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08/12/2022 | FRANCE | N°20/00588

France | France, Cour d'appel de Versailles, 21e chambre, 08 décembre 2022, 20/00588


COUR D'APPEL

de

VERSAILLES



21e chambre





ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 8 DÉCEMBRE 2022



N° RG 20/00588

N° Portalis DBV3-V-B7E-TY5B













Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 janvier 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARGENTEUIL

N° Section : I

N° RG : F19/00177



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Coralie LARDET-ROMBEAUX

r>
Me Banna NDAO



le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





Le 8 décembre 2022,



La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :



Monsieur [R] [A]

[Adresse 2]

[Localité 4]



...

COUR D'APPEL

de

VERSAILLES

21e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 8 DÉCEMBRE 2022

N° RG 20/00588

N° Portalis DBV3-V-B7E-TY5B

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 janvier 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARGENTEUIL

N° Section : I

N° RG : F19/00177

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Coralie LARDET-ROMBEAUX

Me Banna NDAO

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le 8 décembre 2022,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [R] [A]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Coralie LARDET-ROMBEAUX, constitué / plaidant avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 114

APPELANT

*****

S.A.R.L. ELECTRICITÉ RESEAUX AERIENS SOUTERRAINS - E-RAS

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Banna NDAO, constitué / postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 667 - Me Sylvie BRENNER de la SELEURL SBVA AVOCATS, plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0030

INTIMÉE

****

Composition de la cour

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 octobre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président,

Madame Odile CRIQ, Conseiller,

Madame Véronique PITE, Conseiller,

Monsieur Mohamed EL GOUZI, greffier lors des débats.

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 27 juillet 2018, la société Electricité Réseaux Aériens Souterrains (E-RAS) a engagé M. [A] à compter du 3 septembre suivant en qualité de chauffeur poids lourd, et ce « moyennant une rémunération mensuelle brute de 2 792 euros, soit un taux horaire brut de 18,40 euros pour l'horaire de travail collectif à temps plein effectué selon les dispositions en vigueur dans l'entreprise soit 35 heures ».

Spécialisée dans les travaux d'installation électrique dans tous locaux, la société emploie moins de onze salariés et relève de la convention collective du bâtiment ouvrier occupant jusqu'à 10 salariés.

Le 1er février 2019, M. [A] a signé un avenant au contrat de travail, aux termes duquel la durée du travail hebdomadaire a été portée à 39 heures sans modification du salaire mensuel de 2 792 euros.

Le 11 avril 2019, le salarié a démissionné par courriel. Par lettre du 12 avril 2019, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur en exposant divers griefs.

M. [A] a saisi le 9 juillet 2019, le conseil de prud'hommes d'Argenteuil afin de voir juger que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner la société à lui verser diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

La société s'est opposée aux demandes et a sollicité une somme de 1 196,68 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 29 janvier 2020, notifié le 30 janvier 2020, le conseil a statué comme suit :

Déboute M. [A] de sa demande tendant à qualifier la prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Dit que M. [A] a démissionné le 11 avril 2019,

Condamne la société à verser à M. [A] les sommes suivantes :

- 1 876,12 euros bruts au titre des heures supplémentaires,

- 187,61 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne à la société de fournir à M. [A] les documents suivants conformes à la présente décision sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter du 15ème jour suivant la notification de la présente décision : l'attestation Pôle Emploi, le solde de tout compte, le certificat de travail et les bulletins de salaire,

Déboute M. [A] pour le surplus de ses demandes et la société de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,

Ordonne l'exécution provisoire sur l'ensemble des condamnations,

Fixe la moyenne des salaires à 2 792 euros bruts,

Fixe les intérêts au taux légal et leur capitalisation à compter de la saisine du conseil, soit à compter du 9 juillet 2019,

Met les dépens à la charge de la société y compris l'intégralité des frais d'exécution par voie d'huissier s'il y a lieu.

Le 27 février 2020, M. [A] a relevé appel de cette décision par voie électronique.

Par ordonnance rendue le 8 décembre 2021, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 24 janvier 2022.

' Selon ses dernières conclusions du 19 octobre 2020, M. [A] demande à la cour de :

A titre principal,

Infirmer le jugement rendu en ce qu'il l'a débouté de sa demande tendant à qualifier la prise d'acte intervenue par courrier du 12 avril 2019 en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, dit qu'il a démissionné le 11 avril 2019 et l'a débouté du surplus de ses demandes,

Statuant à nouveau,

Dire et juger que la prise d'acte et donc la rupture du contrat de travail du 12 avril 2019 est un licenciement sans cause et réelle,

Ecarter au cas d'espèce le plafonnement prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail en raison de son inconventionalité, de la violation du droit au procès équitable et surtout que le dit barème porte atteinte au droit à une indemnité adéquate et appropriée pour lui,

Ecarter des débats les attestations de M. [P], [G] et [C],

Condamner en conséquence la société E-RAS à lui payer les sommes suivantes :

- 1 035,51 euros au titre des salaires, outre 103,55 euros de congés payés y afférents,

- 1 163,69 euros au titre du prorata du 13ème mois pour 2019 au taux horaire de 18,40 euros ou 930,67 euros si le taux horaire retenu est de 16,10 euros,

- 12 763 euros au titre de dommages et intérêts au titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

A titre subsidiaire si l'ordonnance prévue par l'article 1235-3 du code du travail était appliquée la condamner à payer 3 189,49 euros soit un mois de salaire au titre des dommages et intérêts,

Dans tous les cas, débouter purement et simplement la société de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

Vu les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile,

Déclarer irrecevable la société en son appel incident consistant à le voir condamner au paiement de la somme de 2 792 euros pour la déloyauté de son comportement,

Condamner la société E-RAS à lui payer la somme de 9 540 euros au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale de son contrat de travail,

Dire que les intérêts seront capitalisés,

Dire que la société E-RAS devra établir les bulletins de salaire, l'attestation Pôle Emploi, solde de tout compte et certificat de travail conformes à la décisions dans un délai de 15 jours après la notification de la décision puis sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document,

Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société E-RAS à lui payer les sommes suivantes :

- 1 876,12 euros au titre des heures supplémentaires à 50 %, outre 187,61 euros de congés payés y afférents,

- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

et en ce qu'il a débouté la société E-RAS de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions reconventionnelles.

