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29/06/2023 | FRANCE | N°22/07269

France | France, Cour d'appel de Versailles, 14e chambre, 29 juin 2023, 22/07269


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 54B



14e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 29 JUIN 2023



N° RG 22/07269 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VRR4



AFFAIRE :



S.A.S. UCG





C/

S.A.S. BETON PADUA





S.E.L.A.R.L. FIDES







Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 24 Novembre 2022 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° RG : 2022R00160



Expéditions

exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 29.06.2023

à :



Me Rui RESENDE GOMES, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Guillaume GOMBART, avocat au barreau de VERSAILLES





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT NEUF JUIN...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 54B

14e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 29 JUIN 2023

N° RG 22/07269 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VRR4

AFFAIRE :

S.A.S. UCG

C/

S.A.S. BETON PADUA

S.E.L.A.R.L. FIDES

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 24 Novembre 2022 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° RG : 2022R00160

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 29.06.2023

à :

Me Rui RESENDE GOMES, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Guillaume GOMBART, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.S. UCG

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]/France

Représentant : Me Rui RESENDE GOMES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 702

Ayant pour avocat plaidant Me Sirma SEZGIN-GUVEN, du barreau de Paris

APPELANTE

****************

S.A.S. BETON PADUA

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Guillaume GOMBART, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 646

Ayant pour avocat plaidant Me Merabi MURGULIA, du barreau de Paris

INTIMEE

****************

S.E.L.A.R.L. FIDES

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Rui RESENDE GOMES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 702

Ayant pour avocat plaidant Me Sirma SEZGIN-GUVEN, du barreau de Paris

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 Mai 2023, Madame Marietta CHAUMET, conseiller ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de président,

Madame Marina IGELMAN, Conseiller,

Madame Marietta CHAUMET, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Elisabeth TODINI

EXPOSÉ DU LITIGE :

Les sociétés Béton Padua et UCG exercent toutes les deux une activité de travaux de maçonnerie générale et de gros oeuvre de bâtiment.

La société UCG a confié à la société Béton Padua la sous-traitance de plusieurs chantiers portant notamment, sur la réalisation des travaux de 'dallage mise en oeuvre de béton, coulage à la grue et finitions lisse hélicoptère'.

Par acte d'huissier de justice délivré le 7 octobre 2022, la société Béton Padua a fait assigner en référé la société UCG aux fins d'obtenir principalement sa condamnation au versement de la somme de 75 766, 40 euros à titre de provision à valoir sur les factures impayées.

Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 24 novembre 2022, le juge des référés du tribunal de commerce de Pontoise a :

-dit la société Béton Padua recevable et bien fondée en sa demande,

-condamné la société UCG à payer, par provision, à la société SAS Béton Padua la somme de 75 766,40 euros TTC majorée des intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2022,

-condamné la société UCG à payer, par provision, à la société sas Béton Padua la somme de 1 360 euros au titre de l'article L. 441-10 du code de commerce,

-condamné la société sas UCG à payer à la société Béton Padua la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné la société sas UCG aux entiers dépens de l'instance en ce compris les frais de greffe liquidés à la somme de 40,66 euros ttc,

-rappelé que l'exécution provisoire de l'ordonnance est de droit.

Par déclaration reçue au greffe le 5 décembre 2022, la société UCG a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.

Par jugement du tribunal de commerce de Pontoise rendu le 11 avril 2023, la société UCG a fait l'objet d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire.

Dans ses dernières conclusions déposées le 28 avril 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société UCG représentée par son liquidateur Maître [I], demande à la cour, au visa des articles 328, 872 et 873 du code de procédure civile et des articles 1217 et 1219 du code civil, de :

'- déclarer la SELARL Fides prise en la personne de Maître [I] es qualité de liquidateur de la SAS UCG recevable en son intervention volontaire et l'en dire bien fondée

-déclarer la société UCG recevable en son appel et l'en dire bien fondée

-infirmer dans toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le tribunal de commerce de Pontoise en date du 24 novembre 2022

et par conséquent

-constater les contestations sérieuses émises par la société UCG

-dire n'y avoir lieu à compétence du juge des référés

-débouter la société Béton Padua de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions à toutes fins qu'elles comportent

-la renvoyer à mieux se pourvoir

-condamner la société Béton Padua à payer à la société UCG représentée par la SELARL Fides prise en la personne de Maître [I] es qualité de liquidateur la somme de 3 000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

-condamner la société Béton Padua aux entiers dépens de première instance et d'appel.'

