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26/01/2023 | FRANCE | N°21/06403

France | France, Cour d'appel de Versailles, 2e chambre 1re section, 26 janvier 2023, 21/06403


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 22G



2e chambre 1re section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 26 JANVIER 2023



N° RG 21/06403 -

N° Portalis DBV3-V-B7F- UZOD



AFFAIRE :



[D], [J] [F] divorcée [Z]

C/

[R] [Z]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 02 Septembre 2021 par le Juge aux affaires familiales de Nanterre

N° Chambre :

N° Cabinet :

N° RG : 19/04874





Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le : 26.01.2023



à :

Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU,



Me Monique TARDY de l'ASSOCIATION AVOCALYS,



TJ NANTERRE













RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 22G

2e chambre 1re section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 26 JANVIER 2023

N° RG 21/06403 -

N° Portalis DBV3-V-B7F- UZOD

AFFAIRE :

[D], [J] [F] divorcée [Z]

C/

[R] [Z]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 02 Septembre 2021 par le Juge aux affaires familiales de Nanterre

N° Chambre :

N° Cabinet :

N° RG : 19/04874

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le : 26.01.2023

à :

Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU,

Me Monique TARDY de l'ASSOCIATION AVOCALYS,

TJ NANTERRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SIX JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [D], [J] [F] divorcée [Z]

née le 21 Juin 1966 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 - N° du dossier 20210388

APPELANTE

****************

Monsieur [R] [Z]

né le 24 Août 1963 à [Localité 6] (94)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentant : Me Monique TARDY de l'ASSOCIATION AVOCALYS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620

Me NABOUDET-VOGEL, avocat au barreau de PARIS

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Octobre 2022 en chambre du conseil, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Julie MOUTY TARDIEU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Dominique SALVARY, Président,

Madame Julie MOUTY TARDIEU, Conseiller,

Madame Sophie MATHE, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Elisa PRAT,

FAITS ET PROCEDURE,

Mme [D] [F] et M. [R] [Z] se sont mariés le 26 juin 1995 à [Localité 7] (21), sous le régime de la séparation de biens.

De cette union sont issus :

- [V], né le 11 juin 1999, aujourd'hui majeur,

- [B], née le 12 novembre 2000, aujourd'hui majeure.

Par une ordonnance de non-conciliation du 5 octobre 2015, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Créteil a notamment :

- autorisé les époux à résider séparément,

- attribué à l'époux la jouissance du logement familial et du mobilier du ménage,

- dit que cette jouissance sera à titre onéreux,

- dit que cette jouissance donnera lieu à indemnité dans le cadre des opérations de liquidation de régime matrimonial,

- désigné Maître [M], notaire à [Localité 9] (94), en qualité de professionnel qualifié sur le fondement de l'article 255 9° du code civil.

Le notaire a déposé son rapport le 12 décembre 2016.

Par un jugement du 14 mars 2018, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Créteil a, notamment :

prononcé le divorce des époux,

ordonné la liquidation des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux,

dit qu'il appartiendra aux parties de procéder aux opérations de liquidation et de partage de leurs intérêts patrimoniaux en saisissant les notaires de leur choix,

attribué préférentiellement le bien sis [Adresse 3] (94) à M. [Z],

condamné M. [Z] à verser à Mme [F], à titre de prestation compensatoire, la somme en capital de 100 000 euros.

Le 28 mars 2018, les parties ont acquiescé au jugement de divorce.

