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28/06/2022 | FRANCE | N°21/00058

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 28 juin 2022, 21/00058


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





1ère chambre 1ère section







ARRÊT N°







CONTRADICTOIRE

Code nac : 28A





DU 28 JUIN 2022







N° RG 21/00058

N° Portalis DBV3-V-B7F-UHVK





AFFAIRE :



[D] [C] épouse [N]

C/

[Y], [J], [B] [I] épouse [P]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Novembre 2020 par le Juge de la mise en état de PONTOISE

N° Chambre :



N° Section :

N° RG : 18/09983



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :





à :



-la SCP PARUELLE ET ASSOCIE,



-la SELARL JRF & ASSOCIES







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT HUIT JUIN DEUX MILLE ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

1ère chambre 1ère section

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 28A

DU 28 JUIN 2022

N° RG 21/00058

N° Portalis DBV3-V-B7F-UHVK

AFFAIRE :

[D] [C] épouse [N]

C/

[Y], [J], [B] [I] épouse [P]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Novembre 2020 par le Juge de la mise en état de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 18/09983

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

-la SCP PARUELLE ET ASSOCIE,

-la SELARL JRF & ASSOCIES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [D] [C] épouse [N]

née le 26 Février 1967 à [Localité 4] (MAROC)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Rayman REMTOLA substituant Me Gilles PARUELLE de la SCP PARUELLE ET ASSOCIE, avocat - barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 02 - N° du dossier 20/5188

APPELANTE

****************

Madame [Y], [J], [B] [I] épouse [P]

née le 09 Octobre 1958 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 3]

représentée par Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & ASSOCIES, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20210048

Me Catherine LABUSSIERE BUISSON de l'AARPI G.B AVOCATS, avocat - barreau de PARIS, vestiaire : A0785

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 Avril 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anna MANES, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anna MANES, Présidente,

Madame Nathalie LAUER, Conseiller,

Madame Sixtine DU CREST, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

FAITS ET PROCÉDURE

[H] [W], célibataire et sans enfant, est décédé le 24 décembre 2017.

Par testament du 14 juin 2010, il a institué sa filleule, Mme [P] légataire universel, à charge pour elle de délivrer des legs particuliers à Mme [U] née [O] et à l'Institut Curie.

Le 22 mai 2013, [H] [W] a modifié son testament par un codicille, ajoutant Mme [N] comme bénéficiaire d'un tiers de ses contrats d'assurance-vie, avec Mme [P] et Mme [U]. Mme [C] épouse [N] était employée de [H] [W] en qualité d'aide-ménagère et la validité du testament à son profit est contestée.

Mme [P] a fait assigner Mme [C] épouse [N] devant le tribunal de grande instance (devenu tribunal judiciaire) de Pontoise par acte d'huissier de justice du 21 novembre 2018 afin de voir prononcer la nullité du testament du 22 mai 2013.

Par jugement contradictoire rendu le 9 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Pontoise a :

- constaté que Mme [N] est frappée d'une incapacité à recevoir une libéralité de la part de [H] [W],

En conséquence

- prononcé la nullité du codicille du 24 juin 2013 complétant le testament du 14 juin 2010 et instituant Mme [N] légataire à titre particulier à hauteur d'un tiers des contrats d'assurance-vie souscrits par [H] [W],

- condamné Mme [N] à verser à Mme [P] une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

- condamné Mme [N] aux entiers dépens, avec distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Mme [C] épouse [N] a interjeté appel de ce jugement le 5 janvier 2021 à l'encontre de Mme [P].

Par ses dernières conclusions notifiées le 16 mars 2021, Mme [C] demande à la cour, au visa de l'article 2 du code civil, de :

- recevoir son appel, le déclarer bien fondé et y faire droit ;

- infirmer le jugement rendu le 09 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Pontoise ;

En conséquence,

- débouter Mme [P] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer la validité du codicille en date du 22 mai 2013 l'instituant légataire à titre

particulier,

- condamner Mme [P] à lui payer la somme de 3 000 euros en application des

dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre 2 500 euros s'agissant de l'article 700 se rapportant à l'instance devant le tribunal judiciaire de Pontoise ;

- condamner Mme [P] aux entiers dépens dont distraction.

