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06/12/2022 | FRANCE | N°21/05948

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 06 décembre 2022, 21/05948


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 53I



13e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 06 DECEMBRE 2022



N° RG 21/05948

N° Portalis DBV3-V-B7F-UYEP



AFFAIRE :



S.A.S. FONDS COMMUN DE TITRISATION CEDRUS



C/



[R] [C]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Juillet 2021 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2019

F01609



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Frédérique LEPOUTRE



Me Niels ROLF-PEDERSEN



TC NANTERRE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53I

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 06 DECEMBRE 2022

N° RG 21/05948

N° Portalis DBV3-V-B7F-UYEP

AFFAIRE :

S.A.S. FONDS COMMUN DE TITRISATION CEDRUS

C/

[R] [C]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Juillet 2021 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2019F01609

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Frédérique LEPOUTRE

Me Niels ROLF-PEDERSEN

TC NANTERRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.S. FONDS COMMUN DE TITRISATION CEDRUS ayant pour société de gestion la société EQUITIS GESTIONS

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Frédérique LEPOUTRE de la SCP B.L.S.T., avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 709 - N° du dossier 182251

APPELANTE

****************

Monsieur [R] [C]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Niels ROLF-PEDERSEN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 291

Représentant : Me Charline HUBER-BROSSE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 Octobre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Madame Olivia WINGERT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN,

La SAS Voyages Saint Fargeau a ouvert un compte bancaire dans les livres de la Société générale, le 1er février 2012, assorti d'une ouverture de crédit de 15 000 euros pour une durée indéterminée. Le même jour, son président, M. [R] [C], s'est porté caution solidaire de l'ensemble des engagements de la société envers la Société générale dans la limite de 19 500 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard, pour une durée de dix ans. Mme [M] [U], épouse de M. [C], a donné son consentement.

Le 25 octobre 2013, M. [C], s'est porté caution solidaire de l'ensemble des engagements de la société Voyage Saint Fargeau envers la Société générale, dans la limite de 65 000 euros, couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant, des pénalités et intérêts de retard pour une durée de dix années et ce, avec le consentement exprès de son épouse.

Le 24 août 2017, la Société générale a consenti une nouvelle convention de trésorerie à la société Voyage Saint Fargeau.

Par jugement du 31 janvier 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société Voyage Saint Fargeau.

Le 5 mars 2018, la Société générale a déclaré sa créance chirographaire au titre du solde débiteur du compte courant pour un montant de 84 988,47 euros.

Après une première mise en demeure adressée à M. [C] le 5 mars 2018 portant sur le cautionnement de 65 500 euros, la Société générale, par deux courriers recommandés datés du 27 mai 2019 et dont l'avis de réception a été signé, a mis en demeure M. [C] de régler les sommes dues au titre des cautionnements des 1er février 2012 et 25 octobre 2013.

Par ordonnance du 25 juillet 2019, le juge de l'exécution du tribunal de commerce de Nanterre a autorisé la Société générale à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur les biens immobiliers appartenant à M. [C] et son épouse à [Localité 4] ; cette ordonnance leur a été signifiée le 9 août 2019.

Par acte du 29 novembre 2019, la Société générale a cédé au Fonds commun de titrisation Cedrus 2 820 créances dont celle détenue sur la société Voyage Saint Fargeau.

Par acte d'huissier en date du 19 août 2019, la Société générale a assigné M. [C] devant le tribunal de commerce de Nanterre, lequel, par jugement contradictoire assorti de l'exécution provisoire du 23 juillet 2021, a :

- constaté que le Fonds commun de titrisation Cedrus, ayant pour société de gestion la société Equitis gestion et représenté par la société MCS et associés, vient aux droits de la Société générale ;

- débouté le Fonds commun de titrisation Cedrus de ses demandes ;

- condamné le Fonds commun de titrisation Cedrus à payer à M. [C] la somme de 1 000 euros au titre des dispositions do l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné le Fonds commun de titrisation Cedrus aux entiers dépens.

Par déclaration en date du 29 septembre 2021, le Fonds commun de titrisation Cedrus a interjeté appel du jugement.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 21 décembre 2021, il demande à la cour de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

- condamner M. [C] à lui payer la somme de 84 500 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 28 mai 2019 jusqu'à complet paiement ;

- condamner M. [C] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonner la capitalisation des intérêts qui seront échus depuis plus d'un an par application de l'article 1154 ancien du code civil ;

- condamner le défendeur aux entiers dépens, dont distraction au profit de maître Frédérique Lepoutre, avocat au barreau des Hauts de Seine, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'appelant conteste l'appréciation faite par le tribunal du patrimoine de M. [C] en rappelant que la Cour de cassation a jugé que la disproportion manifeste suppose que la caution se trouve dans l'impossibilité manifeste de faire face à l'engagement souscrit avec ses biens et revenus.

