La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/10/2022 | FRANCE | N°19/04236

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15e chambre, 06 octobre 2022, 19/04236


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



15e chambre



ARRÊT N°





CONTRADICTOIRE





DU 06 OCTOBRE 2022



N° RG 19/04236



N° Portalis DBV3-V-B7D-TSYG





AFFAIRE :





[D] [B]





C/





Société ALGECO venant aux droits de la société TSM anciennement dénommée TOUAX SOLUTIONS MODULAIRES





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Octobre 2019

par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Nanterre

N° Section : Encadrement

N° RG : F 14/03666



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Yann CAUCHETIER de la SELARL ANTARES



Me Cécile PLOT



Expédition numérique délivrée à ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 06 OCTOBRE 2022

N° RG 19/04236

N° Portalis DBV3-V-B7D-TSYG

AFFAIRE :

[D] [B]

C/

Société ALGECO venant aux droits de la société TSM anciennement dénommée TOUAX SOLUTIONS MODULAIRES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Octobre 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Nanterre

N° Section : Encadrement

N° RG : F 14/03666

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Yann CAUCHETIER de la SELARL ANTARES

Me Cécile PLOT

Expédition numérique délivrée à : PÔLE EMPLOI

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant, fixé initialement au 16 mars 2022, puis prorogé au 20 avril 2022, puis au 1er juin 2022, puis au 29 juin 2022, puis au 14 septembre 2022, différé au 15 septembre 2022, puis prorogé au 06 octobre 2022, les parties ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Madame [D] [B]

née le 22 Mai 1979 à [Localité 5] (TOGO)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Yann CAUCHETIER de la SELARL ANTARES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0070 substitué par Me Pauline CONIGLIO, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Société ALGECO venant aux droits de la société TSM anciennement dénommée TOUAX SOLUTIONS MODULAIRES

N° SIRET : 685 550 659

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Cécile PLOT, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0826

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 janvier 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,

Madame Perrine ROBERT, Vice-président placé,

Greffier lors des débats : Madame Carine DJELLAL,

EXPOSE DU LITIGE :

Par contrat de travail à durée indéterminée signé le 12 juillet 2010 prenant effet le 23 août suivant, Madame [D] [B] a été engagée en qualité de Business Developer Manager par la société Touax Solutions Modulaire, devenue TSM, aux droits de laquelle vient la société Algeco.

La relation de travail entre les parties est régie par la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

Entre le 1er septembre 2013 et le 18 avril 2014, la salariée a été placée en congé maternité puis en arrêt de travail pour maladie.

Par courrier recommandé avec accusé de réception daté du 3 décembre 2014 réceptionné le 8 décembre suivant, la salariée a été convoquée à un entretien préalable de licenciement, lequel s'est déroulé le 10 décembre 2014.

Par requête datée du 13 décembre 2014 reçue au greffe le 17 décembre 2014, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre afin de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur et d'obtenir le paiement de diverses sommes à titre d'indemnités et de rappels de salaires.

Par courrier recommandé avec accusé de réception daté du 17 décembre 2014, envoyé le 18 décembre suivant et réceptionné le 22 décembre 2014, elle a été licenciée pour cause réelle et sérieuse.

Par courrier daté du 23 mars 2015, la salariée a été informée par la société de la levée de la clause de non-concurrence prévue dans son contrat de travail.

Par arrêt du 5 juillet 2016, la cour d'appel de Versailles a :

- confirmé l'ordonnance rendue le 11 septembre 2015 par la formation de référé du conseil de prud'hommes de Versailles, en ce que celle-ci a fixé l'indemnité de non-concurrence due mensuellement à la salariée à 3.910,83 euros pour la période comprise entre le 17 décembre 2014 et le 29 janvier 2015, fixé l'indemnité due à ce titre pour la période du 29 janvier au 17 décembre 2015 à 2.279,03 euros et ordonné à la société de payer à la salariée les sommes de 16.605,08 euros au titre de l'indemnité de non-concurrence pour la période comprise entre le 17 décembre 2014 et le 17 juillet 2015, 2.279,03 euros au titre de l'indemnité de non-concurrence par règlement mensuel pour la période du 17 juillet 2015 au 17 décembre 2015 et 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné par ailleurs la société à payer à la salariée la somme de 1.800 euros à titre de congés payés sur le montant de l'indemnité compensatrice prévue par la clause de non-concurrence ainsi que 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur le fond, par jugement du 30 octobre 2019, auquel renvoie la cour pour l'exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud'hommes de Nanterre a :

- dit le licenciement de la salariée dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société à payer à la salariée les sommes suivantes :

- 34.431 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 14.166 euros au titre de la rémunération variable de l'exercice 2014 ;

- 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- renvoyé les parties à faire les comptes des montants dus au titre de l'indemnité de non-concurrence ;

- ordonné le remboursement d'office par la société aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à la salariée du jour de licenciement au jour du jugement, à concurrence de six mois ;

- débouté la salariée du surplus de ses demandes ;

- condamné la société aux entiers dépens.

