La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/01/2023 | FRANCE | N°21/01468

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 24 janvier 2023, 21/01468


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 35A



13e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 24 JANVIER 2023



N° RG 21/01468

N° Portalis

DBV3-V-B7F-ULOT



AFFAIRE :



[F] [C]

....



C/



[A] [EK]

....







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Février 2021 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° chambre : 02

N° Section :

N° RG : 2017F557r>


Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me [A] [O]



Me Michèle DE KERCKHOVE



TC VERSAILLES







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





LE VINGT QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Vers...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 35A

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 24 JANVIER 2023

N° RG 21/01468

N° Portalis

DBV3-V-B7F-ULOT

AFFAIRE :

[F] [C]

....

C/

[A] [EK]

....

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Février 2021 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° chambre : 02

N° Section :

N° RG : 2017F557

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me [A] [O]

Me Michèle DE KERCKHOVE

TC VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [F] [C]

né le [Date naissance 11] 1969 à [Localité 19]

[Adresse 15]

[Localité 16]

Madame [ZA] [N] épouse [C]

née le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 21] (CORÉE DU SUD)

[Adresse 15]

[Localité 16]

Monsieur [P] [L] [G]

né le [Date naissance 6] 1985 à [Localité 24]

[Adresse 14]

[Localité 16]

Monsieur [W] [I]

né le [Date naissance 3] 1951 à [Localité 27] (ALLEMAGNE)

[Adresse 12]

[Localité 16]

Madame [NR] [M] épouse [I]

née le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 28] (MAROC)

[Adresse 12]

[Localité 16]

Monsieur [R] [J]

né le [Date naissance 9] 1942 à [Localité 25]

[Adresse 7]

[Localité 18]

Madame [Z] [D] épouse [J]

née le [Date naissance 4] 1940 à [Localité 29]

[Adresse 7]

[Localité 18]

Société APPIA

[Adresse 5]

[Localité 16]

Société D.G.L. PARTNERS

[Adresse 8]

[Localité 16]

Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20210085

Représentant : Me David GORDON KRIEF de la SCP UGGC AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANTS

****************

Monsieur [A] [EK]

né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 26]

[Adresse 17]

[Localité 23] (LUXEMBOURG)

Monsieur [JN] [V]

né le [Date naissance 10] 1959 à [Localité 20]

[Adresse 17]

[Localité 23] (LUXEMBOURG)

Société UTOKY INTERNATIONAL HOLDING SA

[Adresse 13]

[Localité 22] (LUXEMBOURG)

Société PAYROUX SARL

[Adresse 17]

[Localité 23] (LUXEMBOURG)

Société PHT INTERNATIONAL HOLDING SA

[Adresse 17]

[Localité 23] (LUXEMBOURG)

Société DIMAP INTERNATIONAL SA

[Adresse 17]

[Localité 23] (LUXEMBOURG)

Société PAYMAP SA

[Adresse 17]

[Localité 23] (LUXEMBOURG)

Représentant : Me Michèle DE KERCKHOVE de la SELARL BVK AVOCATS ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C26

Représentant : Me Michel LAVAL de la SCP ML&A, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

en la présence de :

Société OLKY PAYMENT SERVICE PROVIDER SA

[Adresse 17]

[Localité 23] (LUXEMBOURG)

Représentant : Me Michèle DE KERCKHOVE de la SELARL BVK AVOCATS ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C26

Représentant : Me Michel LAVAL de la SCP ML&A, et Me Juliette HEINZ, Plaidants, avocats au barreau de PARIS

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Octobre 2022, Madame Marie-Andrée BAUMANN, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN

La société Olky payment service provider (la société Olkypay), SARL de droit luxembourgeois transformée en SA en mars 2015 et spécialisée dans la fourniture de services de paiements, laquelle a notamment développé une solution permettant l'optimisation du recouvrement des factures impayées, a été créée en décembre 2011 à l'initiative de MM. [A] [EK] et [JN] [V]. Ces derniers, depuis 2015, sont respectivement administrateurs délégués et président du conseil d'administration d'Olkypay.

M.[F] [C], dirigeant du fonds d'investissement HIG capital en France, est entré en en contact avec M. [EK] en mars 2014, par l'intermédiaire de M. [U] [PU]. M. [C] a mis en relation la société Olkypay avec la société Veolia.

Au cours de l'année 2014, la société Olkypay a négocié la conclusion d'un contrat de prestation de services avec la société Veolia ; un 'Term sheet' présentant les principaux termes et conditions du contrat de service devant être conclu entre ces sociétés avant le 30 janvier 2015 a été signé le 22 décembre 2014 par M. [X] [K], en qualité de cogérant de la société Veolia eau et M. [EK], représentant la société Olkypay. Trois avenants ont été postérieurement conclus entre ces sociétés les 7 juillet 2015, 21 mars et 13 juillet 2016.

Au cours de l'assemblée générale extraordinaire du 11 mars 2015, M. [C] et son épouse Mme [ZA] [N], M. [P] [L] [G], M. [W] [I] et son épouse Mme [NR] [M], M. [R] [J] et son épouse Mme [Z] [D], les SAS Tivoli finance dont M. [PU] était le président, Appia et D.G.L. partners ainsi que la société de droit suisse Digital transactions service SA, dont M. [Y] [K] était le dirigeant sont devenus actionnaires minoritaires de la société Olkypay en apportant au capital de cette dernière une somme de 1 000 787,25 euros, ceux-ci réglant en outre une prime d'émission de 21 212,75 euros.

Ils ont conclu en leur qualité d'investisseurs financiers, par acte daté du 11 mars 2015, avec MM. [A] [EK] et [JN] [V] un pacte d'actionnaires, signé également par trois autres sociétés de droit luxembourgeois dont M. [EK] était le dirigeant et alors actionnaires de la société Olkypay, à savoir les sociétés PHT international holding SA, Olky international holding SA, désormais dénommée Utoky international holding (la société Utoky), Dimap international SA ; le pacte a été signé en présence de la société Olkypay, désignée 'gardien du pacte'.

Aux termes du pacte d'actionnaires, il a été notamment prévu les modalités de gouvernance de la société, les principes généraux applicables aux transferts de titres et les conditions de l'exercice d'un droit de préemption en ce cas ainsi que le processus de 'sortie totale' ; il y est indiqué en particulier que le conseil d'administration est composé de cinq membres, désignés par l'assemblée générale des actionnaires, trois sur proposition de M. [C] et deux sur proposition des associés fondateurs ; au cours de l'assemblée générale extraordinaire qui s'est déroulée le même jour, M. [C], M. [L] et la société Appia ont été désignés en qualité d'administrateurs de catégorie A et MM. [EK] et [V] nommés en qualité d'administrateurs de catégorie B, ceux-ci ayant été également désignés comme administrateurs délégués en application du pacte d'actionnaires.

Le 30 novembre 2015, les actionnaires de la société Utoky ont voté en assemblée générale extraordinaire la création d'une classe d'actions traçantes ; la société Gaway, dirigée par M. [T] [FK], a déclaré souscrire à cette action traçante pour un prix de souscription de 124 911euros, étant précisé que M. [CW] [B], directeur général adjoint de la société Veolia eau, était actionnaire de cette société.

A la suite d'un contrôle effectué au cours de l'année 2015 par la Commission de surveillance du secteur financier luxembourgeois et d'une restructuration capitalistique, la société de droit luxembourgeois Paymap SA, créée en septembre 2016, est devenue actionnaire majoritaire de la société Olkypay (51,83% du capital) par transfert des actions détenues d'une part par la société Payroux SARL, à laquelle avaient été incorporés les titres des sociétés PHT international holding et Utoky et d'autre part par la société Dimap international ; celles-ci, ne détenant plus d'actions de la société Olkypay, ont adhéré le 21 décembre 2016 au pacte d'actionnaires du 11 mars 2015, de même que les sociétés Payroux et Paymap, étant précisé que toutes ces sociétés étaient dirigées par M. [EK].

Le 24 novembre 2016, est paru un article de Médiapart intitulé 'Chez Veolia, le banquet des fauves', indiquant que 'deux dirigeants de la branche eau de Veolia sont devenus actionnaires' de la société Olkypay et décrivant notamment l'entrée au capital de cette dernière de la société Digital transaction services dirigée par le 'frère du directeur général de Veolia eau, M. [X] [K]', le mécanisme de l'action traçante décidée lors de l'assemblée générale extraordinaire de la société Utoky et la découverte de la 'fraude' par le 'PDG' de Veolia.

Le contrat que la société Olkypay avait conclu avec la société Veolia eau qui a mené une enquête interne après la parution de cet article, a été résilié par cette dernière le 14 février 2017. Une procédure judiciaire a été engagée devant le tribunal de commerce de Paris et est en cours entre les sociétés Veolia et Olkypay.

Invoquant de graves violations aux engagements souscrits aux termes du pacte d'actionnaires, dans les suites de la résiliation de ce contrat, M. et Mme [C], M. [L] [G], M. et Mme [I], M. et Mme [J], les sociétés Tivoli finance, Appia et DGL partners ont assigné, en août 2017, MM. [EK] et [V] ainsi que les sociétés PHT international holding, Olky international holding (société Utoky), Dimap international, Paymap, Payroux et Olkypay devant le tribunal de commerce de Versailles qui, après s'être déclaré compétent par jugement du 10 octobre 2018, a, par jugement du 10 février 2021 assorti de l'exécution provisoire :

- constaté le désistement d'instance et d'action de la société Tivoli finance ;

- dit recevable la demande de M. et Mme [C], M. [L] [G], M. et Mme [I], M. et Mme [J] et des sociétés Appia et DGL partners, relative aux violations du pacte d'actionnaires de la part de MM. [EK] et [V] ;

- dit la stipulation limitative des obligations de MM. [EK] et [V] au titre du pacte d'actionnaires bien fondée ;

- débouté MM. [EK] et [V] avec les sociétés Utoky, Payroux, PHT international holding, Dimap international et Paymap de leur demande de nullité de la disposition du pacte octroyant à M. [C] la possibilité de désigner les administrateurs de catégorie A de la société Olkypay ;

- débouté M. et Mme [C], M. [L] [G], M. et Mme [I], M. et Mme [J] et les sociétés Appia et DGL partners de leurs demandes au titre du préjudice moral ;

- dit irrecevable 'la demande en action ut singuli' de M. et Mme [C], M. [L] [G], M. et Mme [I], M. et Mme [J] et des sociétés Appia et DGL partners ;

- condamné M. et Mme [C], M. [L] [G], M. et Mme [I], M. et Mme [J] et les sociétés Appia et DGL partners aux dépens ainsi qu'à payer solidairement à MM. [EK] et [V] avec les sociétés Utoky, Payroux, PHT international holding, Dimap international et Paymap la somme totale de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

Par déclaration du 4 mars 2021, M. et Mme [C], M. [L] [G], M. et Mme [I], M. et Mme [J] ainsi que les sociétés Appia et DGL partners ont interjeté appel de ce jugement.

