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28/01/2020 | FRANCE | N°19/02799

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 28 janvier 2020, 19/02799


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





1ère chambre 1ère section





ARRÊT N°





CONTRADICTOIRE

Code nac : 29E





DU 28 JANVIER 2020





N° RG 19/02799

N° Portalis DBV3-V-B7D-TEOQ





AFFAIRE :



[K], [E] [X] veuve [I]

[M] [I]

[P] [B]

C/

[U] [Q]





Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 28 Mars 2019 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 01
r>N° Section : 00

N° RG : 18/00868



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :





à :



-Me Franck LAFON,



-l'AARPI JRF AVOCATS









RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT HUIT JANVIER DEUX MILLE VINGT,...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

1ère chambre 1ère section

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 29E

DU 28 JANVIER 2020

N° RG 19/02799

N° Portalis DBV3-V-B7D-TEOQ

AFFAIRE :

[K], [E] [X] veuve [I]

[M] [I]

[P] [B]

C/

[U] [Q]

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 28 Mars 2019 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 01

N° Section : 00

N° RG : 18/00868

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

-Me Franck LAFON,

-l'AARPI JRF AVOCATS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT HUIT JANVIER DEUX MILLE VINGT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [K], [E] [X] veuve [I]

née le [Date naissance 1] 1935 à [Localité 1] (ALGÉRIE)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Monsieur [P] [B]

né le [Date naissance 2] 1939 à [Localité 3] (ALGERIE)

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentés par Me Franck LAFON, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20190183

Me Paula FRIAS de la SELEURL POL AVOCATS, avocat plaidant - barreau de PARIS, vestiaire : P0450

Monsieur [M] [I]

né le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Localité 2]

représenté par Me Franck LAFON, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20190183

Me Chantal TEBOUL ASTRUC, avocat déposant - barreau de PARIS, vestiaire : A0235

APPELANTS

****************

Monsieur [U] [Q]

Chez Monsieur Mikaël [Q]

[Adresse 4]

[Localité 4]

représenté par Me Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 633 - N° du dossier 20190455

Me Mikaël LOREK, avocat plaidant - barreau de PARIS, vestiaire : C1707

INTIMÉ

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 Novembre 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain PALAU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, Président,

Madame Anne LELIEVRE, Conseiller,

Madame Nathalie LAUER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

Vu l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Nanterre qui a statué ainsi :

Rejette la demande de Mme [D] [K] épouse [I], M. [I] [M] et M. [B] [P] tendant à la nullité de l'assignation délivrée le 7 décembre 2017 ;

Rejette l'exception de litispendance et la demande tendant à voir déclarer les juridictions israéliennes saisies dont l'arbitre [T] [D], le tribunal régional de Tel Aviv ou le tribunal étatique de Tel Aviv seules compétentes pour statuer sur les demandes de Monsieur [U] [Q] ;

Dit n'y avoir lieu de renvoyer M. [F] [V] à mieux se pourvoir devant ces juridictions ;

Renvoie l'affaire à la mise en état du 23 mai 2019 à 10 h 00 pour conclusions au fond de Madame [K] [E] [I] née [X], de M [M] [I] et de M. [P] [B] ;

Rejette la demande des parties au titre des frais irrépétibles ;

Condamne Mme [D] [K] épouse [I], M. [I] [M] et M. [B]

[P] à supporter les dépens de l'incident.

Vu la déclaration d'appel en date du 16 avril 2019 de Mme [K] [X] veuve [I], de M. [M] [I] et de M. [P] [B].

Vu le refus du président de cette chambre d'autoriser les appelants à assigner l'intimée à jour fixe et la fixation de la procédure conformément à l'article 905 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions en date du 17 octobre 2019 de Mme [K] [X] et de M. [P] [B] qui demandent à la cour de :

Dire recevable et bien fondé leur appel ;

Déclarer recevable et bien fondé l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

Sur la nullité de l'assignation :

Infirmer l'ordonnance ;

Statuant à nouveau :

Dire que l'assignation du 7 décembre 2017 ne contient pas, à peine de nullité, la mention du domicile de M. [U] [Q] ;

