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25/05/2023 | FRANCE | N°20/00793

France | France, Cour d'appel de Versailles, 21e chambre, 25 mai 2023, 20/00793


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



21e chambre



ARRET N°



RENDU PAR DEFAUT



DU 25 MAI 2023



N° RG 20/00793 - N° Portalis DBV3-V-B7E-TZ7T



AFFAIRE :



[I] [E] [O]





C/

S.A.R.L. VOVEH SECURITE PRIVEE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu

le 09 Juillet 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Chambre :

N° Section : AD


N° RG : F18/00197



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :







Me Stéphanie CHANOIR











le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT CINQ MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Ver...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

21e chambre

ARRET N°

RENDU PAR DEFAUT

DU 25 MAI 2023

N° RG 20/00793 - N° Portalis DBV3-V-B7E-TZ7T

AFFAIRE :

[I] [E] [O]

C/

S.A.R.L. VOVEH SECURITE PRIVEE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu

le 09 Juillet 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Chambre :

N° Section : AD

N° RG : F18/00197

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Stéphanie CHANOIR

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [I] [E] [O]

né le 06 Août 1970 à [Localité 4] (COTE D'IVOIRE)

de nationalité Ivoirienne

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par : Me Stéphanie CHANOIR, Plaidant/Constitué avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 143

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/013125 du 24/02/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)

APPELANT

****************

S.A.R.L. VOVEH SECURITE PRIVEE

N° SIRET : 810 069 260

[Adresse 1]

[Localité 3]

NON REPRESENTEE

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Mars 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président,,

Madame Véronique PITE, Conseiller,

Mme Florence SCHARRE, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,

FAITS ET PROCEDURE

Soutenant avoir été engagé à compter du 1er février 2016, en qualité d'agent de sécurité SSIAP, par la société Voveh Sécurité privée, selon contrat de travail verbal, ce que la société a contesté, lui opposant la conclusion d'un contrat à durée déterminée de chantier et à temps partiel, M. [O], qui affirme que la société a cessé de lui remettre des plannings dès qu'il a commencé à faire valoir ses droits à l'été 2016, a saisi le 30 juillet 2018, le conseil de prud'hommes de Poissy aux fins d'entendre prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et la condamnation de l'employeur à lui verser diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

La société s'est opposée aux demandes du requérant et a sollicité sa condamnation au paiement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 9 juillet 2019, le conseil a statué comme suit:

Condamne la société Voveh Sécurité privée à verser à M. [O] avec intérêts légaux à compter du prononcé du jugement la somme de 1 538,38 euros à titre d'indemnité de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,

Fixe la moyenne des trois derniers mois de salaire à 1 538,38 euros,

Déboute M. [O] du surplus de ses demandes,

Déboute la société de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société aux dépens et éventuels frais d'exécution.

Observation faite que selon annonce légale publiée dans le Bodacc n°20190080, en date du

24 avril 2019, la société Voveh Sécurité privée a été dissoute, M. [C] [M] étant désigné liquidateur amiable, cette décision a été notifiée à la société, prise en la personne de son représentant légal, le 12 juillet 2019 (accusé de réception signé) et le 13 juillet suivant à M. [O].

M. [O] a déposé une demande d'aide juridictionnelle le 23 juillet 2019, qui lui a été accordée par décision du 24 février 2020.

Le 13 mars 2020, M. [O] a relevé appel de ce jugement par voie électronique.

' Selon ses dernières conclusions du 3 juin 2022, M. [O] demande à la cour d'accueillir son appel, de le déclarer bien fondé et de :

Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il l'a débouté de ses demandes au titre des rappels de salaires, du travail dissimulé, de la résiliation judiciaire du contrat et de ses conséquences,

En conséquence,

Fixer son salaire de référence à la somme mensuelle de 2 317,04 euros

(et subsidiairement, 1 538,38 euros)

Condamner la société représentée par son liquidateur M. [M] à lui régler à titre de rappel de salaires la somme de 7 397,93 euros et à titre d'indemnité de congés payés sur rappel de salaires la somme de 739,79 euros ;