Il a été proposé une médiation refusée par les appelants selon message de leur conseil du 19 mars 2021.

Par ordonnance contradictoire en date du 9 mars 2022, le conseiller de la mise en état de la présente cour a :

- ordonné à M. [A] [EK] et la société Utoky international holding de communiquer :

- le protocole d'accord signé entre à MM. [A] [EK] et [CW] [B], lequel est mentionné dans l'email du 12 novembre 2015 de DLA piper adressé à M. [EK] et dont M. [B] a été mis en copie ;

- le 'projet de contrat de gage sur créance (...) à conclure entre Utoky et Gaway en garantie des obligations d'Utoky au titre du paiement des 5,5 % du produit de la vente des titres d'Olky' annexé à ce protocole,

et ce, dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'ordonnance, sous astreinte ;

- réservé la liquidation de l'astreinte ;

- renvoyé le dossier à la mise en état pour fixation et clôture ;

- débouté les défendeurs à l'incident de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamné M. [A] [EK] et la société Utoky international holding aux dépens de l'incident.

Dans leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 28 juillet 2022, M. et Mme [C], M. [L] [G], M. et Mme [I], M. et Mme [J], les sociétés Appia et DGL partners demandent à la cour de :

- les déclarer recevables en leur appel ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

- dit la stipulation limitative des obligations de MM. [EK] et [V] au titre du pacte d'actionnaires bien fondée ;

- les a déboutés de leurs demandes au titre du préjudice moral ;

- les a condamnés à payer solidairement la somme totale de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- les a condamnés solidairement aux dépens ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

- dit leur demande relative aux violations du pacte d'actionnaires de la part de MM. [EK] et [V] recevable ;

- débouté MM. [EK] et [V] avec les sociétés PHT international holding, Utoky, Dimap international, Paymap et Payroux de leur demande de nullité de la disposition du pacte octroyant à M. [C] la possibilité de désigner les administrateurs de catégorie A de la société de droit luxembourgeois Olkypay ;

En conséquence, statuant à nouveau,

A titre principal,

- débouter MM. [EK] et [V] ainsi que les sociétés PHT international holding, Utoky, Dimap international, Payroux et Paymap de leur appel incident ;

- les déclarer recevables et bien fondés en toutes leurs demandes, tant en leur qualité d'actionnaires de la société Olkypay que de signataires du pacte d'actionnaires du 11 mars 2015 ;

- déclarer nulle et non écrite la stipulation limitative des obligations de MM. [EK] et [V] stipulée au pacte d'actionnaires conclu entre les parties le 11 mars 2015 en raison de son caractère contradictoire avec l'intention commune des parties et du fait que cette clause vide de toute substance les obligations essentielles dudit pacte d'actionnaires ;

- déclarer que MM. [EK] et [V], en leurs qualités de signataires du pacte d'actionnaires du 11 mars 2015 et d'administrateurs délégués, ainsi que les sociétés PHT international holding, Utoky, Dimap international, Paymap et Payroux ont manqué délibérément à leur obligation d'exécuter de bonne foi le pacte d'actionnaires et d'autre part, violé leurs engagements contractuels au titre dudit pacte en ayant :

* violé les règles de gouvernance et d'information renforcée stipulées au pacte d'actionnaires ; * dissimulé la résiliation unilatérale par la société Veolia de son contrat avec la société Olkypay représentant un impact défavorable supérieur à 100 000 euros pour la société Olkypay ;

* décidé de retenir irrégulièrement des fonds appartenant à la société Veolia ;0

* décidé de prélever de manière unilatérale sur les fonds susvisés des montants correspondant aux factures mensuelles de la société OlkyPay ;

* émis par le biais de leur holding personnelle et sans accord préalable des autres signataires du pacte d'actionnaires une action traçante au bénéfice de M. [CW] [B] ;

- déclarer que ces fautes leur ont causé des préjudices ;

- déclarer que la responsabilité contractuelle de MM. [EK] et [V] ainsi que des sociétés PHT international holding, Utoky, Dimap international, Paymap et Payroux est engagée au titre des fautes ainsi commises ;

A titre subsidiaire,

- déclarer que les malversations, man'uvres frauduleuses, dissimulations volontaires et réticences dolosives commises par MM. [EK] et [V] leur ont causé un préjudice, ce qui engage la responsabilité extracontractuelle de MM. [EK] et [V] ;

en conséquence et en tout état de cause,

- condamner in solidum MM. [EK] et [V] avec les sociétés PHT international holding, Utoky, Dimap international, Paymap et Payroux à payer à chacun des appelants, à l'exception de M. [C], la somme d'un euro symbolique en réparation de leur préjudice moral ;

- condamner in solidum MM. [EK] et [V] avec les sociétés PHT international holding, Utoky, Dimap international, Paymap et Payroux à payer la somme de 200 000 euros à M. [C] en réparation de son préjudice moral ;

- condamner in solidum MM. [EK] et [V] avec les sociétés PHT international holding, Utoky, Dimap international, Paymap et Payroux à leur payer la somme de 400 000 euros en réparation de leur préjudice matériel et en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- prononcer la publication de la décision de condamnation à intervenir dans l'Agefi et Les Echos;

- condamner in solidum MM. [EK] et [V] ainsi que les sociétés PHT international holding, Utoky, Dimap international, Paymap et Payroux aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de maître Franck Lafon, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

MM. [EK] et [V] ainsi que les sociétés Utoky, Payroux, PHT international holding, Dimap international et Paymap, en présence de la société Olkypay, dans leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 8 septembre 2022, demandent à la cour de :

Sur l'appel principal,

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

- débouté M. et Mme [C], M. [L] [G], M. et Mme [I], M. et Mme [J], les sociétés Appia et DGL partners de leurs demandes au titre du préjudice moral ;

- dit irrecevable la demande de ces derniers 'en action ut singuli' ;

- condamné M. et Mme [C], M. [L] [G], M. et Mme [I], M. et Mme [J], les sociétés Appia et DGL partners à leur payer solidairement la somme totale de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- condamné solidairement M. et Mme [C], M. [L] [G], M. et Mme [I], M. et Mme [J], les sociétés Appia et DGL partners aux dépens ;

- débouter les appelants au principal de toutes leurs demandes aux fins de dire et juger que MM. [EK] et [V], en leur qualités de signataires du pacte d'actionnaires du 11 mars 2015 et d'administrateurs délégués, et les sociétés Paymap, Payroux, Dimap International, PHT international holding et Utoky, en leur qualité, ont manqué délibérément à leur obligation d'exécuter de bonne foi le pacte d'actionnaires et d'autre part, violé leurs engagements contractuels au titre dudit pacte ;

Sur l'appel incident,

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

- dit recevable la demande des appelants fondée sur la violation du pacte d'actionnaires à l'encontre de MM. [EK] et [V] ;

- dit recevable la demande des appelants fondée sur la révocation des mandats de MM. [C] et [H] à l'égard de MM. [EK] et [V] et de la société Paymap ;

- déclarer les appelants au principal irrecevables en leur demande fondée sur la violation du pacte d'actionnaires à l'encontre de MM. [EK] et [V] ;

- déclarer les appelants au principal irrecevables en leur demande fondée sur la révocation des mandats de M. [C] et M. [H] à l'égard de MM. [EK] et [V] et de la société Paymap ;

En tout état de cause, sur l'article 700 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné les appelants au principal solidairement à leur payer la somme totale de 50 000 euros ;

Y ajoutant,

- condamner in solidum les appelants au principal à leur payer à ce titre la somme totale 100 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner in solidum les appelants au principal aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 septembre 2022.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

Aucun moyen n'étant soulevé ou susceptible d'être relevé d'office, il convient de déclarer les appels principal et incident recevables.

Il est précisé en préalable que d'une part, conformément à la clause 18 du pacte d'actionnaires, celui-ci est soumis au droit français et que d'autre part, les appelants, comme ils le mentionnent en page 16 de leurs écritures, n'exercent plus en appel l'action ut singuli de sorte que le jugement est confirmé en ce que le tribunal les a jugés irrecevables en cette action.

La cour, en application de l'article 954 du code de procédure civile, ne statuant que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions des parties, n'a pas à examiner l'appel incident uniquement évoqué par les intimés dans les motifs de leurs conclusions relativement à leur demande aux fins de nullité de la disposition du pacte octroyant à M. [C] la possibilité de désigner les administrateurs de catégorie A de la société Olkypay, dont le tribunal les a déboutés.

Sur les fins de non-recevoir opposées aux prétentions des appelants :

Les appelants, rappelant les dispositions de l'article 30 du code de procédure civile, font valoir que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l'action et qu'en matière contentieuse, a intérêt à agir toute personne dont la prétention constitue un moyen de faire cesser le dommage qu'elle subit.

Ils soutiennent qu'ils sont parfaitement recevables en leur action dans la mesure où les contestations élevées par les intimés et les moyens qu'ils développent, à la lecture des pages 48 à 50 de leurs conclusions, constituent non une fin de non-recevoir relevant du droit d'agir mais une défense au fond portant sur le bien fondé de l'action en responsabilité engagée contre eux, les intimés opérant de toute évidence une confusion entre les conditions de recevabilité de l'action qui sont en l'espèce parfaitement caractérisées et son bien fondé.

Ils observent que la question de savoir s'ils sont en droit d'invoquer à l'encontre de MM. [V] et [EK] des violations des stipulations du pacte d'actionnaires pose la question de l'étendue des obligations de ces derniers au regard du pacte, ce qui est bien une question de fond.

Les intimés, au visa des dispositions des articles 31, 32 et 122 du code de procédure civile, soutiennent que les appelants sont irrecevables pour défaut de droit d'agir à l'encontre de MM. [EK] et [V] dès lors que leur action est fondée sur la responsabilité contractuelle de ces derniers, laquelle est subordonnée à l'existence et à la portée de leurs obligations issues de leur souscription au pacte d'actionnaires dont il résulte, à la lecture des clauses 13.3,13.4 et 13.7, que leurs engagements à l'égard des actionnaires de la société Olkypay se limitent, à l'exclusion de toutes autres, aux seules clauses précitées, 'qu'ils ne sont pas individuellement et personnellement liés contractuellement à l'intégralité du pacte' et qu'ils ne sauraient se confondre avec leurs holdings personnelles dès lors qu'ils ne sont signataires du pacte qu'en leur qualité personnelle. Ils en concluent que les appelants sont irrecevables à agir sur le fondement de dispositions autres du pacte qui ne les engagent en aucune façon et que le jugement devra être infirmé de ce chef.

