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16/05/2023 | FRANCE | N°20/04303

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 16 mai 2023, 20/04303


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





1ère chambre 1ère section





ARRÊT N°







CONTRADICTOIRE

Code nac : 28A





DU 16 MAI 2023





N° RG 20/04303

N° Portalis DBV3-V-B7E-UBDY





AFFAIRE :



[J], [T], [A] [F]

C/

[R], [S], [L] [O]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Août 2020 par le Juge aux affaires familiales de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section :
>N° RG : 18/05993



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :





à :



-la SCP GRAS - ROBERT - CHARPENTIER,



-Me Mélodie CHENAILLER







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

1ère chambre 1ère section

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 28A

DU 16 MAI 2023

N° RG 20/04303

N° Portalis DBV3-V-B7E-UBDY

AFFAIRE :

[J], [T], [A] [F]

C/

[R], [S], [L] [O]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Août 2020 par le Juge aux affaires familiales de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 18/05993

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

-la SCP GRAS - ROBERT - CHARPENTIER,

-Me Mélodie CHENAILLER

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dont le délibéré a été prorogé les 21 mars et 09 mai 2023, les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Monsieur [J], [T], [A] [F]

né le 01 Mars 1975 à [Localité 12]

de nationalité Française

[Adresse 9]

[Adresse 9]

représenté par Me Fanny CHARPENTIER de la SCP GRAS - ROBERT - CHARPENTIER, avocat - barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.372 - N° du dossier 203-2015

APPELANT

****************

Madame [R], [S], [L] [O]

née le 13 Juin 1977 à [Localité 10]

de nationalité Française

Chez M. [N] [P]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Mélodie CHENAILLER, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 125

Me Alexandre BLONDIEAU, avocat - barreau de PARIS, vestiaire : D1517

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Décembre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anna MANES, Présidente et Madame Sixtine DU CREST, Conseiller

chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anna MANES, Présidente,

Madame Nathalie LAUER, Conseiller,

Madame Sixtine DU CREST, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

FAITS ET PROCÉDURE

M. [F] et Mme [O] ont vécu en concubinage pendant plusieurs années. Une enfant est issue de cette union.

Par acte du 20 août 2003, ils ont acquis indivisément à concurrence de la moitié chacun un terrain situé à [Adresse 15], sur lequel ils ont fait édifier une maison.

Par acte délivré le 23 novembre 2015, M. [F] a fait assigner Mme [O] devant le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Versailles aux fins de voir ordonner la liquidation de l'indivision des ex-concubins et l'ouverture des opérations de partage, condamner Mme [O] à lui verser la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par jugement rendu le 15 juillet 2016, le juge aux affaires familiales de Versailles a :

- Ordonné le partage judiciaire de l'indivision constituée entre M. [F] et Mme [O] conformément aux dispositions des articles 1364 et suivants du code de procédure civile,

- Désigné pour y procéder Mme [V], notaire à [Localité 16],

- Dit qu'il pourra être procédé au remplacement du notaire sur simple requête,

- Commis le magistrat coordonnateur du pôle famille de ce tribunal, ou son délégataire pour surveiller les opérations, statuer sur les difficultés et faire rapport au tribunal en cas de désaccords persistants des parties,

- Dit que conformément aux dispositions de l'article 1365 du code de procédure civile, si la valeur ou la consistance des biens le justifie, le notaire désigné pourra s'adjoindre un expert, choisi d'un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis,

- Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage,

- Ordonné l'exécution provisoire,

- Ordonné le retrait du rôle et dit que l'affaire pourra être rappelée à tout moment à l'audience du juge commis à la diligence de ce dernier, du notaire désigné, des parties ou de leurs conseils.

Un procès-verbal de difficultés a été rédigé par le notaire le 16 juillet 2018.

Par conclusions déposées le 20 août 2018, M. [F] a sollicité le rétablissement de l'affaire.

Par jugement rendu le 7 août 2020, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire Nanterre a :

- Débouté M. [F] de sa demande tendant à voir homologuer en ses formes et teneurs l'acte de Mme [V], ès qualités, notaire à [Localité 16] annexé au procès-verbal de difficultés en date du 16 juillet 2018,

- Débouté M. [F] de sa demande de condamnation de Mme [O] à lui payer la somme de 40.880,16 euros à titre de solde,

- Débouté M. [F] de sa demande de fixation de la date de la jouissance divise au 16 juillet 2018,

- Débouté M. [F] de sa demande de fixation à l'encontre de Mme [O] d'une créance de 11.433,52 euros au titre du règlement du prêt contracté auprès du crédit foncier de France,

- Débouté M. [F] de sa demande de fixation d'une créance à l'encontre de Mme [O] au titre des factures d'un montant de 46.871,12 euros,

- Débouté M. [F] de sa demande de fixation de la valeur du bien à la somme de 480.000 euros,

- Débouté M. [F] de sa demande d'attribution du bien immobilier indivis,

- Dit qu'aucun compte n'est à faire entre M. [F] et Mme [O] relativement au remboursement des prêts ayant servi à l'acquisition du terrain et de la maison leur appartenant,

- Débouté Mme [O] de sa demande tendant à voir mettre à son actif la somme de 7.134,01 euros au titre du remboursement du prêt,

- Débouté Mme [O] de sa demande tendant à voir ôter de la créance de M. [F] la somme de 93.911,36 euros au titre des factures pour travaux,

- Dit que M. [F] dispose de créance au titre des factures pour travaux relatives aux années 2004, 2006, 2008 et 2011,

- Débouté M. [F] de sa demande de créance au titre des factures libellées au nom de ses parents en 2009,

- Dit que relativement aux factures de 1'année 2013, M. [F] devra justifier auprès du notaire que le spa financé par lui se trouve toujours dans le bien indivis et qu'il sera sursi sur sa demande de créance à ce titre,

- Dit que le notaire au regard de ce qui précède aura pour mission d'établir la créance globale de M. [F] au titre des travaux,

- Dit que M. [F] est redevable d'une indemnité d'occupation, et ce depuis le 16 juillet 2013 et jusqu'à la libération effective des lieux,

- Dit que la valeur locative du bien est fixée à la somme de 1.750 euros,

- Dit que ladite valeur sera affectée d'un abattement de 20 %,

- Dit qu'il reviendra au notaire au vu de ces éléments de calculer l'indemnité d'occupation due par M. [F],

- Renvoyé les parties devant Mme [V], ès qualités, notaire à [Localité 16] afin de terminer les opérations de partage et de liquidation en prenant en compte ce qui a été jugé par le présent jugement,

- Débouté M. [F] de sa demande formulée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Débouté Mme [O] de sa demande formulée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Débouté les parties de leurs plus amples demandes,

- Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage,

- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,

- Dit que la présente décision sera signifiée par huissier de justice par la partie la plus diligente, faute de quoi elle ne sera pas susceptible d'exécution forcée.

M. [F] a interjeté appel de cette décision le 4 septembre 2020 à l'encontre de Mme [O].

Par dernières conclusions notifiées le 21 octobre 2021 (49 pages), M. [F] demande à la cour de :

- Infirmer le jugement rendu en date du 07 août 2020, en ce que le tribunal a :

Débouté M. [F] de sa demande de fixation à l'encontre de Mme [O] d'une créance de 11.433,52 euros, au titre du règlement du prêt contracté auprès du Crédit foncier de France,

Débouté M. [F] de sa demande de fixation d'une créance à l'encontre de Mme [O] au titre des factures d'un montant de 46.871.12 euros,

Débouté M. [F] de sa demande de fixation de la valeur du bien à la somme de 480.000 euros,

Dit qu'aucun compte n'est à faire entre M. [F] et Mme [O] relativement au remboursement des prêts ayant servi à l'acquisition du terrain et de la maison leur appartenant,

Débouté M. [F] de sa demande de créance au titre des factures libellées au nom de ses parents en 2009,

Dit que relativement aux factures de l'année 2013, M. [F] devra justifier auprès du notaire que le spa financé par lui se trouver toujours dans le bien indivis et qu'il sera sursis sur sa demande de créance à ce titre,

Dit que le notaire au regard de ce qui précède aura pour mission d'établir la créance globale de M. [F] au titre des travaux,

Dit que M. [F] est redevable d'une indemnité d'occupation, et ce depuis le 16 juillet 2013 et jusqu'à la libération effective des lieux,

Débouté M. [F] de sa demande formulée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Débouté les parties de leurs plus amples demandes.

