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25/09/2019 | FRANCE | N°17/01175

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15e chambre, 25 septembre 2019, 17/01175


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



15e chambre





ARRÊT N°





CONTRADICTOIRE





DU 25 SEPTEMBRE 2019





N° RG 17/01175







AFFAIRE :





[N] [I]





C/





Me [S] [R] - Commissaire à l'exécution du plan de SAS AZURIAL

...



Syndicat ANTI-PRÉCARITÉ





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Septembre 2012 par l

e Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Saint Germain

N° Section : Commerce

N° RG : 11/00160



Expéditions exécutoires et expéditions certifiées conformes délivrées à :





Me Charles ROMINGER



Me Hugues BERRY



Pôle Emploi





le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 25 SEPTEMBRE 2019

N° RG 17/01175

AFFAIRE :

[N] [I]

C/

Me [S] [R] - Commissaire à l'exécution du plan de SAS AZURIAL

...

Syndicat ANTI-PRÉCARITÉ

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Septembre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Saint Germain

N° Section : Commerce

N° RG : 11/00160

Expéditions exécutoires et expéditions certifiées conformes délivrées à :

Me Charles ROMINGER

Me Hugues BERRY

Pôle Emploi

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [N] [I]

[Adresse 2]

[Localité 7]

né le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 18] (Mali), de nationalité Française

Représenté par Me Charles ROMINGER, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E2005

APPELANT

****************

Me [R] [S] ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de SAS AZURIAL

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représenté par Me Hugues BERRY, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 70

SAS AZURIAL venant aux droits de la SAS L'UNION FRANCE ENTRETIEN, dite LFE

[Adresse 10]

[Adresse 10]

[Localité 5]

N° SIRET : 519 881 791

Représentée par Me Hugues BERRY, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 70

INTIMÉES

****************

Syndicat ANTI-PRÉCARITÉ

[Adresse 3]

[Localité 9]

Représentanté par Me Charles ROMINGER, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E2005

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 mai 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Maryse LESAULT, Présidente et Jean-Yves PINOY, conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Maryse LESAULT, Présidente,

Madame Isabelle VENDRYES, Présidente,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Carine DJELLAL,

FAITS ET PROCÉDURE,

M. [N] [I] (ci-après M. [I]) a été engagé le 2 juin 1994 en qualité d'agent de propreté par la SA PROPRETÉ HYGIÈNE MAINTENANCE, avec des missions alors situées dans [Localité 16] intra muros.

Son contrat de travail a été transféré à la société L'UNION FRANCE ENTRETIEN dite LFE le 1er janvier 2008, par suite d'un changement de prestataire dans l'obtention du marché sur le site.

La SARL LFE employait plus de onze salariés et la convention collective applicable est celle des entreprises de propreté.

Le dernier salaire brut était de 1 289,19 euros.

M. [I] s'est vu affecter successivement sur plusieurs sites d'île de France ([Localité 17], [Localité 14], [Localité 12], [Localité 8]) dans les termes de la clause de mobilité de son contrat.

Il avait été convoqué à un entretien préalable en vue de licenciement une première fois le 16 octobre 2008 sans que le licenciement ne soit alors notifié.

Il a engagé plusieurs instances :

- le 16 décembre 2008 devant le juge des référés du CPH de Saint Germain en Laye pour paiement de rappels de salaires, dommages-intérêts et indemnités diverses. L'ordonnance rendue le 13 mars 2009 a été infirmée par arrêt du 26 octobre 2010 sauf sur le paiement de 15,29 euors à titre de rappel de prime d'expérience.

- Les 14 mai 2009 et 9 avril 2010 respectivement les CPH de saint Germain en Laye et de Longjumeau

Le 13 février 2009 une retenue sur salaire avait été notifiée au salarié pour des faits contestés.

Par lettre du 3 mars 2009 M. [I] a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable à une mesure de licenciement.

Par lettre recommandée du 26 mars 2009 M. [I] a été licencié pour faute grave aux motifs d'un arrêt de travail injustifié pendant 20 minutes le 3 mars 2009 de 10h à 10h20, et d'une mauvaise exécution de ses tâches de travail.

M. [I] et le syndicat ANTI- PRÉCARITÉ ont saisi le Conseil de prud'hommes afin de solliciter le relevé de la décision de radiation prononcée le 3 mars 2011 par le Conseil de céans et condamner la SARL L'UNION FRANCE ENTRETIEN sur plusieurs chefs de demande.

Par jugement du 20 septembre 2012, le Conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye a :

- dit que la faute grave n'est pas caractérisée mais que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- condamné la SARL L'UNION FRANCE ENTRETIEN à payer à M. [I] les sommes suivantes :

- rappel de salaire août 2008 : 17 heures 51 : 148,81 euros,

- congés payés afférents : 14,88 euros,

- rappel de prime d'expérience : 7,44 euros,

- congés payés afférents : 0,74 euros,

- rappel de salaire septembre 2008 : 297,50 euros,

- congés payés afférents : 29,75 euros,

- rappel de prime d'expérience : 14,88 euros,

- congés payés afférents : 1,48 euros,

- rappel de salaire octobre 2008 : 1 040,66 euros,

- congés payés afférents : 104,06 euros,

- rappel de prime d'expérience : 52,03 euros,

- congés payés afférents : 5,20 euros,

- rappel de salaire novembre 2008 : 1 289,20 euros,

- congés payés afférents : 128,92 euros,

- rappel de prime d'expérience : 64,46 euros,

- congés payés afférents: 6,45 euros,

- rappel de salaire janvier 2009 : (8 jours sur 31) : 349,53 euros,

- congés payés afférents : 34,95 euros,

- 500 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- 1.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné la remise des bulletins de salaires conformes à la présente décision sous astreinte de 50 euros par jour, quinze jours à compter de la notification de la présente décision, le Conseil se réservant le droit de liquider ladite astreinte,