Dire que l'absence de mention du domicile dans l'assignation du 7 décembre 2017 constitue un grief pour les demandeurs à l'exception et que l'irrégularité doit être sanctionnée d'une nullité ;

Faire droit à l'exception de nullité de l'assignation du 7 décembre 2017 ;

Déclarer nulle l'assignation du 7 décembre 2017 ;

Subsidiairement, sur la litispendance et l'incompétence :

Infirmer l'ordonnance

Statuant à nouveau :

Dire que les juridictions israéliennes sont saisies du litige et se sont déjà prononcées sur des demandes de M. [U] [Q] depuis 2010, soit avant l'assignation du 7 décembre 2017 ;

Dire que M. [U] [Q] a définitivement renoncé à la compétence des juridictions françaises concernant sa participation dans Harlington 2 BV ;

Dire que le tribunal arbitral israélien reste saisi de la procédure d'évaluation des parts détenues par M. [U] [Q] dans Harlington 2 BV et que la procédure est en cours ;

Déclarer la listispendance et l'incompétence au profit du tribunal arbitral diligenté par M. [T] [D], arbitre, et du tribunal régional de Tel Aviv ou du tribunal étatique de Tel Aviv Renvoyer M. [U] [Q] à mieux se pourvoir devant ces juridictions ;

En tout état de cause :

Débouter M. [U] [Q] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Condamner M. [U] [Q] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner M. [U] [Q] au paiement des entiers dépens dont distraction au profit de Maître Franck Lafon, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions en date du 22 mai 2019 de M. [P] [B], de Mme [K] [X] et de M. [M] [I] celui-ci n'ayant pas conclu ultérieurement- qui demandent à la cour de':

Les recevoir en leurs demandes fins et conclusions d'appel

Infirmer l'ordonnance ;

A titre principal':

Dire et juger nulle et de nul effet l'assignation introductive d'instance ;

A titre subsidiaire,

Déclarer les juridictions israéliennes saisies en premier lieu, en particulier l'arbitre [T] [D], non démis à ce jour, le tribunal régional de Tel Aviv et si besoin le tribunal étatique de Tel Aviv seules compétentes pour statuer sur les demandes de Monsieur [U] [Q] en tout cas pour faire établir la valorisation de la société 8 Harlington 2 BV et sociétés affiliées et celle des parts de Monsieur [Q] dans ladite société ;

Le renvoyer à mieux se pourvoir devant ces juridictions et en tout cas à poursuivre devant la juridiction d'arbitrage rabbinique l'expertise ordonnée pour cette valorisation ;

Le débouter de toutes demandes, fins et conclusions contraires ;

Le condamner à leur payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en sus des dépens avec distraction pour ceux le concernant au profit de Maître Franck Lafon en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières concluions en date du 18 octobre 2019 de M. [Q] qui demande à la cour de':

Débouter Mme [K] [X] veuve [I], M. [M] [I] et M. [P] [B] de leurs demandes tendant à la nullité de l'assignation qui leur a été délivrée le 7 décembre 2017 à sa requête.

Les débouter de leur exception d'incompétence au profit des tribunaux de Tel Aviv comme de litispendance.

Les débouter de toutes demandes, fins et conclusions contraires.

Confirmer en conséquence l'ordonnance en ce qu'elle les a déboutés de leurs demandes, fins et conclusions.

Les condamner solidairement à lui payer la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en sus des dépens avec distraction pour ceux le concernant au profit de Maître Oriane Dontot en application de l'article 699 du code de procédure civile.

***************************************

FAITS ET PROCÉDURE

Engagés dans un projet d'investissement immobilier en Israël, M. [F] [V], M. [H] [I] et M. [P] [B] ont organisé leurs relations d'associés dans diverses sociétés dont la société 8 Harlington 2 BV selon protocole des 9 février 1995, modifié le 16 février 1998 puis le 31 août 2000.

Selon sentence arbitrale du 31 janvier 2011 confirmée par le tribunal étatique de Tel Aviv-Yafo, la propriété des sommes investies par les associés dans la société 8 Harlington B V a été jugée ainsi répartie : 15 % à M. [Q] et 85 % à M. [H] [I] et M. [B].