Et, statuant à nouveau,

- Dire et juger que l'acte en date du 14 janvier 2011 ne pourra recevoir aucune application,

- Dire et juger que M. [F] dispose de créances à hauteur de :

28.106,98 euros au titre de l'apport personnel lors de l'acquisition du terrain,

11.433,52 euros au titre du remboursement du crédit de 22.867,00 euros contracté pour financer le terrain,

67.322,00 euros au titre des échéances de prêt destiné au financement des constructions.

- Dire et juger que ces créances devront être revalorisées au regard de la valorisation soit du terrain seul, soit de la maison seule, en application des dispositions de l'article 815-13 du code civil,

A titre subsidiaire sur ce point,

- Dire et juger caduc l'engagement qui résulte de l'acte du 14 janvier 2011 à compter du mois de juin 2011,

- Dire et juger que M. [F] dispose des créances suivantes :

une créance de 28.106,98 euros au titre de l'apport personnel effectué lors de l'acquisition du terrain,

une créance correspondant à toutes les sommes réglées par lui au titre de l'acquisition du terrain et de la construction de la maison à compter du mois de juin 2011, dont le montant sera à déterminer par le notaire,

- Dire et juger que ces créances devront être revalorisées au regard de la valorisation soit du terrain seul, soit de la maison seule, en application des dispositions de l'article 815-13 du code civil,

- Dire et juger que M. [F] dispose d'une créance au titre des factures de travaux relatives à l'année 2009, sauf à exclure de cette créance la somme de 1528,88 euros correspondant à la moitié de la facture établie au nom de Mme [C] [F] en date du 13 mars 2009,

- Dire et juger que M. [F] dispose d'une créance au titre de l'acquisition du SPA dont le coût s'est élevé à 14 388 euros, soit une créance de 7194,00 euros,

- Fixer la créance détenue par M. [F] à l'égard de Mme [O] au titre des factures pour travaux à hauteur d'un montant nominal de 45 342,24 euros,

- Dire et juger que, sur ce montant, la somme de 29 025,04 euros devra être réévaluée en fonction de la valorisation actuelle de la maison, s'agissant de dépenses de construction,

- Fixer la valeur des biens et droits immobiliers sis à [Adresse 4] à hauteur de 530 000 euros,

- Dire et juger que M. [F] est redevable d'une indemnité d'occupation uniquement à compter du 20 décembre 2018,

A titre subsidiaire sur la question de l'indemnité d'occupation, si la cour devait confirmer le jugement en ce qu'il a estimé que l'acte en date du 14 janvier 2011 doit recevoir application,

- Dire et juger que M. [F] n'est redevable d'aucune indemnité d'occupation,

- Dire et juger que le notaire devra actualiser la créance de M. [F] au titre des taxes foncières et de l'assurance habitation, en tenant compte des sommes réglées par lui jusqu'à la date la plus proche du partage,

- Dire et juger que M. [F] dispose d'une créance à l'encontre de Mme [O], au titre des taxes d'habitation, pour les sommes réglées par lui à compter de la taxe due au titre de l'année 2012 et ce jusqu'à la date la plus proche du partage,

- Débouter Mme [O] de ses demandes, fins et conclusions,

- Confirmer le jugement pour le surplus,

- Condamner Mme [O], sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, à verser à M. [F] les sommes de 6000 euros au titre de la procédure de première instance et de 5000 euros au titre de la procédure d'appel,

- La condamner aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 20 septembre 2021 (29 pages), Mme [O] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement du 7 août 2020 en ce qu'il a :

Débouté M. [F] de sa demande tendant à voir homologuer en ses formes et teneurs l'acte de Mme [V], ès qualités, notaire à [Localité 16] annexé au procès-verbal de difficultés en date du 16 juillet 2018,

Débouté M. [F] de sa demande de fixation à l'encontre de Mme [O] d'une créance de 11. 433,52 euros au titre du règlement du prêt contracté auprès du crédit foncier de France,

Débouté M. [F] de sa demande de fixation d'une créance à l'encontre de Mme [O] au titre des factures d'un montant de 46.871,12 euros,

Débouté M. [F] de sa demande de fixation de la valeur du bien à la somme de 480.000 euros,

Dit qu'aucun compte n'était à faire entre M. [F] et Mme [O] relativement au remboursement des prêts ayant servi à l'acquisition du terrain et de la maison leur appartenant,

Débouté M. [F] de sa demande de créance au titre des factures libellées au nom de ses parents en 2009,

Dit que relativement aux factures de l'année 2013, M. [F] devra justifier auprès du notaire que le spa financé par lui se trouve toujours dans le bien indivis et qu'il sera sursis sur sa demande de créance à ce titre,

Dit que le notaire aura pour mission d'établir la créance globale de M. [F] au titre des travaux,

Dit que M. [F] est redevable d'une indemnité d'occupation, et ce depuis le 16 juillet 2013 et jusqu'à la libération effective des lieux,

Dit que la valeur locative du bien est fixée à la somme de 1750 euros,

Dit que ladite valeur sera affectée d'un abattement de 20 %,

Dit qu'il reviendra au notaire au vu de ces éléments de calculer l'indemnité d'occupation dur par M. [F],

Débouté M. [F] de sa demande formulée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Infirmer le jugement du 7 août 2020 en ce qu'il a :

Dit que M. [F] dispose de créances au titre des factures pour travaux relatives aux années 2004, 2006, 2008 et 2011,

Débouté Mme [O] de sa demande formulée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Et, statuant à nouveau :

- Juger valide l'engagement souscrit par l'appelant le 14 janvier 2011 et reconnaître que Mme [O] a vocation à recevoir 50 % du prix de vente de la maison que les parties ont acquise sous réserve de la déduction de créance de M. [F] ou de Mme [O] qui ne résulterait pas des paiements des prêts ayant servi à l'acquisition du patrimoine immobilier indivis, l'acte du 14 janvier 2011 ne visant pas d'autres dépenses,

- Rejeter la demande de M. [F] visant à voir constater que celui-ci dispose de créances au titre des factures pour travaux relatives aux années 2004, 2006, 2008 et 2011,

- Fixer la valeur du bien immobilier indivis à hauteur de 640.000 euros,

- Rejeter la demande de M. [F] visant à voir constater que celui-ci dispose d'une créance à l'encontre de Mme [O] au titre des taxes foncière et d'habitation ainsi que de l'assurance d'habitation payées par lui et dire que le notaire devra tenir compte au bénéfice de Mme [O] du prélèvement de 2.391 euros effectué par le comptable public sur ses comptes,

- Débouter l'appelant de ses autres demandes,

- Condamner M. [F] au versement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 3 novembre 2022.

SUR CE, LA COUR,

A titre liminaire

La cour rappelle que l'article 954 du code de procédure civile oblige les parties à énoncer leurs prétentions dans le dispositif de leurs conclusions et que la cour ne statue que sur celles-ci.

Par prétention, il faut entendre, au sens de l'article 4 du code de procédure civile, une demande en justice tendant à ce qu'il soit tranché un point litigieux.

Par voie de conséquence, les « dire et juger » ne constituent pas des prétentions, mais en réalité des moyens qui ont leur place dans le corps des écritures, plus précisément dans la partie consacrée à l'examen des griefs formulés contre le jugement et à la discussion des prétentions et moyens, pas dans le dispositif. La cour ne répondra de ce fait à de tels « dire et juger » qu'à condition qu'ils viennent au soutien de la prétention formulée en appel et énoncée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause, pas dans le dispositif de son arrêt, mais dans ses motifs.

En outre, l'article 954 oblige les parties à formuler expressément leurs prétentions dans le dispositif de leurs conclusions, la cour ne statuant que sur celles-ci. L'adverbe « expressément » qualifie sans aucun doute possible une volonté clairement exprimée.

Il découle de ce texte que le dispositif des conclusions doit récapituler les prétentions des parties de manière claire et distincte. Un dispositif qui ne répondrait pas à cet impératif contreviendrait tant à l'esprit qu'à la lettre des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile dont le respect participe assurément au bon déroulement d'un procès équitable.

Il s'infère de ce qui précède que la cour ne statuera pas sur une demande non expressément formulée.

Sur les limites de l'appel

Il résulte des écritures de l'appelant et de l'intimée que le jugement n'est pas querellé en ce qu'il a :

- Débouté M. [F] de sa demande de condamnation de Mme [O] à lui payer la somme de 40 880,16 euros à titre de solde (il convient de lire « soulte » en réalité),

- Débouté M. [F] de sa demande de fixation de la date de la jouissance divise au 16 juillet 2018,

- Débouté M. [F] de sa demande d'attribution du bien immobilier indivis,

- Débouté Mme [O] de sa demande tendant à voir mettre à son actif la somme de 7.134,01 euros au titre du remboursement du prêt,

- Débouté Mme [O] de sa demande tendant à voir ôter de la créance de M. [F] la somme de 93.911,36 euros au titre des factures pour travaux,

- Renvoyé les parties devant Mme [V], ès qualités, notaire à [Localité 16] afin de terminer les opérations de partage et de liquidation en prenant en compte ce qui a été jugé par le présent jugement,

- Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage,

- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Ces dispositions sont par conséquent, désormais, irrévocables.

