La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/09/2019 | FRANCE | N°18/02628

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 17 septembre 2019, 18/02628


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 53I



13e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 17 SEPTEMBRE 2019



N° RG 18/02628 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SKEA



AFFAIRE :



SAS SPAC





C/





SA CRÉDIT DU NORD



...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Avril 2018 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 0

N° Section : 0

N° RG : 2

016F01986







Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 17/09/2019





à :





Me Stéphane CHOUTEAU





Me Martine DUPUIS





Me Laëtitia ANDRE





TC NANTERRE



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX SEPT SEPTEMBRE D...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53I

13e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 17 SEPTEMBRE 2019

N° RG 18/02628 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SKEA

AFFAIRE :

SAS SPAC

C/

SA CRÉDIT DU NORD

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Avril 2018 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 0

N° Section : 0

N° RG : 2016F01986

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 17/09/2019

à :

Me Stéphane CHOUTEAU

Me Martine DUPUIS

Me Laëtitia ANDRE

TC NANTERRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

LA SAS SPAC prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 18/03456 (Fond)

Représentée par Maître Stéphane CHOUTEAU de l'ASSOCIATION AVOCALYS avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 - N° du dossier 003787 et par Maître X. DELPLANQUE de MANDELO avocat plaidant au barreau de PARIS.

APPELANTE

****************

LA SA CRÉDIT DU NORD prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Autre(s) qualité(s) : Appelant dans 18/03456 (Fond)

Représentée par Maître Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1859759 et par Maître V. MAYER avocat plaidant au barreau de PARIS.

LA SDE SEA AND MARINE PRODUCTS SL

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 18/03456 (Fond)

Représentée par Maître Laëtitia ANDRE avocat postulant au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 240 et par Maître J. SALOMON avocat plaidant au barreau de PARIS.

INTIMÉES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Juin 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Delphine BONNET, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER,

La société de droit espagnol Sea & marine products sl (la société Sea & marine) a pour activité les travaux d'aménagement portuaires et fluviaux, l'affrètement de navires, la location et la location-vente de tous matériels liés à l'activité maritime et portuaire.

La SAS Spac a été chargée de travaux de confortation d'une digue devant le port de [Localité 6].

Selon contrat n° 2714427/2016-066 daté du 8 février 2016 conclu avec la société Sea & marine, la société Spac a pris en location une barge jack up dénommée « Sea Reisen Alaast» stationnée en Angleterre. Ce contrat prévoyait une mise à disposition de la barge à [Localité 6] le 23mars 2016 pour une période ferme de location de six mois, moyennant un loyer de 4 500 euros par jour pour dix heures de travail et de 3 000 euros par jour de « stand-by », outre des frais de mobilisation d'un montant de 65 000 euros payables d'avance et des frais de démobilisation pour 35 000 euros.

La société Spac a procédé le 8 mars 2016 au règlement des frais de mobilisation par virement de la somme de 65 000 euros.

Le contrat signé a été transmis par la société Spac à la société Sea & marine le 10 mars.

Compte tenu des conditions climatiques empêchant l'acheminement de la barge dans les délais convenus, la société Sea & marine a proposé à la société Spac la mise à disposition d'une barge de substitution dénommée « Seamed Halewijn » stationnée en Belgique pour laquelle elle a sollicité un cautionnement à hauteur de 800 000 euros.

Le 1er avril 2016, le Crédit du nord s'est porté caution personnelle et solidaire au profit de la société Sea & marine des sommes pouvant lui être dues par la société Spac au titre de la location de la barge, dans la limite de la somme de 800 000 euros.

Le cautionnement a été transmis à la société Sea & marine et à la banque de cette dernière, la société Banco de sabadell, par mail du 5 avril 2016.

Par courrier du 19 avril 2016, la société Spac a résilié le contrat de location

n° 2714427/2016-066 pour inexécution, indiquant que la barge ne lui avait jamais été livrée et a sollicité le remboursement immédiat de l'acompte de 65 000 euros.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 juillet 2016, la société Sea & marine a adressé à la société Spac les factures afférentes au contrat de location :

- une facture d'un montant de 138 000 euros correspondant aux frais de mobilisation de la barge jack up «Halewijn», déduction faite de l'acompte de 65 000 euros versé,

- une facture de 695 000 euros au titre des loyers correspondant à 150 jours de travail et à 30 jours de « stand by '',

- une facture de 35 000 euros au titre des frais de démobilisation.