Ils soutiennent, pour conclure à l'irrecevabilité des prétentions fondées sur la révocation des mandats de MM. [C] et [H], que la responsabilité de la révocation d'un dirigeant social pèse sur la société et non sur les associés qui ont participé au vote et dont la responsabilité ne peut être recherchée que par l'imputation d'une faute détachable, laquelle est incompatible avec l'exercice normal des prérogatives attachées à la qualité d'associé et est caractérisée par l'intention de nuire ou une volonté malveillante ; qu'en conséquence, en l'espèce, la révocation des mandats invoquée par les appelants ne saurait être imputée à la société Paymap pas plus qu'à MM. [EK] et [V] mais uniquement à la société Olkypay de sorte que le jugement devra être également infirmé en ce qu'il a déclaré la demande de révocation des mandats recevable.

Conformément à l'article 30 du code de procédure civile, l'action est le droit, pour l'auteur d'une prétention, d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée.

Selon l'article 31 du même code, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention.

Le demandeur à l'action doit justifier, à la date de l'introduction de l'instance, d'un intérêt juridique suffisant et direct, cette exigence ne se confondant pas avec le bien fondé de la demande.

Il est mentionné en page 3 du pacte d'actionnaires que MM. [EK] et [V] interviennent au pacte pour les seuls besoins des obligations qui leur incombent au titre des clauses 13.3 'Engagement de non- concurrence', 13.4 'Loyauté' , 13.7 'Engagements divers', de sorte que les appelants qui discutent les conditions d'application de cette clause limitative d'obligations et demandent à la cour notamment de la considérer comme non écrite, sont recevables à engager la responsabilité de ces derniers au titre du non respect du pacte d'actionnaires, la cour ne pouvant apprécier si les conditions de mise en oeuvre de la responsabilité de MM. [V] et [EK] sont réunies que dans le cadre de l'examen au fond de la demande des appelants.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

S'agissant des prétentions en lien avec la révocation des mandats de deux des administrateurs dont M. [C], il ressort des conclusions des appelants (pages 43 et 44) que ces derniers, 'indépendamment des conditions de cette révocation', reprochent pour l'essentiel aux intimés de n'avoir pas informé les deux administrateurs concernés de cette révocation et, au mépris des règles de représentation et de fonctionnement du conseil d'administration prévues au pacte d'actionnaires, d'avoir fait entrave à la nomination de nouveaux administrateurs de catégorie A ; les appelants ne contestent donc pas la révocation en elle-même mais les suites de cette révocation.

La fin de non-recevoir tirée de l'appréciation de la révocation de ces deux administrateurs est par conséquent sans objet dès lors qu'aucune faute n'est soutenue de ce chef de sorte qu'il n'y a pas lieu à infirmation du jugement à ce titre.

Sur les manquements invoqués par les appelants :

Les appelants, après avoir souligné qu'une condition déterminante de leur consentement tenait à l'établissement de règles fixant des limites au pouvoir discrétionnaire de MM. [V] et [EK], font valoir que ces derniers ainsi que leurs sociétés Utoky et Paymap ont commis des violations graves et répétées du pacte d'actionnaires dont les règles de gouvernance visaient à créer un équilibre des pouvoirs au sein de la direction, à mettre en place une saine répartition des droits et obligations des actionnaires majoritaires et minoritaires afin d'éviter les abus de pouvoir, cet objectif devant être assuré principalement par le biais de droits de véto au travers de la représentation des actionnaires minoritaires au conseil d'administration, d'une obligation renforcée d'information et de règles de composition et de fonctionnement du conseil d'administration. Ils invoquent, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, quatre manquements concernant :

- l'action traçante consentie au profit de M. [B] :

Après avoir rappelé que par les clauses de restriction des transferts de titres prévues au pacte d'actionnaires, les parties entendent maintenir inchangé l'équilibre financier trouvé au jour de leur entrée au capital, les appelants font état du montage opaque mis en place par M. [EK] via sa holding personnelle, la société Utoky, par l'émission d'une action traçante reflétant 21,7391 % des performances et revenus des actions détenues par cette dernière dans la société Olkypay et de la volonté de dissimulation de ce mécanisme complexe dont ils ont eu connaissance pour la première fois lors de la parution le 24 novembre 2016 de l'article de Médiapart ; ils analysent les notions de 'Titre' puis de 'Transfert' définies par le pacte d'actionnaires en soulignant notamment que l'intention des parties, en utilisant des termes et expressions d'une portée générale, a été de ne pas limiter la définition des titres aux seules valeurs mobilières émises par la société Olkypay mais au contraire de la définir au regard notamment des droits sur les profits ou revenus tirés de la revente de la société Olkypay que ces valeurs pourraient attribuer à leur propriétaire. Ils prétendent que l'émission de l'action traçante constitue une violation imputable aux intimés et plus spécifiquement à M. [EK], en sa qualité d'actionnaire unique et de représentant légal de la société Utoky, tant de la lettre que de l'esprit du pacte d'actionnaires au titre de l'interdiction de procéder à des transferts portant sur tous droits dérivant d'une valeur mobilière émise par la société Olkypay ; ils analysent la note du professeur [TU], communiquée par les intimés, pour prétendre qu'elle conforte leur position, en particulier en ce qu'elle affirme que l'action traçante est une technique de transfert de valeur économique puis exposent que l'action traçante a été émise en violation de l'interdiction posée par l'article 4 du pacte d'actionnaires sur l'inaliénabilité temporaire des titres et qu'aux termes du protocole d'accord secret signé le 1er juillet 2015, M. [B] se voit octroyer des droits directs sur la société Olkypay, ajoutant que la société Utoky avait donné procuration à M. [B] pour agir en son nom notamment vis-à-vis de la société Olkypay. Ils soulignent que la volonté de MM. [EK] et [B] était de mettre ce dernier dans une situation équivalente à celle d'un actionnaire à part entière de la société Olkypay, mais de manière dissimulée, soutenant que M. [EK] avait parfaitement conscience que les actionnaires minoritaires risquaient fortement de refuser l'entrée au capital de la société Olkypay de M. [B], principal négociateur du contrat Veolia.

Ils ajoutent enfin que l'émission de l'action traçante au profit de la société Gaway en lui transférant des droits appartenant à la société Utoky, signataire du pacte d'actionnaires, a rompu l'alignement des intérêts voulu par les parties et que son mécanisme, en violation de l'obligation de bonne foi prévue à l'ancien article 1134 alinéa 3 du code civil et dont découle l'obligation de loyauté pesant sur les parties à un contrat ainsi qu'en violation tant de la lettre que de l'esprit du pacte d'actionnaires, a permis de cacher aux autres actionnaires signataires du pacte l'arrivée d'un nouvel intéressé aux performances de la société Olkypay, la technique de l'action traçante, par son opacité, ayant été utilisée dans le seul but de contourner les restrictions imposées par le pacte d'actionnaires concernant les transferts ;

- les violations répétées du pacte d'actionnaires sur la gestion du litige avec Veolia, en particulier au regard de l'obligation de recueillir l'accord préalable du conseil d'administration pour certaines décisions importantes et/ou stratégiques.

Ils exposent que le pacte convenu entre les actionnaires limite en sa clause 2.2, pour les décisions qui y sont visées, les pouvoirs des administrateurs délégués et ce, afin de garantir l'équilibre entre d'une part ces derniers et l'actionnaire majoritaire, la société Paymap que ceux-ci détiennent via leurs holdings personnelles, et d'autre part les minoritaires, cette clause visant en particulier 'toute décision tenant à la gestion d'un litige pouvant représenter un impact défavorable sur la société supérieur à 100 000 euros' ; que sans même en avertir le conseil d'administration, les administrateurs délégués, à compter du 1er février 2017, ont décidé de gérer seuls le litige Veolia, citant plusieurs décisions unilatéralement prises et reprochant à cet égard au tribunal plusieurs erreurs de raisonnement et d'appréciation alors que compte tenu notamment des enjeux du litige opposant les sociétés Olkypay et Veolia, il est incontestable que l'ensemble de ces décisions relève de la clause 2.2 précitée, sans qu'il y ait lieu ni de s'interroger sur le caractère licite ou non de ces décisions ni de tenir compte du quitus donné par l'assemblée générale du 27 février 2017 sur les actions engagées par les administrateurs délégués concernant le litige Veolia ;

- l'obligation d'information à la charge de MM. [EK] et [V], en leur qualité d'administrateurs délégués, visée à l'article 2.4 du pacte d'actionnaires :

Observant que cette obligation fondamentale, à la charge des associés fondateurs dont la société Paymap et des administrateurs délégués, de les tenir informés des éléments financiers relatifs à la société Olkypay et des événements importants ou de nature à avoir un impact significatif sur l'activité et/ou la situation financière de cette dernière, devait être exécutée loyalement, sans réticence ni mauvaise foi, les appelants font valoir qu'à la suite de la publication de l'article de Médiapart, MM. [EK] et [V] ont cessé de respecter les obligations mises ainsi à leur charge quant à la transmission sans délai des informations relatives à la résiliation du contrat Veolia et de ses motifs alors que celle-ci avait pour conséquence la perte immédiate de 95 % du chiffre d'affaires de la société et un risque quasiment certain de contentieux. Les appelants font état d'une transmission tardive et incomplète de cette information, effectuée la veille de la révocation des MM. [C] et [H], et sans mention des agissements frauduleux imputables aux administrateurs délégués et reprochés dans la lettre de résiliation de la société Veolia que les administrateurs délégués ont refusé de communiquer ; ils expliquent que la violation de cette obligation a eu des conséquences extrêmement graves dans la mesure où elle a en pratique privé les autres administrateurs de la possibilité de faire usage du droit de véto que leur attribue le pacte d'actionnaires;

- le non remplacement de MM. [C] et [H] en violation des stipulations du pacte d'actionnaires sur la gouvernance de la société et de l'obligation de bonne foi et de loyauté contractuelle:

Les appelants exposent que depuis le 27 février 2017, date de la révocation de MM. [C] et [H] de leurs mandats, le conseil d'administration, faute de remplacement, n'est plus constitué conformément aux dispositions du pacte d'actionnaires en son article 2.2. et qu'ils se trouvent privés définitivement du contre-pouvoir qui leur était assuré par le droit de véto accordé aux autres administrateurs de la société, en méconnaissance de l'objectif poursuivi par les parties au pacte.

Après avoir analysé l'équilibre des pouvoirs garantis par le pacte d'actionnaires et observé notamment que le pouvoir de nommer et révoquer les membres du conseil d'administration est uniquement exercé par la société Paymap, elle-même contrôlée et dirigée par M. [EK] et par son actionnaire majoritaire, la société Payroux, elle-même contrôlée et dirigée par ce dernier et par la société Utoky que celui-ci dirige également ainsi que par la société PHT international contrôlée par M. [V] et dirigée par M. [EK], ils soutiennent qu'en faisant délibérément entrave, à la suite de la révocation précitée de MM. [C] et [H], à la nomination de nouveaux administrateurs de catégorie A suivant une liste proposée par M. [C], MM. [EK] et [V] ont de nouveau violé leurs obligations contractuelles au détriment des appelants et qu'il en est de même suite au remplacement non conforme de M. [L] qui a démissionné de son mandat d'administrateur en septembre 2017.

