COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
1ère chambre 1ère section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
Code nac : 29A
DU 05 JUILLET 2022
N° RG 20/06324
N° Portalis DBV3-V-B7E-UGYW
AFFAIRE :
[K] [M]
C/
[T], [L] [X]
[G] [J]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Novembre 2020 par le Tribunal Judiciaire de VERSAILLES
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 20/00890
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
-l'ASSOCIATION AVOCALYS,
-la SELARL JRF & ASSOCIES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE CINQ JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dont le délibéré a été prorogé le 28 juin 2022, les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :
Madame [K] [M]
née le 19 Juillet 1954 à [Localité 12]
de nationalité Française
[Adresse 8]
[Localité 12]
représentée par Me Monique TARDY de l'ASSOCIATION AVOCALYS, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 - N° du dossier 004772
Me Adrien SAPORITO de la SELARL TSV AVOCATS, avocat - barreau de PARIS, vestiaire : D0044
APPELANTE
****************
Monsieur [T], [L] [X]
né le 29 Décembre 1930 à [Localité 12]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 12]
représenté par Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & ASSOCIES, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20210181
Me Nathalie DELEUZE de la SARL Nathalie Deleuze Avocat, avocat - barreau de PARIS, vestiaire : K0066
INTIMÉ
****************
Monsieur [G] [J]
mandataire judiciaire à la protection des majeurs, en sa qualité de tuteur aux biens de M. [T] [X], désigné par ordonnance du 27 novembre 2021 en remplacement de Mme [P]
[Adresse 13]
[Adresse 13]
[Localité 5]
représenté par Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & ASSOCIES, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20210181
Me Nathalie DELEUZE de la SARL Nathalie Deleuze Avocat, avocat - barreau de PARIS, vestiaire : K0066
PARTIE INTERVENANTE
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Avril 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anna MANES, Présidente et Madame Nathalie LAUER, Conseiller, chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anna MANES, Présidente,
Madame Nathalie LAUER, Conseiller,
Madame Sixtine DU CREST, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,
*************************
FAITS ET PROCÉDURE
M. [X] est né le 29 décembre 1930 à [Localité 12], où est situé son domicile, [Adresse 3]. Il est célibataire et sans enfant. Depuis 2016, année où sa " maladie à corps Lewy " (apparentée à la maladie d'Alzheimer) a été diagnostiquée, il dort et prend ses repas à la résidence pour seniors : [11], située à proximité de son domicile.
Le 26 juin 2018, M. [X] a fait donation par acte authentique à Mme [M] de la nue-propriété du bien situé au [Adresse 3].
Le 11 novembre 2018, M. [X] a modifié la clause bénéficiaire de son assurance-vie au profit de Mme [M] et à défaut au profit de l'association protectrice des animaux (SPA).
Par jugement du 21 juin 2019, le juge des tutelles du tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye a placé M. [X] sous tutelle, désigné Mme [P] en qualité de tuteur aux biens et Mme [M] en qualité de tuteur à la personne.
Le 12 novembre 2021 une ordonnance de changement de tuteur a été rendue par le tribunal de proximité de Saint-Germain-en-Laye, déchargeant Mme [P] et désignant M. [J] en tant que mandataire judiciaire à la protection des majeurs de M. [X].
En vertu d'une ordonnance rendue sur requête le 7 février 2020 par le président du tribunal judiciaire de Versailles, M. [X], représenté par sa tutrice aux biens, Mme [P], a fait délivrer à Mme [M], le 26 février 2020, une assignation à jour fixe.
Par jugement rendu le 24 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Versailles a :
- prononcé la nullité de1'acte de donation du 26 juin 2018, consenti à Mme [M] sur la nue-propriété d'une maison à usage d'habitation, située [Adresse 3], cadastrée Section AK. numéro [Cadastre 7], d'une surface de 393 m² ('32 93ca') ; et section AK, numéro [Cadastre 6], d'une surface de 197 m² (1a 97 ca).
