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04/07/2023 | FRANCE | N°22/07607

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 04 juillet 2023, 22/07607


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 14D



13e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 04 JUILLET 2023



N° RG 22/07607

N° Portalis DBV3-V-B7G-VSOO



AFFAIRE :



[K] [T]



C/



LE PROCUREUR GENERAL









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Novembre 2022 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2022L01402


>Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Eva DUMONT SOLEIL



MP



TC PONTOISE



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUATRE JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt sui...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 14D

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 JUILLET 2023

N° RG 22/07607

N° Portalis DBV3-V-B7G-VSOO

AFFAIRE :

[K] [T]

C/

LE PROCUREUR GENERAL

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Novembre 2022 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2022L01402

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Eva DUMONT SOLEIL

MP

TC PONTOISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [K] [T]

né le [Date naissance 2] 1981 à [Localité 6] (PAKISTAN)

de nationalité pakistanaise

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Eva DUMONT SOLEIL, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 69

APPELANT

****************

LE PROCUREUR GENERAL

POLE ECOFI - COUR D'APPEL DE VERSAILLES

[Adresse 3]

[Localité 4]

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Mai 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président, et Madame Delphine BONNET, Conseiller, chargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Monsieur Philippe VANDINGENEN, président de chambre,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN,

En la présence du Ministère Public, représenté par Monsieur Fabien BONAN, Avocat Général dont l'avis du 16/01/2023 a été transmis le même jour au greffe par la voie électronique.

La SARL Eco renov, créée en mai 2015 et gérée par M. [K] [T], avait pour activité la réalisation de travaux de revêtement des sols et des murs.

Par jugement du 24 juin 2021, le tribunal de commerce de Pontoise, saisi par déclaration de cessation des paiements, a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société Eco renov, désigné la Selarl [W], prise en la personne de maître [M] [W], en qualité de liquidateur judiciaire et fixé la date de cessation des paiements au 30 avril 2021.

Par jugement réputé contradictoire assorti de l'exécution provisoire du 7 novembre 2022, le tribunal de commerce de Pontoise a :

- déclaré le procureur de la République recevable et bien fondé en sa demande d'interdiction professionnelle à l'encontre de M. [T] ;

- condamné M. [T] à une faillite personnelle pour une durée de huit ans ;

- condamné M. [T] aux dépens de l'instance.

Le tribunal a retenu les griefs suivants à l'encontre de M. [T] :

- une absence de comptabilité complète et régulière ;

- une abstention volontaire de coopérer avec les organes de la procédure faisant obstacle au bon déroulement de la procédure ;

- un détournement d'actif, à savoir un véhicule Renault.

Par déclaration en date du 19 décembre 2022, M. [T] a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 31 janvier 2023, il demande à la cour de :

à titre principal,

- infirmer l'intégralité du jugement ;

statuant à nouveau,

- prendre acte du caractère disproportionné de la sanction de faillite personnelle ;

en conséquence,

- annuler la sanction de faillite personnelle prononcée à son encontre ;

à titre subsidiaire, si la cour confirmait le jugement prononçant une sanction professionnelle à son encontre, prononcer une sanction alternative comme suit :

- soit requalifier la sanction en interdiction de gérer pour une durée raisonnable de deux ans ;

- soit annuler la sanction de faillite personnelle et prendre en considération la proposition de contribution au passif à hauteur de 10 000 euros par M. [T], en accordant un échelonnement de 24 mois.

Dans son avis notifié par RPVA le 16 janvier 2023, le ministère public demande à la cour de confirmer en tous points le jugement au motif que les premiers juges se sont montrés justes et rigoureux en déclarant que les griefs, nombreux et graves, sont caractérisés à savoir l'absence de tenue de comptabilité régulière, l'absence de collaboration avec les organes de la procédure et le détournement d'actif. Le ministère public considère qu'une condamnation inférieure à sept ans de faillite personnelle paraît inopportune, rappelant que l'insuffisance d'actif est de 286 023, 16 euros.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 avril 2023.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

* sur la non tenue de comptabilité

M. [T] prétend avoir correctement tenu la comptabilité depuis la création de la société, précisant avoir mandaté à cette fin un cabinet comptable. Il indique verser aux débats les bilans comptables de la société.

Aux termes des articles L. 653-1 et L. 653-5 6° du code de commerce, le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de tout dirigeant de droit ou de fait d'une personne morale, contre lequel a été relevé le fait d'avoir fait disparaître des documents comptables, de ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou d'avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables.

Les articles L.123-12 à L.123-28 et R.123-172 à R.123-209 du code de commerce imposent aux commerçants personnes physiques et personnes morales la tenue d'une comptabilité donnant une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise, au moyen de la tenue d'un livre journal et d'un grand livre ; les mouvements doivent être enregistrés chronologiquement au jour le jour et non en fin d'exercice, seuls les comptes annuels étant établis à la clôture de l'exercice.

