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08/09/2022 | FRANCE | N°19/02624

France | France, Cour d'appel de Versailles, 21e chambre, 08 septembre 2022, 19/02624


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES







21e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 08 SEPTEMBRE 2022



N° RG 19/02624



N° Portalis DBV3-V-B7D-TI3P



AFFAIRE :



SARL NS DISTRIBUTION



C/



[E] [G]

...



S.A.R.L. K ECO MARKET





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Mai 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARGENTEUIL

N° Chambre :

N° Section :

C

N° RG : 18/00215



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Sami LANDOULSI



Me Jouba WALKADI



SCP HADENGUE



SCP MAISANT ASSOCIES

SCP EVODROIT-SCP INTER BARREAUX D'AVOCATS



le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU P...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

21e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 08 SEPTEMBRE 2022

N° RG 19/02624

N° Portalis DBV3-V-B7D-TI3P

AFFAIRE :

SARL NS DISTRIBUTION

C/

[E] [G]

...

S.A.R.L. K ECO MARKET

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Mai 2019 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARGENTEUIL

N° Chambre :

N° Section : C

N° RG : 18/00215

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Sami LANDOULSI

Me Jouba WALKADI

SCP HADENGUE

SCP MAISANT ASSOCIES

SCP EVODROIT-SCP INTER BARREAUX D'AVOCATS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SARL NS DISTRIBUTION

N° SIRET : 531 758 878

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Sami LANDOULSI, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 136

APPELANTE

****************

Madame [E] [G]

née le 19 Octobre 1975 à ROUMANIE

de nationalité Roumaine

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Jouba WALKADI, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A265

Monsieur [V] [L], de la SELARL MMJ, Es qualité de «Mandataire ad'hoc » de la « Sarl 2N2A »

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentant : Me Armelle PHILIPPON MAISANT de la SCP MAISANT ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J055

Association L'UNEDIC, DÉLÉGATION AGS CGEA D'ILE DE FRANCE EST

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Sophie CORMARY de la SCP HADENGUE et Associés, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98, susbtituée à l'audience par Maître GREGOIRE François, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

****************

S.A.R.L. K ECO MARKET

N° SIRET : 891 359 598

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentant : Me Sebastien TO de la SCP EVODROIT-SCP INTER BARREAUX D'AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : 209, susbtitué à l'audience par Maître BAUDOIN Anne, avocate au barreau du VAL D'OISE

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 31 Mai 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président,,

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,

Madame Odile CRIQ, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU,

FAITS ET PROCÉDURE

Selon contrat de travail à durée déterminée motivé par un surcroît d'activité, Mme [G] a été engagée du 22 novembre au 5 décembre 2016, en qualité d' 'employée libre service', par la société 2N2A, gérée par M. [I] [N], laquelle exploitait un commerce de proximité situé à [Adresse 7]

Suivant contrat de travail à durée indéterminée, Mme [G] a été engagée, toujours en qualité d'employée libre service à compter du 10 mars 2017, par la société NS Distribution, également gérée par M. [N], laquelle exploitait un commerce de proximité situé à [Adresse 6].

Ces contrats étaient régis par la convention collective du commerce de détail de fruits, légumes épicerie, produits laitiers.

Exposant qu'elle exerçait, conjointement avec son époux, M. [Y], qui a également saisi la juridiction prud'homale, les fonctions de 'Chef de magasin', soutenant avoir accompli de nombreuses heures supplémentaires sans en être payée, Mme [G] a saisi le 25 juillet 2018, le conseil de prud'hommes d'Argenteuil d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur et de demandes en paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Victime d'un malaise sur son lieu de travail, en date du 10 août 2018, Mme [G] a été placée en arrêt de travail à compter de cette date.

La société 2N2A a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Pontoise en date du 26 novembre 2018, Maître [L] étant désigné en qualité de liquidateur.

L'AGS CGEA d'Ile de France Est et la Selarl MMJ en la personne de Maître [L] ont soulevé l'irrecevabilité des demandes et ont demandé au conseil de débouter de Mme [G].

Par jugement réputé contradictoire rendu le 17 mai 2019, notifié le 20 mai 2019, le conseil a statué comme suit :

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de Mme [G] aux torts de la société NS Distribution,

Condamne la société NS Distribution au paiement à Mme [G] des sommes suivantes :

- 8 305 euros outre 830 euros à titre de congés payés y afférents au titre des salaires du 10 août 2018 au 21 février 2019,

- 3 020 euros au titre du préavis outre 302 euros à titre de congés payés y afférents,

- 756 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne à la société NS Distribution l'établissement d'une attestation de salaire pour l'arrêt de travail du 10 août 2018,

Ordonne la remise à Mme [G] des documents sociaux conformes au présent jugement,

Ordonne l'exécution provisoire sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile,

Déboute Mme [G] des autres demandes

Met les dépens à la charge de la société NS Distribution.

Le 20 juin 2019, la société NS Distribution a relevé appel de cette décision par voie électronique.

