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15/10/2019 | FRANCE | N°18/03685

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 15 octobre 2019, 18/03685


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





1ère chambre 1ère section





ARRÊT N°





CONTRADICTOIRE

Code nac : 29B





DU 15 OCTOBRE 2019





N° RG 18/03685

N° Portalis DBV3-V-B7C-SM6O





AFFAIRE :



Association L'ESSOR

C/

[J], [N], [C] [N]

[O], [Q], [E] [N]

[C], [S], [P] [N]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Avril 2018 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
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N° Section : 3

N° RG : 14/11955



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :





à :



-la SELARL MEZERAC - CHEVRET & Associés,



-la SCP REYNAUD ASSOCIES











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE F...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

1ère chambre 1ère section

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 29B

DU 15 OCTOBRE 2019

N° RG 18/03685

N° Portalis DBV3-V-B7C-SM6O

AFFAIRE :

Association L'ESSOR

C/

[J], [N], [C] [N]

[O], [Q], [E] [N]

[C], [S], [P] [N]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Avril 2018 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section : 3

N° RG : 14/11955

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

-la SELARL MEZERAC - CHEVRET & Associés,

-la SCP REYNAUD ASSOCIES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Association L'ESSOR

agissant poursuites et diligences de son Président domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Ma Amandine NAUD substituant Me Samuel CHEVRET de la SELARL MEZERAC - CHEVRET & Associés, avocat postulant plaidant - barreau de PARIS, vestiaire : A0729 - N° du dossier 35410

APPELANTE

****************

Monsieur [J], [N], [C] [N]

né le [Date naissance 1] 1941 à [Localité 1] (SUÈDE)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2] (SUÈDE)

Monsieur [O], [Q], [E] [N]

né le [Date naissance 2] 1943 à [Localité 1] (SUÈDE)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Monsieur [C], [S], [P] [N]

né le [Date naissance 3] 1951 à [Localité 1] (SUÈDE)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentés par Me Natacha MAREST-CHAVENON de la SCP REYNAUD ASSOCIES, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 177 - N° du dossier 381416

Me Sophie LIMOUZINEAU substituant Me Françoise HERMET LARTIGUE, avocat plaidant - barreau de PARIS, vestiaire : C0716

INTIMÉS

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Juin 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain PALAU, Président chargé du rapport et Madame Anne LELIEVRE, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, Président,

Madame Anne LELIEVRE, Conseiller,

Madame Nathalie LAUER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Nanterre en date du 17 avril 2018 qui a statué ainsi :

Dit que le tribunal de céans est compétent pour connaître de l'action en réduction des consorts [N] et que la loi française y est applicable ;

Dit que l'association l'Essor a bénéficié d'une donation entre vifs que lui a consentie [V] [U] veuve [N] le 7 mars 1961 qui excède la quotité disponible ;

Dit que l'association l'Essor est redevable à l'égard de [J], [O] et [C] [N] d'une indemnité de réduction au titre de cette donation ;

Préalablement, ordonne une expertise immobilière et désigne à cette fin Monsieur [H] [C], [Adresse 5] ; Tél : XXXXXXXXXX ; Courriel [Courriel 1] avec pour mission de procéder à l'évaluation du domaine sis sur les territoires de [Localité 2] et de [Localité 3] dans le département du [Localité 4], dit « Domaine de [Localité 5] dont les références au cadastre de la commune de [Localité 2] sont :

lieudit [Localité 6], section [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] à [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10] à [Cadastre 11], - lieudit [Localité 7], section E I l n° I à 7,

lieudit [Localité 8], section [Cadastre 12] ) [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 16], [Cadastre 17] à [Cadastre 18] et [Cadastre 19] à [Cadastre 20] et au cadastre de la commune de [Localité 3] :

section A, lieudit [Localité 9], n°[Cadastre 21], [Cadastre 22], [Cadastre 23], [Cadastre 24], [Cadastre 25],

section E, lieudit [Localité 6], [Cadastre 26] à [Cadastre 27],

section E, lieudit [Localité 10], [Cadastre 28], [Cadastre 29], [Cadastre 30], [Cadastre 31], [Cadastre 32] [Cadastre 33], [Cadastre 34], [Cadastre 35], [Cadastre 36], [Cadastre 37], [Cadastre 38], [Cadastre 39] et [Cadastre 40], tel que désigné dans l'acte de donation du 7 mars 1961 et ce, dans les conditions prévues à l'article 922 du code civil, c'est-à-dire au jour de l'ouverture de la succession de [V] [U] veuve [N] le [Date décès 1] 2013, en considération de l'état de ce bien au jour où la donation a été consentie le 7 février 1961 et sans tenir compte du bail emphytéotique dont disposait jusqu'à cette date l'association l'Essor ;

Dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu'il déposera son rapport en un exemplaire original (éventuellement sous format papier et en copie sous la forme d'un fichier PDF ou d'un CD-Rom ou d'une clé USB) au greffe du service des contrôles des expertises du tribunal de grande instance de Nanterre dans un délai de six mois à compter de l'avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle ;

Dit que l'expert devra, dès réception de l'avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l'expiration d'un délai de deux mois, au cours de laquelle il procédera à une lecture contradictoire de sa mission, présentera la méthodologie envisagée, interrogera les parties sur d'éventuelles mises en cause, établira contradictoirement un calendrier de ses opérations et évaluera le coût prévisible de sa mission ;

Dit qu'à l'issue de cette première réunion, il adressera un compte-rendu aux parties et au juge chargé du contrôle ;

Dit que sauf accord contraire des parties, l'expert devra adresser à celles-ci une note de synthèse dans laquelle il rappellera l'ensemble de ses constatations matérielles, présentera ses analyses et déposera une réponse à chacune des questions postées par la juridiction ;

Dit que l'expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l'article 276 du code de procédure civile et rappelons qu'il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives ;

Désigne le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d'instruction et statuer sur les incidents ;

Dit que l'expert devra rendre compte à ce magistrat de l'avancement de ses travaux d'expertise et des diligences accomplies et qu'il devra l'informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l'exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 à 275 du code de procédure civile ;

Dit que [J], [C] et [O] [N] feront l'avance des frais de cette expertise à concurrence de la somme de 3 000 euros qui devra être consignée entre les mains du régisseur d'avances et de recettes de ce tribunal dans un délai maximum de six semaines à compter du présent jugement, sans autre avis et à peine de caducité de la mesure d'expertise ;

Avant dire droit, sur la détermination du montant de l'indemnité de réduction due par l'association L'Essor, désigne en qualité d'expert Me [M] [H], notaire à [Adresse 6], Téléphone : XXXXXXXXXX avec pour mission, les parties régulièrement convoqués, après avoir pris connaissance du dossier, en ce compris les conclusions de l'expert immobilier ci-avant désigné, s'être fait remettre tous documents utiles, avoir entendu les parties :

déterminer la valeur de la masse de tous les biens existant au décès de [V] [U] veuve [N] en considération de sa consistance telle que définie aux termes du présent jugement ;

d'y réunir tous les biens dont elle a disposé en déterminant la valeur dans les conditions prévues à l'article 922 du code civil et en considération des énonciations du présent jugement ;

donner au tribunal tous les éléments nécessaires à la détermination de l'indemnité de réduction qui pourrait être due par l'association L'Essor ;

Dit que la masse des biens existant au décès de la défunte augmentée fictivement des biens dont il a été disposé entre vifs pour leur valeur au jour du décès en considération de leur état au jour de la donation se compose :

des avoirs et liquidités bancaires dont [V] [U] veuve [N] était titulaire en Suède et en France au jour de son décès ;

de la donation- partage qu'elle a consentie à parts égales à ses trois enfants nés de son union avec [E] [N] le 20juin 2001 par Me [L] [X], notaire à [Localité 11] portant sur la nue- propriété de l'immeuble situé [Adresse 7] ;

de la donation d'une parcelle de terre sise domaine de la « [Localité 10] » dans le [Localité 4] qu'elle a consentie à son fils [J] [N] le 3 août 1988 reçue par Me [Z] [B], notaire à [Localité 12] ;

de la donation qu'elle a consentie le 7 mars 1961 à l'association L'Essor de la pleine propriétaire du domaine « [Localité 5] » dans le [Localité 4] ;

Dit que l'immeuble sis [Adresse 7], objet de la donation en nue-propriété consentie par la défunte à ses trois enfants, doit être évalué à la somme de 292 740,46 euros à la date de son aliénation et en considération de son état au jour de la donation ;

Dit que la parcelle de terre sise domaine de la « [Localité 10] » dans le [Localité 4], objet de la donation qu'elle a consentie en pleine propriété à son fils [J], doit être évaluée à la date de son décès et en considération de son état au jour de la donation à la somme de 7 622,45 euros ;

Dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu'il déposera son rapport en un exemplaire original (éventuellement sous format papier et en copie sous la forme d'un fichier PDF ou d'un CD-Rom ou d'une clé USB) au greffe du service des contrôles des expertises du tribunal de grande instance de Nanterre dans un délai de six mois à compter de l'avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle ;

Dit que l'expert devra, dès réception de l'avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l'expiration d'un délai de deux mois, au cours de laquelle il procédera à une lecture contradictoire de sa mission, présentera la méthodologie envisagée, interrogera les parties sur d'éventuelles mises en cause, établira contradictoirement un calendrier de ses opérations et évaluera le coût prévisible de sa mission ;

Dit qu'à l'issue de cette première réunion, il adressera un compte-rendu aux parties et au juge chargé du contrôle ;

