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29/01/2020 | FRANCE | N°16/02896

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15e chambre, 29 janvier 2020, 16/02896


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



15e chambre



ARRÊT N°





CONTRADICTOIRE





DU 29 JANVIER 2020





N° RG 16/02896



N° Portalis DBV3-V-B7A-QYEZ





AFFAIRE :





[N] [U]





C/





GE Hydro France anciennement dénommée SA ALSTOM HYDRO FRANCE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Avril 2016 par

le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Encadrement

N° RG : 14/03720





Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :





Me Olivier KHATCHIKIAN



Me Julie BEOT-RABIOT





le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT NEUF...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 29 JANVIER 2020

N° RG 16/02896

N° Portalis DBV3-V-B7A-QYEZ

AFFAIRE :

[N] [U]

C/

GE Hydro France anciennement dénommée SA ALSTOM HYDRO FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Avril 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : Encadrement

N° RG : 14/03720

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Olivier KHATCHIKIAN

Me Julie BEOT-RABIOT

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant, fixé au 18 décembre 2019 puis prorogé au 15 janvier 2020 puis au 29 janvier 2020, les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Madame [N] [U]

née le [Date naissance 2]1958, de nationalité française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

comparante en personne, assistée de Me Olivier KHATCHIKIAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0619 substitué par Me Sylvain LEGRAND, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

GE Hydro France anciennement dénommée SA ALSTOM HYDRO FRANCE

N° SIRET : 327 948 907

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Julie BEOT-RABIOT de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0107 substituée par Me François-Xavier ANSART, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 octobre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Jean-Yves PINOY, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Maryse LESAULT, Présidente,

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Carine DJELLAL,

FAITS ET PROCÉDURE,

Mme [N] [U] (ci-après Mme [U]) a été recrutée par contrat à durée indéterminée écrit à compter du 15 décembre 2008, par la société Astro Hydro France, en qualité de "Contract Manager".

Son poste était basé à [Localité 5].

La relation de travail était soumise à la convention collective nationale des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie.

Par courrier du 16 décembre 2013, la société a notifié à Mme [U] son licenciement pour motif économique.

Mme [U] a accepté le congé de reclassement, d'une durée de 14 mois.

Elle a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre le 22 décembre 2014 des demandes suivantes :

- 135 787,50 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- A titre infiniment subsidiaire : 135 787,50 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des critères d'ordre du licenciement,

- 90 525 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices causés par l'exécution déloyale et discriminatoire de l'obligation de reclassement externe,

- 1 euro « symbolique » à titre de dommages et intérêts pour discrimination liée à l'âge,

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- exécution provisoire,

- dépens.

Par jugement du 19 avril 2016, le conseil de prud'hommes de Nanterre a :

- jugé le licenciement économique de Mme [U] fondé sur une cause réelle et sérieuse.

- débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes.

- laissé les dépens éventuels à la charge de Mme [U].

Par déclaration du 27 mai 2016, Mme [U] a interjeté appel de l'intégralité du jugement.

Par conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, Mme [U], appelante, demande à la cour de :

- infirmer le jugement dont appel en l'intégralité de ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

- condamner la société ALSTOM HYDRO FRANCE, à lui verser les sommes de :

- 135 787,50 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

- A titre infiniment subsidiaire : 135 787.50 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des critères d'ordre du licenciement,

- 90 525 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices causés par l'exécution déloyale et discriminatoire de l'obligation de reclassement externe,

- 1 euro « symbolique » à titre de dommages et intérêts pour discrimination liée à l'âge,

- condamner la société ALSTOM HYDRO FRANCE, à verser à Mme [U] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- ordonner que ces sommes produisent intérêt au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du Conseil de Prud'hommes de Nanterre, avec la capitalisation,

- condamner la société ALSTOM HYDRO FRANCE, aux entiers dépens.

Par conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, la Société GE Hydro France, intimée, demande à la cour de :

- confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Nanterre en date du 19 avril 2016.