Vu les manquements graves de l'employeur à ses obligations,

Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail le liant avec la société Voveh Sécurité privée,

Condamner la société à lui régler les sommes suivantes :

- 9 268,16 euros (et subsidiairement 6 153,52 euros) à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2 317,04 euros à titre d'indemnité de licenciement (sauf mémoire en fonction de la date de résiliation) (et subsidiairement 1 538,38 euros),

- 4 634,08 euros (et subsidiairement 3 078,76 euros) à titre d'indemnité compensatrice de préavis et, à titre de congés payés sur l'indemnité compensatrice de congés payés, 463,40 euros (subsidiairement 307,88 euros),

- 13 902,24 euros, (subsidiairement 9 230,28 euros) à titre d'indemnité forfaitaire de travail dissimulé,

Très subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la requalification du CDD à temps partiel en contrat à durée indéterminée temps plein et condamner la société représentée par son liquidateur M. [M] à une indemnité de requalification d'un mois de salaire,

Infirmer le jugement en ce qu'il a fixé l'indemnité à la somme de 1 538,38 euros et fixer cette indemnité à la somme de 2 317,07 euros ;

Y ajoutant, condamner la société représentée par son liquidateur M. [M] aux indemnités de rupture pour licenciement abusif et plus précisément :

- 9 268,16 euros (et subsidiairement 6 153,52 euros) à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2 317,04 euros (sauf mémoire en fonction de la date de résiliation) (et subsidiairement 1 538,38 euros) à titre d'indemnité de licenciement,

- 4 634,08 euros (et subsidiairement 3 078,76 euros) et à titre de congés payés sur l'indemnité compensatrice de congés payés 463,40 euros (subsidiairement 307,88 euros) au titre du préavis,

Ordonner la remise des bulletins de paie correspondant sur la période du mois de février 2016 au jour de la décision à intervenir et l'attestation Pôle Emploi, sous astreinte de

50 euros par mois de retard et par document,

Dire que ces sommes porteront intérêt au taux légal,

Débouter la société Voveh Sécurité privée de toutes ses demandes fins et conclusions,

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

Condamner la société représentée par son liquidateur M. [M] au paiement d'une somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles avec application de l'article 37-1 du décret du 19/12/1991.

À l'appui de son appel, M. [O] soutient avoir été engagé selon contrat verbal en qualité d'agent de sécurité SSIAP 1 à durée indéterminée à compter du mois de février 2016 par la société Voveh sécurité privée qui ne lui a remis ni contrat de travail ni aucun bulletin de paie et qui ne l'a déclaré que pour un nombre d'heures bien inférieur à celles effectivement travaillées et payées puisque sa déclaration fiscale 2016 ne fait état que de 3 343 euros de salaires déclarés par l'employeur.

Il affirme que la société qui a cessé de lui remettre ses plannings dès qu'il a commencé à faire valoir ses droits en juillet 2016, n'a pas accédé à ses légitimes prétentions et n'a pas mis en oeuvre une procédure de licenciement de sorte qu'il n'a eu d'autres choix que de saisir le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail.

M. [O] conteste l'authenticité du contrat de travail à durée déterminée de chantier que l'employeur lui a opposé en première instance, qu'il affirme ne pas avoir signé, et réfute avoir reçu les bulletins de salaire ainsi que les justificatifs de virements de sommes sur un compte tiers produits par la société.

Subsidiairement, si la cour devait retenir ce contrat, il demande la confirmation du jugement en plaidant que l'employeur ne s'est pas placé dans le cadre légal du contrat de chantier, qui est un contrat de travail à durée indéterminée, de sorte que les premiers juges ont très justement requalifié le contrat de travail à durée déterminée.

Par ailleurs, il estime que l'employeur s'est également affranchi des règles relatives à la durée du travail puisque le contrat, qualifié de contrat à temps partiel, ne comporte aucune précision sur la durée de travail hebdomadaire ou mensuelle de sorte qu'il convient de requalifier le contrat en temps plein. Déduction faite de la somme globale de 6 504,34 euros perçue, il fait valoir que l'employeur reste lui devoir la somme de 7 397,91 euros au titre des missions accomplies sur le site de [Localité 7] et du Technoparc, son salaire de référence s'élevant sur cette période de six mois à 2 317,04 euros.