Enfin les appelants demandent à la cour de juger non écrite la clause limitative des obligations de MM. [V] et [EK] que ces derniers invoquent pour tenter de se soustraire au pacte d'actionnaires. Ils font valoir en premier lieu que le pacte d'actionnaires a été prévu pour encadrer la gestion de la société, préserver ses intérêts et donner des garanties aux investisseurs financiers ; qu'en particulier, contrairement à ce que tentent de faire croire MM. [V] et [EK] qui détiennent une participation majoritaire au capital de la société Olkypay via leurs holdings personnelles, ceux-ci sont individuellement et personnellement liés à l'intégralité du pacte d'actionnaires conformément aux termes du paragraphe B du préambule qui, par la précision apportée sur la détention indirecte au capital de la société Olkypay, concerne les parties qui ne sont pas directement actionnaires ; qu'en leur qualité de parties au pacte ceux-ci sont tenus également de respecter des engagements autres que ceux prévus dans la clause litigieuse, en particulier l'objet du contrat stipulé au paragraphe D du préambule outre les obligations découlant de l'article 2.2 du pacte dont ils sont devenus personnellement débiteurs ; que ceux-ci ont nécessairement reçu, en conséquence de leur mandat au titre du pacte d'actionnaires, la charge de veiller pour le compte de la société Olkypay, gardienne du pacte, au respect et à la bonne exécution de toutes les stipulations de celui-ci, ceux-ci devant a minima s'abstenir de commettre une quelconque violation du pacte d'actionnaires en application du principe d'ordre public d'obligation de bonne foi.

Ils soutiennent en second lieu que la clause invoquée par les intimés qui vide de sa substance le pacte d'actionnaires et doit être réputée non écrite ne saurait avoir pour effet de contredire la portée des obligations essentielles prévues par le pacte d'actionnaires, observant aussi que les conditions d'application de cette stipulation limitative sont strictement circonscrites dans le cas où MM. [EK] et [V] ne seraient plus administrateurs délégués de la société et/ou ne détiendraient plus de participation (directe ou indirecte) au capital de la société Olkypay et qu'ils n'ont consenti à investir qu'à la condition d'avoir un droit de regard sur la gestion de la société et d'être tenus informés par les administrateurs délégués devant obtenir leur accord pour la prise de certaines décisions. Ils précisent que MM. [EK] et [V] sont spécifiquement visés par les clauses du pacte soit en leur qualité de parties au pacte d'actionnaires (clauses 2.2 k et 3), soit en qualité d'administrateurs délégués (clause 2.4), soit en qualité de dirigeants des associés initiaux, de sorte qu'admettre que ces derniers ne seraient tenus que par les clauses 13.3,13.4 et 13.7 du pacte serait en totale contradiction avec les autres stipulations du pacte et le rendrait inopérant et inutile puisque cela reviendrait à les affranchir des obligations qui y sont prévues pour assurer aux investisseurs financiers un droit de regard sur la gestion de la société.

Subsidiairement, si la cour ne retenait pas la responsabilité contractuelle de MM. [EK] et [V], ils invoquent leur responsabilité délictuelle au visa des anciens articles 1382 et suivants du code civil.

Les intimés qui soutiennent que les accusations des appelants sont totalement infondées comme l'a jugé à bon droit le tribunal, s'expliquent sur chacun des manquements allégués.

- L'émission d'une action traçante au bénéfice de M. [B] :

Après avoir rappelé la définition et les effets d'une action traçante en soulignant notamment que le titulaire de cette action, émise par la société émettrice, demeure un tiers par rapport à la société exerçant l'activité reflétée, les intimés font valoir que l'action traçante au profit de la société Gaway, actionnaire de la société Utoky et majoritairement détenue par M. [B], ne constitue en aucune manière un 'Titre' et que son émission ne correspond pas à un 'Transfert' au sens du pacte au regard des définitions qui y sont données, comme le confirme le professeur [E] [TU] ; que les appelants, qui n'ont aucun droit de regard sur la société Utoky et sur cette décision et qui soutiennent qu'elle leur aurait été dissimulée, cherchent à entretenir une confusion entre les titres des sociétés Olkypay et Utoky et assimilent à tort la notion de transfert de valeur économique à celle du transfert définie dans le pacte de sorte qu'il ne peut leur être opposé de violation du pacte au titre de l'inaliénabilité temporaire des titres et du droit de préemption. Ils ajoutent que cette action ne donne droit à aucun dividende, aucun profit, boni de liquidation ou droits de vote de la société Olkypay mais seulement à une part du profit de la société Utoky de sorte que M. [EK] n'avait pas à en informer les administrateurs dans la mesure où aucune disposition du pacte n'impose aux actionnaires de la société Olkypay d'obligation d'information sur la répartition ou les opérations de leur propre capital, que l'émission de cette action ne peut avoir eu lieu en violation de l'obligation de confidentialité stipulée au pacte puisque celui-ci ne s'applique pas aux actions de la société Utoky et que de surcroît cette opération, réalisée par les avocats rédacteurs du pacte et amis très proches de MM. [H] et [C], était parfaitement connue des administrateurs de catégorie A.

Ils soutiennent également que les appelants, pour soutenir que l'émission de l'action traçante serait intervenue en violation de l'obligation de bonne foi et de loyauté contractuelle, outre qu'ils semblent confondre la gouvernance de la société Olkypay avec celle de la société Utoky, procèdent par affirmation sans verser une seule preuve permettant d'en attester et que ceux-ci font une exploitation totalement inappropriée et une interprétation erronée du protocole d'accord et de son annexe signés le 1er juillet 2015 entre la société Utoky, MM. [EK] et [B], en prêtant à ses signataires des intentions imaginaires de dissimulation ; ils indiquent que celui-ci n'avait rien de secret dans la mesure où il a été rédigé par un avocat du cabinet DLA Piper, en relation étroite avec M. [C], que surtout, il ne confère aucune participation à M. [B] dans le capital social de la société Olkypay dans la mesure où les droits de la société Gaway sont circonscrits à sa participation dans la société Utoky au titre de l'action traçante comme le stipule l'article 3 du protocole précité, que les différentes garanties accordées à M. [B] visent exclusivement à renforcer son droit de propriété qui découle directement et uniquement de l'action tracée 'en dépit des affabulations des appelants', et qu'en tout état de cause les différentes stipulations du contrat de gage dont les appelants se prévalent, lequel au demeurant n'est pas prohibé dès lors qu'il garantit l'obligation de paiement au titre de l'action traçante émise par la société Utoky et non Olkypay, doivent être interprétées à la lumière du droit luxembourgeois et non du droit français, conformément à la volonté des parties ;

- s'agissant de la violation du pacte à propos de l'interdiction de transfert des titres, lors de la cession de 3 817 actions de la société Olkypay à la société Digital transactions services (DTS), les intimés exposent que cette opération ne rentre pas dans le périmètre du pacte dès lors que la société Olkypay n'y est pas partie et que rien ne démontre que cette cession en constituerait une violation par MM. [EK] et [V] qui non seulement ne sont pas engagés par les dispositions des articles 9 et 5 du pacte mais qui en outre ne sont pas intervenus dans l'opération ;

- la violation du pacte au titre du litige avec la société Veolia eau :

S'agissant de la liste dressée par les appelants sur les décisions prises prétendument unilatéralement par MM. [EK] et [V] en violation de l'article 2.2 du pacte sans recueillir l'accord préalable du conseil d'administration, les intimés reprochent aux appelants de ne justifier aucunement que le conseil d'administration n'a pas été informé de ces prétendues décisions.

Sur la 'prétendue violation de l'obligation d'information renforcée supposément prévue au pacte', en particulier en son article 2.4, les intimés, après avoir relevé qu'aucune disposition du pacte ne prévoit ni de délai dans lequel l'information doit être transmise ni de sanction en cas d'absence d'information, exposent que M. [V], par lettre simple et recommandée du 24 février 2017, a informé l'ensemble des actionnaires de la société Olkypay de la rupture brutale du contrat par la société Veolia, des motifs de cette résiliation intervenue par lettre du 14 février 2017 et des mesures déjà prises pour en limiter les conséquences, évoquant au surplus les informations détenues par M. [C] dès le mois de janvier 2017, 'la communauté d'intérêts' et la 'connivence' de ce dernier avec la société Veolia eau qu'il a 'indéniablement aidée' dans sa stratégie ' visant à accaparer la plate-forme SIO4' développée par la société Olkypay, tous deux poursuivant notamment leur collaboration sur de nombreux projets.

Ils soulignent qu'aucune disposition du pacte ne permet d'affirmer que la transmission de l'information aurait dû s'effectuer sans délai et que comme en première instance, les appelants persistent dans leur démarche sans rapporter d'élément permettant d'étayer leurs seules affirmations ; qu'aucune décision de justice définitive sur le fond n'a jugé que les agissements incriminés par les appelants au principal, lesquels constituent la reprise à l'identique des arguments de la société Veolia, constitueraient une quelconque faute, qu'en outre si le quitus donné par l'assemblée générale n'a pas pour effet d'éteindre une action en responsabilité contre les administrateurs, celui-ci démontre cependant l'assentiment exprimé par l'assemblée générale du 27 février 2017 aux actions engagées par les administrateurs délégués ; que de surcroît, les appelants ne prouvent pas que les actions entreprises par les administrateurs délégués sont couvertes par les dispositions de l'article 2.2 dès lors que le montant visé à cet article n'est pas connu.

- la révocation des administrateurs de catégorie A :

Observant que les demandes à ce titre ne reposent sur aucun fondement juridique, les intimés rappellent que les administrateurs peuvent être révoqués à tout moment par l'assemblée générale sans préavis, ni indemnités ni motif, cette règle d'ordre public étant d'ailleurs rappelée à l'article 2.2 du pacte de sorte qu'il importe peu qu'il n'ait pas été communiqué l'ordre du jour faisant état de la révocation envisagée.

Détaillant les modalités de la composition du conseil d'administration, les décisions prises par ce dernier et les modalités de leur adoption aux termes du pacte d'actionnaires, les intimés soulignent qu'aucune de ses décisions ne peut être prise concernant la société sans le vote positif d'un administrateur de catégorie A, choisi par M. [C] de sorte que c'est entre les mains de ce dernier qu'est remis le contrôle entier de la société qui ne peut agir sans son accord alors que dans le même temps la désignation de MM. [EK] et [V], en leur qualité d'administrateurs délégués, ne leur confère aucun pouvoir de contrôle de la société. Ils remarquent de plus que suite à la révocation de MM. [C] et [H], le conseil d'administration n'a pu être valablement constitué que de la seule faute de M. [C] qui délibéremment n'a proposé aucune personne en remplacement, dénonçant ainsi la mauvaise foi des appelants qui invoquent de prétendues violations du pacte résultant de leur seule turpitude.