Il expose que Mme [C] a donné son consentement exprès aux deux engagements de caution souscrits par son époux et que leur proportionnalité s'apprécie par conséquent tant au regard des biens et revenus propres de M. [C] que de ceux de la communauté, incluant les salaires de son épouse ; il soutient que par conséquent, au regard des revenus des époux [C] et des 560 parts sociales détenues par l'intimé dans le capital de la société Ab consulting, les engagements de caution, lorsqu'ils ont été souscrits, n'étaient pas manifestement disproportionnés, observant que M. [C] a lui même évalué ces parts sociales à la somme de 100 000 euros dans une fiche de renseignements confidentiels datée du 23 février 2016 qu'il a signée en en certifiant l'exactitude et qui ne présente aucune anomalie apparente.

Si la cour a une position inverse et doit apprécier par conséquent si la disproportion existait toujours au jour où M. [C] a été recherché en exécution de ses engagements, l'appelant critique le jugement en ce qu'il a retenu la valeur d'acquisition de l'appartement dont l'intimé est devenu propriétaire en 2015 alors qu'il aurait dû la réévaluer, au moins au jour de l'assignation ; il verse aux débats des éléments pour justifier de l'évaluation qu'il propose entre 350 000 et 400 000 euros et indique que le capital restant dû au mois de septembre 2021, date de la déclaration d'appel, était de 125 424,68 euros de sorte qu'aucun des deux cautionnements ne saurait être jugé disproportionné.

L'appelant, au vu de la fiche de renseignements précitée, souligne que le tribunal aurait dû prendre comme valeur du bien immobilier celle mentionnée par M. [C] en 2016 et que compte tenu de la hausse des prix de l'immobilier et des remboursements des échéances du crédit depuis 2016, la valeur de ce bien immobilier en août 2019, date de l'assignation, a augmenté à 371 540 euros tandis que le capital restant dû s'élevait à 147 231,10 euros de sorte qu'à cette date la disproportion ne peut être retenue, les deux cautionnements correspondant à 84 500 euros.

M. [C], qui a constitué avocat, n'a pas conclu au fond.

Il a renoncé à l'incident aux fins de radiation qu'il avait introduit par conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 30 septembre 2022, le Fonds commun de titrisation Cedrus ayant justifié s'être acquitté de la condamnation prononcée en première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 octobre 2022.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

Il résulte de l'article 472 du code de procédure civile que si en appel, l'intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit aux prétentions de l'appelant que dans la mesure où il les estime régulières, recevables et bien-fondées ; la cour, pour statuer sur l'appel lorsque l'intimé n'a pas conclu, examine les motifs du jugement ayant accueilli les prétentions de cette partie en première instance.

Il résulte des dispositions de l' article L.341-4 ancien du code de la consommation reprises aux articles L.332-1 et L.343-4 du même code, les contrats ayant été conclus en 2012 et 2013, qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. Ces dispositions s'appliquent que la caution, personne physique, soit ou non avertie, la preuve de la disproportion incombant à la caution.

La disproportion manifeste de la caution commune en biens s'apprécie non seulement par rapport à ses revenus et ses biens propres mais aussi par rapport aux biens communs, incluant les revenus de son conjoint, étant observé que la disproportion manifeste se caractérise par l'impossibilité manifeste de faire face à l'engagement souscrit.

Il est constant, à la lecture des écritures de l'appelant et du jugement, qu'aucune fiche de renseignements n'a été établie et remplie en 2012 et 2013 pour justifier des revenus et du patrimoine de M. [C].

Au regard des éléments versés aux débats, il est établi que :

- d'après les mentions portées par le notaire sur l'acte authentique de vente de l'appartement dont les époux [C] sont devenus propriétaires le 9 janvier 2015, ceux-ci sont soumis au régime matrimonial de la communauté légale ;

- leurs revenus étaient de 49 451 euros en 2012 et de 54 000 euros en 2013 d'après leurs avis d'imposition qui mentionnent deux enfants à charge, l'un étant mineur et l'autre majeur ;

- en 2013, ils disposaient tous deux des 800 parts composant le capital de la société AB holding dont M. [C] était le gérant, d'un montant total de 8 000 euros lors de la constitution de la société en février 2008 ; cette société, d'après la fiche de renseignements communiquée par l'appelant, était la société mère des sociétés Voyage Saint Fargeau ; en 2012 et 2013, la valeur de ces parts sociales ne peut être fixée au-delà de 8 000 euros dès lors que ce n'est qu'en 2016, dans la fiche dont il a certifié l'exactitude des renseignements en la signant et qu'il a remise à la Société générale, que M. [C] a évalué ces parts sociales à 100 000 euros.