Par acte d'huissier du 5 octobre 2016, elle a fait sommation à la société Spac de procéder au règlement de ces sommes, en vain.

C'est dans ces conditions que, par assignation du 21 octobre 2016, la société Sea & marine products sl a assigné le Crédit du Nord devant le tribunal de commerce de Nanterre afin d'obtenir le paiement de la somme de 800 000 euros au titre des sommes dues par la société Spac, en exécution du cautionnement solidaire.

Le Crédit du nord a assigné en intervention forcée la société Spac par acte du 29 décembre 2016.

Selon jugement contradictoire du 11 avril 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a :

- ordonné la jonction des deux procédures,

- dit n'y avoir lieu à statuer sur la qualité à agir de la société Seamed united holding,

- condamné le Crédit du Nord à payer à la société Sea & marine products sl la somme de 800 000 euros outre les intérêts de retard au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points à compter du 21 octobre 2016,

- ordonné la capitalisation annuelle des intérêts,

- débouté la société Spac de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la société Spac à garantir le paiement de toutes sommes que sera amené à payer le Crédit du Nord au titre de l'exécution du jugement,

- condamné la société Spac à payer au Crédit du Nord la somme de 2 000 euros et la somme de 3 000 euros à la société Sea & marine products sl au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné la société Spac aux entiers dépens.

La société Spac a interjeté appel de cette décision le 13 avril 2018. Le Crédit du Nord a également interjeté appel de cette décision selon déclaration d'appel du 17 mai 2018. Les deux procédures ont été jointes.

Dans ses conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 4 avril 2019, la société Spac demande à la cour de :

- annuler le jugement sur le fondement des articles 12 et 455 du code de procédure civile,

subsidiairement :

- l'infirmer en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

- dire et juger que la société Sea & marine products sl ne justifie pas de la mise à disposition d'une barge « jack up » en conformité avec l'affrètement à temps daté du 8 février 2016 et ratifié le 10 mars 2016,

- juger que l'inexécution de la mise à disposition de la barge jack up « Halewijn » est imputable à la société Sea & marine products sl,

en conséquence,

- dire et juger que la société Sea & marine products sl ne justifie pas d'une créance à son encontre garantie par le cautionnement du Crédit du Nord,

- dire et juger la société Sea & marine products sl non recevable et mal fondée à poursuivre l'exécution du cautionnement du Crédit du Nord,

- débouter la société Sea & marine products sl de toutes ses demandes d'appel de paiement de la caution,

en conséquence,

- dire et juger l'appel en garantie du Crédit du Nord à son encontre sans objet,

- la dire et juger recevable et fondée en ses demandes dirigées contre la société Sea & marine products sl,

- y faire droit et confirmer au fond la condamnation de la société Sea & marine products sl au paiement de la somme de 65 000 euros telle qu'ordonnée en référé par le tribunal de commerce de Marseille,

- y faire droit et condamner la société Sea & marine products sl à lui verser :

. la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts,

. la somme de 15 000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Sea & marine products sl en tous les dépens.

En premier lieu, la société Spac fait valoir que le tribunal a considéré à tort que le défaut de paiement des trois factures datées du 12 juillet 2016 suffisait à condamner le Crédit du Nord, sans s'être livré aucunement à l'analyse de l'obligation de la caution, sans vérifier l'existence de la créance principale, son caractère certain, liquide et exigible, sans répondre à ses conclusions et sans se référer à aucune disposition légale pertinente. Elle prétend que cette décision encourt la nullité sur le fondement des articles 455 du code de procédure civile et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme pour inexistence et contradiction de motifs.

Ensuite, la société Spac soutient que l'obligation garantie par la caution du Crédit du Nord n'est pas due soulignant qu'en vertu de l'article 2 du cautionnement, seuls les loyers impayés et exigibles constituent l'obligation garantie. Elle rappelle qu'il appartient à la société Sea & marine de rapporter la preuve de l'existence de la créance cautionnée et que la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions inhérentes à la dette.

Elle soutient que la société Sea & marine en qualité de fréteur à temps, devait livrer et mettre à sa disposition la barge Jack up le 23 mars 2016 pour une période de location de six mois, à raison d'un tarif de location prévu à la clause 20 de 4500 euros par jour, pour 10 heures de travail par jour, et que sa seule obligation en tant qu'affréteur à temps était le paiement du prix de la location, sous la condition de la bonne exécution de ses obligations par le fréteur à temps et ce conformément aux articles L. 5432-10 et R. 5432-15 et 16 du code des transports. Elle répète que la livraison du navire est l'obligation essentielle du fréteur à temps et qu'en conséquence, l'affréteur n'est pas tenu de régler le paiement stipulé dans la charte-partie lorsque le navire ne lui a pas été livré ce qui résulte également des conditions générales du contrat.