Enfin s'agissant de la stipulation limitative des engagements de MM. [EK] et [V], les intimés soutiennent que la demande des appelants ne saurait prospérer dès lors que rien dans cette mention n'est contraire à la loi qui justifierait qu'elle soit stipulée non écrite, soulignant que la responsabilité contractuelle de MM. [EK] et [V], au titre de prétendues violations du pacte dont ils ne sont signataires qu'en leur qualité personnelle, ne peut être engagée que sur le fondement des obligations limitativement énumérées qui leur incombent.

Il incombe à la cour d'examiner chacun des manquements invoqués, étant précisé que les appelants ne font plus état à ce titre de la cession par la société Olkypay de 3817 actions auto-détenues à la société Digital transactions services, ainsi que la question de la clause du pacte d'actionnaires relative aux obligations de MM. [V] et [EK].

Sur l'action traçante émise au profit de la société Gaway :

L'action traçante, ou ' action reflet', si elle reflète ou retrace les performances d'une catégorie d'actifs, celles d'une filiale en particulier, est émise par la société mère pour isoler une activité économique spécifique de sorte qu'elle confère à son porteur la qualité d'actionnaire de la société qui l'émet, celui-ci demeurant un tiers par rapport à la société exerçant l'activité reflétée.

Aux termes de l'assemblée générale extraordinaire du 30 novembre 2015, l'action traçante souscrite par la société Gaway dont M. [B] et plusieurs membres de sa familles sont actionnaires, correspond à une action émise par la 'Société' laquelle désigne, d'après les mentions préalables du procès-verbal de cette assemblée, la société Olky international holding dénommée la société Utoky selon la première résolution de la même assemblée, société holding dirigée par M. [EK], laquelle détenait alors 22% du capital de la société Olkypay ; les appelants confirment d'ailleurs que l'action traçante a été émise par la société Utoky.

Selon la quatrième résolution de cette assemblée, les statuts de la société Utoky ont été modifiés pour stipuler en leur article 5 que notamment, 'l'action traçante reflétera 21,7391 % des performances et revenus des actions détenues par la société dans Olky payment service provider' et en leur article 15.3 qu' 'après la répartition de tous profits au compte de réserve statutaire (...), tous les profits supplémentaires seronts distribués et payés comme suit : a) le détenteur de l'action traçante aura droit à 21,7391 % des produits et revenus dérivés par la société (en ce compris, sans limitation, dividendes, plus-value, boni de liquidation, produits des ventes et tout autre produit et revenu) des actifs désignés, moins 21,7391 % de tous les coûts et dépenses y relatifs et étant déterminés par le conseil d'administration' ; la lecture du protocole du 1er juillet 2015, communiqué à la suite de l'incident initié par les appelants et aux termes duquel la société Utoky, MM. [EK] et [B] avaient convenu de l'émission de cette action traçante, en prévoyant une clause de confidentialité, confirme que celle-ci est 'nouvellement émise par Utoky holding' et qu'elle 'reflètera' un pourcentage 'des performances et revenus des Titres détenus par Utoky holding dans la Société', le préambule de cet accord désignant ainsi la société Olkypay.

Selon l'article 3 du pacte d'actionnaire, 'chacune des parties s'interdit de transférer tous Titres qu'elle détient ou détiendra, si ce n'est conformément aux stipulations des présentes qui s'appliqueront par priorité à toutes autres stipulations ayant le même objet convenues entre les associés ou certains d'entre eux et dans les seuls cas qui y sont définis (...)' .

Selon l'article 4 b, il est prévu par le pacte que 'sauf dans le cadre d'un transfert autorisé conformément à l'article 9, les associés initiaux ne pourront transférer leurs Titres, directement ou indirectement, pendant une période expirant le 31 décembre 2020', étant précisé en page 8 du pacte que le terme 'Transfert' 'désigne notamment, sans que cette liste soit limitative, les transferts de droits d'attribution'.

Si les appelants soutiennent que l'émission de l'action traçante viole l'interdiction faite au pacte d'actionnaire des transferts de 'Titres'ainsi que la clause d'inaliénabilité temporaire des titres, la définition donnée à cette notion en page 8 du pacte ne permet pas, comme l'a déjà jugé le tribunal, de considérer que cette action traçante puisse constituer un 'Titre' au sens du pacte.

En effet, ce terme 'désigne toute valeur mobilière émise ou à émettre par la Société qu'il s'agisse, sans que cela ait un caractère limitatif, des Actions, d'obligations, d'obligations convertibles avec ou sans bons de souscription d'actions, remboursables en actions ou mixtes, de bons de souscription ou d'acquisition d'actions, ou de toute autre valeur mobilière d'une quelconque nature susceptible de donner droit à une part des profits, du boni de liquidation ou des droits de vote de la Société ou d'entraîner directement ou indirectement une augmentation de capital ou l'émission ou l'attribution de titre(s)donnant droit, en pleine propriété ou en usufruit, à une part des profits, du boni de liquidation ou des droits de vote de la société'.

Le mot 'Titre' ne désigne ainsi qu'une valeur mobilière émise ou à émettre par 'la Société', qui correspond, comme précisé en page 4 du pacte, à la société Olkypay, tous les autres termes successivement mentionnés après la locution 'qu'il s'agisse' constituant une liste, 'non limitative', d'exemples de 'Titres' sous réserve qu'il aient été émis par la société Olkypay, peu important que le dernier mot 'titre' cité dans cette énumération ne porte pas de majuscule. Pour le même motif, il ne peut être tiré de conséquence du fait que le pacte ait employé des formules très générales.

Par conséquent, quand bien même il est constant, à la lecture notamment du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire de la société Utoky, que la détention de l'action traçante permettra à son titulaire de bénéficier des revenus des actions détenues par cette société dans la société Olkypay et que celui-ci profitera, indirectement, des bénéfices réalisés par cette dernière, il s'agit uniquement d'un transfert de valeur économique, dans la limite de 21,7391 % des 22% représentant la part détenue par la société Utoky dans le capital de société Olkypay, soit 4,78 %, et non d'un transfert de titre, au sens du pacte, de la société Olkypay à la société Gaway et à ses actionnaires ; seule la société Utoky, en sa qualité d'actionnaire de la société Olkypay, perçoit directement, à hauteur de sa part dans le capital de cette dernière, les dividendes versés par celle-ci, l'action traçante émise par la société Utoky bénéficiant ensuite et uniquement indirectement de ces dividendes dans la limite du pourcentage convenu dans le cadre de cette opération qui ne confère à son détenteur, bénéficiaire indirect des dividendes de la société Olkypay, ni droit financier direct dans cette société ni prérogative juridique sur son activité.

Il est exact, comme le relèvent les appelants en produisant un mail de M. [EK] en date du 22 novembre 2016, que celui-ci a alors écrit que 'Il y a sans doute une mauvaise compréhension de cette notion d'action traçante qui n'apporte en réalité aucun privilège supplémentaire à celui des autres actionnaires d'Olkypay. Cette action traçante a permis de faire entrer un actionnaire supplémentaire après avoir bouclé le tour de table de mars 2015.' Ce mail ne peut être analysé comme un aveu de ce dernier alors même qu'il poursuit ses propos en ces termes : 'Il s'agit d'une action spéciale dans le capital d'Utoky, actionnaire minoritaire d'Olkypay, et non directement une action dans Olkypay. Elle permet à son détenteur de récupérer sa juste proportion des résultats d'Olkypay (ou plus value en cas de cession) par rapport à l'ensemble des résultats (ou plus-value) collectés par Utoky. A noter que le prix d'acquisition de cette action traçante est égal à celui payé par les nouveaux entrants en mars 2015 sans pour autant être dotée de droit de vote dans Olkypay (ce qui pourrait dès lors s'assimiler à des conditions économiques moins favorables que celles octroyées aux actionnaires entrés en mars 2015).'

Ainsi ce n'est que par un abus de langage que M. [EK] qui n'est pas juriste a pu indiquer que l'action traçante a fait 'entrer un actionnaire supplémentaire' dans la société Olkypay, ce que l'analyse du pacte, des modalités de l'action traçante et la suite de ses propos contredisent.

Il ressort de la lecture du protocole signé entre la société Utoky, MM.[EK] et [B] le 1er juillet 2015, que la société Utoky et M. [EK], son dirigeant, y ont consenti, comme précisé à l'article 5, 'à l'investisseur un droit irrévocable de bénéficier, au titre de la participation, à la Quote-part de Plus-Value', celle-ci correspondant selon les définitions données en pages 4 et 5 de ce protocole, au pourcentage convenu entre les parties des performances et revenus des titres détenus par la société Utoky dans la société Olkypay ; qu'en outre M. [EK] s'y est engagé à ce que la société Utoky 'bénéficie à tout moment des liquidités nécessaires afin de lui permettre de faire face à tout déficit ou perte qu'Utoky pourrait enregistrer du fait de participation qu'elle détient' dans d'autres sociétés afin 'que les produits qui remontraient à Utoky ne soient pas impactés par des pertes ou déficits qui seraient enregistrés au titre de ces participations'.

Il s'en déduit qu'il a été ainsi fourni des garanties à M. [B] pour l'assurer qu'il bénéficierait exactement du pourcentage de dividendes versés à la société Utoky par la société Olkypay, sans incidence d'éventuelles pertes résultant notamment d'autres participations détenues par la société holding Utoky dans d'autres sociétés ; cette garantie, qui s'inscrit dans les rapports entre ce dernier et la société Utoky et qui est sans impact à l'égard des actionnaires minoritaires de la société Olkypay, démontre au contraire que M. [B] ne percevait pas directement les dividendes versés par la société Olkypay car sinon le dirigeant de la société Utoky n'aurait pas eu à préserver ce dernier d'éventuelles pertes affectant les résultats de la société Utoky du fait de sa participation dans d'autres sociétés.

Par ailleurs, si dans l'annexe de ce protocole relative au contrat de gage sur créance que la société Utoky a accepté de consentir au bénéficiaire de l'action traçante, il est effectivement prévu qu'en cas de survenance d'un cas de réalisation du gage, le bénéficiaire sera autorisé à le faire réaliser de la manière la plus favorable prévue par la Loi ou par toute autre loi applicable et notamment de demander à la 'Société' le payement direct de toute somme due par cette dernière au titre des Créances', il ne peut être déduit de cette faculté offerte au bénéficiaire à l'égard directement de la société Olkypay, dans le cadre de l'exécution d'une mesure de sûreté, qu'il puisse être considéré comme bénéficiaire direct des dividendes versés par la société Olkypay à son actionnaire, la société Utoky.

L'émission de cette action traçante ne saurait donc être constitutive d'une violation des dispositions du pacte d'actionnaires relatives à la cession des titres.

