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04/06/2019 | FRANCE | N°17/04735

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 04 juin 2019, 17/04735


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





1ère chambre 1ère section





ARRÊT N°







CONTRADICTOIRE

Code nac : 56B





DU 04 JUIN 2019





N° RG 17/04735

N° Portalis DBV3-V-B7B-RUJ4





AFFAIRE :



SAS CARREFOUR SUPPLY CHAIN

C/

SAS SUEZ EAU FRANCE

SARLAU CAR 4





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Juin 2017 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre :

7

N° Section :

N° RG : 15/11476



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :





à :



-l'AARPI INTER- BARREAUX JRF AVOCATS,



-Me Hugues DE METZ- PAZZIS,



-Me Anne-Laure DUMEAU



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

1ère chambre 1ère section

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 56B

DU 04 JUIN 2019

N° RG 17/04735

N° Portalis DBV3-V-B7B-RUJ4

AFFAIRE :

SAS CARREFOUR SUPPLY CHAIN

C/

SAS SUEZ EAU FRANCE

SARLAU CAR 4

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Juin 2017 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 7

N° Section :

N° RG : 15/11476

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

-l'AARPI INTER- BARREAUX JRF AVOCATS,

-Me Hugues DE METZ- PAZZIS,

-Me Anne-Laure DUMEAU

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE JUIN DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SAS CARREFOUR SUPPLY CHAIN

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

N° SIRET : 428 240 287

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Oriane DONTOT de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 633 - N° du dossier 20170683

Me Stéphanie GRIGNON DUMOULIN, avocat plaidant - barreau de PARIS, vestiaire : C2334

APPELANTE

****************

SAS SUEZ EAU FRANCE

N° SIRET : 410 03 4 6 077

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Hugues DE METZ-PAZZIS, avocat plaidant - barreau de PARIS, vestiaire : B0968

SARLAU CAR 4-ICAR 4-I, venant aux droits de la SCI CAR 4CAR 4

N° SIRET : 441 316 536

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Anne-Anne-laure DUMEAU, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 - N° du dossier 42177

Me Clotilde NORMAND de l'AARPI LOGELBACH ASSOCIESLOGELBACH ASSOCIES, avocat plaidant - barreau de PARIS, vestiaire : K0042

INTIMÉES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 Mars 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain PALAU, Président chargé du rapport et Madame Nathalie LAUER, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, Président,

Madame Anne LELIEVRE, Conseiller,

Madame Nathalie LAUER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Nanterre en date du 15 juin 2017 qui a statué ainsi :

Condamne la société Carrefour Supply Chain à payer à la société Suez Eau France la somme de 95.965, 38 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2015,

Dit que les intérêts échus dus au moins pour une année entière produiront eux-mêmes des intérêts,

Condamne la société Carrefour Supply Chain à payer à la société Suez Eau France la somme de 10.431, 49 euros TTC,

Déboute la société Carrefour Supply Chain de sa demande de dégrèvement au titre de la redevance d'assainissement,

Déboute la société Carrefour Supply Chain de sa demande en garantie formée à l'encontre de la société Car 4Car 4,

Condamne la société Carrefour Supply Chain à payer à la société Suez Eau France et à la société Car 4Car 4 la somme de 3.000 euros chacune en indemnisation de leurs frais irrépétibles,

Condamne la société Carrefour Supply Chain aux dépens de l'instance,

Ordonne l'exécution provisoire.

Vu la déclaration d'appel de la SAS Carrefour Supply Chain en date du 21 juin 2017.

Vu les dernières conclusions de la société Carrefour Supply Chain en date du 28 novembre 2018 qui demande à la cour de :

La dire et juger recevable et bien fondée en son appel,

Infirmer le jugement,

Débouter la société Suez Eau France, anciennement dénommée Lyonnaise des Eaux France, de toutes ses demandes, fins et conclusions formées à son encontre,

Débouter la société Car 4-1Car 4-1, anciennement SCI Car 4Car 4, de toutes ses demandes, fins et conclusions formées à son encontre,

Statuant à nouveau :

Constater que la société Suez fonde ses demandes sur la prétendue qualité d'abonnée au service public de l'eau pour le site de [Localité 1] de la société LCM/ Carrefour Supply Chain,

Dire et juger qu'elle ne démontre pas la qualité d'abonnée,

Dire et juger qu'elle n'avait pas la qualité d'abonnée au service public de l'eau pour le site de [Localité 1],

Constater que c'est la société Exel logistique qui était abonnée et client et payait les factures du contrat et non la société Logidis Comptoir Moderne, devenue la société Carrefour Supply Chain,

En conséquence ;

Dire et juger que la société LCM/ Carrefour Supply Chain n'avait pas à résilier un prétendu contrat d'abonnement, suite au départ du locataire Logidis,

Dire et juger que la société Carrefour Supply Chain n'est pas débitrice de la facture du 7 janvier 2013 de 95.965,38 euros et de la majoration de la redevance d'assainissement,

Débouter la société Suez Eau France, anciennement dénommée Lyonnaise des Eaux France, de toutes ses demandes,

En tout état de cause :

Dire et juger que la consommation excessive d'eau, objet de la facture litigieuse, est postérieure au départ du locataire Logidis,

Dire et juger que la SCI Car-4Car-4, devenue la société Car-4-1Car-4-1, est seule à l'origine de la consommation excessive d'eau à l'origine de la facture du 7 janvier 2013 de 95.965,38 euros,

En conséquence':