Depuis lors, un litige persiste entre les parties principalement quant à l'évaluation des parts dont M. [Q] réclame le paiement.

[H] [I] est décédé le [Date décès 1] 2017 à Paris, laissant pour lui succéder sa veuve Mme [X] épouse [I] avec laquelle il était marié sous le régime de la communauté universelle.

Par actes en date des 11 et 12 décembre 2017, M. [Q] a assigné Mme [X] épouse [I], M. [M] [I] -fils du défunt- et M. [B] devant le tribunal de grande instance de Nanterre aux fins, outre à lui payer une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure et à supporter les dépens, de voir :

Dire que la succession de tous les biens du défunt, [H] [V] [I] incluant les titres lui appartenant dans la société 8, Harlington 2 BV- Israël et les sociétés affiliées est soumise au droit français, à la juridiction française et en conséquence au tribunal de grande instance de Nanterre.

Dire que M. [M] [I], est dirigeant de fait de la société 8 et est prétendant aux titres- actions de la société 8 et des sociétés affiliées de la succession du défunt [H] [I].

Dire que M. [P] [B] détient avec [H] [I] les titres de la société 8 sans distinction de la quote-part de chacun,

Dire et juger que les déficits de la société 8 des années 2011 à 2016 et 2017 seront supportés exclusivement par la succession de [H] [I] à savoir, ensemble M [M] [I] et Mme [I] née [X].

Condamner in solidum Mme [I] née [X], M. [I] et M. [B] à lui payer la somme de 5.500.000 euros en paiement de 15% des actions qu'il détient dans la société 8 et les sociétés affiliées précitées,

Condamner in solidum Mme [I] née [X], M. [I] et M. [B] à lui payer la somme de 1.500.000 euros en réparation du préjudice résultant de la perte de chance subie par lui.,

Par conclusions d'incident, les appelants ont saisi le juge de la mise en état de demandes que celui-ci a rejetées dans l'ordonnance dont appel.

Dans leurs dernières conclusions précitées, Mme [X] et M. [B] exposent que Mme [X] n'est poursuivie qu'en qualité de bénéficiaire de la succession de [H] [I] et que M. [B] est en litige avec M. [Q] depuis de nombreuses années en Israël «'pour les mêmes faits'» que ceux pendants devant le tribunal de grande instance de Nanterre.

Ils exposent également que, le 9 février 1995, MM. [U] [Q], [H] [I] et [P] [B] ont signé une convention régissant leurs rapports d'associés dans une société Berlington 222 NV et ses filiales, parmi lesquelles Harlington BV qui a acquis deux terrains sur lequel un projet hôtelier était prévu, M. [U] [Q], bien que propriétaire de 50% de la propriété des terrains, ne devant investir pour la réalisation du projet hôtelier qu'à hauteur de 40% des sommes à engager.

Ils indiquent qu'une seconde convention a été signée le 16 février 1998 entre eux qui portait l'investissement de 20 millions USD (dollars américains) à 29 millions de USD, toujours dans les mêmes proportions d'investissement au bénéfice de M. [U] [Q], soit 40%.

Ils déclarent qu'aux termes de cette seconde convention, la répartition des investissements en capitaux propres était de 75% pour MM. [I] et [B] et de 25% pour M. [Q].

Ils affirment que M. [Q] a tenté d'éluder ses obligations en réclamant pour la première fois, le 17 août 1999, des « frais d'entreprenariat » pour quote-part de 60% de la somme de 5,084 millions de USD et qu'une décision arbitrale israélienne l'a débouté.

Ils exposent enfin qu'une nouvelle convention a été signée le 31 août 2000 entre eux puis deux nouveaux actes les 10 novembre 2001 et 9 juin 2003 ramenant la participation de M. [Q] à 14% des parts de la société Harlington BV.

Ils déclarent que M. [Q] a assigné [H] [I] et M. [B] devant le tribunal de grande instance de Paris le 14 septembre 2010 et qu'il a renoncé à cette procédure et aux juridictions françaises au profit d'une procédure d'arbitrage en Israël.

