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21/06/2022 | FRANCE | N°21/04464

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 21 juin 2022, 21/04464


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 4IF



13e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 21 JUIN 2022



N° RG 21/04464

N° Portalis

DBV3-V-B7F-UUKT



AFFAIRE :



S.A. CIC



C/



Me [M] [T]

....







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Juillet 2021 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 2121L01023



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Oriane DONTOT



Me Ivan CORVAISIER



TC NANTERRE



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT ET UN JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrê...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 4IF

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 21 JUIN 2022

N° RG 21/04464

N° Portalis

DBV3-V-B7F-UUKT

AFFAIRE :

S.A. CIC

C/

Me [M] [T]

....

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Juillet 2021 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 2121L01023

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Oriane DONTOT

Me Ivan CORVAISIER

TC NANTERRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A. CIC - CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20210662

Représentant : Me Didier SALLIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0924

APPELANTE

****************

Maître [X] [M] [T] ès qualités de mandataire judiciaire de la société ELOMAT

[Adresse 2]

[Localité 8]

SELARL BCM, prise en la personne de Maître [I] [P] ès qualités d'administrateur judiciaire de la société ELOMAT

[Adresse 3]

[Localité 10]

S.A.S. ELOMAT

[Adresse 1]

[Localité 9]

Représentant : Me Ivan CORVAISIER de la SELARL CORVAISIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 37

LE PROCUREUR GENERAL

COUR D'APPEL DE VERSAILLES

[Adresse 4]

[Localité 7]

INTIMES

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Mars 2022, Madame Marie-Andrée BAUMANN, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT

La SAS Elomat qui exerce une activité commerciale de 'traiteur dans le domaine de la restauration, la cuisine, la gestion de prestations de services dans le domaine de la restauration' et qui était titulaire d'un compte courant professionnel n° 00020467201 dans les livres de la SA Crédit Industriel et commercial (le CIC) a souscrit un prêt d'un montant de 50 000 euros remboursable en 48 mensualités successives, lequel était garanti par un nantissement de compte bancaire.

Par jugement en date du 3 décembre 2020, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Elomat et désigné la Selarl BCM, prise en la personne de maître [I] [P] et maître [X] [M] [T], respectivement en qualité d'administrateur et de mandataire judiciaires.

Le 10 décembre 2020, maître [P], ès qualités, a demandé la clôture du compte courant lequel présentait un solde créditeur de 71 814,36 euros, porté à 84 353,46 euros par suite de crédits postérieurs.

A l'ouverture de la procédure, le CIC a isolé la somme de 32 740,33 euros du solde créditeur du compte de la société Elomat sur un sous-compte n°00020467203 créé à cet effet, en vertu de la clause de nantissement prévue à l'acte de prêt.

Par lettre recommandée du 29 décembre 2020, il a déclaré au titre du prêt une créance de 32 740,33 euros en faisant état d'un droit de rétention à hauteur de ce montant.

Après avoir demandé la restitution de cette somme au CIC, l'administrateur judiciaire de la société Elomat, par lettre recommandée du 9 février 2021, l'a vainement mis en demeure afin que celle-ci soit reversée sur le compte ouvert au nom de la société en redressement judiciaire.

Par requête datée du 4 mars 2021, maître [P], ès qualités, a sollicité la restitution des sommes retenues par le CIC au titre de sa clause de nantissement de compte bancaire.

Par ordonnance du 17 mars 2021, le juge-commissaire désigné dans la procédure collective a ordonné la restitution des sommes retenues par le CIC, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de l'ordonnance.

Par lettre recommandée datée du 30 mars 2021, la société CIC a formé un recours à l'encontre de cette ordonnance devant le tribunal de commerce de Nanterre, lequel, par jugement contradictoire du 2 juillet 2021, a :

- déclaré recevable l'opposition à l'ordonnance du juge-commissaire, formée par le CIC ;

- débouté le CIC de toutes ses demandes ;

- confirmé l'ordonnance en toutes ses dispositions ;

- condamné le CIC à payer à la société Elomat la somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné le CIC aux dépens de l'instance.

Par déclaration du 12 juillet 2021, le CIC a interjeté appel du jugement.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 14 février 2022, il demande à la cour de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

- juger que le périmètre de la demande de restitution formée par la société Elomat et la Selarl BCM, ès qualités, ne saurait être supérieur à la somme de 20 706,91 euros ;

- débouter la société Elomat, la Selarl BCM et maître [M] [T], ces derniers ès qualités, de toutes leurs demandes ;

- les condamner solidairement à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article

700 du code de procédure civile ;

- laisser les dépens à la charge de la procédure collective.

