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09/03/2023 | FRANCE | N°21/07348

France | France, Cour d'appel de Versailles, 2e chambre 1re section, 09 mars 2023, 21/07348


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 22G



2e chambre 1re section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 09 MARS 2023



N° RG 21/07348 -

N° Portalis DBV3-V-B7F- U4HK



AFFAIRE :



[X] [R]

C/

[T] [I]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 21 Octobre 2021 par le Juge aux affaires familiales de NANTERRE

N° Chambre :

N° Cabinet :

N° RG : 19/05211



Expédit

ions exécutoires

Expéditions

délivrées le : 09.03.2023



à :

Me Stéphanie FOULON BELLONY,



Me Juliette LEPAPE,



TJ NANTERRE













RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE NEUF MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 22G

2e chambre 1re section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 09 MARS 2023

N° RG 21/07348 -

N° Portalis DBV3-V-B7F- U4HK

AFFAIRE :

[X] [R]

C/

[T] [I]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 21 Octobre 2021 par le Juge aux affaires familiales de NANTERRE

N° Chambre :

N° Cabinet :

N° RG : 19/05211

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le : 09.03.2023

à :

Me Stéphanie FOULON BELLONY,

Me Juliette LEPAPE,

TJ NANTERRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [X] [R]

né le 28 Mai 1985 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Stéphanie FOULON BELLONY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 673

Me Amélie ROGERET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0648

APPELANT

****************

Madame [T] [I]

née le 25 Mars 1983 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 5]

Présente

Représentant : Me Raluca LOLEV de l'AARPI AARPI Arpège, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0656, substitué par Me PORCHY, avocat au barreau de PARIS

Me Juliette LEPAPE, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire: 22

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Janvier 2023 en chambre du conseil, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Julie MOUTY TARDIEU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Dominique SALVARY, Président,

Madame Julie MOUTY TARDIEU, Conseiller,

Madame Sophie MATHE, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Elisa PRAT,

FAITS ET PROCEDURE

Le 21 juin 2016 Mme [T] [I] et M. [X] [R], concubins, ont acquis en indivision, à hauteur de 48% pour lui et 52% pour elle, un appartement et un emplacement de stationnement situés à [Localité 5] (93). Le prix total de 155 800 euros a été payé au moyen d'un apport de 6 000 euros de Mme [I] et d'un prêt de 149 800 euros souscrit auprès de la Société Générale par les concubins.

Après une séparation intervenue en décembre 2016, les indivisaires ne sont pas parvenus au partage amiable des biens précités.

Par un acte du 25 avril 2019, Mme [I] a fait assigner M. [R] devant le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Nanterre aux fins de partage judiciaire de l'indivision existant entre eux.

Par un jugement du 21 octobre 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Nanterre a notamment :

- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision existant entre M. [R] et Mme [I], portant sur un appartement dans un ensemble immobilier situé [Adresse 2] (93), et un emplacement de stationnement dans un ensemble immobilier situé [Adresse 1],

- désigné, pour y procéder, Maître [K] [V], notaire, lequel pourra notamment consulter le FICOBA et réclamer tout document bancaire, et requérir de toutes administrations et de toutes personnes privées qu'elles lui communiquent toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,

- commis tout juge de la 3ème section du pôle famille du tribunal judiciaire de Nanterre pour surveiller les opérations et faire rapport en cas de difficulté,

- dit que l'actif indivis comprendra notamment cet appartement et cette place de stationnement évalués ensemble à la somme de 150 000 euros ainsi que le solde du compte joint Société Générale, qui était créditeur de 1,14 euros au 11 février 2020,

- rejeté la demande de Mme [I] d'expertise de ces deux biens,

- dit que le passif indivis comprendra notamment le solde du prêt immobilier restant dû à la Société Générale au moment du partage,

- dit que Mme [I] détiendra une créance sur l'indivision au titre des frais suivants avancés par elle pour son compte :

* les taxes foncières des années 2017 à 2020 incluse : 4 427 euros,

* la taxe d'habitation des années 2017 à 2019 incluse : 1 395 euros,

* les charges de copropriété du 1er janvier 2017 au 30 septembre 2018 : 1 032,90 euros,