Ils affirment produire, contrairement à l'intimé, les décisions rendues en Israël dans leur intégralité.

Ils indiquent que sont parties à l'instance israélienne, MM. [U] [Q], [P] [B] et [H] [I] (Mme [K] [I] venant aux droits de son époux, suite à son décès) ainsi que les sociétés Berlington et certaines de ses filiales concernées dont la société 8 soit Harlington 22 BV.

Ils rappellent qu'une première sentence arbitrale a été rendue le 31 janvier 2011 aux termes de laquelle les demandes de « frais d'entreprenariat » réclamés par M. [U] [Q] ont été rejetées et que M. [Q] a été débouté de son recours le 10 janvier 2012.

Ils déclarent que, par décision du 10 juin 2012, le tribunal régional de Tel Aviv a décidé qu'une seconde instance arbitrale devait désormais s'attacher à valoriser Harlington 2 BV.

Ils indiquent que l'arbitrage s'est donc de nouveau mis en place et que, par décision arbitrale du 7 avril 2013, il a été décidé de faire appel à un expert pour valoriser la société Harlington 2 BV, et ce faisant, évaluer les parts sociales détenues par M. [U] [Q] dans cette société.

Ils affirment que M. [Q] a alors tout tenté pour éviter une évaluation de la société qui devait prendre en compte, selon les termes de cette dernière décision arbitrale, les montants investis par chaque associé avec application d'un taux d'intérêt sur ces investissements supplémentaires, cette prise en compte lui étant défavorable.

Ils affirment que la seule question qui demeure non tranchée mais qui reste en cours d'instance en Israël est celle de l'évaluation du prix des actions que M. [U] [Q] détient dans Harlington 2 BV.

Ils ajoutent que, par décision du 13 août 2015, M. [U] [Q] a été débouté de sa demande de destitution de l'arbitre et qu'il a été désigné un expert pour l'évaluation de la société et que, par décision du 26 septembre 2017, M. [Q] a été débouté par le tribunal régional de Tel Aviv d'une demande de désignation d'un administrateur de faillite suite au décès de [H] [I].

Ils affirment que M. [Q] a introduit la procédure litigieuse au motif que les décisions prises en Israël lui déplaisaient et lui reprochent d'avoir multiplié les actes pour faire pression sur eux, âgés de 84 et 80 ans.

Ils soutiennent que l'assignation est nulle.

Ils rappellent les articles 56 et 648 et 112 et 114 du code de procédure civile.

Ils rappellent également que M. [Q]- qui agit en tant que personne physique-devait donc, dans son assignation, se soumettre aux dispositions précitées en ce compris un domicile véritable.

Ils relèvent que, dans son assignation, il a déclaré être domicilié au [Adresse 5] et qu'en cours d'instance, il a justifié d'une « domiciliation » au [Adresse 4] chez son fils [M] [Q].

Ils soutiennent que l'adresse mentionnée dans l'assignation doit être un domicile et non une domiciliation, sous peine de nullité.

Ils rappellent que l'article 648 prescrit de mentionner, à peine de nullité, un domicile soit, selon l'article 102 du code civil, le « lieu du principal établissement ».

Ils infèrent d'arrêts que le « principal établissement » est celui d'une résidence et d'une installation durable.

Ils soutiennent que l'élection de domicile au cabinet de l'avocat de M. [U] [Q] ne peut être prise en compte car limitée aux impératifs d'une procédure avec postulation obligatoire, M. [Q] ne pouvant être considéré comme habitant et ayant une résidence valant domicile au cabinet de son avocat.

Ils estiment que, de même, sa domiciliation en cours d'instance au [Adresse 4] ne peut pas être de nature à couvrir l'irrégularité de l'assignation, qui doit être appréciée à la date de celle-ci, et considèrent que cette adresse reste celle d'une domiciliation dans ce qui semble être le domicile du fils de M. [U] [Q].

Ils soutiennent que cette domiciliation ne démontre pas qu'il aurait une résidence régulière et principale à cette adresse et rappellent qu'aux termes de l'article 103 du code civil, le changement de domicile s'opère par le fait d'une habitation réelle dans un autre lieu, joint à l'attention d'y fixer son principal établissement.

