COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
1ère chambre 1ère section
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
Code nac : 63B
DU 02 AVRIL 2019
N° RG 17/05181
AFFAIRE :
U... B...
T... H... épouse B...
C/
P... K...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Juin 2017 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
POLE CIVIL
N° Chambre : 1
N° RG : 15/09509
Expéditions exécutoires
Expéditions
délivrées le :
à :
-SCP HB & ASSOCIES- HITTINGER-ROUX BOUILLOT & ASSOCIES
-Me Guy REBBOAH
-SCP CORDELIER & Associés
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DEUX AVRIL DEUX MILLE DIX NEUF,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant après prorogation les 16 novembre 2018, 11 janvier ,08 février et le 26 mars 2019 les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :
Monsieur U... B...
né le [...] à ARIANA (TUNISIE)
de nationalité Française
[...]
représenté par Me Stéphane BOUILLOT de la SCP HB & ASSOCIES-HITTINGER-ROUX BOUILLOT & ASSOCIES, avocat - barreau de PARIS, vestiaire : P0497 - N° du dossier 27993
Madame T..., V... H... épouse B...
née le [...] à PARIS (75004)
de nationalité Française
[...]
représentée par Me Guy REBBOAH, avocat - barreau de PARIS, vestiaire : P0545
APPELANTS
****************
Monsieur P... K...
né le [...] à BELFORT
de nationalité Française
[...]
représenté par Me Agathe CORDELIER de la SCP CORDELIER & Associés, avocat postulant - barreau de PARIS, vestiaire : P0399 - N° du dossier 15.00198
Me Jean-Pierre CORDELIER de la SCP CORDELIER & Associés, avocat plaidant - barreau de PARIS
INTIMÉ
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 septembre 2018 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne LELIEVRE, conseiller, et Madame Nathalie LAUER, conseiller, chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Alain PALAU, président,
Madame Anne LELIEVRE, conseiller,
Madame Nathalie LAUER, conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE,
Vu le jugement rendu le 15 juin 2017 par le tribunal de grande instance de Nanterre qui a :
-déclaré Mme H... épouse B... recevable en son intervention volontaire à la procédure,
-débouté M. B... de sa demande au titre de la responsabilité civile professionnelle de Me K...,
-débouté Mme H... épouse B... de sa demande au titre de la responsabilité civile contractuelle et de la responsabilité civile délictuelle de Me K...,
-rejeté les demandes plus amples ou contraires,
-débouté Me K... de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamné in solidum M. et Mme B... aux dépens, lesquels pourront être recouvrés selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile,
-dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire.
Vu l'appel relevé le 6 juillet 2017 par M. B... qui, dans ses dernières conclusions notifiées le 4 avril 2018, demande à la cour de :
-Dire et juger M. B... recevable et bien fondé en son appel,
Y faisant droit,
-Infirmer le jugement frappé d'appel en ce qu'il a débouté M. B... de ses demandes indemnitaires,
Statuant à nouveau,
-Dire et juger que les fautes commises par Me K... sont directement à l'origine du préjudice subi par M. B...
Vu les dispositions des articles 1147 et suivants du code civil,
-Condamner Me K... à payer à M. B... les sommes de :
-151.295,80 euros intérêts au taux légal capitalisés à compter de la délivrance de l'assignation, au titre de l'indemnisation des conséquences du redressement fiscal dont M. B... a injustement fait l'objet,
-10.000 euros, au titre des frais de justice inutilement engagés,
-50.000 euros, à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral.
-Condamner Me K... à payer à M. B... une indemnité de procédure de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile,
-Condamner Me K... aux dépens, de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP HB et Associés, Avocats.
Vu l'intervention volontaire de Mme B... qui, dans ses dernières conclusions notifiées le 3 avril 2018, demande à la cour de :
Statuant sur l'appel de M. B... en date du 6 juillet 2017 à l'encontre du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nanterre du 15 juin 2017,
-Le déclarer recevable et bien fondé,
Y faisant droit,
-Déclarer recevable et bien fondée en ses conclusions Mme B...,
-Dire l'appel incident de Me K... irrecevable et mal fondé,
-L'en débouter,
-Confirmer partiellement le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nanterre en ce qu'il a déclaré Mme H... épouse B... recevable en son intervention volontaire à la procédure,
-En revanche, infirmer le jugement frappé d'appel en ce qu'il a débouté Mme B... de ses demandes indemnitaires.