Par déclaration au greffe du 26 novembre 2019, la salariée a interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 18 novembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens, elle expose notamment que :

- en exécutant le jugement qui n'était pas assorti de l'exécution provisoire, la société a, conformément aux dispositions de l'article 410, alinéa 2 du code de procédure civile, acquiescé à ce dernier, particulièrement en ce qui concerne l'irrégularité du licenciement intervenu ;

- elle est fondée à percevoir un rappel de salaire au titre de la rémunération variable afférente aux objectifs pour l'année 2013, dans la mesure où la société n'a pas fixé lesdits objectifs et où celle-ci a procédé à une retenue indue sur sa rémunération variable au titre de l'année 2013 ;

- elle est fondée à percevoir un rappel de salaire au titre de la rémunération variable afférente aux objectifs pour l'année 2014, dès lors que ses objectifs n'ont été fixés par l'entreprise que près de six mois après le début de l'exercice ;

- en application de l'article L. 1234-5, alinéa 2 du code du travail dont il résulte une obligation de prise en compte de tous les éléments de rémunération pour la détermination du salaire maintenu pendant le préavis, elle est fondée à obtenir un rappel de salaire sur préavis, intégrant ses rémunérations variables ;

- alors que sa demande n'est pas prescrite tant au vu de la date à laquelle elle a saisi au fond la juridiction prud'homale qu'au regard du délai de prescription triennal applicable en matière d'actions en paiement ou en répétition de salaire ainsi que du principe de l'unicité de l'instance, des sommes lui restent dues au titre de l'indemnité de concurrence et des congés payés y afférents, eu égard à sa date de prise de poste auprès de son nouvel employeur (distincte de celle à laquelle elle a signé son contrat de travail) et à la moyenne des salaires incluant le rappel de rémunération variable qui lui est dû ;

- elle a saisi le conseil de prud'hommes aux fins de résiliation de son contrat de travail avant que son licenciement ne lui soit notifié, ce dont il résulte que cette demande doit être analysée avant l'examen du bien-fondé de son licenciement ;

- elle bénéficie du statut de salariée protégée, en ce que, le 3 décembre 2014 à 11 heures, elle a informé son employeur de son intention de se porter candidate aux élection du comité d'entreprise, de sorte que la rupture de son contrat de travail à compter de ce moment était subordonnée à l'autorisation préalable de la DIRECCTE ;

- elle démontre l'existence de manquements graves et répétés rendant impossible la poursuite du contrat de travail commis par la société à son encontre, en ce qu'elle l'a privée de sa rémunération variable, a procédé à des modifications unilatérales et intempestives de son contrat de travail et l'a licenciée de façon discriminatoire après l'annonce de sa candidature aux élections professionnelles ;

- à titre subsidiaire, son licenciement est nul en ce que l'entreprise a méconnu son statut de salariée protégée et, en tout état de cause, dépourvu de cause réelle et sérieuse, en ce que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas de nature à justifier la rupture de son contrat de travail (dans la mesure, notamment, où l'employeur ne saurait lui reprocher d'avoir refusé les modifications contractuelles imposées unilatéralement ou des résultats insuffisants, alors même qu'il ne lui a pas fixé d'objectifs pour 2014).

Elle demande à la cour de :

- Confirmer le jugement en qu'il a dit la rupture de son contrat de travail comme étant irrégulière sur le fond, en ce qu'il a condamné la société à lui verser un rappel de salaire concernant la rémunération variable de l'exercice 2014 et une somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a condamné la société à rembourser les indemnités chômage qu'elle a perçues du jour de son licenciement au jour du jugement, à concurrence de six mois ;

- Infirmer le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau :

- Fixer sa rémunération mensuelle brute à la somme de 5.881,56 euros ou, à défaut, à la somme de 4.558,08 euros bruts ;

- Dire qu'elle bénéficiait du statut protecteur attaché aux candidats aux élections professionnelles ;

En conséquence,

A titre principal :

- Prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société ;

- Dire que la rupture s'analyse comme un licenciement nul ou, à tout le moins, dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

A titre subsidiaire :

- Dire que son licenciement est nul ou à tout le moins, dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

En tout état de cause,

- Condamner la société à lui payer les sommes suivantes :

- 7.419 euros au titre du reliquat à valoir sur la rémunération variable de l'année 2013, outre 741,90 euros à titre des congés payés afférents ;

- 20.000 euros à titre de rappel de rémunération 2014, outre 2 000 euros de congés payés afférents ;

- 5 000 euros bruts à titre de rappel de salaire sur indemnité compensatrice de préavis outre 500 euros bruts à titre de congés payés sur préavis ou à titre subsidiaire, 1.115,88 euros bruts d'indemnité compensatrice de préavis outre 111,59 euros bruts de congés payés afférents ;