Par ailleurs, Mme [O] demande la confirmation du jugement en ce qu'il a :

- Débouté M. [F] de sa demande tendant à voir homologuer en ses formes et teneurs l'acte de Mme [V], ès qualités, notaire à [Localité 16] annexé au procès-verbal de difficultés en date du 16 juillet 2018,

- Dit que la valeur locative du bien est fixée à la somme de 1.750 euros,

- Dit que ladite valeur sera affectée d'un abattement de 20 %,

- Dit qu'il reviendra au notaire au vu de ces éléments de calculer l'indemnité d'occupation due par M. [F].

M. [F] ne demande pas l'infirmation de ces chefs au dispositif de ses conclusions.

Ces points ne sont pas querellés de sorte qu'ils sont devenus irrévocables.

Enfin, il résulte des écritures susvisées que le jugement est querellé en ce qu'il a :

- Débouté M. [F] de sa demande de fixation à l'encontre de Mme [O] d'une créance de 11.433,52 euros au titre du règlement du prêt contracté auprès du crédit foncier de France,

- Débouté M. [F] de sa demande de fixation d'une créance à l'encontre de Mme [O] au titre des factures d'un montant de 46.871,12 euros,

- Débouté M. [F] de sa demande de fixation de la valeur du bien à la somme de 480.000 euros,

- Dit qu'aucun compte n'est à faire entre M. [F] et Mme [O] relativement au remboursement des prêts ayant servi à l'acquisition du terrain et de la maison leur appartenant,

- Dit que M. [F] dispose de créance au titre des factures pour travaux relatives aux années 2004, 2006, 2008 et 2011,

- Débouté M. [F] de sa demande de créance au titre des factures libellées au nom de ses parents en 2009,

- Dit que relativement aux factures de 1'année 2013, M. [F] devra justifier auprès du notaire que le spa financé par lui se trouve toujours dans le bien indivis et qu'il sera sursis sur sa demande de créance à ce titre,

- Dit que le notaire au regard de ce qui précède aura pour mission d'établir la créance globale de M. [F] au titre des travaux,

- Dit que M. [F] est redevable d'une indemnité d'occupation, et ce depuis le 16 juillet 2013 et jusqu'à la libération effective des lieux,

- Débouté M. [F] de sa demande formulée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Débouté Mme [O] de sa demande formulée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Débouté les parties de leurs plus amples demandes.

Sur l'engagement du 14 janvier 2011

M. [F] et Mme [O] ont signé un « Accord » le 14 janvier 2011, dont la remise, la teneur et la signature ont été constatés par procès-verbal d'huissier de justice du même jour, selon lequel, après avoir repris les modalités de financement de l'acquisition du terrain et de la construction de leur maison à [Adresse 4], M. [F] :

« (') atteste que toutes les sommes qui ont été payées jusqu'à ce jour, et celles qui le seront ultérieurement à partir du compte joint ou de tout autre compte y compris mes comptes personnels, sont réputées avoir été payées pour le compte de Mademoiselle [O] et moi-même, et ce, notamment en exécution de mon obligation naturelle vis-à-vis de notre fille [X] ;

C'est pourquoi, il ne pourra être fait aucun compte entre nous sur les sommes payées en cas de séparation de notre couple et de volonté de sortir de l'indivision.

Chacun étant réputé avoir acquitté pour son compte la moitié des sommes réglées ;

Dès lors, chacun de nous aura vocation à recevoir 50% du prix de vente de la maison, en cas de rupture de l'indivision ou vente du bien immeuble sans que comptes soient fait entre les parties ».

Considérant que cet acte était applicable entre les parties en limitant ses effets aux seuls emprunts souscrits par le couple pour l'acquisition du terrain et la construction de la maison, le jugement du 7 août 2020 a dit qu'aucun compte n'est à faire entre M. [F] et Mme [O] relativement au remboursement des prêts ayant servi à l'acquisition du terrain et de la maison leur appartenant.

Moyens des parties

Poursuivant l'infirmation du jugement sur ce point, M. [F] demande à la cour de considérer que cet acte n'est pas applicable.

A titre subsidiaire, il demande à la cour de considérer que cet engagement est caduc à compter du mois de juin 2011 (correspondant au départ définitif de Mme [O] du domicile conjugal).

Il indique tout d'abord que les indications portées dans cet acte concernant le financement des biens et droits immobiliers indivis sont erronées, notamment en ce qui concerne le montant de l'apport personnel. Il valide l'analyse du tribunal selon laquelle cet engagement ne concernerait que les prêts souscrits par le couple, mais conteste qu'il puisse « recevoir application ».

Il précise qu'il a découvert en juin 2009 en regardant l'émission de téléréalité « Secret Story » que sa concubine y participait, qu'il a dû gérer ses « frasques et incartades publiques » en protégeant leur fille [X], cet événement ayant entraîné pour lui une hospitalisation pour crise d'angoisse et par la suite un traitement pour dépression pendant deux années. Il soutient avoir perdu 20 kilos, qu'il était particulièrement influençable et qu'à l'époque Mme [O] lui faisait faire tout ce qu'elle souhaitait. Il explique avoir signé l'acte du 14 janvier 2011, rédigé par sa concubine, alors que Mme [O] lui avait fait espérer une reprise de la vie commune « en repartant de zéro », avec le projet de vendre leur maison à [Adresse 2] et l'idée de déménager aux Etats-Unis. Il ajoute que si les premières diligences pour vendre la maison ont été entreprises, elle n'a pas tenu sa promesse et a quitté le domicile conjugal en juin 2011 pour s'installer en Corse avec un footballeur.

Il conteste avoir commis des violences, arguant avoir immédiatement reconnu l'avoir poussé du lit avec les pieds en décembre 2009, faits qui ont donné lieu à sa condamnation par le tribunal correctionnel à une dispense de peine, avec allocation d'un euro symbolique à Mme [O], le procureur de la République étant d'avis de classer sans suite de la procédure pour infraction insuffisamment qualifiée. Il conteste l'attestation de M. [P], paparazzo mandataire de Mme [O], selon laquelle il aurait commis des violences conjugales, excipant que ce dernier n'a jamais été témoin de tels faits, et que son ex-épouse, Mme [Y] a reconnu que ce dernier avait faussement témoigné contre lui. Selon lui, Mme [O] a quitté le domicile conjugal en juin 2011 pour s'installer avec un footballeur professionnel en Corse, l'abandonnant ainsi que leur fille, et non parce qu'elle était victime de violences. Il précise avoir saisi le juge aux affaires familiales en novembre 2011 et avoir obtenu, par jugement du 24 novembre 2017, l'exercice exclusif de l'autorité parentale.

Par ailleurs, il considère que les dispositions du code civil (article 1188 et suivants) relatives à l'interprétation des contrats n'ont pas à s'appliquer puisqu'il s'agit d'un engagement unilatéral.

En outre, il fait valoir n'avoir jamais signé cet acte en considération d'une obligation naturelle l'inclinant à protéger son ex-concubine, rappelant que l'acte ne vise qu'une obligation naturelle envers leur fille et que Mme [O], en tant que mannequin et chanteuse, disposait de revenus suffisants et venait de recevoir 25 000 euros pour sa participation à « Secret Story ».

Il expose que Mme [O] justifiait auparavant cet engagement par la soi-disant volonté de M. [F] de racheter ses fautes, de sorte que la notion d'obligation naturelle n'a, selon lui, jamais présidée à la commune intention des parties.

Il fait valoir que l'huissier de justice n'a jamais vérifié s'il consentait de façon libre et éclairée à l'acte du 14 janvier 2011 et qu'il n'a jamais eu conscience de la portée de cet acte, dont aucun exemplaire ne lui a été remis.

Enfin, à titre subsidiaire, M. [F] considère que la reprise de la vie de famille et la vente de la maison ne s'étant jamais concrétisées, l'acte du 14 janvier 2011 s'est trouvé dépourvu de cause de sorte qu'il ne peut pas s'appliquer. Selon lui, le départ de Mme [O] du domicile conjugal doit être considéré comme un événement postérieur à la signature de l'acte, dont la survenance a fait disparaître la cause de l'engagement et entraîner la caducité de ce dernier.