En conséquence,

- débouter Mme [N] [U] de l'intégralité de ses demandes.

- condamner Madame [N] [U] à verser à la société Alstom Hydro France la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

- condamner Madame [N] [U] aux entiers dépens d'instance.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS,

1- Sur la demande de nullité du licenciement pour défauts du plan de sauvegarde et manquements à l'obligation de reclassement

Il ressort d'un document « accord de méthode » négocié entre la société GE Hydro France et les représentants des salariés, et constitué, de deux volets, l'un du 23 mai 2013, l'autre du 19 juillet 2013, qu'a été organisé en concertation le reclassement d'un maximum de collaborateurs, avec une mise en place de moyens de reclassement par anticipation après consultation des représentants du personnel durant un délai de 8 mois au cours duquel la société GE Hydro France s'est engagée à ne pas notifier de licenciements économiques .

Mme [U] a refusé par courrier en date du 2 avril 2013 le poste proposé à [Localité 4], a été destinataire du questionnaire mobilité le 29 mai 2013, elle a reçu une nouvelle proposition de reclassement le 8 juillet 2013 aussitôt refusée et elle a accepté de bénéficier du dispositif de congé de reclassement le 16 décembre 2013.

Le plan de reclassement mis en place au sein de la société GE Hydro France prévoyait que la cellule RH de reclassement devait interroger de manière régulière l'ensemble des filiales du groupe Alstom afin d'identifier les postes vacants et de présenter les postes réservés en interne (PRI) aux salariés concernés, lesdits postes devant en outre être publiés dans l'intranet de la branche «Hydro» de la société GE Hydro France à Levallois.

Mme [U] soutient que des postes disponibles n'ont pas été ouverts au reclassement et que les postes publiés sur l'intranet n'étaient que de l'affichage dès lors que certains salariés n'ont jamais reçu de réponse.

Elle indique n'avoir eu qu'un entretien avec son référent RH de la cellule de reclassement et que la seule offre de reclassement qui lui aurait été faite serait celle d'un transfert à [Localité 4] qu'elle a refusé.

Sur ce,

En application de l'article L. 1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou à défaut et sous réserve de l'accord exprès du salarié sur un emploi d'une catégorie inférieure. Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

Il est relevé aux termes des dispositifs issus de l'accord de méthode conclu le 23 mai 2013 et du second volet conclu le 19 juillet 2013, qu'un important dispositif a été instauré au niveau de la société GE Hydro France, afin de permettre le reclassement d'un maximum de collaborateurs visés par le projet de licenciement collectif pour motif économique.

Il est constaté que ce dispositif comporte deux volets :

- un premier dispositif envisagé par anticipation, conformément aux dispositions de l'article L. 1233-21 du code du travail permettant dans sa rédaction alors en vigueur, la mise en place de moyens de reclassement par anticipation.

- un second dispositif devenu pérenne à la suite d'une consultation des instances représentatives du personnel, pendant une durée globale garantie de 8 mois.

Il est ainsi établi que le périmètre des recherches de reclassement n'a pas été circonscrit au secteur d'activité dont relève la société GE Hydro France mais a été étendu à l'intégralité des entités appartenant au groupe ALSTOM, et cela, quel que soit son domaine d'intervention.

En outre, il ressort des pièces du débat qu'une cellule RH de reclassement composée de 6 personnes a, dans ce cadre, été instituée en charge de piloter la démarche de reclassement par anticipation issue de l'accord du 23 mai 2013 puis les recherches postérieures aux avis des instances représentatives du personnel recueillis en date des 16, 18 et 19 juillet 2013.

Cette cellule de reclassement a identifié les solutions de reclassement parmi les postes vacants et a recensé chaque semaine l'intégralité des postes vacants au sein du Groupe ALSTOM en alimentant à ce titre un portefeuille de postes « PRI » instaurés spécifiquement pour cette réorganisation, avec pour objectif de compléter l'ensemble des solutions de reclassement identifiées lors de la présentation du plan de reclassement et présentées aux instances (Article 4.1.1 a) du Plan de sauvegarde de l'emploi du 7 juin 2013).