Ils font état du caractère fictif du domicile de M. [Q] mentionné dans l'assignation.

Ils affirment qu'il n'y vit plus depuis de nombreuses années et, en tout état de cause, que ce n'était pas son domicile au moment de la délivrance de l'assignation, date à laquelle il convient de se placer pour apprécier la fiabilité de l'adresse donnée.

Ils indiquent qu'un acte de signification de protestation à demeure a été délivré le 28 février 2018 à l'adresse mentionnée dans l'assignation et que la gardienne a précisé qu'il n'y habitait plus depuis de nombreuses années comme l'a indiqué l'huissier.

Ils ajoutent que le bien a été saisi et vendu aux enchères le 22 février 2018 et en infèrent qu'il était inoccupé depuis de nombreuses années.

Critiquant l'ordonnance, ils soutiennent que ni la facture de relance du fournisseur d'électricité ' qui consiste en un report d'impayés- ni l'imposition en 2018, pour des revenus 2017, ne suffisent, l'administration fiscale ayant retenu l'adresse qui lui a été déclarée et ne pouvant la changer sans qu'une nouvelle adresse lui soit notifiée.

Ils soutiennent que cette irrégularité leur cause un grief notamment pour obtenir, le cas échéant, l'exécution du jugement ce qu'a retenu le juge de la mise en état.

Ils excipent d'arrêts et soulignent que l'appartement qui était celui déclaré par M. [Q] comme son domicile a été saisi et vendu aux enchères le 22 février 2018 ce qui confirme qu'en l'absence de mention de son réel domicile, ils ne pourraient pas faire exécuter la décision qui pourrait être rendue en leur faveur.

Subsidiairement, ils invoquent une exception d'incompétence et de litispendance.

Ils rappellent l'article 100 du code de procédure civile.

Ils estiment que la question est celle de l'existence ou non d'une procédure en cours, devant un tribunal compétent.

Ils exposent que la procédure israélienne dure depuis de nombreuses années et que la compétence des juridictions israéliennes n'a jamais été contestée par M. [Q] qui a d'ailleurs renoncé à la procédure qu'il avait engagée en France au profit d'un arbitrage en Israël.

Ils relèvent que des questions sur sa participation dans la société Harlington 2 BV ont été tranchées définitivement par le tribunal arbitral, les recours devant les juridictions de Tel Aviv introduits par M. [U] [Q] ayant été rejetés.

Ils déclarent que la seule question qui reste non tranchée en Israël -et est en cours de procédure- est celle de la valorisation des titres détenus par M. [Q] dans la société Harlington 2 BV.

Ils rappellent qu'un expert a été désigné et déclarent que M. [Q] refuse de participer à ses opérations.

Ils soulignent que le principe absolu de la litispendance s'impose au second juge saisi dès lors qu'il y a identité d'objet, de parties et que les mêmes conventions sont concernées.

Ils considèrent que, selon le principe de l'estoppel, M. [Q] ne peut pas réclamer en France ce à quoi il a renoncé et rappellent qu'il a renoncé à la procédure qu'il avait lui-même introduite devant le tribunal de grande instance de Paris par assignation du 14 septembre 2014, au profit de l'arbitrage israélien.

Ils exposent que, comme devant le tribunal arbitral israélien, sont parties M. [Q], M. [B] et Mme [X] venant aux droits de [H] [I].

Ils exposent également qu'il est demandé à ces deux derniers de payer le prix des 15% des titres de Harlington 2 BV détenus par M. [U] [Q], ces 15% ayant été déterminés dans le cadre des procédures israéliennes et seule l'évaluation des parts restant en suspens dans l'attente de la fin de l'expertise en cours, demandée par l'arbitre.

Ils soutiennent que la demande n'a rien à voir avec la succession de [H] [I] et que les dispositions évoquées à ce titre ne trouvent pas application en l'espèce.

Ils déclarent qu'il s'agit d'une procédure en cours, en Israël, pour l'évaluation des titres d'une société israélienne détenues par M. [U] [Q] et qui ne sont pas dans le patrimoine de [I] puisque non encore transférées.

