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24/11/2022 | FRANCE | N°20/01994

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15e chambre, 24 novembre 2022, 20/01994


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



15e chambre



ARRÊT N°





CONTRADICTOIRE





DU 24 NOVEMBRE 2022





N° RG 20/01994



N° Portalis DBV3-V-B7E-UB6J





AFFAIRE :





[P] [O] épouse [D]





C/





S.E.L.A.S.U. NOVE 7





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Septembre 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Boulogn

e-Billancourt

N° Section : Encadrement

N° RG : 19/00662



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :





Me Xavier MATIGNON de l'AARPI ONYX AVOCATS



Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES





le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 24 NOVEMBRE 2022

N° RG 20/01994

N° Portalis DBV3-V-B7E-UB6J

AFFAIRE :

[P] [O] épouse [D]

C/

S.E.L.A.S.U. NOVE 7

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Septembre 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Boulogne-Billancourt

N° Section : Encadrement

N° RG : 19/00662

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Xavier MATIGNON de l'AARPI ONYX AVOCATS

Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT-QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant, initialement fixé au 19 octobre 2022, différé au 20 octobre 2022, puis prorogé au 17 novembre 2022, puis prorogé au 24 novembre 2022, les parties ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Madame [P] [O] épouse [D]

née le 07 Novembre 1959 à [Localité 4] (78)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentant : Me Xavier MATIGNON de l'AARPI ONYX AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0833

APPELANTE

****************

S.E.L.A.S.U. NOVE 7

N° SIRET : 481 146 165

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 substitué par Me Charlotte ERRARD, avocat au barreau de VERSAILLES

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 juin 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Régine CAPRA, Présidente chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,

Madame Perrine ROBERT, Vice-présidente placée,

Greffier lors des débats : Madame Carine DJELLAL,

EXPOSE DU LITIGE

Mme [P] [O] épouse [D] a été engagée à compter du 10 décembre 2001, en qualité de juriste, par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel, pour 32 heures de travail par semaine, soit 139 heures par mois, par la Selarl Astek, aux droits de laquelle est venue la Selas Nove 7, dont Me [E] est depuis 2013 le seul associé et dont elle est depuis lors la seule salariée. Classée cadre, 1er échelon, niveau 1, coefficient 510, elle percevait en dernier lieu un salaire mensuel brut de 5 088,18 euros sur treize mois pour 139 heures de travail par mois.

La convention collective applicable aux relations entre les parties est la convention collective nationale des avocats et de leur personnel.

Mme [D] a été en congé maladie ininterrompu à compter du 31 octobre 2017.

Sollicitant la résiliation judiciaire de son contrat de travail et le paiement de diverses sommes, elle a saisi, le 30 novembre 2017, le conseil de prud'hommes de Paris, qui, par, décision du 16 novembre 2018, notifiée le 15 février 2019, a renvoyé l'affaire devant le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt en application de l'article 47 du code de procédure civile.

Le 14 mai 2019, Mme [D] a poursuivi l'instance devant le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt.

Son congé maladie a pris fin le 22 septembre 2019.

A l'issue de la visite de reprise, le 24 septembre 2019, le médecin du travail a déclaré Mme [D] inapte à tout poste avec dispense de reclassement au motif que tout maintien de la salariée dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé.

La salariée a été de nouveau en congé maladie du 27 septembre au 31 octobre 2019, prolongé le 24 octobre jusqu'au 30 novembre 2019.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 25 octobre 2019, la Selas Nove 7 a convoqué Mme [D] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 5 novembre 2019, puis par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 5 décembre 2019, elle lui a notifié son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par jugement du 3 septembre 2020, auquel la cour renvoie pour l'exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt a :

- dit que le retard de paiement et les autres griefs invoqués par la demanderesse ne constituent pas, pris séparément ou en totalité, des motifs suffisamment graves pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat ;

- débouté en conséquence la demanderesse de sa demande de résiliation judiciaire ;

- jugé que la demanderesse n'a pas établi que sa maladie était due à une cause professionnelle et l'a déboutée de sa demande subsidiaire tendant à ce que son licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse ;

- dit que le solde de tout compte a bien été établi même si les versements ont été différés et débouté Mme [D] de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté Mme [D] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté la société Nove 7 de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que chacune des parties conservera la charge de ses éventuels dépens.

