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20/09/2022 | FRANCE | N°21/06625

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 20 septembre 2022, 21/06625


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





1ère chambre 1ère section





ARRET N°





CONTRADICTOIRE

Code nac : 26F





DU 20 SEPTEMBRE 2022



N° RG 21/06625

N° Portalis DBV3-V-B7F-U2FU





AFFAIRE :



[B], [G], [P] [J]-[Z]

C/

[S], [R] [I]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Septembre 2021 par le Tribunal Judiciaire de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 21/013

11



Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :





à :



-Me Banna NDAO,



- Me CHATEAUNEUF,



- le Procureur Général



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

1ère chambre 1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 26F

DU 20 SEPTEMBRE 2022

N° RG 21/06625

N° Portalis DBV3-V-B7F-U2FU

AFFAIRE :

[B], [G], [P] [J]-[Z]

C/

[S], [R] [I]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Septembre 2021 par le Tribunal Judiciaire de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 21/01311

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

-Me Banna NDAO,

- Me CHATEAUNEUF,

- le Procureur Général

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [B], [G], [P] [J]-[Z]

né le 07 Mai 1968 à [Localité 4]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 4]

représenté par Me Banna NDAO, avocat - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 667

APPELANT

*********************

Madame [S], [R] [I]

née le 15 Octobre 1967 à [Localité 10]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Philippe CHATEAUNEUF, avocat - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 643 - N° du dossier 2022040

INTIMÉE

*********************

LE PROCUREUR GENERAL

COUR D'APPEL DE VERSAILLES

[Adresse 2]

[Localité 4]

pris en la personne de Mme TRAPERO, Avocat général

PARTIE JOINTE

En présence de :

[X] [Z]

né le 15 Février 1965 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 4]

[Y], [O] [Z] (MINEUR)

né le 08 Février 2006 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, en présence du ministère public, l'affaire a été débattue le 13 Juin 2022 en chambre du conseil, l'avocat de la partie ne s'y étant pas opposé, devant Madame Anna MANES, Présidente chargée du rapport et Mme Nathalie LAUER, Conseiller.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anna MANES, Présidente,

Madame Nathalie LAUER, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

**************************

FAITS ET PROCÉDURE

De l'union de M. [Z] et Mme [I] est né [Y] [Z], le 8 février 2006 à [Localité 5] (Haut-Rhin).

Par la suite, M. [Z] et Mme [I] ont divorcé.

M. [Z] s'est remarié avec M. [J] le 3 octobre 2020.

Par requête enregistrée au greffe du tribunal judiciaire de Versailles le 10 mars 2021, M. [J] a sollicité l'adoption simple de [Y].

Par jugement contradictoire rendu le 17 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Versailles a :

- rejeté la demande d'adoption simple émise par M. [B] [J] concernant [Y] [Z],

- ordonné la notification de la présente décision par le greffe, à M. [B] [J], Mme [I] et au ministère public.

M. [B] [J]-[Z] a interjeté appel de ce jugement le 28 septembre 2021.

Le dossier a été communiqué à M. le Procureur Général près la cour d'appel de Versailles qui a apposé son visa le 10 novembre 2021.

Par ordonnance fixative du 18 novembre 2021, la 1ère chambre, 1ère section de la cour d'appel de Versailles a :

- ordonné communication de la procédure au ministère public, pour avis et conclusions,

- invité le ministère public à assister aux débats à l'audience en chambre du conseil fixée au 13 juin 2022 à 09h00 en salle n° 1.

Le magistrat chargé de la mise en état de la 1ère chambre civile, 1ère section, de la cour d'appel de Versailles a procédé à l'audition de M. [Y] [Z] le 17 mars 2022 et le compte rendu qui a été dressé, a été communiqué aux avocats des parties à l'instance et au ministère public.

Par ses dernières conclusions notifiées le 8 juin 2022, M. [B] [J]-[Z] demande à la cour, au fondement des articles 361 et 348-6 du code civil, de :

- Infirmer le jugement rendu le 17 septembre 2021 par la chambre du conseil du tribunal judiciaire de Versailles section affaires gracieuses ;

Statuant à nouveau,

- Dans le cas où la cour estimerait que les éléments apportés par M. [J] et la parole de [Y] ne sont pas suffisants à démontrer les violences subies ;

Avant dire droit, ordonner une expertise psychologique de [Y] ;

- Renvoyer cette affaire à une prochaine audience dans l'attente du dépôt du rapport de l'expert ;

A défaut,

- Prononcer l'adoption simple de [Y] [Z] né le 08 février 2006 à [Localité 5] (Haut-Rhin), domicilié [Adresse 6] par M. [B] [J]-[Z], né le 07 mai 1968 à [Localité 4], domicilié [Adresse 6] (France),

- Ordonner la transcription du jugement d'adoption conformément à l'article 362 du code civil,