Constituée le 25 novembre 2020, la société K Eco Market a acquis, selon acte sous seing privé en date du 8 janvier 2021, auprès de la société NS Distribution le fonds de commerce du magasin sis [Adresse 6].

Le 12 mars 2021, le tribunal de commerce de Pontoise prononçait la clôture de la procédure

judiciaire de la société 2N2A pour insuffisance d'actifs.

Par ordonnance du tribunal de commerce de Pontoise en date du 22 juin 2021, la Selarl MMJ, prise en la personne de Maître [L], a été désignée en qualité de mandataire ad hoc de la société 2N2A.

Suite à la cession de fonds de commerce intervenue entre NS Distribution et K Eco Market, Mme [G] a assigné en intervention forcée la société cessionnaire en vue de solliciter sa condamnation in solidum.

Le 2 septembre 2021, les parties ont été informées que la clôture, qui devait intervenir le 1er septembre 2021 était renvoyée au 17 novembre 2021. Elle a été de nouveau renvoyée au 9 février 2022, au 20 avril 2022, puis au 25 mai 2022.

Par ordonnance rendue le 25 mai 2022, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 31 mai 2022.

' Selon ses dernières conclusions notifiées le 25 août 2019, la société NS Distribution demande à la cour d'infirmer le jugement rendu en ce qu'il a prononcé la rupture du contrat de travail de Mme [G] à ses torts et l'a condamnée à lui payer les sommes de 8 305 euros outre 830 euros à titre de congés payés afférents au titre des salaires du 10 août 2018 au 21 février 2019, 3 020 euros au titre du préavis outre 302 euros à titre de congés payés y afférents, 756 euros à titre d'indemnité de licenciement et 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et statuant à nouveau, de :

Prononcer la rupture du contrat de travail aux torts de Mme [G].

Débouter Mme [G] de l'intégralité de ses demandes,

Confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de Mme [G] à la voir condamner à lui payer :

- le salaire du 10 août 2018 jusqu'au 21 février 2019, soit la somme de 8305 euros et ses congés payés afférents : 830 euros, subsidiairement 2772 euros au titre du salaire du complément de salaire conventionnel outre 277 euros de congés payés afférents.

- dommages et intérêts pour défaut de mutuelle et d'établissement d'une attestation de salaires : 5 000 euros

- rappel d'heures supplémentaires : 61 935 euros et les congés payés afférents: 6193 euros, subsidiairement rappel d'heures supplémentaires 36 243 euros et les congés payés afférents: 3 624 euros

- dommages et intérêts pour défaut de repos compensateur: 10 443 euros

- indemnité pour travail dissimulé: 15 492 euros, subsidiairement : 9060 euros

- dommages et intérêts pour harcèlement moral : 10 000 euros

- indemnité de préavis : 7 749 euros et les congés payés afférents : 774 euros, subsidiairement : 3020 euros et les congés payés afférents : 302 euros

- indemnité de licenciement : 1452 euros, subsidiairement : 859 euros

- licenciement nul et abusif : 15 492 euros

- rappel de salaire : 18 224 euros et les congés payés afférents: 1 822 euros

- dommages et intérêts pour manquement au repos dominical et atteinte à l'obligation de sécurité : 10 000 euros

- article 700 du code de procédure civile : 2 000 euros

- intérêts au taux légal

- les dépens

- l'établissement d'une attestation de salaires pour l'arrêt de travail du 10 août 2018 et ses prolongations

- la remise des bulletins de paie de janvier 2018 à février 2019

- la remise des documents sociaux conformes à la décision du conseil de prud'hommes d'Argenteuil.

Condamner Mme [G] à lui payer la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Condamner Mme [G] aux dépens.

' Aux termes de ses dernières conclusions, remises au greffe le 5 mai 2022, Mme [G] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et en conséquence, statuant à nouveau, de :

Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société NS Distribution à la date du jugement prud'homal,

Fixer le salaire à 2 582 euros compte tenu de son statut de chef de magasin en application de la convention collective applicable,

Condamner in solidum les sociétés NS Distribution et K Eco Market au paiement des sommes suivantes :

- 8 305 euros outre 830 euros à titre de congés payés y afférents au titre des salaires du 10/08/2018 au 21/02/2019 et subsidiairement, 2 772 euros au titre du complément de salaire conventionnel outre 277 euros de congés payés afférents et ordonner à ce titre l'établissement d'une attestation de salaire pour l'arrêt de travail du 10/08/2018 et ses prolongations,

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'établissement d'une attestation de salaire pour l'accident du travail du 18/08/2018 et défaut de mutuelle,

- 61 935 euros à titre de rappels d'heures supplémentaires, outre 6 193 euros à titre de congés payés y afférents, et subsidiairement 36 243 euros, outre 3 624 euros à titre de congés payés afférents

- 10 443 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de repos compensateur,

- 15 492 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé et subsidiairement 9 060 euros,