Dit que sauf accord contraire des parties, l'expert devra adresser à celles-ci une note de synthèse dans laquelle il rappellera l'ensemble de ses constatations matérielles, présentera ses analyses et déposera une réponse à chacune des questions postées par la juridiction ;

Dit que l'expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l'article 276 du code de procédure civile et rappelons qu'il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives ;

Désigne le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d'instruction et statuer sur les incidents ;

Dit que l'expert devra rendre compte à ce magistrat de l'avancement de ses travaux d'expertise et des diligences accomplies et qu'il devra l'informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l'exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 à 275 du code de procédure civile ;

Dit que [J], [C] et [O] [N] feront l'avance des frais de cette expertise à concurrence de la somme de 3 000 € qui devra être consignée entre les mains du régisseur dl avances et de recettes de ce tribunal dans un délai maximum de six semaines à compter du présent jugement, sans autre avis et à peine de caducité de la mesure d'expertise ;

Rejette la demande de [J], [C] et [O] [N] de provision à valoir sur les frais de l'expertise ;

Sursoit à statuer sur la demande de [J], [C] et [O] [N] en paiement d'une indemnité de réduction d'un montant de 1 724 405,64 euros ;

Déboute les parties de toute autre demande ;

Ordonne l'exécution provisoire ;

Réserve les demandes des parties au titre des frais irrépétibles et des dépens ;

Dit que l'affaire sera rappelée à l'audience du juge de la mise en état du 21 juin 2018 pour retrait du rôle jusqu'au dépôt du rapport de l'expert Maître [H] désigné ci-avant, sauf observations des parties formulées avant le 20 juin 2018 à 12 heures.

Vu la déclaration d'appel de l'association L'Essor en date du 25 mai 2018.

Vu les dernières conclusions en date du 15 mai 2019 de l'association L'Essor qui demande à la cour de :

In limite litis,

Dans l'hypothèse où après examen d'office de sa compétence la cour d'appel estimerait les juridictions suédoises compétentes,

Infirmer le jugement dont appel et renvoyer les parties à mieux se pourvoir,

A titre principal,

Infirmer la décision dont appel,

Retenir la qualification de legs,

Débouter les consorts [N] de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

Subsidiairement,

Dire et juger que l'ensemble des sommes versées sur les contrats d'assurance vie ouverts au profit de Monsieur [J] [N] auprès de la Société Cardif sous le numéro 014185880001, au profit de Monsieur [O] [N] auprès de la société Cardif sous le numéro 1418588154SEI, au profit de Monsieur [B] [N] auprès de la société Cardif sous le numéro 1418588154SEI ; au profit de Madame [V] [N] auprès de la société BNP Paribas sous le numéro AS01419628.0001 devront être rapportées à la masse partageable servant à évaluer la quotité disponible sur laquelle une éventuelle action réduction est susceptible d'être exercée.

Dire et juger que l'immeuble [Adresse 7] doit être rapporté à la masse pour sa valeur en pleine propriété.

Subsidiairement, avant dire droit sur le principe de la réduction, désigner en tout état de cause tel expert qu'il plaira à la cour avec pour mission de donner à la cour tous éléments permettant de reconstituer l'ensemble de la masse partageable au décès de Mme [N] en identifiant les biens perçus par Mme [N] dans la succession de son père, l'ensemble des biens mobiliers, immobiliers, transmis par M. et Mme [N] à leurs enfants postérieurement à la donation effectuée le 7 mars 1961 à l'association L'Essor, outre les récompenses dues à la communauté du chef de l'utilisation par M. [N] de biens communs ainsi que le patrimoine mobilier dont Mme [N] était propriétaire à son décès (titres, FCP').

A titre infiniment subsidiaire, dans la seule hypothèse ou la juridiction de céans estimerait acquis le principe d'un droit à réduction :

Dire et juger concernant l'expertise immobilière de la donation opérée au profit de l'association L'Essor dans l'état où il a été donné en 1961 en fonction de sa valeur au jour le plus proche de l'ouverture de la succession que l'expert devra tenir compte du bail emphytéotique pour évaluation de la valeur du bien dans l'état dans lequel il se trouvait en 1961.

En tout état de cause,

Condamner solidairement les intimés à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance avec droit de recouvrement direct au profit de la Selarl Mezerac-Chevret & Associés.

Vu les dernières conclusions en date du 14 mai 2019 de MM. [J], [O] et [C] [N] qui demandent à la cour de :

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Déclarer irrecevable et mal fondée l'Essor en l'intégralité de son appel et des demandes qu'elle y formule,

La déclarer irrecevable en sa nouvelle exception d'incompétence au profit du juge suédois,

Rejeter toute exception, même d'office, infondée,

La débouter tant à titre principal qu'à titre subsidiaire dans ses demandes de réformation, y compris sur la modification de la demande d'expertise,

Déclarer irrecevable la demande de réformation de la mission de l'Expert après clôture et dépôt du rapport,

Rejeter l'ensemble des demandes de l'Essor en cause d'appel,

Condamner l'Essor à leur payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens, lesquels pourront être recouvrés par la SCP Reynaud et Associés, Avocats, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 4 avril 2019.

****************************

Faits et moyens

Par acte notarié en date du 1er mars 1946, [J] [U] a donné en location à l'association L'Essor, pour une durée de 90 ans à compter du 1er mars 1946, un bien situé sur les territoires de [Localité 2] et de [Localité 3] dénommé « [Localité 5] », pour une surface approximative de 170 à 174 hectares.

[J] [U] est décédé le [Date décès 2] 1956 laissant pour seule héritière sa fille, [V] [N].

Par acte notarié du 7 mars 1961, [V] [N] a fait donation à l'association L'Essor, de ce bien dont elle avait hérité de son père étant précisé que, pour les besoins de la publicité foncière, le bien donné était évalué à la somme de 33.000 francs.

[V] [N] était mariée à [Localité 13] sous le régime matrimonial de la communauté universelle avec clause d'attribution de la totalité de la communauté au survivant

[E] [N] est décédé le [Date décès 3] 2004.

[V] [U] veuve [N], dont le dernier domicile était situé à [Localité 14] (Suède), est décédée le [Date décès 1] 2013 en laissant pour lui succéder, suivant l'acte de notoriété établi le 5 mai 2014 par Maître [V], notaire à [Localité 11], ses trois enfants, [J], [O] et [C], nés de son union avec [E] [N], prédécédé.

Par acte d'huissier du 26 septembre 2014, [J], [O] et [C] [N] ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Nanterre l'association L'Essor aux fins de la voir condamner à leur régler une indemnité de réduction à raison de la donation dont elle a bénéficié le 7 mars 1961 de la part de leur mère portant sur un domaine situé dans le département du [Localité 4], dénommé « Domaine de [Localité 5] ».

Le tribunal a prononcé le jugement déféré.

Aux termes de ses écritures précitées, l'association L'Essor expose que [V] [N] a hérité d'un patrimoine d'environ 100.000.000 francs et que l'association a, en qualité de preneur de bail emphytéotique, effectué d'importants travaux d'entretien et de construction dans le domaine concerné.

Elle indique que [V] [N] a eu vocation à recueillir l'intégralité du patrimoine dont disposaient son père et son mari.

Elle fait état d'échanges infructueux entre elle, [V] [N] et ses fils courant 2003 aux fins d'examiner les conditions dans lesquelles la donation pourrait éventuellement être réduite.

Elle relate la procédure.

In limine litis, elle précise que le tribunal a examiné d'office sa compétence et retenu celle-ci.

Elle évoque toutefois une difficulté procédurale et rappelle l'article 76 alinéa 2 du code de procédure civile.

Elle estime contestable que les juridictions françaises soient compétentes pour connaître de l'action en réduction, et a fortiori que la loi française soit applicable au cas d'espèce.

Elle admet que la succession a été ouverte après l'entrée en vigueur des dispositions du règlement européen n°650/2012 du 04 juillet 2012 mais estime nécessaire de distinguer entre succession mobilière et succession immobilière pour déterminer la compétence des juridictions et la loi successorale applicable.

Elle relève que le tribunal a considéré que s'agissant d'une action en réduction ayant trait à la donation d'un bien immobilier situé en France, il y avait lieu d'appliquer la loi française.

Elle fait valoir qu'au jour du décès de la défunte en Suède, son patrimoine n'était composé d'aucun immeuble, les seuls biens dépendant de la succession de Mme [N] étant des biens meubles.

Elle infère de la dernière résidence de la défunte, en Suède, que la loi suédoise avait vocation à s'appliquer à cette succession.

Elle en infère également qu'il n'y a pas lieu de retenir la compétence des tribunaux français ni d'appliquer la loi française.

Elle soutient que l'action en réduction ouverte aux héritiers réservataires selon les modalités du droit français n'est pas une action immobilière mais une simple action mobilière dont l'objectif est de faire constater une créance de la succession à l'encontre d'un tiers gratifié, pour reconstituer l'actif successoral au regard de la réserve héréditaire.

Elle invoque l'article 924 du code civil qui parle d'indemnité.

Elle conclut que l'action en réduction des libéralités excessives ouvre un simple droit à indemnité aux héritiers réservataires, ce qui explique que les consorts [N] ont effectivement demandé le paiement d'une certaine somme d'argent.

Elle rappelle, citant des arrêts de la Cour de cassation, qu'un droit de créance ne peut être assimilé à un droit de nature immobilière.

Elle fait valoir qu'ainsi, la réunion fictive de la valeur de l'immeuble donné n'est qu'une modalité du calcul des comptes de la succession, qui n'a vocation à être opéré qu'en cas d'application des règles françaises de règlement de la succession, et non un critère de rattachement de la loi successorale applicable.