- Juger que l'adopté se nommera [Y] [Z]-[J],

- Débouter tous opposants aux présentes écritures de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

Par ses dernières conclusions notifiées le 10 juin 2022, Mme [I] demande à la cour de :

Au fondement des articles 146, alinéa 2, et 564 du code de procédure civile ;

- Déclarer principalement irrecevable et subsidiairement mal fondée la demande d'expertise psychologique de [Y] formée avant dire droit par M. [J] ;

Au fondement des articles 348, 348-6, 360, 361, 363 et 365 du code civil,

- Déclarer M. [B] [J]-[Z] mal fondé en son appel et l'en débouter intégralement,

- Confirmer le jugement rendu le 17 décembre 2021 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- Condamner M. [B] [J] à lui régler la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner M. [B] [J] aux entiers dépens, dont distraction pour ceux d'appel au profit de Me Chatauneuf, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le ministère public a notifié son avis par la voie du réseau privé virtuel des avocats le 19 mai 2022 aux termes duquel il demande à la cour de :

- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Versailles du 17 septembre 2021 qui déboute M. [J]-[Z] de sa demande d'adoption.

Sans autorisation de cette cour, ce qu'il admet lui-même, le conseil de M. [B] [J] lui a fait parvenir une note en délibéré.

Cette note sera dès lors déclarée irrecevable.

A titre surabondant, comme il sera examiné ultérieurement, les informations qu'elle contient sont inopérantes au regard des dispositions de l'article 348-6, alinéa 1, du code civil qui exigent que soient réunies des conditions précises pour permettre de passer outre au refus à l'adoption simple des parents ou de l'un d'eux, lesquelles ne tiennent pas à l'état de santé de l'un d'entre eux.

SUR CE, LA COUR,

Sur la recevabilité de l'expertise judiciaire sollicitée par l'appelant

L'article 564 du code de procédure civile dispose que 'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.'

Il résulte de ce texte que si les parties ont la possibilité d'invoquer en appel des moyens nouveaux, de produire de nouvelles pièces et de nouvelles preuves, en revanche, elles ne peuvent pas présenter de demandes nouvelles, c'est-à-dire des prétentions qui diffèrent de celles soumises au premier juge. Le principe du double degré de juridiction s'oppose en effet à ce qu'une partie puisse formuler pour la première fois en cause d'appel des demandes qui n'auraient pas déjà été examinées par le juge de première instance.

L'article 565 du code de procédure civile, (souligné par la cour) énonce en outre que 'Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.'

Ce texte autorise donc une partie à formuler en appel une prétention nouvelle à la condition qu'elle tende aux mêmes fins que celle que cette même partie a déjà soumise au premier juge.

L'article 566 du même code précise enfin que (souligné par la cour) 'Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.'

Contrairement à ce que soutient Mme [I], la demande d'expertise judiciaire sollicitée par M. [B] [J]-[Z], bien que nouvelle en cause d'appel, n'est pas irrecevable dès lors qu'elle a pour but de justifier la prétention formulée dès la première instance de sorte qu'elle s'analyse en une demande qui la complète et sera dès lors déclarée recevable.

Son bien-fondé sera examiné ultérieurement, à l'occasion de l'examen de la demande principale de M. [B] [J]-[Z].

Sur la demande d'adoption simple de M. [B] [J]-[Z]

' Moyens des parties

Se fondant sur les dispositions de l'article 348-6 du code civil, M. [B] [J]-[Z] poursuit l'infirmation du jugement en ce qu'il rejette sa demande d'adoption de [Y] [Z] alors que, la résidence ayant été fixé chez sa mère après le divorce, ce dernier a subi de sa part des violences physiques, verbales et psychologiques de sorte que dès ses onze ans, un transfert de résidence chez son père a été sollicité. L'opposition de sa mère, le climat tendu, la pression exercée par Mme [I] pour que [Y] renonce à sa demande de transfert de résidence chez son père (pièces 3 et 4), ont conduit son père à mettre en place un suivi par un psychologue de l'adolescent (pièce 10) qui atteste de ses difficultés psychologiques et le démérite flagrant de sa mère.

Il indique que leur persévérance, à lui-même et au père de l'enfant, l'accompagnement de sa psychologue et de ses pères ont permis le transfert de résidence de [Y] chez son père. Il ajoute que le climat de confiance dans lequel [Y] a alors évolué, lui a permis de se confier sur ce qu'il vivait au quotidien, mais en refusant de porter plainte. Il souligne cependant qu'à la suite d'une altercation violente avec sa mère, l'adolescent a adressé au service 119 (enfance en danger), le 27 décembre 2020, un courriel dans lequel il relate ses relations avec sa mère qui, selon l'appelant, démontre clairement la défaillance de Mme [I] dans son rôle de mère (pièce 11). Il fait valoir que les échanges entre Mme [I] et [Y] en justifient aussi et qu'il ressort de ceux-ci qu'elle admet elle-même avoir démérité dans son rôle de mère (pièce 28).