- débouté M. [I] du surplus de ses demandes,

- débouté le syndicat ANTI-PRÉCARITÉ de ses demandes,

- débouté la SARL L'UNION FRANCE ENTRETIEN de sa demande,

- condamné la SARL L'UNION FRANCE ENTRETIEN à payer les intérêts de droits sur les salaires et éléments de salaire à compter du 19 mai 2009 date de réception par le défendeur de la convocation à l'audience du bureau de conciliation et du prononcé pour le surplus,

- rappelé que par application de l'article R. 1454-28 du Code du travail, l'exécution provisoire est de droit pour la remise des documents et pour les indemnités énoncées à l'article R. 1454-14 dans la limite de neuf mois de salaires et fixé pour ce faire la moyenne des trois derniers mois à la somme de 1.3400 euros,

- condamné la SARL L'UNION FRANCE ENTRETIEN aux éventuels dépens de l'instance.

Par déclaration du 28 septembre 2012, M. [I] a interjeté appel du jugement.

Par ordonnance du 31 mars 2014, la cour d'appel de Versailles a :

- ordonné la radiation de l'affaire et dit qu'elle sera retirée du rang de celles en cours,

- dit que les parties ne pourront procéder à la réinscription de l'affaire que sur justification de l'exécution des diligences suivantes :

- dépôt des demandes au soutien de l'appel de la décision critiquée,

- justification de la notification à l'adversaire des demandes ainsi présentées.

Suite à un premier rétablissement, par arrêt du 11 avril 2016, la cour d'appel de Versailles a :

- ordonné la radiation de l'affaire et dit qu'elle sera retirée du rang de celles en cours,

- dit que les parties ne pourront procéder à la réinscription de l'affaire que sur justification de l'exécution des diligences suivantes : dépôt des demandes au soutien de l'appel de la décision critiquée, et justification de la notification à l'adversaire des demandes ainsi présentées.

Par conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, M. [I], appelant, demande à la cour de :

1. Confirmer les condamnations de l'employeur à lui verser les rappels de salaires suivants :

- rappel de salaire août 2008 : 17 heures 51 :148,81 euros,

- congés payés afférents : 14,88 euros,

- rappel de prime d'expérience : 7,44 euros,

- congés payés afférents : 0,74 euros,

- rappel de salaire septembre 2008 : 297,5 euros,

- congés payés afférents : 29,75 euros,

- rappel de prime d'expérience : 14,88 euros,

- congés payés afférents : 1,48 euros,

- rappel de salaire octobre 2008 : 1 040,66 euros,

- congés payés afférents : 104,06 euros,

- rappel de prime d'expérience : 52,03 euros,

- congés payés afférents : 5,20 euros,

- rappel de salaire novembre 2008 : 1 289,20 euros,

- congés payés afférents : 128,92 euros,

- rappel de prime d'expérience : 64,46 euros,

- congés payés afférents : 6,45 euros,

- rappel de salaire janvier 2009 : 349,53 euros (8 jours sur 31),

- congés payés afférents : 34,95 euros,

- rappel de prime d'expérience : 17,48 euros,

- congés payés afférents : 1,74 euros,

2. Nullité du licenciement :

- constater la nullité du licenciement et la poursuite du contrat de travail,

- condamner l'employeur au versement de la somme provisionnelle de 113 588,84 euros (avril 2009 - janvier 2017 soit 1 494,59 x 76 mois), outre 11 358,88 euros de congés payés,

3. Licenciement sans cause réelle et sérieuse :

- condamner l'employeur au versement de la somme de 18 mois de salaire à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit 26 902,62 euros,

4. Sur la clause de mobilité :

- déclarer la clause de mobilité inconstitutionnelle et à tout le moins inconventionnelle,

- à titre subsidiaire la déclarer nulle,

- à titre infiniment subsidiaire déclarer sa mise en 'uvre abusive,

- enjoindre l'employeur, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard de l'affecter à un poste sur [Localité 16] ou proche de son domicile et ce, dans le respect de l'avis médical du 25 janvier 2008,

- dommages et intérêts pour utilisation abusive de la clause de mobilité : 15 000 euros,

- dommages et intérêts pour atteinte excessive à la vie privée et familiale : 10 000 euros,

- dommages et intérêts pour absence de contrepartie financière : 10 000 euros,

5. Autres demandes indemnitaires :

- dommages et intérêts pour non paiement abusif du salaire : 10 000 euros,

- travail dissimulé : 8 967,54 euros (6 mois),

- dommages et intérêts pour non-respect de l'avis médical du 25 janvier 2008 : 5 000 euros,

- préjudice moral : 20 000 euros (non paiement de salaires, difficultés financières, privation de vacances dans son pays d'origine),

6. Demandes accessoires :

- délivrance immédiate de bulletins de salaire rectifiés depuis la reprise du marché,

- délivrance certificat de travail rectifié,

- chaque document sous peine d'astreinte provisionnelle de 150 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision,

