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05/12/2019 | FRANCE | N°19/03157

France | France, Cour d'appel de Versailles, 14e chambre, 05 décembre 2019, 19/03157


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 30B



14e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 05 DÉCEMBRE 2019



N° RG 19/03157 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TFLA



AFFAIRE :



SCI [I] [V] ET [M] [S] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège







C/

SAS HÔTEL DU VILLAGE agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège









Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 29 Mars 2019 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE



N° RG : 18/01177



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me An...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 30B

14e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 05 DÉCEMBRE 2019

N° RG 19/03157 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TFLA

AFFAIRE :

SCI [I] [V] ET [M] [S] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

C/

SAS HÔTEL DU VILLAGE agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 29 Mars 2019 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE

N° RG : 18/01177

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Anne-laure DUMEAU

Me Julie GOURION

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE CINQ DÉCEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SCI [I] [V] ET [M] [S] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : [V]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Anne-laure DUMEAU, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 - N° du dossier 42578 -

assistée de Me Cécile CLAUDEPIERRE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1980

APPELANTE

****************

SAS HÔTEL DU VILLAGE agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 510 517 675

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Julie GOURION, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 51 - N° du dossier 219785

assistée de Me Mohand MAAMOURI de la SELASU AVOCAT 777, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1740 -

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Octobre 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Maïté GRISON-PASCAIL, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Nicolette GUILLAUME, président,

Madame Maïté GRISON-PASCAIL, conseiller,

Madame Marie LE BRAS, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Agnès MARIE,

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 1er juin 2009, la SCI [I] [V] et [M] [S] a donné à bail commercial à Mme [Y] [X] un ensemble immobilier situé [Adresse 3].

Mme [X] a cédé son droit au bail le 17 juillet 2017 à la SARL Hôtel du village.

La SCI bailleresse a alors consenti à cette dernière, par acte sous seing privé du 27 juillet 2017, un nouveau bail commercial pour une durée de neuf années à compter du 1er août 2017, les biens loués étant destinés à l'activité d'hôtel, moyennant un loyer annuel de 36 000 euros hors charges, soit un loyer mensuel de 3 000 euros.

Le bailleur a accordé une franchise de loyer de douze mois au preneur à charge pour ce dernier d'effectuer des travaux de transformation des locaux en hôtel sous certaines conditions.

Par lettre recommandée en date du 22 mai 2018, la SCI bailleresse a sommé la société Hôtel du village, notamment de lui transmettre un descriptif détaillé des travaux projetés, de justifier des travaux réalisés et de produire les assurances nécessaires au titre du chantier.

En l'absence de réponse, elle a fait délivrer au preneur, par acte du 30 juillet 2018, un commandement visant la clause résolutoire pour inexécution des obligations locatives.

Le paiement des loyers n'étant pas effectif à compter du 1er août 2018, la bailleresse a fait délivrer au preneur, par acte du 17 septembre 2018, un second commandement visant la clause résolutoire d'avoir à payer la somme de 6 000 euros en principal représentant les loyers des mois d'août et septembre 2018.

C'est dans ce contexte que, par acte d'huissier du 22 octobre 2018, la SCI [I] [V] et [M] [S] a fait assigner en référé la société Hôtel du village devant le président du tribunal de grande instance de Pontoise aux fins de constatation de l'acquisition de la clause résolutoire, d'expulsion du preneur et de condamnation au paiement d'indemnités à titre provisionnel.

Par ordonnance contradictoire rendue le 29 mars 2019, le juge des référés a :

- constaté que la société Hôtel du village a utilisé le délai inhérent à la délivrance de l'assignation en constatation de l'acquisition de la clause résolutoire pour apurer l'intégralité de sa dette locative et que la SCI [I] [V] et [M] [S] a participé au retard pris dans le paiement des loyers en ne répondant pas à la demande de transmission de RIB par la société locataire, qui n'a plus désormais aucune dette locative,

- débouté en conséquence la SCI [I] [V] et [M] [S] de ses demandes d'acquisition de la clause résolutoire comme d'expulsion de sa société locataire et de fixation d'une indemnité d'occupation,

- débouté la SCI [I] [V] et [M] [S] de sa demande d'attribution du dépôt de garantie initialement versé par la société Hôtel du village,

- débouté la SCI [I] [V] et [M] [S] de sa demande présentée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Hôtel du village aux entiers dépens,

- débouté les parties des surplus de leurs demandes.

