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17/01/2023 | FRANCE | N°21/00492

France | France, Cour d'appel de Versailles, 4e chambre 2e section, 17 janvier 2023, 21/00492


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 72 C



4e chambre 2e section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 17 JANVIER 2023



N° RG 21/00492

N° Portalis DBV3-V-B7F-UI5R



AFFAIRE :



[L] [P]





C/



SYNDICAT PRINCIPAL DES COPROPRIETAIRES DE L'ENSEMBLE IMMOBILIER [Localité 9]



et autres





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Décembre 2020 par le Tribunal Judiciaire de VERSAIL

LES

N° Chambre : 3

N° Section :

N° RG : 17/01468



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :



à :



Me Emmanuelle LEFEVRE



Me Ghislaine DAVID-MONTIEL



Me Marion CORDIER



Me Sophie POULAIN



RÉPUBLIQUE ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 72 C

4e chambre 2e section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 17 JANVIER 2023

N° RG 21/00492

N° Portalis DBV3-V-B7F-UI5R

AFFAIRE :

[L] [P]

C/

SYNDICAT PRINCIPAL DES COPROPRIETAIRES DE L'ENSEMBLE IMMOBILIER [Localité 9]

et autres

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Décembre 2020 par le Tribunal Judiciaire de VERSAILLES

N° Chambre : 3

N° Section :

N° RG : 17/01468

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Emmanuelle LEFEVRE

Me Ghislaine DAVID-MONTIEL

Me Marion CORDIER

Me Sophie POULAIN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [L] [P]

[Adresse 1],

[Localité 9]

Représentant : Me Emmanuelle LEFEVRE de la SELARL BLOB AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 381

APPELANTE

****************

SYNDICAT PRINCIPAL DES COPROPRIETAIRES DE L'ENSEMB LE IMMOBILIER [Localité 9] pris en la personne de son Syndic la Société des centres commerciaux sis [Adresse 4]

[Adresse 3]

[Localité 9]

Représentant : Me Ghislaine DAVID-MONTIEL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 216

SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentant : Me Marion CORDIER de la SELARL SILLARD CORDIER & ASSOCIÉS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 189 et Me Agathe CORDELIER de la SCP CORDELIER & Associés, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0399

S.A.R.L. [C] [W] - [J] [X]

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représentant : Me Sophie POULAIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 180 et Me Denis PARINI de la SELARL PARINI-TESSIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0706

INTIMÉS

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 30 Novembre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Agnès BODARD-HERMANT, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Agnès BODARD-HERMANT, Président,

Madame Pascale CARIOU, Conseiller,

Madame Séverine ROMI, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Kalliopi CAPO-CHICHI,

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [P] est propriétaire d'un lot de copropriété situé au rez-de-chaussée du bâtiment A, situé [Adresse 6], au sein de l'ensemble immobilier [Adresse 10], représenté par un syndicat principal des copropriétaires et divers syndicats secondaires des copropriétaires, ayant tous pour syndic la Société des Centres Commerciaux . Le bâtiment A est représenté par un syndicat des copropriétaires secondaire.

La SAS [C] [W]-[J] [X] est l'architecte de cette copropriété.

Par acte d'huissier du 23 février 2017, le syndicat principal des copropriétaires a fait assigner Mme [P] afin de la voir condamnée :

- à démolir le socle en béton et la loggia qu'elle aurait fait construitre en violation des termes du règlement de l'ensemble immobilier

- et à remettre les lieux dans leur état d'origine.

Par acte d'huissier du 30 mars 2018, Mme [P] a alors attrait la Société des Centres Commerciaux en intervention forcée, estimant que cette dernière avait engagé sa responsabilité à son égard.

Par acte d'huissier des 15 et 22 janvier 2019, la Société des Centres Commerciaux a alors attrait en intervention forcée et en garantie la SAS d'architectes [C] [W]-[J] [X] et la SELARL éponyme.