Dans ses dernières conclusions déposées le 21 février 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Béton Padua demande à la cour, au visa des articles 872 et 873 du code de procédure civile, de l'article 1103 du code civil et des pièces versées aux débats, de :

'-confirmer dans toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le tribunal de commerce de Pontoise le 24 novembre 2022 ;

-condamner UCG à verser à Béton Padua la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

-condamner UCG aux entiers dépens.'

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 mai 2023.

Par message adressée par RPVA le 30 mai 2023 la société UCG indique, en réponse à la demande d'observation faite par la cour à l'audience sur ce point, que les prétentions de la société Béton Padua sont devenues irrecevables du fait de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de l'appelante.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L'appelante sollicite l'infirmation de l'ordonnance critiquée en qu'elle l'a condamnée au versement d'une somme provisionnelle de 75 766,46 euros, alors qu'il existe, selon elle, des contestations sérieuses faisant obstacle à cette condamnation.

Se fondant sur les dispositions des articles 1217 et 1219 du code civil, la société UCG entend démontrer que l'inexécution, même partielle, par la société Béton Padua de ses obligations contractuelles au regard de l'existence de nombreuses malfaçons dans les travaux réalisés constitue une contestation sérieuse à sa propre obligation de paiement.

Elle fait ainsi valoir qu'ont été impactés par ces malfaçons les chantiers de [Localité 5], [Localité 8], [Localité 7], [Localité 9] et [Localité 6] pour un montant total de facturation qui s'élève à 30 476, 09 euros.

Elle indique que suite à ces malfaçons, elle a été contrainte de:

- payer une entreprise tierce pour les reprises des sols facturées à 14 388,37 TTC euros sur le chantier d'[Localité 7];

- effectuer elle-même certains travaux aux lieu et place de la société Béton Padua sur les chantiers d'[Localité 7] et de [Localité 8], en refacturant les sommes de 10 770 euros TTC et 5 223 TTC;

- faire appel à une entreprise tierce, la société Bacer pour le remplacement de la chape thermo acoustique par une chape liquide pour un montant de 13 053,96 TTC euros sur le chantier de [Localité 6].

Elle estime que le montant des factures contestées est égal à la somme des coûts d'intervention susmentionnés, à savoir 74 911,42 euros TTC.

L'appelante indique avoir détaillé l'ensemble de malfaçons relevées dans les courriels qu'elle verse aux débats, arguant par ailleurs que d'autres entités des chantiers, notamment la société BMC s'agissant du chantier d'[Localité 7], ont constaté l'existence d'anomalies des travaux réalisés par l'intimée.

Contestant la réalité des reprises qui auraient été effectuées par la société Béton Padua, la société UCG met en exergue l'absence de tout élément de preuve de ces interventions, faisant valoir que les attestations produites par les salariés de l'intimée les prive de force probante au regard de l'existence d'un lien de subordination avec leur employeur.

Elle ajoute qu'à supposer même les reprises alléguées effectives, les travaux ainsi réalisés sont privés de toute efficacité compte tenu des éléments suivants qu'elle entend démontrer:

- sur le chantier d'[Localité 7], suite aux constatations effectuées par la société BMC le 9 mai 2022 de l'absence de reprises au sol, l'appelante a été contrainte de faire appel à une autre société;

- sur le chantier de [Localité 9], après avoir contesté l'existence de malfaçons, la société Béton Padua soutient avoir réalisé les reprises nécessaires, alors que leur réception a été refusée;

- s'agissant du chantier de [Localité 8], l'intimée se contente de produire un devis, tout en indiquant qu'elle n'était plus intervenue sur le chantier suite à une mésentente, sans toutefois en justifier;

- s'agissant du chantier de [Localité 5], un constat d'huissier a établi l'existence de malfaçons, sans que l'intimée puisse justifier que l'intervention ' prévue' a bien été réalisée.

La société Béton Padua soutient quant à elle que l'ensemble de travaux qui lui ont été confiés, ont été réalisés, sans que la société UCG ait émis la moindre contestation avant le mois de mars 2022, s'étant au contraire engagée à plusieurs reprises à solder sa dette par fractions étant dans l'incapacité de procéder au règlement complet des factures.

Elle argue qu'en l'absence de possibilité de mesurer la fiabilité des pièces versées aux débats et d'établir la relation entre les malfaçons alléguées et les travaux facturés, la contestation évoquée ne saurait être considérée comme sérieuse.