Elle relève que le défaut de livraison de la barge à la date convenue sans aucune justification d'un cas fortuit ou d'un cas de force majeure, constitue l'inexécution par la société Sea & marine de son obligation permettant la résiliation de la charte-partie, relevant que celle-ci n'a jamais justifié avoir eu la disposition de la barge. Elle souligne qu'au contraire un rapport de la société Atlantis vient apporter la preuve que la société Sea & marine n'était ni propriétaire ni détenteur de l'une des deux barges du mois de février 2016 jusqu'au mois d'avril 2016 et encore moins après mais que les barges litigieuses étaient la propriété d'un tiers et n'ont jamais été affrétées par la société Sea & marine qui n'a jamais détenu aucun droit sur celles-ci. Elle soutient en conséquence que la caution n'est pas due en raison de l'inexécution de l'obligation de livraison et de mise à disposition. Elle ajoute que l'exigence nouvelle de la société Sea & marine de mise en place d'une garantie à première demande au profit de la banque Sabadelle formulée par celle-ci dans un mail du 8 avril 2016 est la démonstration que la société Sea & marine n'avait pas la capacité financière de mobiliser la barge et qu'elle est donc responsable de l'inexécution principale de livrer la barge objet du contrat d'affrètement à temps. Elle estime que l'appel de la caution est frauduleux et manifestement abusif.

Dans ses dernières conclusions, déposées au greffe et notifiées par RPVA le 8 avril 2019, le Crédit du Nord demande à la cour de :

à titre principal :

- dire et juger que l'engagement qu'il a émis étant un cautionnement, accessoire de l'obligation principale de la société Spac, la société Sea & marine products sl n'est pas en droit d'obtenir un quelconque paiement au titre de ce cautionnement sans démontrer détenir une créance sur la société Spac au titre du contrat objet du cautionnement, d'un montant au moins égal à la somme réclamée,

- dire et juger que la société Sea & marine products sl ne rapporte pas la preuve d'une créance sur la société Spac, ni en conséquence d'une créance sur lui en sa qualité de caution,

en conséquence,

- réformer le jugement en ce qu'il l'a condamné à payer à la société Sea & marine products sl la somme de 800 000 euros, outre intérêts de retard au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente augmenté de 10 points à compter du 21 octobre 2016, avec capitalisation,

statuant à nouveau,

- débouter la société Sea & marine products sl de l'ensemble de ses demandes formulées à son encontre,

à titre infiniment subsidiaire :

- confirmer la condamnation de la société Spac à lui rembourser toute somme qu'il se retrouverait ainsi tenu de payer,

en tout état de cause :

- condamner tout succombant à lui verser une somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Le Crédit du Nord observe que le tribunal a méconnu le caractère accessoire du cautionnement et s'est contenté de vérifier s'il existait une apparence de créance de la société Sea & marine en prenant uniquement en considération les documents émis par cette dernière (factures, mise en demeure) sans s'assurer de l'existence de la créance, traitant son engagement comme une garantie autonome ou plus exactement comme une garantie documentaire. La banque relève que la société Sea & marine, alors qu'elle ne conteste pas avoir reçu le cautionnement, a exigé une garantie en langue anglaise par message Swift, conforme aux 'modèles de caution' transmis par elle, exigence non contractuellement convenue. Le Crédit du Nord estime que c'est de manière critiquable que le tribunal a considéré que la société Sea & marine, qui n'a pas exécuté ses obligations contractuelles en se fondant sur le non-respect par la société Spac d'exigences non contractuelles, était en droit d'obtenir le paiement des loyers d'une barge non livrée. Il soutient qu'il est indéniable (puisque reconnu par la société Sea & marine) que le 19 avril 2016, soit deux semaines après réception du cautionnement bancaire contractuellement convenu, la société Sea & marine n'avait pas procédé à la moindre diligence pour acheminer et encore moins livrer la barge censée être mise à disposition de la société Spac, ce qui s'explique en réalité par le fait que la société Sea & marine n'a jamais eu le moindre droit sur la barge Halewijn. Il conclut que la société Sea & marine ne démontre pas avoir une créance sur la Spac qui serait couverte par son cautionnement.