- 9.234,15 euros bruts ou, à titre subsidiaire, de 925,54 euros bruts à titre de rappel d'indemnité de non-concurrence d'un montant ;

- 1.932,44 euros bruts à titre principal ou 1.092,55 euros bruts à titre subsidiaire à titre de rappel de congés payés sur indemnité de non-concurrence ;

- 1.444,40 euros à titre de reliquat à valoir sur l'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 32.936,73 euros au titre de l'indemnité spécifique pour violation du statut protecteur, ou à titre subsidiaire, 25.525,24 euros ;

- 70.578,72 euros, ou à titre subsidiaire, 54.696,96 euros bruts, à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, ou à tout le moins, sans cause réelle et sérieuse ;

- 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 19 octobre 2020, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens, la société Algeco, venant aux droits de la société TSM, intimée, soutient en substance que :

- la société TSM a procédé au règlement de la totalité des sommes dues au titre de la décision de première instance pour des raisons liées à sa restructuration interne, sans avoir acquiescé à celle-ci ;

- la demande en résiliation judiciaire formée par la salariée est irrecevable, en ce que celle-ci s'est précipitée pour saisir le conseil de prud'hommes après la tenue de son entretien préalable de licenciement, de façon à ne recevoir sa lettre de licenciement que postérieurement à ladite demande, alors que la procédure de licenciement avait été engagée antérieurement à cette dernière ;

- il appartient à l'appelante, qui n'a proposé sa candidature aux élections professionnelles qu'après avoir été informée par la directrice des ressources humaines de ce qu'elle allait recevoir une lettre de convocation à un entretien préalable, de démontrer l'heure et la date de réception du courrier électronique qu'elle a envoyé à cette fin à une personne autre que la directrice des ressources humaines ;

- la demande de résiliation judiciaire formée par l'appelante est infondée, les graves manquements dont elle se prévaut n'étant pas établis ;

- le grief relatif au paiement des primes sur objectifs est infondé, la salariée ayant été informé de ses objectifs pour l'année 2013 et ayant perçu une partie de ses primes, des négociations ayant par ailleurs été engagées en vue de la fixation des objectifs pour l'année 2014 (année au cours de laquelle la salarié a perçu une prime de 3.348,90 euros) ;

- la salariée ne saurait reprocher à son employeur les modifications apportées non pas à ses conditions de travail mais à l'activité de la société TSM, de façon structurelle, lesquelles expliquent son affectation à la location, en raison de la fermeture du secteur vente ;

- la salariée n'a pas été rétrogradée au poste de technico-commercial et elle est restée Responsable Grands Comptes, l'évolution de ses missions, prévue par son contrat de travail, résultant de l'évolution des conditions de travail qui s'appliquait à tous les salariés de la société, ses fonctions, son poste et ses bulletins de paie n'ayant pas été modifiés ;

- le licenciement de la salariée n'est pas nul, dès lors qu'elle ne rapporte pas la preuve de ce que son employeur avait connaissance de ce qu'elle était candidate aux élections professionnelles au moment de l'envoi de la lettre de convocation à son entretien préalable de licenciement ;

- le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, la salariée ayant remis en cause les décisions prises par l'employeur, n'ayant accompli aucun effort pour s'adapter et contesté les décisions nécessaires pour la société et les fonctions directionnelle de cette dernière, son refus d'accepter le changement ayant entraîné ses mauvais résultats ;

- alors que la salariée s'est vue libérée de sa clause de non-concurrence dans les huit jours de son départ effectif de la société (compte tenu de sa dispense de préavis), elle s'est engagée auprès d'une nouvelle société qui relève de la branche de la métallurgie dès le 29 janvier 2015 et qui appartient à un groupe dont certaines société exercent une activité concurrente à celle du groupe d'appartenance de la société TSM, la somme dont elle sollicite le versement à titre de reliquat étant pas ailleurs prescrite, outre le fait que sa demande est mal fondée et calculée sur la base d'un salaire mensuel erroné.

Elle demande à la cour de :

- Confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que l'appelante ne pouvait pas bénéficier du statut protecteur attaché aux candidats aux élections professionnelles et en ce qu'il a dit mal fondée la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail de la salariée ;

- Infirmer le jugement en ce qu'il a dit la rupture du contrat de travail de la salariée comme étant irrégulière sur le fond, en ce qu'il l'a condamnée à verser à l'appelante un rappel de salaire concernant la rémunération variable de l'exercice 2014 et une somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a ordonné d'office le remboursement par des indemnités de chômage versées à l'appelante du jour de son licenciement au jour du jugement, à concurrence de six mois ;

- Infirmer la décision pour le surplus ;

- Et statuant à nouveau,

- Dire et juger prescrites les nouvelles demandes relatives au solde de l'indemnité de la clause de non concurrence et aux congés payés y afférents ;

- Fixer la moyenne de rémunération mensuelle brute de la salariée à la somme de 4.558,08 euros bruts ou, à défaut, à la somme de 5.321,30 euros ;

- Débouter l'appelante de l'ensemble de ses demandes ;

- Dire que l'appelante a perçu l'intégralité de sa prime 2013 et que ce paiement est libératoire ;

- Dire que l'appelante a perçu au titre de sa prime 2014 la somme de 3.348, 90 euros et que ce paiement est libératoire ;

- Condamner l'appelante à lui payer la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile.

