail, exercer dans une autre entreprise.
Dès lors, l'intimée, qui n'avait pas à reclasser l'intéressée sur un poste nécessitant une compétence que celle-ci n'aurait pu acquérir que par une formation initiale, étant ajouté que le médecin du travail, comme le relève l'employeur, avait donné avis d'un poste similaire, justifie suffisamment de recherches loyales et sérieuses.
Si Mme [P] lui reproche de ne pas lui avoir proposé de formation, la loi ne lui en fait pas obligation du moment qu'il n'a pas de poste disponible, auquel elle dut être formée.
Le conseil de prud'hommes ayant justement apprécié les faits de la cause, son jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré le licenciement causé et a rejeté les demandes financières de la requérante.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
Condamne Mme [Z] [P] à payer à la société par actions simplifiée Plastyl 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [Z] [P] aux dépens.
- Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- Signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, et par Madame Isabelle FIORE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,