Par jugement rendu le 17 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Versailles a :

- Constaté que le SAS [C] [W]-[J] [X] viennait aux droits de la SELARL [C] [W]-[J] [X] et prononcé la mise hors de cause de la SELARL [C] [W]-[J] [X] ;

- Déclaré le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 10] recevable à agir ;

- Condamné Mme [P] à démolir le socle en béton et la loggia et à remettre les lieux dans leur état d'origine, dans un délai de quatre mois à compter de la signification du présent jugement, et passé ce délai, sous astreinte de 20 euros par jour de retard pendant six mois;

- Débouté Mme [P] de ses demandes formées à l'encontre de la société des Centres commerciaux ;

- Dit que l'appel en garantie formé par la société des Centres Commerciaux à l'encontre de la SAS [C] [W]-[J] [X] est sans objet ;

- Débouté Mme [P] de ses demandes formées à l'encontre de la SAS [C] [W]-[J] [X] ;

- Débouté Mme [P] de sa demande de dommages et intérêts ;

- Condamné Mme [P] à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 10] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné Mme [P] à payer à la société des Centres Commerciaux et la SAS [C] [W]-[J] [X] la somme de 1 000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement ;

- Condamné Mme [P] aux dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile s'agissant de la SELARL Sillard Cordier & Associés, avocat au barreau de Versailles ;

- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

1 - Mme [P] a interjeté appel de ce jugement suivant déclaration du 26 janvier 2021 à l'encontre du syndicat principal des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 10], de la société des Centres Commerciaux et de la société [C] [W]-[J] [X].

Elle demande à la cour, par ses dernières conclusions signifiées le 19 avril 2021, au visa des articles 122 et suivants du code de procédure civile, des articles 1240et 1988 du code civil, des dispositions de la loi du 10 juillet 1965 et du décret du 17 mars 1967, de l'autorisation sollicitée et accordée et des pièces versées aux débats, de :

- Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions (sic) , en ce qu'il a :

* Déclaré le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 10] recevable à agir ;

* Condamné Mme [P] à démolir le socle en béton et la loggia et à remettre les lieux dans leur état d'origine, dans un délai de quatre mois à compter de la signification du présent jugement, et passé ce délai, sous astreinte de 20 euros par jour de retard pendant six mois;

* Débouté Mme [P] de ses demandes formées à l'encontre de la société des Centres commerciaux ;

* Débouté Mme [P] de ses demandes formées à l'encontre de la SAS [C] [W]-[J] [X] ;

* Débouté Mme [P] de sa demande de dommages et intérêts ;

* Condamné Mme [P] à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 10] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

* Condamné Mme [P] à payer à la société des Centres Commerciaux et la SAS [C] [W]-[J] [X] la somme de 1 000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

* Condamné Mme [P] aux dépens.

Statuant à nouveau,

- Constater que le syndicat principal des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 10] n'a pas qualité à agir aux lieux et place du syndicat secondaire de la résidence [11] et le déclarer irrecevables en ses demandes ;

- Débouter en conséquence syndicat principal des copropriétaires de l'ensemble immobilier le [Adresse 10] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions en tant que dirigées à l'encontre de Mme [P] et notamment de sa demande de démolition sous astreinte du socle en béton et de la loggia construite et de remettre les lieux dans leur état d'origine et de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Constater que la société des Centres Commerciaux et la société [C] [W]-[J] [X] ont engagé sa responsabilité à l'égard de Mme [P] ;

- Dans l'hypothèse où la destruction serait ordonnée, les condamner solidairement à régler à Mme [P] la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts représentant le coût de la construction et de la destruction de la loggia et de la remise en état des lieux ;

- Condamner en tout état de cause solidairement la société des Centres Commerciaux, syndicat principal des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 10] et la société [C] [W]-[J] [X] à la relever et garantir contre toutes condamnations pécuniaires prononcées au profit du syndicat principal des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 10] ;

- Condamner soldiairement la société des Centres Commerciaux, syndicat principal des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 10] et la société [C] [W]-[J] [X] à verser à Mme [P] la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice issu de la perte de chance d'éviter un procès et pour le préjudice moral subi ;

- Condamner solidairement la société des Centres Commerciaux, syndicat principal des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 10] et la société [C] [W]-[J] [X] à verser à Mme [P] la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Les condamner solidairement aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

- Dispenser Mme [P] de sa part à la dépense commune des frais de procédure, conformément à l'article 10-1 de la loi du juillet 1965.

2 - Le syndicat principal des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 10] demande à la cour, par ses dernières conclusions signifiées le 13 juillet 2021, au visa du jugement entrepris, des pièces versées au débat, de la loi de 1965 et de son décret d'application, de :

- Déclarer Mme [P] irrecevable et mal fondée en son appel ;

- Débouter Mme [P] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions notamment

celles dirigées à l'encontre du syndicat des copropriétaires ;

- Confirmer purement et simplement le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- Condamner Mme [P] à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile somme qui viendra s'ajouter à la somme de 1 000 euros allouée par les premiers juges au syndicat des

copropriétaires ;

- Condamner Mme [P] aux dépens.