Elle ajoute qu'une loi étrangère ignorant la réserve héréditaire n'est pas contraire à l'ordre public international.

Elle estime donc qu'il n'y avait aucune raison d'écarter l'application du droit suédois au règlement de la succession et que les juridictions françaises ne sont pas compétentes, les intimés ayant pratiqué un forum shopping contraire au droit international privé.

En réponse à ceux-ci, elle soutient, se prévalant d'un arrêt de la Cour de cassation, que la prétendue irrecevabilité de sa demande ne peut empêcher la cour de relever d'office son incompétence sur le fondement de l'article 76 alinéa 2 du code de procédure civile.

Elle soutient également que, si la réduction peut s'exécuter en nature, les intimés n'ont toujours demandé que le versement d'une indemnité de réduction.

Elle estime, en tout état de cause, que l'article 924-1 du code civil est inapplicables en l'espèce, la réduction en nature n'étant qu'une simple faculté offerte au gratifié, le principe demeurant celui du versement d'une indemnité de réduction en valeur.

Elle précise ne pas vouloir procéder à une telle restitution en nature.

Elle ajoute que le bien donné ne peut être considéré comme libre de toute occupation, dès lors que l'association était liée au donateur par un bail emphytéotique.

Elle affirme enfin qu'il est indifférent que la donation porte sur des deniers ou sur un immeuble, le rapport de la donation devant en toute hypothèse s'effectuer en valeur, ce qui caractérise dès lors une dette mobilière soumise à la loi successorale mobilière.

Elle estime que l'opération relève des mécanismes légaux des liquidations successorales -qu'il s'agisse du rapport ou de la réduction- le principe étant qu'ils doivent s'effectuer en valeur, de telle manière que la succession ne saurait être créancière que de dettes de valeur présentant un caractère mobilier.

Elle affirme que son absence de critique expresse de la décision du chef des dispositions relatives à la loi applicable et la compétence des juridictions françaises ne rend pas le jugement définitif sur ce point.

Elle réitère qu'il appartient à la cour d'appel - comme l'a fait le tribunal- en application des dispositions de l'article 76 alinéa 2 du code de procédure civile d'examiner d'office sa compétence lorsque l'affaire est susceptible d'échapper à la connaissance de la juridiction française.

Elle souligne que cet examen d'office est prévu par l'article 76 alinéa 2 y compris au stade de la cassation ce qui confirme son importance.

Elle estime que l'argumentation des consorts [N] reviendrait à vider de toute substance l'examen d'office prévu par l'article 76 alinéa 2 susvisé.

Sur le fond, elle rappelle les articles 912, 913, 922, 924, 924-1 et 924-2 du code civil applicables en matière de donation et de réduction et les articles L 132-12, L 132-13 du code des assurances et 1437 du code civil ainsi que l'arrêt de la Cour de cassation du 21 décembre 2007 permettant de requalifier en donations des contrats d'assurance-vie applicables en matière de rapport à la masse en cas de donations déguisées, de souscription de primes d'assurance vie manifestement excessives et de récompenses due à la communauté en cas d'utilisation de biens communs.

S'agissant du droit à réduction, elle conteste l'existence d'une donation.

Elle affirme que la donation évoquée par les consorts [N] doit s'analyser en l'exécution d'un legs qui avait été décidé par M. [U].

Elle estime que Mme [N] n'a, en donnant le domaine de [Localité 5], fait qu'exécuter les volontés de son père qui avait toujours souhaité à son décès que l'activité de l'association sur le terrain donné à bail emphytéotique puisse se poursuivre de manière pérenne.

Elle se prévaut de ses propos et d'attestation de Mmes [L] et [P] qui la côtoyaient.

Elle ajoute qu'elle avait entamé des démarches pour se faire reconnaître d'utilité publique en raison de ce legs qui lui était annoncé.

Elle en conclut que cette donation doit s'analyser en l'exécution d'un legs par la fille du défunt, legs qui ne peut être sujet à réduction du fait de l'importance du patrimoine de M. [U].

En réponse aux intimés, elle rappelle, citant des arrêts de la Cour de cassation, que si une disposition de dernière volonté purement verbale est nulle de plein droit elle peut, comme constituant une obligation naturelle, servir de cause civile à une obligation valable et que lorsque l'héritier s'engage à exécuter le legs verbal, l'obligation naturelle née de la libéralité se transforme en obligation civile.

Elle ajoute qu'en application de l'article 12 du code de procédure civile, le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée, et ce y compris en matière d'acte authentique.

Elle réitère que M. [U] souhaitait qu'elle puisse bénéficier pour ses activités sociales du terrain qui lui appartenait et que sa fille a toujours confirmé qu'à travers la donation dudit domaine, elle exécutait les volontés de son père.

Elle estime qu'il n'a jamais été dans la volonté de M. [U] de la placer en difficulté financière dans le cadre d'une demande ultérieure en réduction de ladite donation.

Elle précise qu'elle n'a sollicité l'attestation de Mmes [L] et [P] que lorsqu'elle a découvert, en cours de procédure, l'importance du patrimoine dont avait hérité Mme [N].

Elle affirme que l'importance de cet héritage confirme que la donation visée dans l'acte authentique doit être qualifiée de legs au regard de la part infime qu'elle constituait dans les biens transmis par M. [N] à sa fille (1% de l'ensemble de la masse successorale active).

Elle en conclut qu'a été exclue toute volonté qu'elle puisse être redevable d'une quelconque somme.

Elle réfute toute prescription dès lors qu'elle n'a connu les faits fondant ses droits qu'à travers la communication de la déclaration de succession de M. [U] effectuée le 2 septembre 2015.

L'association critique le jugement.

Elle indique produire une nouvelle attestation de Mme [P], entièrement manuscrite, qui emploie le terme « légué'».

Subsidiairement, elle invoque l'absence de preuve d'une atteinte à la quotité disponible.

Elle reproche aux intimés de ne pas fournir l'ensemble des éléments de leur patrimoine et affirme qu'il convient de rapporter à la succession les contrats d'assurance vie et l'immeuble situé [Adresse 7] pour sa valeur en pleine propriété, une mesure d'instruction devant être ordonnée pour reconstituer la masse partageable.

Elle soutient que les consorts [N] ont sciemment minoré l'actif successoral.

Elle déclare qu'il résulte de leur assignation que leur mère n'aurait disposé pour patrimoine susceptible de constituer l'actif successoral que de la valeur du bien donné, outre une somme de 292.740,46 euros correspondant à une valeur de nue-propriété revendue le 10 septembre 2014 et une somme de 2.014,56 euros correspondant à ses économies.

Elle rappelle qu'elle était la seule héritière de son père, [J] [U], et l'importance du patrimoine de celui-ci.

Elle déclare avoir sommé les intimés de communiquer l'ensemble des éléments afférents à la liquidation de la succession de celui-ci afin de connaître l'état complet du patrimoine de la défunte.

Elle ajoute que leur mère avait vocation à hériter directement du chef du régime de communauté universelle du patrimoine de son défunt mari.

Elle affirme que les époux disposaient d'un patrimoine important.

Elle souligne qu'ils ont acquis en janvier 2001 en payant comptant un terrain [Adresse 7] pour une somme de 343.010,49 euros.

Elle s'étonne que les déclarations d'imposition versées aux débats ne fassent état en 2003 que de revenus globaux du couple de 17.000 euros par an.

Elle ajoute qu'ils étaient alors domiciliés [Adresse 8] puis qu'ils ont été domiciliés à [Localité 15].

Elle indique qu'elle a découvert, après diverses sommations, qu'ils avaient vendu plusieurs biens immobiliers qui n'avaient pas été évoqués dans l'assignation introductive d'instance.

Elle fait état de la vente d'un appartement [Adresse 8] pour 4 900 000 francs en janvier 2001 et de celle d'un second appartement dans le même immeuble quelques mois plus tard pour 1. 684. 000 francs.

Elle leur fait grief de ne pas avoir fait état spontanément de ces ventes et de l'utilisation des fonds et, donc, d'avoir eu une stratégie de dissimulation.

Elle soutient que des contrats d'assurances vie doivent être rapportés à la succession.

Elle expose que le produit de la vente d'un bien, le 11 janvier 2001, a été réinvesti au moins en partie sur divers contrats d'assurance vie, des primes versées lors de la souscription étant de 393. 606 euros pour chaque enfant et de 222. 607 euros au profit de Mme [N] suite au décès de son époux.

Elle relève qu'au moment de la souscription de ces contrats d'assurance vie, M. [N] était âgé de 93 ans (et est décédé 3 ans plus tard) et en conclut qu'il s'agit de donations déguisées devant être rapportées à la masse.

Elle ajoute qu'elles constituent également l'utilisation personnelle de biens faisant partie de la communauté de sorte qu'elles doivent donner lieu à récompense en application des dispositions de l'article 1437 du code civil.

Elle affirme que le caractère manifestement excessif des primes versées lors de ces souscriptions est également établi.

Elle fait valoir que si, comme il était prétendu dans l'assignation, le couple ne disposait plus d'aucun patrimoine au jour de l'ouverture de la succession, le seul actif a été aliéné à l'époque de la souscription des contrats.

Elle considère qu'en tout état de cause, les intimés devront justifier des conditions dans lesquelles ces contrats d'assurance vie ont été souscrits à leur profit et alimentés le cas échéant.

Elle précise qu'ils n'en justifient pas.