La Selarl BCM et maître [M] [T], chacun ès qualités ainsi que la société Elomat, dans leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 12 novembre 2021, demandent à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

- débouter le CIC de toutes ses demandes ;

- le condamner à leur payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 février 2022.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

Sur le périmètre du débat :

Le CIC soutient que le périmètre de la demande de maître [P], ès qualités, à l'origine de la présente instance, ne peut être supérieur à 20 706,91 euros.

Rappelant que la société Elomat, dans le cadre des articles L.313-23 à L.313-34 du code monétaire et financier, lui a cédé, à titre de garantie, le solde créditeur du compte courant du contrat d'affacturage la liant à la société CM-CIC factor, le CIC explique que cette dernière lui a viré le 15 février 2021 sur le compte n°00020467203 la somme de 12 033,42 euros dont la propriété lui a été transférée en application de l'article L.313-24 du même code ; que ce compte étant devenu créditeur de 44 773,75 euros, il a réglé au redressement judiciaire de la société Elomat, comme il l'avait annoncé dans un courrier du 11 février 2021, la somme de 12 033,42 euros excédant le montant de la créance déclarée au passif. Dès lors qu'il est propriétaire de cette somme de 12 033,42 euros qu'il a versée au redressement judiciaire de la société Elomat, l'appelant en déduit que le périmètre de la créance de maître [P], ès qualités, ne peut être que de 20 706,91 euros.

Il critique le jugement qui a rejeté sa demande par des moyens dénués de pertinence dans la mesure notamment où il apporte la preuve du versement du 15 février 2021 sur le compte n°00020467203 et de son origine.

Les intimés concluent à la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté le CIC de sa demande relative au périmètre de la restitution dès lors qu'il n'apporte pas les éléments permettant d'apprécier si le montant de 12 033,43 euros a transité par le compte courant de la société Elomat, affirmant qu'il s'agit plus sûrement d'une annulation d'écriture liée à la cession de créance qui n'est pas l'objet du présent contentieux.

Le CIC justifie par les pièces qu'il communique que :

- le 27 novembre 2018, la société Elomat lui a cédé, en application des articles L.313-23 à L.313-34 du code monétaire et financier relatifs aux cessions de créances professionnelles, le solde créditeur disponible du compte courant du contrat d'affacturage la liant à la société CM-CIC factor ;

- suite à sa déclaration de créance à hauteur de 32 740,33 euros au titre du prêt accordé à la société Elomat et à l'exercice de son droit de rétention à hauteur de ce montant qu'il a isolé sur le sous compte n°00020467203, le CIC a informé maître [M] [T], ès qualités, par courrier du 11 février 2021, de la cession dont il bénéficiait sur le solde créditeur du compte de garantie ouvert chez CM-CIC factor et lui a indiqué qu'il restituerait ' les éventuelles sommes créditrices excédant les créances déclarées au passif' sur le compte de la société Elomat en redressement judiciaire ;

- le 15 février 2021, il a été viré au crédit du compte n°00020467203 qui présentait un solde créditeur de 32 740,33 euros une somme de 12 033,42 euros par le 'CIC factoring solutions' ;

- le même jour cette somme a été débitée de ce compte et virée sous la mention ' restitution RJ', les intimés ne discutant pas que cette somme a bien été créditée sur le compte de la société Elomat en redressement judiciaire.

Le CIC était propriétaire de la somme de 12 033,42 euros qui lui a été virée en exécution de la cession de créance dont il bénéficiait, dans la mesure où l'article L.313-24 du code monétaire et financier dispose que la cession de créance, même lorsqu'elle est effectuée à titre de garantie et sans stipulation d'un prix, transfère au cessionnaire la propriété de la créance cédée.

Par conséquent, cette somme, qui a été versée sur le compte bancaire de la société Elomat sans autre cause que celle expliquée dans le courrier du 11 février précité, doit être déduite des fonds dont il est sollicité la restitution ; le périmètre en est donc circonscrit à la somme de 20 706,91 euros.

Sur le nantissement de compte :

Le CIC qui invoque les dispositions des articles 2360 et 2364 du code civil, soutient qu'il n'a fait qu'appliquer et respecter la loi en déclarant sa créance à titre nanti en précisant alors le montant du solde créditeur du compte de la société Elomat à la date du jugement d'ouverture (article 2360) et en transférant ce solde créditeur sur un compte spécial (article 2364) ; il souligne que le nantissement de compte qui lui a été consenti par le contrat de prêt, dont les conditions générales et particulières ont été acceptées par la société Elomat, est conforme aux stipulations et aux exigences de l'article 2356 du code civil .

