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29/06/2023 | FRANCE | N°22/06553

France | France, Cour d'appel de Versailles, 14e chambre, 29 juin 2023, 22/06553


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 54G



14e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 29 JUIN 2023



N° RG 22/06553 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VPVI



AFFAIRE :



S.N.C. INEO TERTIAIRE IDF



C/

Société LIGHT GRAPHIX LTD

...







Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 06 Octobre 2022 par le Président du TJ de VERSAILLES

N° RG : 22/00532



Expéditions exécutoires
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Copies

délivrées le : 29.06.2023

à :



Me Aliénor DE BROISSIA, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Oriane DONTOT, avocat au barreau de VERSAILLES,



Me Anne-laure DUMEAU, avocat au barreau de VERSAILLES







RÉPUBLIQUE FRAN...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 54G

14e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 29 JUIN 2023

N° RG 22/06553 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VPVI

AFFAIRE :

S.N.C. INEO TERTIAIRE IDF

C/

Société LIGHT GRAPHIX LTD

...

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 06 Octobre 2022 par le Président du TJ de VERSAILLES

N° RG : 22/00532

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 29.06.2023

à :

Me Aliénor DE BROISSIA, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Oriane DONTOT, avocat au barreau de VERSAILLES,

Me Anne-laure DUMEAU, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.N.C. INEO TERTIAIRE IDF

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité.

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Aliénor DE BROISSIA de la SELARL CONCORDE AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 135 - N° du dossier 791

Ayant pour avocat plaidant Me Philippe EL FADL, du barreau de Paris

APPELANTE

****************

Société LIGHT GRAPHIX LTD

société de droit anglais, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité.

[Adresse 1]

[Adresse 7]

[Adresse 7] ROYAUME UNI

Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20220937

Ayant pour avocat plaidant Me Hélène LABORDE, du barreau de Paris

SARL INCIDENCE

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 482 375 490 (Rcs Meaux)

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Anne-laure DUMEAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 - N° du dossier 43120

Ayant pour avocat plaidant Me Caroline FAUVAGE, du barreau de Paris

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Mai 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marina IGELMAN, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de Président,

Madame Marina IGELMAN, Conseiller,

Madame Marietta CHAUMET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Elisabeth TODININI

EXPOSÉ DU LITIGE :

La société Arbre Prestige agissant en qualité de maître d'ouvrage a confié à la société Pinson Paysage différentes prestations de service portant sur l'aménagement d'espaces extérieurs du château de [Localité 6] comprenant notamment la réalisation de l'éclairage linéaire des haies.

Par un contrat du 13 mai 2019, la fourniture des éclairages a été sous-traitée par la société Pinson Paysage à la société Ineo Tertiaire IDF moyennant la somme de 826 632,33 euros.

La société Ineo Tertiaire IDF a réalisé la pose de 290 luminaires fabriqués par la société Light Graphix Ltd et distribués en France par la société Incidence suivant un CCTP éclairage rédigé par la société Lighting Design International. Les travaux de la société Pinson Paysage ont été réceptionnés le 22 avril 2021.

Des dysfonctionnements affectant certains luminaires ont été dénoncés par la société Arbre Prestige.

Le 8 décembre 2021, la société Arbre Prestige a adressé une mise en demeure à la société Pinson Paysage qui a elle-même mis en demeure à la société Ineo Tertiaire IDF, le 16 décembre 2022.

La société Ineo Tertiaire Idf a contesté sa responsabilité, rappelant qu'elle avait procédé à l'installation des luminaires conformément aux prescriptions données par la société Lighting Design International.

Par acte d'huissier de justice délivré le 19 avril 2022, la société Arbre Prestige a fait assigner en référé la société Pinson Paysage aux fins d'obtenir principalement la réalisation des travaux de réparations portant sur 290 luminaires et ce, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la signification de la décision à intervenir. À titre subsidiaire, la société Arbre Prestige a sollicité la réalisation d'une mesure d'expertise portant sur les désordres constatés sur les luminaires.

La société Ineo Tertiaire IDF est intervenue volontairement à cette instance.