Elle ajoute que la défunte avait évoqué à plusieurs reprises la transmission de sommes provenant de la vente de toiles de maîtres au profit de ses enfants et estime donc nécessaire de connaître les conditions exactes de la transmission progressive de son patrimoine à ses trois enfants.

En réponse aux intimés, elle réitère que l'héritage de Mme [N] en provenance de son mari est toujours dissimulé.

Elle relève que les testaments de 1998 ne sont pas versés aux débats à l'exception de celui du 14 mai 1998 par lequel M. [N] a légué à son fils [J] - dans l'hypothèse où il survivrait à son épouse- l'intégralité de ses parts, actions et comptes courants dans les sociétés Scan Tech Sa et Scan Tech Sarl.

Elle rappelle que c'est Mme [N] qui, du fait du régime de communauté universelle, en est devenue propriétaire et observe que les intimés n'en font pas état.

Elle fait valoir qu'ils doivent s'expliquer sur le sort de ses actifs qui auraient dû se trouver dans le patrimoine de leur mère suite au décès de leur père et qui ont vocation à augmenter la masse active de la succession.

Elle observe que l'acte de notoriété établi après de décès de M. [N], évoque « deux testaments authentiques faits par les époux [N] concernent des legs particuliers de biens de corps certains en 1998 ».

Elle estime indifférent que ces biens n'existent plus au jour du décès ou que les testaments n'ont pas été exécutés.

Elle estime fondamental de pouvoir disposer de ces testaments puisqu'ils devaient décrire précisément les éléments de patrimoine qui existaient à l'époque pour chacun des époux, et permettre ainsi de connaître d'éventuelles donations ou réalisations d'actifs successoraux dont auraient pu profiter les enfants du couple.

Critiquant le jugement, elle fait valoir qu'elle démontre que, moins de 6 ans avant son décès, M. [N] a rédigé un acte dans lequel il cédait des parts dont il disposait à titre personnel dans la société dont il était le gérant et qu'il a souscrit à titre personnel un contrat d'assurance vie sur lequel a été déposée une somme de plus de 250'000 euros.

Elle ajoute qu'il était ingénieur et estime «'contestable de poser comme postulat qu'il n'aurait disposé d'aucun bien propre au jour de son décès en 2004'».

Elle considère donc nécessaire d'ordonner la production de ces éléments ou à défaut d'ordonner une expertise afin de reconstituer le patrimoine dont a pu disposer Mme [N] tant du chef de la succession de son père que de celle de son mari.

Elle précise que le refus du juge de la mise en état n'empêchait pas le tribunal de prononcer une telle mesure.

Elle affirme également que Mme [N] a hérité de son père une somme de 100. 000.000 francs en 1956 et réitère que dans cette déclaration de succession, le domaine de [Localité 5] était évalué à 1.000.000 francs, soit 1% du patrimoine dont elle allait hériter, dont notamment une multitude d'actions, 53 lingots d'or, un solde de compte bancaire à la banque Gaston Dreyfus pour 14.083.873 Francs, un appartement à [Adresse 9] évalué à 5.000.000 francs, une propriété à [Localité 16] évaluée 5.000.000 francs.

Elle estime donc impossible qu'au jour du décès il n'existe quasiment aucun actif successoral alors même qu'elle a également hérité de son conjoint.

En réponse aux intimés, l'association relève que l'absence de biens dans le patrimoine successoral ne signifie évidemment pas qu'elle n'a pas transmis de son vivant une part importante de son patrimoine à ses enfants ce qui est l'objectif de tout parent dans sa situation.

Elle souligne que les intimés versent aux débats des comptes extrêmement précis des investissements et répartition de l'épargne à partir des années 2000 mais aucun élément pour les années antérieures.

Elle indique également que les seules pièces produites confirment que la réalisation d'actifs immobiliers ne constituait que l'utilisation d'une part extrêmement minoritaire de la succession.

Elle précise, ainsi, que le bien situé [Adresse 9] a été acquis en 1959 pour 8.000.000 francs, soit 8% des 100.000.000 Francs dont elle a hérité et que l'autre appartement ne correspondait qu'à 5% de l'héritage.

Elle ajoute que Mme [N]- qui a acquis son propre domicile en 1959- a nécessairement perçu des loyers importants au regard de la valeur de l'appartement de son père pendant plus de 25 ans.

Elle ajoute également que les intimés n'indiquent pas le patrimoine dont disposait leur père.

Elle ajoute enfin que les ventes d'or et d'action sont soumises à déclaration, enregistrement et paiement de plus-values éventuelles et, donc, que les intimés doivent pouvoir fournir tous éléments utiles.

Elle fait état d'une transmission masquée du patrimoine aux enfants.

Elle déclare que les rachats progressifs des contrats d'assurance-vie par Mme [N] ne concernent qu'une partie des versements sur les contrats d'assurances vie - les primes versées étant supérieures à 1 000 000 euros et le montant racheté périodiquement n'étant que de 229'900 euros.

Elle déclare également qu'une somme de 46.647 euros a été consacrée à l'agrandissement de « [Localité 17] » et en infère à l'existence d'un actif immobilier visiblement situé en Suède.

Elle s'étonne enfin que les époux n'étaient pas les bénéficiaires prioritaires des contrats d'assurances vie.

Elle estime que leur souscription au profit des enfants confirme la volonté de distraire l'actif successoral selon un mécanisme classique, mais frauduleux, caractérisé par la vente, à l'âge de 93 ans des principaux actifs immobiliers susceptibles d'être taxés en cas de succession, la souscription avec les fonds reçus de contrats d'assurance vie au profit des enfants et le choix d'une résidence fiscalement favorable au moment de la déclaration de succession (Suède).

Elle conclut que les intimés ont perçu en avancement sur leur part successorale, non seulement des donations déguisées (assurance vie), mais également des sommes importantes sur lesquelles ils ne s'expliquent pas, et qui doivent, à l'instar du bien donné à l'association, être rapportées à la masse active de la succession.

Elle cite les lingots d'or, actions et autres comptes bancaires et propriétés dans le sud de la France, qui constituaient plus de 99% du patrimoine subsistant une fois la donation effectuée et relève que si le produit de la vente du bien de la [Adresse 9] en 1976, 2.500.000 francs- a permis aux époux de vivre, il n'y avait alors nul besoin de puiser dans le reste du capital hérité de son père.

Critiquant le jugement, l'association, au sujet de l'érosion monétaire, déclare que l'héritage de son père était essentiellement constitué de patrimoine immobilier, de 54 kg d'or ainsi que de multiples actions- et non d'avoirs bancaires et espèces- et qu'à suivre le coefficient de minoration pratiqué, son bien ne vaudrait que 20 000 euros alors qu'une expertise le valorise, en fonction de son état au moment de la donation en 1961 aux environs de 1. 000. 000 d'euros.

Elle considère donc que le patrimoine de la défunte s'est apprécié.

Elle adopte le même pour tous les biens immobiliers et pour les lingots d'or.

Enfin, elle lui fait grief d'avoir calculé le montant de ses dépenses en fonction du taux de conversion de 2018 et de la dépréciation afférente, alors que ces dépenses ont été effectuées, le cas échéant, au fil du temps et donc avec d'éventuels coefficients de dépréciation monétaire différents.

Au sujet des contrats d'assurance-vie, elle fait valoir que la souscription totale ne s'est pas élevée à 350. 000 euros mais à plus d'un million d'euros, la somme de 393 605 euros ayant été souscrite pour chacun des enfants et M. [N] ayant souscrit pour un montant de 222 606.57 euros.

Elle souligne que ces contrats ont été conclus quelques semaines après la vente de deux appartements qui leur a rapporté plus d'un million d'euros.

Elle soutient donc que, plutôt que leurs enfants héritent du patrimoine immobilier sur lequel ils auraient été taxés, il a été envisagé de réinvestir la totalité du fruit de ces ventes dans le cadre des assurances vie pour espérer opérer le dénouement de ces contrats hors droits de succession.

Elle considère que le caractère excessif de ces investissements par rapport aux facultés contributives et l'absence d'aléas sont, toutefois, établis.

En réponse aux intimés, elle fait valoir qu'au lendemain de leurs opérations immobilières- vente des appartements et achat du terrain de la [Adresse 7]-, les époux [N], alors âgés de 93 et 85 ans, disposaient d'un capital de 583.620 euros et déclare que l'intégralité de ce capital- leur seul actif selon les intimés- a été investie sur les supports d'assurance-vie.

Elle conclut que soit les époux ont effectivement consacré l'intégralité de leurs revenus à la souscription des contrats d'assurance-vie, et, dans ce cas, le caractère manifestement exagéré des primes est évident au regard de leurs facultés au jour du versement ce qui justifie le rapport des donations soit ils disposaient d'une fortune plus importante que prétendu ce qui justifie le prononcé d'une expertise approfondie afin de reconstituer la matérialité du patrimoine de la défunte.

Elle s'étonne, si une prime unique a été versée par la défunte à leur profit et s'ils n'ont donc perçu qu'un tiers du capital à titre individuel, qu'ils n'apportent aucune preuve des versements perçus au titre de l'assurance-vie.

Elle observe que MM. [O] et [J] [N] ont versé chacun entre 12 et 25'000 euros par an à leur mère entre 2007 et 2012 et affirme qu'ils payaient sans doute ces sommes grâce aux intérêts des assurances vie qui leur avaient été souscrites.

Elle estime que si la souscription desdits contrats n'avait pas excédé les facultés contributives de Mme [N], ses enfants n'auraient pas eu besoin de lui verser des sommes mensuellement pendant les 6 dernières années de sa vie.