A la suite d'une assignation délivrée le 30 avril 2019 par M. [Z], le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Nanterre, par un jugement du 2 septembre 2021, a notamment :

- dit que le partage du régime matrimonial des ex-époux [Z]-[F] sera fait en justice,

- désigné pour y procéder, Maître [L] [W], notaire au [Adresse 2], conformément aux dispositions de l'article 1364 du code de procédure civile,

- commis tout juge de la troisième section du Pôle Famille du tribunal judiciaire de Nanterre pour surveiller les opérations et faire rapport en cas de difficultés,

- dit que le notaire désigné pourra notamment consulter le FICOBA et le fichier FICOVIE et requérir tout document bancaire utile à l'accomplissement de sa mission,

- dit que les quote-parts dans l'indivision portant sur le bien immobilier indivis sis [Adresse 3] (94) sont de 87,5% pour M. [Z] et de 12,5% pour Mme [F],

- rejeté la demande formée par Mme [F] tendant à obtenir avant-dire droit la désignation d'un expert pour évaluer la valeur du bien immobilier-indivis,

- fixé la valeur du bien immobilier indivis, situe [Adresse 3] (94), à la somme de 640 000 euros,

- dit qu'une indemnité d'occupation sera due à l'indivision par M. [Z] au titre de la jouissance privative du bien immobilier indivis sis [Adresse 3] (94) à compter du

5 octobre 2015 et qu'elle sera due jusqu'à la libération effective des lieux ou le jour du partage,

- fixé le montant mensuel de l'indemnité d'occupation à la somme de 1 474,40 euros,

- fixé la créance de M. [Z] à l'encontre de l'indivision au titre de l'achat de matériels et de travaux effectués pour l'amélioration et la conservation du bien indivis à la somme de 60 116,92 euros,

- fixé la créance de M. [Z] à l'encontre de l'indivision au titre du paiement des taxes foncière et d'habitation à la somme de 15 956 euros,

- fixé la créance de M. [Z] à l'encontre de l'indivision au titre du paiement de l'assurance-habitation à la somme de 5 611,76 euros,

- sursis à statuer sur la demande formée par M. [Z] tendant à voir fixer à la somme de 30 656 euros sa créance contre Mme [F] au titre du remboursement des placements de trésorerie,

- fixé la créance de Mme [F] à l'encontre de M. [Z] pour la jouissance du mobilier conservé par lui à la somme de 1 000 euros,

- rejeté la demande de Mme [F] tendant à voir condamner M. [Z] à lui verser la somme de 45 000 euros au titre de créance salariale,

- ordonné l'exécution provisoire,

- rejeté les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'emploi des dépens en frais généraux de partage, qui seront supportés par les parties à proportion de leurs droits,

- renvoyé l'affaire à l'audience du juge commis du 14 octobre 2021 à 9h30 pour retrait du rôle jusqu'à l'établissement de l'acte de partage ou du procès verbal des dires.

Par une déclaration du 20 octobre 2021, Mme [F] a fait appel de cette décision en ce qu'elle :

- a rejeté sa demande tendant à obtenir avant-dire droit la désignation d'un expert pour évaluer la valeur du bien immobilier indivis,

- a fixé la valeur du bien immobilier indivis, situé [Adresse 3] (94) à la somme de 640 000 euros,

- a fixé le montant mensuel de l'indemnité d'occupation à la somme de 1 474,40 euros,

- a sursis à statuer sur la demande formulée par M. [Z] tendant à voir fixer à la somme de

30 656 euros sa créance contre elle au titre du remboursement des placements de trésorerie,

- a fixé sa créance à l'encontre de M. [Z] pour la jouissance du mobilier conservé par lui à la somme de 1 000 euros,

- a rejeté sa demande tendant à voir condamner M. [Z] à lui verser la somme de 45000 euros au titre de créance salariale,

- a ordonné l'exécution provisoire.

Dans ses dernières conclusions du 9 septembre 2022, Mme [F] demande à la cour de :

- Recevoir Madame [F] en son appel et la déclarer bien fondée en son appel,

- Infirmer le jugement critiqué en ce qu'il :

* A REJETTE la demande formée par Madame [F] tendant à obtenir avant dire droit la désignation d'un expert pour évaluer la valeur du bien immobilier indivis,

* A FIXE la valeur du bien immobilier indivis, situé [Adresse 3] à la somme de 640.000 euros,

* A DIT qu'une indemnité d'occupation est due à l'indivision par Monsieur [R] [Z], au titre de la jouissance du bien immobilier indivis sis [Adresse 3], à compter du 5 octobre 2015 et qu'elle sera due jusqu'à la libération effective des lieux ou le jour du partage,