- rejeté la demande de Mme [I] de voir inscrire à l'actif de son compte d'indivision la somme de 1 099,03 euros au titre de l'assurance habitation, compte arrêté au mois de juillet 2020,

- dit que devront être inscrites à l'actif du compte d'indivision de Mme [I] les dépenses de conservation suivantes, qui seront valorisées par le notaire désigné :

* facture de la société DJS au sujet de la pose d'un chauffe-eau, d'un régulateur de débit et d'un anti-tartre magnétique du 15 octobre 2018 au nom de l'intéressée, pour un montant charges comprises de 459 euros,

* commande à la société Europebath d'une paroi de douche (courriel de reçu de commande du 30 janvier 2017), pour un montant charges comprises de 2 406,60 euros,

* deux factures Lapeyre du 23 septembre 2019 de 390,83 euros charges comprises et du 14 octobre 2016 de 1 404,06 euros charges comprises au nom de l'intéressée,

- rejeté le surplus de la demande de créance de Mme [I] au titre de travaux réalisés dans l'appartement indivis,

- dit qu'il sera porté à l'actif du compte d'indivision de Mme [I] la somme de 33 509,04 euros au titre du paiement par elle des mensualités de remboursement du prêt immobilier de janvier 2017 à juillet 2020 et la somme de 644,14 euros au titre du paiement par elle de l'assurance du prêt de janvier 2017 à juillet 2020,

- dit que Mme [I] sera redevable envers l'indivision d'une indemnité mensuelle d'occupation du bien indivis de 660 euros depuis le mois de janvier 2017, ce jusqu'au partage,

- rejeté la demande de Mme [I] de voir fixer le montant du compte d'indivision de M. [R] à la somme de 1 240 euros,

- dit que Mme [I] aura une créance de 90 000 euros contre M. [R] au titre de la reconnaissance de dette qu'il a signée le 20 décembre 2016,

- rejeté la demande d'anatocisme formulée par Mme [I],

- rejeté la proposition chiffrée de M. [R] de liquidation de l'indivision,

- rejeté la demande de M. [R] de vente par licitation de l'appartement et de la place de stationnement indivis,

- rejeté les demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes autres demandes des parties,

- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage, qui seront supportés par les parties à proportion de leurs droits dans l'indivision,

- ordonné l'exécution provisoire,

- renvoyé l'affaire à l'audience du juge commis du 16 décembre 2021 à 9h30 pour retrait du rôle jusqu'à l'établissement de l'acte de partage ou du procès-verbal des dires.

Par une déclaration du 10 décembre 2021, M. [R] a fait appel de cette décision en ce qu'elle a dit que Mme [I] aura une créance de 90 000 euros contre lui au titre de la reconnaissance de dette qu'il a signée le 20 décembre 2016.

Dans ses dernières conclusions du 12 juillet 2022, M. [R] demande à la cour de :

- INFIRMER le jugement prononcé le 21 octobre 2021 par le Juge aux affaires familiales près le Tribunal Judiciaire de Nanterre en ce qu'il a DIT que Madame [T] [I] a une créance de 90.000 euros contre Monsieur [X] [R] au titre de la reconnaissance de dette qu'il a signée le 20 décembre 2016,

Statuant à nouveau,

- CONSTATER que la reconnaissance de dette signée le 20 décembre 2016 par Monsieur [R] est sans cause,

En conséquence,

- PRONONCER la nullité de la reconnaissance de dette signée le 20 décembre 2016 par Monsieur [R],

Dans tous les cas,

- CONSTATER l'erreur matérielle du jugement en ce qu'il a omis de reprendre dans le dispositif une disposition pourtant motivée dans le corps de la décision disant que la somme de 8.146,55 euros sera portée à l'actif du compte d'indivision de Monsieur [X] [R],

- FIXER la créance que Monsieur [R] détient contre l'indivision à 8 146, 55 €,

- CONFIRMER le jugement prononcé le 21 octobre 2021 par le Juge aux affaires familiales près le Tribunal Judiciaire de Nanterre en toutes ses autres dispositions,

- DEBOUTER l'intimée de toute demande contraire,

- CONDAMNER l'intimée à verser à Monsieur [R] la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'appel.'