Fixer les intérêts taux légal et leur capitalisation à compter de la saisine du conseil soit à compter du 9 juillet 2019.

Mettre à la charge de la société E-RAS les dépens y compris l'intégralité des frais d'exécution par voie d'huissier s'il y a lieu ;

A titre reconventionnel, condamner la société E-RAS à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 pour les frais irrépétibles qu'il a dû engager dans la procédure devant la cour outre les entiers dépens.

' Aux termes de ses dernières conclusions, en date du 22 juillet 2020, la société Electricité Réseaux Aériens Souterrains demande à la cour de :

Juger qu'en l'absence d'effet dévolutif, elle n'est pas saisie des chefs de jugement non critiqués par la déclaration d'appel, à savoir la demande de confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société E-RAS au titre des heures supplémentaires, congés payés afférents et de l'article 700 du code de procédure civile, la fixation, par le conseil de prud'hommes, du salaire de référence à hauteur de 2 792 euros et le rappel de salaires, congés payés y afférents et prorata de 13ème mois.

Pour le reste,

A titre principal,

Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que M. [A] avait démissionné le 11 avril 2019, débouté M. [A] de sa demande tendant à qualifier la prise d'acte de la rupture de son contrat de licenciement sans cause réelle et sérieuse, débouté M. [A] pour le surplus de ses demandes,

La recevant en son appel incident et y faisant droit :

Infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,

Statuant à nouveau, condamner M. [A] au paiement de la somme de 2 792 euros (1 mois de salaire) pour la déloyauté de son comportement,

A titre subsidiaire,

Ramener les condamnations qui seraient prononcées à de plus justes proportions,

En toute hypothèse,

Débouter M. [A] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

Condamner M. [A] au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par arrêt rendu le 24 mars 2022, la cour d'appel de Versailles (21ème chambre) a ordonné la réouverture des débats et invité les parties à présenter leurs éventuelles observations sur la portée de la déclaration d'appel et de la saisine de la cour d'appel tant à l'égard de l'appel principal qu'à l'égard de l'appel incident et ce, selon un calendrier fixé.

Suivant observations transmises par RPVA le 12 septembre 2022, M. [A] fait valoir que la nullité de la déclaration d'appel ne peut pas être retenue, tout comme le moyen soulevé par la société concernant l'absence d'effet dévolutif et demande à la cour de :

Prendre en considération ses observations sur la portée de la déclaration d'appel, de la saisine de la cour d'appel tant à l'égard de l'appel principal qu'à l'égard de l'appel incident.

En conséquence,

Juger que la cour est bien saisie par les appels formés par les deux parties et débouter la société de l'ensemble de ses demandes formulées dans ses observations.

Par observations transmises par RPVA le 12 septembre 2022, la société E-RAS estime que la cour n'est pas saisie de l'appel de M. [A] et que l'appel principal n'étant pas valable, il en est de même de son appel incident. La société demande à la cour en tout état de cause de se déclarer non saisie :

- des demandes de confirmation du jugement formulées dans ses écritures s'agissant des heures supplémentaires, des congés payés y afférents et de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- du chef de jugement fixant la moyenne des salaires à la somme de 2 792 euros bruts,

- du chef de jugement ayant débouté M. [A] de sa demande de rappels de salaires, congés payés y afférents et prorata de 13ème mois,

Et de condamner M. [A] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

MOTIFS

I - Sur l'effet dévolutif de la déclaration d'appel

Le salarié fait valoir qu'il a bien interjeté appel de la décision qui l'a débouté des rappels de salaire, congés payés afférents et 13ème mois, ce qui figure dans l'annexe de sa déclaration d'appel. Il soutient que les articles 58 et 901 du code de procédure civile rendent obligatoire pour l'appelant de viser les chefs de jugement critiqués, mais pas ceux dont il demande la confirmation.

Dans ses observations après réouverture des débats, M. [A] précise qu'à la date de la déclaration d'appel, la circulaire du 4 août 2017 prévoyait la possibilité d'une annexe qui fait corps avec la déclaration s'il y avait plus de 4080 caractères, ce qui était le cas en l'espèce. Cette faculté a ensuite été réitérée dans le nouvel article 901-4 du code de procédure civile et par l'article 8 de l'arrêté du 20 mai 2020. M. [A] considère donc que la cour est bien saisie d'un appel principal et de deux appels incidents formés par les parties.

Se prévalant de l'arrêt rendu le 13 janvier 2022 par la Cour de cassation (n° 2017516), la société soutient que les chefs de jugement critiqués doivent figurer dans la déclaration d'appel et non dans une annexe, soulignant qu'en l'espèce la déclaration ne renvoie ni ne fait référence à celle-ci. Il ajoute qu'à la lecture de la déclaration seule, on ne sait pas si l'appel tend à la réformation ou à l'annulation du jugement ni quels sont les chefs de jugement critiqués. De surcroît, elle fait valoir que M. [A] a limité dans son annexe son appel à certains chefs de jugement et qu'il n'a pas sollicité l'infirmation en ce que le conseil a fixé son salaire moyen à la somme de 2 792 euros. L'intimée relève encore que l'appelant ne critique pas dans sa déclaration d'appel le chef de jugement qui a déclaré que l'avenant du 1er février 2019 avait été valablement signé par M. [A] et l'a en conséquence débouté des demandes de rappel de salaire de congés payés afférents et du 13ème mois prorata temporis.