Dire et juger que la société Carrefour Supply Chain n'est pas débitrice de la facture du 7 janvier 2013 de 95.965,38 euros et de la majoration de la redevance d'assainissement,

Débouter la société Suez Eau France, anciennement dénommée Lyonnaise des Eaux France, de toutes ses demandes formées à son encontre,

A titre très subsidiaire,

Condamner la société Car-4-I, anciennement la SCI Car-4Car-4, à la garantir de toutes les condamnations qui seraient prononcées à son encontre, en principal et intérêts,

A titre extrêmement subsidiaire,

Dire et juger qu'il y a lieu d'appliquer un dégrèvement sur le fondement de l'article R2224-19-2 du code général des collectivités territoriales,

Condamner la société Suez Eau France, anciennement dénommée Lyonnaise des Eaux France, à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont le recouvrement sera effectué, pour ceux la concernant, par l'AARPI JRF Avocats représentée par Maître Dontot, avocat au Barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions en date du 21 novembre 2018 de la SAS Suez Eau France qui demande à la cour de :

A titre principal,

Confirmer le jugement du 15 juin 2017,

Débouter la société Carrefour Supply Chain de toutes ses fins, conclusions et demandes,

En conséquence,

Condamner la société Carrefour Supply Chain à lui payer la somme de 95.965, 38 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2015 et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du code civil dès qu'une année d'intérêts sera due, puis à chaque échéance annuelle,

Condamner la société Carrefour Supply Chain à lui payer la somme de 10.431, 49 euros TTC en application de l'article R. 2224-19-9 du code général des collectivités territoriales,

Condamner la société Carrefour Supply Chain à lui payer la somme de 10.000 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles,

Condamne la société Carrefour Supply Chain aux dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître de Metz-Pazzis,

A titre subsidiaire, en cas d'infirmation du jugement,

Condamner la société Car-4Car-4 à lui verser la somme de 95 965,38 euros TTC,

Condamner la société Car-4Car-4 à lui verser la somme de 7 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la société Car-4Car-4 aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Hugues de Metz-Pazzis.

Vu les dernières conclusions en date du 15 novembre 2018 de la société Car-4 1 qui demande à la cour de :

Confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Débouter les sociétés Carrefour Supply Chain et Suez Eau France de toutes leurs demandes, en ce qu'elles sont dirigées à son encontre,

Y ajoutant,

Condamner tout succombant à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner tout succombant aux dépens dont distraction au profit de Maître Dumeau conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 10 janvier 2019.

Vu l'ordonnance du 21 février 2019 rejetant la demande de révocation de l'ordonnance de clôture présentée par la société Suez Eau France.

********************************

FAITS ET PROCÉDURE

Par contrat du 26 juin 2002, la SCI Car 4Car 4 a donné à bail commercial à la SAS Logidis un ensemble d'entrepôts sis [Adresse 4] dont elle est propriétaire.

La SAS Carrefour France s'est portée garant des engagements du preneur.

Par acte d'huissier du 16 juin 2010, la société Logidis a donné congé à la SCI Car 4Car 4 pour le 30 juin 2011.

Au mois d'août 2012, la SCI Car 4Car 4 constatant que la pompe de relevage du site ne fonctionnait plus et que le niveau d'eau montait, a fait appel à la société EPLS afin qu'elle procède à une intervention de pompage.

A cette occasion, elle a constaté que l'alimentation en eau potable de l'entrepôt occupé par la société Logidis était enterrée et grande ouverte. Elle a procédé à sa fermeture.

La société Car 4Car 4 a, en octobre 2012, communiqué à la société Lyonnaise des Eaux, aux droits de laquelle vient la société Suez Eau France l'index du compteur égal à 44.263 m3, relevé confirmé par celle-ci lors de son passage le 14 novembre 2012.

La société Suez Eau France a alors établi une facture d'arrêt de compte au nom de « DTZ Carrefour» le 7 janvier 2013 d'un montant de 95.965, 38 euros.

Cette facture vise un numéro de compteur, un «'nouvel index': relevé le 31 octobre 2012 44.263'» et un «'ancien index estimé le 23 novembre 2012 17.171'».

Par courrier du 29 avril 2013, la société LCM Carrefour Supply Chain a refusé de payer cette facture indiquant qu'elle est établie à l'attention de deux entités juridiques différentes et qu'elle a restitué les clés du site en décembre 2011 à son propriétaire, la société DTZ.

La société Suez Eau France lui a alors adressé un courrier daté du 3 octobre 2013 la mettant en demeure de s'acquitter de la facture susvisée.

Par courrier du 11 décembre 2013, la direction juridique de la société Carrefour a déclaré à la société Suez Eau France qu'elle n'avait jamais exploité le site de [Localité 1] et contracté avec celle-ci un abonnement d'approvisionnement d'eau le concernant.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 16 juillet 2015, la société Suez Eau France a adressé une nouvelle mise en demeure à la société LCM Carrefour Supply Chain en vain.

Par actes d'huissier des 27 août et 31 août 2015, la société Suez Eau France a fait assigner les sociétés Carrefour Supply Chain et Car 4Car 4 devant le tribunal de grande instance de Nanterre qui a prononcé le jugement déféré.

Aux termes de ses conclusions précitées, la société Carrefour Supply Chain expose que la société Car -4Car -4 est propriétaire de l'entrepôt qui est géré par la société DTZ InvestorDTZ Investor et que la société Logidis, locataire de l'entrepôt, est une société distincte de la société Logidis Comptoir Moderne, devenue la société Carrefour Supply Chain.