Dans ses dernières conclusions du 4 novembre 2022, Mme [I] demande à la cour de :

- INFIRMER le jugement rendu le 21 octobre 2021 par le Tribunal judiciaire de NANTERRE en ce qu'il a :

* Rejeté la demande de Madame [T] [I] de voir inscrire à l'actif de son compte d'indivision la somme de 1.099,03 € au titre de l'assurance habitation, compte arrêté au mois de juillet 2020,

* Rejeté le surplus de la demande de créance de Madame [T] [I] au titre de travaux réalisés dans l'appartement indivis,

* Rejeté la demande de Madame [T] [I] de voir fixer le montant du compte d'indivision de Monsieur [X] [R] à la somme de 1.240 €,

* Rejeté la demande d'anatocisme formulée par Madame [T] [I],

Ainsi, statuant à nouveau :

- FIXER le montant du compte d'administration Madame [T] [I], arrêté à juillet 2022 au titre du règlement de l'assurance habitation du bien indivis à la somme de 1.546,93 €,

- FIXER le montant de son compte d'administration arrêté à juillet 2020 au titre au titre des dépenses de travaux réalisés dans le bien indivis par elle à la somme de 5.743,99 €,

- FIXER le montant du compte d'administration de Monsieur [X] [R] à la seule somme de 1.240 € et DECLARER que ce montant sera porté au passif de la masse à partager,

- DECLARER que la somme de 90.000 € due par Monsieur [X] [R] au titre de sa reconnaissance de dette portera intérêts au taux légal rétroactivement à la date du 21 octobre 2021, avec capitalisation,

- CONFIRMER le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions,

- DEBOUTER Monsieur [X] [R] de l'intégralité de ses demandes,

- CONDAMNER Monsieur [X] [R] à verser à Madame [T] [I] la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 6 décembre 2022.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée, ainsi qu'aux écritures déposées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les créances revendiquées par Mme [I]

L'assurance habitation

Le juge aux affaires familiales a rejeté la demande de Mme [I] en retenant qu'elle ne justifiait pas avoir employé des fonds personnels pour payer cette dépense d'assurance.

En appel, Mme [I] répond que les cotisations d'assurance ont été prélevées sur un compte joint uniquement alimenté par ses fonds.

M.[R] répond qu'il n'est toujours pas démontré que Mme [I] a employé des fonds personnels pour payer l'assurance de l'immeuble indivis.

L'article 815-13, alinéa 1er, du code civil dispose':

Lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.

Aucune partie ne conteste la jurisprudence constante selon laquelle le paiement des cotisations d'assurance d'un bien indivis constitue une dépense de conservation qui demeure à la charge de l'indivision (Civ. 1re, 11 septembre 2013, pourvoi n°12-14.996 ; 29 mai 2013, pourvoi n°12-11.983 ; 16 mars 2016, pourvoi n°15-15.704).

Il incombe à Mme [I] d'établir qu'elle a employé des fonds personnels pour payer cette dépense, comme l'exige le texte précité.

Pour la période allant de juin 2016 à juin 2017, Mme [I] produit un appel de cotisations de l'assureur GMF (habitation, 188,11 euros) qui n'est accompagné d'aucun relevé bancaire contemporain. Il en est de même pour les appels de cotisations suivants':

- période du 21 juin 2018 au 20 juin 2019': 266,56 euros prélevé le 5 juillet 2018,

- période du 21 juin 2019 au 20 juin 2020': 274,45 euros à payer avant le 20 juin 2020,

- période du 21 juin 2020 au 20 juin 2021': 321,29 euros.

Le relevé du compte joint des concubins ne permet pas d'établir un paiement par Mme [I] seule puisque ce compte a été alimenté par des versements des deux indivisaires et par le salaire de M. [R].