Sur ce, il est constant que :

- la déclaration d'appel litigieuse en date du 27 février 2020 est rédigée, sous la rubrique 'Objet/Portée de l'appel' comme suit : « appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués »

A cette déclaration, était jointe une annexe ainsi libellée :

« l'objet de l'appel diligenté par M. [A] est de demander à la cour d'appel la réformation de la décision de première instance en ce qu'elle a :

chefs du jugement critiqués :

CHEF DE JUGEMENT CRITIQUÉ 1 : que le jugement déboute M. [A] de sa demande tendant à qualifier la prise d'acte intervenue par courrier du 12 avril 2019 en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

AUTRE CHEF DE DEMANDE CRITIQUÉS 2 : que le jugement a dit que M. [A] a démissionné le 11 avril 2019,

AUTRES CHEFS DE DEMANDES CRITIQUÉS 3 : que le jugement déboute M. [A] du surplus de ses demandes et plus précisément :

- de voir dire et juger que doit être écarté le plafonnement prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail en raison de son inconventionnalité, de la violation du droit à un procès équitable et surtout que ledit barème porte atteinte, dans le cas d'espèce au droit à une indemnité adéquate et appropriée,

- de voir écarter des débats les attestations de MM. [P], [G] et [C] versées aux débats par la société E-RAS ,

- de voir condamner la société E-RAS à lui payer à les sommes de :

' 1 035,51 euros et 103,55 euros au titre des congés payés afférents,

' 1 163,69 euros au titre du prorata du 13ème mois pour 2019,

' 12 763 euros au titre des dommages-intérêts sans cause réelle et sérieuse

à titre subsidiaire et si le barème était appliqué, 3 189,49 euros soit un mois de salaire au titre des dommages-intérêts sans cause réelle et sérieuse,

- et dans tous les cas : 9 540 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail de son contrat de travail ».

Dans sa rédaction résultant du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l'article 901 du code de procédure civile disposait que 'la déclaration d'appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par l'article 58, et à peine de nullité :

1° La constitution de l'avocat de l'appelant ;

2° L'indication de la décision attaquée ;

3° L'indication de la cour devant laquelle l'appel est porté ;

4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. [...].'

En vertu de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Il est de droit que :

- Seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement, de sorte que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas, quand bien même la nullité de la déclaration d'appel n'aurait pas été sollicitée par l'intimé ;

- Par ailleurs, la déclaration d'appel affectée d'une irrégularité, en ce qu'elle ne mentionne pas les chefs du jugement attaqués, peut être régularisée par une nouvelle déclaration d'appel, dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond conformément à l'article 910-4, alinéa 1, du code de procédure civile ;

- Ces règles encadrant les conditions d'exercice du droit d'appel dans les procédures dans lesquelles l'appelant est représenté par un professionnel du droit, sont dépourvues d'ambiguïté et concourent à une bonne administration de la justice en assurant la sécurité juridique de cette procédure.

La société Electricité réseaux Aériens et Souterrains n'est pas fondée à se prévaloir de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation résultant de l'arrêt du 13 janvier 2022. En effet, en application des dispositions du décret n° 2022-245 du 25 février 2022, modifiant l'article 901 du code de procédure civile, et de l'arrêté du 25 février 2022, modifiant l'arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant la cour d'appel, lesquelles sont immédiatement applicables aux instances en cours pour les déclarations d'appel qui ont été formées antérieurement à l'entrée en vigueur de ces deux textes réglementaires, la déclaration d'appel, à laquelle est jointe une annexe comportant les chefs de dispositif du jugement critiqués, constitue l'acte d'appel conforme aux exigences de l'article 901 du code de procédure civile, dans sa nouvelle rédaction, même en l'absence d'empêchement technique.

Or, il ressort de l'annexe jointe à la déclaration d'appel du 27 février 2020, que M. [A] a sollicité la réformation du jugement en précisant les chefs de jugement critiqués.

Alors que la demande en paiement d'un rappel de salaire dépend de l'annulation de l'avenant litigieux, et que le dispositif du jugement ne comporte aucune disposition sur ce point, la société intimée n'est pas fondée à critiquer le fait que cette annexe ne comporterait aucune critique de la décision qui rejetterait l'annulation de cet avenant, sous la seule réserve de la fixation par le conseil de la moyenne des salaires à 2 792 euros bruts.

Il s'ensuit que, sous cette seule réserve, la cour d'appel est valablement saisie de l'appel principal interjeté par M. [A] dans les limites des chefs visés dans sa déclaration et de l'appel incident.

II - Sur la demande visant à écarter des débats les attestations de MM. [P], [G] et [C]

A l'appui de sa demande tendant à ce que soient écartées des débats les attestations de MM. [P], [G] et [C], M. [A] soutient qu'elles ne présentent pas de garanties suffisantes puisqu'elles sont rédigées en termes généraux, dactylographiées avec la même police, et que les témoins ont simplement apposé la formule obligatoire. Il ajoute que M. [C] s'exprime très mal en français et que les signatures ne correspondent pas à celles apposées sur leur pièce d'identité.

La société réplique que le salarié n'explique pas en quoi il y aurait inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public lui faisant grief. Elle conclut qu'aucun motif légitime ne justifierait qu'elles soient écartées des débats.