- réserve de compétence pour la liquidation des astreintes prononcées,

- article 700 du Code de procédure civile & art. 37 alinéa 2 loi 1991 : 5.000 euros en première instance et 4 000 euros en cause d'appel,

- intérêts au taux légal sur toutes les demandes en paiement des sommes d'argent à compter de la date de la première demande,

- capitalisation des intérêts,

- condamnation de l'employeur aux entiers dépens,

- article 515 Code de procédure civile totalité décision (exécution provisoire intégralité de la décision),

7. Demandes du syndicat ANTI-PRÉCARITÉ, partie intervenante :

- condamner l'employeur au paiement des sommes suivantes :

- dommages et intérêts pour atteinte aux intérêts collectifs de la profession : 5 000 euros,

- sur l'article 700 du Code de procédure civile : 2 000 euros TTC,

- intérêts au taux légal sur toutes les demandes en paiement des sommes d'argent à compter de la date de la première demande,

- capitalisation des intérêts,

- condamnation de l'employeur aux entiers dépens,

- article 515 Code de procédure civile totalité décision (exécution provisoire intégralité de la décision).

Par conclusions déposées au greffe et développées à l'audience la société AZURIAL venue aux droits de la société UNION FRANCE ENRETIEN dite LFE demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné la société AZURIAL à payer la somme de 500 € à titre de « dommages et intérêts pour harcèlement moral »,

Statuant à nouveau,

-débouter Monsieur [I] de l'ensemble de ses demandes,

-débouter le syndicat Anti précarité de l'ensemble de ses demandes,

-condamner solidairement Monsieur [I] et le Syndicat Anti-précarité à verser à la société AZURIAL la somme de 1 500 Euros sur le fondement de l'article 700 du CPC,

-condamner Monsieur [I] aux entiers dépens de |'instar1ce.

Au soutien de ces écritures la société fait valoir qu'il n'y a pas eu défaillance dans le paiement des salaires , les rappels litigieux ayant porté sur une période où le salarié n'avait pas exécuté certaines missions.

Elle conclut par ailleurs à l'irrecevabilité du syndicat Anti-Précarité en raison selon elle de l'absence démontrée de ses qualité et/ou intérêt à agir.

S'agissant des procédures concernant d'autres salariés, évoquées par M. [I] , la société indique qu'il ne faut pas faire d'amalgame entre des situations différentes.

La SCP [R] LEHERICY représentée par Me [S] [R] ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société AZURIAL a constitué le même avocat que la société AZURIAL avec indication de son intervention volontaire.

Il est renvoyé aux conclusions de l'appelant pour plus ample exposé des demandes et moyens.

MOTIFS,

I- DEMANDES DE M. [I]

1- Sur le défaut de paiement des salaires

M. [I] soutient que l'employeur doit opérer un rattrapage des salaires non versés, en contrepartie desquels il a mis sa force de travail à disposition, de sorte que le jugement doit être confirmé sur ce point. Il ajoute que le refus de l'employeur de verser les salaires dus doit être indemnisé et que cela ouvre droit à l'indemnité due au titre du travail dissimulé.

La société après avoir rappelé les nombreuses procédures et référé et au fond engagées par M. [I], a conclu à la confirmation du jugement entrepris sur ce chef de demande, déclarant l'avoir exécuté au titre de l'exécution provisoire.

Sur ce,

Dès lors que l'infirmation n'est pas sollicitée il convient de constater l'acquiescement de l'employeur à la décision rendue, qui est ainsi confirmée quant aux rappels de salaires, congés payés y afférents et primes retenues.

2- Sur la contestation de la validité de la clause de mobilité

M. [I] invoque de première part l'inconstitutionnalité et l'inconventionnalité de cette clause qui fait obstacle à la liberté du travail. Il soutient qu'en l'affectant à de multiples reprises sur des sites éloignés de son domicile, l'employeur l'a maintenu dans une situation restreignant cette liberté fondamentale. Il précise qu'il n'a, de facto, pas été en mesure d'obtenir un complément de rémunération alors même qu'aucune contrepartie financière ne lui a été versée. Il demande en conséquence à la cour de déclarer cette clause inconstitutionnelle, et à tout le moins inconventionnelle et sollicite la condamnation d'AZURIAL à l'indemniser du manque à gagner, à hauteur de 13 heures par semaine, depuis 3 ans, soit 18 055,05 euros.

M. [I] invoque de seconde part la nullité de la clause en raison de son illicéité. il fait valoir que la clause insérée à son contrat est de style, a été insérée dans tous les contrats des salariés repris par la société L'UNION FRANCE ENTRETIEN, et qu'elle n'a pas été librement discutée et consentie par lui. Il tire son caractère illicite de ce qu'elle a pour but de lui imposer un lieu de travail qui ne se trouve pas dans le secteur géographique où il fournissait jusque là sa prestation de travail, et l'oblige à changer de domicile ou, à tout le moins, de vivre éloigné de sa famille tout au long de la semaine.

Il ajoute que la validité de la clause de mobilité ne peut être qu'exceptionnelle et qu'il appartient à l'employeur qui l'invoque de rapporter la preuve que l'on se trouve dans une situation très particulière permettant de limiter les droits et libertés de l'individu proclamés par la Convention européenne et le code du travail, ce qu'il ne rapporte pas ici et confère un caractère léonin à la clause. Faisant par ailleurs référence à la mise en échec la clause de non-concurrence sur la base d'absence de contrepartie financière il demande ici que cette jurisprudence soit étendue à la clause de mobilité géographique.