Il soutient que Mme [I] n'a contacté qu'une seule fois M. [Z] au sujet de leur fils [Y] entre janvier 2021 à janvier 2022 comme l'atteste son époux (pièce 12) de sorte que, selon lui, Mme [I] a menti au juge lorsqu'elle lui a dit qu'elle se sentait écartée alors qu'elle s'écartait volontairement et d'elle-même de la vie de son fils. Il souligne en outre qu'elle n'a offert de cadeaux à son fils ni pour les Noël 2020 et 2021, ni pour ses 15 ans et ses 16 ans en février 2021 et 2022. De même, il précise qu'elle ne contribue que modiquement aux frais d'éducation et d'entretien de [Y] laissant son ex-époux et lui-même y procéder. Il fait encore valoir que les propositions de Mme [I] sont toujours restées sans suite comme la médiation familiale qu'elle avait assurée, devant le juge, vouloir mettre en place, ce qui n'a pas été fait.

Il ajoute que [Y] s'est également résolu à déposer une main courante le 11 octobre 2021 afin de préciser les raisons pour lesquelles il ne souhaitait plus se rendre chez sa mère (pièce 15) et qu'il se réservait le droit de porter plainte contre elle si elle persistait à lui nuire.

L'appelant insiste sur le fait que la volonté de [Y] est d'être adopté par lui et que cette décision est claire et sereine comme le confirme la psychologue qui le suit depuis le 1er février 2010 (pièce 10).

Il déduit des éléments qui précèdent que les regrets exprimés par Mme [I], la manifestation de son désir de reprendre contact avec son fils ne sont pas suffisants pour faire échec à la demande d'adoption, qu'il a clairement démontré le caractère abusif de son refus à l'adoption compte tenu de son désintérêt pour son fils et que ses agissements ont fortement compromis la santé mentale et l'équilibre de [Y].

Il rétorque aux éléments apportés par Mme [I] que la notion de 'syndrome d'aliénation parentale' qu'elle évoque est une notion désormais obsolète et infondée. Il insiste sur le fait que Mme [I] tente de décrédibiliser la parole de [Y] alors qu'il va bientôt avoir 18 ans et qu'il a parfaitement conscience et connaissance des 'atrocités' que sa mère lui a fait subir ; qu'il a retrouvé stabilité et poursuit des études brillantes dans un des meilleurs lycée de la région comme ses résultats scolaires le démontrent.

Il répond aux critiques adverses sur la multiplication des procédures judiciaires introduites par M. [Z], son ex-époux, qu'elles ont été motivées par la résistance de Mme [I] aux droits du père car il n'avait aucun autre moyen pour maintenir ses liens à son fils [Y] (pièce 32).

Il s'étonne que Mme [I] ait pu communiquer des correspondances privées entre [Y] et son père alors que l'adolescent affirme n'avoir jamais transmis ces correspondances à sa mère et que tant le téléphone que la ligne de [Y] appartiennent à M. [J] (pièce 31). Il s'ensuit que, selon lui, cette production porte atteinte à l'intimité de [Y].

S'agissant des attestations datées de mai et juin 2021 (pièces adverses 7, 11 à 19) produites par Mme [I], M. [B] [J] prétend qu'elles sont de pures complaisances et n'ont aucune force probante. Quant aux autres attestations, elles ne sont pas, selon lui, de nature à emporter la conviction de la cour puisqu'elles sont pour certaines incohérentes et également le produit de la rancoeur de proches ou de la famille. Il ajoute que ce n'est pas parce que [Y] ne parlait pas des violences commises par sa mère sur lui que celles-ci n'existaient pas.

M. [B] [J]-[Z] affirme avoir noué des liens forts avec [Y] et fait valoir que Mme [I] ne parvient pas à démontrer le contraire dans ses écritures. Si un passif familial existe, il est inopérant en l'espèce puisqu'il est amplement démontré que [Y] et lui-même entretiennent des relations filiales depuis des années et grâce à la cellule familiale reconstituée entre [Y] et ses pères, il a pu s'épanouir dans l'amour et l'équilibre dont il avait besoin. Leurs proches ont été si choqués par la décision du premier juge qu'ils ont tenu à témoigner du véritable attachement et de la relation forte qu'ils ont développés (pièces 16 à 27).

L'appelant relève que de nombreuses attestations soulignent l'extrême maturité de [Y] et sa parfaite conscience de son vécu, ce qui, selon lui, explique son souhait de ne pas entacher la demande d'adoption par les violences qu'il a subies. Il explique que pour [Y] et lui-même la demande d'adoption est une démarche naturelle et logique qui s'inscrit dans ce qu'ils ont vécu ensemble.

