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17/10/2022 | FRANCE | N°20/01605

France | France, Cour d'appel de Versailles, 4e chambre, 17 octobre 2022, 20/01605


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 54B



4e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 17 OCTOBRE 2022



N° RG 20/01605 - N° Portalis DBV3-V-B7E-TZZH



AFFAIRE :



SCCV FABERT



C/



S.A.R.L. PROMO FILIPE - PRO.FIL





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Janvier 2020 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 04

N° Section : 00

N° RG : 18/06212



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Franck LAFON,



Me Carine LERENARD,



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX SEPT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versaille...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 54B

4e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 17 OCTOBRE 2022

N° RG 20/01605 - N° Portalis DBV3-V-B7E-TZZH

AFFAIRE :

SCCV FABERT

C/

S.A.R.L. PROMO FILIPE - PRO.FIL

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Janvier 2020 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 04

N° Section : 00

N° RG : 18/06212

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Franck LAFON,

Me Carine LERENARD,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SCCV FABERT

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 et Me Hélène MOISAND FLORAND de la SELARL MOISAND BOUTIN & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0036

APPELANTE

****************

S.A.R.L. PROMO FILIPE - PRO.FIL

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Carine LERENARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 548 et Me Yannick ENAULT de la SELARL YANNICK ENAULT-CHRISTIAN HENRY, Plaidant, avocat au barreau de ROUEN, vestiaire : 105

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 05 Septembre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Emmanuel ROBIN, Président chargé du rapport et Madame Séverine ROMI, Conseille ;

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Emmanuel ROBIN, Président,

Madame Pascale CARIOU, Conseiller,

Madame Séverine ROMI, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Vincent MAILHE,

FAITS ET PROCÉDURE

La SSCV Fabert (ci-après la société Fabert) a fait construire une résidence dénommée [Adresse 3]. Elle a confié à la société Promo Filipe (alias Pro.Fil) la réalisation des lots n°20 ' espaces verts et n°21 ' VRD.

Par acte d'huissier du 12 septembre 2018 la société Promo Filipe a fait assigner la société Fabert devant le tribunal de grande instance de Versailles afin d'obtenir le paiement d'un solde de prix d'un montant de 66 771,99 euros ainsi que des dommages et intérêts à concurrence de 20 000 euros. Reconventionnellement, la société Fabert a revendiqué un solde en sa faveur d'un montant de 1 411,49 euros et a réclamé la somme de 75 000 euros au titre des pénalités de retard, outre une indemnité de 5 000 euros pour procédure abusive.

Par jugement en date du 21 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Versailles a condamné la société Fabert à payer à la société Promo Filipe les sommes de 32 800,69 euros, 32 540,17 euros et 2 760 euros au titre du solde de trois factures, avec intérêts au taux légal à compter du 11 mai 2015, ainsi qu'une indemnité de 2 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, et a débouté les parties de leurs autres demandes.

Pour l'essentiel, le tribunal a fait droit aux demandes correspondant au solde des prix convenus aux termes de devis acceptés mais non pour des travaux dont il n'était pas démontré qu'ils avaient été acceptés ; il a rejeté les contestations de la société Fabert prétendant appliquer des retenues de garantie, une retenue pour l'alimentation du compte pro rata et une retenue pour le compte interentreprises en considérant que les travaux étaient terminés et que la période de garantie de parfait achèvement était expirée, et qu'il n'était pas justifié de l'obligation de la société Promo Filipe d'alimenter un compte interentreprises ; il a également considéré que la société Fabert ne rapportait pas la preuve des retards qu'elle invoquait.