Par d'uniques conclusions notifiées le 7 juin 2021, Mme [P] demande à la cour, au fondement de la loi n°2015-1776 du 28/12/2015, des articles L 116-4 du code de l'action sociale et des familles, L.7221-1 et L.7231-1 du code du travail, 901, 902, 911 du code civil, 1129 à 1131, 1137 et 1143 du code civil, 1112 et 1169 du même code, de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et pour le surplus, y ajoutant :

- condamner Mme [N] à lui verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [N] aux entiers dépens, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 17 février 2022.

SUR CE, LA COUR,

Sur les limites de l'appel,

Il résulte des écritures ci-dessus visées que le débat en cause d'appel se présente dans les mêmes termes qu'en première instance, chacune des parties maintenant ses prétentions telles que soutenues devant les premiers juges.

Sur l'incapacité à recevoir de Mme [C]

Se fondant sur les dispositions des articles L.116-4 du code de l'action sociale et des familles, issu de la loi du 28 décembre 2015, L.7221-1 du code du travail et 911 du code civil, le tribunal a rappelé que, pour les dispositions testamentaires et les clauses bénéficiaires d'un contrat d'assurance-vie, le transfert de propriété s'opérait à l'ouverture de la succession et que c'était de ce fait au regard de la loi en vigueur au jour du décès et non celle en vigueur au jour du testament qu'il convenait de rechercher si, au moment où la libéralité a été faite, le légataire justifiait d'une qualité l'empêchant, au jour du décès, de bénéficier de la libéralité.

Retenant qu'au jour du décès de [H] [W], soit le 24 décembre 2017, l'article L.116-4 du code de l'action sociale et des familles était entré en vigueur, que Mme [C] était l'employée de [H] [W], le tribunal en a déduit que Mme [C] était frappée d'une incapacité de recevoir des libéralités à titre gratuit de la part de son employeur et que le testament du 22 mai 2013 établi à son profit était nul.

' Moyens des parties

Se fondant sur l'article 2 du code civil, Mme [C] poursuit l'infirmation du jugement en ce qu'il a fait application des dispositions de l'article L. 116-4 du code de l'action sociale et des familles, issu de l'article 28 de la loi du 28 décembre 2015, alors qu'aucune disposition transitoire de cette loi ne prévoyait expressément la rétroactivité de la loi nouvelle frappant d'incapacité des personnes déterminées de recevoir des libéralités. Elle souligne que le codicille contesté par Mme [P] a été rédigé par [H] [W] le 22 mai 2013, soit antérieurement à la loi nouvelle, de sorte que l'article L. 116-4 du code de l'action sociale et des familles est inapplicable.

En outre, se fondant sur la décision du Conseil constitutionnel du 12 mars 2021 (Cons. const., 12 mars 2021, n° 2020-888 QPC) qui a déclaré inconstitutionnelle cette disposition en ce qu'elle porte une atteinte disproportionnée au droit de propriété des personnes concernées, elle prétend que la validité du codicille n'est pas affectée par la loi nouvelle et doit produire ses effets ce qui suppose qu'elle soit considérée comme la bénéficiaire d'un tiers des contrats d'assurance-vie souscrits par [H] [W] suivant testament de 2013.

Mme [P] poursuit la confirmation du jugement de ce chef et fait valoir que Mme [C] était incapable de recevoir à titre gratuit et que la jurisprudence a confirmé à plusieurs reprises que les dispositions de la loi du 28 décembre 2015 étaient applicables comme étant entrées en vigueur au moment du décès du de cujus et non au moment où la libéralité avait été consentie (pièce 36, des arrêts de la cour d'appel de Paris).