La preuve étant libre en matière prud'homale et M. [A] ne se prévalant d'aucun motif de nullité visant ces attestations, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté cette demande et considéré qu'ils en apprécieraient la force probante. Le jugement sera confirmé de ce chef.

III - Sur les heures supplémentaires 

Il n'y a pas lieu de se prononcer de ce chef, ni l'appel principal, ni l'appel incident ne portant pas sur ce point, la société Electricité réseaux Aériens et Souterrains précisant même dans ses observations, au visa de sa pièce n°28, qu'elle a exécuté le jugement de ce chef.

IV - Sur la demande de rappel de salaire à hauteur de 1 035,51 euros bruts outre 103,55 euros au titre des congés payés afférents

M. [A] critique la validité de l'avenant conclu le 1er février 2019, qui a fait passer l'horaire initialement convenu de 35 heures moyennant un salaire mensuel brut de 2 792 euros, le contrat précisant que le taux horaire était de 18,40 euros, à un horaire 'modifié porté à 39 heures à compter du 1er février 2019, l'avenant stipulant qu'en contrepartie le salarié percevrait une rémunération mensuelle brute de 2 443,06 euros à laquelle s'ajoutera 348,94 euros pour 17,33 heures supplémentaires', soit 2 792 euros.

Sur la base du taux horaire initialement convenu, il s'estime fondé à solliciter ce rappel de salaire au titre des mois de février à avril 2019.

Si dans sa lettre de prise d'acte le salarié évoquait avoir été menacé d'un licenciement il n'en justifie en aucune façon.

Le seul fait que le salarié établit qu'en décembre 2018, alors que l'employeur invoquait une erreur porté sur le contrat, il ait exprimé le souhait de conserver le bénéfice des stipulations du contrat initial, et que cet avenant ne précise pas le nouveau taux horaire applicable n'est pas de nature à remettre en cause la rencontre des volontés sur la modification de la durée hebdomadaire de travail à la hausse sans modification du salaire mensuel, l'avenant distinguant la part du salaire de base de la rémunération des heures supplémentaires contractuelles découlant de la modification horaire convenue.

Aucun élément ne vient établir une quelconque surprise du consentement du salarié ni a fortiori une quelconque violence morale susceptible de caractériser un dol.

Par suite, le salarié n'est pas fondé à solliciter le paiement de la somme de 1 035,51 euros outre 103,55 euros de congés payés afférents. Le jugement sera confirmé sur ce point.

V - Sur la prime de 13ème mois

M. [A] soutient qu'au vu du bulletin de paie d'un autre salarié, il aurait dû percevoir un 13ème mois ce qui n'a pas été le cas. Il critique le jugement qui ne s'est pas prononcé sur cette demande mais a simplement indiqué qu'elle était liée à la modification du contrat de travail du 1er février 2019, ce qu'il conteste. M. [A] indique que l'existence ou non d'un 13ème mois n'est pas en lien avec l'avenant, que le principe du paiement du 13ème mois est acquis en l'espèce. Il en sollicite le paiement prorata temporis au taux horaire de 18,40 euros ce qui correspond à une somme de 1 162,16 euros, subsidiairement au taux de 16,10 euros, soit la somme de 930,67 euros.

M. [A] verse le bulletin de paye de M. [F], chef d'équipe électricien, du mois de décembre 2018 mentionnant effectivement un demi 13ème mois.

En exposant qu'il aurait dû bénéficier de cette prime de 13ème mois 'comme les autres', M. [A] invoque implicitement l'inégalité de traitement dont il s'estime victime. Au regard de l'avantage en cause, l'appelant communique un élément de nature à laisser supposer l'existence d'une inégalité de traitement que l'employeur ne justifie en aucune façon.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. [A] de ce chef et sa demande en paiement calculé prorata temporis sera accueillie à hauteur de la somme de 930,67 euros.

VI - Sur la requalification de la démission en prise d'acte

M. [A] critique le jugement qui a considéré qu'il avait démissionné le 11 avril 2019, qu'aucun vice du consentement n'était démontré et que les manquements reprochés à la société n'étaient pas d'une gravité telle qu'ils empêchaient la poursuite du contrat de travail sans motivation. Il soutient rapporter la preuve que les manquements qu'il impute à l'employeur sont suffisamment graves pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La société réplique que si M. [A] a démissionné le 11 avril 2019, puis a pris acte de la rupture le 12 avril 2019, c'est uniquement parce qu'il s'apprêtait à rejoindre dès le 15 avril 2019 son nouvel employeur, la société TDLS et qu'il ne pouvait pas exécuter son préavis. Elle soutient que M. [A] a démissionné sans réserve, de manière claire et non équivoque, le 11 avril 2019 et que ce n'est que par pure opportunité qu'il a invoqué le lendemain de prétendus manquements à l'exécution du contrat de travail. La société indique qu'en tout état de cause, les manquements invoqués ne sont pas établis ni de nature à justifier la rupture à ses torts.

La prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.

Elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, voire nul, si les faits invoqués la justifiaient ou, dans le cas contraire, d'une démission.

En l'espèce, le salarié a démissionné par courriel du 11 avril 2019 rédigé comme suit :

'Par la présente, je vous présente ma démission, je vous dois 15 jours de préavis, ce qui nous amène jusqu'au 30 avril 2019, je continuerai à faire mon travail de la même façon jusqu'à mon départ, ne vous inquiétez pas, j'essaierai de faire attention à votre camion.

Si vous ne désirez pas que j'effectue le préavis, je vous remercie de m'en aviser rapidement par e-mail s'il vous plaît, sans réponse de votre part, je me présenterai lundi pour l'effectuer, Merci à vous'.