Elle considère donc que c'est à tort que le tribunal s'est contenté de relever que Mme [N] avait procédé à des rachats sur son contrat pour son propre compte alors qu'elle avait également bénéficié de versements en provenance de ses enfants.

Elle réitère que, concernant son époux, le versement à 93 ans de 222. 606 euros est à l'évidence dépourvu d'aléas et caractérisé par l'utilisation de deniers communs

Elle conclut au rapport de ces contrats à la succession.

L'appelante soutient en outre que la valeur de l'immeuble doit être rapportée en pleine propriété soit pour 365.926 euros et non 292.740,48 euros comme reconnu.

Elle indique, citant un arrêt, que le rapport d'un bien donné en nue- propriété doit se faire en pleine propriété.

Elle demande également que soit rapportée une donation opérée dans les années 80 en faveur de M. [J] [N] d'une partie du domaine de [Localité 5], en échange d'une parcelle qui n'avait pas été initialement prise en compte dans la donation opérée en 1961.

Critiquant le jugement, elle affirme qu'il n'y a pas lieu de distinguer selon que le bien soit rapporté du chef du décès du donateur ou non.

L'association conclut que la masse partageable et la reconstitution du patrimoine du défunt telle qu'elles figurent dans l'acte introductif d'instance ne correspondent pas à la réalité et, donc, que, faute de justifier du patrimoine réel devant servir à la reconstitution de la masse partageable de manière incontestable, les intimés devront être déboutés de leur action en réduction.

Subsidiairement, elle reprend ses autres demandes.

Elle expose que le notaire ne s'est pas vu confier une mission de reconstitution du patrimoine et estime nécessaire une mesure d'expertise.

A titre infiniment subsidiaire, sur l'action en réduction, elle fait valoir que le tribunal ne peut se fonder sur une seule expertise non contradictoire et critique celle réalisée par M. [R] à la demande des intimés.

Elle lui fait grief de retenir, concernant la maison principale, une surface de 760 m² alors qu'elle n'est que de 656 m² et de ne pas avoir tenu compte des améliorations et modifications apportées par elle à certains bâtiments.

Elle conteste la valeur des terrains jouxtant les habitations, non étayée, alors qu'ils ne sont pas viabilisés et sont situés en zone inondables et ne sont pas constructible et que les bâtiments sont affectés à l'activité de l'association.

Elle ajoute qu'un changement d'activité n'apparaît pas possible dans le cadre du respect du PLU.

Elle conteste également son estimation à 855.066 euros des 169 ha de terrains et se prévaut d'une évaluation par l'administration des domaines à hauteur de 247.400 euros.

Elle souligne que l'évaluation des biens ne peut s'effectuer in abstracto et doit prendre en considération leur situation.

Elle expose que le domaine de [Localité 5] connaît régulièrement des inondations qui rendent quasi sans valeur les parcelles non construites et minorent de manière extrêmement importante les parcelles construites, dès lors que l'accès à celles-ci est régulièrement impossible et entraîne des frais d'entretien et de confortement très importants.

Elle affirme que le coût des travaux de sécurisation- 450.000 euros au minimum- absorbe le prix des terrains.

Elle ajoute qu'ils se situent en zone Natura 2000 ce qui rend extrêmement contrainte toute intervention sur le site.

En réponse aux intimés, elle se prévaut d'une estimation de M. [J] en 2015 évaluant les biens entre 900.000 et 1.000.000 euros (état 1961 valeur 2015) et ce sans tenir compte de la prise en compte du bail grevant le bien donné qui constitue un point de droit laissé à l'appréciation du juge.

Elle souligne que le bien donné doit être réintégré selon son état au jour de la donation et rappelle qu'il faisait alors l'objet d'un bail emphytéotique.

Elle admet que la donation a emporté un effet extinctif par confusion des qualités de bailleur et preneur et que la jurisprudence retient une valeur libre pour le legs d'un bien loué à l'attributaire mais estime que le montant à retenir pour un bien donné reste la valeur vénale.

Elle fait valoir que s'il avait été vendu en 1961, il l'aurait été avec une décote liée à la souscription du bail.

Elle en conclut que l'expert, dans son appréciation de l'état au jour de la donation, ne doit pas faire abstraction du bail conclu en 1946.

Elle s'oppose à la demande de provision sur les frais de procédure équivalente à la consignation de l'expert qui pourrait être nommé.

Elle déclare avoir produit l'avis actualisé valeur 2015 de M. [J] et estime sans incidence, compte tenu de la date du décès de Mme [N], le [Date décès 1] 2013, de connaître l'évaluation faite par lui en 2002, évaluation reprise dans son rapport de 2015.

Elle reproche au tribunal d'avoir considéré qu'il ne devait pas être tenu compte du bail emphytéotique et réitère que si on apprécie l'état du bien en 1961 date de son évaluation, on ne peut faire abstraction du bail emphytéotique qui le grevait à cette époque.

En réponse aux intimés, elle soutient que la cour doit examiner l'appel formé par elle du chef de la mission confiée à l'expert judiciaire même si son rapport a été déposé.

Aux termes de leurs conclusions précitées, les consorts [N] exposent que Mme [N] a, après la donation consentie à l'association, disposé de manière gratuite d'un terrain à bâtir acquis en janvier 2001, sis [Adresse 7], qu'elle détenait en communauté universelle avec son époux, donné en nue-propriété à ses héritiers réservataires pour une valeur de 154.354,63 euros, en juin 2001 et d'une parcelle de terrain « [Localité 10] », cédée gratuitement à son fils, M. [J] [N], d'une valeur de 7.622,25 euros.

Ils indiquent qu'ils ont revendu le 20 septembre 2004 le bien situé [Adresse 7] pour un prix de 365.925 euros dont 292.740,46 euros correspondant à la valeur de la nue-propriété mais précisent que leur mère a bénéficié du versement de la totalité du prix de vente conformément à une convention de quasi usufruit régularisée par les parties le 20 mars 2008.

Ils déclarent qu'elle a dû faire face aux difficultés financières consécutives au décès de son époux, la pension de réversion dont elle bénéficiait étant extrêmement modeste ainsi que l'épargne constituée par son époux.

Ils affirment qu'elle a vécu les dernières années de son existence grâce au produit de la vente des terrains à bâtir situés [Adresse 7], à la revente de l'épargne de son mari et aux aides sociales de la commune de [Localité 14].

Ils affirment qu'ils lui ont aménagé, moyennant un crédit, son lieu de vie en Suède.

Ils soulignent qu'au jour de son décès, elle a laissé un actif de 2.014,56 euros.

Ils indiquent qu'avant son décès, consciente des difficultés qu'allaient connaître ses enfants pour faire face à son entretien, elle a tenté de se rapprocher de l'association Essor pour convenir, avant décès, d'une indemnité de réduction de la donation, même si l'action en réduction est née du jour de son décès au bénéfice de ses héritiers réservataires et font état de vains pourparlers de 2009 à 2013.

Ils précisent que le domaine a été estimé à 2.400.000 euros par M. [R] et que le juge de la mise en état a rejeté une demande d'expertise de celui-ci.

Concernant la loi successorale applicable et la compétence des juridictions françaises, ils se prévalent des termes du jugement et relèvent que l'association ne conteste ni l'applicabilité de la loi française ni la compétence du tribunal.

En tant que de besoin, ils rappellent que les successions immobilières sont soumises à la loi de situation de l'immeuble.

Ils font valoir, citant des arrêts, que, dans la mesure où la réserve se calcule dans les successions internationales sur chaque masse de biens soumise à une loi différente, les héritiers réservataires peuvent retenir toute la réserve que leur donne la loi française de la situation des immeubles, à fortiori compte-tenu de la double nationalité de la défunte et de ses héritiers, à la fois suédoise et française.

Ils reprennent les motifs du jugement.

Ils invoquent l'irrecevabilité de l'exception soulevée par l'association, celle-ci étant tardive car soulevée pour la première fois en appel et après des conclusions au fond.

Ils exposent que, pour cette raison, l'association demande à la cour de soulever d'office son incompétence sur le fondement de l'article 76 alinéa 2 du code de procédure civile.

Ils réfutent cette incompétence.

Ils soutiennent que la nature et le mécanisme de cette action sont liés à la nature des biens objet de la libéralité sujette à réduction.

Ils rappellent que l'article 922 du code civil précise que la réduction se détermine en formant une masse de tous les biens du donateur, ceux existant et ceux dont il a disposé, notamment par donation entre vifs réunis fictivement.

Ils en infèrent que, par cette réunion, la propriété immobilière donnée à l'association fait masse dans la succession en cause où figurent fictivement des droits immobiliers.

Ils ajoutent que l'indemnité de réduction peut s'exécuter en nature et donc par des droits immobiliers en France.

Ils reprochent à l'association de dénaturer la jurisprudence en prenant l'exemple d'actions en réduction portant sur des donations en deniers et souligne que, même si ces donations ont été remployées en immeubles en France, la réunion à la masse porte sur des meubles, les deniers donnés, ce qui justifie l'application de la loi du dernier domicile du défunt.

Ils considèrent que l'espèce est inverse et que, la donation ayant porté sur des immeubles, c'est la loi du lieu de ces immeubles qui est applicable.

Ils ajoutent que l'association ne revendique pas au fond l'application de la loi suédoise.

Ils estiment enfin que cette exception heurte le caractère définitif du jugement non frappé d'appel en son dispositif de ce chef.

Ils contestent la demande de requalification de la donation.

Ils se prévalent des motifs du jugement.