Mme [D] a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe du 24 septembre 2020.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par Rpva le 15 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, elle demande à la cour :

¿ d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit que le retard de paiement et les autres griefs invoqués par la demanderesse ne constituent pas, pris séparément ou en totalité, des motifs suffisamment graves pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat ;

- débouté en conséquence la demanderesse de sa demande de résiliation judiciaire ;

- jugé que la demanderesse n'a pas établi que sa maladie était due à une cause professionnelle et l'a déboutée de sa demande subsidiaire tendant à ce que son licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse ;

- dit que le solde de tout compte a bien été établi même si les versements ont été différés et débouté Mme [D] de l'ensemble de ses demandes, étant précisé qu'il est demandé l'infirmation de ce 4ème chef de jugement critiqué en ce qu'il a Mme [D] des demandes suivantes :

* fixer le salaire brut mensuel de Madame [D] des 12 derniers mois à 5 506, 97 euros bruts ;

* condamner la société Nove 7 à verser à Madame [D] les sommes suivantes :

- salaire du 25 octobre au 5 décembre 2019 : 5735, 47 euros bruts,

- congés payés afférents : 573,54 euros bruts,

- indemnité compensatrice de préavis : 15 264, 54 euros,

- congés payés afférents : 1 526,45 euros,

- complément d'indemnité légale de licenciement : 10 192,20 euros,

- dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 74 300 euros,

* constater que Mme [D] dénonce le solde de tout compte et ordonner que cette dénonciation produise tous ses effets,

* ordonner la remise des documents de fin de contrat par la société Nove 7 (certificat de travail, attestation Pôle Emploi et bulletin de paie conforme), sous astreinte de 100 euros par jour et par document à compter du jugement ;

- débouté Mme [D] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

¿ et statuant à nouveau,

- à titre principal, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [D] aux torts exclusifs de la société Nove 7 ;

- à titre subsidiaire, déclarer le licenciement prononcé par l'employeur sans cause réelle et sérieuse;

En tout état de cause :

- fixer le salaire brut mensuel de Mme [D] des 12 derniers mois à 5 506, 97 euros bruts ;

- constater que Mme [D] dénonce le solde de tout compte et ordonner que cette dénonciation produise tous ses effets ;

- condamner la société Nove 7 à verser à Mme [D] les sommes suivantes :

- salaire du 25 octobre au 5 décembre 2019 : 5735, 47 euros bruts,

- congés payés afférents : 573,54 euros bruts,

- indemnité compensatrice de préavis : 15 264, 54 euros,

- congés payés afférents : 1 526,45 euros,

- complément d'indemnité légale de licenciement : 10 192,20 euros,

- dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 74 300 euros,

- article 700 du code de procédure civile : 5 000 euros ;

- ordonner la remise des documents de fin de contrat rectifiés par la société Nove 7 (certificat de travail, attestation Pôle Emploi et bulletin de paie conforme) sous astreinte de 100 euros par document et par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;

- condamner la société Nove 7 aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

- débouter la société Nove 7 de toutes ses demandes incidentes et moyens de défense.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par Rpva le 9 mars 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, la SELAS Nove 7, intimée, demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré de tous les chefs dont appel,

- débouter l'appelante de toutes ses demandes ;

- condamner l'appelante au paiement de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles d'appel ;

- subsidiairement, limiter l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 3 mois de salaire.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 25 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de rappel de salaire pour la période du 25 octobre 2019 au 5 décembre 2019

Selon l'article L. 1226-4 du code du travail, à l'issue du délai préfix d'un mois prévu par cet article, l'employeur est tenu, en l'absence de reclassement ou de licenciement du salarié déclaré inapte, de reprendre le paiement du salaire.

Le paiement d'indemnités journalières par l'organisme de sécurité sociale, qui est, le cas échéant, en droit d'en obtenir de la salariée le remboursement, n'est pas de nature à délier l'employeur de l'obligation de reprendre le paiement du salaire.