Elle conteste donc avoir été locataire et rappelle les échanges intervenus.

Elle se prévaut de pièces communiquées en cause d'appel par la société Suez Eau France, notamment des factures, démontrant que l'abonné du site était la société Exel Service Logistique et souligne que le conseiller de la mise en état a rappelé, par ordonnance du 19 octobre 2018, qu'il appartenait à la société Suez de démontrer sa qualité d'abonnée.

Elle soutient qu'elle ne rapporte pas cette preuve.

Elle fait état de sa mauvaise foi lorsqu'elle a prétendu devant le conseiller de la mise en état n'avoir jamais soutenu qu'elle était son abonnée entre juin 2002 et juin 2011 et cite son assignation et ses conclusions.

Elle fait valoir qu'elle ne verse aux débats aucune pièce de nature à démontrer qu'elle aurait eu la qualité d'abonné du mois de juin 2002 au mois de juin ou d'octobre 2011.

Elle affirme qu'elle ne démontre pas qu'elle ou la société LCM aurait réglé des factures au titre de la période de juin 2002 à juin 2011.

Elle ajoute qu'elle ne verse aux débats aucune pièce corroborant qu'elle a souscrit un contrat d'abonnement du mois de juin 2002 au mois de juin 2011.

Elle rappelle les articles 1353 du code civil et 9, 15 et 132 du code de procédure civile.

Elle estime que seules les factures- contrats qui auraient été émises par elle au nom de la société Logidis Comptoirs Modernes, devenue Carrefour Supply Chain, pour la période de consommation antérieure au départ de Logidis au mois de juin 2011 permettraient d'établir sa qualité d'abonnée à cette date.

Elle considère donc comme légitime sa sommation de communiquer du 4 octobre 2017 et demande qu'il soit tiré toutes conséquences du refus de la société Suez d'y obtempérer.

Elle soutient, en conséquence, que la société Suez Eau France ne rapporte pas la preuve d'un contrat d'abonnement et d'approvisionnement d'eau souscrit par la société LGM et de sa qualité d'abonnée pour la période antérieure au congé donné par la société Logidis en juin 2011.

Elle estime qu'il lui était simple de rapporter cette preuve, ces pièces ayant été établies par elle.

Elle réitère qu'elle n'avait pas la qualité d'abonnée pour cette période.

Elle affirme que les pièces communiquées par la société Suez dans le cadre de l'incident le confirment, l'abonné étant la société Exel Service Logistique.

La société soutient également que la société Suez n'établit pas sa qualité de locataire et d'occupant du site.

Elle rappelle que le bail a été conclu avec la société Logidis et réitère que cette société est distincte de la société Logidis Comptoirs Modernes, devenue Carrefour Supply Chain, les deux sociétés étant immatriculées sous des numéros distincts.

Elle estime que la disposition par elle d'un établissement secondaire à [Localité 1] n'est pas de nature à lui conférer la qualité de locataire.

Elle affirme que, dans sa lettre du 29 avril 2013, le préposé de la société LCM n'a pas indiqué expressément que la société Carrefour Supply Chain aurait été locataire de la SCI Car-4Car-4.

Elle affirme également que la société Suez le reconnaît lorsqu'elle indique dans son courrier du 3 octobre 2013 qu'un compte client a été créé chez elle le 3 novembre 2011 pour la société DTZ Carrefour du fait du départ du site de la société Exel Logistique ».

Elle souligne que, dans le cadre de l'incident, la société Suez Eau France a produit des pièces démontrant que les lieux étaient occupés par la société Exel Logistique.

Elle en conclut qu'elle ne peut invoquer sa qualité de locataire pour solliciter le paiement d'une facture correspondant à une consommation du 2 novembre 2011 au 31 octobre 2012.

Elle réfute sa qualité de sous-locataire.

Elle admet que le bail conclu entre la société Car-4Car-4 et la société Logidis autorise la sous-location au profit de toute entité du groupe Carrefour mais soutient qu'il ne peut être déduit de cette disposition générale qu'elle a effectivement été sous-locataire de la société Logidis.

Elle affirme qu'il en est de même de la lettre de Mme [V] qui indique que la société LCM, filiale du groupe Carrefour, a restitué les clés du site de [Localité 1] mais qui ne précise pas en quelle qualité.

Elle soutient, en tout état de cause, que cette discussion sur la qualité d'occupant est inopérante, seule la qualité d'abonné de la société LCM pendant la période de juin 2002 à juin/octobre 2011 important.

Elle réitère que la société Suez ne rapporte pas cette preuve.

Elle reproche au tribunal d'avoir déduit sa qualité d'abonnée d'éléments non probants.

Elle rappelle que la société Logidis est une société distincte.

Elle estime sans incidence que les deux sociétés avaient leur siège social [Adresse 5] et étaient des filiales de la société Carrefour.

Elle réitère que sa qualité d'abonnée ne peut être démontrée que par le contrat d'abonnement ou les factures-contrats.

Elle fait grief au tribunal d'avoir déduit sa qualité d'abonnée de factures émises par erreur par la société Suez Eau France au nom de DTZ Carrefour.

S'agissant de la facture contrat du 3 novembre 2011, elle conteste qu'elle puisse établir sa qualité d'abonnée pour la période antérieure.

Elle fait valoir que la société Suez Eau France fonde ses demandes sur sa prétendue qualité d'abonnée lors de l'occupation des lieux par la société Logidis soit entre le 1er juin 2002 et le 30 juin 2011.

Elle estime que cette facture postérieure ne peut rapporter cette preuve.