Seule la cotisation d'assurance du 4 février 2022 (250,70 euros) a bien été prélevée sur le compte bancaire de Mme [I] le même jour. Cette créance sur l'indivision est donc retenue et le jugement sera infirmé sur ce point.

Les travaux

Le tribunal a retenu une partie de la créance revendiquée par Mme [I] sur l'indivision au titre des travaux effectués sur l'immeuble indivis (chauffe-eau 459 euros, paroi de douche 2406,60 euros, factures Lapeyre 390,83 et 1404,06 euros).

En appel, Mme [I] conteste cette décision et sollicite la reconnaissance d'une créance complémentaire sur l'indivision au titre d'autres travaux d'amélioration.

M. [R] répond que la prétention n'est pas justifiée faute de documents au nom de Mme [I].

Mme [I] produit un devis qui lui a été adressé le 17 février 2017, relatif à l'installation d'une barrière de parking. Ce devis n'est pas accepté, il n'est pas accompagné d'une facture ni d'un justificatif de paiement par les fonds de Mme [I].

Mme [I] produit une liste «'d'articles libre service Ikea'» qui ne porte pas son nom. Ce document n'est accompagné d'aucun élément financier démontrant l'emploi des fonds personnels de l'indivisaire.

Mme [I] produit des tickets de caisse Leroy Merlin et Castorama qui ne portent pas son nom. Ils ne sont accompagnés d'aucun élément financier démontrant l'emploi des fonds personnels de l'indivisaire.

Ainsi, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté ces créances non justifiées.

Sur la créance revendiquée par M. [R]

Le tribunal a reconnu dans les motifs du jugement une créance de M. [R] sur l'indivision à hauteur de 8 146,55 euros mais n'a pas repris cette décision au dispositif de la décision. Le dispositif ne contient que le rejet de la demande de Mme [I] tendant à la fixation de cette créance à la somme de 1 240 euros.

En appel, M. [R] demande la correction de l'erreur matérielle affectant le jugement et l'inscription au dispositif de sa créance sur l'indivision.

Mme [I] répond que cette créance doit être limitée à la somme de 1 240 euros.

Il appartient donc à la cour d'examiner à nouveau la créance revendiquée par M. [R].

A l'appui de sa prétention, M. [R] produit les relevés bancaires du compte joint des concubins entre avril 2016 et le 10 mai 2017. Il sollicite la restitution de toutes les sommes qu'il a versées sur ce compte, sous déduction de ses retraits, pendant la période de concubinage et après la séparation du couple.

Mme [I] répond qu'il existait un accord entre les concubins selon lequel ce compte bancaire était utilisé pour financer les charges de la vie courante du couple. Elle en déduit que M. [R] ne peut revendiquer que les sommes déposées sur ce compte après leur séparation intervenue en décembre 2016.

Le tribunal a fondé son analyse sur un tableau récapitulatif de M. [R] qui n'est pas produit devant la cour d'appel. Ainsi, l'ancien concubin sollicite la confirmation du jugement sans produire le document utilisé par la juridiction de première instance.

Il résulte de l'analyse par la cour du seul relevé du compte bancaire joint entre les concubins (11 juin 2016 au 10 mai 2017) que ce compte a été alimenté par des virements de M. [R], son salaire de l'APHP (juillet à novembre 2016), des virements de Mme [I] et de membres de sa famille.

Les fonds ont été employés pour rembourser le prêt immobilier, payer un assureur (GMF), l'électricité, un service de télécommunication (Orange), les charges de copropriété (Foncia), des travaux, des meubles, effectuer des virements au profit de chacun des indivisaires (motifs non précisés).

Il s'en déduit que ce compte n'a été utilisé que pour faire face aux dépenses générées par l'immeuble indivis et qu'il n'existait pas d'accord entre les concubins sur le partage de leurs charges quotidiennes, le compte ne révélant aucun paiement pour des dépenses alimentaires, de transport ou de loisirs.

En conséquence, il n'y a pas lieu d'appliquer la jurisprudence revendiquée par Mme [I] (1re Civ., 10 juin 2015, pourvoi n° 14-18.442; 1re Civ., 13 janvier 2016, pourvoi n° 14-29.746) conduisant à ne retenir que les sommes versées sur le compte commun par M. [R] après la séparation du couple.