*

Le 11 mars 2020, la société Fabert a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 4 mai 2021, le conseiller de la mise en état a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Fabert. En effet, celle-ci soutenait que les demandes présentées par la société Promo Filipe afin d'obtenir le paiement de la somme de 66 771,99 euros étaient irrecevables en l'absence d'appel incident de la part de l'intimé ; le conseiller de la mise en état a considéré que les conclusions de la société Promo Filipe contenaient une demande de condamnation de la société Fabert pour un montant supérieur à celui qui avait été accordé par le tribunal, celui-ci ayant rejeté une facture, que cette demande non équivoque impliquait nécessairement la réformation du jugement, et non sa confirmation, et que l'erreur matérielle commise dans le dispositif des conclusions ne remettait pas en cause la validité de l'appel incident formé dans le délai de l'article 909 du code de procédure civile, qui demeurait recevable, aucun texte n'imposant que les conclusions de l'intimé mentionnent expressément qu'elles contiennent un appel incident.

Par arrêt du 24 janvier 2022, la cour a confirmé l'ordonnance ci-dessus.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 14 juin 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience de la cour du 5 septembre 2022, à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré.

*

Par conclusions déposées le 29 avril 2022, la société Fabert demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, de constater qu'elle n'est pas saisie des demandes de la société Promo Filipe au titre d'une indemnité supplémentaire pour comportement déloyal et de solde de la facture n°2014/04/010 du 29 avril 2014, de débouter la société Promo Filipe de ces mêmes demandes, de la condamner à lui payer la somme de 1 411,49 euros et une indemnité de 5 000 euros pour procédure abusive, subsidiairement de la condamner au paiement de la somme de 75 000 euros au titre des pénalités de retard, et, en tout état de cause, de la condamner aux dépens et au paiement d'une indemnité de 7 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Fabert reproche au premier juge d'avoir alloué à la société Promo Filipe des sommes supérieures à celles qui étaient réclamées ; elle ajoute qu'elle a payé à l'entreprise l'intégralité des sommes dues à celle-ci en vertu des marchés forfaitaires conclus entre elles. S'agissant des déductions opérées, la société Fabert affirme qu'une contestation de la société Promo Filipe est prescrite et soutient que les retenues au titre du compte pro rata et du compte interentreprises ont été effectuées et employées à bon escient. S'agissant des pénalités de retard, la société Fabert affirme que les retards sont suffisamment démontrés par les pièces versées aux débats.

Par conclusions déposées le 13 juin 2022, la société Promo Filipe demande à la cour de condamner la société Fabert à lui payer la somme de 66 771,99 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 11 mai 2015, outre leur capitalisation, ainsi que celle de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts contractuels et celle de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, et de la condamner aux dépens et au paiement d'une indemnité de 10 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Promo Filipe réclame les sommes de 2 760 euros, 7 784,40 euros, 33 176,24 euros et 23 051,35 euros au titre de ses factures impayées, malgré une mise en demeure du 11 mai 2015 ; elle invoque une acceptation implicite de travaux supplémentaires par le maître de l'ouvrage, ainsi qu'une commande de travaux de nettoyage, et conteste l'existence d'un compte pro rata et d'un compte interentreprises établi pour les besoins du chantier. La société Promo Filipe conteste également être à l'origine d'un retard de chantier et, subsidiairement, demande que le montant des pénalités soit limité à la somme de 10 000 euros. Au soutien de ses demandes de dommages et intérêts elle affirme que la société Fabert a fait preuve d'un comportement déloyal

MOTIFS

Sur l'étendue de la saisine de la cour d'appel

En application de l'article 910 du code de procédure civile, l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.

L'article 910-4 du même code en son premier alinéa précise qu'à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

La société Promo Filipe a déposé dans ses premières conclusions déposées le 8 septembre 2020 les demandes suivantes :

« Confirmer le jugement précité en toutes ses dispositions et en conséquence :

Condamner la société SCCV FABERT à régler à la société PRO.FIL la somme de 66.771,99 euros, majorée des intérêts contractuels capitalisés à compter du 11 mai 2015,

Condamner la société SCCV FABERT à payer à la société PRO.FIL la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts contractuels,

Condamner la société SCCV FABERT à verser à la société PRO.FIL le somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamner la société SCCV FABERT à payer à la société PRO.FIL la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamner la société SCCV FABERT aux entiers dépens. »

Le juge de la mise en état a, dans son ordonnance du 4 mai 2021, répondu au moyen d'irrecevabilité soulevé par la société Fabert en estimant que s'il y avait une contradiction entre la demande de confirmation du jugement et les demandes supplémentaires de l'intimé, cela ne constituait qu'une erreur matérielle.