Il n'est pas allégué par l'appelant qu'en 2012 et 2013, M. [C] aurait été propriétaire d'autres biens que les parts sociales de la société AB consulting ; l'intimé, en première instance, n'a pas fait état d'autres charges que les charges courantes du foyer et d'éducation des enfants du couple qu'il a alors évaluées à 2 000 euros par mois.

Lorsqu'il a souscrit le premier cautionnement, d'un montant de 19 500 euros, M. [C] disposait de ses revenus de 49 451 euros et de ses parts sociales de 8 000 euros. Même s'il est constant qu'il devait assumer le paiement de ses charges courantes avec ses revenus, il ne peut être considéré que son premier engagement était manifestement disproportionné.

Le jugement est infirmé de ce chef.

En revanche, lorsqu'il a souscrit le second cautionnement d'un montant de 65 000 euros, M. [C] ne disposait que de revenus d'un montant 54 000 euros outre les 8 000 euros de parts sociales de sorte que ce nouveau cautionnement, portant la totalité des engagements de l'intimé à la somme de 84 500 euros, doit être jugé manifestement disproportionné dans la mesure où M. [C] devait également avec ses revenus assurer l'entretien de sa famille.

Il appartient par conséquent à la cour d'apprécier si la situation de M. [C], au regard de ses revenus et de son patrimoine, lui permettait de faire face à ce second engagement de caution et au paiement des sommes réclamées à ce titre lorsqu'il a été assigné par la Société générale le 19 août 2019, celle-ci sollicitant alors sa condamnation au paiement en principal de la somme totale de 84 500 euros.

A cette date, il a été confirmé par M. [C] en première instance qu'il était toujours propriétaire de l'appartement acheté en 2015 avec son épouse, au prix de 217 800 euros d'après l'acte de vente communiqué par l'appelant.

Il est justifié qu'en février 2016, sur la fiche de renseignements précédemment évoquée, M. [C] a évalué ce bien immobilier à la somme de 325 000 euros qui sera retenue par la cour comme le sollicite l'appelant, sans qu'il y ait lieu de tenir compte des évaluations fournies par l'appelant sur le prix du m² à [Localité 4] dans la mesure où il s'agit de moyennes et que l'état en 2019 de l'appartement dont la caution est propriétaire n'est pas connu.

Il convient d'en déduire le capital restant dû, après paiement de l'échéance du 7 août 2019, à hauteur de 147 231,10 euros de sorte qu'à la date de l'assignation, ce bien immobilier représentait une valeur nette de 177 768,90 euros.

Au regard de ce patrimoine immobilier, étant précisé qu'il n'a pas été fait état lors des débats en première instance d'autres charges d'emprunt ou de cautionnement en 2019, qu'il a alors été indiqué que les revenus de la caution étaient d'un montant brut mensuel de 2 411 euros et que l'appelant fait uniquement état dans ses conclusions en appel d'un prêt 'expresso' dont l'intimé restait également tenu à hauteur de 7 243,13 euros, M. [C] disposait au jour de l'assignation d'un patrimoine et de revenus lui permettant de faire face à la somme de 84 500 euros réclamée par la Société générale de sorte que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a considéré que l'appelant ne pouvait pas se prévaloir des cautionnements souscrits par l'intimé.

Il convient, infirmant le jugement sauf en ce qu'il a constaté que le Fonds commun de titrisation vient aux droits de la Société générale, de condamner M. [C] au paiement de la somme de 84 500 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 mai 2019, lendemain de la mise en demeure qui lui a été adressée par lettre recommandée dont il a signé l'avis de réception.

La capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière et sollicitée par l'appelant, sera ordonnée conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement du 23 juillet 2021 sauf en ce qu'il a constaté que le Fonds commun de titrisation Cedrus vient aux droits de la Société générale ;

Statuant à nouveau,

Condamne M. [R] [C] à payer au Fonds commun de titrisation Cedrus la somme de 84 500 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 mai 2019 ;

Ordonne la capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière ;

Condamne M. [R] [C] à payer au Fonds commun de titrisation Cedrus la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [R] [C] aux dépens qui seront recouvrés par maître Frédérique Lepoutre, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le conseiller,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 21/05948
Date de la décision : 06/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-06;21.05948 ?
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