- dit que la présente décision est opposable à l'étude notariale SCP Lelièvre, Galiber d'Auque et Dubois,
- prononcé la nullité des avenants aux contrats d'assurance-vie CNP Assurances n° 343088668 et CNP Assurances n °161005516, à savoir : 1'avenant du 28 février 2018 au bénéfice de Mme [M] et des neveux de M. [X], 1'avenant du 11 novembre 2018 au bénéfice de Mme [M], et à défaut de la SPA.
- renvoyé à l'exécution des contrats d'assurance-vie selon les stipulations antérieures aux avenants annulés,
- dit que la présente décision est opposable aux sociétés CNP Assurances,
- condamné Mme [M] à payer à M. [X], représenté par sa tutrice aux biens, Mme [P], la somme de 42.500 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice matériel,
- débouté M. [X] représenté par sa tutrice aux biens, Mme [P], du surplus de ses demandes ;
- condamné Mme [M] aux dépens.
- condamné Mme [M] à payer à M. [X] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [M] a interjeté appel de ce jugement le 17 décembre 2020 à l'encontre de M. [X] représenté par son tuteur aux biens.
Par dernières conclusions notifiées le 29 mars 2022, Mme [M] demande à la cour de :
- infirmer le jugement du Tribunal judiciaire de Versailles rendu le 24 novembre 2020 (RG n 20/00890) en ce qu'il :
- prononce la nullité de l'acte de donation du 26 juin 2018, consenti à Mme [M] sur la nue-propriété d'une maison à usage d'habitation, située [Adresse 3], cadastrée Section AK, numéro [Cadastre 7], d'une surface de 393 m² (3a 93ca) ; et section AK, numéro [Cadastre 6], d'une surface de 197 m² (1a 97 ca),
- dit que la présente décision est opposable à l'étude notariale SCP Lelièvre, Galiber d'Auque et Dubois,
- prononce la nullité des avenants aux contrats d'assurance-vie CNP Assurances n 343088668 et CNP Assurances n 161005516, à savoir : l'avenant du 28 février 2018 au bénéfice de Mme [M] et des neveux de M. [X], l'avenant du 11 novembre 2018 au bénéfice de Mme [M], et à défaut de la SPA.
- renvoie à l'exécution des contrats d'assurance-vie selon les stipulations antérieures aux avenants annulés,
En conséquence et statuant à nouveau,
- débouter M. [X], représenté désormais par son tuteur aux biens M. [J], de sa demande d'annulation de l'acte de donation du 26 juin 2018, consenti à Mme [M] sur la nue-propriété d'une maison à usage d'habitation, située [Adresse 3], cadastrée Section AK, numéro [Cadastre 7], d'une surface de 393 m² (3a 93ca) ; et section AK, numéro [Cadastre 6], d'une surface de 197 m² (1a 97 ca).
- débouter M. [X], représenté désormais par son tuteur aux biens M. [J], de sa demande d'annulation des avenants aux contrats d'assurance-vie CNP Assurances n° 343088668 et CNP Assurances n°161005516, à savoir : l'avenant du 28 février 2018 au bénéfice de Mme [M] et des neveux de M. [X], l'avenant du 11 novembre 2018 au bénéfice de Mme [M], et à défaut de la SPA.
- débouter M. [X], représenté désormais par son tuteur aux biens M. [J], de sa demande subsidiaire tendant à la réduction totale et en nature des libéralités consenties au profit de Mme [M].
- débouter M. [X], représenté désormais par son tuteur aux biens M. [J], de sa demande de dommages-intérêts au titre du préjudice matériel.
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [X], représenté désormais par son tuteur aux biens M. [J], de sa demande de réparation d'un préjudice moral.
- débouter M. [X], représenté désormais par son tuteur aux biens M. [J], de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- ordonner que M. [X], représenté désormais par son tuteur aux biens M. [J], supporte les dépens de première instance et d'appel.