Enfin, il rappelle que M. [Z], le père de [Y], a souffert de deux cancers en 2016 et 2020 et que pendant cette période très douloureuse les liens qu'il entretenait avec l'adolescent se sont renforcés. Il indique que [Y] vit depuis dans la peur que son père disparaisse avant ses dix-huit années et qu'il soit obligé de retourner vivre avec sa mère (pièce 25). Il insiste pour que la cour comprenne que la présente demande d'adoption consiste en la suite logique de cet amour réciproque.

En définitive, l'appelant prétend avoir justifié que le refus de Mme [I] à l'adoption sollicitée est abusif dès lors qu'il est, selon lui, amplement démontré que sa mère s'est désintéressée de lui, par son absence, au risque de compromettre sa santé et sa moralité (pièces 10 à 12).

Mme [I] poursuit la confirmation du jugement et souligne que cette procédure d'adoption simple s'inscrit dans une histoire familiale complexe et douloureuse au cours de laquelle [Y] est devenu l'enjeu d'un conflit parental exacerbé par M. [Z] et son nouvel époux sur le fond d'un syndrome d'aliénation parentale ou, plus exactement, d'un conflit de loyauté qui place [Y] dans une situation difficile.

Elle rappelle que les liens qu'elle entretenait avec son fils étaient très forts (pièces 17, 16, 23, 7, 13, 19, 18, 22). Elle soutient que le couple que son ex-mari forme désormais avec M. [B] [J]-[Z] a développé une haine envers elle et a mené une opération de dénigrement et d'exclusion systématique envers elle dans le but de l'éloigner de son fils comme le démontrent amplement les SMS que son ex-mari a échangés avec leur fils lesquels attestent du dénigrement de la qualité de la vie de [Y] auprès d'elle par son père (pièce 5). Elle note que les frère et soeur de [Y], [N] et [E], ont vécu la même expérience que vit leur frère et après avoir envisagé l'adoption de [N], M. [B] [J]-[Z] y a renoncé parce que [N] s'y est finalement opposé. Ce refus a entraîné le rejet de [N] de la part de M. [J]. Elle rapporte que l'hostilité de M. [J] envers [E] a fait que celle-ci ne lui parle plus et que son propre son père ne l'a même pas invitée à leur mariage. Elle souligne que M. [B] [J]-[Z] n'entretient plus aucun lien avec son fils adoptif, [W], et sa fille biologique, [V]. Elle prétend que [Y], le plus jeune, en quête de repère, a sans doute renoncé à s'opposer à M. [B] [J]-[Z] et, las de devoir développer un double discours, s'est résigné à se conformer au discours paternel.

Elle insiste sur le fait que le dossier de M. [B] [J]-[Z], pour démontrer que les conditions de l'article 348-6 du code civil, est vide.

A cet égard, elle observe que M. [B] [J]-[Z] se fonde essentiellement sur trois éléments de preuve à savoir l'attestation de la psychologue (pièce 10), le courriel de [Y] (pièce 11) et l'attestation de son ex-époux (pièce 12).

Or, elle relève que la psychologue se borne à relater les propos des père et beau-père de [Y] ou de [Y] lui-même, puis elle parle elle-même de 'conflit de loyauté', de barrières anxieuses liées au conflit parental et de construction d'une identité propre. Elle souligne que la psychologue reste très prudente sur la prétendue 'violence' ou autres 'mauvais traitements' qui auraient été infligés par la mère de [Y] puisqu'elle parle d'une 'possible' influence délétère de la mère exprimée par son jeune patient, qu'elle se garde bien de confirmer. Elle en conclut que cette pièce ne démontre nullement le 'démérite de Mme [I]' et autres 'mauvais traitements' qui restent dans le domaine de l'imaginaire.

S'agissant du courriel de son fils au site 'enfance en danger', elle relève que le texte est dactylographié, non signé et que rien ne démontre qu'il n'a pas été rédigé par son ex-mari et M. [B] [J]-[Z]. Elle observe à cet égard que les reproches que l'auteur formule contre elle ne sont que la retranscription des propos que le couple [J]-[Z] tient sur elle, en particulier la 'manipulation' de [Y] devant le juge en 2017, le thème de 'l'argent' ou encore ses 'soit disant mensonges'.

Enfin, la pièce 12 est une preuve que le couple se fabrique à lui-même de sorte qu'il n'a aucune force probante.

Elle ajoute que s'agissant de la main courante de [Y], son adversaire procède de la même manière à savoir se constituer des preuves à soi-même avec la circonstance qu'elle a été obtenue postérieurement au prononcé du jugement dont appel à une époque où [Y] ne venait plus la voir et qu'elle n'a entrepris aucune démarche pour imposer à son fils de lui rendre visite.