Elle affirme également que cette facture résulte d'une erreur de la société Suez Eau France comme le démontre son intitulé.

Elle ajoute qu'elle ne pouvait avoir la qualité d'abonnée pour cette période postérieure au départ du locataire car le site était vacant comme l'indique la société DTZ, mandataire de la société Car-4Car-4, dans son courrier du 23 mars 2015.

Elle relève également que cette facture a été établie à la suite de la création d'un nouveau compte le 3 novembre 2011 ainsi que l'a écrit la société Suez Eau France ce qui démontre qu'elle ne correspond pas à un compte antérieur afférent à l'occupation des lieux du mois de juin 2002 au mois de juin 2011.

Elle déclare enfin que la facture contrat du 3 novembre 2011 n'a pas été payée par elle mais par la société Carrefour France.

Elle en conclut que ce paiement ne peut caractériser sa qualité d'abonnée.

Elle ajoute qu'elle a été réglée par erreur par la société Carrefour France.

S'agissant des factures établies ultérieurement à l'occupation du site, les 3 novembre et 2 décembre 2011 et 20 mars et 15 juin 2012, elle relève qu'elles ne sont pas libellées à son nom mais au nom de la société DTZ Carrefour soit deux entités différentes, DTZ gérant les actifs de la SCI Car 4Car 4.

Elle indique également qu'elles ont été établies, suite à l'ouverture d'un compte au mois de novembre 2011, par la société DTZ, la société Car-4Car-4 ayant repris l'exploitation de l'immeuble.

Elle fait valoir que c'est l'ouverture de ce compte qui a généré ces factures et rappelle que le locataire avait donné congé au 30 juin 2011 et que, pour la période concernée, du 2 novembre 2011 au 31 octobre 2012, le site était vacant.

Elle souligne qu'elle n'a pas contacté la société Suez pour créer ce compte.

Elle soutient que c'est le propriétaire des lieux, la société Car-4Car-4, qui a repris l'abonnement au départ de son locataire.

Elle affirme donc que la société Suez Eau France a commis une erreur dans le libellé des factures.

Enfin, elle déclare qu'elle n'a réglé aucune de ces factures, celles-ci ayant été payées par la société Carrefour France ce qui n'est pas de nature à caractériser la qualité d'abonnée de sa filiale.

Elle ajoute que ces factures ont été réglées par erreur par la société Carrefour France ainsi que celle-ci l'a écrit le 11 décembre 2013.

Elle déclare que la facture litigieuse correspond à une consommation d'eau excessive pour la période du 2 novembre 2011 au 21 octobre 2012.

Elle estime qu'elle ne peut concerner l'ancien locataire ou occupant du site.

Elle affirme que la société Logidis a quitté les lieux le 6 octobre 2011 et non en décembre comme le prétend la société Car-4Car-4.

Elle relève que celle-ci produit deux constats d'huissier établis les 6 octobre et 5 décembre 2011 et déclare, les citant, qu'ils ne démontrent pas que la société Logidis est restée jusqu'au 5 décembre 2011, le constat du 6 octobre précisant que les clefs du site sont remises.

Elle ajoute que la société DTZ a écrit que la société Car-4Car-4 avait repris l'exploitation de l'immeuble le 6 octobre 2011.

Elle excipe également d'un courrier du 3 octobre 2013 de la société des Eaux de Senart et d'une lettre de la société Car-4Car-4 faisant état de la vacance du site à compter du 2 novembre.

En réponse à celle-ci, elle réitère qu'elle n'était pas locataire de la société Car-4Car-4.

Elle soutient que la fuite invoquée est postérieure au départ du locataire.

Elle fait valoir qu'à la suite du départ du locataire, aucune consommation excessive d'eau et aucune fuite n'ont été constatées, le relevé du compteur le 2 novembre 2011 faisant apparaître une consommation de 0 m3 ainsi qu'il résulte d'un courrier de la société des Eaux et de la facture du 3 novembre.

Elle ajoute que le constat du 6 octobre ne mentionne aucune difficulté

Elle relève que c'est en août 2012 que la société Car-4Car-4 aurait découvert la fuite à l'origine de la facture litigieuse.

Elle affirme qu'elle ne démontre pas que son locataire aurait enterré une alimentation d'eau potable qui serait laissée grande ouverte grande.

Elle déclare en outre que cette affirmation est contredite par le relevé du compteur en novembre 2011.

Elle réitère que c'est la société Excel Service Logistique qui avait la qualité d'abonnée ainsi qu'il résulte, notamment, des factures produites dans le cadre de l'incident de communication de pièces dont celle d'arrêté de compte du 3 novembre 2011.

Elle réitère qu'en tout état de cause, la société Car-4Car-4 est responsable de la consommation excessive.

Elle reprend ses développements précédents et fait valoir qu'il appartenait à la société de s'assurer du bon fonctionnement de l'installation par des relevés de compteur réguliers.

Elle ajoute qu'elle n'a joint la société Suez que le 31 octobre 2012 alors qu'elle était informée de la fuite dès le 9 août.

Enfin, elle déclare qu'elle ne rapporte pas la preuve d'un prétendu raccordement de l'alimentation au réseau d'évacuation qui émanerait de son locataire.

A titre subsidiaire, elle demande le dégrèvement prévu par l'article R. 2224-19-2 du code général des collectivités territoriales en cas de fuite.