Après la révocation de l'ordonnance de clôture initiale, la clôture de l'instruction a été prononcée le 24 novembre 2021.

MOTIFS :

Sur l'acquiescement de la société au jugement :

Selon l'article 409, alinéa 1er du code de procédure civile, l'acquiescement au jugement emporte soumission aux chefs de celui-ci et renonciation aux voies de recours sauf si, postérieurement, une autre partie forme régulièrement un recours.

Aux termes de l'article 410, alinéa 2 du code de procédure civile, l'exécution sans réserve d'un jugement non exécutoire vaut acquiescement, hors les cas où celui-ci n'est pas permis.

Même partielle, l'exécution sans réserve d'un jugement non exécutoire vaut acquiescement sans qu'il y ait lieu de rechercher si la partie qui a exécuté le jugement avait ou non l'intention d'y acquiescer.

En l'espèce, il n'est pas contesté que le 10 janvier 2020, la société a, en application du jugement déféré, procédé au versement des sommes suivantes, au bénéfice de l'appelante :

- 14.166 euros à titre de rappel de salaire ;

- 1.416 euros au titre des congés payés y afférents ;

- 34.431 euros à titre d'indemnité de licenciement.

L'exécution sans réserve du jugement suffit à démontrer l'acquiescement de l'intimée audit jugement, indifféremment des arguments de cette dernière concernant la restructuration interne de la société TSM.

La cour relève par ailleurs que la salariée a relevé appel de la décision déférée antérieurement à l'exécution du jugement par la société, à savoir le 26 novembre 2019.

En outre, alors que la salariée a interjeté appel du jugement tout en effectuant par la suite les différentes diligences lui incombant en sa qualité d'appelante, son acceptation du paiement des sommes précitées ne saurait s'analyser comme démontrant qu'elle avait acquiescé à cette décision.

Il convient donc de constater l'acquiescement par la seule intimée au jugement déféré.

Sur le rappel de salaire au titre de la rémunération variable de l'exercice 2013 :

Aux termes de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Par ailleurs, selon l'article 16 de la convention collective précitée, après un an de présence dans l'entreprise, en cas d'absence pour maladie ou accident, l'employeur doit compléter les indemnités journalières versées par les organismes de sécurité sociale et par un régime complémentaire de prévoyance, pour assurer à l'intéressé des ressources égales à tout ou partie de ses appointements mensuels, pour des durées de trois mois à plein tarif et trois mois à demi-tarif s'agissant de salariés disposant d'une ancienneté comprise entre un et cinq ans.

De même, l'article 17, alinéa 3 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie prévoit que pendant les périodes d'indemnisation de la salariée en congé maternité, l'intéressée percevra la différence entre sa rémunération et les indemnités journalières versées par la sécurité sociale et les régimes de prévoyance auxquels participe l'employeur.

En l'espèce, l'article VIII du contrat de travail de la salariée stipule : '[la salariée] percevra (...) une prime annuelle déterminée en fonction des résultats du Groupe et corrélée à ses objectifs annuels. Cette prime a été fixée à 20.000 €, prorata temporis en cas d'année incomplète'.

Bien que l'intimée soutienne que 'ce n'est pas l'absence de fixation des objectifs qui est en cause (...) mais l'absence d'accord sur le montant de cette rémunération variable', le mémo interne de la société daté du 26 mai 2012 indique que 'les objectifs annuels de chaque RGC (Responsable Grand Compte) sont fixés en début d'année par le Directeur Commercial France, avec la validation du Directeur Général France'.

Il en résulte que la rémunération variable de la salariée devait être calculée sur la base d'objectifs déterminés unilatéralement par l'employeur.

Par ailleurs, l'intimée ne saurait valablement soutenir que la salariée indique qu'elle n'a 'reçu [que] tardivement une proposition d'objectifs pour l'année 2013", alors que cette dernière mentionne expressément dans ses écritures que la société a fait 'fi de ses obligations contractuelles en ne fixant pas [s]es objectifs annuels'.

D'une façon générale, indépendamment des arguments de la société concernant ses difficultés conjoncturelles, il ne résulte d'aucun élément du dossier que la salariée s'était vue assigner des objectifs pour l'année 2013 par son employeur.

En ce sens, aux termes du courrier adressé le 1er septembre 2014 à la salariée, la société reconnaît expressément que 'les objectifs 2013 n'ont pas pu être définis'.

Par conséquent, à défaut pour l'employeur d'avoir précisé à la salariée les objectifs à réaliser pour l'année 2013 ainsi que les conditions de calcul vérifiables, la rémunération variable prévue pour cette année est due à l'appelante.