3 - La société des Centres Commerciaux demande à la cour, par ses dernières conclusions signifiées le 12 juillet 2021, au visa de l'article 1240 du code civil et de l'article 367 du code de procédure civile, de :

- Déclarer Mme [P] irrecevable et mal fondée en son appel ;

- L'en débouter ;

- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Subsidiairement,

- Juger que la loggia dont se prévaut Mme [P] étant inexistante, faute d'un socle préexistant, elle ne pouvait procéder à sa fermeture ;

- Juger qu'en agissant autrement, la construction opérée était illicite ;

- Juger que la société des Centres Commerciaux n'a commis aucun manquement et a, au contraire, parfaitement respecté les obligations qui étaient les siennes ;

- Juger que Mme [P] est seule à l'origine et responsable du préjudice dont elle se plaint;

- Juger que Mme [P] ne justifie pas d'un préjudice né, direct, actuel et certain ;

- Juger que la société des Centres Commerciaux ne peut être tenue à l'exécution d'une obligation de faire à laquelle elle est totalement étrangère ;

- Déclarer Mme [P] mal fondée et irrecevable en son appel en garantie ;

- Déclarer Mme [P] mal fondée en toutes ses demandes ;

- L'en débouter ;

Très subsidiairement, ramener le préjudice de Mme [P] dans de plus justes proportions pour tenir compte de sa qualification de perte de chance, jamais équivalente à l'avantage escompté ;

- Condamner la SELARL [C] [W]-[J] [X] à relever et garantir la société des Centres Commerciaux de toutes condamnations qui pourront être éventuellement prononcées à son encontre ;

- Débouter Mme [P] et toutes autres parties de l'ensemble de leurs demandes, toutes prétentions fins et conclusions contraires ;

- Condamner Mme [P] à verser à la société des Centres Commerciaux la somme de 4 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner Mme [P] aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

4- La SAS [C] [W] - [J] [X] demande à la cour, par ses dernières conclusions signifiées le 6 septembre 2021, de :

- Déclarer Mme [P] irrecevable et mal fondée en son appel ;

- L'en débouter ;

- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- Rejeter toute demande de condamnation directe de Mme [P] et de demande directe ou de garantie présentée par Mme [P] ou par la société des Centres Commerciaux à l'encontre de la société [W] [X] ;

- la mettre purement et simplement hors de cause ;

- Condamner Mme [P] à payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 qui viendra s'ajouter à la somme de 1 000 euros accordée par les premiers juges.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 octobre 2022.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé à la décision et aux conclusions susvisées pour plus ample exposé du litige.

SUR CE, LA COUR,

Conformément à l'article 954, alinéas 2 et 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées dans le dispositif des conclusions et n'examine les moyens que s'ils sont invoqués dans la discussion de celles-ci, à l'exclusion des 'dire et juger' et des 'constater'  qui ne constituent pas des prétentions, mais des moyens au soutien de celles-ci.

Mme [P], en dépit des termes du dispositif de ses conclusions, ne critique pas le chef du jugement entrepris qui met hors de cause la SELARL [C] [W]-[J] [X], lequel n'est pas non plus contesté par les intimés.

Ce chef du jugement entrepris doit donc être confirmé.

***

Le syndicat principal fait grief à Mme [P] d'avoir effectué des travaux dans son jardin, partie commune à jouissance privative, sans autorisation préalable de l'assemblée générale des copropriétaires alors que son lot ne disposait ni de loggia ni de terrase/socle en béton pouvant être fermée à la seule condition d'un agrément de l'architecte de l'immeuble.

1 - Sur la recevabilité à agir du syndicat des copropriétaires principal

Mme [P] soutient que seul le syndicat secondaire dont dépend le bâtiment A au sein duquel se trouve cette loggia a intérêt à agir en démolition de ces travaux et en remise en état, en ce qu'il est seul concerné par ce litige, même relatif au sol partie commune, dès lors qu'elle dispose d'un droit de jouissance exclusif sur le jardin dans lequel est construite cette loggia.

La cour retient cependant, à l'instar du jugement entrepris, que ce syndicat est recevable à agir en démolition de ces travaux en ce qu'ils affectent le sol, partie commune de l'ensemble immobilier et non du seul bâtiment A.