Ils exposent ainsi qu'au jour du décès de [J] [U], l'association n'avait pas la capacité de recevoir un legs, sa reconnaissance d'utilité publique n'étant intervenue que par décret du 5 mars 1958, que [J] [U] n'a jamais exprimé la volonté de lui faire une donation ou un legs, le bail emphytéotique entraînant le paiement d'un loyer et des obligations lourdes pour le locataire, et que Mme [N] n'a pas exprimé sans ambiguïté son intention de régulariser un legs verbal de son père entaché de nullité quant à la forme et que l'association était dans l'incapacité de recevoir de son vivant.

Ils critiquent la nouvelle attestation, manuscrite, de Mme [P]- née en 1925- qui diverge de l'attestation initiale aux côtés de Mme [L] et qui est moins explicite sur la prétendue volonté de M. [U].

Ils s'étonnent également qu'elle ait pu connaître, à 21 ans, les volontés et les données juridiques de la convention de 1946.

Ils relèvent qu'elle fait état d'une simple confidence reçue de Mme [N].

Ils estiment cette attestation, au surplus non conforme à l'article 202 du code de procédure civile, insuffisante et soulignent qu'elle ne contient pas une relation de faits auxquels elle a assisté ou qu'elle a constatés personnellement.

Ils ajoutent qu'elle est imprécise sur les conditions de cette confidence.

Ils font valoir que l'association prétend que Mme [N] aurait délivré un legs verbal de son père contre les termes d'un bail emphytéotique notarié, contre les termes exprès de la succession de M. [U] où figure le bien comme non légué et transmis aux héritiers directs et contre les termes exprès de l'acte du 7 mars 1961 aux termes duquel elle fait clairement donation à l'association L'Essor de la propriété.

Ils relèvent que, dans cet acte, l'association a accepté cette donation sans prétendre recevoir ainsi l'exécution d'un legs verbal de M. [U].

Ils admettent que, malgré l'article 971 du code civil, un legs verbal a été validé lorsqu'il procède de l'exécution d'une obligation naturelle mais soulignent que Mme [N] a choisi de son vivant et de manière tout à fait personnelle de régulariser une donation au bénéfice de l'association sur un bien dont elle avait hérité, pour lequel elle a acquitté des droits et qui est rentré dans son patrimoine.

Ils soulignent également qu'elle s'est appauvrie d'un bien à titre personnel.

Ils en concluent que l'acte constitue une donation de son vivant, ouvrant droit à une action en réduction selon les conditions de la loi, dans l'hypothèse où cette donation porte atteinte à la réserve.

Ils affirment que, qu'il ait été inspiré par une générosité propre ou par une générosité inspirée de son père, doublée de la sienne, cet acte ne peut permettre à l'association d'invoquer un legs dont elle n'a jamais sollicité la délivrance, notamment au moment du décès de M. [U] car elle n'en avait pas la capacité.

Ils soutiennent en outre que l'association est irrecevable à revendiquer un legs verbal de M. [U] l'action étant à tout le moins prescrite.

Ils relèvent qu'elle ne l'a pas invoquée du vivant de Mme [N] alors que les parties étaient en pourparlers.

Ils concluent que le legs verbal aurait été nul en application de l'article 941 du code civil et impossible à exécuter en l'absence de capacité du légataire et, donc, que la dernière volonté prétendue du défunt n'a pas pu se nover en obligation naturelle et se transformer en obligation civile au jour de son décès.

Ils rappellent que Mme [N] est restée propriétaire du bien, en a perçu les loyers et a payé des impôts.

Ils relèvent qu'au bout de cinq ans, trois ans après que l'association a acquis la capacité de recevoir, elle a décidé de sa donation.

Ils déclarent qu'elle n'a jamais indiqué qu'elle considérait avoir l'obligation civile de le faire.

Enfin, ils exposent qu'en application de l'article 1341 ancien du code civil - et de l'article 1359 actuel- il ne peut être prouvé, contre un écrit établissant un acte juridique, que par un autre écrit.

Ils en concluent que la preuve par témoignage est exclue face au bail et à la donation, deux actes notariés «'parfaitement clairs'» sur la volonté de leur auteur.

Ils soutiennent enfin que le juge n'a pas pouvoir de requalifier un acte, lorsque les termes de la convention sont clairs et précis et ne peut dénaturer les obligations qui en résultent et modifier les stipulations qu'il renferme et citent un arrêt prononcé en matière de donation.

Ils ajoutent que la requalification de la donation est d'autant moins possible qu'elle a fait l'objet d'une autorisation donnée par le préfet [Localité 18] le 7 mai 1962 sous la condition que le bien soit affecté aux besoins de l'[Établissement 1].

S'agissant de l'atteinte à la réserve, ils relèvent que l'association n'a pas interjeté appel de la décision en ce qu'elle a rejeté une demande de sursis à statuer dans l'attente de communication de pièces.

Ils contestent les moyens fondés sur la minoration du patrimoine de la défunte et sur l'existence de libéralités auxquelles elle aurait procédé de son vivant.

Ils se prévalent des termes du jugement.

Les intimés rappellent qu'aucune disposition testamentaire ne peut modifier les droits des héritiers réservataires, tels qu'ils résultent de la loi française, et citent les articles 912, 913, 921, 922, 924, 924-1, 924-2 et 928 du code civil.

Ils font également valoir, citant des arrêts de la Cour de cassation, que lorsque le bien donné, à l'origine de l'action en réduction, est donné à bail lors de la disposition entre vifs, il est estimé libre au jour où il a été donné si le donataire est le locataire, la libéralité emportant un effet extinctif par la confusion entre la qualité de bailleur et de preneur qui s'opère au jour de la libéralité.

Ils relèvent qu'ainsi, lorsqu'un bien est attribué à un des co-partageants fermiers l'attribution se fait en valeur libre et que la valeur du bien donné au jour de la donation est celle de la pleine propriété d'un bien libre de tout bail, même lorsque le donataire bénéficiait d'un bail au jour de la donation.

Ils affirment que le tribunal a procédé à la reconstitution du patrimoine de la défunte.

Concernant les donations rapportées, ils font état, outre celle objet du litige, de la donation-partage de la nue-propriété de l'immeuble situé [Adresse 7] vendue au prix de 292.740,46 euros, somme perçue par l'usufruitier nonobstant ses droits.

Ils contestent que cette valeur puisse se cumuler avec l'usufruit car ils n'ont jamais bénéficié de l'extinction de l'usufruit, le bien ayant été vendu antérieurement.

Ils excipent du jugement aux termes duquel l'évaluation en pleine propriété du bien donné en nue-propriété ne peut s'expliquer que dans la mesure où l'usufruit que le donateur s'est réservé s'éteint par effet de son décès et qu'ainsi, le bénéficiaire de la donation a bien réuni, au jour du décès, la pleine propriété.

Ils soulignent que tel n'est pas le cas, l'immeuble ayant été vendu avant que l'usufruit ne s'éteigne.

Ils estiment non transposable l'arrêt de la Cour de cassation du 28 septembre 2001, le donataire ayant alors réuni entre ses mains la pleine propriété du bien qui ne lui avait été donné qu'en nue-propriété.

Ils rappellent que le rapport prévu à l'article 922 n'est pas différent du rapport successoral de droit commun prévu par les articles 843 et suivants du code civil et font valoir que ne peut être rapporté que ce qui a été effectivement donné et que la réunion de l'usufruit à la nue-propriété ne peut se faire si le donataire n'en a jamais bénéficié.

Ils font également état de la somme de 7.622,45 euros correspondant à la valeur du terrain dit « [Localité 10] », parcelle donnée à M. [J] [N].

Ils réfutent toute dissimulation.

Ils reconnaissent que Mme [N] a hérité de son père d'un patrimoine important soit un appartement [Adresse 9] et une importante épargne mais pas des toiles de maître.

Ils exposent qu'elle en a intégralement disposé à titre onéreux notamment en faisant l'acquisition d'un appartement à son seul nom en 1959, [Adresse 9], appartement revendu en 1995 pour acquérir un nouveau domicile [Adresse 8], en 2001.

Ils estiment sans incidence que ce domicile ait été constitué de deux lots et qu'il ait pu être revendu en deux lots.

Ils ajoutent qu'elle a revendu l'appartement de son père dans l'immeuble [Adresse 9], [Adresse 10] et [Adresse 11], pour 2.500.000 francs en 1976.

Ils affirment qu'après la vente des biens situés [Adresse 8], les consorts [N]- âgés- n'ont racheté aucun bien pour se loger, Mme [N] étant devenue locataire à compter de 2001.

Ils indiquent qu'au moyen du prix de vente, ils n'ont acquis, pour 343.010 euros outre frais soit pour 420.241 euros, que le bien situé [Adresse 7] considéré comme un placement.

Ils affirment que leur mère a consommé à titre onéreux l'intégralité de l'héritage de son père.

Ils font valoir qu'il résulte des actes et en particulier de la convention de quasi usufruit de 2008, qu'aucune autre donation n'a été faite au bénéfice des héritiers et que les difficultés financières de Mme [N] ne sont donc pas consécutives à des arrangements qu'elle aurait eus à titre gratuit avec ses enfants.

Ils infèrent de la déclaration fiscale émise en Suède que la défunte n'était assujettie à aucune fiscalité en l'absence d'actif subsistant en Suède.

Ils ajoutent qu'elle n'a bénéficié au décès de son époux que d'un capital décès pour 50.742 euros.

Ils affirment que son époux n'avait aucune fortune et que ses affaires ont été un total échec.