Poursuivant la confirmation du jugement, Mme [O] considère, au fondement de l'article 1302 du code civil (ancien article 1235 alinéa 2), que l'acte d'engagement du 14 janvier 2011 doit être appliqué au remboursement des prêts ayant servi à l'acquisition du terrain et à la construction de la maison. Elle fait valoir, au fondement des articles 1188 et 1189 du code civil, que cet acte s'interprète de façon à ce qu'il en ressorte une cohérence globale afin qu'il puisse déployer ses effets selon la commune intention des parties.

Selon elle, cet acte doit être considéré comme la novation d'une obligation naturelle en une obligation civile. Elle indique que l'adverbe « notamment » signifie que M. [F] a tenu compte à la fois de son obligation naturelle vis-à-vis de sa fille mais également des autres obligations naturelles qu'il détient vis-à-vis de sa concubine. Elle en déduit que non seulement M. [F] ne saurait demander la répétition des sommes qu'il a payées au titre des prêts en exécution de son obligation naturelle à l'égard de Mme [O], mais qu'il ne saurait non plus cesser l'exécution de cette obligation dans la mesure où, le 14 janvier 2011, il l'a transformée en obligation civile. A l'instar de ce qu'a considéré le tribunal, elle estime que cet acte concerne le remboursement des prêts à l'exclusion de toute autre créance ayant servi à l'acquisition du patrimoine immobilier indivis.

Appréciation de la cour

L'article 1101 du code civil, dans sa version applicable au litige, dispose que le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose.

L'article 1103 (devenu article 1106) du même, dans sa version applicable au litige, précise qu'il est unilatéral lorsqu'une ou plusieurs personnes sont obligées envers une ou plusieurs autres, sans que de la part de ces dernières il y ait d'engagement.

Selon l'article 1156 du code civil (devenu article 1188), on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes.

Les articles 1161 et 1162 du code civil (devenus articles 1189 et 1190), dans leur version applicable au litige, toutes les clauses des conventions s'interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l'acte entier. Dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation (souligné par la cour).

Il n'est pas permis aux juges, lorsque les termes d'une convention sont clairs et précis, de dénaturer les obligations qui en résultent et de modifier les stipulations qu'elle renferme (Civ. 15 avr. 1872, Veuve Foucauld et Coulombe c/ Pringault, GAJC, 11e éd., n°160, DP 1872. 1. 176; S. 1872. 1. 232 ; Solution maintenue : voir par ex., Civ. 6 juin 1921, DP 1921. 1. 73, rapp. A. Colin, S. 1921. 1. 193, note Hugueney ; 9 oct. 1940, DA 1941. 1. 130 (1re esp.) ; 16 déc. 1940, DA 1941. 1. 130 (2e esp.) ; Civ. 1re, 11 mai 1982: Gaz. Pal. 1982. 2. 612, note Chabas ; Com. 5 juill. 1984: JCP 1985. II. 20409, note E.-M. Bey ; Civ. 1re, 4 avr. 2001, no 98-20.528 P: JCP 2001. II. 10647, note Puigelier ; CEDH sect. IV, 13 juill. 2004, P. et P. c/ Andorre: V. note 4 ss. art. 310).

La dénaturation se définit comme la méconnaissance du sens clair et précis d'un écrit. (Civ. 6 juin 1921: préc. note 1 ; Civ. 1re, 16 avr. 2015, no 14-10.257 P: D. 2015. 928). Une clause n'est claire et précise que si elle n'est susceptible que d'un seul sens (Civ. 12 janv. 1938: DH 1938. 197 ; Civ. 1re, 28 févr. 1962: Bull. civ. I, no 128).

Cette jurisprudence, aujourd'hui codifiée sous l'article 1192 du code civil, s'applique au contrat unilatéral (Civ. 7 févr. 1912: DP 1912. 1. 433; S. 1914. 1. 305, note Hugueney ; Civ. 1re, 9 juill. 1958: D. 1958. 583 ; Civ, 25 juin 1968: D. 1968. 625 Civ., 30 juin 1976: Bull. civ. I, n°145 ; Civ., 23 janv. 2001, n°97-20.618 P: Defrénois 2001. 626, note Crône ; Civ. 1re, 8 mars 2005, n°02-12.740 P: Defrénois 2005. 1219, note Revillard (2e esp.); ibid. 1356, obs. Massip; AJ fam. 2005. 191, obs. Chénedé; Dr. fam. 2005, n°98, note Murat; RTD civ. 2005. 377, obs. Hauser; RDSS 2005. 510, obs. F. [G]).

En l'espèce, force est de constater que l'acte du 14 janvier 2011, contrat unilatéral portant engagement de M. [F] envers Mme [O], est parfaitement clair et précis, chacune de ses clauses n'étant susceptible que d'un seul sens, de sorte qu'il n'y a pas lieu de l'interpréter au risque de le dénaturer.

La cour constate que la première partie de l'acte indique :

« Nous avons acquis une maison sise à [Adresse 4] (') en indivision 50/50.

Le prix de vente du terrain à bâtir 116 000 euros a été réglé.

au moyen d'un apport personnel que nous avons réalisé pour moitié chacun à hauteur de 93 285 euros

au moyen d'un emprunt de 22 867 euros Crédit foncier de France à taux zéro pour lequel nous sommes co-emprunteurs.

S'agissant de la maison, un emprunt souscrit auprès du CRÉDIT FONCIER de France de 114 438 euros à un taux de 4,55%, pour lequel nous sommes tous deux co-emprunteurs ».

Il résulte de ces dispositions que l'engagement porte sur l'apport personnel et les emprunts relatifs à l'acquisition du terrain et à la construction de la maison.

Par cet acte, M. [F] a attesté que « toutes les sommes qui ont été payées jusqu'à ce jour, et celles qui le seront ultérieurement à partir du compte joint ou de tout autre compte y compris mes comptes personnels, sont réputées avoir été payées pour le compte de Mademoiselle [O] et moi-même (') C'est pourquoi, il ne pourra être fait aucun compte entre nous sur les sommes payées en cas de séparation de notre couple et de volonté de sortir de l'indivision.

Chacun étant réputé avoir acquitté pour son compte la moitié des sommes réglées ».

M. [F] explique avoir souffert d'un syndrome dépressif suite à la participation de sa compagne à l'émission Secret Story et produit aux débats un certificat d'hospitalisation du 17 au 20 juillet 2009 pour une crise d'angoisse avec idéations suicidaires et un certificat médical du 23 juillet 2019 attestant d'un traitement anti-dépresseur entre 2009 et 2011 (pièces 45, 46 et 84). Son hospitalisation est antérieure de deux ans à l'engagement pris le 14 janvier 2011. En outre, la prise d'un traitement anti-dépresseur n'est pas suffisante à établir une insanité d'esprit et une incapacité à discerner la portée de son engagement. Il en résulte que M. [F] échoue à démontrer une insanité d'esprit au moment de la signature de l'acte du 14 janvier 2011.

A titre subsidiaire, M. [F] prétend, sans préciser aucun fondement juridique, que l'acte ne serait plus valable après juin 2011 car sa cause, la reprise de la vie commune, aurait disparu. Force est de constater que la reprise de la vie commune n'apparaît pas clairement comme une contrepartie envisagée par les parties au contrat. Elle n'est pas évoquée dans les termes de l'engagement du 14 janvier 2011, et M. [F] ne produit aucun élément de nature à démontrer que la reprise de la vie commune constituait la contrepartie, explicite ou supposée, de son engagement. Il ne produit aucune lettre, courriel ou message de Mme [O] démontrant la promesse de reprendre la vie commune ou de « repartir de zéro » qu'il allègue. Il s'ensuit que la reprise de la vie commune ne constituait pas la cause du contrat à proprement parler, mais, à supposer qu'il ait existé au moment de la signature de l'acte, un espoir nourri par M. [F] seul, sans incidence sur la validité de son consentement.

Au contraire, il ressort des termes mêmes de l'acte du 14 janvier 2011 qu'il a pour objet d'organiser la séparation du couple dans l'hypothèse où elle aurait lieu : « C'est pourquoi, il ne pourra être fait aucun compte entre nous sur les sommes payées en cas de séparation de notre couple et de volonté de sortir de l'indivision (') Dès lors, chacun de nous aura vocation à recevoir 50% du prix de vente de la maison, en cas de rupture de l'indivision ou vente du bien immeuble sans que comptes soient fait entre les parties » (souligné par la cour). Les termes de l'acte étant parfaitement clair, M. [F] ne peut valablement prétendre être délié de son engagement dès lors qu'une séparation définitive a eu lieu.