Par acte d'huissier de justice délivré les 17 et 20 juin 2022, la société Ineo Tertiaire IDF a fait assigner en référé les sociétés Lighting Design International, Light Graphix Ltd et Incidence aux fins de leur rendre commune et opposable la mesure d'expertise judiciaire sollicitée par la société Arbre Prestige.

Les deux procédures ont été jointes à l'audience du 6 octobre 8 septembre 2022.

Par ordonnance contradictoire rendue le 6 octobre 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Versailles a :

- ordonné une mesure d'expertise et commis pour y procéder M. [P] [W] ;

- dit qu'en cas d'empêchement ou de refus de l'expert ou en l'absence de réponse de sa part passé un délai d'un mois suivant la présente décision, il pourra procédé à son remplacement par ordonnance d'office ou sur requête ;

- fixé à la somme de 6 000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert qui devra être consignée par la société Arbre Prestige entre les mains du régisseur d'avances et de recettes du tribunal, dans le délai de six semaines à compter de l'ordonnance, sans autre avis et accompagnée d'une copie de la présente décision ;

- dit qu'après acceptation, l'expert aura pour mission de :

- convoquer les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise,

- se faire remettre toutes les pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,

- se rendre sur les lieux et en faire la description,

- relever et décrire les désordres affectant la réalisation de l'éclairage linéaire des haies de la perspective principale du château de Beau regard,

-détailler l'origine, les causes et l'étendue et fournir tout élément utile permettant à la juridiction de déterminer à quels intervenants ces désordres, malfaçons et inachèvements son imputables et dans quelles proportions,

- indiquer si les conséquences de ces désordres malfaçons et inachèvements quant à l'usage et à la solidité qui peut en être attendu ou quant à la conformité de sa destination,

- dire si les travaux ont été conduits conformément aux documents contractuels et aux règles de l'art,

- donner son avis sur les solutions permettant de remédier totalement ou en partie aux désordres constatés, leurs descriptions, ainsi que leurs coûts,

- faire toutes observations utiles au règlement du litige,

- autoriser la société Arbre Prestige en cas d'urgence ou de réel danger reconnu par l'expert, à faire exécuter à ses frais avancés et pour le compte de qui il appartiendra les travaux estimés indispensables par l'expert judiciaire sous sa propre direction et par les entreprises de son choix,

- dire que dans ce cas, l'expert déposera un pré rapport précisant la nature, l'importance et le coût des travaux qu'il estimera indispensable,

- dit que l'expert désigné pourra, en cas de besoin, s'adjoindre le concours de tout spécialiste de son choix, dans un domaine distinct du sien après en avoir simplement avisé les conseils des parties et le magistrat chargé du contrôle des expertises ;

- dit que l'expert effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile, qu'il pourra, conformément aux dispositions de l'article 278 du code de procédure civile, s'adjoindre d'initiative un sapiteur dans une spécialité distincte de la sienne ;

- dit que lors de sa première réunion, et dans un délai de deux mois maximum à compter de l'avis donné par le greffe de la consignation de la provision, l'expert devra en concertation avec les parties dresser un programme de ses investigations et proposer le plus précisément possible le montant prévisible de ses honoraires, de ses frais et débours, ainsi que la date de dépôt du rapport ;

- dit que l'expert devra adresser ces informations au juge chargé du contrôle de l'expertise qui rendra une ordonnance fixant le montant de la provision complémentaire et le délai prévu pour le dépôt du rapport ;

- dit que l'expert devra dresser rapport et le déposer au greffe en deux exemplaires dans les six mois de sa saisine par service du contrôle des expertises du tribunal sauf prorogation comme prévu ci-dessus;

- désigné le juge chargé du contrôle des expertises et à défaut tout autre magistrat du siège du tribunal suivant l'ordonnance annuelle de répartition des services ;

- mis hors de cause les sociétés Light Graphix Ltd et la société Incidence ;

- condamné la société Ineo Tertiaire IDF à verser à la société Light Graphix la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Ineo Tertiaire IDF à verser à la société Incidence la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

- débouté la société Ineo Tertiaire IDF de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- laissé les parties assumer provisoirement la charge de leurs propres dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 28 octobre 2022, la société Ineo Tertiaire IDF a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition, à l'exception de ce qu'elle a ordonné une mesure d'expertise et des chefs subséquents à l'expertise, ainsi qu'en ce qu'elle a statué sur les dépens.