Aux termes de ses écritures précitées, la SAS Suez Eau France expose que l'entrepôt a été donné à bail à la société Logidis, filiale logistique de la société Carrefour, du 1er juillet 2002 au 30 juin 2011 et que l'article 13 du bail autorise la sous location au profit de toute entité du groupe Carrefour.

Elle déclare que c'est en vertu de cette stipulation que la société LCM (Logidis Comptoirs Modernes), filiale du groupe Carrefour, est devenue sous-locataire et a occupé l'entrepôt jusqu'en décembre 2011, puisque que c'est à cette date a rendu les clés à la société DTZ Investors, gérant les actifs de la société Car-4Car-4.

Elle observe que la société Car-4Car-4 indique, dans ses dernières conclusions, que la société Logidis a gardé les clés de l'entrepôt jusqu'au 6 décembre 2011, puisqu'elle a dû procéder à la réalisation de nombreuses réparations locatives entre le 30 juin 2011 et le 6 décembre 2011.

Elle en infère que, de juin à décembre 2011, l'entrepôt était donc encore occupé et l'était manifestement par la société LCM, filiale à 97,39 % de la société Logidis.

Elle expose que, pour l'alimentation en eau de cet entrepôt et la collecte des eaux usées, la société LCM a souscrit un contrat d'abonnement avec la société Lyonnaise des Eaux France et a honoré toutes les factures d'eau.

Elle affirme qu'au terme de son occupation, en décembre 2011, la société LCM n'a pas résilié son contrat d'abonnement dans les conditions prévues à l'article 8 du règlement du service et, de fait, a continué à régler des factures d'eau jusqu'en octobre 2012.

Elle précise que la société Car-4Car-4 l'a jointe le 31 octobre 2012 pour lui communiquer l'index du compteur, égal à 44 263 m³ ce qui a été vérifié in situ par son préposé le 14 novembre 2012 et donné lieu, le 7 janvier 2013, à la facture d'arrêt de compte d'un montant de 95 965,38 € TTC pour la consommation intervenue entre le 2 novembre 2011 et le 31 octobre 2012.

Elle rappelle les courriers échangés et la procédure et précise que le jugement a été exécuté.

La société sollicite la confirmation du jugement.

Elle soutient que la société Carrefour Supply Chain avait la qualité de sous-locataire et/ou d'occupant des locaux.

Elle fait valoir que la société Carrefour Supply Chain avait un établissement secondaire situé [Adresse 6] où elle exerçait son activité sous l'enseigne Logidis Comptoirs Modernes.

Elle fait également valoir que la société Carrefour Supply Chain a été sous-locataire ou occupante de l'entrepôt situé au [Adresse 4].

Elle se prévaut de la lettre précitée de Mme [V] qui, exerçant la fonction de contrôleur de gestion site, ne se méprend ni sur le site que la société Carrefour Supply Chain a effectivement occupé jusqu'à la date du 6 décembre 2011 ni sur la date de remise des clefs.

Elle ajoute que la qualité de locataire ou de sous-locataire importe peu dans la mesure où il est démontré qu'elle était occupante des lieux jusqu'en décembre 2011.

Elle soutient que la société Carrefour Supply Chain avait la qualité d'abonnée.

Elle expose que les fournisseurs d'énergie et de fluide ne font plus signer de polices d'abonnement et que la souscription est établie sous forme d'une facture-contrat.

Elle déclare que la facture-contrat du 3 novembre 2011 d'un montant de 326,53 euros TTC a été réglée par la société Carrefour Supply Chain et en infère qu'elle était contractuellement liée à elle.

Elle ajoute qu'en tout état de cause, l'article 1341 du code civil n'est pas d'ordre public et qu'il est possible de démontrer que les parties ont entendu y déroger.

Elle affirme que la société Carrefour Supply Chain a, ainsi, accepté de régler des factures sans exiger d'écrit préconstitué exécutant donc volontairement le contrat d'abonnement.

Elle excipe également d'une lettre de sa part dans laquelle elle confirme l'imputation de ses paiements sur les factures émises au titre du contrat d'abonnement.

Elle en infère qu'elle a tacitement renoncé à exiger la production d'un écrit conformément à l'article 1341 du code civil.

Elle ajoute que leurs relations sont commerciales et, donc, que la preuve est libre, l'existence d'un contrat d'abonnement écrit n'étant pas requise.

Elle soutient que la société Carrefour France, maison-mère de la société Carrefour Supply Chain, est chargée de régler l'ensemble des fournisseurs du groupe et rappelle qu'elle a procédé au règlement de plusieurs factures relatives à l'entrepôt de [Localité 1], soit celles du 3 novembre 2011, du 2 décembre 2011 et du 20 mars 2012.

Elle souligne que tous les fournisseurs du groupe Carrefour doivent adresser leurs factures à un « Centre de règlement Fournisseurs » situé à [Localité 2].

Elle s'étonne que si ces factures ont été réglées par erreur, la société Carrefour France n'en ait pas sollicité le remboursement.

Elle en conclut que ces règlements prouvent surabondamment l'existence d'une relation contractuelle.

Elle se prévaut enfin d'une lettre du 8 novembre 2012 du service des frais généraux de la société Carrefour France qui a confirmé expressément l'imputation de ses différents règlements sur les factures relatives à ce contrat d'abonnement.

Elle relève que, si ces factures sont improprement libellées comme prétendu, la société redevable les a honorées et souligne qu'elles ont été adressées au siège de la société Carrefour Supply Chain.

Elle affirme en outre que la société Carrefour Supply Chain a fait l'aveu exprès de sa qualité d'abonnée en première instance avant de se rétracter.