Faisant valoir que la société Voveh sécurité privée ne lui a établi aucun bulletin de paye et ce malgré ses réclamations, et n'a déclaré qu'une partie de ses salaires, il s'estime fondé à se prévaloir du caractère intentionnel de ces manquements et à revendiquer le paiement de l'indemnité légale de travail dissimulé.

L'appelant considère qu'en le laissant sans planning ni travail à compter du mois d'août 2016, en refusant d'établir un contrat de travail et de lui délivrer des bulletins de salaire et en ne lui réglant pas l'intégralité de ses salaires pour le travail effectivement réalisé la société Voveh sécurité privée a commis des manquements rendant impossible la poursuite de la relation contractuelle.

' Par exploit d'huissier délivré par procès-verbal de recherches infructueuses en date du 23 juillet 2020, M. [O] a fait signifier à la société Voveh Sécurité privée sa déclaration d'appel et ses premières conclusions d'appel.

Au constat, à l'examen de l'extrait Kbis de la société de l'existence d'un établissement principal situé à [Localité 6], le conseiller de la mise en état a invité le conseil de l'appelant à réitérer son assignation au siège de cet établissement. Par exploit d'huissier en date du 11 octobre 2022,

M. [O] a fait citer la société Voveh Sécurité privée suivant procès-verbal de recherches conformément aux dispositions de l'article 659 du code de procédure civile. La radiation d'office de la société du Registre du Commerce et des Sociétés en date du 9 juin 2022 est sans incidence sur la personnalité juridique de cette société, le gérant demeurant le représentant légal de la société.

La société n'a pas constitué avocat.

Par ordonnance rendue le 15 février 2023, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 21 mars 2023.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

MOTIFS

Il résulte de l'article 472 du code de procédure civile qu'en appel, si l'intimé ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés. Aux termes de l'article 954, dernier alinéa, du même code, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Sur la nature du contrat liant les parties :

M. [O] critique la décision du conseil de prud'hommes en ce qu'elle a rejeté ses demandes principales fondées sur une relation contractuelle reposant sur un contrat verbal à durée indéterminée et présumé conclu à temps plein.

Après avoir retenu, de manière erronée, comme constant que 'M. [O] avait été engagé par la société Voveh sécurité privée selon contrat de chantier à durée déterminée à temps partiel du 1er février 2016 pour occuper un emploi d'agent de sécurité/SSIAP à la maison de retraite [5] de [Localité 7]', le conseil de prud'hommes a écarté la réclamation de M. [O] aux motifs suivants :

'Considérant le contrat de travail à durée déterminée et à temps partiel, signé le

1er février 2616, et dont il n'est pas prouvé la nature frauduleuse par une falsification de signature, par un dépôt de plainte ou de main-courante [...]',

M. [O], qui affirme avoir été engagé suivant contrat verbal, fait valoir le caractère apocryphe de la signature apposée sur le contrat de travail ainsi que sur le règlement intérieur produits en première instance par la société intimée.

En vertu de l'article 1324 du code civil, dans le cas où une partie désavoue son écriture ou sa signature, la vérification en est ordonnée en justice. Selon l'article 299 du code de procédure civile, si un écrit sous seing privé produit en cours d'instance est argué faux, il est procédé à son examen comme il est dit aux articles 287 à 295 du même code, le juge vérifiant l'écriture déniée ou non reconnue, à moins qu'il puisse statuer sans en tenir compte.

En l'espèce, la société a opposé au salarié un contrat de chantier à durée déterminée aux termes duquel les parties auraient convenu que M. [O] exercerait les fonctions de SSIAP à la maison de retraite [5] de [Localité 7] et ce pour une durée déterminée jusqu'à la fin de ce chantier et ce moyennant une rémunération de base de 9,67 euros bruts de l'heure, sans précision sur le temps partiel énoncé dans l'intitulé de l'acte.

Sans même qu'il soit nécessaire d'examiner la demande de requalification de ce 'CDD' en contrat de travail à durée indéterminée, prétention que l'appelant ne forme qu'à titre subsidiaire, il n'est pas nécessaire en l'espèce de procéder à la vérification de la signature déniée.