Dans ses dernières conclusions déposées le 16 mars 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Ineo Tertiaire IDF demande à la cour, au visa des articles 145 du code de procédure civile, 1231 et 1240 du code de procédure civil et de la loi n°71-584 du 16 juillet 1971, de :

'- infirmer l'ordonnance du 6 octobre 2022 RG n°22/00532 rendue par le juge des référés du

tribunal judiciaire de Versailles en ce qu'elle a :

- mis hors de cause les sociétés Light Graphix Ltd et la société Incidence,

- condamné la société Ineo Tertiaire Idf à verser à la société Light Graphix la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamné la société Ineo Tertiaire Idf à verser à la société Incidence la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

-débouté la société Ineo Tertiaire Idf de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

et, statuant à nouveau :

- faire droit à la demande d'intervention forcée sollicitée par la société Ineo Tertiaire Idf et rendre commune et opposable aux sociétés Light Graphix et Incidence la mesure d'expertise judiciaire sollicitée par la société Arbre Prestige et ordonnée par la décision du 6 octobre 2022 RG n°22/00532;

- condamner Light Graphix et Incidence à verser chacune la somme de 2 000 euros à Ineo Tertiaire Idf sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamner Light Graphix et Incidence aux dépens de première instance;

et, y ajoutant :

- condamner Light Graphix et Incidence à verser chacune la somme de 3 500 euros à Ineo Tertiaire Idf sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

-condamner Light Graphix et Incidence aux dépens d'appel.'

Dans ses dernières conclusions déposées le 24 janvier 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Light Graphix Ltd demande à la cour, au visa de l'article 145 du code de procédure civile, de :

'-à titre principal:

- confirmer l'ordonnance de référé rendue par le tribunal judiciaire de Versailles en date du 6 octobre 2022 (RG n° 22/00532) en toutes ses dispositions ;

en conséquence :

- débouter la société Ineo Tertiaire Idf de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- mettre la société Light Graphix Ltd hors de cause ;

à titre subsidiaire :

- donner acte à la société Light Graphix Ltd de ce qu'elle formule toutes protestations et réserves d'usage en pareille matière,

en tout état de cause,

- condamner la société Ineo Tertiaire à payer à la société Light Graphix Ltd la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens dont distraction au profit de maître Oriane Dontot, Jrf & Associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.'

Dans ses dernières conclusions déposées le 26 janvier 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Incidence demande à la cour, au visa de l'ordonnance du 6 octobre 2022, des articles 145, 146 et 564 du code de procédure civile et des pièces versées aux débats, de :

'- à titre principal,

- confirmer l'ordonnance du 6 octobre 2022 (RG 22/00532) en toutes ces dispositions;

y ajoutant,

- dire irrecevable comme nouvelle en cause d'appel la demande de la société Ineo Tertiaire Ile de France, tendant à obtenir la condamnation de la société Incidence aux dépens et frais irrépétibles de première instance;

- condamner la société Ineo Tertiaire Ile de France, ou toutes autres parties succombantes, à payer à la société Incidence la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens;

à titre subsidiaire,

- prendre acte des protestations et réserves d'usage de la société Incidence sur la demande de désignation d'expert judiciaire.'

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 avril 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La société Ineo Tertiaire IDF demande à la cour d'infirmer l'ordonnance dont appel et, statuant à nouveau, d'ordonner que la mesure d'expertise judiciaire en cours se déroule au contradictoire des sociétés Incidence et Light Graphix.