S'agissant du manquement à l'obligation de loyauté à l'égard des investisseurs minoritaires, le seul fait que le protocole de juillet 2015 ait été établi par un avocat du cabinet DLA Piper dont les intimés affirment qu'il était 'en relation étroite' avec M. [C], est insuffisant, au contraire de ce qu'ils prétendent, pour établir que ce dernier et les deux autres membres du conseil d'administration nommés sur sa proposition aient été informés de l'action traçante qui y était déjà prévue.

Il est certain que l'émission de cette action traçante avait pour effet de permettre que l'identité de son bénéficiaire final soit masquée par une société écran ; il était en effet de l'intérêt de M. [B], au regard de sa position au sein de la société Veolia et de ses obligations à l'égard de son employeur, de garder secrète l'émission de cette action traçante qui lui offrait, indirectement et de façon occulte, un avantage économique sur d'une partie des dividendes de la société Olkypay, partenaire contractuelle de la société Veolia, ce qui ne pouvait générer qu'un conflit d'intérêts avéré.

Cette opération, en cas découverte par la société Veolia, ne pouvait qu'avoir une incidence néfaste sur la poursuite du contrat, dont il n'est pas discuté que l'impact sur le chiffre d'affaires de la société Olkypay était majeur.

Dans ces circonstances, l'émission de cette action, en l'absence d'information sur cette opération des administrateurs issus de la liste établie par M. [C], lesquels aurait pu la retransmettre aux minoritaires, constitue un manquement à l'obligation de loyauté à laquelle sont tenues les parties au pacte d'actionnaires en application de l'ancien article 1134 du code civil et de l'obligation de bonne foi et donc un manquement à l'esprit du pacte, lequel est imputable non seulement à M. [EK] mais aussi à M. [V] qui, en sa qualité de dirigeant de la société Olkypay dont ils étaient tous deux administrateurs délégués, ne pouvait pas ignorer cette opération ainsi qu'à la société Utoky, au regard de son obligation de loyauté, quand bien même aucune disposition du pacte, comme le relèvent les intimés, n'imposait à cette dernière, en sa qualité d'actionnaire de la société Olkypay, d'informer les autres actionnaires, notamment minoritaires, de la répartition ou des opérations concernant son propre capital.

Un manquement est ainsi caractérisé à l'obligation de loyauté et à l'esprit du pacte à l'encontre de MM. [EK] et [V] et de la société Utoky, représentée par M. [EK]. Dès lors que les autres sociétés n'étaient pas impliquées par cette action traçante, la société Paymap n'étant pas encore constituée lors de cette opération, leur responsabilité ne peut être engagée à ce titre, ces sociétés étant des personnes distinctes de la personne de leur dirigeant.

Sur la clause du pacte d'actionnaires limitant les obligations de MM. [V] et [EK] :

Il est effectivement précisé en en-tête du pacte d'actionnaires que MM. [V] et [EK] interviennent 'au présent pacte pour les seuls besoins des obligations qui leur incombent au titre des clauses 13.3 'engagement de non- concurrence' 13.4 'loyauté' 13.7 'Engagements divers' du présent pacte.

Il est constant que le préambule du pacte précise :

- en son paragraphe B, que les 'Parties détiennent ensemble, directement et indirectement, 100% des Titres (tel que ce terme est défini' au pacte) 'donnant accès, immédiatement ou à terme, au capital social de la Société et qui sont répartis entre elles conformément à ce qui figure en Annexe B.'

- en son paragraphe D, que les 'Parties ont souhaité déterminer dans le présent Pacte les règles particulières s'appliquant entre elles pour organiser leurs rapports au sein de la Société, la manière dont la Société sera gérée et les conditions qu'elles entendent respecter lors de la cession de tout ou partie de leur participation dans le capital de la Société'.

S'il peut être considéré que MM. [V] et [EK], du fait des actions qu'ils détiennent dans le capital des sociétés qui sont actionnaires de la société Payroux, elle-même actionnaire à 80 % de la société Paymap, actionnaire majoritaire de la société Olkypay, bénéficient indirectement des bénéfices tirés des dividendes de la société Olkypay, il ne peut être jugé ni qu'ils détiennent eux-même des titres dans le capital de cette société ni que la clause limitant la responsabilité de ces derniers contredit et vide de sa substance les autres clauses invoquées par les appelants alors même que les conditions d'application de cette clause, comme le relèvent les appelants, sont circonscrites pour le cas notamment où MM. [V] et [EK] ne seraient plus administrateurs délégués au sein de la société Olkypay.

En effet, d'après les seules clauses invoquées par les appelants,

- la clause 2.2 k, prévue au paragraphe 2.2 relatif au conseil d'administration et compris dans l'article 2 concernant la gouvernance de la société Olkypay, dispose que ' chacune des parties fera en sorte, dans la limite de ses pouvoirs au sein de la Société, que la Société ne prenne ou ne vote aucune décision ou mesure suivante, ou toute décision ou mesure conduisant en pratique aux mêmes conséquences que l'une quelconque des décisions suivantes, sans que cette décision ou mesure n'ait été préalablement approuvée par la majorité simple des membres du conseil d'administration présents ou représentés comprenant le vote positif d'au moins un membre du conseil d'administration désigné par OB', c'est-à-dire M. [C] ; la liste des actes ainsi visés est ensuite détaillée ; cette clause, qui s'applique à MM. [V] et [EK], en leur qualité d'administrateurs délégués et membres du conseil d'administration, ne peut entrer en contradiction avec la limitation litigieuse de leur responsabilité dès lors que la clause 2.2 k ne concerne que les parties disposant de pouvoirs au sein de la société Olkypay, ce qui n'est le cas de MM. [V] et [EK] que tant qu'ils en restent les administrateurs, ceux-ci n'étant pas en ce cas concernés par la limitation de l'article 13 et leur responsabilité individuelle pouvant être engagée s'ils commettent des manquements aux obligations leur incombant en qualité d'administrateurs délégués, telles que prévues par le pacte ;

- la clause 2.4 relative à l'information du conseil d'administration concerne exclusivement l'information incombant aux 'administrateurs délégués, assistés des autres associés initiaux', le terme d'associé désignant selon les définitions données à l'article 1 du pacte ' tout détenteur de Titres' ; cette obligation, dans la mesure où elle s'applique à MM. [V] et [EK] en leur qualité d'administrateurs délégués n'est pas davantage invalidée par la clause litigieuse qui ne s'applique à eux que pour le cas où ils ne sont plus administrateurs délégués et ne disposent plus des pouvoirs et obligations afférents à cette fonction ;

- la clause 3 concerne les 'principes généraux applicables aux Transferts' de Titres détenus par les parties au contrat ; dès lors que la cour a considéré que la notion de Titres ne concerne que les valeurs mobilières émises par la société Olkypay, la clause litigieuse limitant la responsabilité de MM. [V] et [EK] qui ne détiennent pas eux-mêmes de titres de la société Olkypay n'entre pas en contradiction avec cet article 3.

Dans ces circonstances, la clause litigieuse limitant la responsabilité de MM. [V] et [EK] ne saurait être déclarée nulle et non écrite ; il convient d'ajouter au jugement de ce chef.

Sur les violations du pacte d'actionnaires en lien avec la gestion du litige avec la société Veolia:

L'article 2 du pacte d'actionnaires , en son paragraphe 2.2 k, tel que cité cité ci-dessus et relatif à la gouvernance de la société Olkypay prévoit parmi les seize décisions devant être approuvées par la majorité simple des membres du conseil d'administration présents ou représentés comprenant le vote positif d'au moins un membre du conseil d'administration désigné par M. [C], 'toute décision tenant à la gestion d'un litige pouvant représenter un impact défavorable sur la Société supérieur à 100 000 euros'.

Ce même article, en son paragraphe n, précise que toute réunion et décision du conseil d'administration fera l'objet d'un procès-verbal signé par son président et un autre membre du conseil d'administration désigné par OB (M. [C]) qui sera communiqué aux membres du conseil d'administration dans les meilleurs délais à compter de sa signature'.

Il ressort des éléments du dossier, notamment les courriers échangés entre MM. [V] et [EK] et la société Veolia en février 2017 et les décisions judiciaires ayant opposé les sociétés Olkypay et Veolia devant le juge des référés et le juge de l'exécution, en première instance et en appel, que :

- MM. [V] et [EK], en leur qualité d'administrateurs délégués, ont décidé de retenir à compter du 10 février 2017, les sommes figurant aux soldes des comptes de paiement des sociétés du groupe Veolia et détenues pour le compte de ces sociétés pour un montant total de 7 191 588,41 euros selon la société Veolia, alors que les conditions générales des services de paiement prévoyaient un transfert quotidien de ces sommes ; ils se sont opposés aux demandes expresses de restitution de la société Veolia qui en a ensuite saisi le juge des référés ; par ordonnance du 7 avril 2017 confirmée en appel, celui-ci, s'il n'a pas accueilli la demande de condamnation provisionnelle d'un montant de 10 521 693,34 euros faute de justification suffisante du caractère non sérieusement contestable de ce montant, a en revanche considéré que l'obligation de la société Olkypay de verser les sommes recouvrées auprès des abonnés de la société Veolia et des filiales de celle-ci n'était pas sérieusement contestable et a fait obligation à la société Olkypay, sous astreinte, de reverser à la société Veolia et à ses filiales la totalité des sommes figurant au 14 février 2017 sur les comptes de paiement ouverts à leur nom ;

- MM. [V] et [EK], en leur qualité d'administrateurs délégués, ont également pris la décision au nom de la société Olkypay, notamment le 15 février 2017, de prélever sur les fonds détenus pour le compte de la société Veolia une somme de 1 097 333,33 euros, somme correspondant au montant de la facture de la société Olkypay et ce, sans autorisation de la société Veolia, celle-ci contestant cette décision ;

- c'est à l'initiative de la société Olkypay, représentée par ses dirigeants, que la procédure de référé devant le tribunal de commerce de Paris a été engagée, suite à une ordonnance du président du tribunal du 24 février 2017 l'y autorisant, afin notamment qu'il soit ordonné la poursuite des contrats ou subsidiairement, le maintien, pendant la période d'exécution des contrats, de leurs conditions, s'agissant en particulier de la rémunération de la société Olkypay représentant un montant mensuel de 1,097 millions d'euros, et encore plus subsidiairement, la condamnation provisionnelle de la société Veolia au paiement de la somme de 14 265 333,29 euros correspondant à treize mois d'exécution loyale du contrat ; elle a relevé appel de l'ordonnance du 7 avril 2017 .