En outre, dès lors qu'il résulte des articles 16 et 17 de la convention collective applicable l'obligation de maintien de la rémunération de la salariée pendant son congé maternité et son arrêt de travail et que ces textes n'excluent pas de ladite rémunération la part variable, le placement de l'appelante en congé maternité et en arrêt de travail pour maladie au cours de l'année 2013 est sans incidence sur les sommes qui lui sont dues à titre de rémunération variable au titre de l'année 2013.

Dans la mesure où la salariée était fondée à percevoir une somme de 20.000 euros à titre de rémunération variable pour l'année 2013, et au vu de la somme de 12.581 euros versée au mois de septembre 2014 par la société à ce titre (ainsi que les deux parties le reconnaissent et au vu du bulletin de paie), elle sera dûment indemnisée par le versement d'une somme de 7.419 euros bruts au titre du reliquat de rémunération variable due pour l'année 2013, outre une somme de 741,90 euros bruts au titre des congés payés y afférents.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il la déboute de ce chef.

Sur le rappel de salaire au titre de la rémunération variable de l'exercice 2014 :

La salariée fait grief à l'employeur de ne lui avoir transmis les objectifs permettant de calculer sa rémunération variable due au titre de l'année 2014 que le 23 mai 2014.

Au soutien de ses allégations, elle produit un courrier électronique que lui a adressé le 23 mai 2014 Monsieur [P] [M], responsable d'agences Ile de France, qui lui transmet sa fiche d'objectifs pour l'année 2014. Ce message, au même titre que l'ensemble des pièces versées aux débats par les parties, ne laisse nullement apparaître que la salariée s'était vue communiquer ses objectifs au préalable.

En ce sens, l'intimée reconnaît in fine que la salariée ne s'était vue remettre aucun objectif pour l'année 2014 avant cette date, puisqu'elle déclare que cette dernière s'est vu proposer des objectifs oralement au mois de mai 2014 puis par écrit, au mois de juillet 2014.

Ainsi qu'il a été montré précédemment, il appartenait à l'employeur de fixer des objectifs à la salariée, de sorte qu'il ne saurait valablement arguer (au demeurant, sans produire d'élément probant) que le caractère tardif de la détermination des objectifs pour l'année 2014 résultait de l'absence de réponse de la salariée à sa proposition d'objectifs.

Dès lors que la période de référence concernait l'année civile 2014 (ainsi qu'il n'est pas contesté), la chronologie des faits démontre le caractère tardif de la communication des objectifs à la salariée pour l'année 2014.

Par conséquent, l'employeur n'était pas fondé à opposer lesdits objectifs à la salariée pour déterminer sa rémunération variable due pour l'année 2014.

Il en résulte que la salariée est fondée à percevoir la rémunération variable contractuellement prévue au titre de l'année 2014.

La lecture du bulletin de paie de la salariée pour le mois de décembre 2014 démontre que la somme de 3.348,90 euros qui lui a été versée à cette occasion correspond à sa prime de treizième mois, ce dont il résulte que l'intimée ne saurait valablement soutenir qu'elle doit être déduite de la somme due au titre de la rémunération variable pour l'année 2014.

En outre, comme il a été montré précédemment, la prime due à la salariée n'a pas lieu d'être réduite en tenant compte de ses absences causées par ses arrêts de travail pour maladie et son congé maternité.

Compte tenu de la dispense de préavis de la salariée à compter du 17 décembre 2014 (laquelle justifie l'allocation d'un rappel d'indemnité compensatrice de préavis, ainsi qu'il est justifié ci-après), il convient donc de condamner l'intimée à verser à l'appelante une somme de 19.277,78 euros bruts à titre de rappel de rémunération variable pour l'année 2014, outre une somme de 1.927,78 euros bruts au titre des congés payés y afférents.

Le jugement sera donc infirmé s'agissant du montant des sommes allouées à ce titre.

Sur le rappel d'indemnité compensatrice de préavis :

Aux termes de l'article L. 1234-5, alinéa 2 du code du travail, l'inexécution du préavis, notamment en cas de dispense par l'employeur, n'entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s'il avait accompli son travail jusqu'à l'expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise.

En l'espèce, il n'est pas contesté que la salariée a été dispensée de préavis par son employeur et qu'elle a perçu à ce titre une indemnité n'incluant aucune rémunération variable.

Au vu de la durée du préavis (trois mois), de la rémunération variable d'un montant de 20.000 euros annuel (soit 1.666,67 euros par mois, sur la base d'une année complète) qu'elle était fondée à percevoir au titre des années 2013 et 2014, et à défaut de détermination d'objectif pour l'année 2015, la salariée est fondée à percevoir une somme de 5.000 euros bruts à titre de rappel d'indemnité compensatrice de préavis, outre une somme de 500 euros bruts au titre des congés payés y afférents.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il déboute l'appelante de ces chefs.