M. [I] invoque enfin l'absence de limitation géographique de la clause, ce qui permet à l'employeur de se réserver la possibilité d'étendre unilatéralement les lieux d'affectation du salarié, sans respect de l'exigence de proportionnalité avec le but recherché, de sorte qu'elle ne saurait être reconnue comme valable et doit être annulée.

Il souligne l'importance du retentissement de sa mise en oeuvre en ce que les temps de transport des différentes affectations ont alourdi sa charge de travail et impacté sa vie privée et familiale, et relève l'avis médical y afférent.

La société AZURIAL se prévaut de la validité de cette clause de mobilité en rappelant qu'elle a été acceptée de façon non équivoque par M. [I] et qu'elle est définie de manière précise dans un champ d'application limité géographiquement.

Sur ce,

Pour être valable la clause de mobilité doit figurer au contrat de travail (ou dans un avenant, s'il y a lieu) qui doit être signé. Si le contrat n'est pas signé, la clause est inopposable au salarié. En application d'une clause de mobilité valablement stipulée, la mutation du salarié ne constitue pas une modification du contrat.

La clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d'application, la définition « précise » de la zone d'application n'interdisant pas de prendre en considération un espace assez vaste (le territoire national métropolitain), si l'entreprise est implantée dans différents points de cet espace et que son intérêt n'est pas contestable. En revanche, la clause indéterminée dans son étendue ne peut être élargie à l'initiative du seul employeur en fonction de l'élargissement des zones d'activité de l'entreprise. Lorsque ce dernier décide la mettre en oeuvre et de muter le salarié, la décision ne doit pas révéler de sa part, un abus ou un détournement de pouvoir et doit être dictée par l'intérêt de l'entreprise.

La clause de mobilité insérée au contrat de travail de M. [I], régulièrement signé des parties est ainsi rédigée :

« le salarié sera affecté sur un ou plusieurs chantiers de nettoyage situés soit dans la région Ile de France soit dans les départements limitrophes du département du premier lieu d'affectation. Les changements d'affectation sur les chantiers pourront être décidés par l'employeur en fonction de l'évolution de la charge de travail, des contraintes de l'organisation du travail sur les chantiers, des nécessités du travail en équipe et des besoins des clients.

Le premier lieu d'affectation est résidence [Adresse 13] ».

La Cour retient qu'en ces termes la clause de mobilité est précise et délimitée, et satisfait ainsi aux conditions requises pour sa validité.

L'argumentation du salarié sur l'étendue excessive résultant de cette clause sera écartée dès lors que l'employeur, spécialisé dans le nettoyage de sites professionnels en région Ile de France, est fondé au regard de son pouvoir d'organisation et de direction de l'entreprise, à pouvoir affecter des équipes composées de mêmes salariés auprès de ses clients sur l'espace géographique défini, sans que la spécificité de la région d' Ile de France qui bénéficie de très nombreux réseaux de transports collectifs ne représente une aire d'activité excessive. Si la potentialité d'extension aux départements limitrophes à la première affectation est contenue dans la clause, ce qui n'enlève rien à la précision et à la limitation de son étendue,force est de constater que sa mise en oeuvre n'a pas été demandée à M. [I].

La circonstance qu'après son embauche en 1994 par la SA PROPRETÉ HYGIÈNE MAINTENANCE, il ait été affecté dans des sites situés dans [Localité 16] intra muros, puis qu'à la suite du transfert de son contrat à la société L'UNION FRANCE ENTRETIEN 28 septembre 2006 il ait été affecté sur des sites extérieurs dans les conditions de la clause contractualisée ci-rappelée, ne remet pas en cause la validité de la clause, même si cela a nécessairement impacté sa vie personnelle et familiale par les temps de transports accrus qui en ont résulté.

M. [I] a été successivement affecté sur des sites suivants :

- à [Localité 12] dans l'Essonne (91) par avenant du 29 juin 1999, puis par le contrat initial de reprise par LFE en 2006,

- à [Localité 17] dans les Yvelines (78) au centre commercial Bel Air (RN10) à compter du 11 janvier 2007,

- à [Adresse 15] à compter du 10 janvier 2008

- puis à nouveau à [Localité 17] dans les Yvelines (78) au centre commercial Bel Air (RN10) à compter du 22 septembre 2008,

- et à [Localité 8] en Seine et Marne (77) à compter du 2 février 2009.

Sur le strict plan géographique, ces changements de son lieu de travail étaient licites par le jeu de la clause de mobilité insérée dans son contrat de travail dès lors que l'employeur n'en a pas fait un usage détourné, notamment à des fins disciplinaires, et qu'elle n'a pas porté une atteinte disproportionnée à sa vie personnelle et familiale.

La cour retient que la demande tendant à la nullité de la clause de mobilité est ainsi infondée et sera rejetée par confirmation du jugement entrepris, sous réserve des dispositions ci-après relatives aux conditions dans lesquelles cette clause à été mise en oeuvre à l'égard de M. [I].

La demande de dommages-intérêts pour absence de contrepartie financière à la clause de mobilité est ainsi rejetée.

3- Sur le licenciement

3-1- Sur la nullité alléguée du licenciement

M. [I] invoque la nullité de son licenciement en ce qu'il a été engagé à la suite de l'action en justice qu'il avait initiée contre son employeur.