Elle soutient avoir démontré tant par ses productions que ses écritures que :

* [H] [W] était une personne vulnérable au moment de la rédaction du codicille du 23 mai 2013 en ce qu'il était âgé de quatre-vingt-quatre ans et se trouvait en état de dépendance et de fragilité ;

* Mme [C] était son employée de 2009 à décembre 2015 ;

* Mme [C] effectuait des tâches d'aide à domicile au moment de la rédaction du codicille litigieux, cette fonction entrant dans la définition des articles L.7221-1 et L.7231-1 du code du travail ;

* Mme [C] n'a jamais entretenu de relation amicale avec le défunt ;

* les dispositions de la loi du 28 décembre 2015 et notamment l'article L.116-4 du code de l'action sociale et des familles, sont applicables à Mme [C].

Mme [P] en déduit que le jugement ne pourra qu'être confirmé en ce qu'il a retenu que Mme [C] était frappée d'une incapacité de recevoir des libéralités à titre gratuit par son employeur et prononcé la nullité du codicille du 24 juin 2013 complétant le testament du 14 juin 2010 et instituant Mme [N] légataire à titre particulier à hauteur d'un tiers des contrats d'assurance-vie souscrits par [H] [W].

' Appréciation de la cour

Selon l'article 2 du code civil, en l'absence de dispositions particulières, les actes juridiques sont régis par la loi en vigueur au jour où ils ont été conclus.

La loi du 28 décembre 2015 ne prévoit pas de dispositions particulières relatives à l'application rétroactive de l'article L.116-4 du code de l'action sociale et des familles.

Il en résulte que la loi permettant d'apprécier l'incapacité de recevoir par un testament est celle en vigueur au jour de l'établissement de celui-ci.

Le codicille litigieux ayant été rédigé le 22 mai 2013, soit avant l'entrée en vigueur de la loi du 28 décembre 2015, c'est à tort que le jugement a fait application des dispositions de l'article L. 116-4, alinéa 2, du code de l'action sociale et des familles qui n'étaient pas encore applicables.

Il s'ensuit que le tribunal en ce qu'il a retenu que Mme [C] était frappée d'une incapacité de recevoir des libéralités à titre gratuit de la part de son employeur et que le testament du 22 mai 2013 établi à son profit était nul en raison de l'application des dispositions de l'article L. 116-4, alinéa 2, du code de l'action sociale et des familles ne pourra qu'être infirmé.

Sur la nullité du legs pour dol

' Moyens des parties

Se fondant sur les articles 901, 1129, 1130, 1131, 1137, alinéa 1, 1143, 1112, alinéa 2, du code civil, Mme [P] sollicite, à titre subsidiaire, que le legs litigieux soit déclaré nul en raison d'un vice du consentement l'affectant.

Elle fait valoir que [H] [W] a été victime d'un dol parce qu'il appartient à une catégorie de personne particulièrement fragile, étant âgé et affaibli, dont les gratifiés savent profiter pour l'amener à tester en leur faveur.

En l'espèce, elle fait valoir que [H] [W] a connu dès 2012, une détérioration de ses facultés cognitives et intellectuelles, oubliant des lieux de rendez-vous, roulant en sens inverse, conduisant à une perte d'autonomie depuis avril 2013 et à la mise en place, en plus de l'aide ménagère, d'auxiliaires de vie.

Elle ajoute qu'il a été hospitalisé en gériatrie dès juillet 2013 et que de nombreuses hospitalisations ont suivi. Elle soutient, qu'âgé de 84 ans, il était particulièrement vulnérable. A l'inverse, Mme [C] était intéressée, fourbe, autoritaire, caractérielle.

Elle soutient que les intentions malveillantes et intéressées de Mme [C] sont corroborées par des éléments intrinsèques du codicille dont l'écriture fait apparaître un tracé désordonné avec une rédaction imprécise, des indications vagues.