Par dernières conclusions notifiées le 25 mars 2022, M. [X], représenté par son tuteur aux biens, M. [J], demande à la cour de :
Vu le jugement rendu par le juge des tutelles de [Localité 14] en date du 21 juin 2019,
Vu l'ordonnance du président du tribunal judiciaire de Versailles en date du 7 février 2020,
Vu l'ordonnance rendue par le tribunal de proximité de Saint-Germain-en-Laye du 12 novembre 2021,
Vu le jugement du tribunal judiciaire de Versailles en date du 24 novembre 2020 déféré,
Vu l'article 464 du code civil,
Vu l'article L. 132-4-1 alinéa 3 du code des assurances,
Vu l'article 901 du code civil,
Vu l'article 414-1 du code civil,
Vu les articles 1240 et 1241 du code civil,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les pièces versées au débat,
- débouter Mme [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- déclarer recevables et bien fondées les demandes de M. [X] représenté par son tuteur aux biens, M. [J].
En conséquence :
À titre principal :
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
- prononcé la nullité de l'acte de donation du 26 juin 2018, consenti à Mme [M] sur la nue-propriété d'une maison à usage d'habitation, située [Adresse 3], cadastrée Section AK, numéro [Cadastre 7], d'une surface de 393 m² (3a 93ca) ; et section AK, numéro [Cadastre 6], d'une surface de 197 m² (1a 97 ca),
- dit que la présente décision est opposable à l'étude notariale SCP Lelièvre, Galiber d'Auque et Dubois,
- prononcé la nullité des avenants aux contrats d'assurance-vie CNP Assurances n° 343088668 et CNP Assurances n° 161005516, à savoir : l'avenant du 28 février 2018 au bénéfice de Mme [M] et des neveux de M. [X], l'avenant du 11 novembre 2018 au bénéfice de Mme [M], et à défaut de la SPA,
- renvoyé à l'exécution des contrats d'assurance-vie selon les stipulations antérieures aux avenants annulés,
- dit que la présente décision est opposable aux sociétés CNP Assurances,
À titre subsidiaire :
- prononcer la réduction totale en nature de la donation en nue-propriété consentie le 26 juin 2018 et des libéralités résultant des avenants précités aux assurance-vie,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [M] à payer à M. [X], la somme de 42 500 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice matériel,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [X], de sa demande de réparation d'un préjudice moral ;
Et statuant à nouveau,
- condamner Mme [M] à payer à M. [X] la somme de 40.000 euros au titre de dommages-intérêts pour préjudice moral ;
En tout état de cause,
- condamner Mme [M] à payer à M. [X] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Dontot, JRF & Associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile .
La clôture de l'instance a été ordonnée le 31 mars 2022.
SUR CE, LA COUR,
Les limites de l'appel
Il résulte des écritures ci dessus visées que le débat en cause d'appel se présente dans les mêmes termes qu'en première instance, chacune des parties maintenant ses prétentions telles que soutenues devant les premiers juges.
La demande d'annulation de la donation consentie le 26 juin 2018 et des modifications de la clause bénéficiaire des contrats d'assurance-vie souscrits par M. [X].
Moyens des parties
Mme [M] poursuit l'infirmation du jugement en ce qu'il a annulé ces actes. À l'appui, elle fait valoir que, au vu des pièces qu'elle produit aux débats, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, M. [X] n'était pas dans un état d'insanité habituel en 2018 ; que la maladie dont il souffre ne l'a pas rendu notoirement inapte à effectuer des libéralités en 2018 ; que le tuteur de M. [X] maintient le contraire au vu du seul avis médical du docteur [B] qui pourtant se contredit elle-même dans le cadre de ses différents rapports. Elle en déduit qu'il ne peut être sérieusement prétendu qu'elle avait connaissance de la prétendue inaptitude notoire de M. [X] à défendre ses intérêts alors même que des professionnels de santé qualifiés attestent du contraire. Elle réplique par ailleurs que, contrairement à ce que soutient la partie adverse, l'état de M. [X] ne s'est pas amélioré mais que ce dernier est stable depuis plusieurs années. En outre, elle soutient que ces actes ne sont pas préjudiciables pour M. [X].
M. [X], représenté par son tuteur aux biens, M. [J], conclut à la confirmation du jugement sur ce point. À l'appui, il fait valoir que les conditions posées par l'article 464 du code civil et l'article L 132-4-1 alinéa 4 du code des assurances pour l'annulation des actes litigieux sont remplies. À titre subsidiaire, il demande la réduction des libéralités. Par ailleurs, il forme appel incident du jugement en ce qu'il a débouté M. [X] de sa demande de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.