La présente juridiction est donc bien saisie de la totalité des demandes de condamnation présentées par la société Promo Filipe.

Sur le fond

Les demandes de la société Fabert

Par application de l'article 1134 du code civil, dans sa version applicable au présent litige, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

L'article 1315 du même code dispose que, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, il est constant que la société Fabert a confié à la société Promo Filipe les lots :

-VRD :

par contrat de marché de travaux du 27 novembre 2012 d'un montant de 177 600 euros hors taxes,

par avenant n°1 du 15 juillet 2013 pour un montant de 49 090,40 euros hors taxes,

par avenant n°2 du 17 février 2014 pour un montant de ' 7 261,60 euros hors taxes,

Soit un montant total de 219 428,80 euros hors taxes ;

- Espaces verts

par contrat de marché de travaux du 17 décembre 2013 d'un montant de 132 103,34 euros hors taxes,

par des devis pour un montant de 14 896 euros hors taxes,

Soit un montant total de 146 999,34 euros hors taxes.

Le cahier des clauses administratives particulières (CCAP), document contractuel entre les parties, prévoyait notamment que « Toutes modifications aux clauses générales ou particulières du marché feront l'objet d'avenants établis par le Maître d''uvre' le montant du présent Marché est conclu à prix global, forfaitaire hors taxes, ferme, non actualisable et non révisable » et indiquait qu'un planning détaillé tous corps d'état serait établi par le maître d''uvre et remis aux entrepreneurs. À défaut d'exécution dans les délais fixés, le CCAP prévoyait en son article 2.2.3.1, l'application de pénalités en cas de retard pour tous délais prévus et en son article 3.17.3, leurs modalités de calcul.

Le CCAP prévoyait également en son article 2.3.17 un « compte prorata » dont la quote-part revenant à chaque titulaire de lots devait être déduite du montant à leur devoir au titre de leur marché respectif. Son montant était arrêté à une somme forfaitaire de 1,5 % hors taxes.

La société Fabert démontre, avoir réglé par virement à la société Promo Filipe les montants suivants :

- lot VRD

le 7 janvier 2014, 79 918,22 euros (situation 1et 2),

le 29 janvier 2014, 70 227,47 euros (situation 3),

le 20 janvier 2014, 43 227,81euros (situation 4),

le 4 avril 2014, 36 262,65 euros (situation 5) ;

Selon la société Fabert il restait un solde en faveur de la société Promo Filipe de 1.526,87 euros pour ce lot ;

- lot espaces verts

7 janvier 2014, 47 765,08 euros (situation1),

le 29 janvier 2014, 44 010,58 euros (situation 2),

le 6 mars 2014, 32 647,88 euros (situation 3),

le 24 février 2014, 10 418,23 euros (situation 4),

par chèque encaissé le 9 juillet 2014, 19 251,73 euros (situation 5) ;

Soit un total de 383 729,65 euros.

Avec un solde en faveur de la société Fabert, et toujours selon elle, d'un montant de 2 938,36 euros toutes taxes comprises puisque sur chacune des situations et sur les décomptes elle a appliqué des retenues pour les comptes prorata et interentreprises et des pénalités de retard.

La société Fabert argue donc d'un trop payé pour l'ensemble des travaux de 1 411,49 euros toutes taxes comprises, qu'elle réclame.