Observant que nul ne discute l'application de l'article 2287 du code civil, il critique le jugement en faisant valoir d'une part que l'article 2364 du code civil est applicable contrairement à ce que

le tribunal a jugé dans la mesure où le nantissement de compte est une variété de nantissement de créance, et d'autre part, que le nantissement n'est pas un paiement et confère un droit de rétention au créancier. Il observe à cet égard que l'inopposabilité du gage visée par l'article L.622-7 du code de commerce qui ne concerne que le gage corporel ne s'applique pas aux nantissements de meubles incorporels de sorte que le droit de rétention résultant du nantissement de compte figurant au contrat de prêt est parfaitement opposable à la procédure collective et ne se limite pas, comme l'a soutenu le tribunal, à la créance exigible au jour du jugement déclaratif. Il ajoute que la mise en jeu du nantissement ne contrevient pas aux dispositions des articles L.622-7, L.622-21 et L.622-29 du code de commerce.

Le CIC, pour répondre aux intimés et à la jurisprudence de la Cour de cassation citée par ces derniers, fait valoir que ces arrêts qui ne répondent pas au droit de rétention sont vivement critiqués par une partie de la doctrine, ajoutant qu'ils font application de l'article L.622-13 du code de commerce relatif aux contrats en cours au contrat de prêt qui ne constitue pas pourtant un tel contrat.

Les intimés observent que ce n'est pas la validité de forme du nantissement, prévue à l'article 2356 du code civil, qui est discutée mais que c'est l'ouverture du redressement judiciaire de la société Elomat qui rend ce nantissement inefficace. Observant que conformément à l'article 2360 du même code, les droits du créancier nanti portent sur le solde du compte à la date du jugement d'ouverture et que cet article n'a vocation qu'à déterminer l'assiette de la sûreté du créancier bénéficiant d'un tel nantissement, ils soulignent que conformément à l'article 2287 du code civil, les dispositions concernant le nantissement ne font pas obstacle à la mise en place des règles d'ordre public prévues en cas de procédure collective auxquelles aucune stipulation contractuelle ne peut déroger.

Ils exposent que la jurisprudence s'est prononcée à plusieurs reprises sur l'inefficacité d'un nantissement de compte bancaire au profit de l'établissement teneur de compte et que l'article 2364 du code civil qui ne s'applique qu'au nantissement de créance et pas au nantissement de compte bancaire ne peut justifier la légalité de la clause contractuelle de blocage des comptes ; ils remarquent qu'en l'espèce la société Elomat a bien respecté ses échéances de prêt jusqu'à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire et que le CIC a déclaré sa créance, ce qui lui donnera un rang prioritaire dans la procédure collective.

Ils contestent enfin que le CIC dispose d'un droit de rétention en considérant que celui-ci est contraire au droit en vigueur, en particulier aux dispositions de l'article L.622-13 du code de commerce, applicable au redressement judiciaire selon l'article L.631-14, dont ils sollicitent l'application non pas au contrat de prêt mais à la convention de compte courant ; ils soutiennent, en évoquant en particulier l'arrêt de la Cour de cassation (Com. 22 janvier 2020, 18 21.647), qu'en vertu des articles L.622-13 et 2287, un compte bancaire nanti en garantie d'une créance non exigible ne peut être bloqué par le créancier lorsque le débiteur est placé en redressement judiciaire et ce, malgré l'article 2360 alinéa 2 du code civil et la clause de blocage figurant au contrat.

Les conditions générales du contrat de crédit accordé par le CIC à la société Elomat prévoient au paragraphe intitulé 'nantissement des comptes' que ' conformément aux articles 2355 à 2366 du code civil, l'emprunteur remet en nantissement au profit du prêteur, à titre de sûreté, le compte sur lequel sont ou seront domiciliés les remboursements du crédit objet des présentes, et plus généralement l'ensemble des comptes présents ou futurs ouverts sur

les livres du prêteur, ceci sans préjudice de toute autre garantie spécifique qui pourrait le cas échéant être spécialement affectée par ailleurs à la garantie de ce crédit. (...)

Ce nantissement est consenti en garantie du paiement et du remboursement de toutes sommes en capital, intérêts, frais et accessoires dues au titre du crédit présentement consenti. (...)

En constituant ce nantissement, l'emprunteur accorde au prêteur le droit de se faire payer par préférence à ses autres créanciers sur les comptes ainsi nantis. (...)

De même, le prêteur pourra se prévaloir du nantissement en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire, de liquidation judiciaire ou d'une procédure de traitement des situations de surendettement des particuliers et sera en droit d'isoler sur un compte spécial bloqué à son profit les soldes créditeurs des comptes nantis existant à la date du jugement déclaratif d'ouverture de la procédure collective. (...)'