Il suffira d'ajouter que le règlement de copropriété en ses pages 10 à 12 relatives à la définition des parties communes et des parties privatives - auxquelles renvoie l'argumentaire de Mme [P] sans d'ailleurs les citer avec la précision suffisante (ses conclusions p.7) - n'est pas de nature à combattre la pertinence des motifs du premier juge ci-dessus repris.

En effet, d'une part, Mme [P] ne conteste pas que le sol de l'ensemble immobilier est une partie commune générale à celui-ci au sens de ce règlement et d'autre part, elle invoque vainement une exception à cette règle fondée sur sa jouissance exclusive du jardin dans lequel est construite la loggia, dès lors que ce jardin qui n'est pas privatif n'est pas inclu dans la définition des parties privatives qu'en donne ce règlement. A cet égard, il est constant que le droit de jouissance exclusif d'une partie commune ne constitue pas un droit de propriété mais un droit d'usage privatif sans incidence sur le caractère commun du sol d'emprise concerné (V. Par ex Civ 3, 23 janvier 2020, n° 18-24676).

Enfin, au vu des motifs qui précèdent, les attestations d'incompréhension de certains copropriétaires (pièces 11-12), en l'état du retrait de la résolution sept de l'assemblée générale annuelle du syndicat secondaire de la résidence [11] datée du 15 octobre 2014 qui prévoit d'agir contre Mme [P] n'étayent utilement l'irrecevablité à agir du syndicat principal, étant relevé qu'il ne résulte pas manifestement de cette résolution un 'aveu extrajudiciaire' sans plus de précision quant à son objet et à son auteur.

Le jugement entrepris sera donc confirmé du chef de la recevabilité à agir du syndicat principal.

2 - Sur la mise hors de cause de la SAS [C] [W]-[J] [X]

Mme [P] fonde ses demandes subsidiaires dirigées contre la SAS [C] [W]-[J] [X] sur l'agrément qu'il aurait donné aux travaux litigieux en cosignant le courrier que le syndic lui a adressé le 14 mai 2013 pour les autoriser.

La SAS [C] [W]-[J] [X] n'étaye pas sa demande de mise hors de cause, à laquelle aucun paragraphe distinct de sa discussion n'est dédié, se bornant à des arguments de fond selon lesquels son intervention se limite à un contrôle a postériori de conformité de la construction en question aux prescriptions fixées dans les documents déposés au syndic, sans examen préalable de conformité ni des travaux projetés , ni de leurs conditions d'exécution.

En cet état, sa demande de mise en de cause ne peut être accueillie.

3 - Sur les demandes en démolition et en remise en état des lieux

Le jugement entrepris retient, après avoir exactement rappelé que le droit de jouissance exclusive conféré par le règlement de copropriété à un copropriétaire sur une fraction de partie commune ne donne pas à ce dernier le droit de construire et après avoir relevé que Mme [P] ne produisait pas aux débats son titre de propriété , retient :

- que le lot de Mme [P] est une chambre de service qui ne dispose pas d'une loggia à l'origine ni d'une terrasse avec un socle en béton

- que le règlement de copropriété n'autorise la fermeture que d'une loggia ou terrasse existante

- que les attestations de Mme [P] dont il ressort qu'à l'acquisition de son bien en 2008, il y avait une terrasse avec un socle en béton sont sans incidence au vu de ce qui précède.

Il en conclut que la seule absence d'autorisation donnée à Mme [P] par l'assemblée générale des copropriétaire pour réaliser des travaux sur les parties communes suffit à justifier la demande de démolition de ces derniers et de remise en état des lieux.

Mme [P] soutient pour le contester qu'elle ne peut être condamnée à démolir un socle de béton qu'elle n'a jamais fait construire et une loggia dûment autorisée par le syndic avec l'agrément de l'architecte tel que prévu au règlement de copropriété, dès lors que :

- aucune disposition du règlement de copropriété ne prévoit que les terrasses ou loggias ne peuvent être fermées que si elles sont constituées par une dalle de béton préexistante

- le règlement de copropriété ne prévoit pas non plus que la loggia ou la terrasse doit exister depuis l'origine