Elle fait valoir qu'elle a demandé dans tous les cas à bénéficier du dégrèvement sur la redevance d'assainissement et, ainsi, estimé qu'elle satisfaisait à toutes les conditions pour en bénéficier.

Elle souligne que seul l'abonné peut en bénéficier et en infère qu'elle a fait l'aveu judiciaire de sa qualité d'abonnée au service d'eau potable et au service d'assainissement.

Elle fait également valoir qu'elle n'a pas résilié le contrat d'abonnement qui la liait à la société Suez Eau France lorsqu'elle a, selon ses propres termes, «rendu les clés » de l'entrepôt à la société DTZ Investors en décembre 2011.

Elle en conclut qu'elle avait encore la qualité d'abonné des services de distribution publique d'eau potable et d'assainissement collectif au cours de la période où la consommation d'eau est intervenue (du 2 novembre 2011 au 31 octobre 2012) et, donc, qu'elle est seule redevable de la consommation d'eau peu important qu'elle n'ait pas bénéficié concrètement des prestations entre décembre 2011 et octobre 2012.

Elle souligne à cet égard que la notion d'abonné est distincte de celle d'usager et qu'il appartenait à la société Carrefour Supply Chain de mettre fin au contrat d'abonnement en le résiliant dans les formes stipulées à l'article 8 du règlement du service.

L'intimée déclare justifier de sa créance.

S'agissant de la majoration de la redevance d'assainissement, elle rappelle que l'article R 2214-19-9 du code général des collectivités territoriales comporte des dispositions spécifiques en cas de retard dans le paiement de la redevance d'assainissement.

Elle rappelle ses mises en demeure et les termes de l'assignation et, citant des arrêts, en conclut qu'elle est bien fondée à réclamer à sa cocontractante la majoration prévue.

Elle s'oppose à la demande de dégrèvement fondée sur l'article R. 2224-19-2 du code général des collectivités territoriales.

Elle soutient que le dégrèvement de la redevance d'assainissement n'est possible que si l'abonné a bénéficié d'un dégrèvement sur sa consommation d'eau en application des dispositions des articles L. 2224-12-4 et R. 2224-20-1 du code général des collectivités territoriales et qu'il est réservé aux seuls abonnés domestique qui, de surcroît, ont ayant subi une fuite sur canalisation, ce qui n'est pas le cas de la société Carrefour Supply Chain qui a maintenu ouverte une vanne.

A titre subsidiaire, la société demande la condamnation de la société Car-4Car-4 à réparer le préjudice né du non règlement de cette facture sur le fondement des dispositions de l'ancien article 1382 du code civil.

Elle invoque sa qualité de propriétaire de l'entrepôt qui en a retrouvé la jouissance en décembre 2011 et soutient qu'elle aurait dû se soucier davantage du branchement d'eau alimentant son bien immobilier, voire demander immédiatement à la société Suez Eau France la mutation du contrat d'abonnement à son nom.

Elle souligne qu'elle a attendu le 31 octobre 2012 pour contacter la société Suez Eau France, lui transmettre l'index du compteur et demander à s'abonner au service d'eau potable.

Elle souligne également qu'elle a attendu le 8 août 2012, à l'occasion d'une intervention technique sur le site, pour constater que la société Carrefour Supply Chain avait quitté les lieux en laissant grande ouverte une alimentation d'eau se rejetant dans le réseau d'assainissement.

Elle soutient que si elle avait exercé avec sérieux ses prérogatives de propriétaire et de gardien de la chose, elle aurait repéré, dès le départ de la société Carrefour Supply Chain, cette alimentation d'eau ouverte en permanence.

Elle fait valoir que cette faute est la cause de la très forte consommation d'eau que la société Suez Eau France est susceptible de ne pas recouvrer auprès de la société Carrefour Supply Chain si la cour venait à la débouter de ses conclusions en paiement fondées sur la responsabilité contractuelle.

Aux termes de ses écritures précitées, la Sarl Car-4 1 expose que la consommation d'eau est imputable à la société Carrefour Supply Chain.

Elle déclare que celle-ci a quitté les lieux le 6 décembre 2011, date de la remise des clefs effectuée par Logidis ainsi qu'il résulte du constat d'huissier établi à cette date et de sa propre lettre du 29 avril 2013.

Elle souligne que l'huissier a mentionné, le 6 octobre 2011, que la société Logidis devait encore réaliser des travaux de remise en état.

Elle estime inopérant le moyen tiré d'une consommation d'eau de 0 m3, le compteur étant à zéro en raison de la pose, le même jour, d'un nouveau compteur.

Elle conteste l'appel en garantie de la société carrefour Supply Chain.

Elle fait valoir, avec le tribunal, que l'anomalie (les canalisations enterrées), qui n'était pas visible, a été découverte grâce aux investigations de l'entreprise EPLS, missionnée par le propriétaire.

Elle rappelle également que seul l'abonné à la garde des équipements et qu'il lui appartenait de résilier le contrat.

Elle réfute tout retard dans l'information donnée, relève qu'elle n'est pas à l'origine de la surconsommation d'eau et indique qu'elle a immédiatement fermé cette alimentation.

Elle ajoute que la consommation d'eau a été arrêtée le 7 août 2012 et, donc, que la date à laquelle la société Suez Eau France a été informée de l'index des compteurs importe peu.

Elle s'oppose à la demande subsidiaire formée contre elle.

Elle conteste avoir commis une faute.

Elle affirme que le raccordement de l'alimentation au réseau d'évacuation effectué par l'ancien locataire était indécelable et qu'il était totalement imprévisible pour le propriétaire que le locataire procéderait à un branchement aussi absurde.