Sur le reliquat dû au titre de l'indemnité de non-concurrence :

- Sur la prescription

Aux termes de l'article L. 3245-1 du code du travail, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

En l'espèce, la demande en paiement de l'indemnité de concurrence de la salariée n'était pas prescrite le 2 juin 2015 lorsqu'elle a saisi le juge des référés. L'effet interruptif de prescription résultant de cette demande en justice a produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance de référé.

Alors que la cour d'appel de Versailles a rendu son arrêt de confirmation de l'ordonnance de référé du conseil de prud'hommes le 5 juillet 2016, l'intimée ne saurait valablement faire valoir que cette date marquait le point de départ d'un délai de prescription biennal s'agissant de la demande au titre du reliquat dû au titre de l'indemnité de non-concurrence, dès lors que la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence a la nature d'une indemnité compensatrice de salaires.

Ainsi, dans la mesure où cette créance est assujettie au délai de prescription triennal prévu à l'article L. 3245-1 du code du travail, la demande de la salariée n'était prescrite ni au 21 juillet 2017 (date à laquelle elle a formulé ses demandes au fond au titre de l'indemnité de non-concurrence), ni au 4 octobre 2018 (date à laquelle elle a modifié ses demandes).

Il convient de relever au surplus qu'en tout état de cause, la saisine au fonds du conseil de prud'hommes en décembre 2014 a interrompu la prescription pour toutes les actions concernant, au cours d'une même instance, le même contrat de travail, peu important dès lors la date à laquelle la demande de reliquat d'indemnité de non-concurrence a été présentée en cours d'instance.

Il s'ensuit que l'action de la salariée en paiement du reliquat d'indemnité de non-concurrence et des congés payés afférents n'est pas prescrite. La demande qu'elle présente de ce chef est donc recevable.

- Sur le fond

Le contrat de travail signé entre les parties comporte une clause de non-concurrence rédigée dans les termes suivants :

' Compte tenu des fonctions et des responsabilités confiées à [la salariée] des spécificités techniques mises en oeuvre dans la société, il est convenu qu'en cas de rupture du présent contrat, pour quelle que cause que ce soit et quelle que époque que ce soit, s'interdira de s'intéresser à quelque titre que ce soit, directement ou indirectement à toute activité concurrente à celle de la société, et ce notamment dans le domaine de la location de constructions modulaire.

Cette interdiction est limitée à une durée de un an, à compter de la date de rupture effective du contrat. Par ailleurs, de par la nature internationale de l'activité module, cette interdiction est limitée au secteur géographique actuellement couvert par [la salariée] : France.

En contrepartie de cette obligation de non concurrence, [la salariée] percevra, pendant la durée d'application de la clause, une indemnité mensuelle selon les termes de la convention collective de la métallurgie.

La société se réserve le droit de libérer de son obligation de non concurrence sans que celui-ci puisse prétendre au paiement d'une quelconque indemnité ; notification lui en sera alors faite par lettre recommandée avec accusé de réception, dans les huit jours de la notification de la rupture, et ce, quelqu'en soit l'auteur'.

Selon l'article 28 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, la contrepartie de la clause de non-concurrence correspond, pendant la durée de non-concurrence, à une indemnité mensuelle égale à 5/10 de la moyenne mensuelle des appointements ainsi que des avantages et gratifications contractuels dont l'ingénieur ou cadre a bénéficié au cours de ses 12 derniers mois de présence dans l'établissement. Toutefois, en cas de licenciement, cette indemnité mensuelle est portée à 6/10 de cette moyenne tant que l'ingénieur ou cadre n'a pas retrouvé un nouvel emploi et dans la limite de la durée de non-concurrence.

En cas de rupture du contrat de travail avec dispense d'exécution du préavis par le salarié, la date à partir de laquelle celui-ci est tenu de respecter l'obligation de non-concurrence, la date d'exigibilité de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et la date à compter de laquelle doit être déterminée la période de référence pour le calcul de cette indemnité sont celles du départ effectif de l'entreprise ; il en résulte que l'employeur qui dispense le salarié de l'exécution de son préavis doit, s'il entend renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l'intéressé de l'entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires.

La clause de non-concurrence de la salariée a été levée par courrier daté du 23 mars 2015, alors qu'elle s'est vu notifier la rupture de son contrat de travail par courrier du 17 décembre 2014, envoyé le 18 décembre suivant et réceptionné le 22 décembre 2014, lequel le dispensait par ailleurs de l'exécution de son préavis.

Il est ainsi établi que l'employeur n'a pas informé la salariée de ce qu'il la libérait de sa clause de non-concurrence avant son départ effectif de l'entreprise.

Par conséquent, il appartenait aux parties de se conformer aux stipulations contractuelles et conventionnelles de la clause de non-concurrence litigieuse, à compter du départ effectif de l'appelante de l'entreprise.

Il incombe à l'employeur, qui se prétend libéré de l'obligation de payer la contrepartie financière d'une clause de non concurrence, de rapporter la preuve de la violation de cette clause par le salarié.