Par déclaration reçue le 29 avril 2019, la SCI [I] [V] et [M] [S] a relevé appel par un acte visant expressément l'ensemble des chefs de décision à l'exception de la condamnation aux dépens.

Dans ses conclusions transmises le 16 juillet 2019, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la SCI [I] [V] et [M] [S], appelante, demande à la cour, au visa des articles L.145-41 du code de commerce, 491, 808 et 809 du code de procédure civile, de :

- la dire recevable et bien fondée en son appel,

- constater que la société Hôtel du village n'a pas déféré au commandement pour inexécution des obligations locatives visant la clause résolutoire, signifié le 30 juillet 2018, dans le délai d'un mois imparti,

- constater que les causes du commandement de payer visant la clause résolutoire signifié le 17 septembre 2018 n'ont pas été réglées dans le délai d'un mois imparti,

- constater la particulière mauvaise foi de la société Hôtel du village,

- constater l'absence de quelque manquement de la part du bailleur,

En conséquence,

- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 29 mars 2019,

Statuant à nouveau,

- constater l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail,

- dire et juger que par le jeu de la clause résolutoire le bail liant les parties est résilié à compter du 30 août 2018, ou à défaut, du 17 octobre 2018 et que la société Hôtel du village occupe sans droit ni titre les locaux loués depuis cette date,

- ordonner l'expulsion de la société Hôtel du village ainsi que de tous occupants sans droit ni titre de son chef, avec au besoin, l'aide et le concours de la force publique et ce sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- ordonner la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux loués, sur place ou dans tel garde-meuble qu'il plaira au propriétaire de désigner, aux frais, risques et périls de qui il appartiendra, et ce, en garantie des indemnités d'occupation et réparations locatives qui pourront être dues,

- condamner la société Hôtel du village à lui payer la somme de 3 000 euros TTC par mois, et ce, à compter du 30 août 2018 (à défaut du 17 octobre 2018), date d'acquisition de la clause résolutoire, et ce, jusqu'à complète libération des lieux et remise des clés, au titre d'une indemnité d'occupation, outre la somme de 206,98 euros au titre des frais engagés pour la signification du commandement pour inexécution des obligations locatives visant la clause résolutoire du 30 juillet 2018 et celle du commandement de payer les loyers et les charges visant la clause résolutoire du 17 septembre 2018,

- lui attribuer le dépôt de garantie d'un montant de 6 000 euros à titre d'indemnité provisionnelle,

- débouter la société Hôtel du village de toutes ses demandes,

- condamner la société Hôtel du village à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens dont distraction au projet de Maître Anne-Laure Dumeau, avocat au barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions transmises le 2 octobre 2019, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société Hôtel du village, intimée, demande à la cour, au visa des articles L.141-41 et L.145-46-1 du code de commerce, de :

A titre principal,

- dire et juger que les sommes réclamées au titre du commandement de payer les loyers et charges ont été réglées en octobre 2018 et encaissées en novembre 2018,

- constater que le loyer est réglé mensuellement depuis le mois de décembre 2018 par virements bancaires,

- dire et juger que les sommes réclamées au titre de la taxe foncière ont été réglées en octobre 2018 et encaissées en novembre 2018,

- constater que la société Hôtel du village a entrepris toutes les démarches en amont pour entreprendre les travaux prévus au bail et qu'aujourd'hui la quasi-totalité des travaux ont été réalisés,

- constater que la demande d'obtention d'un permis de construire a obtenu l'accord de l'architecte des bâtiments de France et un avis favorable de la commission consultative de sécurité et d'accessibilité et qu'une demande de permis de construire a été déposée régulièrement au nom de la société Hôtel du village,

En conséquence, confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a débouté la SCI [I] [V] et [M] [S] de l'ensemble de ses demandes,

A titre subsidiaire,

- rejeter la demande de conservation du dépôt de garantie d'un montant de 6 000 euros à titre d'indemnité provisionnelle de la SCI [I] [V] et [M] [S],

Y ajoutant,

- débouter la SCI [I] [V] et [M] [S] de l'ensemble de ses demandes formées devant la cour,

- condamner la SCI [I] [V] et [M] [S] à lui régler la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

- condamner la SCI [I] [V] et [M] [S] aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Julie Gourion, avocat au barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 octobre 2019.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de 'constatations' qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques et qu'il en est de même de celles tendant à ce qu'il soit 'dit et jugé' en ce qu'elles constituent des moyens et non des prétentions.