Il est constaté que les postes « PRI » correspondaient aux postes réservés en interne pour permettre aux collaborateurs visés par une mesure de licenciement économique de bénéficier d'une solution de reclassement et étaient dans ce cadre identifiés au regard des compétences des salariés concernés en envisageant si nécessaire une formation d'adaptation, conformément aux dispositions des accords conclus avec les organisations syndicales. (Article 1.1.2 c) de l'accord de méthode du 23 mai 2013 et article 1.2 c) de l'accord de méthode en date du 19 juillet 2013).

Le portefeuille de postes « PRI », consultable dans l'intranet, était mis à jour pour la parfaite information des salariés, comme en témoignent les captures d'écran produites aux débats.

Il est relevé que cette actualisation intranet a été complétée d'un envoi par courrier électronique aux salariés concernés.

Les postes « PRI », une fois identifiés, ont ensuite été conservés dans le portefeuille pendant un délai de 2 mois destiné à assurer le bon déroulement du processus de reclassement des salariés concernés et ce n'est qu'à l'expiration de ce délai que les postes n'ont plus été considérés comme « réservés » et son sorti du portefeuille « PRI » sauf acceptation d'un poste PRI par un salarié.

S'agissant du reclassement hors du territoire national, il est établi par les pièces produites qu'un questionnaire recensant l'ensemble des implantations géographiques du Groupe ALSTOM, hors du territoire national a été adressé aux salariés concernés afin de recueillir leurs souhaits.

L'identification des solutions de reclassement à l'international a été élaborée en fonction de la volonté des collaborateurs de recevoir ou non des offres hors du territoire national.

Il résulte de ces constatations que la société GE Hydro France a mis en oeuvre d'importants moyens pour trouver une solution de reclassement à l'ensemble des salariés du site de Levallois.

Elle a dans ce cadre procédé à des recherches individualisées de solutions de reclassement avec loyauté, en mettant en place une cellule dédiée composée de six collaborateurs mobilisés à cet effet.

Mme [U] formule deux critiques, l'une portant sur la démarche « PRI », l'autre relative aux diligences de recherches de reclassement effectuées par la cellule RH de reclassement interne.

Elle reproche en substance à la société GE Hydro France de ne pas avoir identifié l'ensemble des postes vacants au sein du Groupe, gelé pour le personnel d'Hydro Levallois les postes vacants et listé dans l'intranet les postes ouverts à l'international.

La Cour relève cependant que Mme [U] ne démontre pas en quoi la société GE Hydro France n'aurait pas identifié la totalité des postes vacants pouvant entrer dans le champ du « PRI », et ce alors même que l'intégralité des postes vacants au sein du Groupe n'avait nullement vocation à figurer dans le portefeuille « PRI » qui ne devait contenir que les postes susceptibles de permettre le reclassement des salariés concernés et des postes adaptés à leurs compétences spécifiques.

Il est également relevé que Mme [U] ne fait pas la démonstration selon laquelle les postes « PRI » n'auraient pas été « réservés au seul personnel du site de Levallois » alors même qu'est produit aux débats un message électronique concernant une salariée Mme [K] [M], adressé par l'employeur le 15 octobre 2013 aux termes duquel il lui était bien précisé que les postes proposés dans le cadre du « PRI » étaient conservés prioritairement pour les salariés de Levallois avant d'être « relâchés » au profit d'autres candidats.

Il est rappelé que la mise en place d'accord de méthode et d'un plan de sauvegarde de l'emploi prévoyant des mesures collectives de reclassement ne dispense pas l'employeur de rechercher de façon individuelle et personnalisée des postes de reclassement aux salariés dont le licenciement est envisagé.