La jurisprudence citée par M. [F] concerne un contrat unilatéral, souscrit à l'occasion d'un changement de direction, prévoyant un transfert d'actions par le directeur général d'une société au profit du directeur financier de façon à préserver une répartition égalitaire entre eux, cette répartition étant de nature à préserver une bonne entente nécessaire au développement de l'entreprise. La Cour de cassation a considéré dans cette espèce que la démission du directeur financier privait de cause l'engagement unilatéral de sorte qu'il était devenu caduc à compter de celle-ci (1ère Civ., 10 septembre 2015, n°14-20.498). Dans cette espèce, l'engagement unilatéral avait une cause résidant dans la participation effective des deux parties au développement de l'entreprise.

Il en va tout à fait différemment de l'acte du 14 janvier 2011, en l'absence d'élément laissant penser que la reprise de la vie commune était la cause du contrat, qui, au contraire, organise les conséquences d'une séparation.

Il s'ensuit qu'ainsi que l'ont exactement considéré les premiers juges, l'acte d'engagement du 14 janvier 2011 doit recevoir application s'agissant des prêts. Il sera ajouté qu'il doit s'appliquer s'agissant de l'apport personnel effectué lors de l'acquisition du terrain.

Sur les demandes de M. [F] de fixation de ses créances à hauteur de 28 106,98 euros au titre de son apport personnel lors de l'acquisition du terrain, à hauteur de 11 433,52 euros au titre du règlement du prêt contracté auprès du crédit foncier de France pour financer le terrain, et à hauteur de 67 322 euros au titre des échéances de prêt destiné au financement des constructions

Moyens des parties

A titre principal, conformément au projet du notaire annexé au procès-verbal de difficulté, M. [F] demande le remboursement de 28 106,98 euros au titre de l'apport personnel lors de l'acquisition du terrain, de 11 433,52 euros au titre du règlement du prêt contracté auprès du crédit foncier de France pour financer le terrain, et de 67 322 euros au titre des échéances de prêt destiné au financement des constructions. Il demande la revalorisation de ces créances en application de l'article 815-13 du code civil.

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où l'acte du 14 janvier 2011 est caduc à compter de juin 2011, il demande une somme de 28 106,98 euros au titre de l'apport personnel lors de l'acquisition du terrain, et une créance correspondant à toutes les sommes versées par lui au titre de l'acquisition du terrain et de la construction de la maison à compter de juin 2011, dont le montant sera à déterminer par le notaire. Il demande la revalorisation de ces créances en application de l'article 815-13 du code civil.

M. [F] conteste les stipulations relatives à l'apport personnel de l'acte du 14 janvier 2011 et estime avoir couvert la quasi-totalité de l'apport personnel avec ses deniers personnels à hauteur de 70 585,48 euros.

Mme [O] réplique qu'en application de l'acte du 14 janvier 2011, il ne doit être fait aucun compte au titre des prêts et que le jugement, sur ce point, doit être confirmé.

Elle ne développe aucun moyen de fait ni de droit s'agissant de l'apport personnel.

Appréciation de la cour

Il résulte de ce qui précède que l'acte du 14 janvier 2011 s'applique tant en ce qui concerne l'apport personnel que les emprunts relatifs à l'acquisition du terrain et à la construction de la maison.

Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a :

- débouté M. [F] de sa demande de fixation à l'encontre de Mme [O] d'une créance de 11.433,52 euros au titre du règlement du prêt contracté auprès du crédit foncier de France,

- dit qu'aucun compte n'est à faire entre M. [F] et Mme [O] relativement au remboursement des prêts ayant servi à l'acquisition du terrain et de la maison leur appartenant.

Il y sera ajouté que les demandes de M. [F] de fixation de ses créances à hauteur de 28 106,98 euros au titre de son apport personnel lors de l'acquisition du terrain, à hauteur de 11 433,52 euros au titre du règlement du prêt contracté auprès du crédit foncier de France pour financer le terrain, et à hauteur de 67 322 euros au titre des échéances de prêt destiné au financement des constructions, seront rejetées.

Sur les dépenses relatives aux travaux

S'agissant des dépenses relatives aux travaux, le jugement a :

- débouté M. [F] de sa demande de fixation d'une créance à l'encontre de Mme [O] au titre des factures d'un montant de 46.871,12 euros,

- dit que M. [F] dispose de créance au titre des factures pour travaux relatives aux années 2004, 2006, 2008 et 2011,

- débouté M. [F] de sa demande de créance au titre des factures libellées au nom de ses parents en 2009,

- dit que relativement aux factures de 1'année 2013, M. [F] devra justifier auprès du notaire que le spa financé par lui se trouve toujours dans le bien indivis et qu'il sera sursis sur sa demande de créance à ce titre,

- dit que le notaire au regard de ce qui précède aura pour mission d'établir la créance globale de M. [F] au titre des travaux.

Moyens des parties

M. [F] poursuit :

- la confirmation du jugement en ce qu'il a dit qu'il dispose de créance au titre des factures pour travaux relatives aux années 2004, 2006, 2008 et 2011,

- l'infirmation du jugement en ce qu'il :

l'a débouté de sa demande de créance au titre des factures libellées au nom de ses parents en 2009,

a dit que relativement aux factures de 1'année 2013, il devra justifier auprès du notaire que le spa financé par lui se trouve toujours dans le bien indivis et qu'il sera sursis sur sa demande de créance à ce titre,

a dit que le notaire au regard de ce qui précède aura pour mission d'établir sa créance globale au titre des travaux.

A hauteur d'appel, M. [F] demande à la cour de :

- fixer sa créance à l'égard de Mme [O] au titre des factures pour travaux à hauteur d'un montant nominal de 45 342,24 euros,

- dire que, sur ce montant, la somme de 29 025,04 euros devra être réévaluée en fonction de la valorisation actuelle de la maison, s'agissant de dépenses de construction.

S'agissant des factures payées par ses parents, M. [F] fait valoir que le fait qu'il ait bénéficié de dons de ses parents, via le paiement de ses factures, était sans incidence sur le calcul de ses créances, ces dons ayant été effectués à son unique bénéfice. Il souligne que le jugement a adopté ce raisonnement pour certaines factures de 2004, 2006 et 2008, mais pas pour certaines factures de 2009.

Sur l'année 2009, s'agissant du bon de commande et de la facture du 3 et 13 mars 2009 de la société Leroy Merlin d'un montant total de 3 057,76 euros émise au nom de sa mère Mme [C] [F], il demande à la cour de retenir sa créance à hauteur de la moitié de cette somme, soit 1528,88 euros, ainsi que l'a retenu le notaire.

S'agissant de l'acquisition du spa en 2013, il verse aux débats la facture du 30 mai 2013 libellé à son nom et le tableau d'amortissement du prêt Sofinco ayant servi à son financement à son nom ainsi que ses relevés de compte personnel. Il produit en outre des pièces visant à démontrer que le spa est toujours présent sur la terrasse du bien indivis.

Il critique le raisonnement de Mme [O] tendant à additionner les récapitulatifs de paiement avec le montant des factures prises individuellement de façon à augmenter fictivement le montant des sommes qu'elle estime devoir être déduites des créances de l'appelant.

S'agissant des factures sur lesquelles apparaît le nom de la société de M. [F], il explique qu'il s'agit simplement de l'adresse de livraison du matériel commandé.

M. [F] demande par conséquent la fixation de sa créance à hauteur de 45 342,24 euros, correspondant au montant retenu par le notaire au titre de ce qu'il a financé pour les travaux au-delà de sa quote-part indivise (46 871,12 euros) déduction faite de la moitié de la facture du 13 mars 2009 au nom de Mme [C] [F] (1528,88 euros).

Poursuivant l'infirmation du jugement en ce qu'il a dit que M. [F] dispose de créance au titre des factures pour travaux relatives aux années 2004, 2006, 2008 et 2011, Mme [O] demande à la cour de rejeter les demandes de l'appelant à ce titre.

Reprenant les factures litigieuses entre 2004 et 2013, elle considère que ne peuvent pas être retenues comme une créance de l'appelant :

les factures dont il n'apparaît pas dans les relevés bancaires de l'appelant le paiement de la somme correspondante,

les factures sur lesquelles est mentionné le nom et l'adresse de la société Hyper Meca de l'appelant sise [Adresse 7],

les factures comportant le nom et l'adresse des parents de M. [F] ([Adresse 6]), estimant que le matériel était destiné à la maison de ces derniers.