Sur l'acquisition de la clause résolutoire

L'article L 145-41 du code de commerce dispose que "toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit à peine de nullité mentionner ce délai."

Faute d'avoir payé ou contesté les causes du commandement de payer dans le délai imparti d'un mois, le preneur ne peut remettre en cause l'acquisition de la clause résolutoire sauf à démontrer la mauvaise foi du bailleur lors de la délivrance du commandement de payer, laquelle doit s'apprécier lors de la délivrance de l'acte ou à une période contemporaine à celle-ci.

Au soutien de ses prétentions, la SCI appelante fait valoir :

- d'une part, que malgré sa réclamation du 22 mai 2018 et le commandement délivré le 30 juillet 2018, la société preneuse ne lui a transmis aucun document relatif aux travaux entrepris, en violation des stipulations de l'article 4 du contrat, la société ayant été autorisée et s'étant engagée à réaliser divers travaux dans les locaux à ses frais mais sous certaines conditions précisément énumérées qui n'ont pas été respectées, qu'elle a appris que le preneur qui s'est vu refuser le permis de construire, au demeurant déposé au nom de Mme [X], ancienne locataire, a néanmoins entrepris les travaux dont elle ignore la nature et l'étendue en l'absence de toute note technique, que rien ne permet d'affirmer que les travaux sont quasiment terminés alors qu'ils devaient être exécutés rapidement, a priori dans le délai d'un an correspondant à la franchise de loyers, qu'aucune preuve n'est rapportée de la présence de squatters dans l'immeuble ayant retardé la mise en oeuvre des travaux ou du prétendu état de délabrement de l'immeuble,

- d'autre part, que la société Hôtel du village n'a pas déféré aux causes du commandement de payer dans le délai d'un mois, ayant remis un chèque seulement le 23 octobre 2018, contestant avoir participé au retard de paiement en l'absence de transmission de son RIB, lequel a été adressé au locataire dès le 2 février 2018, soulignant que l'encaissement des chèques ne peut intervenir que sous plusieurs jours.

L'appelante conteste encore la mauvaise foi qui lui est imputée par le preneur au motif que ce dernier aurait été approché par un promoteur qui lui aurait proposé le 26 novembre 2018 une indemnité en contrepartie de la résiliation anticipée du bail, ce qui démontrerait l'intention du bailleur de vendre les murs, rappelant que la seule chronologie des faits témoigne des manquements du preneur à ses obligations contractuelles.

La société Hôtel du village conteste l'acquisition de la clause résolutoire ensuite de la délivrance du commandement de payer en invoquant le règlement opéré par le chèque en date du 15 octobre 2018, encaissé par le bailleur seulement le 25 octobre suivant, et souligne qu'elle est à jour du paiement de ses loyers et charges.

S'agissant du commandement délivré pour inexécution des obligations locatives, l'intimée prétend qu'elle a fait toutes diligences pour exécuter les travaux et obtenir les autorisations administratives nécessaires, indiquant avoir eu recours à un architecte, et soutient que le bailleur a donné son accord pour que le permis de construire soit déposé au nom de Mme [X], ancienne exploitante du fonds de commerce, et transmis au nouveau locataire, ajoutant qu'il n'est prévu aucun délai pour l'achèvement des travaux.

Elle invoque également la mauvaise foi de la SCI bailleresse dont elle estime qu'elle n'a diligenté ces procédures qu'en raison de sa volonté de vendre les murs, une offre de protocole de résiliation anticipée du bail en date du 26 novembre 2018 lui ayant été proposée, cette mauvaise foi étant caractérisée par les manoeuvres de la bailleresse pour que la mairie [Localité 1] refuse sa dernière demande de permis de construire, par son refus d'encaisser immédiatement le paiement apurant les causes du commandement de payer et le retard apporté dans l'envoi de son relevé d'identité bancaire.

* sur le commandement de payer délivré le 17 septembre 2018

Le commandement visant la clause résolutoire stipulée au bail porte sur une somme en principal de 6 000 euros représentant les loyers et charges des mois d'août et septembre 2018, les loyers étant payables mensuellement et d'avance le premier de chaque mois.