Elle affirme également que la société Suez Eau France a contribué à son propre dommage, puisqu' elle n'a procédé à aucun relevé sur site du compteur pendant plus d'un an, depuis le 2 novembre 2011 jusqu'au 14 novembre 2012, alors que le constat d'une consommation anormale aurait conduit la société Carrefour Supply Chain à réagir plus tôt.

Elle n'entend pas intervenir dans la relation contractuelle entre la société Suez Eau France et la société Carrefour Supply Chain mais relève que, si ces sociétés s'étaient acquittées de leurs obligations contractuelles- résilier le contrat pour l'une et procéder au relevé du compteur pour l'autre- elles n'auraient pas à déplorer la consommation excessive qui est aujourd'hui l'objet de leur litige.

S'agissant de la majoration de la redevance d'assainissement, elle expose qu'elle n'est pas débitrice de la facture de résiliation d'un contrat d'abonnement auquel elle n'est pas parti et estime qu'a fortiori, elle ne doit pas la majoration de 25% de la redevance d'assainissement qui réclamée par Suez Eau France et qui sanctionne le retard dans le paiement de ladite redevance dans un délai de 3 mois à compter de la présentation de la quittance.

Elle rappelle que la quittance n'est pas libellée à son attention et que la demande de condamnation n'est présentée qu'à titre subsidiaire à son encontre.

************************

Sur l'aveu de la société Carrefour Supply Chain

Considérant que la société a demandé, dans ses écritures numéro 2 devant le tribunal, à bénéficier, «dans tous les cas», du dégrèvement sur la redevance d'assainissement ; que ce dégrèvement ne peut être sollicité que par l'abonné ;

Mais considérant que l'aveu- qui peut être implicite- doit être dépourvu d'équivoque ; qu'il exige de la part de son auteur une manifestation non équivoque de sa volonté de reconnaître pour vrai un fait de nature à produire contre lui des conséquences juridiques ;

Considérant que la société a toujours contesté être abonnée ;

Considérant que, dans ses écritures invoquées, elle conclut au rejet de la demande ;

Considérant que, dans le corps de celles-ci, elle indique, immédiatement après le titre d'un paragraphe sollicitant ce dégrèvement «dans tous les cas», qu'elle demande ce dégrèvement «à titre extrêmement subsidiaire pour le cas où le tribunal entrerait en voie de condamnation» à son encontre ;

Considérant, ainsi, que la formulation -maladroite- «dans tous les cas» ne peut contenir l'aveu univoque que la société était abonnée ; qu'elle ne peut valoir aveu de sa qualité d'abonnée ;

Sur la demande formée contre la société Carrefour Supply Chain

Considérant qu'il appartient à la société Suez Eau France de rapporter la preuve que la société Carrefour Supply Chain est redevable de la facture émise le 7 janvier 2013';

Considérant que cette facture correspond, nonobstant les termes employés, à une consommation d'eau du 3 novembre 2011 au 31 octobre 2012';

Considérant qu'elle doit donc démontrer qu'elle avait la qualité d'abonnée ;

Considérant qu'aucun contrat d'abonnement n'est produit ;

Mais considérant que cette preuve est libre';

Considérant que les «'factures-contrat'» produites par la société Suez Eau France au titre des locaux litigieux de 2008 au 3 novembre 2011 sont toutes au nom de la société Exel Service Logistique';

Considérant, s'agissant de la dernière facture, qu'elle porte la mention «'arrêt de compte'», qu'elle s'élève à 3.664,29 euros compte tenu d'un solde débiteur antérieur au 2 novembre 2011';

Considérant que la société Suez Eau France ne peut donc se prévaloir de ces factures pour justifier de la qualité d'abonnée de la société Carrefour Supply Chain';

Considérant qu'une autre facture contrat a été émise en date du 3 novembre 2011'; qu'elle ne fait état d'aucune consommation'; que son montant- 326,53 euros- correspond à diverses prestations'; qu'elle est libellée au nom de «'DTZ Carrefour'»':

Considérant que ces entités sont distinctes, «'DTZ'» étant le gestionnaire de la société désormais CAR-4'1;

Considérant que l'intimée ne verse aux débats aucune pièce de nature à démontrer que ce compte a été ouvert à la demande de l'appelante';

Considérant que cette facture ne contient aucune référence à la société Carrefour Supply Chain';

Considérant qu'elle ne peut donc établir sa qualité d'abonnée';

Considérant qu'elle n'a pas été payée par l'appelante';

Considérant qu'elle a été payée par la société Carrefour France';

Considérant qu'il est constant que cette société est chargée de payer l'ensemble des fournisseurs du groupe Carrefour';

Mais considérant, d'une part, que la société appelante a sa propre personnalité morale';

Considérant, d'autre part, qu'il ne résulte pas de ces attributions que la société Carrefour France a payé cette facture pour le compte de la société appelante';

Considérant que ce paiement ne peut donc établir la qualité d'abonnée de celle-ci';

Considérant que la société Suez Eau France rapporte la preuve du paiement par la société Carrefour France d'autres factures';

Mais considérant qu'aucun des relevés produits ne mentionne la société appelante comme donneur d'ordre';

Considérant également qu'il n'est nullement établi que ces factures ont été adressées à la société Carrefour Supply Chain';

Considérant, par conséquent, qu'aucune de ces pièces ne démontre la qualité d'abonnée de la société Carrefour Supply Chain';