Elle considère que les motifs du premier juge ne pouvaient fonder une mise hors de cause, faisant valoir que sa demande est classique en matière de construction, à savoir qu'il est normal que dès lors que le maître d'ouvrage produit des éléments rendant plausible une défaillance du lot éclairage, l'ensemble des parties susceptibles d'être concerné par la défaillance du lot soit appelé à l'expertise judiciaire afin de vérifier la matérialité du désordre et déterminer son imputabilité.

Elle entend démontrer justifier d'un éventuel recours en cas de non-conformité des luminaires ou de vices cachés ainsi que le cas échéant d'un recours fondé sur l'obligation d'information et de conseil du revendeur Incidence et du fabricant Light Graphix, rappelant qu'il n'est pas contesté que les luminaires vendus étanches prennent l'eau.

Surabondamment, la société Ineo Tertiaire IDF indique que les premières constatations de l'expert désigné, suite à la réunion du 26 janvier 2023, évoquent au titre des causes dont l'investigation est privilégiée une défaillance de l'étanchéité des luminaires vendus IP67 et que le technicien a décidé de suspendre ses opérations en l'attente de la mise en cause du fabricant qu'il appelle de ses voeux.

Elle conteste les arguments adverses, soulignant qu'il n'est pas avéré que son action au fond serait manifestement vouée à l'échec et que l'expert n'a pas constaté de chocs ou défauts d'entretien comme l'allègue la société Light Graphix.

La société Light Graphix sollicite la confirmation de l'ordonnance l'ayant mise hors de cause en estimant que l'appelante n'apportait aucun élément de preuve d'un motif légitime pour l'attraire aux opérations d'expertise.

Elle soutient qu'il ne fait aucun doute en l'espèce que le dysfonctionnement des luminaires n'est pas dû à un défaut du produit livré mais uniquement à une pose du produit non conforme aux préconisations du fabricant.

Elle entend préciser que le modèle de référence LD34 préconisé par la société Lighting Design International dans son CCTP, qu'elle a livré, est parfaitement adapté aux usages extérieurs ou dans les salles d'eau, de sorte que ce modèle est étanche dès lors que les modalités de pose préconisées par le fabricant sont respectées.

Elle fait valoir que les constats réalisés sur site et en particulier les photographies permettent de conforter ses dires en ce qu'il apparaît que les luminaires ont été mal positionnés et que non encastrés, ils ont été fortement endommagés dans le cadre des travaux d'entretien des espaces extérieurs.

Elle ajoute qu'aucun élément de preuve ne vient étayer l'argumentation de la société Ineo Tertiaire IDF qui tente de soutenir qu'elle n'aurait pas disposé des notices d'instruction lui permettant de procéder à la pose des luminaires dans les règles de l'art.

La société Incidence demande elle aussi la confirmation de l'ordonnance en ses chefs critiqués.

Elle entend préciser qu'en application des dispositions de l'article 146 du code de procédure civile, l'expertise n'a pas vocation à pallier la carence probatoire d'une partie.

Elle soutient qu'à ce stade, aucun élément ne vient accréditer la thèse selon laquelle les luminaires sont affectés d'un vice ou qu'elle ait manqué à son obligation d'information et de conseil, les éléments produits faisant ressortir trois thèses : celle d'un défaut des préconisations du bureau d'études Lighting Design International, celle d'une mauvaise exécution de pose et celle d'une mauvaise utilisation de la part du maître d'ouvrage, la SCI Arbre Prestige.

Rappelant qu'elle est intervenue en tant que distributeur des produits fabriqués par la société Light Graphix Ltd et posés par la société Ineo Tertiaire IDF, elle soutient que l'intérêt légitime s'apprécie au jour où le juge statue, et qu'au 22 octobre 2022, comme au 20 janvier 2023, aucun élément ne permet à l'appelante de l'attraire à l'expertise.

A titre subsidiaire, elle indique formuler les protestations et réserves d'usage.

Sur ce,

Selon l'article 145 du code de procédure civile, 's'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées, à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé'.

L'application des dispositions de l'article 145 suppose l'existence d'un éventuel procès in futurum, sur la base d'un fondement juridique suffisamment déterminé et dans lequel les parties appelées à la mesure seraient susceptibles de voir leur responsabilité engagée.