En effet, pour arriver à ce solde, elle a pratiqué des retenues dans ses décomptes généraux et définitifs dont elle estime que l'absence de contestation de la société Promo Filipe pendant plus de 5 ans rend irrecevable la contestation aujourd'hui, comme prescrite en application de l'article 2224 du code civil.

Or les retenues effectuées figurant sur des décomptes émis du 10 novembre 2013 au 22 juillet 2014 ne portent pas la signature de la société Promo Filipe et de ce fait ont été, avec certitude, connus de cette société à partir des virements faits sur son compte bancaire, soit pour le premier le 7 janvier 2014 ; son assignation contestant lesdites retenues et permettant d'interrompre la prescription devant les juges du fond a été délivrée à la société Fabert le 12 septembre 2018 ; ses contestations sont donc recevables.

S'agissant en premier lieu des retenues au titre de la garantie de parfait achèvement, prévues à l'article 3.16.1 du CCAP en cas de non-levée des réserves, d'abandon de chantier, de dépôt de bilan et plus généralement de faits de nature à empêcher l'entreprise de remplir ses obligations, en l'absence de la preuve de survenance d'un tel événement, la garantie de parfait achèvement étant expirée, la société Fabert ne saurait indûment retenir ces sommes qu'elle aurait dû libérer un an après la réception, intervenue le 18 février 2014, comme prévu à l'article 3.16.3 du CCAP.

S'agissant du compte prorata pour les dépenses d'intérêt commun il a été fixé au CCAP à 1,5 % hors taxes et non à 2 % comme le soutient le maître de l'ouvrage. En l'absence de justification sur le fonctionnement et les dépenses afférentes à ce compte, il faut considérer que les sommes fixées unilatéralement par la société Fabert ne peuvent être imputées à la société Promo Filipe.

En outre, la création d'un compte interentreprises « hors compte prorata » n'a pas fait l'objet d'une acceptation de la part de la société Promo Filipe, les factures pour la sécurisation du chantier adressées par la SAS Prodomo à la société Fabert ne peuvent être mises à la charge de la société Promo Filipe.

Enfin, concernant les pénalités de retard prévues au CCAP, la société Fabert verse le procès-verbal de réception, avec réserve sur la finition des espaces verts, du 18 février 2014, signé des deux parties.

Pour le lot VRD, selon l'ordre de service n°1 du 27 novembre 2012 reçu le même jour par la société Promo Filipe, les travaux à sa charge devaient démarrer le 3 juin 2013 pour s'achever un mois et demi après ; toutefois selon la société Fabert, elle-même, le délai était de trois mois et demi commençant mi-juillet et s'achevant fin octobre, ce qui résulte d'un planning produit, qualifié de planning TCE, mais dont la valeur contractuelle n'est pas établie et dont la connaissance par l'entreprise intervenante n'est pas démontrée, de telle sorte que la seule certitude est la date de réception du 18 février 2014.

Pour le lot espaces verts, il n'est produit que le contrat de marché du 17 novembre 2013, l'ordre de service fixant le démarrage des travaux n'est pas produit.

En l'absence de connaissance de la date de départ des travaux confiés à la société Promo Filipe, il ne peut être procédé au calcul des pénalités de retard prévues au CCAP.

En conséquence, l'intégralité des demandes de la société Fabert sera rejetée.

Les demandes de la société Promo Filipe

Le paiement des factures

La société Promo Filipe réclame, en premier lieu, le paiement de sommes supplémentaires, non prévues au marché résultant de deux factures :

- l'une du 29 avril 2014, d'un montant de 7 784,40 euros toutes taxes comprises,

- l'autre du 15 avril 2014, d'un montant de 2 760 euros toutes taxes comprises.

S'agissant de la facture de nettoyage, si le CCAP dans son article 2.3.10.2 met à la charge de l'entrepreneur le nettoyage de son chantier, il appert qu'en première instance, la société Fabert a reconnu devoir cette prestation affirmant l'avoir payée « par compensation », ce qu'elle reconnaît également en appel ; cette demande sera accordée.