En l'espèce, le preneur ne conteste pas les sommes réclamées dont il est établi qu'il les a payées par chèque n°0000522 d'un montant de 6 132,32 euros, frais compris, daté du 15 octobre 2018, mais remis au bailleur seulement le 23 octobre 2018, ce qui n'est pas contredit par l'intimée.

Or le chèque étant un titre payable à première présentation, il est émis au moment où le tireur s'en dessaisit au profit du bénéficiaire et non à la date de son établissement s'il est conservé par le tireur.

Dès lors le preneur ne peut valablement soutenir qu'il s'est acquitté des causes du commandement de payer dans le délai d'un mois imparti, soit avant le 18 octobre 2018.

Il est par ailleurs inopérant pour l'intimée de prétendre que ce retard de paiement est dû à l'absence de communication par le bailleur de son RIB, qu'elle a réclamé seulement le 15 octobre 2018, soit à la veille de l'expiration du délai d'un mois imparti et que le bailleur soutient lui avoir adressé dès le mois de février 2018 par SMS, étant souligné qu'en tout état de cause, il incombait au seul preneur de s'acquitter des causes du commandement de payer par tout moyen de paiement et en temps utile, faute de pouvoir effectuer un virement bancaire.

C'est donc à tort que le premier juge a considéré d'une part, que le retard apporté au paiement avait été causé par la carence du bailleur dans la transmission de son RIB et d'autre part, par son refus d'encaisser immédiatement le chèque remis en paiement.

Est tout aussi inopérante pour faire échec à la constatation de plein droit de l'acquisition de la clause résolutoire la seule constatation par le premier juge de la bonne foi du preneur qui a désormais mis en place un virement automatique mensuel et qui a apuré sa dette avant même que se tienne l'audience de référé, dès lors qu'il n'a pas été accordé au preneur, dans le dispositif de l'ordonnance, des délais rétroactifs de paiement suspensifs des effets de la clause résolutoire, permettant alors de constater que la clause résolutoire visée au commandement de payer est réputée n'avoir pas joué.

La cour relève à cet égard que la société Hôtel du village ne formule aucune prétention en cause d'appel tendant à l'octroi de délais de paiement rétroactifs et suspensifs des effets de la clause résolutoire, suite à la délivrance du commandement de payer du 17 septembre 2018.

* sur le commandement délivré le 30 juillet 2018

Le commandement visant la clause résolutoire stipulée au bail porte sur l'obligation de transmission au bailleur de dossiers et documents en relation avec les travaux autorisés énoncés à l'article 4 du bail en contrepartie d'une franchise de loyers de douze mois, soit :

- le descriptif détaillé des travaux projetés qui devait être remis au bailleur le 27 août 2017,

- la justification des travaux effectués à ce jour, en précisant leur nature exacte et la date de leur réalisation,

- la production des assurances du maître d'oeuvre et des entreprises intervenant et intervenues sur le chantier, la production de l'assurance dommage-ouvrage souscrite pour ce chantier,

- la fourniture de l'entier dossier déposé aux fins d'obtention des autorisations administratives requises et la justification de l'obtention desdites autorisations (permis de construire, déclaration préalable),

- la justification de l'éventuelle validation des travaux par les différentes commissions et bureaux de contrôle.

Le preneur ne conteste pas en l'espèce n'avoir pas satisfait dans le délai imparti d'un mois à cette demande de transmission des documents justificatifs.

Il ne conteste pas non plus les obligations mises à sa charge en contrepartie de l'autorisation qui lui a été accordée par le bailleur d'effectuer à ses frais des travaux de transformation des locaux loués en hôtel, ces travaux étant précisément énumérés à l'article 4 du bail et soumis à des conditions également listées de manière précise, à savoir :

- l'obtention par le preneur des autorisations administratives telles que permis de construire ou déclaration préalable

- transmission au bailleur de l'entier dossier déposé aux fins d'obtention des autorisations précitées et d'un descriptif détaillé des travaux, dans le délai d'un mois à compter des présentes,

- neutralisation de toutes les cuves de stockage d'hydrocarbure (situées dans le local atelier et sur le terrain) par remplissage de sable,

- production des attestations d'assurance dommages-ouvrage à souscrire, et des attestations d'assurance du maître d'oeuvre du preneur et des entreprises chargées de l'exécution des travaux,

- travaux réalisés sous le contrôle de l'architecte du bailleur qui pourra prendre attache à tout moment tant avec le preneur que son architecte aux fins d'obtenir la communication de toutes pièces et de procéder à toute visite sur le chantier,

- conformité des travaux aux règles de sécurité, de décence et à la législation sociale,

- validation des travaux par la commission de sécurité,

- réalisation des travaux par le preneur dans les meilleurs délais,

- communication à la demande du bailleur de tous les documents transmis aux organismes de conformité de type Socotec, Veritas...