Il ajoute que l'employeur a porté atteinte à la défense de ses droits en n'ayant pas indiqué les raisons réelles pour lesquelles il était convoqué, qu'il n'a découvert les motifs que lors de l'entretien préalable. Ainsi, s'agissant des faits longuement reprochés dans la lettre de licenciement, ceux qui n'ont pas été indiqués dans la lettre de convocation à entretien préalable ne peuvent être invoqués pour supporter le fondement d'un licenciement. Par ailleurs il a été convoqué à l'entretien préalable pour des prétendues absences injustifiées, dont il a pu se justifier en rapportant la preuve de son assiduité.

M. [I] invoque par ailleurs le harcèlement moral dont il se dit avoir été victime par les pressions subies et notamment celle résultant de la multiplication de changement de son lieu de travail, de la remise en cause de la qualité de son travail et l'impact économique des déductions injustifiées de salaire sur sa vie personnelle et familiale. S'agissant des autres griefs reprochés qui n'ont ni été indiqués dans la lettre de convocation à entretien préalable, ni évoqués lors de cet entretien, il indique qu'ils ne peuvent être invoqués pour fonder un licenciement.

Estimant que les garanties procédurales n'ont pas été respectées M. [I] demande que son licenciement soit déclaré nul et que lui soit attribuées cumulativement les indemnités d'un licenciement nul et celles pour absence de cause réelle et sérieuse. Il demande en outre à la cour de condamner la société L'UNION FRANCE ENTRETIEN à le réintégrer.

La société AZURIAL conteste les faits de harcèlement, de discrimination par rapport à une origine familiale ou encore d'atteinte aux droits de la défense qui lui sont reprochés, soulignant l'absence de tout élément factuel de nature à en étayer l'allégation, aucune réclamation sur ces points n'ayant été formée pendant l'exécution du contrat.

Sur ce,

Sur l'atteinte alléguée à la défense de ses droits

M. [I] a pu régulièrement exercer les recours requis pour l'exercice de ses droits tant devant le juge des référés que devant les juges du fond de sorte qu'il manque à démontrer l' atteinte à ses droits.

S'agissant du moyen tiré du harcèlement

En application de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L.1154 du même code, dans sa version ici applicable, prévoit qu'en cas de litige, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

M. [I] présente plusieurs indices pour prouver la pression morale injustifiée qu'il subit :

- il lui a été demandé de manière injustifiée de changer son lieu de travail,

- il lui a été systématiquement demandé de refaire son travail,

- un collègue de travail a attesté de la pression morale qu'il a subit,

- il a subi des sanctions pécuniaires unilatérales alors qu'il est père d'une famille nombreuse et sous un lien de particulière dépendance économique.

L'examen de ces éléments appelle les observations suivantes :

* il lui est systématiquement demandé de refaire son travail,

Force est de constater que M. [I] ne cite pas d'exemple de ce qu'il aurait été demandé systématiquement de refaire son travail de sorte que cet argument n'est aucunement étayé.

* un collègue de travail a attesté de la pression morale qu'il subit,

Force est de constater que M. [I] ne justifie pas de l'attestation alléguée visant la pression morale subie de sorte que cet argument n'est aucunement étayé.

* il lui est demandé de manière injustifiée de changer son lieu de travail,

Il résulte des éléments contractuels produits au débat que le travail de M. [I] pouvait trouver à s'exécuter sur différents sites de la région d' Ile de France, cela avec la reprise de son contrat initial par la société LFE qui s'est traduite par une affectation en dehors de [Localité 16] intra muros. Toutefois la mise en oeuvre de la clause de mobilité doit être loyale, adaptée et proportionnée au but poursuivi par l'activité économique de l'entreprise.

-les affectations à [Localité 17] et [Localité 14]

Après une première affectation au centre commercial Bel Air de [Localité 17] à compter du 11 janvier 2007, M. [I] a été affecté au centre commercial de [Localité 14] à compter du 10 janvier 2008 (pièce LFE 10).

Cependant l'employeur expose que M.[I] ayant contesté cette affectation, et dans le respect des indications du médecin du travail, il a accepté d'affecter de nouveau M. [I] au centre Bel Air de [Localité 17] à compter de 22 septembre 2008 mais que le salarié ne s'est plus présenté à son travail sur ce site de [Localité 17], à compter du 4 octobre 2008.

La cour retient toutefois que la lettre de contestation par le salarié de son affectation à [Localité 14], mentionnée être du 8 janvier 2008 (citée dans pièce LFE10) n'est pas versée aux débats, alors que M. [I] justifie de ce qu'il a été présent sur le site de [Localité 14], précisément, (pièces sous cote 15) le 4 août, puis les 6-10-11-13-14-15-16-17-18-20-21-22-23-24-25-27-28-29-30 et 31 octobre, 19-20-21-22-24-25-26-27-28 novembre 2008, 1er-2-3-4 décembre 2008.

Il n'est pas contesté que le salarié a ainsi travaillé pour son employeur LFE sur le site désigné par cet employeur.

Il est relevé que M. [I] a en outre produit deux certificats médicaux des 18 et 25 septembre 2008 portant arrêt de travail jusqu'au 3 octobre 2008.

Il est relevé que la position contradictoire des parties sur cette période a été suivie le 16 octobre d'une convocation à un entretien préalable à un licenciement fixé au 27 octobre 2008, à laquelle le salarié s'est présenté.