Mme [D], ayant été déclarée inapte par le médecin du travail le 24 septembre 2017, est en conséquence bien fondée à prétendre au paiement de son salaire pour la période du 25 octobre 2019 au 5 décembre 2019, date de la rupture du contrat de travail.

Elle sollicite de ce chef la somme de 5 735,47 euros calculée comme suit :

- salaire dû : 11 193,99 euros, selon le décompte suivant :

* du 25 au 31 octobre 2019 : 1 017,63 euros ;

* du 1er au 30 novembre 2019 : 5 088,18 euros ;

* du 1er au 5 décembre 2019 : 5 088,18 euros ;

- sous déduction des indemnités de prévoyance versées par l'employeur pour la période du 30 septembre au 3 décembre 2019 : 5 458,52 euros.

Mme [D] dont le contrat de travail a été rompu le 5 décembre 2019 est mal fondée à prétendre au paiement de son entier salaire pour le mois de décembre 2019. Au vu des bulletins de paie produits, dont il ressort qu'elle percevait un salaire mensuel brut de 5 088,18 euros sur treize mois, elle avait droit pour la période du 25 octobre 2019 au 5 décembre 2019 à un salaire de 7 124,40 euros brut.

Il est établi par les bulletins de paie produits que la salariée percevait en réalité une indemnité de prévoyance d'un montant journalier de 68,454 euros brut.

Il convient dès lors, après déduction des indemnités de prévoyance versées par l'employeur, puisque la salariée en tient compte dans son calcul, mais en retenant le salaire dû pour la période du 25 octobre 2019 au 5 décembre 2019, soit 7 124,40 euros brut, et le montant de l'indemnité de prévoyance perçue pour les 42 jours de la période considérée, soit 2 875,06 euros brut [68,454 x 42 = 2 875,06], d'infirmer le jugement entrepris et de condamner la Selas Nove 7 à lui payer la somme de 4 249,34 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période du 25 octobre au 5 décembre 2019 ainsi que la somme de 424,93 euros brut au titre des congés payés afférents.

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail

A l'appui de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, Mme [D] fait valoir que la Selas Nove 7 a gravement manqué à ses obligations contractuelles à son égard. Elle invoque à ce titre les faits suivants :

- des retards dans le paiement de ses salaires ;

- des missions administratives, de secrétariat et de comptabilité ne relevant pas du cadre de ses fonctions de juriste et aboutissant à la mettre en situation de surmenage et de stress ;

- l'absence de locaux depuis le 31 août 2017 la contraignant à travailler à son domicile ;

- le travail effectué le vendredi en principe non travaillé, durant ses congés payés et durant ses congés maladie ;

- l'absence d'adhésion de l'employeur à un service de santé au travail et spécialement au centre de santé au travail dont dépend le nouveau siège social de la société et l'absence d'inscription de la salariée à ce centre ;

- le retard dans la communication des documents nécessaires à sa prise en charge par la Cpam ;

- l'absence de reprise du paiement du salaire à l'issue du délai d'un mois suivant l'avis d'inaptitude ;

- l'absence de versement des sommes mentionnées au solde de tout compte avant la saisine de la formation de référé du conseil de prud'hommes à cette fin ;

- les répercussions des manquements de l'employeur sur son état de santé.

Le retard dans le paiement de l'indemnité de licenciement, de l'indemnité compensatrice de congés payés et de la prime de 13ème mois calculée prorata temporis, mentionnées dans le solde de tout compte, qui constituent, pour les deux premières, des créances qui trouvent leur origine dans la rupture du contrat de travail et, pour la troisième, une créance qui n'est devenue exigible au moment du solde de tout compte qu'en raison de la rupture du contrat de travail, ne peut fonder la résiliation judiciaire du contrat de travail comme étant postérieur à la date à laquelle la rupture de la relation contractuelle était acquise.