Elle souligne qu'elle a tenté d'organiser une médiation familiale comme l'atteste le CIDFF d'[Localité 7] (pièce 25) et demeure dans l'attente d'y être convoquée avec les autres participants.

Elle conteste avoir reconnu avoir 'démérité dans son rôle de mère' et la lecture attentive du courriel invoqué par son adversaire (pièce 29) le démontre, selon elle, amplement. Elle y indique ne pas avoir 'mesuré toute la souffrance' de son fils, ce qui est somme toute une démarche saine puisqu'elle se remet en cause et qu'elle se montre en réalité sévère envers elle car il est faux de prétendre qu'elle ne se soit pas préoccupée de la souffrance de [Y]. A cet égard, elle précise avoir fait suivre [Y] par le Docteur [C], psychiatre à [Localité 7] qui l'a vu 9 fois en consultation du 2 octobre 2017 au 20 mai 2018 (pièce 27). Selon elle, le rôle de parent est compliqué et bien présomptueux serait celui qui se prétendrait être un parent parfait ; du reste, elle observe que M. [B] [J]-[Z] ne voit plus ses propres enfants et que M. [Z] fait tout pour rompre les relations de [Y] avec sa mère. Elle souligne que [Y] est coupé de ses frère et soeur, de ses grands-parents, de ses cousins, de tous ses amis d'enfance, que l'unité familiale a été brisée et cela préjudicie à [Y] avant tout.

Elle insiste sur le fait qu'elle ne prétend pas que son fils ment, mais qu'il a fini par se persuader de la véracité des accusations proférées par M. [B] [J]-[Z] et son père contre sa mère au point de croire que cela a vraiment existé et d'y adhérer. Elle souligne du reste qu'il est légitime de douter de la 'parfaite stabilité' de [Y] et du fait qu'il se concentre 'sur son avenir' alors que le séparer de la branche maternelle (frère, soeur, mère, grands-parents) n'est ni sain ni pertinent pour la construction de l'avenir de [Y].

Le ministère public rappelle que la procédure d'adoption relève de la matière gracieuse (article 1167 du code de procédure civile) et que, conformément aux dispositions de l'article 950 du même code, l'appel contre la décision gracieuse est formé par une déclaration faite ou adressée par pli recommandé au greffe de la juridiction qui a rendu la décision par l'intermédiaire d'un avocat. S'agissant du délai, il souligne que l'article 538 du code de procédure civile impartit un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement.

En l'espèce, il constate que le conseil de M. [B] [J]-[Z] s'est présenté au greffe de la chambre du conseil du tribunal judiciaire de Versailles le 28 septembre 2021 pour interjeter appel du jugement rendu le 17 septembre 2021 au nom de son client, M. [B] [J]-[Z] de sorte que l'appel paraît recevable pour avoir été formé dans les formes et délai prévus par les textes.

Le ministère public est d'avis que cette cour devra statuer en matière contentieuse puisque le tribunal a rejeté la demande d'adoption et que M. [B] [J]-[Z] le conteste de sorte que cette cour est désormais saisit d'un litige.

S'agissant des conditions de fond, il indique que les conditions de l'adoption simple sont remplies tant en ce qui concerne l'âge de l'adoptant, la différence d'âge adoptant/adopté, ainsi que le consentement de l'adopté et du père de celui-ci, conjoint de l'adoptant.

En revanche, la mère refuse de donner son consentement et dit ne pas être d'accord avec ce projet.

Le ministère public observe qu'entendu par le magistrat de la cour chargé de la mise en état, [Y] [Z], assisté de son conseil, a confirmé son souhait d'être adopté par M. [B] [J]-[Z] qu'il considère comme son second père.

Il souligne que, conformément aux dispositions de l'article 348 du code civil, applicable en matière d'adoption simple par renvoi de l'article 361 du même code, cette adoption simple d'un mineur dont la filiation est établie à l'égard des deux parents n'est possible qu'avec le consentement de ceux-ci.

Il rappelle que le code civil prévoit deux tempéraments à cette exigence, l'un en cas de refus abusif de l'un des parents (article 348-6 du code civil) l'autre en cas de décès, de perte de l'autorité parentale ou d'impossibilité de manifester sa volonté de l'un des parents (article 348, alinéa 2, du même code).

Selon le ministère public, l'article 348-6 du code civil permet au tribunal de prononcer l'adoption s'il estime abusif le refus de consentement opposé par l'un ou les parents 'lorsqu'ils se sont désintéressés de l'enfant au risque d'en compromettre la santé ou la moralité'.

Il appartient dès lors au juge de caractériser le désintérêt du parent qui refuse, désintérêt qui doit en outre avoir compromis la santé ou la moralité de l'enfant. L'abandon total d'un enfant sur le plan matériel et moral par l'un des parents pourrait constituer un tel désintérêt.