* A FIXE le montant mensuel de l'indemnité d'occupation à la somme de 1474,40 euros,

* A SURSIS A STATUER sur la demande formulée par Monsieur [R] [Z] tendant à voir fixer à la somme de 30.656 euros sa créance contre Madame [D] [F] au titre du remboursement des placements de trésorerie,

* A FIXE la créance de Madame [D] [F] à l'encontre de Monsieur [R] [Z] pour la jouissance du mobilier conservé par lui à la somme de 1000 euros,

* A REJETTE la demande de Madame [D] [F] tendant à voir condamner Monsieur [R] [Z] à lui verser la somme de 45.000 euros au titre de créance salariale,

STATUANT A NOUVEAU,

Il est demandé à la Cour de :

- Dire la valeur de la maison située [Adresse 3] est de 897.500€,

- Dire l'indemnité d'occupation due par Monsieur [Z] à 2.111€ euros mensuels à compter du jour de l'ONC (5 octobre 2015) au jour du partage,

A défaut d'accord sur ces points,

- Ordonner une expertise,

- Dire que l'expert, après s'être assuré du métrage de la maison, devra fixer la valeur actuelle de la maison et de l'indemnité d'occupation,

- Mettre la consignation à la charge exclusive de Monsieur [Z],

- Condamner Monsieur [Z] à verser à Madame [F] la somme de 10.000 euros pour l'indemniser du mobilier conservé par lui,

- Condamner Monsieur [Z] à verser à Madame [F] à titre de créance salariale la somme de 45.000 euros,

- Condamner Monsieur [Z] à payer à Madame [F] le somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du CPC,

- Condamner Monsieur [Z] aux dépens dont distraction au profit de la SELARL MINAULT TERIITEHAU agissant par Maître Stéphanie TERIITEHAU Avocat et ce conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

Dans ses dernières conclusions du 23 septembre 2022, M. [Z] demande à la cour de :

- Dire et juger Madame [F] mal fondée en son appel du jugement rendu le 2 septembre 2021 par le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal Judiciaire de NANTERRE,

- Constater le caractère définitif des chefs non contestés du jugement, relatifs :

* Au partage judiciaire,

* A la désignation de Maître Hélène BOIDIN,

* Au montant des quote part dans l'indivision,

* A la créance de Monsieur [Z] sur l'indivision au titre de l'achat de matériels et de travaux,

* A la créance de Monsieur [Z] sur l'indivision au titre du paiement des taxes foncières et d'habitation (à actualiser),

* A la créance de Monsieur [Z] sur l'indivision au titre de du paiement de l'assurance habitation (à actualiser),

- Débouter Madame [F] de son appel et de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

* Rejeté la demande formée par Madame [F] tendant à obtenir avant dire droit la désignation d'un expert pour évaluer la valeur du bien immobilier indivis,

* Fixé la valeur du bien immobilier indivis, situé [Adresse 3] à la somme de 640.000 €,

* Fixé le montant mensuel de l'indemnité d'occupation à la somme de 1474,40 euros,

* Rejeté la demande de Madame [D] [F] tendant à voir condamner Monsieur [R] [Z] à lui verser la somme de 45.000 euros au titre de créance salariale,

* Fixé la créance de Madame [D] [F] pour la jouissance du mobilier conservé par lui à la somme de 1000 €,

- Débouter Madame [F] de sa demande d'expertise judiciaire,

Subsidiairement, pour le cas où, par extraordinaire, il serait fait droit à la demande d'expertise de Madame [F], désigner « PARIS NOTAIRE SERVICE » l'organisme d'expertise de la Chambre des Notaires de PARIS,

- Dire et juger que les frais d'expertise resteront à la charge de Madame [F],

Faisant droit à l'appel incident de Monsieur [Z] :