La proposition d'une modification du contrat de travail que le salarié peut toujours refuser ne dispense pas l'employeur de son obligation de reclassement et celui-ci est tenu de proposer au salarié dont le licenciement est envisagé tous les emplois disponibles de la même catégorie ou à défaut d'une catégorie inférieure, sans pouvoir limiter ses offres en fonction de la volonté présumée de l'intéressé de les refuser.

Les possibilités de reclassement doivent être recherchées au sein de l'entreprise et si celle ci appartient à un groupe, c'est dans le cadre du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu de travail permettent la permutation de tout ou partie du personnel qu'il faut se placer.

C'est à l'employeur de démontrer qu'il s'est acquitté de son obligation de reclassement, laquelle est de moyens. Le manquement par l'employeur à son obligation de reclassement préalable au licenciement prive celui-ci de cause réelle et sérieuse.

S'agissant des recherches individualisées menées par la cellule RH de reclassement, Mme [U] prétend qu'aucune recherche individualisée n'aurait été menée.

La cour relève toutefois s'agissant de sa situation personnelle, que Mme [U] a refusé par courrier en date du 2 avril 2013 le poste proposé à [Localité 4], qu'elle a été destinataire du questionnaire mobilité le 29 mai 2013, qu'elle a reçu une autre proposition de reclassement pour un poste de « Contract manager » le 8 juillet 2013 à [Localité 6] aussitôt refusée alors même qu'il correspondait à ses souhaits de mobilité. Elle a accepté de bénéficier du dispositif de congé de reclassement le 16 décembre 2013.

La société GE Hydro France produit les échanges de courriels contenant les propositions faites et les réponses négatives de Mme [U].

La société GE Hydro France explique ensuite les raisons de ses refus pour certains postes sélectionnés par Mme [U] par le fait que certains avaient déjà été pourvus lors de la réorganisation et que d'autres ont été ouverts plus de six mois après le licenciement et qu'enfin les autres supposaient des exigences et qualifications particulières ne correspondant pas à celles de Mme [U].

Il est constaté au vu des pièces produites que nombre des postes visés par Mme [U] relevaient d'un niveau nettement supérieur ou inférieur au sein, nécessitaient des compétences étrangères aux siennes, ou avaient été pourvus lors de la mise en 'uvre du plan ou bien encore n'étaient finalement pas créés.

La plupart des candidatures de Mme [U] concernait en outre des postes qui n'étaient pas des « postes PRI » puisque ses candidatures étaient antérieures à la conclusion du premier accord de méthode du 23 mai 2013.

Ainsi, parmi les 13 postes qu'elle identifie, 6 d'entre eux étaient pourvus avant la conclusion du premier accord de méthode ayant instauré le dispositif de reclassement par anticipation, ou n'existaient déjà plus à cette date ou n'étaient finalement pas créés.

Enfin, Mme [U] identifie deux postes de « Risk Management Director » et « Boiler Product Line » alors même qu'il s'agit d'un doublon et d'un poste identique pour lequel elle en dispose pas des compétences requises.

Il se déduit de tout ce qui précède que les propositions de reclassement individualisées faite par l'employeur à la salariée font échec à caractériser un manquement de la société GE Hydro France dans l'exécution de son obligation de recherche individualisée de reclassement.

Il est établi que le plan de sauvegarde de l'emploi mis en 'uvre par la société GE Hydro France ne demeure insuffisant ni dans son contenu, ni dans ses modalités et que les organisations syndicales, pleinement associées au processus de reclassement ont négocié un accord d'anticipation ainsi qu'un accord de méthode portant sur les mesures de reclassement, qui ont au contraire permis d'aboutir au reclassement d'au moins 53 collaborateurs.

En outre, Mme [U] a pu bénéficier de recherches individualisées ayant abouti à deux offres de reclassement refusées.

Mme [U] sera par conséquent déboutée de l'intégralité de ses demandes portant sur une prétendue insuffisance du plan de reclassement et manquements de l'employeur à son obligation de reclassement.