Dans ses dernières conclusions, déposées au greffe et notifiées par RPVA le 7 mai 2019, la société Sea & marine products sl demande à la cour de :

- confirmer le jugement dont appel,

- débouter la société Crédit du Nord de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner solidairement la société Crédit du Nord et la société Spac à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens de l'instance.

Après avoir fait un rappel chronologique des faits, la société Sea & marine soutient que le contrat initial est devenu sans objet dès lors que la société Spac, qui a reconnu la réalité des intempéries, a accepté une barge de substitution et a formalisé son accord sur ce contrat de substitution en sollicitant du Crédit du Nord un acte de cautionnement. Elle affirme qu'elle a fait affréter la nouvelle barge par l'intermédiaire d'une société Léon Vincent et que cette barge, contrairement à ce que soutient la société Spac, a bien été mise à sa disposition. Elle affirme que le contrat en cause a été conclu et relève que la société Spac non seulement n'a pas exécuté de bonne foi ce contrat (retard de paiement, modification des conditions, retard de production de la garantie conforme et nécessaire à la livraison de la barge jack-up Halewijn) mais l'a en outre abusivement et rétroactivement rompu le 19 avril 2016 en invoquant sa propre turpitude dès lors qu'elle est elle-même à l'origine de l'impossibilité de livrer le navire dans les délais.

Elle ajoute que le Crédit du Nord s'est bien porté caution au titre du paiement des termes du contrat n° 2714427/2016-066 daté du 8 février 2016, signé par le cautionné le 10 mars 2016 et modifié le 22 mars 2016 pour la location de la barge back up Halewijn, pour un montant de 800 000 euros, qu'elle a adressé au cautionné le 18 juillet 2016 les factures afférentes audit contrat, que celles-ci n'étant pas payées, elle a mis en demeure la société Spac, cautionnée défaillante, par sommation du 5 octobre 2016 et la caution par assignation du 21 octobre 2016. Elle souligne qu'aucune mention de l'acte de caution ne prévoit l'obligation pour elle de discuter avec la cautionnée la Spac et qu'aucune mention de l'acte de caution ne prévoit la possibilité pour le Crédit du Nord de discuter des termes, responsabilités, dommages résultant de l'exécution du contrat objet de la caution.

Elle s'estime en conséquence fondée à demander la condamnation du Crédit du Nord à lui régler la somme de 800 000 euros.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 mai 2019.

Le 21 mai 2019, la société Spac a déposé au greffe et notifié de nouvelles conclusions au fond.

Par conclusions d'incident déposées au greffe et notifiées par RPVA le même jour, elle sollicite la révocation de l'ordonnance de clôture afin de pouvoir répondre aux dernières conclusions au fond de la société Sea & marine products sl.

Par conclusions d'incident déposées au greffe et notifiées par RPVA le 29 mai 2019, le Crédit du Nord s'est associé à cette demande.

Par conclusions d'incident déposées au greffe et notifiées par RPVA le 6 juin 2019, la société Sea & marine products sl s'en est rapportée à la sagesse de la cour et a sollicité la fixation d'un nouveau calendrier de procédure pour lui permettre de répliquer aux dernières écritures des appelantes.

Avant l'ouverture des débats, et en accord avec les conseils des parties, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de réouverture des débats présentée par la société Spac et déclaré irrecevables ses conclusions au fond notifiées par RPVA le 21 mai 2019.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE

1) sur la nullité du jugement

S'il est vrai que le tribunal a statué dans un premier temps sur la demande de la société Sea & marine dirigée à l'encontre du Crédit du Nord au titre de son engagement de caution, sans répondre au préalable aux moyens relatifs à l'exigibilité des trois factures établies par la société Sea & marine, puis dans un second temps a statué sur les 'demandes de la société Spac à l'encontre de la société Sea & marine' qui constituent en réalité des moyens de défense relatifs à l'exigibilité de la dette principale, il a néanmoins motivé sa décision. Ce raisonnement inversé, sans toutefois qu'apparaisse une contradiction de motifs, et l'appréciation inexacte des faits ou l'erreur de droit n'équivalent pas à un défaut de motivation en sorte que le jugement n'encourt pas la nullité.

2 ) sur le fond

Selon l'article 2313 du code civil, la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette.

En l'espèce, le Crédit du Nord s'est constitué caution solidaire et personnelle de la société Spac afin de garantir à la société Sea & marine, ayant conclu avec la société Spac un contrat de location en date du 8 février 2016 portant sur une barge Jack up (Seamed Halewijn), le paiement de toutes les sommes qui lui seraient dues à ce titre par la société Spac, dans la limite de 800 000 euros.