- Réformer le jugement du chef de la créance de Madame [F] au titre des meubles,

- L'infirmer en ce qu'il a sursis à statuer sur la demande formulée par Monsieur [R] [Z] tendant à voir fixer à la somme de 30.656 € sa créance contre Madame [D] [F] au titre du remboursement des placements de trésorerie,

Statuant à nouveau :

- Fixer la créance de Madame [D] [F] à l'encontre de l'indivision pour la jouissance du mobilier conservé par Monsieur [Z] à la somme de 1000 €,

- Fixer à la somme de 30.656 € la créance de Monsieur [Z] contre Madame [D] [F] au titre du remboursement des placements de trésorerie,

- Condamner Madame [F] à verser à Monsieur [Z] la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du C.P.C,

- Condamner Madame [F] aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 11 octobre 2022.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu'aux écritures déposées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande d'expertise

L'indivision à partager comprend un immeuble, l'ancien domicile conjugal qui a été attribué à titre préférentiel à M. [Z] par le jugement de divorce, dont la valeur est discutée par Mme [F].

La cour dispose des travaux du notaire et de nombreuses estimations et informations relatives au marché de l'immobilier au [Localité 5], lieu de situation de l'immeuble.

Ces éléments sont suffisants pour apprécier la valeur du bien indivis de sorte que la demande d'expertise, qui a pour seul objet de retarder les opérations de liquidation et partage, sera rejetée.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la valeur de l'immeuble indivis

Le tribunal judiciaire a fixé la valeur de l'immeuble indivis à la somme de 640 000 euros.

Mme [F] conteste cette valeur et soutient qu'elle doit être fixée à 897 500 euros.

M.[Z] demande la confirmation du jugement.

Paris notaires services a procédé à une évaluation de l'immeuble indivis au mois d'avril 2016 après une visite des lieux et une comparaison des ventes réalisées à proximité.

La valeur était alors de 600 000 euros.

Il convient d'actualiser cette estimation ancienne de près de 7 années.

Mme [F] produit un document du 20 mars 2020 relatif à l'évolution des prix de l'immobilier en région parisienne (prix des notaires), selon lequel le prix au mètre carré des appartements anciens a augmenté de 15,7 % en une année et de 33,3 % sur cinq années.

Cette étude n'est toutefois pas pertinente, l'immeuble indivis est une maison avec un jardin et non un appartement.

Mme [F] produit également des évaluations effectuées par ses soins sur un site Internet entre 2020 et 2022, selon lesquelles le bien indivis aurait une valeur comprise entre 851 754 euros et 995 868 euros (juillet 2022). Toutefois, les critères choisis par Mme [F] ne sont pas connus, il n'est notamment pas établi qu'elle a mentionné les travaux de structures nécessaires en l'espèce, signalés dès l'année 2016 (ravalement des murs, toiture à réviser, affaissement de la terrasse).

M.[Z] justifie qu'en février 2019 il a reçu une information selon laquelle l'assainissement de l'immeuble indivis n'était pas conforme à la réglementation en vigueur.

Il produit les attestations de valeur suivantes :

- Février 2019, après une visite des lieux : 600 à 620 000 euros,

- Mai 2020 : une information générale signalant une diminution de 5 % sur trois mois du prix des maisons au [Localité 5],

- Février 2022 : une information générale signalant une augmentation de 9,2% sur trois mois du prix des maisons au [Localité 5].

- Août 2022 : une information générale signalant une augmentation de 7% sur un an du prix du mètre carré au [Localité 5].

La cour relève toutefois que toutes ces informations manquent de pertinence dans la mesure où elles ne sont pas adaptées à l'immeuble indivis au regard de son état et des travaux de rénovation nécessaires. En effet, selon un devis du 10 novembre 2020, l'état de l'immeuble exige des travaux évalués à 63 312 euros (ravalement des murs extérieurs, remplacement des gouttières, mise aux normes de l'assainissement, révision du toit).