- 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- 7 749 euros à titre d'indemnité de préavis outre 774 euros à titre de congés payés y afférents et subsidiairement 3 020 euros outre 302 euros à titre de congés payés afférents,

- 1 452 euros à titre d'indemnité de licenciement et subsidiairement 859 euros,

- 15 492 euros à titre pour licenciement nul et abusif,

- 18 224 euros au titre des rappels de salaires fondés sur les minima conventionnels (chef de magasin), outre 1 822 euros à titre de congés payés afférents,

- 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement au repos dominical et à l'obligation de sécurité de résultat,

- 4 000 euros au titre des frais d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dépens

- intérêt légal,

Ordonner aux sociétés K Eco Market et NS Distribution la remise des bulletins de paie de janvier 2018 à février 2019,

Ordonner aux sociétés la remise de documents sociaux conformes à la décision,

Fixer au passif de la liquidation de la société 2N2A ses créances aux sommes suivantes :

- 8 057 euros à titre de rappels d'heures supplémentaires outre 805 euros à titre de congés payés y afférents de septembre 2016 à février 2017,

- 2 161 euros à titre de repos compensateur

- 9 060 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

Ordonner les bulletins de paie conformes à la décision à intervenir,

- intérêt au taux légal,

- dépens,

Dire et juger le jugement opposable à l'AGS CGEA,

Débouter les sociétés NS Distribution et K Eco Market de leurs demandes.

' Selon ses dernières conclusions notifiées le 7 juillet 2021, la Selarl MMJ, demande à la cour de la recevoir, en la personne de Maître [L], en son intervention volontaire en qualité de mandataire ad hoc de la société 2N2A et, au visa des articles L 622-21 et L. 625-1 du code de commerce, et de :

Dire et juger que les éventuelles créances ne pourront faire l'objet, le cas échéant, que d'une fixation au passif du redressement judiciaire,

Statuant sur le fond , lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice quant à la recevabilité et au bien-fondé de l'appel interjeté par la société NS Distribution,

Débouter Mme [G] en son appel incident et par voie de conséquence en toutes ses demandes, fins et conclusions,

Confirmer le jugement rendu en ce qu'il a débouté Mme [G] en toutes ses demandes dirigées à l'encontre de la Selarl MMJ en la personne de Maître [L], ès-qualités de liquidateur de la société 2N2A,

Y ajoutant, prononcer la mise hors de cause de la Selarl MMJ en la personne de Maître [L], ès-qualités de mandataire ad hoc de la société 2N2A, et débouter Mme [G] en sa demande tendant à voir assorties ses créances des intérêts au taux légal, et ce en application de l'article L.622-28 du code de commerce,

À titre subsidiaire, dire et juger que l'AGS devra garantir les créances éventuellement fixées au passif de la liquidation judiciaire.

' Selon ses dernières conclusions notifiées le 20 avril 2022, la société K Eco Market demande à la cour de :

Confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [G] à la date du 17 mai 2019,

Constater en conséquence que le contrat de travail était rompu avant l'acquisition du fonds de commerce par la société K Eco Market,

Débouter Mme [G] de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre,

Subsidiairement si la juridiction était amenée à infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail, constater qu'elle ne saurait être tenue à des demandes indemnitaires fondées sur des prétendus manquements de son ancien employeur, la société NS Distribution, que les demandes de Mme [G] ne sont pas fondées,

En toute hypothèse, débouter Mme [G] de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre et condamner Mme [G] ou tout succombant au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

' Aux termes de ses dernières conclusions, remises au greffe le 25 avril 2022, l'AGS CGEA d'Ile de France Est demande à la cour de :

Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [G] des demandes dirigées à l'encontre de la société 2N2A,

Mettre hors de cause l'AGS au titre des demandes formulées à l'encontre des sociétés NS Distribution et K Eco Market,

En tout état de cause :

Mettre hors de cause l'AGS s'agissant des frais irrépétibles de la procédure.

Dire et juger que la demande qui tend à assortir les intérêts au taux légal ne saurait prospérer postérieurement à l'ouverture de la procédure collective en vertu des dispositions de l'article L 622-28 du code du commerce.

Fixer l'éventuelle créance allouée au salarié au passif de la société.

Dire que le CGEA, en sa qualité de représentant de l'AGS, ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L 3253-6, L 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-15, L 3253-19 à 21 et L 3253-17 du code du travail.

Dire et juger que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le Mandataire ad hoc et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

MOTIFS

I - Sur le rappel de salaire conventionnel :

La charge de la preuve de la qualification revendiquée pèse sur le salarié, observations faites que la qualification se détermine relativement aux fonctions réellement exercées par celui-ci, leur appréciation s'effectuant par rapport à la grille de classification fixée par la convention collective.