Il est constant et non contesté que l'engagement du Crédit du Nord constitue un cautionnement accessoire et non une garantie autonome en sorte qu'il convient, avant d'examiner la demande de la société Sea & marine dirigée à l'encontre du Crédit du Nord, d'examiner le caractère certain, liquide et exigible de la créance invoquée par la société Sea & marine à l'encontre de la société Spac, étant rappelé que la caution, en vertu des dispositions rappelées ci-dessus, peut opposer au créancier l'exception d'inexécution.

Le contrat n° 2714427/2016-066 daté du 8 février 2016, aux termes duquel la société Spac a pris en location une barge jack up dénommée « Sea Reisen Alaast » auprès de la société Sea & marine a fait l'objet de négociations pour une modification et le 22 mars 2016, la société Sea & marine a adressé à la société Spac le contrat pour la barge jack-up modifié. Les modifications apportées au contrat étaient les suivantes :

- nom du bateau : Seamed Halewijn

- mobilisation charge, montant estimatif payable sur présentation des justificatifs : 138 000 euros

- caution bancaire de 800 000 euros, valable jusqu'au paiement des loyers. Caution dégressive après chaque paiement de loyers.

Ce contrat prévoyait toujours une mise à disposition de la barge à [Localité 6] le 23 mars 2016 pour une période de location de six mois ferme, moyennant un loyer de 4 500 euros par jour pour dix heures de travail et de 3 000 euros par jour de « stand-by », outre frais de mobilisation et de démobilisation.

Le contrat modifié prévoyait bien une caution bancaire de 800 000 euros. Le 1er avril 2016, le Crédit du Nord établissait l'acte de cautionnement, lequel a été adressé par la société Spac le 5 avril 2016 à la société Sea & marine et à sa banque, Banco Sabadell.

La société Sea & marine, par mail du 8 avril 2016, a alors exigé de la société Spac une garantie à première demande en précisant : 'voici les points principaux de la garantie dont le Banco Sabadell a besoin pour apporter son engagement dans les termes exigés par le propriétaire de la barge jack up avant son chargement'.

Puis, le 18 avril 2016, la société Sea & marine a mis en demeure la société Spac de lui faire savoir sous 48 heures si elle allait fournir, ou non, la caution bancaire dans les conditions exigées, afin de confirmer ou pas la mise à disposition de la barge.

La société Spac a notifié à la société Sea & marine, par lettre du 19 avril 2016, la résiliation du contrat précisant que : 'malgré de multiples échanges, vous n'avez pas été en mesure de nous confirmer la livraison de cette seconde barge. Vous avez tenté de justifier votre incapacité à nous fournir cette solution de remplacement en prétextant des difficultés administratives, notamment la fourniture d'une caution. Nous vous avions pourtant fourni une caution bancaire parfaitement valable au regard des dispositions du projet de contrat et de nos échanges du 19 mars 2016. A l'inverse, vous n'avez jamais été capable de nous prouver que vous étiez propriétaire ou locataire d'un tel engin', étant souligné que par mails des 24 et 29 mars 2016, la société Spac avait demandé à la société Sea & marine de confirmer le départ de la barge jack up de substitution, mails restés sans réponse.

Par lettre du 20 avril 2016, la société Sea & marine a contesté cette résiliation rappelant que les nouvelles conditions avaient été transmises et acceptées par la société Spac et lui reprochant 'd'avoir essayé de se soustraire aux règles basiques des échanges internationaux à savoir transmettre une caution bancaire en anglais et par code Swift (de banque à banque)', étant là encore souligné que la société Spac avait demandé par mail du 5 avril 2016 si la caution devait être envoyée par Swift, proposition restée sans réponse de la part de la Banco de Sabadell.

Il apparaît ainsi que la société Sea & marine a imposé à la société Spac une nouvelle exigence, non prévue au contrat modifié, à savoir une garantie à première demande et non pas une caution bancaire, peu important que celle-ci n'ait pas été transmise par la société Spac en anglais et par Swift ; le mail envoyé par la société Sea & marine à la société Spac le 8 avril 2016 montre qu'en réalité la société Sea & marine n'était pas en mesure de mobiliser cette barge ce que confirme le rapport, non critiqué par la société Sea & marine, établi par le cabinet Atlantis à la demande de la société Spac, qui indique que la barge Halewijn appartenait à une société belge DEME, que l'opérateur commercial était la société Geosa NV, société du groupe DEME située en Belgique et que le propriétaire et l'exploitant de cette barge ont confirmé n'avoir pris aucun engagement pour une affectation du Halewijn à [Localité 6] en mars 2016, étant souligné que ce même rapport conclut également que l'affectation promise par la société Sea & marine du Sea Reisen Alaast ne correspondait à aucune réalité.