Au regard de la description de l'immeuble figurant dans l'évaluation du mois d'avril 2016, de sa surface, de sa situation, de la nécessité de réaliser des travaux de rénovation et de mise en conformité de l'assainissement, d'un chauffage au fuel et de l'état du marché immobilier, il convient de confirmer le jugement ayant fixé la valeur du bien indivis à 640000 euros.

Sur le montant de l'indemnité d'occupation

Le litige ne porte que sur le montant de l'indemnité d'occupation due par M. [Z], et non sur son principe énoncé à l'article 815-9 du code civil.

Le jugement a fixé à la somme mensuelle de 1474,40 euros le montant de l'indemnité d'occupation due par M. [Z].

En appel, Mme [F] conteste cette évaluation et sollicite la somme de 2 111 euros, elle souligne que l'estimation du notaire doit être actualisée.

M . [Z] demande la confirmation du jugement, il estime que l'augmentation sollicitée par Mme [F] ne doit pas être admise, sauf à lui donner un effet rétroactif.

Le tribunal a fixé le montant de l'indemnité d'occupation en se fondant sur le rapport notarié établi en avril 2016. La valeur locative a été exactement fixée à 1474,40 euros par mois, ce que ne conteste par Mme [F].

Sa contestation porte, à juste titre, sur l'absence d'actualisation de cette somme au fil des années, alors que pendant la même période l'indice de variation des loyers a augmenté.

Toutefois, Mme [F] n'actualise pas, année par année, le montant de l'indemnité d'occupation alors qu'il lui appartient d'exprimer ses prétentions. La cour ne peut pas pallier la carence d'une partie dans l'expression de sa demande, sauf à manquer d'impartialité.

Mme [F] ajoute qu'il convient d'augmenter cette indemnité de 5 % pour le mois de novembre 2021. Toutefois, cette prétention n'est pas justifiée, la progression des loyers n'étant que de 2,48 % au premier trimestre de l'année 2022 selon l'indice de référence des loyers publié par l'INSEE.

Ainsi, le montant de l'indemnité d'occupation sera fixé de la façon suivante :

- du 5 octobre 2015 au 31 décembre 2021 : 1474,40 euros par mois,

- à partir du 1er janvier 2022 : 1474,40 euros + 2,48 % = 1 510,96 euros,

puis une augmentation annuelle selon l'indice de référence des loyers publié par l'INSEE (premier trimestre de chaque année).

Le notaire commis pourra saisir le juge commis en cas de difficulté sur le calcul de l'actualisation du montant de l'indemnité d'occupation.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

Sur le mobilier

Le tribunal a fixé la créance de Mme [F] à l'encontre de M. [Z] pour la jouissance du mobilier conservé par lui à la somme de 1000 euros.

En appel, Mme [F] revendique une créance de 10 000 euros sur l'indivision pour des meubles indivis conservés par M. [Z].

Ce dernier répond que Mme [F] a pris tous ses meubles lors de son départ du domicile conjugal. Il ajoute que ceux restés au domicile conjugal ont une valeur de 1000 euros. Il précise que s'agissant de meubles indivis, il convient de retenir une créance de Mme [F] contre l'indivision et non contre lui.

Mme [F], qui revendique l'existence de meubles indivis à partager, doit en démontrer l'existence, en application de l'article 9 du code de procédure civile.

Elle produit, à l'appui de sa prétention, une liste manuscrite établie par ses soins (pièce 4c). Mme [F] n'est toutefois pas recevable à ses constituer une preuve pour elle-même. Sa demande n'est donc pas fondée.

M.[Z] répond que les meubles indivis restés au domicile conjugal ont peu de valeur et il les estime à 1 000 euros.

Il relève à juste titre que la demande de Mme [F] n'est pas une revendication de créance mais la fixation de la valeur de biens meubles indivis.

Le jugement sera donc infirmé sur ce point et il sera inscrit à l'actif de la masse à partager des meubles pour une valeur de 1000 euros.

Sur la créance de salaires revendiquée par Mme [F]

Le tribunal a rejeté la demande de Mme [F] qui revendique une créance de salaires de 45 000 euros à l'encontre de M. [Z].