L'établissement de la comptabilité complète d'une société, d'après les textes précédemment rappelés, ne se limite pas à la remise annuelle des bilans et comptes de résultat mais suppose l'établissement d'une comptabilité quotidienne au travers des éléments comptables précités.

En l'espèce, dans son rapport le liquidateur indique que seule la liasse fiscale de 2020 lui a été remise. M. [T], qui ne produit aucune pièce devant la cour, ne justifie pas de la tenue régulière de la comptabilité de la société alors même qu'il lui incombait en sa qualité de dirigeant de s'assurer de sa bonne tenue par le professionnel auquel il a indiqué l'avoir confiée.

Le grief est donc caractérisé, comme l'a jugé le tribunal.

* sur l'absence de coopération avec les organes de la procédure

M. [T] conteste ce grief prétendant avoir répondu au commissaire-priseur et avoir remis sa comptabilité. Il souligne qu'il n'a pas reçu de convocation à se rendre à l'étude et estime que la preuve de l'absence de coopération et d'une entrave intentionnelle de sa part au bon déroulement de la procédure n'est rapportée.

Selon l'article L.653-5-5° du code de commerce, le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée à l'article L.653-1 contre laquelle a été relevé le fait d'avoir fait obstacle au bon déroulement de la procédure collective en s'abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure.

Dans son rapport le liquidateur judiciaire indique que M. [T], bien qu'informé de la liquidation judiciaire, ne s'est pas présenté à son étude.

En l'état de cette seule affirmation du liquidateur judiciaire, en l'absence de production de mail ou de lettre de convocation du dirigeant, le défaut de coopération ainsi que son caractère volontaire ne sont pas suffisamment caractérisés. Ce grief doit donc être écarté contrairement à ce qu'a retenu le tribunal.

* sur le détournement d'actif

M. [T] affirme ne pas avoir cherché à dissimulé un actif puisque le commissaire-priseur a pu identifier le véhicule Renault qui a été gardé par des salariés avec lesquels il a essayé en vain de reprendre contact.

Aux termes des articles L. 653-1, L. 653-3 et L. 653-4 5° du code de commerce, le tribunal peut prononcer une sanction personnelle à l'encontre de tout dirigeant de droit ou de fait d'une personne morale contre lequel a été relevé le fait d'avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif ou frauduleusement augmenté le passif de la personne morale.

Il est reproché au dirigeant de ne pas avoir remis au commissaire-priseur le véhicule mentionné dans la déclaration de cessation des paiements.

Le liquidateur a précisé dans son rapport que le véhicule utilitaire Renault trafic figurant dans la déclaration de cessation des paiements et revendiqué par la société Lixxbail n'a pas pu être appréhendé par le commissaire priseur.

Il s'en déduit que le véhicule dont il s'agit n'était pas la propriété de la société Eco renov en sorte qu'aucun détournement d'actif ne peut être reproché à son dirigeant. Ce grief n'est pas caractérisé contrairement à ce qu'a retenu le tribunal.

* sur la sanction

M. [T] estime que la sanction prononcée par le tribunal est disproportionnée. Il précise qu'il a retrouvé un emploi de salarié en qualité de peintre mais qu'il souhaite dans le futur de nouveau créer une société dans le secteur du BTP.

La sanction doit être proportionnée à la gravité des fautes reprochées.

Au regard de l'unique grief retenu à l'égard de M. [T] et de sa gravité, il convient, infirmant le jugement sur la nature et le quantum de la sanction, de prononcer à son encontre une interdiction de gérer pour une durée de cinq ans, étant précisé que l'insuffisance d'actif s'est élevée à 286 023 euros.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement en ce qu'il a prononcé à l'encontre de M. [K] [T] une faillite personnelle pour une durée de huit ans ;

statuant de nouveau de ce chef,

Prononce à l'encontre de M. [K] [T], né le [Date naissance 2] 1981 à [Localité 6] (Pakistan), de nationalité pakistanaise, demeurant [Adresse 1], une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale d'une durée de cinq ans ;

Confirme le jugement pour le surplus ;

Condamne M. [K] [T] aux dépens de la procédure d'appel ;

Dit qu'en application des articles 768 et R.69-9° du code de procédure pénale, la présente décision sera transmise par le greffier de la cour d'appel au service du casier judiciaire après visa du ministère public ;

Dit qu'en application des articles L.128-1 et suivants et R.128-1 et suivants du code de commerce, cette sanction fera l'objet d'une inscription au Fichier national automatisé des interdits de gérer, tenu sous la responsabilité du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce auprès duquel la personne inscrite pourra exercer ses droits d'accès et de rectification prévus par les articles 15 et 16 du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Conseiller faisant fonction de Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 22/07607
Date de la décision : 04/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-04;22.07607 ?
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