M.[R] est donc fondé à revendiquer une créance sur l'indivision au titre des fonds versés sur ce compte bancaire, après déduction des sommes virées sur son compte personnel.

- Montant total des versements effectués par M. [R], selon le relevé de compte fourni':

700 + 1525,35 + 1556,87 + 56 +49 +'23 + 1805,75 + 375 + 1735,30 + 40 + 1696,28 + 50+ 900 + 200 + 45 + 700 + 90 + 50 + 50 = 11 649,55 euros';

- Montant total des retraits au profit de M. [R]':

400 + 300 + 100 + 600 + 600 + 375 + 200 + 500 + 120 + 600+ 50 + 50= 3895 euros';

- Montant total de la créance': 7 754,55 euros.

Le jugement sera donc infirmé et la créance de M. [R] sur l'indivision sera fixée à 7754,55 euros.

Sur la créance entre les parties

Le tribunal a retenu une créance de Mme [I] à l'encontre de M. [R] d'un montant de

90 000 euros, fondée sur une reconnaissance de dette rédigée par le débiteur.

M. [R] conteste cette décision, il estime que le contrat de prêt est nul en ce que Mme [I] ne démontre pas lui avoir remis les fonds mentionnés dans la reconnaissance de dette. Il souligne qu'il n'a jamais rencontré de difficultés financières de sorte qu'il n'a pas eu recours à l'aide de Mme [I], contrairement à ce qu'elle affirme.

M. [R] ne reconnaît qu'une aide d'un montant de 1 630 euros, versée en février 2016. Il ajoute que les attestations produites par Mme [I] sont de complaisance et ne reprennent que des propos tenus par la prétendue créancière.

Il ajoute qu'il a été trompé sur l'existence d'une obligation de restitution': en signant la reconnaissance de dette au moment de la séparation du couple, M. [R] indique qu'il pensait chiffrer le montant «'des droits dans l'indivision'», qu'il s'agissait donc «'d'une dette putative et non encore réalisée'». Il souligne qu'il a subi la «'pression'» de Mme [I] pour signer le document et qu'elle a utilisé la reconnaissance de dette à partir d'août 2017 pour faire du chantage auprès de lui.

Mme [I] demande la confirmation du jugement, elle souligne que la reconnaissance de dette suffit à établir l'obligation de M. [R], même si sa cause n'est pas mentionnée et c'est au débiteur d'établir que les sommes ne lui ont pas été remises.

Elle ajoute que les relevés bancaires de M. [R] révèlent que son compte bancaire était régulièrement débiteur. Elle précise qu'elle a payé, pendant le concubinage, les dettes importantes de M. [R] (dettes de jeu) et qu'elle a remboursé un prêt de 7 000 euros (Casden).

Mme [I] produit le document suivant':

«'[Localité 5], le 20 décembre 2016.

Je soussigné M. [R] [X] né à [Localité 7] (92) le 28/05/1985 devoir la somme de 90 000 € (quatre vingt dix mille euros) à Melle [I] [T], [O] née le 25/03/1983 à [Localité 6].

Pour faire valoir en reconnaissance de dette.

M.[R] [X]'» suivi d'une signature

M. [R] demande à la cour de «'constater'» que cette reconnaissance de dette est sans cause et sollicite son annulation, en citant l'article 1169 du code civil qui dispose':

Un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s'engage est illusoire ou dérisoire.

La cour relève toutefois que ce texte ne mentionne pas la notion de cause, qui ne fait plus partie de l'ordre juridique depuis la réforme du droit des obligations issue de l'ordonnance du 10 février 2016, entrée en vigueur le 1er octobre 2016 et applicable en l'espèce s'agissant d'un document daté du 20 décembre suivant.

De plus, aucun élément de cette reconnaissance de dette ne fait de relation avec un contrat à titre onéreux, le capital dû n'est pas accompagné d'intérêts.