En appel, Mme [F] maintient cette prétention, M. [Z] oppose la prescription prévue par l'article L 3245-1 du code du travail. Il ajoute que les attestations produites par Mme [F] sont de complaisance. Il souligne que son épouse recevait des indemnités de chômage au cours de la période considérée et que son état de santé ne lui permettait pas de travailler. Il ajoute que Mme [F] a reçu une prestation compensatoire de 100.000 euros qui a pris en compte sa situation professionnelle au cours du mariage. Il conclut à la confirmation du jugement.

L'article L 3245-1 du code du travail dispose :

L'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

En l'espèce, Mme [F] indique avoir travaillé pour son époux au cours du mariage.

Selon l'article 2236 du code civil, la prescription n'a pas couru entre eux pendant leur mariage.

Il convient d'appliquer le délai de trois ans prévu par le texte précité au jour de la dissolution du mariage, soit en l'espèce le 28 mars 2018, jour de l'acquiescement au jugement de divorce.

Mme [F] a revendiqué pour la première fois, selon les informations à la disposition de la cour, une créance de salaires par des conclusions devant le tribunal judiciaire signifiées le 4 novembre 2020, mois de trois années après la dissolution du mariage. La demande est donc recevable.

Mme [F] produit à l'appui de sa demande une attestation de M. [Y] [F], son père, qui ne relate aucun fait dont il a été le témoin. Il ne fait que reprendre les propos de sa fille, ce document ne sera pas retenu.

M.[T] témoigne en juillet 2020 qu'il a vu Mme [F] travailler dans le cabinet dentaire de son mari entre 1998 et juin 1999 (répondre au téléphone, accueil des patients, nettoyage entre deux patients). M. [N] fait la même déclaration.

Mme [F] ne produit toutefois pas le relevé de sa carrière professionnelle qui permettrait à la cour de connaître sa situation professionnelle au cours de la période litigieuse.

M.[Z] produit le témoignage d'un médecin selon lequel l'état de santé de Mme [F] l'empêchait de travailler entre juin 1998 et juin 1999.

Selon Mme [S], à partir de l'année 1997 Mme [F] s'est consacrée à sa famille et à ses enfants, elle n'a pas eu d'activité professionnelle avant l'été 2012.

M.[Z] produit des relevés bancaires de novembre et décembre 1998 selon lesquels Mme [F] recevait des indemnités de chômage.

Le jugement de divorce précise (page 7) que Mme [F] a peu travaillé au cours du mariage, l'épouse déclarait s'être consacrée aux enfants et à la famille pendant que M. [Z] développait son cabinet de chirurgien dentiste.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que les pièces produites par Mme [F] ne sont pas convaincantes et s'avèrent incomplètes en l'absence du relevé de sa carrière professionnelle. Elle ne démontre pas avoir travaillé, sans rémunération, dans le cabinet professionnel de son époux. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de Mme [F].

Sur la créance revendiquée par M. [Z]

M.[Z] indique avoir effectué des versements sur les comptes bancaires de son épouse et revendique en conséquence une créance de 30 656 euros.

Le tribunal a ordonné un sursis à statuer sur cette prétention, dans l'attente du compte entre les parties fait par le notaire.

M.[Z] demande l'infirmation de cette disposition du jugement et maintient sa demande en paiement.

Mme [F] répond que M. [Z] a versé des sommes sur ses comptes bancaires et en a repris également. Elle estime que le solde est de 9 948,50 euros et ajoute qu'il s'agit de libéralités.

M.[Z] réplique, à juste titre, que la libéralité ne se présume pas et qu'il appartient à Mme [F] d'en établir la preuve, ce qu'elle ne fait pas.

La cour relève que M. [Z] ne qualifie pas la dite relation contractuelle. Il appartient donc à la cour de le faire (article 12 du code de procédure civile) en retenant que la relation qu'il invoque s'analyse en un contrat de prêt prévu par l'article 1892 du code civil :

Le prêt de consommation est un contrat par lequel l'une des parties livre à l'autre une certaine quantité de choses qui se consomment par l'usage, à la charge par cette dernière de lui en rendre autant de même espèce et qualité.