Le 21 novembre 2008 M. [I] écrivait au Directeur de LFE en ces termes :

« Objet : Rappel de salaire

Monsieur,

Par la présente, je vous demande de me faire un rappel de salaire de 847€ pour le mois de septembre et de 1071,15 € pour pour le mois d'octobre soit un total de 1899€, car ces retraits de n'ont pas été engendrés par des absences de me part comme comme vous l'indiquez sur mes bulletins de salaire, mais d"un dysfonctionnement de votre part ; ainsi les absences dont vous parlez ne sont pas réelles.

En fait ayant pris connaissance de ma mutation à [Localité 17], je me suis rendu sur le site en question où là l'inspecteur (Mr [M]) m'a demandé de retourner sur mon ancien chantier à [Localité 14].

En sachant qu'il s'agit là de ma 5ème mutation depuis que vous m'avez repris dans le cadre de l'annexe 7.

Ainsi, il ne s'agit pas de mauvaise volonté de ma part ou d'absence, car j'ai toujours accepté les mutations imposées sans conditions, et j'ai bien assuré mon travail sur le site où on m'a demandé de me rendre.

C'est pourquoi, je vous demande de me faire mon rappel de salaire dans les conditions précisées précédemment - au plus vite, car ayant des obligations financières, je suis dans une situation délicate par votre faute.

En espérant que vous allez faire le nécessaire pour que la situation soit rétablie, dans le cas contraire je serais obligé de saisir le conseil de prud'hommes pour cette affaire.

Je vous prie d'agréer Monsieur, l'expression de mes salutations distinguées. »

LFE écrivait ensuite au salarié, le 15 décembre 2008,

« nous faisons suite à notre entretien du 27 octobre dernier concernant votre absence inexpliquée du site de Bel Air à [Localité 17] depuis le 8 octobre 2008 sur lequel nous vous avions muté en date du 22 septembre.

Nous vous informons que suite à cet entretien, nous ne prendront aucune sanction disciplinaire à votre encontre et afin de vous laisser une seconde chance nous vous demandons de bien vouloir vous présenter à l'adresse suivante :

[Adresse 11]

[Adresse 11]

[Localité 8]

à compter du 2 février 2009 soit, à la fin de vos congés à vos horaires habituels. »

Le salarié se voyait en effet admis en sa demande de congés (pièce LFE 15) soit du 5 décembre 2008 au 7 janvier 2009 au titre de congés payés, et du 8 janvier au 31 janvier 2009 en congé sans solde.

La Cour retient de ces circonstances, alors que le salarié s'est effectivement rendu sur le site de [Localité 14] désigné par son employeur, que ce dernier manque à justifier de ce que le salarié aurait contesté l'affectation à [Localité 14], puisqu'il s'y est rendu, et qu'en conséquence il ne pouvait en l'état des éléments produits devant la cour, reprocher de bonne foi à M. [I] une « absence inexpliquée du site de Bel Air à [Localité 17] ».

En ces circonstances, l'affectation du salarié à [Localité 8], c'est à dire à l'extrémité opposée de la région d'Ile de France ne peut, en l'absence d'explication, qu'être qualifié d'usage abusif du pouvoir de direction ou à tout le moins non causé.

Par ailleurs la succession de 5 mutations à partir du transfert du contrat chez LFE n'est pas discutée par cette dernière, sans que ne soit apportés d'éléments relatifs aux contraintes de la société LDE de nature à justifier la totalité de ces modifications d'affectations.

La cour retient, dès lors, que la mise en oeuvre à l'égard de LFE de la clause de mobilité telle que rappelée a ici constitué un agissement constitutif de harcèlement moral.

* les sanctions pécuniaires unilatérales alors qu'il est père d'une famille nombreuse et sous un lien de particulière dépendance économique

La Cour retient des motifs qui précèdent que l'employeur a manqué au paiement du salaire de son salarié en raison d'absences prétendues, démenties par la réalité des faits puisque M. [I] continuait à travailler sur le site de [Localité 14] où il avait été affecté.

Il s'est agi d'un dysfonctionnement majeur de l'entreprise quant à l'obligation essentielle de l'employeur de payer le salaire dû, qui a donné lieu :

- à une première réclamation du 16 septembre 2008 (pièce salarié 18) portant sur le retrait contesté de 17h51 de travail en août 2008

- puis à une seconde réclamation du 21 novembre 2008 dans les termes précédemment rapportés (pièce 19).

Ce refus de paiement a exposé le salarié à des poursuites notamment,comme il en justifie, pour le paiement de son loyer (pièce 29-commandement de payer du 17 février 2009 pour 800 euros) mettant ainsi sa situation financière et familiale en grande difficulté.

La cour retient ici que le défaut de paiement de salaires a constitué un indice avéré de harcèlement moral.

Face à ces indices pouvant accréditer des agissements de harcèlement, force est de constater que l'employeur n'apporte pas d'élément de nature à démontrer au vu de ces éléments, que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il est en particulier relevé que l'employeur ne justifie d'aucune vérification diligentée lors des réclamations de salaire, alors que la présence du salarié dans l'entreprise était aisée à vérifier.

Si l'employeur a par ailleurs invoqué l'adaptation du poste aux préconisations émises par le médecin de travail (pas de prise de poste avant 7 heures et délai de transport raisonnable), il n'est pas justifié notamment par les tableaux de pointage du site de [Localité 14] (pièce 15 citée) de ce que ces préconisations aient été complètement respectées. En effet si M. [I] apparaît avoir commencé son travail en général plus tard que bon nombre de ses collègues, sa prise de poste sur les tableaux de pointage a cependant presque toujours été entre 6h15 et 6h45, sauf les 4 août, 6-10-11-18-20-23-25-27 octobre (où elle a effectivement été à 7 heures).