Si les intimés observent que les conditions générales d'utilisation conclues entre les sociétés Veolia et Olkypay font du compte ouvert dans les livres de cette dernière un compte courant sur lequel toute écriture vaut paiement et intéresse par conséquent la gestion journalière des affaires de la société Olkypay, il ne peut être considéré que la décision, prise par les administrateurs délégués au nom de la société Olkypay, de bloquer les fonds destinés à la société Veolia et à ses filiales, payés par leurs abonnés, relève de la gestion journalière de la société Olkypay qu'ils avaient pouvoir d'assurer aux termes de l'article 2.1b qui leur donnait également pouvoir pour la représenter à l'égard des tiers ; au regard de son impact financier et de l'importance, non discutée, du chiffre d'affaires généré par le contrat de prestation de services conclu entre les sociétés Veolia et Olkypay, cette décision ressort de la gestion d'un litige pouvant représenter un impact défavorable sur la Société supérieur à 100 000 euros ; il en est de même, au regard des sommes en jeu, de la décision d'introduire l'action en référé et de poursuivre l'instance en appel, étant précisé que la décision dont appel qui ordonnait notamment à la société Olkypay de restituer à la société Veolia, dans les trente jours de son prononcé, les fonds détenus pour son compte, était assortie, passé ce délai, d'une astreinte de 100 000 euros par jour pendant une période de trente jours.

Par conséquent, au moins ces deux décisions nécessitaient d'être soumises au conseil d'administration, sans qu'il y ait lieu de s'interroger sur leur caractère licite ; il incombait aux deux administrateurs délégués, préalablement à la mise en oeuvre de ces décisions, de faire convoquer le conseil d'administration dont le pacte prévoit qu'il se réunit sur convocation d'un de ses membres.

Ces derniers, par conséquent, ne peuvent pas valablement imputer aux appelants la charge d'une preuve négative en soutenant que ceux-ci ne 'justifient aucunement que le conseil d'administration n'a pas été informé de ces prétendues décisions' alors même que s'agissant d'une obligation incombant aux administrateurs délégués, il leur appartient de prouver qu'ils s'en sont acquittés ; faute de tout élément en justifiant, la faute est suffisamment caractérisée à l'encontre de MM. [V] et [EK], administrateurs délégués de la société Olkypay et de la société Paymap, actionnaire majoritaire de la société Olkypay, celle-ci, en application de l'article 2.2 précité devant en cette qualité s'assurer que les décisions étaient prises conformément aux dispositions du pacte ; cette faute ne peut être imputée aux autres sociétés intimées, qui n'étaient plus actionnaires en 2017 de la société Olkypay et ne disposaient donc pas du pouvoir de s'assurer du respect de cette disposition, même si elles avaient renouvelé leur adhésion au pacte.

Le fait que lors de l'assemblée générale extraordinaire du 27 février 2017 il ait été 'donné quitus aux administrateurs délégués pour les réponses apportées et actions engagées et pour le choix des conseils' après présentation en séance des 'différents courriers de Veolia et les réponses apportées ainsi que les actions engagées' par la société ne peut suppléer l'absence d'autorisation préalable du conseil d'administration, d'autant que seuls les deux administrateurs délégués assistaient à cette assemblée, ce quitus ne figurant pas à l'ordre du jour figurant sur la convocation adressée le 16 février 2017 aux actionnaires de la société Olkypay.

Sur l'obligation d'information :

L'obligation d'information stipulée au pacte d'actionnaires est prévue à l'article 2.4 b) en ces termes :

'Les administrateurs délégués, assistés des autres associés initiaux, communiqueront à chacun des membres du conseil d'administration les informations suivantes : (...)

- toute information relative à des faits, événements ou circonstances pouvant affecter le patrimoine, les résultats, la situation financière ou les perspectives de la Société ;

- plus généralement, toute information utile à l'exercice par le conseil d'administration de sa mission générale de contrôle de la gestion de la Société.'

Comme l'a justement relevé le tribunal, aucune disposition du pacte d'actionnaires ne prévoit de délai dans lequel l'information doit être transmise, ce que ne discutent pas les appelants.

Pour qu'elle soit effective, il importe toutefois que cette information soit transmise dans un délai raisonnable et qu'elle soit suffisante, quand bien même le pacte d'actionnaires ne prévoit aucune sanction en cas de défaut d'information ; cette obligation d'information est en effet un élément indispensable de l'obligation de loyauté qui incombe aux parties au pacte d'actionnaires et aux dirigeants de la société.

Il est établi qu'après la résiliation du contrat Veolia, intervenue le 14 février 2017, dont personne ne discute que les membres du conseil d'administration devaient en être informés, une 'lettre ouverte aux actionnaires' de la société Olkypay datée du 24 février 2017, envoyée par lettre simple et recommandée selon les indications, non discutées, qui y sont portées, a été adressée aux intimés, pour les informer que la société Veolia avait 'mis fin brutalement à ses relations contractuelles avec Olkypay' en ces termes:

'Comme vous le savez, les relations avec Veolia se sont fortement dégradées après la publication de l'article de Mediapart du 24 novembre 2016, conduisant Veolia à prendre des mesures immédiates visant deux de ses cadres, et à diligenter un audit interne auquel nous avons apporté notre participation. (...) Dans ce contexte, et comme nous pouvions nous y attendre, Veolia (...) a mis fin brutalement à ses relations contractuelles' avec la société Olkypay.

Les mails adressés par M. [C] à M. [EK] dès le 25 février 2017 et se référant à cette lettre du 24 février établissent que les actionnaires minoritaires ont été informés, dans un délai raisonnable (dix jours), de la résiliation du contrat intervenue à l'initiative de la société Veolia

S'il est constant que cette lettre ne fait pas mention de l'intégralité de la lettre de rupture du contrat adressée par la société Veolia, laquelle met expressément en cause M. [EK], 'dirigeant et actionnaire d'Olkypay' et que les intimés n'allèguent pas avoir donné suite à la demande de M. [C] de communication de cette lettre dans des mails datés des 25 au 27 février 2017, les membres du conseil d'administration autres que les administrateurs délégués ont cependant été informés des éléments essentiels à connaître en cette qualité, à savoir la rupture du contrat par la société Veolia et le lien entre cette résiliation et l'action traçante et les événements dénoncés dans l'article de Médiapart.

Dans ces circonstances, les appelants ne sont pas fondés à invoquer, que ce soit sur le plan contractuel ou délictuel, un défaut d'information à l'encontre des intimés en lien avec la résiliation du contrat conclu avec la société Veolia.

Sur le non remplacement de MM. [C] et [H] :

Il ressort des éléments communiqués que :

- lors de l'assemblée générale du 27 février 2017, les quatrième et cinquième résolutions prévoyant la 'nomination comme administrateur de catégorie A de la Société avec effet immédiat d'une personne qui sera choisie en séance conformément à l'article 7.2 des statuts en remplacement' d'une part de M. [C] et d'autre part de M. [H] n'ont pas été adoptées, étant mentionné au procès-verbal qu'aucune liste de candidats n'était proposée ;

- il est constant que ces deux administrateurs, informés de la tenue de cette assemblée, ne s'y sont pas présentés et que M. [C] n'a pas transmis pour cette date de liste de candidats au poste d'administrateur ; toutefois, il n'est pas démontré que ce dernier ait été informé des révocations envisagées et de la nécessité de transmettre une liste de candidats pour la désignation de nouveaux administrateurs ;

- ces deux administrateurs de catégorie A n'ont pas été remplacés ;

- postérieurement à cette révocation, M. [L], également administrateur de catégorie A nommé par M. [C], a démissionné en septembre 2017 ;

- comme indiqué dans le courrier du conseil des appelants en date du 6 octobre 2017, adressé à la suite de la convocation du 28 septembre 2017 pour l'assemblée générale des actionnaires du 13 octobre 2017, il est constant, à la lecture de la convocation, que les quatre noms proposés dans la liste des candidats qui y figurait pour remplacer M. [L] ne correspondaient pas, sauf pour un seul d'entre eux, à la liste établie par M. [C] ; dans ce même courrier, le conseil des appelants a reproché ainsi une violation des statuts et a précisé que la liste établie par M. [C] dont il a rappelé les noms, restait maintenue ;

- d'après la convocation adressée, notamment à M. [C], pour l'assemblée générale du 13 novembre 2017, le point 10 de l'ordre du jour relatif à la nomination d'administrateurs en remplacement de MM. [C], [H] et [L], mentionne la liste de candidats à ces postes qui, si elle comporte ceux énumérés dans la lettre précitée de l'avocat des appelants, propose également trois autres noms dont celui de M. [Z] [S] ;

- M. [L] a été remplacé par ce dernier dont il est constant que sa nomination n'a pas été proposée par M. [C] et dont la candidature a été contestée par le conseil des appelants par lettre du 8 novembre 2017 et par une lettre de M. [C] datée du lendemain de l'assemblée.

Les intimés ne fournissent pas d'éléments sur le remplacement de MM. [C] et [H] alors même que les appelants soulignent que la situation d'entrave à la nomination de nouveaux administrateurs de catégorie A persiste et que les convocations qu'ils communiquent pour les assemblées postérieures à celle du 13 novembre 2017, ne mentionnent pas la nomination d'administrateurs sur proposition de la liste établie par M. [C].

Etant rappelé, comme précisé précédemment, que le pacte d'actionnaires stipule que trois des membres du conseil d'administration sont désignés par l'assemblée générale des actionnaires sur proposition de M. [C], les associés fondateurs ne pouvant pour leur part que proposer les deux autres membres du conseil d'administration, il est ainsi suffisamment établi des manquements dans l'organisation de la désignation des membres du conseil d'administration et dans le fonctionnement de ce conseil d'administration alors même que les modalités du pacte visent à modérer le pouvoir des administrateurs délégués et de l'actionnaire majoritaire à l'égard des actionnaires minoritaires.

Pour les mêmes motifs que ceux retenus à propos de la faute relative aux décisions prises à propos du litige avec Veolia sans l'avis préalable du conseil d'administration, ce manquement sera supporté par MM. [EK] et [V] et la société Paymap et ce, en application du contrôle qui incombait aux termes de l'article 2.2 k précité à chacune des parties au pacte d'actionnaires, de s'assurer, 'dans la limite de ses pouvoirs' au sein de la Société Olkypay, qu'il ne soit pas voté, pour les décisions qui y étaient énumérées, de décision sans approbation par la majorité simple des membres du conseil d'administration comprenant le vote positif d'au moins un membre du conseil d'administration désigné par M. [C] ; ce contrôle imposait en effet au préalable de s'assurer que le conseil d'administration était constitué conformément aux règles du pacte d'actionnaires.