Il rappelle deux arrêts rendus par cette chambre de la cour d'appel de Versailles qui précise cette notion.

La cour d'appel de Versailles a ainsi jugé que le refus de consentement pourrait être qualifié d'abusif, compte tenu du désintérêt du parent pour sa fille, depuis de longues années et qu'il pourrait être passé outre, comme l'y autorise l'article 348-6 du code civil (RG 21/00636 rendu le 28 septembre 2021).

De même, la cour d'appel de Versailles a également jugé qu'il pouvait être passé outre le consentement d'une mère lorsque celle-ci avait totalement disparu depuis de longues années en laissant sans nouvelle ses propres parents et ses enfants, malgré les démarches pour la retrouver (RG 19/01915).

Le ministère public rappelle que, conformément aux dispositions de l'article 365 du code civil, l'adoption envisagée priverait la mère de ses droits d'autorité parentale au profit de l'adoptant et du père de l'enfant de sorte qu'il est inexact de prétendre que l'adoption ne changerait rien pour Mme [I] et il est normal que son consentement soit requis ou que de graves manquement soient démontrés ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Il ajoute qu'il n'apparaît en outre pas de l'intérêt de [Y], adolescent pris dans un conflit de loyauté et enjeu d'un conflit parental, comme le souligne le psychologue en pièce 10 produite par l'appelant, conflit manifestement non résolu.

Enfin, le ministère public relève que l'absence de liens entre M. [B] [J]-[Z] et sa fille biologique, son fils adoptif, le frère de [Y], [N], après que ce dernier aurait refusé l'adoption proposée, ne peut qu'interroger.

Il s'ensuit que le ministère public est d'avis qu'il y a lieu de confirmer le jugement en toutes ses dispositions.

' Appréciation de la cour

La cour rappelle que le rôle du ministère public est d'émettre un avis fondé sur le droit positif en tenant compte des éléments de preuve versés aux débats et que, contrairement à ce que soutient M. [B] [J]-[Z], en l'espèce, il a parfaitement rempli son rôle.

Selon l'article 361 du code civil, 'Les dispositions des articles 343 à 344, du dernier alinéa de l'article 345, des articles 346 à 350,353,353-1,353-2,355 et des trois derniers alinéas de l'article 357 sont applicables à l'adoption simple.'

L'article 348, alinéa 1er, du code civil dispose que 'Lorsque la filiation d'un enfant est établie à l'égard de ses deux parents, ceux-ci doivent consentir l'un et l'autre à l'adoption.'

Conformément aux dispositions de l'article 365 du code civil, 'L'adoptant est seul investi à l'égard de l'adopté de tous les droits d'autorité parentale, inclus celui de consentir au mariage de l'adopté, à moins qu'il ne soit le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l'un des parents de l'adopté ; dans ce cas, l'adoptant a l'autorité parentale concurremment avec son conjoint, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin, lequel en conserve seul l'exercice, sous réserve d'une déclaration conjointe avec l'adoptant adressée au directeur des services de greffe judiciaires du tribunal judiciaire aux fins d'un exercice en commun de cette autorité.

Les droits d'autorité parentale sont exercés par le ou les adoptants dans les conditions prévues par le chapitre Ier du titre IX du présent livre.

Les règles de l'administration légale et de la tutelle des mineurs s'appliquent à l'adopté.'

L'article 348, alinéa 2, du code civil précise que 'Si l'un des deux est mort ou dans l'impossibilité de manifester sa volonté, s'il a perdu ses droits d'autorité parentale, le consentement de l'autre suffit.'

Cette hypothèse n'est manifestement pas pertinente en l'espèce.

Selon l'article 348-6, alinéa 1, du même code, 'Le tribunal peut prononcer l'adoption s'il estime abusif le refus de consentement opposé par les parents ou par l'un d'entre eux seulement, lorsqu'ils se sont désintéressés de l'enfant au risque d'en compromettre la santé ou la moralité.'

Ce texte exige donc une double condition pour permettre de passer outre au refus des parents ou de l'un d'eux, d'une part, que ceux-ci se soient désintéressés de l'enfant, au risque d'en compromettre la santé ou la moralité, et, d'autre part, que leur refus de consentir à l'adoption soit jugé abusif.

Serait susceptible d'être jugé abusif le refus d'un parent qui ne tient nullement compte de l'intérêt de l'enfant ou/et qui est animé par des considérations étrangères à cet intérêt.

Le désintérêt d'un parent de son enfant au risque d'en compromettre la santé et la moralité du mineur a été illustré par la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 18 novembre 1997 (1re Civ., 18 novembre 1997, pourvoi n° 95-20.777). Dans cette espèce, le parent n'avait jamais versé la moindre somme d'argent pour son enfant, s'était montré peu présent auprès de lui de sorte que ce désintérêt de l'enfant tant matériellement qu'affectivement était, selon la Cour de cassation, de nature à compromettre sa santé et sa sécurité.