Ils font valoir que le fait que les actions sont dirigées contre des résidents français plutôt que la société israélienne est sans rapport avec la litispendance et l'incompétence des tribunaux français.

Ils estiment que c'est stratégiquement que M. [Q] a privilégié une action contre les actionnaires plutôt que contre les sociétés Harlington 2 BV ou sa société mère.

Ils affirment qu'il existe un risque de contradiction de décisions.

Ils rappellent qu'une juridiction arbitrale peut rendre des décisions ayant l'autorité de la chose jugée.

Aux termes de ses dernières conclusions précitées, incluses dans les pénultièmes écritures de Mme [X] et M. [B], M. [M] [I] précise que, fils de Mme [X] et de [H] [I], il n'a pas de relation avec M. [Q] et estime qu'il doit être mis hors de cause au fond.

Il rappelle les actes et les procédures.

Il développe les mêmes moyens que les autres appelants, précisant que M. [Q] n'a pas comparu à la procédure de vente aux enchères et soulignant qu'il a déclaré, dans des requêtes à fin de saisie conservatoire, la même adresse inexacte.

Il ajoute que l'attestation du fils de M. [Q] n'établit qu'une domiciliation et non un domicile effectif.

Il rappelle les demandes formées par M. [Q] et en conclut que ne sont pas en cause les parts détenues par [H] [I] et M. [B] mais le prix des parts détenus par M. [Q].

Il soutient donc que le tribunal de Nanterre n'est pas compétent aux motifs que c'est la loi israélienne et les juridictions israéliennes qui doivent régir le conflit entre les associés et les modalités de la sortie de M. [Q], que celui-ci invoque au soutien d'une partie de ses demandes dans la présente procédure le fonctionnement de la société et que l'engament de la procédure contre des personnes physiques et non la société relève d'une stratégie judiciaire.

Il estime que la résidence en France des défendeurs et le décès en France de [H] [I] ne peuvent donner compétence au tribunal de grande instance de Nanterre.

Il considère que sa présence dans la procédure relève de cette stratégie.

Aux termes de ses conclusions précitées, M. [Q] rappelle le litige.

Il soutient que l'assignation est régulière et se prévaut des termes de l'ordonnance qui a rappelé que la nullité était couverte par la régularisation ultérieure de l'acte et qui a pris en compte la quittance d'électricité de mars 2018 et l'avis d'imposition au 1er janvier 2018 indiquant l' adresse du [Adresse 5] et la justification désormais d'une domiciliation chez M [Q] [M] au [Adresse 4].

Il déclare produire en cause d'appel son avis de taxe d'habitation 2017 du [Adresse 5], son avis de situation déclarative à l'impôt sur le revenu 2019 établi le 12 mai 2019 justifiant sa domiciliation au [Adresse 4] ainsi que la quittance d'électricité à son nom, justifiant sa domiciliation au même domicile.

Il en infère à l'absence de grief.

Il soutient que le tribunal de grande instance de Nanterre est compétent.

Il rappelle qu'il sollicite la condamnation des défendeurs solidairement au paiement des sommes de 5 millions d'euros et de 1 ,5 millions d'euros montant de la créance dont il fait état au titre de ses parts dans la société dont Mme [X] et M. [B] sont redevables à son égard.

Il souligne que tous les défendeurs ont leur domicile en France ce qui justifie la compétence du tribunal de grande instance de Nanterre en application de l'article 42 du code de procédure civile.

Il fait valoir qu'il demande de dire qu'il détient une créance contre les défendeurs puis de fixer cette créance et de les condamner au paiement de celle-ci.

Il estime que la question de savoir s'il justifie de sa qualité de créancier à l'encontre des défendeurs relève de la compétence du tribunal de grande instance de leur domicile.

Il souligne qu'aucune compétence exclusive n'est applicable en l'espèce et que les parties n'ont convenu d'aucune attribution de juridiction ou de convention d'arbitrage.

Il souligne également qu'aucune procédure d'arbitrage n'est en cours entre les parties.

Il souligne enfin qu'aucune procédure n'a été engagée devant les tribunaux israéliens à l'encontre des défendeurs dont il résulterait qu'il ait renoncé à la compétence des tribunaux français.