Ainsi, la qualification de contrat à titre onéreux n'est pas applicable en l'espèce et il n'y a pas lieu d'appliquer le texte précité.

M. [R] fonde également sa contestation sur les textes applicables au contrat de prêt. Toutefois, le document ne mentionne pas de remise de fonds par Mme [I], laquelle explique sa créance par le paiement des dettes de jeu, et d'une dette de loyers de M. [R].

La lecture de ses relevés bancaires révèle un découvert constant (août 2016 à janvier 2017, compte Société Générale), des frais prélevés en conséquence par la banque sur la même période.

M. [R] disposait également d'un compte auprès de la Banque Populaire, débiteur en fin de mois et donnant lieu au paiement de frais bancaires chaque mois, selon les relevés produits par l'ancien concubin.

En outre, la cour relève que M. [R] ne communique qu'une partie de ses relevés de comptes et non leur intégralité, contemporaine de la période du concubinage.

Ainsi, les besoins financiers réguliers de M. [R] sont établis par ses propres pièces.

Le document produit par Mme [I] est une reconnaissance de dette de M. [R] qui ne conteste pas sa signature, ni son écriture. Il indique avoir subi des pressions pour établir ce document, toutefois ce fait ne repose sur aucune preuve et M. [R] n'invoque aucun vice du consentement.

Il ajoute que cette reconnaissance de dette serait en relation avec le futur partage de l'indivision existant entre les concubins, toutefois ses explications sont confuses et n'éclairent aucunement la cour sur les éventuels comptes qui auraient été ainsi concernés.

De plus, la présente décision reconnaît une créance de M. [R] sur l'indivision d'un montant de

7 754,55 euros, sans relation avec le montant figurant sur la reconnaissance de dette.

Il convient de faire application de l'article 1376 du code civil à cette reconnaissance de dette':

L'acte sous signature privée par lequel une seule partie s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent ou à lui livrer un bien fongible ne fait preuve que s'il comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l'acte sous signature privée vaut preuve pour la somme écrite en toutes lettres.

En l'espèce, la reconnaissance de dette rédigée par M. [R] et remise à Mme [I] contient bien la somme due, exprimée en chiffres et en lettres, et la signature du débiteur. Ce document suffit à établir la créance de Mme [I], le jugement sera donc confirmé.

Mme [I] conteste la décision du tribunal en ce qu'il a rejeté sa demande d'anatocisme.

Sa créance est ancienne et n'a pas été payée en dépit de l'exécution provisoire ordonnée par le jugement contesté.

La créance de Mme [I] produira donc intérêts au taux légal depuis le 21 octobre 2021, conformément à la demande de la créancière, et les intérêts dus pour une année entière produiront également des intérêts au taux légal en application de l'article 1343-2 du code civil.

Sur les demandes accessoires

L'essentiel des prétentions de M. [R] étant rejeté, il sera condamné à payer les dépens de l'instance.

Il sera également condamné à payer à Mme [I] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, dans la limite de sa saisine, par un arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,

CONFIRME le jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Nanterre le 21 octobre 2021, sauf au titre de la créance d'assurance revendiquée par Mme [I], du montant de la créance de M. [R] sur l'indivision, des intérêts applicables à la créance de Mme [I] à l'encontre de M. [R],

Statuant à nouveau,

FIXE la créance de Mme [I] sur l'indivision à la somme de 250,70 euros (cotisation d'assurance GMF du 4 février 2022),

FIXE la créance de M. [R] sur l'indivision à la somme de 7 754,55 euros,

DIT que la créance de 90 000 euros de Mme [I] à l'encontre de M. [R] produit intérêts au taux légal depuis le 21 octobre 2021 et que les intérêts dus pour une année entière produisent également intérêts au taux légal,

Y ajoutant,

CONDAMNE M. [R] à payer à Mme [I] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande de M. [R] fondée sur ce texte,

CONDAMNE M. [R] à payer les dépens de l'instance.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Dominique SALVARY, Président et par Madame PRAT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 2e chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 21/07348
Date de la décision : 09/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-09;21.07348 ?
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