- le jugement entrepris inverse la charge de la preuve de la préexistance d'une dalle de béton alors qu'il est hautement improbable au vu du descriptif commercial de l'opération que son lot, qui constitue un studio et non une chambre de service, ne dispose pas d'une terrasse et ou d'une loggia et alors, au demeurant qu'elle produit des attestations et photos à ce sujet et que le syndic s'est référé dans ses conclusions de première instance à la certification par l'architecte lors de l'autorisation de travaux de la préexistence d'un socle 

- les travaux litigieux ont été réalisés sur ses parties privatives et n'exigeaient donc que l'agrément de l'architecte tel que prévu au règlement de copropriété, qu'elle a obtenu

- le syndicat principal ne peut que se retourner contre le syndic s'il estime que celui-ci a autorisé à tort les travaux qu'il conteste

- il n'est démontré aucune atteinte à l'harmonie de l'immeuble qui comporte de nombreuses loggias, les travaux litigieux sécurisant en outre ce dernier.

La cour retient ce qui suit.

Le syndicat des copropriétaires invoque l'absence d'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaire pour réaliser des travaux en partie commune.

Or, il jugé au point qui précède que ces travaux affectent une partie du sol, partie commune de l'ensemble immobilier, sur laquelle Mme [P] dispose d'un droit de jouissance exclusive qui ne lui donne pas le droit de construire de sorte qu'une autorisation d'assemblée générale des copropriétaire est requise à cette fin.

C'est donc à Mme [P] - qui soutient qu'une telle autorisation, dont elle ne conteste pas le principe, n'est pas requise par le règlement de copropriété - qu'incombe en vertu de l'article 9 du code de procédure civile, la charge de la preuve que les conditions que pose ce règlement pour autoriser la couverture d'une loggia sans cette autorisation sont remplies.

Or, Mme [P] qui reconnaît elle-même avoir demandé l'autorisation non pas seulement de fermer la loggia mais de la réaliser (conclusions p.16, § 7 et 10), ce qui résulte d'ailleurs de sa demande (sa pièce 3) admet donc qu'aucune loggia n'existait avant ses travaux contestés.

Par ailleurs, selon les dispositions non contestées de ce règlement de copropriété (pièce appelante 1 p. 13 in fine et pièce 11 syndicat principal p.12), expressément reprises par le jugement entrepris, 'les propriétaires des lots comportant des terrasses ou loggias auront le droit de les clore mais uniquement sous réserve de l'agrément de l'architecte de l'ensemble immobilier', peu important à cet égard que le lot litigieux soit une chambre de service ou un studio.

La clôture de loggias ou terrasses impliquant l'existence d'un socle préexistant pour la permettre, Mme [P] ne soutient pas sérieusement 'qu'aucune disposition du règlement de copropriété ne prévoit que ces terrasses ou loggias ne peuvent être fermées que si elles sont constituées par une dalle de béton préexistante' (en gras et souligné par elle) et que les premiers juges ont ajouté une condition au règlement de copropriété.

Dans le silence de ce règlement de copropriété, la création d'une terrasse sur une partie commune à l'ensemble immobilier, même objet d'un droit de jouissance exclusive , n'est pas visée par le règlement de copropriété et nécessite donc une autorisation d'assemblée générale des copropriétaires à laquelle ne saurait être substituée une autorisation du syndic.

Or, Mme [P] ne justifie pas de l'existence, préalablement aux travaux litigieux, de la terrasse ou dalle en béton destinée à recevoir la fermeture de loggia souhaitée,.

En effet, Mme [P] ne verse pas aux débats son titre de propriété et rien ne permet de rattacher avec certitude à son lot les photos produites . En outre, ni les attestations, ni la référence vague, voire hypothétique, au descriptif publicitaire de l'opération immobilière ne suffisent à justifier de l'existence d'une terrasse. Mme [P] invoque encore vainement l'assignation et les conclusions en première instance du syndic selon lesquelles l'architecte lui aurait 'certifié (...) la prééxixtence d'un socle', dès lors qu'elles ne sont pas produites ni d'ailleurs précisément et intégralement citées dans leur contenu prétendu pertinent. Il en est de même de l'absence de référence à la réalisation d'un tel socle dans sa demande d'autorisation de travaux, laquelle ne suffit pas à caractériser sa préexistence aux travaux en question.

A l'inverse, l'architecte de la copropriété a écrit à Mme [P] le 21 novembre 2013 : 'dans votre cas, le socle n'est pas existant d'origine' et aucun élément objectif en débat se référant aux règlements de la copropriété de l'ensemble immobilier et à leurs plans ou annexes ne permet de le contredire.