Engagée en qualité d'employée libre service, niveau 1, correspondant à un 'emploi qui ne requière pas de connaissance particulières et pour lesquels l'adaptation est quasiment immédiate', et se prévalant de la grille de classification initiale de la convention collective, Mme [G] revendique, conjointement avec son compagnon, M. [Y] - qui a saisi parallèlement le conseil de prud'hommes d'Argenteuil et dont la cause est pendante devant la présente cour - le niveau VI, correspondant aux 'emplois qui, outre les qualités requises au niveau V et les qualités professionnelles au niveau IV (à savoir emploi impliquant des responsabilités et une autonomie dans l'organisation des tâches liées aux fonctions), impliquent la responsabilité totale dans la mission qui lui est confiée ou qu'il exerce dans une entreprise'.

L'accord de classification du 14 décembre 2016 modifie la structure de la grille en créant sept niveaux d'employés (E1 à E7) deux niveaux d'agent de maîtrise (AM1 et AM2) et deux de cadre (C1 et C2) et détaille les emplois repères en précisant les tâches susceptibles d'être confiées aux collaborateurs.

Au soutien de sa demande de classement en qualité de 'chef de magasin', l'appelante se borne à invoquer les attestations de plusieurs personnes lesquelles décrivent de manière imprécise une amplitude de travail importante, le fait que la salariée pouvait ouvrir ou faire la fermeture du magasin, qu'elle s'occupait de la mise en rayon, de la propreté du magasin, sans pour autant établir que la salariée exerçait concrètement des responsabilités attachées à celle d'un chef de magasin (pièces n°9 à12 de l'appelante).

Le seul fait que l'employeur a établi le 2 juillet 2018 une note annonçant qu'à partir du 2 juillet 2018, M. [P] est nommé responsable de magasin et précise les tâches confiées à M. [Y] et à Mme [G], n'objective pas qu'antérieurement à cette date la salariée a assumé des responsabilités de 'chef de magasin'.

Les seuls éléments produits par la salariée sont insuffisants pour faire la preuve que, dans le cadre de son emploi au sein des sociétés 2N2A puis NS Distribution, l'appelante exécutait concrètement les fonctions d'un chef de magasin et assumait, de manière autonome, l'organisation des tâches liées à ses fonctions, une responsabilité totale du magasin.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il l'a déboutée de ce chef.

II - Sur les heures supplémentaires, le repos compensateur et l'indemnisation du travail dissimulé :

Alors que les contrats de travail signés par Mme [G] stipulaient une durée hebdomadaire de travail de 35 heures, la salariée soutient avoir travaillé un nombre d'heures beaucoup plus important sans en être rémunérée, travaillant six, voire sept jours par semaine.

La SELARL MMS, ès qualités, s'en rapporte. La société NS Distribution réfute catégoriquement l'accomplissement par l'intéressée des heures supplémentaires alléguées.

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d' heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant, la chambre sociale de la Cour de cassation précisant selon une jurisprudence constante que le juge prud'homal ne saurait faire peser la charge de la preuve que sur le seul salarié.

Outre des attestations peu probantes d'une ancienne collègue avec qui elle a travaillé en 2016, de clients et d'un voisin, faisant état d'une grande amplitude de travail tôt le matin et jusqu'à tard le soir, Mme [G] verse surtout aux débats un tableau journalier présentant ses heures de prise et de fin de service, incluant un décompte des heures qu'elle prétend avoir accomplies au cours de la relation de travail sous l'égide de la société 2N2A puis de la société NS Distribution à compter du 10 mars 2017.

Elle communique également des documents établis par l'employeur en juillet 2018, consécutivement à sa réclamation amiable à savoir un organigramme et deux plannings hebdomadaires.

Alors que ces éléments sont suffisamment précis pour lui permettre de répondre, les employeurs successifs se bornent à affirmer que la salariée n'a pas accompli les heures prétendument déclarées et l'absence de caractère probant des témoignages communiqués au soutien de sa réclamation salariale, mais s'abstiennent de répondre utilement, alors qu'il leur appartenait d'assurer le contrôle des heures de travail effectuées, obligation légale rappelée par les stipulations de l'article 4.1.5 de la convention collective applicable, en produisant leurs propres éléments sur les horaires concrètement accomplis par la salariée.

Force est de constater que tant la société liquidée que la société NS Distribution ne communique aucun élément probant de nature à établir les horaires effectivement accomplis par l'intéressée.

Il ressort des plannings établis par la société en juin et juillet 2018 que compte tenu, d'une part, du caractère limité de l'effectif (3 collaborateurs) et, d'autre part, de l'importance de l'amplitude d'ouverture du magasin 8h30 (ou 9heures) /22 heures du lundi au dimanche, avec, selon ces plannings, de rares périodes dépourvues en personnel, à savoir pour le planning du 19 juin 2018, le mardi de 12h30 à 14 heures, le samedi de 16 à 18 heures, et des chevauchements sur certains horaires de la présence de deux salariés, les plannings excédaient les 35 heures contractuelles. C'est ainsi que Mme [G] était censée faire :

- sur le planning du 19 juin, 46,5 heures hebdomadaires et son compagnon, M. [Y] 39h45.