2- Sur le licenciement économique

Mme [U] fait valoir en substance que son poste a été, en réalité, supprimé et non transféré sur le site de [Localité 4] et que le motif économique n'est pas sérieux.

Mme [U] fait valoir qu'il ne lui a été proposé au titre du reclassement que son poste qui était « transféré » sur [Localité 4], alors que son employeur fait partie du groupe ALSTOM qui dispose de plusieurs entités en France et qu'elle a identifié plusieurs postes pourvus dans les ressources humaines du groupe durant la période de mise en oeuvre de la réorganisation et non inclus dans le plan de reclassement interne prévu au PSE, qui ne lui ont pas été proposés et qui correspondaient pourtant à son profil.

En réplique, la société rappelle en premier lieu qu'elle a organisé un important dispositif avec l'accord de méthode du 23 mai 2013 qui permettait la mise en place de moyens de reclassement par anticipation avant le terme de la procédure d'information et de consultation des institutions représentatives du personnel et celui du 19 juillet 2013 qui a pérennisé le dispositif postérieurement à cette consultation et que le licenciement économique demeure justifié par les pièces comptables qu'elle produit.

Sur ce,

Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emplois consécutive à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

Mme [U] conteste la réalité économique de son licenciement au motif qu'elle considère que la réorganisation envisagée n'avait d'autre but que la suppression pure et simple des postes proposés à [Localité 4] après que les salariés concernés aient refusé leur transfert dans cette ville.

La cour retient que la société GE Hydro France démontre que la branche Hydro du groupe, au niveau mondial, est confrontée à une baisse générale du marché et un renforcement de la concurrence et que cette situation a été relevée par l'expert-comptable du Comité Central d'Entreprise .

Il est établi par les chiffres présentés par la société GE Hydro France que les prises de commandes de la branche Hydro ont chuté depuis 2009 diminuant de plus de 60% entre 2009 et 2013 et que les résultats d'exploitation ont présenté des pertes conséquentes au cours de cette période.

Il ressort encore de l'examen des rapports effectués par deux cabinets d'expertises Secafi et Syndex, que tous les chiffres présentés par la société GE Hydro France, ont été validés.

Par ailleurs, la société GE Hydro France produit le livre d'entrées et de sorties du personnel du site de [Localité 4] qui permet à la cour de constater que sur la période 2013-2014 il y a eu plus d'entrées que de sorties et que s'il y a bien eu 27 postes supprimés c'est le résultat du refus de salariés d'accepter leur transfert à [Localité 4].

Mme [U], prétend qu'aucun des membres du Comité de direction de la Société GE Hydro France n'aurait rejoint le site de [Localité 4], ce qui constituerait selon elle la preuve de suppressions de postes déguisées.

Or, il résulte pourtant des pièces produites que M. [O] membre du comité de direction a été remplacé sur son poste de General Manager au sein de l'entreprise à Levallois par Mme [T] [I] basée à [Localité 4]. Une note d'organisation produite par Mme [U] confirme cette réalité. 

M. [Y] [E], Vice Président Ressources Humaines Europe et autre membre du comité de direction, ayant refusé le transfert de son poste à [Localité 4] a été licencié dans le cadre du PSE par courrier en date du 16 décembre 2013 mais a été remplacé dans ses fonctions, à [Localité 4] par M. [H] [C] tel que cela résulte d'une lettre de nomination produite aux débats.

Mme [R] [J], Directrice qualité, et membre à ce titre du comité de direction a été promue au niveau monde et a été remplacée sur son poste de Levallois supprimé, par M. [Y] [P] sur le site de [Localité 4], tel que cela ressort de sa nomination du 7 octobre 2013.

M. [L] [S], directeur Général opérations basé à [Localité 4], membre du comité de direction a été promu fin décembre 2013 et a été remplacé par M. [D] [G] à [Localité 4] tel que cela est encore établi par sa lettre de nomination versée aux débats.