En effet, il est constant, ainsi que l'employeur l'a expressément concédé devant le conseil de prud'hommes (cf. notes d'audience), que le salarié n'a pas exercé ses fonctions de SSIAP pour le compte de cet employeur exclusivement dans le cadre de ce 'chantier' de la maison de retraite, mais qu'il lui a confié également des vacations dès le mois de février 2016, ainsi qu'en attestent les rapports de surveillance renseignés par le salarié (pièce n° 2 de l'appelant) sur un autre site dit du 'Technoparc', rendant ipso facto le contrat opposé par l'employeur privé d'effet.

Le jugement sera donc réformé de ce chef, et il sera jugé que les parties étaient liées par un contrat de travail à durée indéterminée oral.

Sur le rappel de salaire :

Le conseil a rejeté cette réclamation motifs pris que :

'Considérant que les rapports de surveillance n'ont pas été fournis dans leur intégralité, et que cela n'a pas permis un recoupement intégral des décomptes d'heures effectivement travaillées, sur les sites de la maison de retraite [5] de [Localité 7] et du Technoparc,

Considérant également que faute d'éléments suffisamment probants, et par application des articles 6 et 9 du code de procédure civile, il ne pourra être fait droit à cette demande.'

Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2, alinéa 1er, L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d' heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant, la chambre sociale de la Cour de cassation précisant selon une jurisprudence constante que le juge prud'homal ne saurait faire peser la charge de la preuve que sur le seul salarié.

En l'espèce, M. [O] verse aux débats les éléments suivants :

- un décompte des heures accomplies au titre des vacations à la maison de retraite qui distingue mois par mois, de février à juillet, les heures au taux normal de celles majorées à 10 et 50%, détaille les montants de salaire correspondant, le salaire mensuel, ainsi que la rémunération globale, soit la somme de 6 160,55 euros,

- un décompte, établi selon la même présentation, concernant les heures de travail qu'il indique avoir accomplies au 'Technoparc', faisant état d'une rémunération globale, toujours pour la période de février à juillet 2016 de 7 741,69 euros,

- les rapports de surveillance concernant le chantier 'Technoparc', documents à l'en-tête de la société Voveh sécurité privée, pour les périodes du 25 février au 25 mars - lesquels détaillent les événements des journées des samedis 5, 12 et 19 mars, de 7 à 19 heures et de la nuit du 22 mars de 19 à 8 heures -, et du 27 mars au 25 avril 2016 - lesquels détaillent les événements des journées des samedis 2, 9, 16 et 23 avril et de la nuit du 22 mars ;

- les rapports de surveillance concernant le chantier 'maison de retraite [5]', pour les mois de février à juillet 2016, le rapport du mois de février précisant à titre d'exemple, les événements des vacations de nuit des 1er, 4, 9, 22 et 29 de ce mois de 21 à 8H.

- des récapitulatifs mensuels énonçant le nombre d'heures travaillées pour chacun de ces chantiers, le nombre global des heures travaillées, le salaire attendu (sans majoration) et le salaire effectivement versé par la société,

- sont joints à ces récapitulatifs les copies des relevés bancaires attestant des paiements que le salarié indique avoir reçus :

- février : 631,03 euros versés sur le compte de M. [O] ,

- mars : 1375,46 euros versés (à la demande du salarié) sur le compte bancaire d'un

M. [Z],

- avril : 1 400,64 euros versés (à la demande du salarié) sur le compte de M. [Z],

- mai : 1 485,06 euros versés (à la demande du salarié) sur le compte de M. [Z],

- juin : 0

- juillet : 1 613,25 euros versés (à la demande du salarié) sur le compte de M. [Z],

- la lettre du 27 juillet 2016 par laquelle il demande à son employeur 'compte tenu des difficultés qu'il rencontre avec son compte personnel' de continuer à lui verser ses salaires sur le compte bancaire de M. [Z],

- la réclamation datée du 25 août 2016, notifiée à la société Voveh sécurité privée le 29 août suivant, ainsi qu'en fait foi l'accusé de réception signé, ainsi libellé :

« M. [M], malgré plusieurs demandes de ma part je reste dans l'attente de recevoir mon contrat de travail ainsi que mes fiches de paie de juin à ce jour avec mon salaire.