Mais, dès le lendemain, M. [A] a adressé à son employeur une lettre datée du 12 avril 2019, ainsi libellée :

'Je vous remets ma démission à vos torts exclusifs à la date du 12 avril 2019 je suis prêt à effectuer le préavis de deux semaines à partir du 15 avril 2013 comme je vous l'ai précisé par mail le 11 avril 2019 mais comme reçu par mail le 12 avril 2019 ou vous me stipuler que le préavis n'est pas nécessaire, je vous précise que cette période de deux semaines m'ai due sur mon salaire du mois d'avril 2019 car vous me dispenser de la faire.

Voici les raisons de ma décision :

Depuis mon embauche le 3 septembre 2018 vous ne respectez pas la réglementation sociale européenne, j'ai passé une visite médicale d'embauche plus de 3 mois après cette dites embauche, je n'ai toujours pas pu vider les données de ma carte conducteur ce qui est une obligation tous les mois car ces mêmes données doivent être consultable par les autorités compétentes en cas de contrôles car vous ne voulez pas installer le logiciel et lecteur de carte conducteur ce qui vous évite que je puisse vous réclamer les heures supplémentaires, vous ne respectez pas mon temps de pauses de 30 minutes minimum obligatoires après 6 heures de travail pris très rarement pour que le travail avance toujours plus vite, vous voulez que je fasse des heures supplémentaires sans les payées j'ai dû attendre 3 mois pour que vous vous décidiez enfin à me les payées en partie et sans le repos compensateur. Vous m'avez convoqué à un entretien préalable au licenciement dans ce sens et m'avez mis un ultimatum soit le licenciement soit un changement de contrat avec plus d'heures au même tarif ce que j'ai dû me résigner à accepter au vue de mon changement de situation, mon déménagement, une augmentation de mon loyer. Vous m'avez fait conduire soit disant sous votre responsabilité le véhicule CD 578 NP sans contrôle technique sans contrôle périodique de la grue auxiliaire avec beaucoup de problèmes mécaniques et de sécurités, des surcharges par moment sur les deux véhicules jusqu'à 3 tonnes de plus de la limite autorisée ce qui altère l'efficacité de freinage, voir les bons déchetterie société Spl [Localité 5] et [Localité 6] qui sont en votre possession à l'archivage, et tous n'a pas été régler depuis le mail que je vous ai envoyé à ce sujet d'ailleurs vous n'avez même pas pris la peine d'y répondre, plus tard vous m'avez affecté à un véhicule neuf FB 242 TR mais je devais me satisfaire des apparaux : élingues déchirées, big bag déchirés et les surcharges du camion pour économiser les trajets à la déchetterie ce qui m'ajoutai un stress supplémentaire car toujours la peur qu'un accident se produise, et mettre en danger les autres usagers de la routes et les ouvriers, par texto vous m'avez expliqué que je ne devais plus me soucié du véhicule CD 578 NP car il n'était plus sous ma responsabilité mais je devais encore déplacé le véhicule CD 578 NP et même le réutiliser au mois de mars 2019 pour former un chauffeur sur la grue et à la conduite pour preuve les données enregistrées sur la carte conducteur, je vous rappelle que je n'ai aucune qualification de formateur et seul un organisme de formation est habilité à le faire et surtout sur ce véhicule sans contrôle technique, sans visite périodique de la grue ce qui est dangereux à la circulation et au travail spécifique de la benne et de la grue, de plus j'ai appris que je formais cette personne qui n'avais ni de caces pour la grue, ni d'autorisation de conduite signé par vous et par la médecine du travail au moment où il était sous ma responsabilité, vous m'avez sans cesse fait prendre des risques à moi et à vos ouvriers, aussi depuis mon embauche vous permettez de ne pas fournir les équipements de protections individuelles adéquats au travail que j'effectue, j'ai dû me faire prêter des chaussures de sécurité par un membre de ma famille qui ne sont pas adapté au travail, j'ai dû prendre le gilet orange de sécurité de mon véhicule personnel et vous m'avez fourni un casque déjà utilisé par d'autres ouvriers merci pour l'hygiène, les lunettes de protection et gants et masque pour me protéger des vapeurs d'enrobé chaud n'était même pas envisageable car pas de stock chez vous, cela fait pratiquement sept mois que je travaille avec les mêmes vêtements personnelles soit un pantalon noir déchiré et un pull noir déchiré. J'ai passé une période hivernale trempé et ayant toujours froids car je travaille dehors sans veste imperméable. Vous avez même loué votre camion FB 242 TR et moi à une autre société, sachant que fait appris que cela était interdit car vous n'avez pas la capacité de transport, et je passe sur les tourets de câbles électriques de plus d'une tonnes à tirés sans chandelles car elle était sur un autre chantier et devais lever par des élingues en tissus complète déchirées.. Je n'ai cesser de faire du bricolage avec les moyens que vous nous donnés, hier encore le 11 avril je vous informe avoir eu un soucie par accident j'ai endommagé des éléments sur la grue et la benne ce qui ne n'altère en rien son fonctionnement, en montrant les dégâts à Mr [H] [B] votre fils car vous n'aviez pas le temps selon vous, je me suis brûlé la main car pas de gants sur le conduis d'échappement devant ce dernier et au lieu de me demander si cela allait, il était plus contrarié visiblement par les dégâts du camion, alors je lui ai demandé pourquoi il était comme cela il m'as répondu c'est normal que je sois énervé sur les dégâts je lui demande si le coût des réparations me devrait être imputé et que l'on devait en rester là à la vu de son agacement, il m'a rétorqué c'est ce que l'on va faire, puis il s est emporté dans les cris et menaces, votre société se soucie plus de son camion que l'état de santé de vos salariés, je ne peux continuer d'utiliser un véhicule en avant peur de payer les réparations en cas d'accidents ou de me faire menacer de la sorte après chaque accident. Pour toute ces raisons je prends acte de la rupture contrat à vos tords exclusif'.