Par ailleurs, il sera dès à présent rappelé qu'il est de jurisprudence constante que les dispositions de l'article 146 du code de procédure civile relatives aux mesures d'instruction ordonnées au cours d'un procès ne s'appliquent pas lorsque le juge est saisi d'une demande fondée sur l'article 145 et qu'en outre, l'existence d'un motif légitime s'apprécie au jour du dépôt de l'assignation, et également à la lumière des éléments de preuve produits ultérieurement.

Au cas présent, chacune des parties intervenantes dénie sa responsabilité dans les dysfonctionnements des luminaires posés, qui eux ne sont pas contestés, de sorte que comme le fait valoir la société Ineo Tertiaire IDF, l'hypothèse d'une non-conformité à la description des produits vendus supposément étanches, comme celle d'un manquement du revendeur Incidence et du fabriquant Light Graphix à leur obligation d'information et de conseil sur l'adéquation des produits aux besoins du client et sur l'existence de préconisations du fabricant, ne sauraient être écartées alors que les résultats dont se prévaut la société Light Graphix Ltd sont issus de ses propres investigations (ses pièces 3 et 5) et sont dès lors dénués de force suffisamment probante.

Il en résulte que le motif légitime concernant la participation de la société Light Graphix Ltd et de la société Incidence aux opérations d'expertise est caractérisé.

Par ailleurs, aux termes de la réunion du 26 janvier 2023, M. [W], expert judiciaire désigné, a indiqué dans le compte rendu établi que les désordres déplorés sont bien avérés, une présence d'eau importante dans les luminaires défaillants ayant été détectée, que selon lui, « l'hypothèse d'une défaillance de la protection à l'eau [du luminaire examiné] ne peut » « être exclue » et que « l'intervention du fabricant des luminaires dans le cadre de cette expertise » lui semblait nécessaire, allant même jusqu'à suggérer que la suite des opérations se fasse après régularisation de la procédure vis-à-vis du fabricant.

Sans nullement préjuger d'une quelconque responsabilité, la présence des deux sociétés susmentionnées aux opérations d'expertise apparaît dès lors pertinente.

En conséquence, il convient de faire droit à la demande de la société Ineo Tertiaire IDF par voie d'infirmation.

Sur les demandes accessoires :

Compte tenu du sens de la présente décision, l'ordonnance sera infirmée en ce qu'elle a condamné la société Ineo Tertiaire IDF au titre des frais irrépétibles à l'égard de la société Light Graphix Ltd et de la société Incidence. Elle sera en revanche confirmée en ce qu'elle a laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

Parties perdantes, la société Light Graphix Ltd et la société Incidence ne sauraient prétendre à l'allocation de frais irrépétibles à hauteur d'appel. Elles devront en outre supporter les dépens d'appel.

Il serait par ailleurs inéquitable de laisser à la société Ineo Tertiaire IDF la charge des frais irrépétibles exposés. La société Light Graphix Ltd et la société Incidence seront, chacune, condamnée à lui verser une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme l'ordonnance du 6 octobre 2022 en ce qu'elle a mis hors de cause les sociétés Light Graphix Ltd et Incidence, ainsi qu'en ce qu'elle a condamné la société Ineo Tertiaire IDF à les indemniser au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

La confirme pour le surplus des dispositions critiquées,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Déclare communes et opposables à la société Light Graphix Ltd et à la société Incidence les opérations d'expertise confiées à M. [W],

Dit que l'expert devra poursuivre ses opérations en présence des intéressées ou celles-ci dûment appelées, et devra provoquer leurs observations sur les opérations d'expertise déjà réalisées pour respecter le principe du contradictoire,

Condamne la société Light Graphix Ltd d'une part, et la société Incidence, d'autre part, à verser, chacune, la somme de 2 500 euros à la société Ineo Tertiaire IDF en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en appel,

Dit que la société Light Graphix Ltd et la société Incidence supporteront les dépens d'appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier lors du délibéré, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 14e chambre
Numéro d'arrêt : 22/06553
Date de la décision : 29/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-29;22.06553 ?
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