D'autre part je reste également dans l'attente de recevoir mon planning du mois d'août déjà réclamé par courrier RAR 1A [...]

par la présente je vous demande également de me faire parvenir celui de septembre 2016, planning qui bien évidemment devra respecter le délai de prévenance de 7 jours francs.

Vous ne pouvez pas ignorer que depuis novembre 2015 je suis salarié de votre entreprise [...] de novembre 2015 à juin 2016 aucun contrat de travail n'a été établi et aucune fiche de paie ne m'a été délivrée et aucun paiement ne m'a été fait. Par la présente, je vous mets en demeure de bien vouloir procéder à la régularisation de l'ensemble de mon dossier et vous informe que je saisis le conseil de prud'hommes ainsi que l' Urssaf. »

Alors que ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, il ne ressort pas de la motivation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes que l'intimée a communiqué des éléments établissant les horaires effectivement accomplis par le salarié.

Par suite, le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté la réclamation du salarié en faisant peser la charge de la preuve sur ce dernier.

Déduction faite des salaires nets reçus par le salarié pour un montant global de 6 505,44 euros, tenant compte des discordances relevées dans l'application quasi systématique de majorations de 10%, sans cohérence avec les journées travaillées mentionnées dans les rapports de surveillance, il sera alloué à M. [O] à titre de rappel de salaire brut la somme de 5 800 euros, outre 580 euros au titre des congés payés afférents.

Sur la rupture :

Les parties étant liées par un contrat de travail à durée indéterminée, celui-ci n'a pas été rompu au 1er septembre 2016 comme retenu par le conseil de prud'hommes et la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail formée par le salarié le 30 juillet 2018 est recevable.

Conformément aux dispositions de l'article 1184 du code civil devenu 1224, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le salarié peut demander la résiliation judiciaire du contrat de travail en cas d'inexécution par l'employeur de ses obligations contractuelles. Il lui appartient alors de rapporter la preuve des faits qu'il allègue.

Si les manquements invoqués par le salarié au soutien de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail sont établis et d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de ce contrat, la résiliation judiciaire est prononcée aux torts de l'employeur et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse au jour de la décision qui la prononce dès lors que le contrat n'a pas été rompu avant cette date.

Il suit de ce qui précède que l'employeur n'a pas satisfait à son obligation de payer les salaires conformément aux heures de travail accomplies par M. [O], ne justifie pas lui avoir délivré ses bulletins de salaire et a cessé de lui fournir du travail à compter du mois d'août 2016.

Nonobstant l'ancienneté des manquements au jour de la saisine de la juridiction prud'homale,

le 30 juillet 2018, force est de constater que, alors que la convocation de l'employeur à l'audience de conciliation vaut mise en demeure, la société intimée qui n'était pas à cette date dissoute,

n'a pas régularisé la situation en fournissant du travail à M. [O] et en lui versant une rémunération en contrepartie, ce qui constitue l'obligation primordiale de l'employeur vis-à-vis de son salarié.

Ces manquements continus rendant impossibles la poursuite de la relation de travail, le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail laquelle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse au jour du prononcé du présent arrêt.

Sur l'indemnisation de la rupture :

Au jour de la rupture, M. [O] est âgé de 52 ans et bénéficie d'une ancienneté de 7 ans et 3 mois au sein d'une entreprise qui n'a plus d'activité et dont l'effectif est donc inférieur à 10 salariés. Son salaire mensuel brut s'établit à 2 100 euros bruts, en ce compris l'incidence des heures supplémentaires.

Le salarié peut prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, correspondant, conformément à l'article L. 1234-5 du code du travail, à la rémunération brute qu'il aurait perçue s'il avait travaillé pendant la période du délai-congé.

Au vu de la durée du préavis, fixée à deux mois tenant son ancienneté, et du montant de son salaire, il sera alloué à M. [O] une indemnité compensatrice de préavis de 4 200 euros bruts, outre 420 euros bruts au titre des congés payés afférents.