Sur les préjudices invoqués par les appelants :

Les appelants, après avoir rappelé que le préjudice réparable est celui qui est direct, certain et déterminé, font valoir que leurs préjudices résultent de violations graves et répétées du pacte d'actionnaires ; ils relèvent notamment qu'en choisissant de procéder de façon irrégulière à l'émission de l'action traçante au profit de la société Gaway et en la leur dissimulant, les intimés ont trahi la confiance qui leur a été donnée. Affirmant que les intimés étaient tous informés de l'existence de cette opération dans la mesure où son donneur d'ordre, M. [EK], est le dirigeant social de toutes les sociétés intimées et que M. [V] est le dirigeant de la société Olkypay, les appelants font valoir que si ceux-ci avaient agi de manière loyale dans le cadre du pacte d'actionnaires, la révélation immédiate de l'action traçante leur aurait permis d'agir sans retard pour faire annuler ou déclarer inopposable à la société Olkypay l'opération litigieuse dont les conséquences ont été désastreuses non seulement pour cette dernière du fait de la rupture brutale du contrat avec Veolia mais aussi pour eux qui ont souffert d'un 'intense sentiment de trahison et d'injustice' à l'origine d'un préjudice moral considérable et indiscutable. Ils indiquent que leur préjudice est également constitué par l'atteinte à leur honneur et à leur probité occasionnée par la découverte 'de toutes les malversations' réalisées à leur insu et des fautes commises dont la première constituée par l'action traçante ne leur a été révélée que 'sur la place publique' par un article de presse et a été accompagnée d'un ensemble d'allégations calomnieuses, ce qui a impacté leur vie, dans toutes ses dimensions, professionnelle, sociale et personnelle, chacun ayant fait l'objet d'une suspicion intolérable en lien avec la rupture contractuelle, brutale et immédiate décidée par la société Veolia.

Ils ajoutent que les multiples violations par MM. [EK] et [V] des règles de gouvernance contractuelles de la société Olkypay et la privation de tous leurs droits pour y participer ont fortement accru leur sentiment de trahison et de tromperie en raison de la confiance qu'ils leur avaient donnée en signant le pacte d'actionnaires et en acceptant de leur confier le mandat d'administrateur délégué.

Les appelants, observant que ces préjudices, essentiellement d'ordre moral et résultant notamment du 'harcèlement' dont ils ont fait l'objet, sont difficilement chiffrables, limitent désormais leur demande à l'allocation d'un euro à chacun à la seule exception de M. [C]. Il considère que son préjudice est d'autant plus caractérisé que MM. [EK] et [V] l'ont instrumentalisé à de 'multiples reprises' afin de nuire à sa réputation, de lui imputer frauduleusement une responsabilité qui n'est pas la sienne et de l'intimider :

- dans le cadre du différend avec la société Veolia ayant abouti à la résiliation du contrat, évoquant un procès-verbal du conseil d'administration daté du 30 janvier 2017 ;

- par le dépôt, auprès des autorités luxembourgeoises, d'une plainte calomnieuse datée du 28 février 2017 ;

- dans le cadre de la procédure judiciaire engagée par la société Olkypay contre la société Véolia, sur la seule initiative de MM. [EK] et [V], en lui imputant à tort des actes purement mensongers ou inexacts ;

- dans leur participation évidente à la parution d'un nouvel article de Mediapart du 15 mars 2017 dont ils ont manifestement orienté la rédaction à son encontre ;

- dans l'utilisation faite par ces derniers du jugement rendu en leur défaveur le 7 avril 2017 par le tribunal de commerce de Paris.

Ils invoquent enfin l'utilisation par M. [EK] des réseaux sociaux pour présenter M. [C] de manière péjorative ainsi que les très nombreux propos mensongers dirigés contre lui dans une multitude de correspondances signées par MM. [V] et [EK] adressées aux actionnaires de la société Olkypay dans le cadre des assemblées générales.

Les appelants demandent à la cour de prononcer en outre la publication de la décision.

Ceux-ci qui précisent que leur préjudice matériel consiste dans le coût des frais de nombreux conseils tant en France qu'au Luxembourg afin de défendre leurs droits issus du pacte d'actionnaires formulent leur réclamation en réparation de ce chef 'en la fusionnant' avec leur demande de condamnation des intimés, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au paiement de la somme de 400 000 euros en remboursement de la totalité de leurs frais de conseils ainsi engagés.

Rappelant que le préjudice réparable est celui qui trouve sa cause dans le manquement du débiteur et qu'il doit être personnel, certain et direct ainsi que les dispositions des articles 1149 et 1150 du code civil, les intimés soutiennent que les préjudices dont les appelants sollicitent la réparation pour un montant diminué drastiquement par rapport à la première instance ne sont étayés par aucune pièce ni aucun élément financier ou comptable qui permettrait d'en établir la véracité et l'étendue ; qu'en outre, rien ne permet d'établir qu'ils seraient liés aux manquements reprochés aux intimés, notamment à l'égard de M. [C], de sorte que la cour devra confirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leurs demande au titre des préjudices moral et matériel. Ils ajoutent que les appelants demeurent silencieux sur la différence entre le montant de 324 446,30 euros correspondant aux factures versées aux débats et la somme de 400 000 euros sollicitée et contestent avoir trompé la confiance de M. [C] alors qu'il a été informé de chaque étape de la négociation du contrat avec la société Veolia, que le pacte a été rédigé par des avocats choisis par ce dernier et que l'émission d'une action traçante n'a jamais été dissimulée, relevant que le fait que figurent dans les conclusions des appelants les arguments que la société Olkypay aurait avancés dans le cadre des procédures judiciaires l'opposant à la société Veolia alors qu'aucun de ces éléments n'a été transmis à M. [C] démontre sa connivence avec la société Veolia dans sa stratégie aux fins d'éviction de la société Olkypay et d'appropriation de sa plate-forme. Ils s'opposent à la publication de toute éventuelle décision de condamnation.

Le seul préjudice qui peut être réparé est celui qui certain et en lien direct avec les fautes dont l'existence est démontrée.

La cour ayant considéré qu'aucune faute ne peut être retenue à l'encontre des sociétés PHT international holding, Dimap international et Payroux, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté les appelants de toutes leurs demandes au titre du préjudice moral à l'encontre de ces dernières.

Au regard des fautes retenues par la cour, lesquelles font notamment la preuve d'une exécution du pacte d'actionnaires de la société Olkypay non conforme aux stipulations qui y sont convenues et qui doivent être appliquées avec loyauté, il est certain que les actionnaires minoritaires ont subi un préjudice moral, ceux-ci ayant été tenus écartés du fonctionnement de la société et des pouvoirs qui leur avaient été reconnus par le pacte d'actionnaires, notamment au travers de la participation de trois d'entre eux au conseil d'administration.

La demande de condamnation formulée par les appelants à hauteur de 1 euro chacun sera accueillie, le jugement étant infirmé en ce qu'il les a déboutés de leur demande indemnitaire.

M. [C] est fondé à solliciter la réparation du seul préjudice moral en lien avec les fautes retenues par la cour de sorte qu'il ne peut valablement alléguer le préjudice résultant notamment de la plainte pénale déposée par la société Paymap ou des propos qui ont été tenus sur les réseaux sociaux, dans les journaux ou à l'occasion des nombreuses procédures judiciaires qui ont opposé et opposent encore les sociétés Olkypay et Veolia. Même si M. [C] est rompu à la vie des affaires, il est néanmoins certain que compte tenu de sa participation au conseil d'administration et de son implication plus importante que celle des autres actionnaires minoritaires dans le fonctionnement de la société Olkypay, celui-ci ayant aussi présenté les fondateurs de cette dernière à la société Veolia, il a ressenti plus intensément le préjudice moral né des fautes que la cour a retenues.

Il lui sera alloué, le jugement étant infirmé de ce chef, une somme de 10 000 euros à ce titre.

Conformément aux précisions précédemment apportées à propos des fautes retenues par la cour, il convient, infirmant le jugement de ce chef, de condamner in solidum MM. [EK] et [V], les sociétés Utoky et Paymap qui ont chacun participé à la commission d'au moins un de ces manquements, au paiement de la somme de un euro à chacun des appelants à la seule exception de M. [C] auquel ils sont condamnés in solidum à verser la somme de 10 000 euros.

La demande de publication qui n'est pas motivée n'est pas justifiée par la nature du litige de sorte que, ajoutant au jugement, les appelants en seront déboutés.

S'agissant de leur préjudice matériel et des frais irrépétibles, les appelants ont communiqué différentes factures ou courriers établis par plusieurs cabinets d'avocats, en France et au Luxembourg, concernant les sommes qui leur ont été réglées pour leurs diligences concernant l'affaire 'O. [C] et autres c. F. [EK] et autres- affaire Olkypay', effectuées à compter du 1er janvier 2017 pour les plus anciennes, pour un montant total de 324 446,30 euros, confirmé par les intimés.

Le sens du présent arrêt et la nature du préjudice réparé, ne justifie pas en équité qu'il soit alloué aux appelants à ce titre davantage que la somme de 100 000 euros. Le jugement sera infirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Déclare les appels principal et incident recevables ;

Dit sans objet la fin de non-recevoir relative à la révocation de deux des administrateurs ;

Infirme le jugement du 10 février 2021 en ce qu'il a débouté les appelants de leurs demandes au titre du préjudice moral et en ce qu'il a condamné M. [F] [C], Mme [ZA] [N] épouse [C], M. [P] [L] [G], M. [W] [I], Mme [NR] [M] épouse [I], M. [R] [J], Mme [Z] [D] épouse [J], les sociétés Appia et D.G.L. partners à payer solidairement à MM. [A] [EK] et [JN] [V] avec les sociétés Utoky international holding, Payroux, PHT international holding, Dimap international et Paymap la somme totale de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il les a condamnés solidairement aux dépens ;

Statuant à nouveau de ces chefs,

Dit que MM. [A] [EK] et [JN] [V] et les sociétés Paymap et Utoky international holding ont commis des fautes à l'encontre de chacun des appelants ;

Condamne in solidum MM. [A] [EK] et [JN] [V], avec les sociétés Paymap et Utoky international holding à payer la somme d'1 euro à Mme [ZA] [N] épouse [C], M. [P] [L] [G], M. [W] [I], Mme [NR] [M] épouse [I], M. [R] [J], Mme [Z] [D] épouse [J], les sociétés Appia et D.G.L. partners, en réparation du préjudice moral de chacun ;

Condamne in solidum MM. [A] [EK] et [JN] [V], avec les sociétés Paymap et Utoky international holding à payer la somme de 10 000 euros à M. [F] [C] au titre de son préjudice moral ;

Condamne in solidum MM. [A] [EK] et [JN] [V], avec les sociétés Paymap et Utoky international holding à payer la somme de 100 000 euros à Mme [ZA] [N] épouse [C], M. [P] [L] [G], M. [W] [I], Mme [NR] [M] épouse [I], M. [R] [J], Mme [Z] [D] épouse [J], les sociétés Appia et D.G.L. partners au titre de leur préjudice matériel et des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Confirme le jugement en ses autres dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute les appelants de leur demandes tendant à déclarer nulle et non écrite la stipulation limitative des obligations de MM. [A] [EK] et [JN] [V] et aux fins de publication du jugement ;

Condamne in solidum MM. [A] [EK] et [JN] [V], avec les sociétés Paymap et Utoky international holding aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés, pour ceux dont il a fait l'avance, par maître Franck Lafon, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 21/01468
Date de la décision : 24/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-24;21.01468 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award