Pour l'exposé détaillé des moyens des parties, et conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément référé à leurs écritures susvisées.
Appréciation de la cour
En application de l'article 143 du code de procédure civile, les faits dont dépend la solution du litige peuvent, à la demande des parties, ou d'office, être l'objet de toutes mesures d'instruction légalement admissibles.
En l'espèce, sont soumis à l'examen de la cour les éléments médicaux suivants :
- une attestation du Docteur [B] (pièce n° 4 de M. [X], représenté par son tuteur aux biens, M. [J]), qui suit M. [X] depuis 2016 et a posé à cette date le diagnostic de maladie à corps de Lewy, et qui atteste le 16 juillet 2019 que l'atteinte subie par M. [X] associée aux troubles mnésiques marqués du patient permet d'affirmer que celui-ci n'était plus en mesure de comprendre pleinement la portée des documents qu'il a pu signer depuis 2016,
- un certificat du docteur [C] du 26 mars 2018 (pièce n° 11 de Mme [M]), établi à la demande du notaire ayant reçu l'acte de donation, qui atteste que " l'état de santé de M. [X] ne contre-indique pas la réalisation d'acte notarié ce jour ",
- les différents comptes-rendus de visite rédigés par ce même médecin et adressés au Docteur [C], médecin traitant de M. [X],
- un compte rendu de visite le 5 novembre 2020 (pièce n° 37 de Mme [M]) toujours établi par le Docteur [B] qui note que la pathologie est peu évolutive actuellement ; que le moral est moyen car la donation de la maison du patient qu'il a faite à Mme [M] est remise en cause compte tenu de ses troubles cognitifs majeurs (qui restent à un stade léger) ; que potentiellement, sa maison pourrait être vendue, ce qui l'affecte car il aime s'y rendre quotidiennement pour y jardiner ; que de plus, il apprécie Mme [M] et est reconnaissant de son aide ; qu'il reçoit d'elle l'affection dont il a besoin et souffre de ce que son choix de donation soit remis en cause ; qu'il ne réalise pas qu'il a pu potentiellement faire l'objet d'une manipulation ; qu'il trouve que ses neveux ne se sont jamais beaucoup occupés de lui et il préférerait que sa maison revienne à Mme [M] qui reste proche de lui ; qu'il n'y a pas de trouble franc de jugement chez lui, mais son jugement peut être partiellement émoussé par sa maladie neurodégénérative ; que le MMS ce jour est stable à 25/30 (23/30 l'an dernier et 25/30 l'année précédente ; que le patient reste assez bien orienté ; que sur le plan temporospatial, il se trompe sur le jour du mois, il perd un point au calcul, il oublie 2 des 3 mots, il a du mal à répéter la phrase ; qu'il peut donner 6 noms d'animaux en une minute et en répète 1 dans le même temps ;
- un certificat médical (pièce n° 39 de Mme [M]) établi le 30 avril 2021 par le Docteur [N], médecin spécialiste inscrit sur la liste établie par le procureur de la République auprès du tribunal judiciaire de Versailles, comme compétent à se prononcer sur l'altération des facultés mentales ou corporelles des individus pouvant être soumis au droit des incapables majeurs prévu par l'article 493-1 du code civil qui conclut que " M. [X] présente une pathologie neurodégénérative type démence à corps de Lewy stabilisée sans trouble du jugement ni de la compréhension ; que cet état neuropsychologique contraste beaucoup par rapport à son état clinique antérieur, et surtout il persiste à vouloir faire donation à Mme [M] ce dont je trouve cohérent ce jour et ce malgré une probable démence à corps de Lewy à réévaluer sur le plan neuropsychologique. ",