Mme [D] établit, par les courriels qu'elle produit, que lorsqu'elle a été placée en congé maladie le 31 octobre 2017, elle assurait, en plus de ses tâches de juriste, le suivi des relations avec les fournisseurs et le suivi de la trésorerie du cabinet, soit une tâche sans lien avec son emploi et sa qualification, que les difficultés de trésorerie récurrentes et les incidents de paiement qu'elle devait gérer, suscitaient chez elle une forte inquiétude, que son employeur ne disposait plus de locaux depuis deux mois, de sorte qu'elle devait travailler à son domicile et y entreposer les dossiers et le matériel informatique du cabinet, et que son employeur n'était pas en mesure de lui payer son salaire du mois écoulé, qui ne lui sera versé que le 29 novembre 2017.

Elle établit également que la Selas Nove 7 n'a pas repris le paiement de son salaire, comme elle y était tenue en application des dispositions de l'article L. 1226-4 du code du travail, à l'issue du délai d'un mois à compter de la date de l'examen de reprise du travail, le 24 septembre 2018, dès lors que, ne pouvant être reclassée, elle n'avait pas été licenciée.

Les difficultés économiques auxquelles l'employeur était confronté ne peuvent justifier des manquements aux obligations qui étaient les siennes envers la salariée.

Les manquements ci-dessus retenus comme établis sont à eux seuls suffisamment graves pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la Selas Nove 7.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [D] aux torts de la Selas Nove 7 à effet au 5 décembre 2019, date du licenciement, qui devient dès lors sans objet.

Sur les conséquences de la résiliation judiciaire du contrat de travail

La résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, Mme [D] est bien fondée à prétendre à une indemnité compensatrice de préavis, aux congés payés afférents, à une indemnité de licenciement et à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En application de l'article L. 1234-5 du code du travail, l'indemnité compensatrice de préavis correspond aux salaires et avantages qu'aurait perçus la salariée si elle avait travaillé pendant cette période, soit au vu des bulletins de paie produits la somme de 5 088,18 réclamée. L'article 20 de la convention collective, dans sa rédaction applicable au litige, fixe le délai de préavis des salariés ayant un coefficient hiérarchique égal ou supérieur à 385 et une ancienneté égale ou supérieure à deux ans à trois mois. Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de condamner la Selas Nove 7 à payer à Mme [D] la somme de 15 264, 54 euros qu'elle revendique à titre d'indemnité compensatrice de préavis ainsi que la somme de 1 526,45 euros au titre des congés payés afférents.

Mme [D], qui a perçu une indemnité de licenciement de 23 304,71 euros, revendique une indemnité de licenciement de 33 496,91 euros et sollicite en conséquence un solde d'indemnité de licenciement de 10 192,20 euros.

Selon l'article 20 de la convention collective, dans sa rédaction applicable au litige, l'indemnité de licenciement est égale à 4 mois de salaire si le temps de présence au cabinet est supérieur à 15 ans. Elle est augmentée d'un mois de salaire si l'âge de l'intéressé est compris entre 52 et 65 ans.

Mme [D], engagée à compter du 10 décembre 2001, dont le contrat de travail a été rompu le 5 décembre 2019, a été absente de l'entreprise à compter du 31 octobre 2017. Si les absences pour maladie ne peuvent être prises en considération dans le calcul de l'ancienneté propre à déterminer le montant de l'indemnité de licenciement, il n'est pas établi que la salariée ait été précédemment en congé maladie en dehors des périodes du 5 au 8 janvier 2015, du 5 au 13 février 2015, du 14 au 31 décembre 2015, du 25 janvier au 6 mars 2016, du 19 au 23 décembre 2016 et du 27 au 30 décembre 2016. Elle comptait donc un temps de présence au cabinet supérieur à 15 ans. Elle était âgée de 60 ans à la date de la rupture du contrat de travail comme étant née le 7 novembre 1959. Le salaire mensuel brut moyen de la salariée au cours des douze mois précédant son congé maladie s'élève, au vu des bulletins de paie produits à la somme de 5 506,97 euros. L'indemnité conventionnelle de licenciement s'élevait donc à la somme de 27 533,35 euros.