Considérant, s'agissant de l'occupation des locaux, que la société Carrefour Supply Chain, anciennement Logidis Comptoir Moderne, est une société distincte de la société Logidis'; que sa qualité de filiale de celle-ci à hauteur de 97,39 % ne lui retire pas ce caractère de société propre';

Considérant que la circonstance que la société Logidis ait été locataire du site ayant donné lieu à la consommation d'eau ne peut donc être opposée à la société Carrefour Supply Chain';

Considérant que la société Suez Eau France ne rapporte pas la preuve d'un contrat de sous-location, de cession de bail ou de location- gérance du local au profit de la société appelante';

Considérant que la société Suez Eau France ne démontre pas que l'établissement secondaire dont disposait lors des faits la société Carrefour Supply Chain [Adresse 4] est situé à l'adresse des locaux litigieux';

Considérant que Mme [V], au nom de la société LCM, a écrit le 29 avril 2013 que «'la société LCM, filiale du groupe Carrefour, a restitué les clefs du site' en décembre 2011 à son propriétaire, la société DTZ'»';

Considérant, toutefois, que les termes de ce courrier sont contredits par les constats dressés par Maître [L], huissier de justice, les 6 octobre 2011 et 5 décembre 2011 aux termes desquels celui-ci a, lors de ses constats d'état des lieux, rencontré des représentants de la société Logidis'; que dans ses conclusions, la société Car-4-1Car-4-1 indique que le locataire lui a, le 5 décembre 2011, restitué les clefs';

Considérant qu'ainsi, les clefs ont été restitués par la société Logidis';

Considérant, en outre, que, par courrier du 11 décembre 2013- rappelé le 17 juillet 2015-, la société Carrefour-Direction juridique- a contesté avoir exploité le site';

Considérant que le seul courrier de Mme [V], corroboré par aucune autre pièce et dont la teneur a été contestée quelques mois plus tard, ne permet pas de démontrer que la société Carrefour Supply Chain a occupé les locaux';

Considérant que la société Suez Eau France ne peut ainsi exciper utilement de la qualité d'occupante qu'aurait eue la société appelante';

Considérant, par conséquent, que la société Suez Eau France ne démontre pas que la société Carrefour Supply Chain a eu la qualité d'abonnée';

Considérant qu'elle n'établit donc pas sa qualité de débitrice de la facture litigieuse';

Considérant que les demandes formées à son encontre seront dès lors rejetées'; que le jugement sera infirmé';

Sur la demande formée contre la société Car-4 1

Considérant que la société Suez Eau France invoque la responsabilité quasi délictuelle de la société'; qu'il lui appartient donc de rapporter la preuve d'une faute de celle-ci';

Considérant que le responsable de la société AMF QSE expose qu'il est intervenu sur le site aux motifs que les pompes de relevage ne redémarraient pas et que le niveau d'eau montait'; qu'il a procédé à une vaine recherche de fuite sur l'intégralité du bâtiment avant de constater, à proximité du poste de sécurité,'«'une alimentation eau potable enterrée grande ouverte'»'; qu'il précise qu'il s'agit de l'ancien départ d'alimentation de bungalows dont l'arrivée aurait dû être coupée lors de leur retrait'; qu'il déclare qu'elle a, au contraire, dû être enfouie et connectée sur l'évacuation';

Considérant qu'au lieu d'être stoppée lors du départ du locataire, cette alimentation a donc été connectée sur l'évacuation';

Considérant que l'existence de cette surconsommation a été constatée car les pompes de relevage ne fonctionnaient plus';

Considérant que cette surconsommation n'est pas due à une fuite mais à une connexion dont l'existence pouvait difficilement être envisagée'; qu'elle n'a été décelée que par des spécialistes et après l'échec de leurs recherches entreprises sur le bâtiment lui-même';

Considérant qu'il ne peut être fait grief à la société de n'avoir pas détecté ce branchement';

Considérant que cette faute est d'autant moins établie qu'un relevé sur place aurait permis de déceler plus tôt cette surconsommation';

Considérant que la société Suez Eau France n'a procédé à aucun relevé du compteur sur le site du 2 novembre 2011 au 14 novembre 2012, ce dernier étant consécutif à l'information que lui avait fournie la société';

Considérant que la société Suez Eau France ne rapporte donc pas la preuve d'une faute de la société';

Considérant, enfin, qu'il ressort du compte-rendu d'intervention du 7 août 2012 et du courriel précité qu'il a été mis fin, dès ce constat, à la cause de la surconsommation';

Considérant qu'aucune faute postérieure de la société à l'origine de cette surconsommation n'est donc avérée';

Considérant que la société Suez Eau France ne rapporte donc pas la preuve d'une faute de celle-ci';

Considérant que ses demandes formées à l' encontre de la société Car-4 1 seront rejetées ;

Sur les autres demandes

Considérant qu'en équité, les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées';

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition ;

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant de nouveau et y ajoutant :

REJETTE les demandes formées par la société Suez Eau France contre la société Carrefour Supply Chain,

REJETTE les demandes formées par la société Suez Eau France contre la société Car-4 1,

REJETTE les demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE la société Suez Eau France aux dépens de première instance et d'appel,

AUTORISE Maître Dumeau et, pour ceux la concernant, l'Aarpi INTER-BARREAUX JRF à recouvrer directement à son encontre les dépens qu'elles ont exposés sans avoir reçu provision ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Monsieur Alain PALAU, président, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 17/04735
Date de la décision : 04/06/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°17/04735 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-04;17.04735 ?
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