- sur le planning du 2 juillet, 42,5 heures et son compagnon 38,25 heures.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'il est établi que la salariée a accompli des heures supplémentaires mais pour un nombre moins important que celui déclaré. Sa réclamation, partiellement justifiée, sera retenue :

- à hauteur de 1 915 euros, outre 191,50 euros au titre des congés payés y afférents, à l'égard de la société 2N2A, sommes qui seront fixées au passif de la liquidation judiciaire ;

- à hauteur de 8 157,24 euros, outre 815,72 euros au titre des congés payés y afférents, montants auxquels la société NS Distribution sera condamnée.

Le jugement sera donc infirmé de ce chef.

Conformément aux dispositions légales, la salariée ayant accompli un nombre d'heures supplémentaires supérieur au contingent annuel, fixé à '130" par la convention collective applicable, Mme [G] est bien fondée à solliciter à l'encontre de la société NS Distribution l'indemnisation de la contrepartie obligatoire en repos dont elle n'a pu bénéficier par la faute de l'employeur, correspondant à 50% des heures dépassant ce contingent.

En revanche, la salariée sera déboutée de la réclamation présentée de ce chef à l'égard de la société 2N2A, le plancher de 130 heures supplémentaires n'ayant pas été atteint ni en 2016, ni en 2017 la concernant.

Il est de droit que le salarié qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur a droit à l'indemnisation du préjudice subi, laquelle comporte à la fois le montant de l'indemnité de repos compensateur et le montant de l'indemnité de congés payés afférents. Le préjudice subi sera réparé par l'allocation de la somme de 2 739 euros bruts à la charge de la société NS Distribution.

Les dispositions de l'article L. 8223-1 du code du travail conditionnant l'allocation d'une indemnité pour travail dissimulé à la rupture du contrat de travail, l' AGS s'oppose à bon droit à la demande formée par Mme [G] à l'encontre de la société 2N2A dans la mesure où la salariée allègue qu'il n'y a pas eu rupture du contrat de travail souscrit vis-à-vis de cette société, mais transfert de son contrat de travail au profit de la société NS Distribution. La demande présentée de ce chef en ce qu'elle est formée à l'encontre de l'employeur initial sera par voie de conséquence rejetée.

En revanche, les plannings établis par l'employeur démontrant que l'amplitude d'ouverture du magasin ne pouvait être couverte sans avoir recours à l'accomplissement d'heures supplémentaires, et l'examen des quelques bulletins de salaire communiqués par la salariée ne faisant état d'aucun paiement d'heure supplémentaire, il s'en déduit que la société NS Distribution a intentionnellement dissimulé une partie de l'activité de la salariée.

La société NS Distribution sera en conséquence condamnée au paiement de la somme de 9 060 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé.

III - Sur le harcèlement moral :

En application de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon les dispositions de l'article L. 1154-1 du même code, dans sa version issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, du code du travail, lorsque le salarié présente des éléments de fait, précis et concordants, constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de laisser supposer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce, Mme [G] énonce les faits suivants, constitutifs selon elle d'un harcèlement : 1. Une rétrogradation suite à sa demande de régularisation de ses heures supplémentaires, 2. Le paiement avec trois semaines de retard de ses salaires, 3. L'employeur lui a répondu de manière injurieuse après qu'elle a demandé l'établissement d'une attestation de salaire.

Il suit de ce qui précède que la salariée, dont la demande en repositionnement au statut de chef de magasin n'est pas fondée, n'a, par conséquent, pas fait l'objet d'une rétrogradation. Ce grief n'est pas établi.

En outre, aucun élément ne vient étayer les allégations de la salariée selon lesquelles le paiement de ses salaires intervenait avec un retard de trois semaines.

La seule pièce visée dans les conclusions de l'intimée, sous le chapitre consacrée au harcèlement moral, consiste en la pièce n°16 qui s'avère être la réponse faite par le gérant de la société à la réclamation formée par la salariée relativement à l'arrêt maladie du 10/08/2018. Après avoir indiqué dans cette correspondance qu'il n'avait pas signé le volet 'accident du travail', point dont il considérait qu'il appartiendrait à la CPAM, de le déterminer dans le cadre de son enquête, le gérant de la société NS Distribution y indiquait faire peu de cas de 'ses menaces de rajouter ce point à ses demandes devant le conseil de prud'hommes', lettre qu'il concluait dans les termes suivants :

'si vous pensez que je vais avoir peur de vos menaces cela est utopique et imaginaires et toutes vos demandes [...] je vous confirme que je serais présent devant le conseil pour défendre mon entreprise contre des vautours comme vous, des ingrats et des menteurs [...] et la justice tranchera selon le droit. Mais je vous conseille de vous retrousser les manches et travailler pour gagner votre vie et arrêter de croire au Père noël. L'entreprise a trop fait pour vous qui vous a permis d'avoir un salaire, un contrat de travail une couverture médicale et avoir des documents pour avoir un toit et sortir de la chambre d'hôtel et surtout vous former à un métier [...]'.