Quelque que soient les difficultés alléguées auxquelles il dit avoir été confronté depuis l'origine de par la présence de squatteurs dans l'immeuble et compte tenu de l'état de dégradation des locaux, le preneur indiquant avoir démarré les premiers travaux de rénovation ne nécessitant pas d'autorisations administratives à partir du mois de janvier 2018, il est constant que la société Hôtel du village n'a jamais transmis au bailleur le moindre document afférent aux travaux entrepris jusqu'à la présente procédure, en violation de ses obligations contractuelles.

En particulier, n'ont pas été transmis au bailleur les dossiers de dépôt de permis de construire qui sont au nombre de trois et qui ont tous été refusés, le descriptif détaillé des travaux projetés, les attestations d'assurance des entreprises missionnées et l'assurance dommage-ouvrage, de sorte que le bailleur a été tenu dans l'ignorance des travaux réalisés depuis l'origine, alors que le bail stipule clairement que les travaux doivent être exécutés sous son contrôle et celui de son architecte.

Il importe peu dès lors que la société Hôtel du village justifie à ce jour de diligences accomplies à travers les pièces qu'elle verse aux débats notamment sur les travaux réalisés (PV de constat avant et après travaux établis les 28 juillet 2017 et 10 décembre 2018), les quatre dépôts de demandes de permis de construire dont la dernière date du 6 mai 2019, ou encore l'avis favorable de la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité du 5 mars 2019, étant toutefois relevé que les travaux réalisés l'ont été à ce jour sans aucune autorisation administrative.

Enfin la mauvaise foi imputée au bailleur n'est pas caractérisée, dès lors que celui-ci a sollicité dans un premier temps les documents relatifs aux travaux par courrier et que c'est seulement en l'absence de toute réponse qu'il a fait délivrer un commandement visant les inexécutions contractuelles au titre des travaux entrepris.

De même n'est pas sérieux le reproche fait au bailleur d'avoir alerté la mairie sur l'irrégularité de la troisième demande de permis de construire, déposée au nom de l'ancienne locataire, Mme [X], comme les deux précédentes demandes qui ont été refusées, alors qu'il n'est pas démontré par l'intimée que le bailleur aurait donné un quelconque accord verbal pour que les demandes de permis de construire soient déposées au nom d'un tiers, Mme [X] ne détenant plus aucun droit d'occupation, étant rappelé que les travaux ont été entrepris par la société Hôtel du village, seule titulaire de l'autorisation donnée par le bailleur.

Enfin les démarches initiées par la SCI bailleresse l'ont été antérieurement à l'offre de protocole de résiliation du bail par un promoteur en date du 26 novembre 2018, de sorte qu'il ne peut être argué de la mauvaise foi du bailleur qui aurait cherché à se débarrasser de sa locataire, alors que depuis la signature du bail, la société Hôtel du village n'a jamais fourni au bailleur la moindre information sur les travaux réalisés, en totale violation des clauses du bail.

En conséquence, la société Hôtel du village n'ayant déféré ni à la réclamation qui lui a été adressée par lettre recommandée avec avis de réception le 22 mai 2018 ni au commandement d'exécuter ses obligations contractuelles au titre des travaux autorisés délivré le 30 juillet 2018, alors même que le défaut d'exécution des charges et conditions, qualifiées dans le bail 'toutes de rigueur', est expressément sanctionné par la résiliation de plein droit du bail selon l'article 16 du contrat, la cour, statuant en référé, ne peut que constater que la clause résolutoire est acquise de plein droit au bailleur à la date du 31 août 2018.

C'est donc à tort que le premier juge a écarté la demande de la bailleresse, au demeurant par des motifs inopérants, en retenant que la majeure partie des travaux avait été réalisée et que le retard provenait d'une situation de fait (intrusion de squatters) ainsi que de difficultés administratives.