Il appartient à M. [Z] de démontrer que les sommes remises à son épouse au cours du mariage au titre des prêts allégués devaient faire l'objet d'un remboursement par Mme [F] (1re Civ., 19 juin 2008, pourvoi n° 07-13.912, Bull. 2008, I, n° 176).

M. [Z] ne rapporte pas cette preuve.

En outre, il incombe à M. [Z] d'établir qu'il s'agissait de fonds personnels.

Il produit des relevés du plan épargne logement ouvert au nom de l'épouse entre le 20 octobre 1998 et le 1er janvier 2009 où apparaissent des versements dénommés « vir. Permanent [Z] ». Cette mention ne démontre pas que les fonds proviennent effectivement d'un compte ouvert au nom de l'époux sur lequel il aurait versé uniquement des fonds lui appartenant.

M.[Z] produit les relevés du livret développement durable ouvert au nom de Mme [F] de décembre 2014, janvier 2015, février 2008 et février 2009. Les écritures ne concernent que les intérêts annuels et deux virements de « GRAVESM » (retrait de 170 euros et versement de 300 euros).

Là encore, M. [Z] ne démontre pas que les fonds proviennent effectivement d'un compte ouvert au nom de l'époux sur lequel il aurait versé uniquement des fonds lui appartenant.

M.[Z] produit les relevés du CODEVI de son épouse de février 1997 à janvier 2007. Les écritures sont essentiellement relatives aux intérêts acquis. Deux virements de « [Z] » apparaissent, mais l'époux n'établit pas qu'il s'agit de fonds qui lui sont personnels.

Il produit enfin des relevés du compte épargne logement de Mme [F] entre février 1997 et janvier 2015. Les écritures sont relatives aux intérêts annuels, prélèvements sociaux, la remise de chèques dont l'origine est inconnue et un virement « [Z] » qui ne permet pas de s'assurer qu'il s'agit de fonds appartenant au seul époux en l'absence du relevé du compte d'origine de cette opération.

M.[Z] ne démontre donc pas avoir remis des fonds personnels à Mme [F], sa demande sera rejetée.

Sur les autres demandes

La nature familiale du litige justifie de rejeter les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Pour le même motif, chaque partie sera condamnée à payer la moitié des dépens de l'instance.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, dans la limite de sa saisine, par un arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,

CONFIRME le jugement prononcé par pôle famille du tribunal judiciaire de Nanterre le 2 septembre 2021, sauf au titre du montant de l'indemnité d'occupation, de la créance de 1000 euros de Mme [F] à l'encontre de M. [Z], du sursis à statuer,

Statuant à nouveau,

FIXE le montant de l'indemnité d'occupation due par M. [Z] à l'indivision aux sommes suivantes:

du 5 octobre 2015 au 31 décembre 2021 : 1474,40 euros par mois,

- à partir du 1er janvier 2022 : 1 510,96 euros par mois,

- à partir du 1er janvier 2023 : une augmentation annuelle selon l'indice de référence des loyers publié par l'INSEE (premier trimestre de chaque année), calculé par le notaire commis sur la base d'une indemnité mensuelle de 1 510,96 euros au 1er janvier 2022,

DIT que le notaire commis pourra saisir le juge commis en cas de difficulté quant au calcul de l'actualisation du montant de l'indemnité d'occupation,

FIXE à l'actif de la masse à partager des meubles pour une valeur de 1 000 euros,

REJETTE la créance revendiquée par M. [Z] à l'encontre de Mme [F],

REJETTE les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE chaque partie à payer la moitié des dépens de l'instance, dont distraction au profit de Me Stéphanie Teriitehau, avocat de la SELARL Minault Teriitehau, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Dominique SALVARY, Président et par Madame PRAT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 2e chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 21/06403
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;21.06403 ?
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