Il se déduit au surplus de la non prise en compte intégralement des prescriptions du médecin du travail a exposé le salarié à des conditions que le praticien avaient reconnues nocives à sa santé, alors que la mutation à [Localité 8] l'a exposé à de nouvelles contraintes d'adaptation pour un homme alors âgé de 58 ans (né en 1950).

En ces circonstances la cour retient que la mutation de M. [I] sur le site de [Localité 8] en ce qu'elle a relevé d'un usage abusif du pouvoir de direction, et le non règlement à M. [I] de ses salaires, ont constitué des faits retenus comme agissements ayant eu des répercussions sur la santé et les conditions de travail de sorte que le harcèlement moral est avéré.

Le licenciement intervenu, ensuite, pour des prétendus manquements sur le site de [Localité 8] et en particulier relatifs à une mauvaise exécution des tâches confiées le 2 mars 2009 puis le 3 mars 2009 une pause de 20 minutes reprochée au salarié hors des temps autorisés, apparaît abusif dans le contexte ci-rappelé, sans qu'il n'y ait lieu de statuer sur ce licenciement lui-même, lequel a manifestement participé aux faits harcèlement.

Il convient en conséquence de constater la nullité du licenciement, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs.

A titre surabondant le moyen de nullité tiré d'un engagement du licenciement en rétorsion de la dénonciation par le salarié des manquements de l'employeur n'apparaît pas fondé dès lors que dans le contexte des relations contractuelles durant l'année 2008 rappelé précédemment il n'est pas suffisamment établi que le licenciement engagé par la convocation à entretien préalable notifié le 3 mars 2009 ait été une conséquence directe de la dénonciation par le salarié de manquement de l'employeur dans le respect de ses obligations.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté le moyen tiré de la nullité du licenciement.

4- Sur la demande de réintégration de M. [I]

La Cour constate qu'il résulte des éléments produits que M. [I] n'avait pas retrouvé de travail après le licenciement, puis avait été admis à faire valoir ses droits à la retraite ainsi qu'il est justifié par la lettre de caisse d'assurance retraite de l'Île de France du 10 janvier 2013 et le relevé de ses mensualités daté du 10 septembre 2019 (pièce communiquées en délibéré comme demandé lors de l'audience de plaidoirie). La demande de réintégration est en conséquence devenue sans objet.

5- Demandes financières de M. [I]

5-1- Paiement de l'indemnité de licenciement sans cause au titre du licenciement nul

et

5-2- Paiement du salaire qu'il aurait dû percevoir

M. [I] demande la somme provisionnelle de 113.588,84 euros à ce titre pour la période d'avril 2009 à janvier 2017 (1 494,59 euros x 76 mois).

La société estime avoir respecté les dispositions conventionnelles en matière salariale ainsi que les prescriptions médicales du médecin du travail et oppose au salarié l'absence de travail dissimulé et l'absence de fondement juridique à ses autres prétentions financières.

Sur ce,

En l'absence de réintégration, le salarié a droit à une indemnité pour licenciement illicite égale au moins à 6 mois de salaire, en plus de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement et de l'indemnité compensatrice de préavis.

Il ressort des pièces produites (Pièce 17-novembre-décembre -février 2009) que le salaire de base de M. [I] s'élevait en dernier lieu à 1 354,41 euros.

Au regard des éléments produits aux débats la cour fixe à 9 000 euros l'indemnité pour licenciement illicite et à 17 000 euros l'indemnité légale de licenciement qui devront être versées par l'employeur avec intérêts au taux légal.

5-3- Dommages-intérêts pour utilisation abusive de la clause de mobilité

La Cour retient que la mise en oeuvre abusive de la clause de mobilité par l'employeur a causé à M. [I] un préjudice spécifique, distinct de celui généré par la nullité du licenciement, en ce qu'elle a exposé à des conditions de travail dégradées, sans justification de ce que l'intérêt de l'entreprise puisse expliquer cette mise en oeuvre non proportionnée de la clause.

Il sera alloué à M. [I] une somme de 3 000 euros à titre de dommages intérêts.

5-4- Dommages-intérêts pour non-paiement abusif du salaire, atteinte excessive à la vie privée et familiale, pour préjudice moral

Le salarié évoque en particulier le non paiement de ses salaires, ses difficultés financières en ayant résulté et la privation de vacances dans son pays d'origine, de sorte que la Cour retient que son des formulations distinctes le salarié reprend un même préjudice économique et son impact sur sa vie et celle de sa famille.

La cour retient que le salarié a, du fait des circonstances ayant précédé son licenciement et par suite de ce licenciement subi un préjudice familial et personnel incluant un préjudice moral certain, étant rappelé que la condamnation au paiement des salaires et accessoires dus a été assortie des intérêts au taux légal prononcés par le jugement entrepris confirmé de ce chef.

Il sera alloué 3 000 euros de dommages intérêts à ce titre.

5-5- Dommages-intérêts pour non-respect de l'avis médical du 25 janvier 2008

La cour retient que les seuls avis médicaux produits aux débats par M. [I] sont les arrêts de travail des 18 et 25 septembre 2008. N'étant pas en mesure de statuer sur l'avis du 25 janvier 2008 évoqué, la Cour déboutera M. [I] de ce chef de demande.