Ils indiquent que les actifs de la Sa Scarntech ont ainsi été cédés dans le cadre d'une procédure collective et que la Sarl Scan Tech a été radiée dès 1999 puisqu'elle n'avait plus d'objet s'agissant d'une société qui ne faisait que facturer les prestations de [E] [N] à la Sa.

Ils prétendent qu'il a investi la fortune de son épouse dans des entreprises hasardeuses au moment où il les a entreprises, qui se sont terminées par des procédures collectives.

Ils ajoutent qu'il était malade dès 1999 et qu'il a fallu faire face alors à des frais médicaux importants.

Concernant les contrats d'assurance-vie, ils exposent que leur mère a investi, sur ces contrats, le capital décès de son époux -50.000 euros- et la somme perçue en 2004 de la vente du bien de la [Adresse 7] soit 350.000 euros.

Ils contestent donc l'existence de souscriptions avec des primes pour chaque enfant de 393.606 euros et font état d'une souscription unique pour trois bénéficiaires en cas de décès.

Ils déclarent que ces contrats ont fait l'objet de rachats successifs par Mme [N] et qu'ils n'ont perçu que 436 euros chacun après son décès.

Ils affirment justifier aux termes de leur pièce n°22 communiquée sous un intitulé inexact, rectifié par leurs conclusions, de la déclaration au décès de M. [N] du capital versé à sa femme et de la déclaration au décès de Mme [N], de ce qui a été versé à ses trois fils.

Ils affirment également justifier de la comptabilité de Mme [N] qui, entre 2004 et son décès en 2013, a consommé 689.384 euros pour vivre, dont 260.727 euros de loyers.

Ils relèvent que cette somme correspond à 5.744 euros par mois pour une personne qui avait besoin d'aide à domicile, ce qui est conforme au train de vie

Ils soulignent que la totalité des assurances ont été rachetées par elle et qu'elle a en outre été aidée par ses fils qui ont alimenté ses comptes, sans que cela ne corresponde à un produit d'assurance dont ils auraient bénéficié.

Ils déclarent qu'ils n'ont bénéficié au décès de M. [N] d'aucun capital décès.

Ils contestent donc le caractère exagéré de ces placements en assurances-vie qui n'ont permis aucune mutation de deniers en dehors du capital décès de M. [N] au bénéfice de son épouse à concurrence de 50.000 euros et au moment du décès de Mme [N] de 436 euros à chacun de ses trois enfants.

Ils estiment, avec le tribunal, que les rachats successifs excluent la notion de placement exagéré.

Ils affirment que les contrats d'assurance-vie ont constitué non des donations déguisées mais un contrat qui constituait pour celle qui l'a souscrit une réelle opération patrimoniale à son bénéfice, préservant son épargne et lui permettant de racheter celle-ci au fur et à mesure de ses besoins.

Ils estiment dépourvue d'objet la critique de l'appelante sur l'érosion monétaire retenue par le tribunal surtout en ce qu'elle s'appuie sur l'évolution de la valeur du bien immobilier donné.

Ils font valoir que Mme [N] n'a conservé aucun bien immobilier et que l'évolution de la valeur du bien donné tient à la progression du marché immobilier.

Ils relèvent que, concernant la [Adresse 7], elle a investi avec son époux 420.241 euros en 2001 et l'a revendu en 2004 pour un prix total, payé entre 2004 et 2006, de 365.925 euros.

S'agissant de l'indemnité de réduction, ils rappellent que le tribunal a ordonné une expertise qui a justement pour objet de déterminer la valeur du bien au jour de l'ouverture de la succession, en l'état où le bien se trouvait au moment où il a été donné.

Ils estiment donc que les critiques du rapport de M. [R] sont sans objet.

Ils réitèrent que dans le cadre d'une action en réduction et de la détermination de l'indemnité d'occupation, le bien doit être considéré comme libre de toute occupation au jour de la donation, dès lors que le preneur en est devenu propriétaire.

Ils relèvent que l'appelante sollicite la modification de la mission de l'expert alors qu'il a déposé son rapport et considèrent cette demande irrecevable.

Ils lui font grief d'omettre que c'est la confusion de bénéficiaire avec la qualité de preneur qui éteint les droits du preneur.

Ils affirment ainsi que si l'association avait acquis à titre onéreux du fait de la confusion de sa qualité d'acquéreur et de preneur, il n'y aurait pas eu lieu à décote au regard du bail emphytéotique.

Ils affirment qu'elle a donc bénéficié lors de la donation d'une donation d'un bien libre de tout bail emphytéotique puisqu'elle ne pouvait se louer à elle-même.

Ils font valoir que le seul fait qu'il lui ait été transféré la qualité de propriétaire a éteint le bail.

Ils prétendent que la référence à l'état du bien au jour de la donation concerne non l'état juridique mais l'état des lieux.

Ils concluent qu'il doit être fait abstraction du bail emphytéotique.

**************************

Sur la loi applicable à l'action des consorts [N] et la compétence de la juridiction pour en connaître

Considérant que le litige présente des éléments d'extranéité dans la mesure où le dernier domicile connu de [V] [U] veuve [N] était situé en Suède et qu'elle disposait de la nationalité suédoise ;

Considérant que, comme l'a relevé le tribunal, il appartient dès lors au juge, même d'office, de s'assurer de sa compétence pour connaître du litige et de la loi qui y est applicable étant souligné que les parties ont développé leurs moyens à cet égard';

Considérant que la désignation des héritiers réservataires- et le montant de leur réserve- est déterminée par la loi successorale ; que celle-ci s'applique donc également à la réduction des libéralités qui excèderaient la quotité disponible ;

Considérant que [V] [U] veuve [N] est décédée le [Date décès 1] 2013 soit avant l'entrée en vigueur du règlement (UE) n° 650/2012 du 4 juillet 2012'; que celui-ci n'est donc pas applicable ;

Considérant qu'il convient, dès lors, afin de déterminer la loi applicable au litige, de distinguer la succession mobilière de la succession immobilière ;

Considérant qu'eu égard au dernier domicile de la défunte, seule la loi suédoise est applicable à sa succession mobilière et le juge suédois seul compétent pour en connaître, peu important que ses biens mobiliers soient situés en France ou à l'étranger ;

Considérant que, conformément à l'article 3 du code civil, les successions immobilières sont soumises à la loi de situation de l'immeuble ; que la loi française s'applique à la succession portant sur les immeubles situés en France ;

Considérant que le seul immeuble situé en France est celui ayant fait l'objet de la donation prétendue à l'association l'Essor ;

Considérant que le litige porte sur une action en réduction de la donation prétendue d'un bien immobilier ;

Considérant qu'aux termes de l'article 922 du code civil, « les biens dont il a été disposé par donation entre vifs sont fictivement réunis » à la masse successorale ;'

Considérant que cette disposition vise la réunion des « biens » ; qu'est réuni à la masse le bien donné ; que figurent donc, fictivement, des droits immobiliers ;

Considérant qu'il résulte ainsi du mécanisme même de l'action en réduction que doit être prise en compte la nature du bien qui a fait l'objet de la donation ;

Considérant que le paiement, prévu par l'article 924 du code civil, d'une indemnité intervient postérieurement au constat d'une atteinte à la réserve ; que le caractère mobilier de ce droit de créance est donc sans emport sur le mécanisme lui-même soit sur la réunion fictive à la masse du bien ayant fait l'objet de la donation ;

Considérant, en conséquence, que, s'agissant de la prétendue donation d'un immeuble, l'action en réduction est soumise à la loi de situation de l'immeuble qui aurait été donné ;

Considérant que la loi française est donc applicable'en l'espèce ;

Considérant que le juge français a dès lors compétence pour connaître du litige ;

Considérant que les consorts [N] ont justement saisi le tribunal compétent au regard du siège de l'association, dans le département des Hauts-de -Seine ;

Sur la qualification de l'acte du 7 mars 1961

Considérant que l'acte du 7 mars 1961 énonce que [V] [U], épouse [N], « fait donation entre vifs » à l'association des biens litigieux ce que l'association accepte ;

Considérant que les termes de cet acte sont dénués d'ambigüité ; que l'acte renferme une donation ;

Considérant que la déclaration de succession de [J] [U] comprend, dans son actif, le bien ;

Considérant que ce bien a été recueilli par [V] [N] ainsi qu'il résulte des énonciations de l'acte du 7 mars 1961 ;

Considérant que [V] [N] était donc propriétaire du bien ;

Considérant que, dans leur attestation commune et dactylographiée, Mmes [L] et [P] ne font que rapporter des propos que leur aurait tenu [V] [N] mais ne prétendent nullement avoir entendu [J] [U] vouloir donner le bien à l'association'; qu'il en est de même de Mme [P] dans sa nouvelle attestation ;

Considérant que l'appelante ne verse aux débats aucune pièce de nature à démontrer que [J] [U] entendait lui donner le bien et en a été empêché par l'absence alors de la reconnaissance d'utilité publique de l'association ;

Considérant qu'il sera observé que s'il est constant qu'il souhaitait soutenir l'oeuvre sociale de l'association, il ne lui a consenti qu'un bail, certes pour une durée de 90 ans, mais moyennant le versement d'un loyer ;

Considérant que les deux témoignages de Mmes [P] et celui de Mme [L] ne font que confirmer la volonté de [V] [N] de soutenir, comme son père, l'oeuvre de l'association ;

Considérant qu'ils sont insuffisants à démontrer, en l'absence de toute autre pièce émanant notamment de [V] [N], que l'acte du 7 mars 1961 constitue, nonobstant ses termes précités, « l'exécution d'un legs qui avait été décidé par » [J] [U] ;