L'envoi de cette correspondance aux termes vifs et aux qualificatifs injurieux, constitue le seul fait présenté et établi par la salariée au soutien de sa demande de reconnaissance de harcèlement moral. Alors que le harcèlement requiert des faits répétés, cette correspondance, à elle seule, ne permet pas de présumer l'existence d'un harcèlement.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [G] de ce chef.

IV - Sur le défaut de délivrance de l'attestation sécurité sociale à l'occasion de l'arrêt de travail ayant débuté le 10 août 2018 :

De ce chef, la salariée sollicite la condamnation de la société NS Distribution au paiement de la somme de 8 305 euros outre 830 euros au titre des congés payés afférents au titre des salaires du 10 août 2018 au 21 février 2019 et, subsidiairement, le paiement de la somme de 2 772 euros au titre du complément de salaire conventionnel outre 277 euros au titre des congés payés afférents.

Elle expose avoir été placée en arrêt de travail pour un accident du travail survenu le 10 août 2018, ce dont elle justifie par la communication de l'attestation signée par le chef de magasin, l'arrêt initial pour lumbago avec sciatalgie établi par le docteur [F] du Centre hospitalier d'[Localité 4] en date du 10 août 2018, et deux certificats médicaux de prolongation jusqu'au septembre et octobre 2018 (pièce n°13).

Alors qu'elle travaillait à temps plein depuis le mois de novembre 2016, Mme [G] soutient et établit par la communication de l'attestation de la Caisse primaire d'assurance maladie qu'aucune indemnité journalière ne lui avait été servie consécutivement à cet accident du travail sur la période du 10 août au 16 décembre 2018.

Elle ajoute que l'employeur s'est par ailleurs abstenu de lui verser le maintien de salaire prévu par la convention collective applicable correspondant, dès le 1er jour d'arrêt, à 40 jours à 90% puis 30 jours à 66.66%.

Observation faite que la salariée précise par ailleurs que les bulletins de salaire, lesquels auraient pu lui permettre de pallier la défaillance de l'employeur relativement à l'établissement de l'attestation de salaires, destinée à permettre à l'assurance maladie de déterminer les droits de la salariée au titre des indemnités journalières, ne lui étaient pas communiqués, force est de constater que si la société appelante affirme être en mesure de justifier des démarches accomplies auprès de la Caisse primaire d'assurance maladie pour que la salariée soit indemnisée, la pièce invoquée par l'employeur, à savoir le courriel de la Caisse du 17 octobre 2018 lui indiquant que 'le dossier était en cours d'étude et que le dossier transmis nécessite une étude complémentaire' est insuffisante à établir que l'employeur avait bien satisfait à son obligation à ce titre.

Le contrat de travail étant suspendu ensuite de son arrêt pour accident du travail, la salariée n'est pas fondée à solliciter le paiement de son salaire durant la période litigieuse. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la société au paiement de la somme de 8 305 euros outre 830 euros au titre des congés payés afférents. En revanche, la salariée est bien fondée à se prévaloir de l'obligation conventionnelle de l'employeur au titre du maintien de salaire. La société NS Distribution sera condamnée au paiement de la somme de 2 772 euros au titre du salaire du complément de salaire conventionnel outre 277 euros de congés payés afférents.

La demande principale formée par la salariée sera donc écartée et sa demande subsidiaire accueillie. Le jugement sera réformé en ce sens.

Le jugement sera par ailleurs confirmé en ce qu'il a ordonné à la société d'établir la dite attestation de salaires au titre de l'arrêt de travail ayant débuté le 10 août 2018.

Conformément aux dispositions de l'article 1153 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, désormais codifiées sous l'article 1231-6 dudit code, dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages et intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans une condamnation aux intérêts au taux légal, le créancier auquel le débiteur a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard pouvant obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance à charge de justifier de ce préjudice.

En l'espèce, si la salariée justifie de la mauvaise foi de l'employeur, qui n'établit pas, malgré une mise en demeure notifiée en décembre 2018, avoir satisfait à son obligation de ce chef, elle ne communique aucun élément de nature à apprécier le préjudice que le manquement de ce dernier lui a occasionné.

La demande de dommages-intérêts pour défaut de mutuelle et d'établissement d'une attestation de salaires sera donc rejetée.

V - Sur le manquement au repos dominical et l'obligation de sécurité :

Au soutien de sa demande en paiement de la somme de  10 000 euros à titre de dommages-intérêts de ces chefs, Mme [G] fait valoir que l'employeur a violé les dispositions des articles R. 3135-2, L. 3132-1 et 3 du code du travail et invoque la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation (31 janvier 2006, n° 04-40.985, 10 novembre 2009, n° 08-41.239, 8 juin 2011, n° 09-67.051) qui détermine notamment que la privation du repos hebdomadaire génère pour les salariés un trouble dans leur vie personnelle.