Il estime que le montant de la créance invoquée par lui devra être déterminé à partir des éléments fournis par les parties sans que la nationalité ou la localisation de la société ou d'autres sociétés puissent faire obstacle au pouvoir d'appréciation du tribunal de grande instance de Nanterre.

Il estime également que le tribunal pourra éventuellement recourir à une expertise qui tiendra compte de tous les paramètres à prendre en considération pour donner un avis sur la créance alléguée.

Il estime enfin qu'il importe peu que la détermination du montant de la créance soit soumise au droit israélien ou à tout autre droit.

Il réitère que la compétence du tribunal de grande instance de Nanterre n'est pas conditionnée par la nature de la créance invoquée par lui, s'agissant d'une créance contre des défendeurs français, domiciliés en France, justiciables en conséquence de la juridiction française de leur domicile et rappelle que la compétence internationale des tribunaux français est fondée, non sur les droits nés des faits litigieux, mais sur la nationalité des parties.

Il ajoute qu'il en aurait également été ainsi s'il s'était agi, «'ce qui n'est pas le cas'», de la succession de [H] [I].

Il se prévaut des termes de l'ordonnance et précise que la société concernée est une société de droit hollandais et que les titres détenus par les associés-actionnaires sont des titres émis par la société mère de droit hollandais.

Il soutient qu'il n'existe pas de litispendance.

Il se prévaut des termes de l'ordonnance.

Il rappelle que dans la décision du 26 septembre 2017, n'étaient parties ni Mme [K] [X] ni M. [M] [I] et affirme qu'aucun expert n'a été saisi ni missionné ni par l'arbitre ni par le tribunal de Tel Aviv.

Il réitère que ni Mme [K] [X] ni M. [M] [I] ne sont parties aux procédures diligentées en Israël.

************************

A l'issue des débats, Mme [I] et M. [B] qui avaient sollicité le report de ceux-ci- ont été autorisés à adresser dans les deux semaines une note en délibéré relatant les procédures suivies en Israël.

Par note du 17 janvier 2020, ils ont adressé diverses pièces et demandé la révocation de l'ordonnance de clôture et la réouverture des débats.

Ils ont également réitéré leurs moyens.

En réponse, M. [Q] affirme que les appelants n'ont pas été autorisés à produire une telle note et s'oppose à la demande.

Il estime que les pièces produites auraient pu être communiquées auparavant.

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Sur la note en délibéré

Considérant que Mme [X] et M. [B] ont été autorisés à communiquer une note en délibéré- après que leur demande de report des débats a été rejetée- dans les quinze jours de ceux-ci ;

Considérant qu'ils ont adressé cette note deux mois après les débats soit au-delà du délai qui leur a été imparti;

Considérant que la note et les pièces jointes sont donc irrecevables étant observé que, par leurs demandes de réouverture des débats et de révocation de l'ordonnance de clôture, ils ne font que réitérer leur demande, rejetée, de reporter ceux-ci ;

Sur l'assignation

Considérant que l'article 648 du code de procédure civile dispose que l'assignation délivrée par une personne physique doit, à peine de nullité, contenir, notamment, l'indication de son domicile';

Considérant qu'un domicile est, selon l'article 102 du code civil, le «'lieu du principal établissement'»';

Considérant que M. [Q] est, aux termes de son assignation délivrée le 7 décembre 2017, domicilié [Adresse 5], son élection de domicile au cabinet de son conseil ne le dispensant pas, compte tenu de son objet limité, d'indiquer son domicile réel';

Considérant qu'un huissier de justice chargé de délivrer un acte à M. [Q] à cette adresse le 22 février 2018 a indiqué que la gardienne de l'immeuble lui avait précisé que M. [Q] «'était parti sans laisser d'adresse depuis plusieurs années'»';

Considérant que si la transposition des propos de la gardienne fait foi jusqu'à inscription de faux, les propos eux-mêmes peuvent être contredits';