Elle rétorque qu'elle ne demande pas l'annulation du codicille en raison de l'insanité d'esprit de [H] [W], mais pour vice du consentement en ce que Mme [C] a usé de manoeuvres frauduleuses et a profité des particulières fragilités et dépendances du défunt pour se voir octroyer le legs litigieux de sorte que la cour ne pourra que prononcer sa nullité pour dol en application des dispositions des articles 901 et 1129 du code civil.

Mme [C] soutient que Mme [P] procède par voie d'affirmation, sans démontrer par ses productions leur bien-fondé.

Elle observe qu'elle ne produit aucun élément de preuve venant corroborer ses allégations et fait en particulier valoir que :

* les comptes-rendus d'hospitalisation versés aux débats ont été établis postérieurement à la rédaction du codicille litigieux (pièces adverses 10 et 11),

* aucun certificat médical ne vient attester de l'état de santé fragile de [H] [W] à l'époque de la rédaction de ce codicille,

* l'âge avancé n'est pas en soi la preuve de l'insanité d'esprit,

* le codicille tant en sa forme qu'en son fond ne permet pas de retenir l'existence d'une défaillance physique et/ou mentale de [H] [W],

* elle n'était pas au courant de ce legs fait en sa faveur et l'a appris par Mme [P],

* les attestations versées aux débats sont de pure complaisance,

* la demande de Mme [P] fondée sur le dol est injustifiée car les conditions du dol ne sont ni réunies ni démontrées, en particulier, selon Mme [C], il n'est pas justifié l'existence de manoeuvres frauduleuses,

* Mme [P] n'a jamais entrepris la moindre action tendant à assurer la protection juridique de [H] [W] ce qui démontre bien qu'elle le considérait comme capable d'accomplir tous les actes de la vie civile.

' Appréciation de la cour

Bien que les moyens développés par Mme [P] à l'appui de sa prétention soient confus, force est de constater que, en conclusif de ses développements au titre de sa demande subsidiaire en point B (page 16, haut de page, du 3ème paragraphe au 5ème paragraphe), Mme [P] reproche à Mme [C] d'avoir trompé [H] [W] dans le but de le conduire à tester en sa faveur et invoque l'existence d'un dol.

L'article 1116 du code civil, dans sa version antérieure à celle résultant de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé, comme tout fait juridique, par tous moyens.

Ainsi qu'il résulte de ce texte, le dol, constitutif de l'un des vices du consentement retenu par le code civil, est sanctionné par la nullité du contrat dont il a déterminé la conclusion.

La charge de la preuve pèse sur le demandeur qui l'invoque. Il doit apporter la preuve que les conditions du dol sont réunies, à savoir des manoeuvres frauduleuses, une intention de tromper le contractant et le caractère déterminant des manoeuvres ou agissements imputés au défendeur.

S'agissant des faits constitutifs du dol, le mot 'manoeuvre', qui figure à l'article 1116 du code civil évoque l'idée d'actes intentionnellement accomplis en vue de la tromperie. Cependant, cette notion de 'manoeuvre' ne s'entend pas strictement. En effet, un simple mensonge, dont le caractère délibéré manifeste l'intention de tromper peut constituer un dol même s'il n'est appuyé d'aucun acte extérieur. Encore faut-il, pour cela, qu'il soit d'une certaine gravité.

L'existence d'un dol peut être déduite du silence volontairement gardé par un contractant mais encore faut-il que le contractant resté silencieux soit tenu d'une obligation d'information.

L'existence du dol s'apprécie en tenant compte des comportements et de la personnalité des parties en cause. Il revient donc à celui qui l'invoque de démontrer l'existence de ces 'manoeuvres dolosives' de nature à convaincre le contractant de contracter et qu'il ne l'aurait pas fait sans elles.

Le testament litigieux ayant été rédigé le 22 mai 2013, seuls les événements antérieurs à cette date sont susceptibles d'être pris en considération au titre des faits du dol allégué.