L'ordonnance déférée doit être infirmée en ce qu'elle a débouté la SCI bailleresse de sa demande d'acquisition de la clause résolutoire et de ses demandes subséquentes d'expulsion du preneur et de fixation d'une indemnité d'occupation.

La cour, statuant à nouveau, constate que la clause résolutoire est acquise au bailleur et que le bail est résilié de plein droit à la date du 31 août 2018.

En conséquence de la résiliation du bail, il y a lieu d'ordonner l'expulsion de la société Hôtel du village des locaux loués, celle-ci étant devenue occupante sans droit ni titre depuis le 31 août 2018 et de la condamner au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle provisionnelle de 3 000 euros, équivalente au montant du loyer hors charges, comme réclamé par l'appelante, jusqu'à la complète libération des lieux et la remise des clés.

Il n'y a pas lieu en revanche d'assortir la mesure d'expulsion ordonnée d'une astreinte.

Sur la demande de conservation du montant du dépôt de garantie

La SCI bailleresse sollicite en application des clauses contractuelles l'attribution du dépôt de garantie de 6 000 euros à titre d'indemnité forfaitaire.

L'intimée s'oppose à cette demande.

Le bail stipule à l'article 16 qu'en cas de résiliation de plein droit du bail par l'effet de la clause résolutoire, 'les loyers d'avance, tout comme le dépôt de garantie, demeureront acquis au bailleur à titre d'indemnité forfaitaire et ce, sans préjudice de tout terme alors dû, de tous dommages-intérêts, comme du règlement des frais, s'il y a lieu'.

La demande de conservation du dépôt de garantie par le bailleur ne se heurte dès lors à aucune contestation sérieuse, ladite clause ayant pour objet d'indemniser le bailleur à titre forfaitaire en cas de résiliation du bail par la faute du locataire.

L'ordonnance déférée doit être infirmée en ce qu'elle a débouté la SCI bailleresse de cette demande.

Sur les demandes accessoires

L'équité ne commande pas de faire droit à la demande de l'appelante présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile tant au titre des frais irrépétibles de première instance que d'appel.

L'ordonnance déférée sera donc confirmée en ce qu'elle a débouté la SCI bailleresse de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que du chef de la condamnation aux dépens, dont la confirmation est sollicitée.

Partie perdante, l'intimée ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles et doit supporter les dépens d'appel, comprenant le coût des deux commandements délivrés le 30 juillet 2018 et 17 septembre 2018.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME l'ordonnance rendue le 29 mars 2019 sauf en ce qu'elle a débouté la SCI [I] [V] et [M] [S] de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné la SARL Hôtel du Village aux dépens,

Statuant à nouveau des chefs de décision infirmés et y ajoutant,

CONSTATE l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de plein droit du bail commercial liant les parties à la date du 31 août 2018,

ORDONNE l'expulsion de la SARL Hôtel du Village et de tous occupants de son chef, à défaut de libération volontaire des lieux, et ce, au besoin avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier, des locaux situés [Adresse 3],

DIT n'y avoir lieu à assortir la mesure d'expulsion d'une astreinte,

RAPPELLE que le sort les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place est régi par les dispositions des articles L.433-1 et R.433-1 du code des procédures civiles d'exécution,

FIXE le montant de l'indemnité d'occupation mensuelle due à titre provisionnel par la SARL Hôtel du Village à la somme de 3 000 euros à compter du 31 août 2018,

CONDAMNE la SARL Hôtel du Village à payer à la SCI [I] [V] et [M] [S] une indemnité d'occupation mensuelle de 3 000 euros à titre provisionnel jusqu'à la complète libération des lieux et la remise des clés,

DIT que la SCI [I] [V] et [M] [S] conservera le dépôt de garantie,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que la SARL Hôtel du Village supportera les dépens d'appel comprenant le coût des deux commandements délivrés le 30 juillet 2018 et 17 septembre 2018, lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par les avocats qui en ont fait la demande.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Madame Nicolette GUILLAUME, président et par Madame Agnès MARIE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 14e chambre
Numéro d'arrêt : 19/03157
Date de la décision : 05/12/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 14, arrêt n°19/03157 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-05;19.03157 ?
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