La Cour de cassation a précisé que le désintérêt prévu par l'article 348-6 du code civil doit être volontaire. Tel n'est pas le cas lorsque le parent qui refuse son consentement à l'adoption a été empêché d'exercer son droit de visite et d'hébergement (1re Civ., 19 juillet 1989, pourvoi n° 87-14.187, Bulletin 1989 I N° 298).

La jurisprudence de cette chambre de la cour d'appel de Versailles a été exactement résumée par le ministère public. Seul un désintérêt du parent pour son enfant durant de longues années permettrait de caractériser le désintérêt d'un parent pour son enfant au risque d'en compromettre la santé ou la moralité. De même, l'absence totale de contribution du parent à l'entretien de cet enfant depuis de nombreuses années le permettrait également. Il faudrait en outre que ce désintérêt soit volontaire.

Il revient à M. [B] [J]-[Z] de démontrer que les conditions de l'article 348-6, alinéa 1, du code civil sont réunies.

A cette fin, M. [B] [J]-[Z] invoque, en particulier, trois pièces, les pièces 10, 11 et 12.

La pièce 10 est constituée d'une attestation émanant de Mme [F], psychologue, exerçant à [Localité 4], qui rapporte le ressenti du couple [J]-[Z] de la situation vécue par [Y] auprès de sa mère. Ils disent que [Y] exprime une peur et qu'ils suspectent la manipulation de cet enfant.

Mme [F] précise que '[Y] est volontaire pour venir aux consultations. Lors des nos premières séances, [Y] démontre des peurs, des doutes, des difficultés à raisonner, un manque de confiance et de connaissance de soi, un conflit de loyauté et une surprotection du self.

Les séances avec [Y] ont visé le développement de la connaissance de soi, l'expression de ses émotions, la levée des barrières anxieuses liés à un conflit parental et la construction d'une identité propre à lui-même.

A ce jour, [Y] exprime avec certitude l'envie d'une adoption simple par son beau-père (daddy). Il exprime également un refus de séjour chez sa maman, dans l'objectif de se protéger d'une possible influence délétère que celle-ci pourrait avoir sur son bien-être actuel'.

Il ne ressort nullement de cette attestation des éléments permettant de caractériser le désintérêt de Mme [I] pour son enfant au risque d'en compromettre la santé ou la moralité ; il n'est pas plus démontré par cette attestation l'influence délétère de Mme [I] sur son enfant, ni que le bien-être de [Y] est compromis par sa mère. En effet, Mme [F] se montre très prudente dans son expression ('possible', choix du conditionnel dans la conjugaison des verbes). En revanche, il apparaît que le psychologue note l'existence d'un conflit de loyauté et d'un conflit parental encore vivace.

S'agissant de la pièce 11, mentionnée dans le bordereau des productions et par les indications manuscrites qui y figurent comme 'un mail adressé au site 119 enfance en danger 27 décembre 2020', elle se présente en réalité comme une lettre dactylographiée non signée, non datée. Ni l'adresse électronique de ce site de protection de l'enfance en qualité de destinataire, ni celle de [Y] ou de son père ou son beau-père en qualité d'expéditeur n'y figure de sorte que la cour est placée dans l'incapacité d'apprécier si cette lettre a été adressée à 'enfance en danger'. Les épisodes de violence de Mme [I] sur son fils ne sont corroborés par aucun témoignage direct, pas plus que par des constatations matérielles. Les mêmes observations seront faites au sujet de la main courante que [Y] a déposée auprès des services de police de [Localité 4].

L'attestation de M. [Z] partie prenante dans ce conflit parental ne revêt pas force suffisamment probante.

Contrairement à ce que soutient M. [B] [J]-[Z], le message adressé par Mme [I] le 30 janvier 2022 ne peut être lu comme l'aveu par cette dernière qu'elle a démérité dans son rôle de mère.

Le message électronique de Mme [I] à son fils le 30 janvier 2022 (pièce 28) est le suivant :

'Je suis contente que nous ayons pu discuter ensemble. Même si nous ne sommes pas d'accord sur cette adoption que tu souhaites demander dès aujourd'hui au lieu d'attendre que tu sois majeur.

Sans refuser catégoriquement, j'ai tenté de t'exposer mon point de vue.

Cette décision est irréversible et c'est mon devoir en tant que parent de t'alerter à ce sujet.

Tu me disais que si je te donnais mon accord tu arrêtais la procédure... Car ce serait 'désagréable pour moi'. Mais la précédente l'était déjà, ne pas te voir tous les jours et ne pas pouvoir correspondre plus directement ou te parler de temps en temps l'est tout autant.