S'agissant du spa acquis en 2013, elle fait valoir que le nom et la signature de Mme [Y], ex-épouse de M. [F], ont été effacés sur le bon de commande du 1er mai 2013, et que cette dernière a attesté avoir vendu le spa en juin 2015 après son départ du domicile. Mme [O] prétend que Mme [Y] est revenue sur son attestation parce qu'elle aurait eu peur des conséquences de son acte, ayant également déposé plainte pour violences contre M. [F]. Selon elle, le procès-verbal d'huissier de justice et les estimations produits par l'appelant sont dépourvus de force probante car ils ne font pas état de la marque, du modèle, du numéro de série ni de l'année de fabrication du spa. Elle en déduit que l'appelant échoue à rapporter la preuve de la présence du spa dans le bien indivis.

Appréciation de la cour

L'article 815-2 du code civil dispose que tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d'urgence.

Il peut employer à cet effet les fonds de l'indivision détenus par lui et il est réputé en avoir la libre disposition à l'égard des tiers.

A défaut de fonds de l'indivision, il peut obliger ses coïndivisaires à faire avec lui les dépenses nécessaires.

Lorsque des biens indivis sont grevés d'un usufruit, ces pouvoirs sont opposables à l'usufruitier dans la mesure où celui-ci est tenu des réparations.

Les mesures nécessaires à la conservation de la chose indivise s'entendent des actes matériels ou juridiques ayant pour objet de soustraire le bien indivis à un péril imminent sans compromettre sérieusement le droit des indivisaires (Civ. 3e, 25 janv. 1983 ; Civ. 1re, 25 nov. 2003, n°01-10.639).

Selon l'article 815-13 du code civil, lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.

Inversement, l'indivisaire répond des dégradations et détériorations qui ont diminué la valeur des biens indivis par son fait ou par sa faute.

Des travaux d'entretien, qui ne constituent pas des dépenses d'amélioration ni de conservation, n'ouvrent pas droit à indemnité au titre de l'article 815-13 précité (Civ. 1re, 28 mars 2006, n°04-10.596 : cassation de l'arrêt qui exclut l'indemnisation d'un solde de dépenses correspondant à des travaux, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si ce solde correspondait à des dépenses nécessaires à la conservation de l'immeuble ; Civ. 1re, 24 sept. 2014, no 13-18.197).

L'article 815-13, alinéa 1, du code civil n'exclut pas les dépenses faites dans l'intérêt d'un seul des indivisaires, pourvu qu'elles aient amélioré l'ensemble indivis (1ère Civ., 18 déc. 1990 ; 1ère Civ., 29 nov. 1994, n°92-21.151 ; 1ère Civ., 6 déc. 2005, n°03-11.489 ; CE 11 juin 2007, n°277305). Les juges doivent alors rechercher si les travaux d'amélioration réalisés par un seul indivisaire n'ont pas entraîné une augmentation de la valeur de l'immeuble indivis (1ère Civ., 15 mai 2008, n°07-17.645).

En l'espèce, il résulte du projet d'état liquidatif du notaire, annexé au procès-verbal de difficulté, que le financement des travaux par M. [F] au-delà de sa quote-part indivise s'élève à 46 871,12 euros (pièce 43 de l'appelant). Il n'est pas contesté par Mme [O] que ces travaux s'analysent comme des dépenses d'amélioration.

Mme [O] conteste en revanche certaines factures soit parce qu'elles ont été prises en charge par les parents de M. [F], soit parce qu'elles mentionnent une adresse différente de sorte qu'il n'est pas démontré qu'elles ont concerné le bien indivis du couple.

En premier lieu, il est établi par les pièces qu'en 2003, M. [F] et Mme [O] ont acquis, chacun pour la moitié indivise (ainsi que le mentionne l'acte de vente), un terrain sis [Adresse 4] et y ont fait construire une maison. En 2004, ils résidaient encore à leur ancienne adresse sise [Adresse 17]. Il n'est donc pas étonnant et encore moins dirimant que l'adresse de [Adresse 17] figure sur les factures de 2004.

En second lieu, ainsi que le fait valoir à juste titre l'appelant, les dépenses de conservation ou d'amélioration du bien indivis qui ont été financés par ses parents doivent être considérées comme des donations faites à leur fils, de sorte que ce dernier peut en demander le remboursement à Mme [O], pourvu que les dépenses aient été affectées au bien indivis.

Il est établi par les attestations de M. et Mme [I] [F] (parents de l'appelant), suffisamment précises et circonstanciées, qu'ils ont largement contribué aux dépenses d'amélioration du bien (pièces 86 et 87 de l'appelant).

Il résulte de l'examen des factures critiquées par Mme [O] les éléments suivants (pièces 6 à 11 de l'appelant) :

les factures de la société Point P de 2006 pour des montants de 4573,57 euros, 667,40 euros et 3906,10 euros ont été payées par M. et Mme [I] [F] (la copie du chèque de 4573,57 euros figure d'ailleurs au dossier) mais sont libellées au nom de M. [F], [Adresse 4]. Ayant été affectées à l'amélioration du bien indivis, il doit être tenu compte de ces dépenses au profit de M. [F].

S'agissant des factures de la société Waterair des 6 juin et 24 juillet 2006 pour des montants de 100,38 euros et 1236,99 euros, il s'agit de deux commandes de matériel de piscine pesant chacune 1,7 kg et 74 kg. La « société Hyper Meca, M. [F], [Adresse 8] », correspondant à la société de M. [F], n'est mentionnée que comme une adresse de livraison. Toutefois, ces factures sont libellées au nom de « M. [F] et Mme [O], [Adresse 3] » de sorte qu'elles ont été affectées à l'amélioration du bien indivis. Il doit donc en être tenu compte au profit de M. [F].

De même, la facture de la société Piscine Center de 2008 pour un montant total de 5103,30 euros, correspondant à la fourniture d'une pompe à chaleur de piscine, bien que mentionnant une adresse de livraison au siège de la société de M. [F], est libellée au nom de M. [F] à [Localité 14]. Cette dépense ayant été affectée à l'amélioration du bien indivis, il doit en être tenu compte au profit de M. [F].

Les factures de la société Godard Environnement du 8 septembre 2008 et du 11 septembre 2008 d'un montant, de 5250 euros et de 23 470 euros (dont 14 000,01 euros réglés par chèque) ont été payées par les parents de M. [F]. Elles concernent la réfection et le terrassement de l'entrée principale de la maison. Ces factures sont libellées au nom de « M. [F] [Adresse 4] ». Elles correspondent par conséquent à une dépense d'amélioration du bien indivis, dont il doit être tenu compte au profit de M. [F].

La facture du 12 mars 2009 de la société Piscine Center pour un montant de 5000,72 euros a été payée par chèque par M. et Mme [I] [F] (la copie du chèque est au dossier). Elle est libellée au nom de « M. [J] [F], [Adresse 2] », l'adresse de la société Hyper Meca n'étant qu'une adresse de livraison. Elle correspond par conséquent à une dépense d'amélioration du bien indivis, dont il doit être tenu compte au profit de M. [F].

Les factures de la société Waterair des 6 juin et 24 juillet 2006 pour des montants de 100,38 euros et 1236,99 euros et les six factures de cette société du 20 octobre 2011 (correspondant à des livraisons de matériel en 2008, 2009 et 2010) mentionnent comme adresse de livraison la société Hyper Meca et, à une reprise, un relais colis. Elles sont toutefois explicitement libellées au nom de « M. [F] et Mme [O], [Adresse 4] ». Dès lors, ayant concernées le bien indivis, il en sera tenu compte au profit de M. [F].

En revanche, il résulte des mentions des factures suivantes - payées par les parents de M. [F], libellées au nom de « M. [F] », « [F] » ou « [F] [C] » à l'adresse des parents de l'appelant ([Adresse 5]) - qu'elles n'ont pas concernés le bien indivis, de sorte que leur montant sera retiré des comptes dus à l'appelant :

la facture de la société Giagnoni Travaux du 16 juillet 2008 d'un montant de 874,93 euros (notamment pour la livraison d'un sac de 25kg d'enduit),

le bon de commande et la facture Leroy Merlin des 3 et 13 mars 2009 pour un montant total de 3057,76 euros.

S'agissant du spa, il n'est pas contesté que son installation en 2013 a contribué à améliorer le bien indivis. Il résulte de l'examen de la facture du 30 mai 2013 libellé au nom de M. [J] [F] à [Localité 14] d'un montant total de 14 388 euros (dont 88 euros ont été réglés par chèque et 14 300 euros par virement) et des relevés de comptes personnels de l'appelant que le spa a été financé d'août à novembre 2013 sur les deniers personnels de M. [F] (pièces 10 et 79 de l'appelant), peu important que le nom de Mme [Y], ex-femme de M. [F], soit mentionné sur la fiche d'intervention du technicien.