M. [O] peut prétendre au paiement d'une indemnité de licenciement. Compte tenu du salaire à prendre en considération et de son ancienneté, qui, pour le calcul des droits, s'apprécie à la date d'expiration normale du délai congé, il a droit à une indemnité dont le montant n'est pas inférieur à 2 317 euros.

En vertu de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance

n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, le salarié peut prétendre au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre un montant minimal de 2 mois de salaire brut et d'un montant maximal de 8 mois de salaire brut.

Il suit de ce qui précède que le salarié ne produit aucun élément justificatif à l'appui de sa demande indemnitaire, la déclaration fiscale de revenus démontrant que M. [O] a travaillé, en sus de son activité au sein de la société Voveh sécurité privée , auprès de deux autres sociétés pour des revenus annuels de l'ordre de 17 000 euros.

Compte tenu des éléments dont dispose la cour, et notamment de l'âge du salarié au moment de la rupture, le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse doit être évalué à la somme de 4 200 euros bruts.

Sur le travail dissimulé :

Selon l'article L. 8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

L'article L. 8221-5 dispose notamment que, 'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur [...] de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales'.

Le conseil de prud'hommes a écarté la réclamation formée par M. [O] de ce chef aux motifs suivants :

'Considérant qu'aucun manquement n'a été retenu dans le versement des salaires dus, il ne pourra être fait droit à cette demande.'

Non seulement, il suit de ce qui précède que l'employeur était redevable d'une créance salariale non négligeable, mais il ne résulte pas du jugement de première instance que l'employeur a satisfait à son obligation de délivrer les bulletins de salaire en y mentionnant, de surcroît, l'intégralité des heures de travail accomplies.

Il ressort en outre de la déclaration fiscale pré-remplie qu'au titre de l'année 2016, la société Voveh sécurité privée a déclaré à l'administration fiscale n'avoir versé au salarié qu'une rémunération de 3 343 euros, soit un montant bien inférieur à ce que le salarié justifie avoir perçu d'elle (6 505,44 euros).

En l'état de ces éléments, la preuve de l'intention de l'employeur de se soustraire à ses obligations est rapportée. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. [O] de ce chef et il lui sera alloué, sur la base d'un salaire brut de 2 100 euros brut, la somme 12 600 euros.

La demande de requalification du CDD, dont M. [O] conteste l'authenticité, n'ayant été présentée qu'à titre subsidiaire, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la société intimée au paiement d'une indemnité de requalification.

Il sera ordonné à l'employeur de remettre au salarié les documents de fin de contrat régularisés, la dite injonction étant assortie d'une astreinte afin d'en garantir l'exécution, selon les modalités précisées au dispositif.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau sur le tout,

Dit que les parties étaient liées par un contrat de travail à durée indéterminée,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur laquelle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du présent arrêt,

Condamne la société Voveh sécurité privée à verser à M. [O] les sommes suivantes :

- 5 800 euros bruts à titre de rappel de salaire, outre 580 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 4 200 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 420 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 2 317 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 4 200 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 12 600 euros à titre d'indemnité légale pour travail dissimulé,

Ordonne à la société Voveh Sécurité privée de remettre à M. [O] un bulletin de paye de régularisation conforme à la présente décision et une attestation Pôle-emploi, et ce sous astreinte de 30 euros par jours de retard passé le délai de deux mois suivant la signification de la présente décision, la durée de l'astreinte provisoire étant limitée à 90 jours,

Dit que les créances de nature contractuelle sont productives d'intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues, et à compter de chaque échéance devenue exigible, s'agissant des échéances postérieures à cette date, et que les créances indemnitaires sont productives d'intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant,

Déboute les demandes plus amples,

Condamne la société Voveh sécurité privée à payer à Maître Stéphanie Chanoir, avocat de M. [O], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile 2° du code de procédure civile et aux entiers dépens.

- Prononce publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- Signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, et par Madame Isabelle FIORE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 21e chambre
Numéro d'arrêt : 20/00793
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;20.00793 ?
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