Les pièces ainsi produites suffisent à démontrer que plusieurs membres du comité de direction ont vu leurs postes transférés sur le site de [Localité 4] ce qui ne permet pas d'établir l'existence de suppressions de postes déguisées comme le soutient Mme [U].

La cour après avoir examiné l'ensemble des pièces présentées au débat en déduit que le licenciement pour motif économique de Mme [U] est fondé sur une cause réelle et sérieuse et la déboute de l'ensemble de ses demandes indemnitaires subséquentes.

3- Sur le non-respect des critères d'ordre du licenciement

Aux termes de l'article L. 1233-5 du Code du Travail, l'application des critères d'ordre des licenciements doit s'étendre à l'ensemble des salariés de l'entreprise occupant un emploi appartenant à la même catégorie professionnelle que le poste supprimé.

Mme [U] prétend avoir subi un préjudice du fait de la perte injustifiée de son emploi et que la société GE Hydro France aurait dû respecter des critères d'ordre du licenciement à son égard.

Or, il est relevé que l'ensemble des salariés concernés par le transfert de leur poste de travail à [Localité 4] ont été destinataires d'une proposition de modification de leur contrat de travail pour motif économique.

L'ensemble des refus enregistrés a alors conduit l'employeur à mettre en 'uvre une procédure de licenciements collectifs pour motif économique.

Cette procédure est ainsi consécutive non pas à des suppressions de poste mais à des refus de modification du contrat de travail, et n'a donc pas nécessité la mise en 'uvre des critères d'ordre de licenciement dès lors que la modification du contrat de a été proposée à tous les salariés et que les licenciements ont concerné tous ceux qui l'ont refusée.

Mme [U] ne fait pas davantage la démonstration de ce que son poste aurait été en réalité supprimé.

Mme [U] sera déboutée de ce chef de demande.

4- Sur la discrimination liée à l'âge

Mme [U] demande à la Cour la condamnation de la société GE Hydro France à lui verser la somme d'un euro symbolique au titre d'une discrimination liée à l'âge dont elle aurait été victime.

Elle soutient que la Direction de la société GE Hydro France n'avait pas l'intention de la reclasser et privilégiait des candidats plus jeunes.

La cour relève que Mme [U] ne verse aux débats aucun élément laissant présumer qu'elle aurait personnellement subi une discrimination en raison de son âge.

Les postes « PRI » qu'elle a identifiés et dont elle prétend qu'ils ne lui auraient pas été attribués en raison de son âge ont, pour un certain nombre d'entre eux, été pourvus par des seniors.

La cour relève notamment que le poste « d'Installed base and Development Director » a été pourvu par M. [A] [F], âgé de 56 ans, tel que cela résulte de sa lettre de nomination du 29 octobre 2013.

Le poste de « Commercial Compliance Process Director » a été pourvu à compter du 1er mai 2013 par M. [X] [B], âgé de 64 ans tel que cela résulte de sa lettre de nomination du 28 mai 2013.

Le poste de « Grid Insurance Manager, » qui nécessitait une compétence technique que n'avait pas Mme [U], a lui été pourvu par M. [W] [V] âgé à l'époque de 55 ans tel que cela ressort de son curriculum vitae .

Mme [U] sera dès lors déboutée de ce chef de demande.

5- Sur les demandes accessoires

Mme [U] qui succombe supportera les entiers dépens et sera déboutée de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il ne serait pas équitable de laisser à la charge de la société GE Hydro France les frais irrépétibles engagés dans la présente instance. Sera condamnée à lui payer la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La COUR,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Y ajoutant :

CONDAMNE Mme [N] [U] à payer à la société GE Hydro France la somme de 500 euros (cinq cents euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [N] [U] aux dépens de première instance et d'appel.

- Prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- Signé par Madame Maryse LESAULT, Présidente et par Madame Carine DJELLAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15e chambre
Numéro d'arrêt : 16/02896
Date de la décision : 29/01/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 15, arrêt n°16/02896 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-29;16.02896 ?
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