Il en ressort que le salarié a pris acte de la rupture du contrat aux torts de l'employeur et qu'il lui appartient d'établir les manquements allégués.

1) Sur la visite médicale d'embauche

M. [A] explique que la visite médicale d'embauche s'est déroulée le 7 février 2019, soit 6 mois après son embauche. Le salarié indique qu'il n'a jamais eu connaissance de la visite prévue le 22 novembre 2018 et que le courrier produit en ce sens par la société ne lui a été adressée qu'à elle sans qu'elle ne justifie l'avoir porté à sa connaissance.

La société fait valoir que M. [A] ne s'est pas présenté aux visites médicales prévues antérieurement au 7 février 2019 et qu'il ne justifie d'aucun préjudice en lien avec ce prétendu retard.

L'employeur produit aux débats des convocations pour M. [A] a une visite médicale initiale les 14 novembre 2018 et 18 décembre 2018 pour les 22 novembre 2018 et 7 janvier 2019.

En toute hypothèse, force est de constater qu'antérieurement à la prise d'acte l'employeur avait satisfait à son obligation d'assurer l'effectivité de son obligation de sécurité en veillant à ce que le salarié soit vu par le médecin du travail qui l'a déclaré à cette occasion apte à son poste.

Le salarié ne justifie à ce titre d'aucun manquement empêchant la poursuite du contrat de travail.

2) Sur l'absence de tickets d'impression

Le salarié affirme que la société ne voulait pas acheter de tickets pour le chronotachygraphe sur le véhicule CD 578 NP.

La société réplique que le camion immatriculé FB 242 TR dispose d'un chronotachygraphe numérique en mesure d'imprimer les tickets dès lors que la carte conducteur était insérée.

M. [A] explique dans sa lettre de prise d'acte : 'je n'ai toujours pas pu vider les données de ma carte conducteur ce qui est une obligation tous les mois car ces mêmes données doivent être consultable par les autorités compétentes en cas de contrôles car vous ne voulez pas installer le logiciel et lecteur de carte conducteur ce qui vous évite que je puisse vous réclamer les heures supplémentaires'.

Le salarié justifie avoir fait part à son employeur de l'absence de rouleaux pour imprimer les tickets dans un mail du 5 novembre 2018 : 'il faudrait commander des rouleaux de ticket pour le chrono tachygraphe car toujours deux rouleaux obligatoire dans le camion'.

En l'état des éléments communiqués, force est de constater qu'il n'est pas justifié par l'employeur que le véhicule conduit par le salarié disposait de rouleaux permettant l'édition de son activité. Observation faite qu'il est établi que le salarié a changé de camion en décembre 2018, la situation dénoncée par le salarié ne l'a pas empêché d'établir sa réclamation salariale au titre des heures supplémentaires que l'employeur n'a pas remis en question et qu'il indique, sans être contredit sur ce point par M. [A], avoir exécuté depuis le prononcé du jugement de première instance.

Là encore, ce manquement n'était pas de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

3) Sur le non-respect des temps de pause 

M. [A] soutient que la société n'a pas respecté ses temps de pause et précise ne disposer que des tickets d'octobre et décembre 2018 puisque par la suite, la société a refusé d'acheter des rouleaux d'impression, de sorte qu'ils ne pouvaient plus être imprimés.

M. [A] verse aux débats ses relevés de chronotachygraphe du mois d'octobre 2018 qui montrent qu'à de nombreuses reprises, après plus de 6h de travail, l'intéressé n'a pas pris de pause.

La société fait valoir qu'elle avait mis en garde son salarié sur le non-respect des heures de travail et des temps de pause. Elle verse aux débats :

- une attestation de M. [D] qui relate que : 'M. [A] ne voulait pas que l'on fasse de pause déjeuner pour qu'il termine plus tôt'

- un courriel écrit par M. [A], rédigé en ces termes : 'Bonjour [S], suite à ta remarque de ce jour concernant ma prise de poste le matin, que je prenais 30 minutes à boire un café et à discuter selon ton appréciation, ce que je conteste formellement, à la limite 10 minutes. Je vais donc retirer 30 minutes chaque jour depuis le 2 novembre 2018, soit 16 jours multiplié par 30 minutes soit 8 heures sur mes heures supplémentaires. A partir de lundi 26 novembre je vais appliquer les heures de mon contrat de travail, début 7h30 du matin, fin 15h15 soit 7h45 d'amplitude horaire dont 45 minutes de pauses. Merci beaucoup'.

En l'état de ces éléments, il n'est pas établi que l'employeur ait manqué à son obligation tendant à faire respecter le temps de pause après six heures d'activité continue.

4) S'agissant des heures supplémentaires et les prises de contact tardives

Il est constant que de la date de son embauche à celle de sa prise d'acte, M. [A] a accompli des heures supplémentaires déterminant une créance de 1 876,12 euros bruts.

M. [A] précise par ailleurs que l'employeur lui envoyait tardivement des SMS pour lui donner ses horaires du lendemain.

La société réplique que seuls 2 SMS en justifient, de sorte qu'ils ne sont que ponctuels pour organiser la journée du lendemain, précisant qu'elle s'est excusée pour l'heure.

L'envoi de ces sms après la fin de la journée de travail dans la perspective d'organiser la journée du lendemain ne constitue pas un manquement justifiant d'un préjudice ni ne présente un caractère de gravité empêchant la poursuite de la relation contractuelle.