Néanmoins, le syndicat principal procède par affirmation s'agissant de l'atteinte à l'harmonie de l'ensemble immobilier ainsi que le fait justement valoir Mme [P]. Ainsi et alors même qu'il n'est invoqué aucun préjudice particulier résultant pour la copropriété de l'absence d'autorisation préalable par une assemblée générale aux travaux litigieux, la démolition de la loggia et de son socle en béton constitue une sanction disproportionnée de ce défaut d'autorisation, par rapport à l'objectif poursuivi par cette dernière, qui tend aux respect des droits des copropriétaires sur les parties communes concernées.

Ce d'autant que la chronologie des faits (pièces appelante 3-7 et pièces architecte 2 et 4) enseigne ce qui suit.

Par courrier du 10 mai 2013, Mme [P] demandait que 'son projet de loggia' soit porté à l'ordre du jour de l'assemblée générale des copropriétaires et joignait le devis des travaux correspondant.

Par courrier du 14 mai 2013, le syndic de l'immeuble lui indiquait avoir étudié sa demande de travaux, lui précisait qu'ils devront être exécutés conformément aux plans déposés et lui donnait son accord, sous réserve du respect de diverses prescriptions de l'architecte de l'ensemble immobilier et du règlement de copropriété. L'architecte de la copropriété a également signé ce courrier, réservant son contrôle de conformité architectural d'usage.

Mme [P] a fait réaliser les travaux, suivant facture du 10 juin 2013.

Par note du 20 juin 2013 le syndic informait les intendants de la résidence [11] de 'l'autorisation de vitrer sa loggia ou terrasse ' qu'il avait délivrée à Mme [P] et leur demandait de compléter cette note 'afin de lui 'permettre de demander à l'architecte de vérifier la conformité de cette réalisation avec les plans acceptés par la copropriété'

Le 21 novembre 2013, l'architecte de l'immeuble a adressé à Mme [P] un courrier précisant que le socle n'étant pas existant d'origine, aucune loggia ne pouvait être installée à l'emplacement prévu par elle, ce dont il a déduit la non conformité des travaux de fermeture en loggia.

Le syndic de la copropriété a adressé un courrier à Mme [P] le 5 février 2014, lui demandant de retirer l'installation litigieuse et les échanges ultérieurs des parties ont conduit au présent procès.

Il ne résulte pas des circonstances ainsi décrites dans lesquelles Mme [P] a procédé aux travaux litigieux qu'elle a 'volontairement tronqué sa présentation' et 'entendu tromper' l'appréciation du syndic, qui se borne pour l'étayer à affirmer sans renvoi à aucun justificatif que l'architecte de l'immeuble lui a certifié la préexistence d'un socle (ses conclusions p.9-10).

En définitive, la demande du syndicat principal en démolition des travaux litigieux réalisés dans ce contexte et en remise en état des lieux, qui n'est d'ailleurs pas précisément fondée en droit, ne peut être accueillie.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en conséquence.

4 - Sur les demandes dirigées contre le syndic et la société d'architecte

Le sens de l'arrêt rend ces demandes sans objet.

5 - Sur les demandes accessoires

Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile, le sens de l'arrêt conduit à laisser à chacune des parties la charge de ses dépens et frais irrépétibles.

Le jugement entrepris sera donc infirmé de ces chefs.

Le sens de l'arrêt conduit de même à rejeter la demande de Mme [P] tendant, au visa de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, à sa dispense de participation aux frais du procès.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Rejette la demande de mise hors de cause de la SAS [C] [W]-[J] [X] ;

Confirme le jugement entrepris du chef de la mise hors de cause de la SELARL [C] [W]-[J] [X] et en ce qu'il a déclaré le syndicat principal de l'ensemble immobilier [Adresse 10] recevable à agir;

Infirme le jugement entrepris pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Rejette les demandes de démolition et remise en état du syndicat principal de l'ensemble immobilier [Adresse 10] ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens de première instance et d'appel ainsi que de ses frais irrépétibles ;

Rejette la demande formée par Mme [P] tendant à sa dispense de participation aux frais du procès ;

Rejette toute autre demande.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Agnès BODARD-HERMANT, Président, et par Madame Kalliopi CAPO-CHICHI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 4e chambre 2e section
Numéro d'arrêt : 21/00492
Date de la décision : 17/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-17;21.00492 ?
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