Il convient de rechercher si les conditions sont réunies pour que le CIC bénéficie de cette clause au regard en particulier des règles relatives aux procédures collectives qui sont d'ordre public, l'article 2287 du code civil énonçant expressément à cet égard que les dispositions du livre IV concernant les sûretés ne font pas obstacle à l'application des règles prévues en matière d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire ou encore en cas d'ouverture d'une procédure de traitement d'une situation de surendettement des particuliers ; aucune stipulation contractuelle ne peut déroger aux règles d'ordre public de la procédure collective.

L'article 2360 du code civil qui dispose en son deuxième alinéa qu'au cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou d'une procédure de traitement des situations de surendettement des particuliers contre le constituant, les droits du créancier nanti portent sur le solde du compte à la date du jugement d'ouverture, ne concerne que l'assiette de la garantie que pourra faire valoir le créancier dans le cadre de sa déclaration de créance.

A la lecture de la déclaration de créance du CIC, les échéances du prêt étaient régulièrement payées par la société Elomat dès lors que le décompte qui y est joint ne mentionne aucune mensualité impayée ; l'essentiel de la créance déclarée n'était ainsi pas exigible, le CIC déclarant une créance à échoir de 32 693,91 euros et une créance échue de 47,42 euros à titre d'assurance et d'intérêts échus.

Le CIC a néanmoins procédé au blocage de la somme de 32 741,33 euros sur le compte n°00020467203 qu'il entend ainsi compenser avec le montant de sa créance, pour l'essentiel à échoir, déclarée au passif de la société Elomat.

Si comme le soutient le CIC le nantissement de compte est une variété de nantissement de créance, celui-ci n'est cependant pas fondé à solliciter l'application des dispositions de l'article 2364 du code civil qui dispose en son deuxième alinéa, lorsque la créance n'est pas encore échue, que 'le créancier conserve à titre de garantie les sommes payées au titre de la créance nantie sur un compte ouvert auprès d'un établissement habilité à les recevoir à charge pour lui de les restituer si l'obligation garantie est exécutée. En cas de défaillance du débiteur de la créance garantie et huit jours après une mise en demeure restée sans effet, le créancier affecte les fonds au remboursement de sa créance dans la limite des sommes impayées.'

Ce texte n'est pas applicable dans le cas de l'ouverture d'une procédure collective au regard d'une part de l'article L.622-7 I du code de commerce selon lequel l'ouverture de la procédure collective emporte interdiction de régler toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture à l'exception du paiement par compensation de créances connexes et d'autre part de l'article L.622-29 du même code qui prévoit que le jugement d'ouverture ne rend pas exigibles les créances non encore échues à la date de son prononcé, ces dispositions étant applicables en matière de redressement judiciaire par le renvoi opéré par l'article L.631-14 du même code.

En procédant au blocage de la somme de 32 741,33 euros, le CIC a également contrevenu aux dispositions de l'article L.622-13 du code de commerce qui dispose que nonobstant toute disposition légale ou toute clause contractuelle, aucune résiliation ou résolution d'un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de l'ouverture de sauvegarde et qui prévoit que le cocontractant doit remplir ses obligations malgré le défaut d'exécution par le débiteur d'engagements antérieurs au jugement d'ouverture ; en vertu de ce texte qui est aussi applicable au redressement judiciaire conformément à l'article L.631-14 précité, les clauses qui modifient la poursuite d'un tel contrat en diminuant les droits ou en aggravant les obligations du débiteur sont réputées non écrites.

La clause contractuelle relative au nantissement modifie en l'espèce les conditions de poursuite du contrat en cours constitué par la convention de compte courant professionnel et aggrave la situation du débiteur du fait du blocage d'une partie du solde créditeur de son compte tout en limitant le potentiel de la procédure de redressement judiciaire, au détriment des autres créanciers de la société Elomat.

Par conséquent, le CIC ne pouvait pas procéder à la rétention de la somme de 32 740,33 euros sur le solde créditeur du compte nanti de sorte qu'il convient de confirmer en son principe la décision de restitution des fonds indûment versés sur un compte séparé du compte courant.

Au regard du périmètre précédemment défini et du versement de la somme de 12 033,42 euros sur le compte de la société Elomat, il convient d'infirmer le jugement et d'ordonner la restitution au redressement judiciaire de la société Elomat de la somme de 20 706,91 euros.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement du 2 juillet 2021 en ce qu'il a déclaré recevable l'opposition à l'ordonnance du juge-commissaire, formée par le CIC, et en ce qu'il a condamné le CIC à payer à la société Elomat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens de l'instance ;

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Infirme l'ordonnance du 17 mars 2021 ;

Ordonne la restitution des sommes retenues par la société CIC sur le compte n°00020467203 dans la limite de la somme de 20 706,91 euros ;

Condamne la société CIC à verser aux intimés la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société CIC aux dépens de la procédure d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 21/04464
Date de la décision : 21/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-21;21.04464 ?
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