Il résulte également de ce rapport que depuis 2015, les propriétaire/opérateur voulaient vendre 'Halewijn' et avaient confié la vente à un courtier, la société DSB, qu'en 2016, DSB avait trouvé un possible acquéreur, la société Sea & marine, mais que les contacts ont été rompus après six mois de discussions vaines. L'attestation de M. [J] versée aux débats par la société Sea & marine confirme l'existence de négociations entreprises par la société Sea & marine en vue de l'achat de la barge Halewijn par l'intermédiaire de M. [J] et la nécessité de la mise en place d'une garantie bancaire entre Ing Bank et Banco Sabadell, étant souligné en outre que la barge était alors démontée dans l'arrière du port d'[Localité 8] et non classée.

Il est évident qu'à la date de l'envoi du contrat modifié, le 22 mars 2016, la société Sea & marine n'avait aucun droit sur la barge Halewijn et que les négociations pour l'acquérir de DEME n'étaient nullement achevées.

La chronologie des faits et des échanges de mails entre les parties montrent que l'absence de mise à disposition de la barge de substitution est imputable à la société Sea & marine qui, alors qu'il avait été convenu entre les parties de la mise en place d'une caution personnelle et solidaire, a exigé la mise en place d'une garantie à première demande, nonobstant la caution reçue le 5 avril 2016, alors qu'en réalité elle ne disposait d'aucune barge pouvant être livrée.

La société Sea & marine qui a manqué à son obligation principale de mise à disposition de la barge ne pouvait réclamer à la société Spac le paiement des trois factures qu'elle lui a adressées le 18 juillet 2016, aucune de ces factures n'étant due, que ce soit celle d'un montant de 138 000 euros correspondant aux frais de mobilisation de la barge jack up «Halewijn», qui au demeurant n'ont pas été justifiés, celle de 695 000 euros au titre des loyers, et celle de 35 000 euros au titre des frais de démobilisation.

C'est donc à tort que le tribunal a condamné le Crédit du Nord au paiement de la somme de 800 000 euros en sa qualité de caution de la société Spac.

Il convient en conséquence, infirmant le jugement en toutes ses dispositions, de débouter la société Sea & marine de ses demandes dirigées à l'encontre du Crédit du Nord.

3) sur les demandes de la société Spac

Il n'appartient pas à la présente cour, saisie de l'instance au fond, de confirmer la condamnation de la société Sea & marine products sl au paiement de la somme de 65 000 euros telle qu'ordonnée en référé par le tribunal de commerce de Marseille, étant souligné que l'ordonnance de référé a été confirmée par arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 18 janvier 2018 et que la société Spac dispose donc déjà d'un titre exécutoire lui permettant d'obtenir la restitution de l'acompte de 65 000 euros.

L'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à l'octroi de dommages-intérêts que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière ; en l'espèce, le fait pour la société Sea & marine, qui certes s'est méprise sur l'étendue de ses droits, d'avoir sollicité la condamnation du Crédit du Nord au titre du cautionnement du 1er avril 2016 en paiement des sommes dues par la société Spac alors que la barge n'a jamais été livrée ne caractérise pas en soi un abus de procédure en sorte que la demande de dommages et intérêts ne peut prospérer. Elle est rejetée.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Déboute la société Spac de sa demande d'annulation du jugement,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

Déboute la société Sea & marine products sl de toutes ses demandes,

Déboute la société Spac de sa demande de 'confirmation au fond' de la condamnation de la société Sea & marine products sl au paiement de la somme de 65 000 euros telle qu'ordonnée en référé par le tribunal de commerce de Marseille et de sa demande de dommages et intérêts,

Condamne la société Sea & marine products sl aux dépens de première instance et d'appel,

Condamne la société Sea & marine products sl à payer au Crédit du Nord d'une part et à la société SPAC d'autre part la somme de 5 000 euros à chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Madame Sylvie PASQUIER-HANNEQUIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 18/02628
Date de la décision : 17/09/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 13, arrêt n°18/02628 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-17;18.02628 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award