Considérant que la facture en date du 3 mars 2018 du fournisseur d'électricité contient un rappel de factures antérieures mais mentionne comme lieu de consommation le bien situé [Adresse 5] ; qu'il en est de même de l'avis d'imposition sur le revenu 2018 qui fait état d'une adressé au 1 er février 2018 sise [Adresse 5] ; que la taxe d'habitation 2017 mentionne également cette adresse ce dont il résulte qu'il y résidait au 1 er janvier 2017';

Considérant, ainsi, que s'il est certain que M. [Q] n'habitait pas à cette adresse le 22 février 2018, ces pièces contredisent les déclarations de la gardienne selon lesquelles il n'y résidait plus depuis «'plusieurs années'» ;

Considérant, en tout état de cause, que M. [Q] verse aux débats un avis d'impôt sur le revenu de 2019 aux termes duquel il réside désormais [Adresse 4] et une facture EDF du 23 juin 2019 mentionnant cette dernière adresse'; qu'il justifie ainsi demeurer désormais [Adresse 4]';

Considérant que son domicile actuel est donc connu';

Considérant, par conséquent, qu'il n'est pas démontré que M. [Q] ne résidait pas, lors de la délivrance de l'assignation, à l'adresse indiquée par lui et qu'il est justifié de son adresse actuelle';

Considérant que les appelants ne rapportent donc pas la preuve de l'existence d'un grief causé par l'irrégularité prétendue';

Sur l'incompétence ou la litispendance

Considérant qu'il sera rappelé que, conformément à l'article 100 du code de procédure civile, la litispendance ne peut exister que lorsqu'un même litige est pendant devant deux juridictions «'également compétentes'»';

Considérant que M. [Q] sollicite, dans la présente procédure, la condamnation de Mme [I] et de MM. [I] et [B] à lui payer diverses sommes';

Considérant que ceux-ci demeurent à Neuilly sur Seine pour deux d'entre eux et à Paris pour le troisième ;

Considérant que le tribunal de grande instance de Nanterre est donc compétent, en application de l'article 42 du code de procédure civile, en raison de l'objet de la demande et du domicile des défendeurs ;

Considérant que la litispendance suppose que le «'même litige'» est pendant devant des juridictions différentes';

Considérant que M. [M] [I] n'est pas partie aux procédures diligentées en Israël'; que les sociétés ne sont pas parties au présent litige';

Considérant que les parties ne sont donc pas les mêmes';

Considérant que l'objet du litige lui-même est différent s'agissant pour M. [Q] d'obtenir la condamnation de Mme [X] et de MM. [I] et [B]';

Considérant qu'il n'existe donc pas un «'même litige'» pendant devant deux juridictions';

Considérant que la présente assignation ne constitue pas une violation par M. [Q] du principe de l'estoppel au regard de sa renonciation à poursuivre l'instance diligentée devant le tribunal de grande instance de Paris le 14 septembre 2010, celle-ci n'opposant pas les mêmes parties et ayant un objet différent ; qu'il ne peut pas davantage s'inférer de cette renonciation qu'il a renoncé à saisir les juridictions françaises de tout litige';

Considérant, enfin, que d'autres moyens peuvent être mis en 'uvre pour éviter toute contradiction entre des procédures qui, sans constituer un même litige, sont susceptibles, comme l'affirment les appelants, d'avoir une incidence';

Considérant qu'en l'absence d'un même litige pendant devant deux juridictions, l'exception de litispendance sera rejetée';

Sur les conséquences

Considérant que l'ordonnance sera donc confirmée en toutes ses dispositions ;

Considérant qu'en équité, la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par l'intimé sera rejetée ; que, compte tenu du sens du présent arrêt, celle formée par les appelants sera rejetée ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition ;

DÉCLARE irrecevable la note en délibéré produite par Mme [X] et M. [B],

CONFIRME l'ordonnance en toutes ses dispositions,

Y ajoutant :

REJETTE les demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE in solidum Mme [X], M. [I] et M. [B] aux dépens,

AUTORISE Maître Dontot à recouvrer directement à leur encontre ceux des dépens qu'elle a exposés sans avoir reçu provision';

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Monsieur Alain PALAU, président, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 19/02799
Date de la décision : 28/01/2020

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°19/02799 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-28;19.02799 ?
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