Le contrat de travail versé aux débats par la salariée démontre qu 'elle a été engagée par la société Isosign, le 29 janvier 2015, en vue d'exercer des fonctions de responsable de l'activité trading à compter du 1er avril suivant.

L'intimée se borne à soutenir, d'une part, que la société Isosign appartenait à un groupe dont certaines activités ont une activité concurrente à celle du groupe Thouax auquel appartenait la société TSM et, d'autre part, que les deux employeurs successifs de la salariée relèvent de la branche de la métallurgie.

Ces éléments apparaissent excessivement imprécis pour démontrer la violation de son obligation de non-concurrence par la salariée.

Au surplus, outre le fait que l'intimée reconnaît elle-même que 'la société TSM n'a pas la preuve matérielle que [la salariée] a commis des agissements en violation de [sa] clause' de non-concurrence, la cour relève que la société Isosign exerce principalement une activité de fabrication de panneaux de signalisation, tandis que la société TSM mène une activité de location, gestion, et vente de conteneurs maritimes et constructions modulaires.

Il en résulte que la violation de son obligation de non-concurrence par la salariée n'est pas établie.

Sur la base d'un salaire mensuel brut moyen d'un montant de 5.881,56 euros (incluant les sommes dues à la salarié à titre de rappels de salaires sur sa rémunération variable), au vu de l'article 28 de la convention collective applicable et dans la mesure où la salariée n'a occupé un nouvel emploi qu'à compter du 1er avril 2015, cette dernière est fondée à percevoir mensuellement les sommes suivantes :

- 3.528,94 euros pour la période comprise entre le 17 décembre 2014 et le 1er avril 2015 (soit un total de 12.210,12 euros) ;

- 2.940,78 euros pour la période compris entre le 2 avril et le 17 décembre 2015 (soit un total de 25,114,26 euros).

La salariée est donc fondée à percevoir une somme totale de 37.324,38 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre une somme de 3.732,44 bruts au titre des congés payés y afférents.

Dès lors qu'en application de l'ordonnance de référé précité et de son arrêt de confirmation, la salariée n'a perçu que la somme de 28.000,03 euros à titre d'indemnité de non-concurrence et la somme de 1.800 euros au titre des congés payés y afférents, l'intimée reste donc débitrice d'une somme de 9.324,35 euros bruts à titre de reliquat d'indemnité de non-concurrence, outre une somme de 1.932,44 euros bruts au titre des congés payés y afférents.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il déboute la salariée de ces chefs de demandes.

Sur le statut de salariée protégée :

Selon l'article L. 2411-10 du code du travail en sa rédaction en vigueur du 1er mai 2008 au 1er janvier 2018, l'autorisation de licenciement est requise pour le candidat aux fonctions de membre élu du comité d'entreprise, au premier ou au deuxième tour, pendant les six mois suivant l'envoi des listes de candidatures à l'employeur. Cette autorisation est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de membre élu du comité d'entreprise ou de représentant syndical au comité d'entreprise a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement.

En l'espèce, il est constant que la salariée a été convoquée à l'entretien préalable de licenciement par courrier recommandé avec accusé de réception daté du 3 décembre 2014 réceptionné le 8 décembre suivant.

Au soutien de son argumentation selon laquelle elle aurait informé l'employeur de sa candidature antérieurement à l'engagement de la procédure de licenciement, la salariée produit un courrier électronique mentionnant un envoi le 3 décembre 2014 à 11 heures, par lequel elle faisait part à Monsieur [J] (qu'elle présente comme le directeur des ressources humaines en charge des élections au sein de la société) de ce qu'elle entendait se porter candidate aux élections professionnelles.

Cela étant, la matérialité de l'envoi de ce courrier électronique par la salariée et sa réception par l'employeur ne sont confortés par aucun élément. Ainsi, il n'est pas démontré que l'information que l'appelante indique avoir transmise à l'employeur a effectivement été réceptionnée par celui-ci avant qu'elle ne soit convoquée à un entretien préalable de licenciement.

Il y a donc lieu de constater que la salariée ne disposait pas du statut de salariée protégée.

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail :

Lorsqu'un salarié a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que son employeur le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation était justifiée ; c'est seulement s'il ne l'estime pas fondée qu'il doit statuer sur le licenciement.

Il relève du pouvoir souverain des juges du fond d'apprécier si l'inexécution de certaines des obligations résultant d'un contrat synallagmatique présente une gravité suffisante pour en justifier la résiliation.

En l'espèce, il est constant que la salariée a sollicité auprès de la juridiction prud'homale la résiliation judiciaire dès le 13 décembre 2014.

Dès lors que cette demande a été formée antérieurement à l'envoi de la lettre de licenciement, l'intimée ne saurait utilement se prévaloir de qu'elle est postérieure à la date d'engagement de la procédure de licenciement.

Il convient donc de rechercher si la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail était justifiée.