Oui je n'ai pas vu ou mesuré toute ta souffrance qui s'installait les derniers temps quand tu vivais chez moi, et je m'en veux chaque jour.

Oui j'ai laissé [A] te faire des commentaires et avoir des attitudes déplacées sans assez intervenir et je le regrette terriblement. Je pensais que ce n'était que passager.

Oui je souhaite que tu sois heureux et serein.

Mais je ne souhaite pas être acteur dans une décision aussi lourde que l'adoption puisqu'elle ne te concerne que toi. Et qu'il suffit d'attendre deux ans pour faire ce choix à ta majorité sans mon accord.

La santé de ton père n'a pas évolué, donc il n'y a aucune urgence.

Tu m'as parlé de ta peur de devoir quitté [Localité 8] s'il devait arriver quelque chose à papa...

Pour te rassurer en ce sens, je te répète ce que je t'ai dit au téléphone : je trouverai un arrangement avec [B] puisque tu souhaites et ne t'obligerai pas à changer d'établissement scolaire !! Nous trouverons une solution ! Et s'il le faut, pour te le prouver, je peux te rédiger un écrit disant cela !!

Mon devoir de parent est aussi de mettre le doigt sur le poids de cet acte irréversible qui mérite une réflexion et une prise de décision plutôt à ta majorité.

Si c'est possible, j'aimerai bien que nous puissions nous voir prochainement sur [Localité 8]... Cela sera peut être plus facile pour toi de me parler de ta vie de lycéen, de tes loisirs, de tes activités... Car malgré ce que tu imagines, ça m'intéresse !!! Et j'aimerai vraiment qu'on trouve le moyen de communiquer à nouveau.

Bon dimanche

Bisous

Maman'.

La teneur de ce message démontre l'intérêt de cette mère pour son enfant, son amour pour lui, la prise en compte des intérêts de son enfant et de ses souhaits, de son rôle de mère, la conscience des conséquences de son consentement à cet acte irréversible, et les termes utilisés font au contraire la preuve de sa délicatesse envers son enfant.

Le fait de dire 'Oui je n'ai pas vu ou mesuré toute ta souffrance qui s'installait les derniers temps quand tu vivais chez moi, et je m'en veux chaque jour. Oui j'ai laissé [A] te faire des commentaires et avoir des attitudes déplacées sans assez intervenir et je le regrette terriblement. Je pensais que ce n'était que passager' ne peut être interprété comme l'aveu de sa part de ce qu'elle démérite dans son rôle de mère au sens de l'article 348-6, alinéa 1, du même code, mais au contraire qu'elle reconnaît la souffrance de son enfant et qu'elle admet qu'elle aurait pu être encore plus vigilante. Cette manière de s'exprimer face à son fils, adolescent, pris dans un conflit parental, dans un conflit de loyauté, pour reprendre les termes du psychologue qui le suit, qu'il n'a pas à arbitrer, est la démonstration qu'elle reconnaît à son fils sa souffrance, ne la minimise pas et ne la dénigre pas.

Comme le souligne en outre le ministère public, l'absence de lien entre M. [B] [J]-[Z] et ses propres enfants ne peut qu'interroger.

S'agissant de la demande d'expertise psychologique de [Y] [Z], elle ne pourra qu'être rejetée. En effet, il n'apparaît pas que les éléments produits devant la cour soient suffisamment précis, utiles et sérieux pour justifier la nécessité d'ordonner une pareille mesure qui, en tout état de cause, ne doit pas l'être, comme en l'espèce, pour suppléer la carence probatoire du demandeur.

Cette demande injustifiée sera dès lors rejetée.

Il découle des développements qui précèdent que M. [B] [J]-[Z] ne démontre pas, par ses productions, que le refus de Mme [I] à consentir à l'adoption simple de [Y] est abusif, ni qu'elle se désintéresse de son enfant au risque d'en compromettre la santé ou la moralité.

Le jugement en ce qu'il rejette la demande d'adoption simple de M. [B] [J]-[Z] de [Y] [Z] sera confirmé.

M. [B] [J]-[Z], partie perdante, supportera les dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité commande de condamner M. [B] [J]-[Z] à verser à Mme [I] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, après débats en chambre du conseil, par arrêt contradictoire et mis à disposition,

DÉCLARE irrecevable la note en délibéré adressée à la cour le 26 juillet 2022 par le conseil de M. [B] [J] ;

CONFIRME le jugement ;

Y ajoutant,

DÉCLARE recevable la demande d'expertise psychologique de [Y] [Z] ;

REJETTE la demande d'expertise psychologique de [Y] [Z] ;

CONDAMNE M. [B] [J]-[Z] aux dépens de première instance et d'appel ;

DIT qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [B] [J]-[Z] à verser à Mme [I] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 21/06625
Date de la décision : 20/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-20;21.06625 ?
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