S'agissant des travaux supplémentaires de gros 'uvre contestés par la société Fabert, il ne ressort d'aucun document présenté par les parties que ces travaux hors marché ont été acceptés par la société Fabert, ce que la société Promo Filipe reconnaît puisqu'elle avance qu'ils ont été « implicitement » acceptés par le maître de l'ouvrage, ce qui ne permet pas de faire droit à cette demande.

La société Promo Filipe réclame, en second lieu, le solde du décompte général définitif arrêté au 30 avril 2014 pour le lot n°21 de 33 176,24 euros toutes taxes comprises et celui arrêté au 30 juin 2016 pour le lot n°20 de 23 051,35 euros toutes taxes comprises, incluant une facture de 2 608,80 euros pour la création d'une terrasse.

Ces sommes, résultant du marché signé entre les parties ' à l'exception d'une facture de 2 608,80 euros pour la création d'une terrasse mais qui n'est pas contestée par le maître de l'ouvrage ' et des travaux dont il est reconnu que la société Promo Filipe les a effectués, qui ont été indûment retenues par la société Fabert comme il a été évoqué ci-avant, lui seront allouées avec les intérêts contractuels capitalisés à compter de sa mise en demeure du 11 mai 2015.

En conséquence, la société Fabert sera condamnée à payer à la société Promo Filipe la somme de 58 987,59 euros toutes taxes comprises avec les intérêts contractuels capitalisés à compter de la mise en demeure du 11 mai 2015.

La demande au titre des dommages et intérêts « contractuels »

En application de l'article 1231-6 du code civil, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte. Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.

En l'espèce, cette demande est présentée par la société Promo Filipe pour le retard de paiement, toutefois en application de l'article précité les intérêts moratoires compensent le préjudice lié au retard de paiement.

Aucun préjudice supplémentaire n'étan prouvé, la demande sera rejetée.

Sur les demandes pour procédure abusive

En application de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

L'exercice d'une action en justice, de même que sa défense, constitue en principe un droit, et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts qu'en cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol.

En l'espèce, l'action des deux parties ne saurait être assimilée à de tels agissements.

En conséquence, leurs demandes respectives seront rejetées.

Sur les dépens et les autres frais de procédure

La société Fabert, qui succombe, a été à juste titre condamnée aux dépens de première instance. Elle sera également condamnée aux dépens d'appel, conformément à l'article 696 du code de procédure civile. Les dépens pourront être recouvrés directement dans les conditions prévues par l'article 699 du même code.

Selon l'article 700 1° de ce code, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée.

Les circonstances de l'espèce justifient de condamner la société Fabert à payer à la société Promo Filipe une indemnité de 5 000 euros au titre des frais exclus des dépens exposés en cause d'appel ; elle sera elle-même déboutée de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement déféré, sauf en ce qu'il a condamné la société Fabert à payer à la société Promo Filipe la somme de 66 771,99 euros avec intérêts contractuels capitalisés à compter de la mise en demeure du 11 mai 2015 ;

L'INFIRME de ce chef ;

Et, statuant à nouveau,

CONDAMNE la société Fabert à payer à la société Promo Filipe ' PRO.FIL la somme de 58 987,59 euros toutes taxes comprises avec intérêts contractuels à compter de la mise en demeure du 11 mai 2015 et capitalisés par années entières ;

Ajoutant au jugement déféré,

DÉBOUTE la société Promo Filipe ' PRO.FIL et la société Fabert de leurs demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

CONDAMNE la société Fabert aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer à la société Promo Filipe ' PRO.FIL une indemnité de 5 000 euros, par application de l'article 700 du code de procédure civile, et la déboute de sa demande à ce titre.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Emmanuel ROBIN, Président et par Madame Kalliopi CAPO-CHICHI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 20/01605
Date de la décision : 17/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-17;20.01605 ?
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