Les estimations du bien immobilier en 2020 et le constat d'huissier de justice produit par l'appelant suffisent à établir que le spa n'a pas été modifié et qu'il se trouve toujours dans le bien indivis (pièces 10, 96, 100 et 102).

Dès lors, la participation de Mme [O] aux dépenses d'amélioration du bien indivis correspond à 46 871,12 euros - 874,93 euros - 3057,76 euros = 42 938,43 euros.

Par conséquent, le jugement sera confirmé en ce qu'il a :

- dit que M. [F] dispose de créance au titre des factures pour travaux relatives aux années 2004, 2006, 2008 et 2011,

Il sera infirmé en ce qu'il a :

- débouté M. [F] de sa demande de fixation d'une créance à l'encontre de Mme [O] au titre des factures d'un montant de 46.871,12 euros,

- débouté M. [F] de sa demande de créance au titre des factures libellées au nom de ses parents en 2009,

- dit que le notaire au regard de ce qui précède aura pour mission d'établir la créance globale de M. [F] au titre des travaux,

- dit que relativement aux factures de 1'année 2013, M. [F] devra justifier auprès du notaire que le spa financé par lui se trouve toujours dans le bien indivis et qu'il sera sursis sur sa demande de créance à ce titre.

Mme [O] sera condamnée à verser à M. [F] la somme de 42 938,43 euros.

Sur la demande de fixation de la valeur du bien indivis

Moyens des parties

M. [F] considère être bien-fondé à solliciter l'infirmation du jugement et la fixation de la valeur des biens et droits immobiliers sis à [Adresse 4] à hauteur de 530 000 euros, au regard de deux estimations de l'agence d'Asta Immobilier du 8 septembre 2020 et de l'agence Century 21 du 27 novembre 2020.

En réplique, Mme [O] considère qu'au regard de la progression moyenne de 10 % du prix de l'immobilier dans cette région, il apparaît raisonnable d'évaluer le bien indivis à la somme de 640 000 euros.

Appréciation de la cour

Le notaire n'étant pas parvenu à un accord entre les parties sur ce point, il convient, ainsi que l'a fait le premier juge, de statuer sur la valeur du bien indivis, laquelle doit être fixée à la date la plus proche du partage.

Les estimations de l'agence d'Asta Immobilier du 8 septembre 2020 (520 000 euros net vendeur) et de l'agence Century 21 du 27 novembre 2020 (570 000 euros) produites par l'appelant sont précises et circonstanciées. Elles ont donné lieu à une visite sur place (pièces 96 et 100).

Mme [O] n'apporte quant à elle aucun élément de nature à démontrer ce qu'elle allègue.

Par conséquent, le jugement sera infirmé sur ce point et il sera fait droit à la demande de M. [F] de fixer la valeur du bien indivis à 530 000 euros.

Sur l'indemnité d'occupation

Le jugement du 7 août 2020 a :

- dit que M. [F] est redevable d'une indemnité d'occupation, et ce depuis le 16 juillet 2013 et jusqu'à la libération effective des lieux,

- dit que la valeur locative du bien est fixée à la somme de 1750 euros,

- dit que ladite valeur sera affectée d'un abattement de 20 %,

- dit qu'il reviendra au notaire au vu de ces éléments de calculer l'indemnité d'occupation due par M. [F].

Il résulte de ce qui précède (cf. la partie relative aux limites de l'appel) que ces trois derniers chefs de dispositif, dont seule la confirmation est demandée, seront confirmés.

Moyens des parties

Poursuivant l'infirmation du jugement en ce qu'il a dit qu'il était redevable d'une indemnité d'occupation depuis le 16 juillet 2013 jusqu'à la libération effective des lieux, M. [F] demande à la cour, au fondement de l'article 815-9 du code civil, de dire qu'il est redevable d'une indemnité d'occupation uniquement à compter du 20 décembre 2018, date de l'ordonnance en la forme des référés du président du tribunal judiciaire de Versailles lui attribuant la jouissance du bien. A titre subsidiaire, si la cour devait confirmer le jugement en appliquant l'acte du 14 janvier 2011, M. [F] demande à la cour de considérer que cet engagement s'applique également à l'indemnité d'occupation de sorte qu'il n'est redevable d'aucune indemnité d'occupation.

Il fait valoir que le jugement du tribunal correctionnel précède de huit mois le départ de Mme [O] du domicile. Il conteste le fait que des violences auraient motivé son départ.

Par ailleurs, il soutient que jusqu'au 20 décembre 2018, elle ne démontre pas avoir été privée de la jouissance du bien, n'ayant jamais été empêchée d'y accéder et n'ayant jamais remis ses clefs. Il ajoute qu'elle n'a jamais évoqué cette difficulté devant le notaire lors de l'établissement du procès-verbal de difficulté. Selon lui, si elle a postérieurement émis le souhait de récupérer ses clefs, il explique ignorer les raisons de cette perte et soutient ne pas en être responsable. Il souligne l'agressivité de M. [P], mandataire de Mme [O], qui a cherché à obtenir le versement de sommes l'ayant contraint à déposer plainte le 14 septembre 2018 pour menaces et chantage et à saisir le président du tribunal judiciaire de Versailles pour obtenir la jouissance exclusive du bien.

Mme [O] demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a mis à la charge de M. [F] une indemnité d'occupation à compter du 16 juillet 2013 et jusqu'à libération effective des lieux, en tenant compte d'une valeur locative de 1750 euros mensuelle et d'un abattement de précarité de 20% à appliquer sur cette somme.

Elle soutient n'avoir pas eu d'autre choix « depuis 2011 » que de quitter le domicile conjugal en raison du comportement violent de l'appelant « dès 2010 », et exclusivement pour cette raison. Elle précise que « depuis [son] départ forcé et contraint du logement indivis, M. [F] est devenu l'unique détenteur des clés donnant accès audit logement, caractérisant ainsi, son occupation privative et exclusive », tout en indiquant que « l'impossibilité pour [elle] d'user du logement résidait moins dans la détention des clés que dans le comportement violent de M. [F] ».

Appréciation de la cour

Selon l'article 815-9 du code civil, chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision. A défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.

L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.

Le droit d'usage et de jouissance est reconnu à chaque indivisaire, sans que celui-ci ait besoin du consentement des autres indivisaires (voir, notamment, l'arrêt du 7 avril 1875 - DP 1875, 1, p. 381 ; S. 1875, 1, p. 299 ; 1re Civ., 25 novembre 2009, pourvoi n 08-15.090).

Un indivisaire ne peut toutefois user de la chose commune qu'à condition de ne pas porter atteinte aux droits égaux et réciproques des autres.

Pour que l'occupation d'un bien indivis par un indivisaire porte atteinte aux droits des autres indivisaires et puisse donner lieu au paiement d'une indemnité d'occupation, il faut en particulier que cette occupation diminue ou entrave, de quelque manière que ce soit, l'usage du bien indivis par les autres indivisaires.

Il revient à celui qui prétend être privé de la jouissance du bien indivis de démontrer l'impossibilité ou l'entrave, de fait ou de droit, qu'il subit l'empêchant de jouir du bien (1ère Civ., 13 janvier 1998, pourvoi n° 95-12.471, Bull. 1998, I, n° 12 ; 1ère Civ., 5 novembre 2014, pourvoi n° 13-11.304, Bull. 2014, I, n° 184).

La détention des clés de la porte d'entrée d'un immeuble, en ce qu'elle permet à leurs détenteurs d'avoir seuls la libre disposition du bien indivis, est constitutive d'une jouissance privative et exclusive (1ère Civ., 31 mars 2016, pourvoi n° 15-10.748, Bull. 2016, I, n° 71). De même, la circonstance que l'un des titulaires d'un droit de jouissance indivise occupe seul l'immeuble ne caractérise pas, en soi, une occupation privative, dès lors qu'il n'est pas établi que, par son fait, il empêcherait un autre titulaire d'exercer son droit concurrent de jouir de l'immeuble. C'est ainsi que l'impossibilité pour une partie d'occuper l'immeuble en raison de la dégradation de son état de santé l'empêchant de quitter la maison de retraite ne caractérise pas l'existence d'une occupation privative de cet immeuble par l'autre partie (1ère Civ., 3 octobre 2018, pourvoi n° 17-26.020, publié au bulletin).

En l'espèce, Mme [O] indique avoir quitté le domicile conjugal en 2011 en raison des violences répétées qu'elle reproche à l'appelant. Elle ne conteste pas les écritures de l'appelant qui situe son départ en juin 2011.