Il résulte de l'article R1234-1 du code du travail, dans sa rédaction issue du décret n°2017-1398 du 25 septembre 2017, applicable aux ruptures du contrat de travail prononcées après le 26 septembre 2017, que l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9 ne peut être inférieure à une somme calculée par année de service dans l'entreprise et tenant compte des mois de service accomplis au-delà des années pleines et qu'en cas d'année incomplète, l'indemnité est calculée proportionnellement au nombre de mois complets.

Aux termes de l'article R1234-2, dans sa rédaction issue du décret n°2017-1398 du 25 septembre 2017, l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à dix ans et à un tiers de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de dix ans.

Mme [D] comptait, compte-tenu de ses absences pour maladie une ancienneté de 15 ans et 8 mois. Son salaire de référence était de 5 506,97 euros. L'indemnité légale de licenciement s'élevait dès lors :

* pour les années jusqu'à dix ans, à : (5 506,97/4) x 10 = 13 767,43 euros ;

* pour les cinq années et huit mois au-delà de dix ans, à : (5 506,97/3) x (5 + 8/12) = 10 402,05 euros ;

* soit au total, à 24 169,48 euros.

Il en résulte que c'est l'indemnité conventionnelle de licenciement, plus favorable à la salariée que l'indemnité légale de licenciement, qui doit être retenue.

Mme [D], qui a perçu une indemnité de licenciement de 23 304,71 euros, est dès lors fondée à prétendre à une indemnité de licenciement de 27 533,35 euros. Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de condamner l'employeur à payer à la salariée la somme de 4 228,64 euros à titre de solde d'indemnité de licenciement.

En application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, applicable en l'espèce, Mme [D], qui, engagée le 10 décembre 2001 et dont le contrat de travail a été rompu le 5 décembre 2019, comptait une ancienneté de 17 années complètes à la date de la rupture de son contrat de travail, peut prétendre à une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre le montant minimal de 3 mois de salaire brut et le montant maximal de 14 mois de salaire brut.

En raison de l'âge de la salariée au moment de la rupture de son contrat de travail, du montant de la rémunération qui lui était versée, ainsi que de l'absence de justificatifs produits sur sa situation depuis la perte de son emploi, il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral qu'elle a subi, la somme de 35 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement sera en conséquence infirmé de ce chef et la Selas Nove 7 condamnée à payer ladite somme à Mme [D] à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la remise des documents sociaux

Il convient d'ordonner à la Selas Nove 7 de remettre à Mme [D] un bulletin de paie récapitulatif et des documents de fin de contrat conformes au présent arrêt. Il n'est pas nécessaire de prononcer une astreinte.

Sur les dépens et l'indemnité de procédure

La Selas Nove 7, qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et sera déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Il convient de la condamner, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à Mme [D] la somme de 3 000 euros pour les frais irrépétibles qu'elle a exposés.

PAR CES MOTIFS :

La COUR,

Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE,

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt en date du 3 septembre 2020 et statuant à nouveau et y ajoutant :

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [P] [O] épouse [D] aux torts de la Selas Nove 7 à effet au 5 décembre 2019, date du licenciement, qui devient sans objet ;

Condamne la Selas Nove 7 à payer à Mme [P] [O] épouse [D] les sommes suivantes :

* 4 249,34 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période du 25 octobre au 5 décembre 2019,

* 424,93 euros brut au titre des congés payés afférents,

* 15 264,54 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 1 526,45 euros brut au titre des congés payés afférents,

* 4 228,64 à titre de solde d'indemnité de licenciement,

* 35 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Ordonne à la Selas Nove 7 de remettre à Mme [P] [O] épouse [D] un bulletin de paie récapitulatif et des documents de fin de contrat conformes au présent arrêt ;

Dit n'y avoir lieu de prononcer une astreinte ;

Condamne la Selas Nove 7 à payer à Mme [P] [O] épouse [D] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute la Selas Nove 7 de sa demande d'indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Selas Nove 7 aux dépens de première instance et d'appel.

- Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- Signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Sophie RIVIERE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15e chambre
Numéro d'arrêt : 20/01994
Date de la décision : 24/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-24;20.01994 ?
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