5-6- Demande d'indemnité pour travail dissimulé

La dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L. 8221-5 du code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué. Les juges du fond apprécient souverainement l'existence d'une telle intention.

Si l'employeur a ici opéré des déductions non fondées d'une partie des salaires dus à M. [I] la Cour retient, dans le contexte des relations contractuelles dégradées entre les parties qu'il s'est agi de mesures n'ayant pas caractérisé une intention de dissimuler les heures de travail.

La demande à ce titre sera rejetée

6- Capitalisation des intérêts

Il est fait droit à la demandes de capitalisation des intérêts échus depuis une année, dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du code civil, étant rappelé que les dommages-intérêts ici alloués produisent intérêts au taux légal à compter de ce jour.

7- Demandes accessoires de M. [I]

7-1- Délivrance des bulletins de salaire, du certificat de travail rectifiés depuis la reprise du marché

Il sera fait droit à cette demande que l'employeur devra satisfaire par actualisation selon les termes du présent arrêt, sous astreinte précisée au dispositif dont la cour ne se réserve pas la liquidation.

Il est rappelé que le pourvoi en cassation n'étant pas suspensif le présent arrêt est exécutoire de plein droit.

II- Demandes du syndicat ANTI- PRÉCARITÉ

1- Qualité et intérêt à agir

La Cour retient que le syndicat intervenant aux côtés du salarié est fondé à agir pour la représentation de l'intérêt collectif des salariés, ce qui justifie sa qualité et son intérêt à agir.

2- Demande de dommages-intérêts

Les termes du présent arrêt établissent l'atteinte aux intérêts collectifs des salariés du secteur d'activité.

La demande du syndicat qui a qualité à obtenir une indemnisation de ce préjudice distinct sera admise à hauteur de 1 000 euros.

III- Sur le remboursement des indemnités de chômage versées à M. [I]

Les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail étant dans le débat, la cour a des éléments suffisants pour fixer à six mois, le montant des indemnités versées à M. [I] que la SARL UNION FRANCE ENTRETIEN dite LFE devra rembourser en application de l'article L. 1235-4 du code du travail.

IV- Frais irrépétibles et dépens

Il sera statué sur les frais irrépétibles et les dépens dans les termes du dispositif, étant observé que le salarié et le syndicat ont conclu sous la constitution d'un même conseil.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement entrepris sauf sur les condamnations à titre de rappel de salaires, congés payés y afférents et primes,

Statuant à nouveau,

DÉCLARE nul le licenciement notifié par la SARL UNION FRANCE ENTRETIEN dite LFE aux droits de qui vient la SAS AZURIAL à M.[N] [I],par lettre du 26 mars 2019,

CONDAMNE la SAS AZURIAL venant aux droits de la SARL UNION FRANCE ENTRETIEN dite LFE à payer à M. [N] [I] les sommes de :

- 9 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement illicite,

- 17 000 euros l'indemnité légale de licenciement,

- 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour usage abusif de la clause de mobilité,

- 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour réparation des préjudices moral, familial et personnel,

Vu l'admission de M. [I] à faire valoir ses droits à la retraite,

DIT sans objet sa demande de réintégration,

DIT que les sommes allouées à titre salarial produisent intérêts à compter de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation du Conseil de Prud'hommes, et les sommes allouées à caractère indemnitaire à compter du jour du présent arrêt,

ORDONNE la capitalisation des intérêts échus depuis une année à compter de leur point de départ,

ORDONNE la remise à M. [N] [I] par la SAS AZURIAL venant aux droits de la SARL UNION FRANCE ENTRETIEN dite LFE des bulletins de salaire et du certificat de travail actualisés selon les termes du présent arrêt, cela dans le délai de deux mois à compter de ce jour,

DIT que passé ce délai la SAS AZURIAL venant aux droits de la SARL UNION FRANCE ENTRETIEN dite LFE sera redevable d'une astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard et par document pendant un délai de deux mois au terme duquel il sera statué en liquidation s'il y a lieu, la cour ne se réservant pas la liquidation de cette astreinte,

ORDONNE le remboursement par la SAS AZURIAL venant aux droits de la SARL UNION FRANCE ENTRETIEN dite LFE à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à M. [N] [I] dans la limite de six mois,

DÉBOUTE M. [N] [I] du surplus de ses demandes,

DÉCLARE le syndicat ANTI-PRÉCARITÉ recevable en ses demandes,

CONDAMNE la SAS AZURIAL venant aux droits de la SARL UNION FRANCE ENTRETIEN dite LFE à payer à syndicat ANTI-PRÉCARITÉ la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts,

Sur les frais irrépétibles et les dépens,

CONDAMNE la SAS AZURIAL venant aux droits de la SARL UNION FRANCE ENTRETIEN dite LFE à payer au syndicat ANTI-PRÉCARITÉ d'une part, et à M. [N] [I] d'autre part la somme de 2 200 euros chacun au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

CONDAMNE la SAS AZURIAL venant aux droits de la SARL UNION FRANCE ENTRETIEN dite LFE aux dépens de première instance et d'appel.

- Prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- Signé par Madame Maryse LESAULT, Présidente et par Madame Carine DJELLAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15e chambre
Numéro d'arrêt : 17/01175
Date de la décision : 25/09/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 15, arrêt n°17/01175 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-25;17.01175 ?
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