Considérant qu'il n'est donc pas rapporté d'éléments justifiant que cet acte soit requalifié ;

Considérant qu'il constitue dès lors une donation faite par [V] [N] à l'association ;

Considérant que, conformément à l'article 920 du code civil, cette donation est réductible si elle excède la quotité disponible ;

Considérant que doit donc être déterminée la masse successorale ;

Sur la masse

Sur les autres donations consenties par la défunte

Considérant qu'il résulte des pièces produites par les intimés que, comme l'a retenu le tribunal, ils ont recueilli au décès de leur mère environ 19 000 couronnes suédoises et 620 euros au titre d'avoirs et liquidités bancaires dont elle était titulaire en Suède et en France, outre chacun la somme de 434 euros au titre d'assurance - vie qu'elle avait souscrit auprès de la société Cardif et dont ils ont été désignés bénéficiaires ;

Considérant que [V] [N] a fait donation de la nue-propriété d'une parcelle de terre située lieudit « [Localité 10] » à son fils [J], qui doit être incluse à la masse, pour une valeur de 7 622,45 euros au jour de l'ouverture de la succession et en considération de l'état de ce bien au jour où il a été donné ;

Considérant que doit être également réunie fictivement à la masse de calcul la donation qu'elle a consentie en nue-propriété à ses trois enfants de l'immeuble sis [Adresse 7] ;

Considérant qu'il résulte de l'article 922 du code civil que le rapport d'un bien donné en nue-propriété doit se faire en pleine propriété ;

Mais considérant que, comme l'a relevé le tribunal, cette règle ne s'explique que dans la mesure où l'usufruit que le donateur s'est réservé s'éteint par l'effet de son décès ;

Considérant que tel n'est pas le cas en l'espèce dans la mesure où les donataires n'ont jamais réuni entre leurs mains la pleine propriété de ce bien, l'immeuble ayant été vendu avant que l'usufruit ne s'éteigne ;

Considérant qu'au regard du prix de vente et de la valeur alors de l'usufruit, ce bien devra être intégré à la masse de calcul pour une valeur de 292 740,46 euros ;

Sur les contrats d'assurance-vie

Considérant qu'il résulte de l'article L 132-13 du code des assurances que les sommes versées à titre de prime sur les contrats d'assurance-vie ne sont pas soumises à rapport ou réduction «'à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés'» ;

Considérant que l'excès manifeste des primes s'apprécie au moment du versement, au regard de l'âge ainsi que des situations patrimoniale et familiale du souscripteur';

Considérant que M. et Mme [N], nés en 1908 et 1916, ont vendu le 11 janvier 2001 deux appartements situés [Adresse 8] au prix de 4.900.000 francs soit 747.000 euros ;

Considérant que M. [N] a versé une somme de 222.606, 57 euros sur un contrat d'assurance-vie dont le bénéficiaire était [V] [N] ;

Considérant que cette prime n'était pas manifestement exagérée au regard de sa situation patrimoniale voire de son âge ; que la bénéficiaire n'a perçu que la somme de 50.747, 17 euros à son décès ; que ce contrat a donc fait l'objet de rachats successifs ; que ceux-ci témoignent, sous réserve des développements ci-dessous, du caractère non manifestement exagéré de la prime versée ;

Considérant que les intimés ont versé aux débats trois certificats de non-exigibilité de l'impôt établis après la déclaration de succession de [V] [N] au titre des sommes perçues par chacun d'eux - 436 euros - provenant de contrats d'assurance-vie dont deux portent un numéro identique ; que la date de souscription est la même ainsi que le montant versé, 393.606 euros ;

Considérant qu'ils n'ont, toutefois, pas versé aux débats, nonobstant les demandes de l'appelante, de pièces permettant de déterminer si trois contrats distincts ont été ouverts le même jour ou si un seul contrat a été souscrit ;

Considérant que, même en retenant la souscription de trois contrats, ces contrats d'assurance-vie ont été conclus plusieurs années avant le décès de leur mère qui a procédé à des rachats successifs, ses enfants ne percevant que 436 euros chacun ;

Considérant que ces rachats successifs démontrent l'utilité pour elle de ces contrats et de ces versements ;

Considérant qu'ils témoignent également, sous la réserve précitée, du caractère non manifestement exagéré des primes versées ;

Considérant que ces rachats ne peuvent en effet être pris en considération pour apprécier le caractère des primes que si ces fonds n'ont pas été destinés aux enfants ;

Considérant que l'association ne verse aux débats aucune pièce de nature à établir que les sommes perçues ont permis une « transmission masquée » de son patrimoine ;

Considérant, en outre, que le revenu imposable des époux [N] s'est élevé à 17.814 euros en 2003'; que [V] [N] n'a pas été imposable en 2005'; que ses avoirs en Suède étaient modestes- environ 2.000 euros- ainsi qu'il résulte de l'inventaire successoral ;

Considérant qu'après la vente de leurs biens, les époux ont été locataires, [V] [N] le demeurant en France jusqu'en 2012';'

Considérant qu'elle avait donc de faibles ressources, qu'elle devait s'acquitter d'un loyer et qu'elle devait faire face aux besoins de la vie courante ;

Considérant que ces rachats ont donc été exercés afin de subvenir à ses dépenses ;

Considérant qu'ils démontrent ainsi, comme le tribunal l'a relevé, que les sommes qui ont été placées sur ces contrats d'assurance sur la vie n'ont pas été versées par la défunte dans l'intention de s'en dépouiller de manière définitive et irrévocable et ont eu une utilité pour elle, lui permettant de se procurer un revenu supplémentaire et de constituer une épargne afin de subvenir à ses besoins ;

Considérant que le caractère manifestement exagéré des primes n'est pas davantage établi, les époux ayant procédé à la vente de divers biens et ayant décidé de consacrer une partie du produit des cessions à ces contrats -dont l'utilité a été démontrée- et l'autre à un investissement immobilier [Adresse 7] ;

Considérant qu'il ne peut, à cet égard, compte tenu des rachats effectués, résulter des versements effectués par les enfants au profit de leur mère que ces primes étaient exagérées ;

Considérant que la demande tendant au rapport de ces primes sera donc rejetée ;

Sur la dissimulation de patrimoine

Considérant que [V] [N] a hérité d'un patrimoine immobilier et mobilier conséquent suite au décès de son père, survenu en 1956, la déclaration de succession produite aux débats retenant un actif net de succession lui revenant, après paiement des droits, d'une valeur de 99 019 865 anciens francs';

Considérant qu'elle a acquis en 1959 un appartement situé [Adresse 9] qu'elle a revendu pour acheter, avec son époux, les biens situés [Adresse 8]';

Considérant qu'elle a également revendu l'appartement ayant appartenu à son père en 1976 pour un prix de 2.500.000 francs';

Considérant qu'il n'est ni allégué ni justifié qu'elle a disposé sa vie durant d'une activité professionnelle lui procurant des gains et des revenus constants';

Considérant, également, que les déclarations de revenus qui ont été produites aux débats démontrent que le couple disposait d'un revenu modeste';

Considérant que le patrimoine dont a hérité [V] [N] de son père a ainsi été affecté à ses besoins personnels étant observé que les retraits provenant des contrats d'assurance-vie ont été effectués à partir de 2001 et qu'elle a hérité du patrimoine de son père en 1956';

Considérant qu'une société de son époux a fait l'objet d'une procédure collective qui a donné lieu à un jugement du tribunal de commerce de Bobigny en date du 20 novembre 2000 arrêtant un plan de cession'; qu'une autre société constituée par lui a été radiée';

Considérant qu'aucun élément de nature à établir qu'il disposait éventuellement d'un patrimoine - qui, à son décès, aurait été transmis à son épouse- n'est versé aux débats'; qu'en l'absence de la moindre pièce de nature à étayer ses allégations, l'appelante n'est pas fondée à solliciter la production de documents complémentaires y compris des testaments non mis en 'uvre ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments la preuve de l'absence de dissimulation ou de minoration du patrimoine hérité et, donc, de l'absence de donations au profit des intimés ;

Considérant que les demandes formées à ce titre seront rejetées ;

Sur la valeur des biens et la prise en compte du bail emphytéotique

Considérant que l'association a interjeté appel du jugement notamment en ses dispositions relatives à l'expertise confie à M. [C] ; qu'elle est donc recevable, nonobstant le dépôt du rapport de l'expert, à demander que sa mission soit modifié ;

Considérant, concernant l'état du bien au jour de la donation, que l'association bénéficiait lors de celle-ci d'un bail emphytéotique sur ce bien consenti depuis 1946';

Considérant que la donation a eu pour effet immédiat d'éteindre ce bail par confusion des qualités de propriétaire-bailleur et de locataire ;

Considérant qu'il doit dès lors être considéré comme libre de toute occupation au jour de la donation ;

Considérant que l'expert ne doit donc pas tenir compte du bail emphytéotique pour apprécier l'état du bien au jour de la donation ;

Sur les autres demandes

Considérant que le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions ;

Considérant que l'appelant devra payer la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ; que, compte tenu du sens du présent arrêt, sa demande aux mêmes fins sera rejetée ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition ;

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant :

CONDAMNE l'association L'Essor à payer à MM. [J], [O] et [C] [N] la somme unique de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE les demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE l'association L'Essor aux dépens,

AUTORISE la SCP Reynaud et Associés à recouvrer directement à son encontre les dépens qu'elle a exposés sans avoir reçu provision ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Monsieur Alain PALAU, président, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 18/03685
Date de la décision : 15/10/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°18/03685 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-10-15;18.03685 ?
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