Elle soutient avoir travaillé de nombreux dimanches de manière totalement illicite, et avoir travaillé sept jours sur sept pour les mois de février 2017 et d'avril à mi-décembre 2017.

Ni la société NS Distribution, ni Maître [L], ès qualité de mandataire ad hoc de la société 2N2A, ni davantage l' AGS ne présentent d'observations de ce chef.

La directive 93/104/CE du Conseil, du 23 novembre 1993, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, telle que modifiée par la directive 2000/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 2000, institue des périodes minimales de repos journalier et des durées maximales hebdomadaires pour les travailleurs.

Son article 3 prévoit ainsi, pour chaque période de 24 heures, une période minimale de repos de 11 heures consécutives. L'article 5 ajoute, pour chaque période de 7 jours, une période minimale de repos sans interruption de 24 heures auxquelles s'ajoutent les 11 heures de repos journalier précitées. Ce temps minimal de repos nécessaire à la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs constitue une des règles du droit social communautaire revêtant une importance particulière.

Il résulte des articles L. 3131-1, L. 3132-1 et L. 3132-2 du code du travail que tout salarié bénéficie d'un repos quotidien d'une durée minimale de onze heures consécutives et qu'il est interdit de faire travailler un même salarié plus de six jours par semaine, le repos hebdomadaire ayant une durée minimale de 24 heures consécutives auxquelles s'ajoutent les heures consécutives de repos quotidien, soit une durée globale de 35 heures consécutives.

En la matière, les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail relatives à la répartition de la charge de la preuve des heures de travail effectuées entre l'employeur et le salarié ne sont applicables ni à la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne ni à la preuve de ceux prévus par les articles L. 3121-34 et L. 3121-35 du code du travail, qui incombe à l'employeur dans le cadre de son obligation de résultat.

Alors que la salariée soutient avoir régulièrement travaillé jusqu'à six jours voire sept jours par semaine et ne pas avoir bénéficié de son repos hebdomadaire, force est de constater que l'employeur ne rapporte pas la preuve du respect de cette prescription légale.

En ce qui concerne le non respect du repos dominical, il convient de relever que la convention collective applicable énonce en son article 4.2 relatif au repos hebdomadaire, dans sa rédaction alors applicable, que 'Ce repos doit être donné le dimanche et un autre jour de la semaine. [...] Toutefois, lorsque l'organisation du travail exige la présence des salariés le dimanche matin, ce repos est obligatoirement de 1 jour et demi consécutif, le dimanche après-midi et le lundi. [...]'.

À lui seul, le travail de Mme [G] le dimanche n'est donc pas critiquable ; la salariée n'est pas fondée, sur ce point, à se plaindre d'un trouble dans sa vie personnelle. En revanche, en l'état des relevés horaires communiqués par la salariée, non utilement critiqués par les employeurs, il n'est pas établi que la salariée a pu bénéficier, lorsqu'elle travaillait le dimanche, du repos hebdomadaire continu du dimanche après-midi au lundi compris.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté Mme [G] au titre du repos hebdomadaire.

Compte tenu de la durée de la période de travail concernée la société NS Distribution sera condamnée à verser à Mme [G] la somme de 2 000 euros de ce chef.

VI - Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :

L'accomplissement de nombreuses heures non rémunérées, le non respect des règles régissant le repos hebdomadaire et le manquement de l'employeur à son obligation d'établir une attestation de salaires consécutivement à l'arrêt de travail en date du 10 août 2018, et de son obligation au titre du maintien de salaire, constituent des manquements suffisamment graves aux obligations contractuelles de l'employeur pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts.

Le jugement sera confirmé sur ce point, la résiliation judiciaire produisant les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse au jour de son prononcé, soit le 17 mai 2019.

VII - Sur l'indemnisation de la rupture :

Au jour de la rupture, Mme [G] âgée de 43 ans, bénéficiait d'une ancienneté de 2 ans et 25 mois au sein de la société NS Distribution qui employait moins de onze salariés. Hors heures supplémentaires, dont le salarié ne demande pas qu'elles soient prises en compte dans la détermination du salaire de base, et la demande de repositionnement conventionnel sur un emploi de chef de magasin n'étant pas fondée, son salaire s'établissait à la somme de 1 510,63 euros brut.

La salariée peut prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, correspondant, conformément à l'article L. 1234-5 du code du travail, à la rémunération brute qu'elle aurait perçue si elle avait travaillé pendant la période du délai-congé. Au vu de la durée du préavis, fixée à deux mois tenant son ancienneté, et du montant de son salaire, il sera alloué à Mme [G], dans la limite de sa demande subsidiaire, une indemnité compensatrice de préavis de 3 020 euros bruts, outre 302 euros bruts au titre des congés payés afférents. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Calculée sur la base d'une ancienneté, qui s'apprécie au terme du délai-congé, que la salariée limite à 2 ans et 3 mois, du salaire de référence, l'indemnité de licenciement à laquelle la société sera condamnée sera fixée, dans la limite de sa demande, à la somme de 849,37 euros (1510/4 x 2 ans + 1510/4 x 3/12). Le montant retenu par le conseil de prud'hommes sera réformé.