Au soutien de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur, la salariée reproche à l'employeur :

- de ne lui avoir pas fixé d'objectifs pour l'année 2013, de lui avoir notifié tardivement ses objectifs pour l'année 2014 et d'avoir procédé à une retenue indue sur sa rémunération variable pour l'année 2013 ;

- d'avoir modifié de façon unilatérale et fautive son contrat de travail à l'issue de son congé maternité, en la rétrogradant du poste de Responsable Grands Comptes au poste de Technico-Commercial, en supprimant l'activité 'Vente' qui était contractuellement affectée à ses fonctions, sans obtenir son consentement ou mettre en oeuvre la procédure qui s'imposait ;

- de l'avoir licenciée de façon discriminatoire après l'annonce de sa candidature aux élections professionnelles.

Les manquements de l'employeur dans la détermination des objectifs fixées à la salariée et le versement de sa rémunération variable de la salariée au titre des années 2013 et 2014 ont été établis précédemment.

Bien que la société argue de ce qu'au mois de septembre 2014, elle a versé une somme de 12.581 euros à la salariée au titre de sa rémunération variable pour l'année 2013 (ainsi qu'il n'est pas contesté), il n'en demeure pas moins que la somme ainsi versée ne correspond qu'à une partie des 20.000 euros dus à la salariée au titre de ladite rémunération variable.

Par ailleurs, il est constant que le manquement de l'employeur au titre de la rémunération variable due pour l'année 2014 n'a fait l'objet d'aucune régularisation.

Les manquements ainsi constatés, qui portent sur un élément essentiel du contrat de travail, la rémunération, sont, compte-tenu des montants en cause, suffisamment graves pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts par l'employeur.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il déboute la salariée de sa demande de ce chef et la résiliation judiciaire du contrat de travail prononcée aux torts par l'employeur, à effet à la date du licenciement, qui devient sans objet.

Sur les conséquences indemnitaires de la résiliation judiciaire du contrat de travail :

La résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Compte tenu de son salaire mensuel moyen en intégrant les sommes dues par l'employeur à titre de rémunération variable (5.881,56 euros), de son ancienneté au service de la société et de la somme de 5.321 euros perçue à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, l'intimée sera condamnée à payer à la salariée la somme de 54,09 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement, conformément à l'article 29 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

La cour fixe le préjudice subie par la salariée du fait de la perte de son emploi imputable à son employeur à la somme de 40.000 euros. L'intimée sera en conséquence condamnée à payer à la salariée la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige.

Sur le remboursement des indemnités de chômage à Pôle emploi

S'agissant d'un salarié de plus de deux ans d'ancienneté et d'une entreprise de plus de onze salariés, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il fait application de l'article L. 1235-4 du code du travail, dans les conditions fixées au dispositif.

Sur les dépens et l'indemnité de procédure :

La société, qui succombe à l'instance, doit supporter les dépens de première instance et d'appel et il y a lieu de la débouter de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il y a lieu de la condamner à payer à la salariée la somme de 2.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme de 1 200 euros allouée à ce titre par le conseil de prud'hommes.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Constate que la société TSM, aux droits de laquelle vient la société Algeco, a acquiescé au jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre en date du 30 octobre 2019 ;

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre en date du 30 octobre 2019, sauf en ce qu'il condamne la société TSM, aux droits de laquelle vient la société Algeco, à verser à Madame [D] [B] une somme de 1.200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ainsi qu'au remboursement aux organismes sociaux concernés des indemnités de chômage éventuellement payées à Madame [D] [B] dans la limite de six mois d'indemnités;

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [D] [B] aux torts de la société TSM, aux droits de laquelle vient la société Algeco ;

Dit que la résiliation judiciaire du contrat de travail prend effet à la date du licenciement, qui devient sans objet ;

Condamne la société Algeco, venant aux droits de la société TSM, à payer à Madame [D] [B] les sommes suivantes :

- 7.419 euros bruts au titre du reliquat de rémunération variable due pour l'année 2013 ;

- 741,90 euros bruts au titre des congés payés afférents au reliquat de rémunération variable due pour l'année 2013 ;

- 19.277,78 euros bruts à titre de rappel de rémunération variable pour l'année 2014 ;

- 1.927,78 euros bruts au titre des congés payés afférents au rappel de rémunération variable pour l'année 2014 ;

- 5.000 euros bruts à titre de rappel d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 500 euros bruts au titre des congés payés afférents au rappel d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 9.324,35 euros bruts à titre de reliquat d'indemnité de non-concurrence ;

- 1.932,44 euros bruts au titre des congés payés afférents au reliquat d'indemnité de non-concurrence ;

- 54,09 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 40.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 2.800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne la société Algeco, venant aux droits de la société TSM, aux dépens d'appel.

- Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- Signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Sophie RIVIERE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15e chambre
Numéro d'arrêt : 19/04236
Date de la décision : 06/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-06;19.04236 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award