Les faits de violences ayant donné lieu à une comparution de M. [F] devant le tribunal correctionnel de Versailles le 15 octobre 2010 ont été commis le 14 décembre 2009 et ont été qualifiés de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à 8 jours, en l'espèce 5 jours (pièce 1 de Mme [O]). M. [F] a été déclaré coupable et condamné à une dispense de peine et à verser à Mme [O] un euro de dommages et intérêts. Ces faits de décembre 2009 sont donc antérieurs de 18 mois au départ définitif de Mme [O] du domicile conjugal en juin 2011.

Toutefois, force est de constater qu'ils se situent dans un contexte de conflit intense entre M. [F] et Mme [O], ponctué par plusieurs déclarations de main courante de cette dernière, qui permettent de caractériser des violences psychologiques, constituées d'insultes et de bousculades, ayant rendu impossible le maintien de Mme [O] au domicile à compter du mois de juin 2011.

Ainsi, Mme [O] produit une main courante du 29 mai 2009 au commissariat de [Localité 13] dans laquelle elle indique être insultée et bousculée par son mari, mais refuse de quitter le domicile conjugal tant qu'elle n'a pas trouvé d'appartement (pièce 2 intimée).

Le 3 mars 2010, Mme [O] a de nouveau déposé une main courante indiquant avoir été bousculée et menacée de mort et précisant qu'elle quitte le domicile conjugale (pièce 2 intimée).

Finalement, Mme [O] déposera plainte, après avoir quitté le domicile conjugal, le 3 décembre 2011 auprès de la brigade de gendarmerie de [Localité 14], en indiquant « j'ai quitté cet homme parce qu'il me violentait » et en dénonçant des insultes et menaces prononcées alors qu'elle se trouvait au portail de la maison (pièce 2 Mme [O]).

Il résulte de ces éléments que le maintien de Mme [O] au domicile a été rendu impossible en raison de cette situation de conflit intense.

Dès lors, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que M. [F] est redevable d'une indemnité d'occupation depuis le 16 juillet 2013 et jusqu'à libération effective des lieux, en tenant compte de la valeur locative de 1750 euros par mois à laquelle il sera appliqué un coefficient de précarité de 20%.

Le jugement a confié le calcul de l'indemnité d'occupation au notaire et ce point est irrévocable (seule sa confirmation est demandée par Mme [O]).

Sur les créances au titre de l'assurance habitation, de la taxe foncière et de la taxe d'habitation

Moyens des parties

M. [F] demande à la cour, au fondement de l'article 815-13 du code civil, de :

- dire que le notaire devra actualiser la créance de M. [F] au titre des taxes foncières et de l'assurance habitation, en tenant compte des sommes réglées par lui jusqu'à la date la plus proche du partage,

- dire que M. [F] dispose d'une créance à l'encontre de Mme [O], au titre des taxes d'habitation, pour les sommes réglées par lui à compter de la taxe due au titre de l'année 2012 et ce jusqu'à la date la plus proche du partage.

Estimant que le paiement de la taxe d'habitation est une dépense de conservation du bien, M. [F] en sollicite le remboursement par Mme [O].

Mme [O] réplique qu'ayant bénéficié de la jouissance exclusive du bien durant toutes ces années, il ne serait pas équitable de mettre à sa charge le règlement d'une partie de ces sommes. Elle ajoute avoir été saisie par le comptable public d'une somme de 2391 euros au titre de la taxe foncière pour 2018. Elle demande par conséquent à la cour de rejeter les demandes de l'appelant et de dire que le notaire devra tenir compte de ce prélèvement de 2391 euros à son bénéfice.

Appréciation de la cour

L'article 815-13 du code civil dispose que lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.

Inversement, l'indivisaire répond des dégradations et détériorations qui ont diminué la valeur des biens indivis par son fait ou par sa faute.

L'assurance habitation, qui tend à la conservation de l'immeuble, incombe à l'indivision, en dépit de l'occupation privative (Civ. 1re, 20 janv. 2004, n°01-17.124 P ; Civ. 1ère, 5 mars 2008: AJ fam. 2008. 215, obs. Hilt). Les sommes payées au titre de l'assurance habitation, qui participent à la conservation de l'immeuble, doivent être imputées au passif de l'indivision, après déduction de la fraction correspondant aux garanties couvrant les dommages subis personnellement par le titulaire du contrat et sa responsabilité civile (Civ. 1re, 20 oct. 2021, n°20-11.921).

Les impôts locaux et les charges de copropriété qui ne sont pas relatives à l'occupation privative et personnelle d'un indivisaire doivent figurer au passif du compte de l'indivision et seront supportés par les coïndivisaires proportionnellement à leurs droits dans l'indivision (Civ. 1re, 16 avr. 2008, JCP 2008. I. 194, no 7, obs. Périnet-Marquet; JCP N 2008. 1328, no 7, obs. Périnet-Marquet). L'impôt foncier, qui tend à la conservation de l'immeuble indivis incombe à l'indivision jusqu'au jour du partage en dépit de l'occupation privative (Civ. 1re, 13 janv. 2016, no 14-24.767 P: D. 2016. 1779, obs. Neyret et Reboul-Maupin; AJDI 2016. 219; AJ fam. 2016. 163, obs. Casey). L'impôt foncier incombe à l'indivision; reconnaissance d'une créance sur l'indivision post-communautaire en faveur d'un ex-époux au titre du paiement de taxes foncières (Civ. 1re, 27 janv. 2016, no 15-11.151 P: AJ fam. 2016. 207, obs. Thouret; RTD civ. 2016. 327, obs. Hauser).

La taxe d'habitation, dont le règlement a permis la conservation de l'immeuble, incombe à l'indivision et doit être supportée par les coïndivisaires proportionnellement à leurs droits dans l'indivision ; la jouissance privative dont l'immeuble a fait l'objet reste sans incidence à cet égard, le préjudice résultant de l'occupation privative étant compensé par l'indemnité prévue à l'article 815-9 du code civil (Civ. 1re, 5 déc. 2018, n°17-31.189).

En l'espèce, les pièces versées aux débats par M. [F] ne concernent ni l'assurance habitation ni la taxe d'habitation, de sorte que sa demande concernant ces chefs de dépenses sera rejetée.

Il démontre en revanche avoir personnellement réglé la taxe foncière du bien indivis entre 2005 et 2016 (pièces 12, 12-1 et 12-2 et pièce 30 de l'appelant).

Mme [O] établit quant à elle avoir fait l'objet d'un avis de saisie sur son compte bancaire à [Localité 11] concernant la taxe foncière de 2018 à hauteur de 2391 euros (pièce 15 de l'intimée).

Il résulte des pièces que M. [F] a payé un montant de taxes foncières bien supérieur à sa quote-part indivise et à la saisie invoquée par Mme [O], de sorte qu'il sera fait droit à sa demande.

Dès lors, la cour dira que le notaire devra actualiser la créance de M. [F] au titre des taxes foncières, en tenant compte des sommes réglées par lui jusqu'à la date la plus proche du partage.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement qui a exactement statué sur les frais irrépétibles sera confirmé.

Partie perdante, M. [F] sera condamné aux dépens d'appel.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, par arrêt contradictoire et mis à disposition,

Dans les limites de l'appel,

INFIRME le jugement en ce qu'il a :

- Débouté M. [F] de sa demande de fixation d'une créance à l'encontre de Mme [O] au titre des factures d'un montant de 46 871,12 euros,

- Débouté M. [F] de sa demande de fixation de la valeur du bien à la somme de 480 000 euros,

- Débouté M. [F] de sa demande de créance au titre des factures libellées au nom de ses parents en 2009,

- Dit que relativement aux factures de 1'année 2013, M. [F] devra justifier auprès du notaire que le spa financé par lui se trouve toujours dans le bien indivis et qu'il sera sursis sur sa demande de créance à ce titre,

- Dit que le notaire au regard de ce qui précède aura pour mission d'établir la créance globale de M. [F] au titre des travaux,

Le CONFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

REJETTE les demandes de M. [F] de fixation de ses créances à hauteur de 28 106,98 euros au titre de son apport personnel lors de l'acquisition du terrain, à hauteur de 11 433,52 euros au titre du règlement du prêt contracté auprès du crédit foncier de France pour financer le terrain, et à hauteur de 67 322 euros au titre des échéances de prêt destiné au financement des constructions ;

CONDAMNE Mme [O] à verser à M. [F] la somme de 42 938,43 euros ;

FIXE la valeur du bien indivis sis [Adresse 4] à 530 000 euros ;

DIT que le notaire devra actualiser la créance de M. [F] au titre des taxes foncières, en tenant compte des sommes réglées par lui jusqu'à la date la plus proche du partage ;

CONDAMNE M. [F] aux dépens d'appel ;

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toutes autres demandes.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 20/04303
Date de la décision : 16/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-16;20.04303 ?
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