- un certificat médical établi le 23 juillet 2021 (pièce n° 42 Mme [M]) par le Docteur [E], médecin gériatre qui constate des troubles cognitifs objectifs avec des tests mnésiques modérément déficitaires, avec une stabilité remarquable depuis plusieurs années (test MMSE à 26/30 en moyenne depuis 2016) ; qu'il n'existe pas sur les éléments cliniques recueillis de signes neurologiques extrapyramidaux notables ; qu'il ne se plaint d'aucun cauchemar ni d'aucune hallucination ; qu'il ne voit donc pour sa part aucun signe évocateur formel de maladie à corps de Lewy ; qu'il existe en revanche des petits signes mineurs de désorientation temporelle ou spatiale, une baisse de l'encodage mnésique tout à fait cohérents avec son grand âge et qu'il n'a observé aucun trouble du jugement (') ; qu'il ne lui est bien sûr pas possible d'affirmer que M. [X] ne souffrait d'aucun trouble cognitif dans les années précédentes mais que ce qu'il observe actuellement lui parait entrer dans le cadre d'un vieillissement cognitif simple avec une composante neuro dégénérative assez banale à 90 ans ;
- un certificat établi le 10 novembre 2021 (pièce n° 43 de Mme [M]) par le Docteur [C], médecin traitant de M. [X] qui certifie que comme le précise le Docteur [N] le 30 avril 2021, M. [X] est cohérent, persiste à vouloir faire la donation à Mme [M] et présente un état stable depuis qu'il le connaît malgré ce diagnostic de maladie à corps de Lewy et qu'il n'a donc pas de remords en ce qui concerne les certificats du 26 mars 2018 et 2 octobre 2020 en dehors de la situation
conflictuelle que cela a produit.
Les pièces médicales soumises à l'appréciation de la cour sont donc contradictoires. Il y a lieu en particulier de relever que même le Docteur [B], qui suit M. [X] suite au diagnostic de maladie à corps de Lewy qu'elle a posé en 2016, et qui atteste en 2019 que l'atteinte dont souffre son patient ne lui permet pas de comprendre la portée de ses actes, relève néanmoins, en 2020 que celui-ci réaffirme son souhait de donner sa maison à Mme [M].
Il est donc démontré qu'une mesure d'expertise médicale est nécessaire afin de vérifier, de manière contradictoire et impartiale, l'aptitude de M. [X] à consentir à cette donation et à comprendre la portée de cet acte. Il convient donc de l'ordonner avant-dire droit, selon modalités précisées au dispositif ci-après, et de surseoir à statuer, dans l'attente, à toutes les demandes.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,
Avant-dire droit,
ORDONNE une expertise ;
DÉSIGNE M. [O] [R] (1957) psychiatre,
[Adresse 4]
[Localité 9]
Tél : [XXXXXXXX01] Fax : [XXXXXXXX02]
Mèl : [Courriel 10]
Qui aura pour mission de :
À cet effet,
1) Examiner M. [X]
2) Recueillir les éléments qu'il jugera nécessaires sur la situation médicale et psychologique de M. [X] depuis 2016 ;
2) Fournir tous éléments permettant à la cour d'apprécier si, au jour de la rédaction des actes litigieux M. [X] était apte à y consentir et s'il est apte à comprendre et à mesurer la portée de ces actes ,
3) Le cas échéant, dire si compte tenu des troubles et de la maladie qui étaient ceux de M. [X], il a pu agir dans un intervalle de lucidité ;
DIT que l'expert pourra se faire assister de sapiteurs de leur choix, hors sa spécialité (en particulier psychologue) ;
FIXE à 2 000 euros, TVA au taux légal à rajouter, la consignation due à l'expert à la charge des deux parties par moitié ;
DIT que cette somme devra être versée avant le 15 septembre 2022 à peine de caducité ;
DIT que l' expert devra déposer son rapport avant le 31 mars 2023 ;
Rappelle qu'il devra accomplir sa mission conformément aux dispositions des articles 237 à 248 et 273 à 284 du code de procédure civile ;
DÉSIGNE tout magistrat de cette chambre pour assurer le suivi des opérations d'expertise ;
RENVOIE à l'audience de mise en état du 06 octobre 2022 pour vérifier le paiement de la consignation ;
RENVOIE toutes autres demandes.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, La Présidente,