La salariée qui est fondée en sa demande de dommages-intérêts au titre de la perte injustifiée de son emploi, ne communique aucun élément sur sa situation professionnelle postérieurement à la rupture.

En vertu de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, la salariée peut prétendre au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre un montant minimal d'un demi mois de salaire brut et un montant maximal de 3,5 mois de salaire brut.

Compte tenu des éléments dont dispose la cour, et notamment de l'âge de la salariée au moment du licenciement, et des perspectives professionnelles qui en découlent, le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sera fixé à la somme de 4 500 euros bruts.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a ordonné à la société NS Distribution la remise à la salariée des documents de fin de contrat régularisés.

VII - Sur la mise hors de cause de la société K économique Market :

La résiliation judiciaire du contrat de travail prononcée par le conseil de prud'hommes étant confirmée et celle-ci ayant produit ses effets au 17 mai 2019, il convient de mettre hors de cause la société K économique Market, qui n'a acquis le fonds de commerce de la société NS Distribution qu'en janvier 2021, soit bien postérieurement à la date de rupture du contrat de travail.

Dès lors, Mme [G] qui n'était plus en lien contractuel au jour de la cession du fonds de commerce n'est pas fondée à rechercher la condamnation du cessionnaire qui sera mis hors de cause.

L'équité commande de condamner Mme [G] à indemniser la dite société des frais irrépétibles exposés à hauteur de 750 euros.

VIII - Sur les demandes accessoires :

Il n'y a pas lieu de déroger aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil prévoyant que les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal, à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues à cette date et à compter de chaque échéance devenue exigible, s'agissant des échéances postérieures à cette date, les créances à caractère indemnitaire produisant intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté Mme [G] de ses demandes en paiement d'un rappel de salaire conventionnel fondé sur un emploi de chef de magasin, de dommages-intérêts pour harcèlement moral et de dommages-intérêts pour défaut de mutuelle et d'établissement d'une attestation de salaires,

- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de Mme [G] aux torts de la société NS Distribution, sauf à préciser que celle-ci a produit ses effets au 17 mai 2019,

- condamné la société NS Distribution à payer à Mme [G] des sommes suivantes :

- 3 020 euros au titre du préavis outre 302 euros à titre de congés payés afférents,

- 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Ordonné à la société NS Distribution l'établissement d'une attestation de salaire pour l'arrêt de travail du 10 août 2018,

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau des chefs infirmés,

Déboute Mme [G] de sa demande en paiement de la somme de 8 305 euros outre 830 euros à titre de congés payés y afférents au titre des salaires du 10 août 2018 au 21 février 2019,

Condamne la société NS Distribution à verser à Mme [G] les sommes suivantes :

- 8 157,24 euros bruts au titre des heures supplémentaires, outre 815,72 euros au titre des congés payés afférents,

- 2 739 euros bruts au titre du repos compensateur,

- 9 060 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement au repos hebdomadaire,

- 849,37 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 4 500 euros bruts au titre de la rupture injustifiée.

Rappelle que les créances de nature contractuelle sont productives d'intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues à cette date, et à compter de chaque échéance devenue exigible, s'agissant des échéances postérieures à cette date, et que les créances indemnitaires sont productives d'intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant,

Ordonne à la société NS Distribution de remettre dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision à Mme [G] ses bulletins de salaire pour la période de janvier 2018 à mai 2019 et les documents de fin de contrat conformes au présent arrêt,

Fixe au passif de la société 2N2A la créance suivante : 1 915 euros bruts, outre 191,50 euros bruts au titre des congés payés afférents,

Déboute Mme [G] de sa demande en fixation d'une créance au passif de la société 2N2A aux titres du repos compensateur et du travail dissimulé,

Dit qu'en application des articles L 622-28 et L 641-3 du Code de commerce, le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête définitivement à sa date le cours des intérêts au taux légal des créances salariales nées antérieurement,

Donne acte à l'AGS - CGEA de son intervention et de ce qu'elle revendique le bénéfice exprès et d'ordre public des textes légaux et réglementaires applicables tant au plan de la mise en 'uvre du régime d'assurances des créances des salaires que de ses conditions et étendues de garantie, plus précisément des articles L 3253-8 , L 3253-17 et D 3253-5 du Code du travail,

Y ajoutant,

Condamne la société NS Distribution à verser à Mme [G] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

Déboute Mme [G] de ses demandes de condamnation visant la société K ECO MARKET et met hors de cause cette dernière.

Condamne Mme [G] à verser à la société K ECO MARKET la somme de 750 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société NS Distribution aux entiers dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, et par Madame Morgane BACHE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 21e chambre
Numéro d'arrêt : 19/02624
Date de la décision : 08/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-08;19.02624 ?
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