Elle fait ensuite valoir que la société UCG ne démontre pas la réalité des malfaçons reprochées au regard, notamment, des éléments suivants:

- les factures relatives au chantier d'[Localité 7] ont bien été réglées par l'appelante;

- il n'est pas démontré que l'intervention de la société De Sousa facturée 14 388,37 euros a résulté des malfaçons des travaux effectués par la société Béton Padua;

- le devis de 10 770 euros produit par l'appelante est dépourvu de toute force probante;

- s'agissant du chantier de [Localité 8], la malfaçon constatée est postérieure à son intervention au regard des caractéristiques techniques des travaux;

- la seule mention sur le compte rendu de travaux de 'plusieurs défauts constatés' ne permet de démontrer ni que ces défauts concernent les travaux réalisés par Béton Padua, ni définir leur ampleur ou encore l'absence de toute reprise;

- s'agissant du chantier de [Localité 5], le compte rendu du chantier précise que les reprises sont en cours;

- les travaux sollicités sur le chantier de [Localité 9] ont été réalisés les 30 et 31 mars 2022;

- un simple mail émanant de l'appelante elle-même, ainsi que le devis et la facture émis par la société Bacer ne démontrent pas que les travaux sur le chantier de Champugny-sur-Marne ont été initialement effectués par la société Béton Padua, l'absence de reprise ayant été par ailleurs confirmée par le chef de chantier en mars 2022.

L'intimée ajoute que chaque chantier correspondant à un rapport contractuel indépendant et autonome, la société UCG ne saurait se prévaloir de réserves sur certains chantiers pour justifier la retenue des factures correspondant à d'autres chantiers.

Elle souligne que le montant des factures sans rapport avec aucun des chantiers litigieux s'élève à 47 289,88 euros TTC, ce qui selon elle, n'est pas contesté par l'appelante.

Sur ce,

Il convient à titre liminaire de donner acte à la SELARL Fides, prise en la personne de Maître [D] [I] de son intervention volontaire en sa qualité de liquidateur de la société UCG.

L'article L. 622-21 I du code de commerce, applicable en procédure de liquidation judiciaire par renvoi de l'article L. 641-3 du même code, dispose que le jugement d'ouverture d'une procédure collective 'interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :

1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;

2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.'

Il résulte de ces textes que l'action introduite par le créancier, avant le placement en liquidation judiciaire du débiteur, en vue de le faire condamner au versement d'une provision sur sa créance, échue antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure, ne peut être poursuivie après ce jugement.

En l'espèce, la décision dont appel a été rendue le 24 novembre 2022 tandis que la procédure de liquidation judiciaire de la société UCG a été ouverte par jugement du 11 avril 2023, de sorte qu'à cette date, elle n'était pas passée en force de chose jugée puisque l'appel était pendant, la déclaration d'appel étant datée du 5 décembre 2022.

En application des textes susvisés, à défaut de décision passée en force de chose jugée antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, une demande tendant à la condamnation en référé au versement d'une provision au titre de la créance échue avant l'ouverture de la procédure collective se heurte à l'interdiction des poursuites et doit être déclarée irrecevable.

Il est par ailleurs constant que seules les condamnations prononcées par le juge du fond peuvent faire l'objet d'une fixation au passif d'une société en liquidation judiciaire et qu'une provision susceptible d'être accordée par le juge des référés n'étant par nature qu'une créance provisoire, ne peut faire l'objet d'une telle fixation, la demande concernant cette créance devant être soumise au juge-commissaire dans le cadre de la procédure de vérification des créances.

Il sera précisé que le même raisonnement s'applique à la créance relative aux frais de recouvrement contractuels.

Par voie d'infirmation, il convient dès lors de déclarer la société Béton Padua irrecevable en toutes ses demandes.

Sur les demandes accessoires

Compte tenu des faits de l'espèce et de l'évolution procédurale de la situation de l'appelante, l'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a statué sur les frais irrépétibles ainsi que sur les dépens sauf à préciser qu'ils seront fixés au passif de la procédure collective de la société UCG.

A hauteur d'appel, chacune des parties conservera la charge des dépens par elles exposés.

Irrecevable en ses demandes, la société Béton Padua ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles.

Par équité, la société UCG représentée par la SELARL Fides prise en la personne de Maître [I] es qualité de liquidateur sera déboutée de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Vu le jugement du tribunal de commerce de Pontoise rendu le 11 avril 2023 ouvrant la procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société UCG,

Donne acte à la SELARL Fides prise en la personne de Maître [I] de son intervention volontaire en sa qualité de liquidateur de la société UCG,

Infirme l'ordonnance entreprise du 24 novembre 2022 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a statué sur les frais irrépétibles ainsi que sur les dépens et sauf à préciser qu'ils seront fixés au passif de la procédure collective de la société UCG,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare la société Béton Padua irrecevable en ses demandes,

Dit que chaque partie conservera la charge des dépens par elle exposés à hauteur d'appel,

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier lors du délibéré, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 14e chambre
Numéro d'arrêt : 22/07269
Date de la décision : 29/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-29;22.07269 ?
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