5) Sur la conduite du camion Man immatriculé CD 578 NP

M. [A] explique que ce camion a été loué mais que l'employeur ne fournit pas le contrat de location qui aurait pu permettre de vérifier le respect des normes. Il affirme que l'employeur n'avait pas le droit de louer le camion et son chauffeur à une autre entreprise, telle que Sobeca.

Le salarié conclut qu'aucune vérification n'a été faite sur la sécurité des camions.

La société réplique que le camion a bien été loué par elle, ce dont elle justifie en communiquant la facture de mise à disposition émise par la société ELTD TP, ce dont le salarié était parfaitement informé. Elle conteste l'absence de contrôle technique ou de contrôle périodique de la grue et critique l'attestation de M. [F], qu'elle estime de complaisance et la valeur probante des photos produites par le salarié.

Le salarié produit aux débats :

- un mail envoyé à la société le 5 novembre 2018 intitulé 'A faire sur le camion', rédigé comme suit :

'Bonjour, voilà tout ce qui ne va pas sur le camion immatriculé CD 578 NP, peux tu essayé de régler ça rapidement pour une question de sécurité et de responsabilité, je t'en remercie infiniment, l'essuie glace côté conducteur ne fonctionne pas tiens avec du scotch les ballets d'essuies glace sont à remplacés, les feux de positions de croisement et clignotant avant côté passager ne fonctionne pas, pas de vitre de feux avant droit, clignotant côté droit du camion cassé, manque plusieurs goupille sur le camion, la poignée d ouverture de la trappe arrière est cassé, flanc de pneu fissuré et pneu usée, barre anti encastrement reste bloqué au niveau le plus bas , la vitre avant côté passager reste bloqué si ouverte entièrement ne remonte pas, le siège suspendu côté conducteur le mécanise cl amortissement pneumatique ne fonctionne qui me don ne des douleurs au dos avec toutes les vibrations dut à la route , la vitesse 3 et 7 craque, pas d extincteur cabine, pas d extincteur tout court, côté équipement, les trois élingues tissu sont fortement détériorés a remplacé immédiatement pas de cales pour les pieds des stabilisateur de la grue, l axe qui tiens le godet à la grue ne tient avec rien du tout manque écrou de fixation et goupille pour la sécurité, la porte la serrure côté conducteur ne ferme pas avec la clef, le contrôle technique n est pas fait depuis août 2018 nous sommes en novembre, je n est pas trouvé la vgp (visite générale périodique de la grue) qui doit être faite tout les six mois, la visite périodique du chrono tachygraphe qui doit être faite tout les deux ans, je ne peux toujours pas vider ma carte conducteur car pas d'appareil et de logiciel dans la société, il faudrait commander des rouleaux de ticket pour le chrono tachygraphe car toujours deux rouleaux obligatoire dans le camion, je n ai toujours pas fait de visite médicale d'embauche, je n'ai pas d'autorisation de conduite pour la grue auxiliaire de la société, si il y a autres choses je ne manquerai de te prévenir merci encore.

- un échange de SMS du 11 décembre 2018 dont la teneur est la suivante :

M. [A] : 'Bonsoir, c'est [R], [...] je te rappelle que j'ai conduit le camion CD 578 NP et travaillé avec sans aucune sécurité, sans contrôle technique, sans visite de contrôle de la grue, et d'autres problèmes que je t'ai énoncé déjà auparavant par e-mail donc mon contrat reste comme cela et je souhaite que toutes mes heures supplémentaires me soient réglées 49h à ce jour, voir décompte fin de semaine,

06 68 60 62 63 : 'Bonsoir [R], tu as raison pour le contrat, il a été mal défini et mal rédigé. Tes 49 heures seront donc payées intégralement à la fin du mois de décembre 2018. D'autre part, le camion Man n'est plus sous ta responsabilité. Tu as maintenant le Renault Truck que tu as récupéré neuf sorti de concession qui n'avait aucun kilométrage. Cordialement'.

- des photographies du camion immatriculé CD 578 NP qui montrent l'absence de vitre au feu avant droit, une étiquette du contrôle technique mentionnant la date du 31 août 2018 comme échéance, et un feu éteint à l'avant gauche. En l'absence de précision sur la date à laquelle ce cliché a été pris, il n'établit pas un manquement au contrôle technique. Il en ressort néanmoins un état dégradé.

- une attestation de M. [F] qui témoigne comme suit : 'j'ai également pu être témoin de l'état du véhicule mis à sa disposition immatriculé CD 578 NP qui circulait sans contrôle technique valable, ni contrôle de la grue auxiliaire'.

Dans ses conclusions, le salarié concède que l'employeur a 'plus ou moins régularisé la situation'.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que si M. [A] s'est vu confier la conduite d'un camion présentant à l'évidence différents défauts jusqu'au mois de décembre 2018, à compter de ce mois l'employeur a mis à sa disposition un véhicule neuf.

La mise à disposition par l'employeur d'un véhicule présentant de tels défauts pendant plusieurs semaines caractérise une exécution déloyale du contrat de travail qui justifie une indemnisation du salarié à hauteur de 750 euros.

Au jour de la prise d'acte, cette situation ayant été régularisée par la société depuis plusieurs mois, elle ne saurait être de nature à empêcher la poursuite de la relation de travail.

6) Sur l'absence d'équipement de protection individuelle

M. [A] soutient qu'il ne lui a pas été fourni d'équipement de protection individuelle, ce qu'il considère particulièrement grave compte tenu du métier qu'il exerce. Il critique les éléments produits par la société, à savoir notamment les factures et les comptes-rendus de visite et s'appuie sur les photos produites par l'employeur pour démontrer que l'équipement n'est pas conforme et que les salariés ne disposaient pas de casque.