Les bulletins d'hospitalisation et les comptes-rendus médicaux, postérieurs aux faits, sont inopérants et, en tout état de cause, ne permettent pas de caractériser de la part de Mme [C] l'existence de manoeuvres dolosives au sens des textes susvisés.

Les attestations des intervenants, auxiliaires de vie, ne fournissent aucun élément pertinent à cette fin. C'est ainsi que ni Mme [G] (pièces 6 et 24) ni Mme [V] (pièces 7 et 25), ni Mme [I] (pièce 12), ni Mme [A] (pièces 13 et 26) ne rapportent aucun fait de nature à justifier les allégations de Mme [P] ; elles ne disent pas avoir été témoin de manoeuvre, de contrainte, de réticence dolosive de la part de Mme [C] à l'égard de [H] [W] de nature à le convaincre de tester pour elle.

Il découle de ce qui précède que le moyen soulevé par Mme [P] tiré de faits de dol est injustifié de sorte que la demande d'annulation du codicille litigieux motivée de ce chef sera rejetée.

Sur la nullité du legs pour défaut de cause ou fausse cause

' Moyens des parties

Se fondant sur les dispositions de l'article 1131 ancien du code civil, Mme [P] fait valoir que [H] [W], compte tenu des circonstances de l'espèce, n'avait aucune conscience de l'importance de la libéralité qu'il pouvait consentir à Mme [C] laquelle n'avait jamais manifesté le moindre attachement à son égard, comme l'indique l'ensemble des auxiliaires de vie qui ont témoigné.

Elle en conclut qu'elle démontre dès lors que le consentement de [H] [W] a été volontairement vicié et que la libéralité consentie ne reposait sur aucune cause ou à tout le moins sur une fausse cause.

Mme [C] rétorque que Mme [P] procède par voie d'affirmation sans aucun élément de preuve.

Elle rappelle avoir été au service de [H] [W] au cours de nombreuses années et effectuait plusieurs heures par semaine de tâches ménagères en application de son contrat de travail ; qu'une relation d'amitié s'est nouée entre elle et [H] [W] ; que ce dernier a entendu la gratifier pour lui exprimer sa reconnaissance, elle qui s'occupait de lui avec bienveillance et dévotion.

' Appréciation de la cour

Selon l'article 1131 ancien du code civil, l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.

Il revient à celui qui invoque l'application de cette disposition de démontrer l'absence de cause, la fausse cause ou la cause illicite.

En l'espèce, comme le soutient Mme [C], Mme [P] procède par voie d'affirmation, sans preuve de sorte que sa demande ne saurait être accueillie.

Il découle de l'ensemble des développements qui précède que le jugement en ce qu'il prononce la nullité du codicille du 24 juin 2013 complétant le testament du 14 juin 2010 et instituant Mme [N] légataire à titre particulier à concurrence d'un tiers des contrats d'assurance-vie souscrits par [H] [W] sera infirmé et la demande de Mme [P] tendant à la nullité de ce codicille rejetée.

Sur les demandes accessoires

Le sens du présent arrêt conduit à infirmer le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [P], partie perdante, supportera les dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Par voie de conséquence, sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

Il apparaît équitable d'allouer la somme de 5 000 euros à Mme [C] au titre des frais qu'elle a engagés en première instance et en appel pour assurer sa défense, somme à laquelle Mme [P] sera condamnée à lui payer.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,

INFIRME le jugement ;

Statuant à nouveau,

REJETTE les demandes de Mme [P] ;

DIT que le codicille du 22 mai 2013 instituant Mme [C] légataire à titre particulier est valide ;

CONDAMNE Mme [P] aux dépens de première instance et d'appel ;

DIT qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [P] à verser à Mme [C] la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

REJETTE toute autre demande.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 21/00058
Date de la décision : 28/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-28;21.00058 ?
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