La société fait valoir qu'elle a fourni des EPI à M. [A], ce dont elle indique justifier en produisant des factures et des photographies de chantiers. Elle précise qu'elle doit respecter les règles de sécurité pour passer les contrôles de sécurité des coordinateur SPS intervenant sur les chantiers, notamment d'Enedis. L'employeur critique la valeur probante de l'attestation de M. [F], soulignant que ce dernier est électricien et qu'il n'intervient sur les chantiers qu'une fois le terrassement effectué, soit après M. [A].

Le salarié verse aux débats :

- une attestation de M. [F] qui témoigne que : 'Depuis que M. [A] a été embauché en septembre 2018 par l'entreprise E-Ras à plusieurs reprises j'ai pu être témoin des réclamations concernant la fourniture des équipements de sécurité tel que une tenue de travail, des chaussures de sécurité, des gants ou même un casque de chantier. Sans la fourniture de ses équipements, il n'avait d'autre choix que de travailler en jogging et basket'.

- les mêmes factures que celles communiquées par l'employeur mais annotées sur lesquelles il mentionne que les équipements achetés ne sont pas fait pour la manutention mais pour les électriciens et qu'ils n'ont jamais été remis aux manutentionnaires ou aux chauffeurs, voire qu'il n'était plus dans la société au moment de l'achat.

En réponse la société produit :

- une attestation de M. [P] qui relate que : 'je déclare que les règles de sécurité sont toujours respectées par les salariés, sinon Enedis nous laisserait pas travailler',

- une attestation de M. [T] qui indique que : 'les règles de sécurité sont toujours respectées sinon on ne pourrait pas travailler',

- un compte rendu de visite par la société Enedis auprès de M. [P] le 28 mars 2019 qui se limite à des remarques techniques, sans relever une quelconque difficulté relativement à la disposition par les collaborateurs des EPI,

- un compte rendu de visite de chantier effectué par Enedis le 23 mai 2019, soit postérieurement au départ de M. [A], qui mentionne 'le port des EPI est respecté'.

En l'état des éléments concordants communiqués par l'employeur ce dernier justifie avoir respecté ses obligations en la matière. Ce grief sera écarté.

7) Sur le non respect des charges

M. [A] soutient que très souvent le camion était en surcharge. Il explique que lorsqu'il est chargé, il n'est pas nécessairement pesé et le chauffeur n'a pas d'autre choix que de le conduire et qu'il ne peut rien y faire puisque le nombre d'aller-retour est limité.

La société rétorque que ce sont les conducteurs qui doivent vérifier le PTAC et qui sont responsables en cas de surcharge. Elle affirme qu'il appartenait à M. [A] de refuser le chargement une fois le PTAC atteint.

Le salarié produit un bon d'admission pour le nouveau véhicule FB 242 TR qui montre qu'il est entré avec 29 520 kg le 6 février 2019 et est ressorti avec 15 800 kg.

En l'état de ces éléments, le grief reproché à l'employeur à ce titre n'est pas établi.

En définitive, il suit de ce qui précède que M. [A] était bien fondé en ses réclamations financières portant sur les heures supplémentaires ainsi qu'un rappel de 13ème mois ainsi qu'au titre d'une exécution déloyale du contrat de travail portant sur le seul manquement lié à la mise à disposition par l'employeur d'un véhicule présentant des défauts pendant plusieurs semaines, préjudice indemnisé à hauteur de la somme de 750 euros.

Pris isolément ou ensemble, les seuls griefs ainsi avérés n'étaient pas de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

Aussi, le jugement sera confirmé en ce qu'il a jugé que la prise d'acte produit les effets d'une démission.

VII - Sur la demande reconventionnelle de l'employeur

Au soutien de sa demande incidente de 2 792 euros représentant 1 mois de salaire, la société affirme que M. [A] a agi avec déloyauté dans la rupture du contrat de travail. L'employeur indique qu'il a démissionné de manière claire et non équivoque, puis qu'il a pris acte en éludant le préavis afin de pouvoir être embauché par son nouvel employeur, sans que les manquements invoqués, par pur opportunisme, ne soient justifiés.

M. [A] soulève l'irrecevabilité de la demande nouvelle en cause d'appel.

Toutefois cette demande reconventionnelle n'est pas nouvelle dès lors qu'elle tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge tendant au paiement de l'indemnité de préavis, même si le fondement n'est pas le même.

Par application des articles 565 et 567 du code de procédure civile, elle sera jugée recevable.

Toutefois, faute pour l'employeur de caractériser à ce titre un manquement du salarié constitutif d'une faute lourde, sa demande en paiement de dommages-intérêts, non fondée, sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, dans les limites de sa saisine,

Déclare la cour valablement saisie par la déclaration d'appel en ce compris son annexe, dans les limites de celle-ci et par l'appel incident,

Infirme le jugement seulement en ce qu'il a débouté M. [A] de sa demande en paiement d'une prime de 13ème mois et de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

Statuant de nouveau des chefs infirmés,

Condamne la société Electricité réseaux Aériens et Souterrains à verser à M. [A] la somme de 930,67 euros à titre de rappel de 13ème mois, outre la somme de 750 euros de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

Confirme le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

Déclare recevable, mais mal fondée, la demande reconventionnelle de la société Electricité réseaux Aériens et Souterrains en paiement de la somme de 2 792 euros de dommages-intérêts,

L'en, déboute,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Laisse les dépens d'appel à la charge respective des parties qui en auront fait l'avance.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, et par Madame Alicia LACROIX, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 21e chambre
Numéro d'arrêt : 20/00588
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;20.00588 ?
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