Statuant à nouveau :
-Dire et juger que les fautes commises par Me K..., sont directement à l'origine du préjudice moral et financier subi respectivement par Mme et M. B...,
Sur le fondement de l'article 1382 du code civil, condamner Me K... à payer à Mme B... les sommes suivantes, lesquelles viendront se confondre avec celles qui sont réclamées par son époux, M. B..., à savoir :
-151 295,80 euros(cent cinquante et un mille deux cent quatre vingt quinze euros et quatre vingt cents), avec les intérêts au taux légal capitalisés à compter de la délivrance de l'assignation au titre de l'indemnisation des conséquences du redressement fiscal dont M. B... a injustement fait l'objet,
-10 000 euros au titre des frais de justice inutilement engagés,
-50 000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice moral,
-Condamner Me K... à payer à Mme B..., une indemnité de procédure à hauteur de 7 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
-Condamner Me K... à payer les entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Me REBBOAH, avocat.
Vu les dernières conclusions notifiées le 20 mars 2018 par Me K..., par lesquelles, il demande à la cour de :
-dire les appels de M. et Mme B... irrecevables et mal fondés,
-les en débouter,
-dire l'appel incident de Me K... recevable,
-le dire bien-fondé en ce qu'il demande à la cour d'écarter les fautes qui lui ont été injustement reprochées par le contribuable et son épouse,
Statuant à nouveau,
-dire que l'avocat, tenu à une obligation de moyens, a fourni des prestations exemptes de critiques, dans le contexte qui a été décrit par l'appelant incident et, en tout cas, sans lien de causalité avec les préjudices dont il est demandé réparation,
En tout cas,
-confirmer le jugement dont est appel en ce que le tribunal juge que le contribuable ne démontre pas qu'il disposait de pièces et de moyens propres à faire échec au redressement opéré par l'Administration fiscale et qu'il aurait été exonéré de tout impôt,
-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il déboute M. et Mme B... de l'ensemble de leurs demandes.
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
-condamner M. et Mme B..., tenus in solidum, à payer à Me K... 10.000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me CORDELIER, avocat associé de la SCP Cordelier et Associés.
FAITS ET PROCÉDURE
Le 17 décembre 2009, à l'issue d'une procédure de vérification de comptes, l'administration fiscale a notifié à M. B..., associé-gérant de la SARL Mélanie qui exerce une activité de marchand de biens, une proposition de rectification relative à cette société ainsi qu'une proposition de rehaussement de son impôt sur le revenu et de ses contributions sociales pour les années 2006 à 2008.
Aux termes de cette seconde proposition n°2120, la révision de son impôt était motivée en raison :
- d'une part, de sommes laissées à sa disposition sur son compte-courant d'associé de la SARL Mélanie au titre des exercices clos en 2006, 2007 et 2008, requalifiées par l'administration fiscale en avances ou acomptes au bénéfice de M. B... et assimilés à des revenus qui lui ont été distribués en vertu de l'article 111 a du code général des impôts, relevant du régime de l'impôt sur le revenu,
- d'autre part, de sommes inscrites en 2008 sur ce même compte à hauteur de 258.870 euros, non justifiées et par conséquent assimilées à des revenus en application de l'article 109-1-2 du code général des impôts.
M. B... a donné mandat à Me K..., avocat, pour contester cette rectification, lequel a transmis un premier courrier à l'administration le 16 janvier 2010. Par lettre en retour du 11 février 2010, l'administration fiscale a confirmé le redressement envisagé.
Le 31 juillet 2010, l'administration fiscale a délivré à M. B... un avis de mise en recouvrement de cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales au titre des années 2006, 2007 et 2008.
Me K..., a présenté, le 21 septembre 2010, une réclamation contentieuse en vue d'obtenir le dégrèvement de ces impositions supplémentaires, laquelle a fait l'objet d'une décision de rejet en date du 9 novembre 2011.
Me K... a alors déposé un recours devant le tribunal administratif de Montreuil le 9 janvier 2012, invoquant le défaut de motivation de la proposition de rectification, l'absence de pouvoir de l'administration fiscale pour requalifier le montant du compte-courant en emprunt devant porter intérêts, enfin la possibilité de prouver par tout moyen et non exclusivement par la formalité prévue à l'article 1690 du code civil que les sommes enregistrées en 2008 dans le compte-courant d'associé de M. B... dans la société Mélanie provenaient du transfert de comptes-courants d'associé qu'il détenait dans les SCI Avner et MJJS.
Le tribunal administratif, par décision rendue le 16 novembre 2012, a rejeté le moyen tiré du défaut de motivation de la proposition de rectification et a jugé que M. B... n'apportait pas la preuve des moyens au fond qu'il avançait, n'établissant ni que les avances que lui a consenties la société Mélanie au titre des trois années comportaient des contreparties pour celle-ci justifiant qu'il ne lui verse pas d'intérêts, ni qu'il s'était conformé à l'article 1690 du code civil et que les soldes issus des comptes-courants qu'il détenait en tant qu'associé d'autres SCI et inscrits sur son compte-courant d'associé de la société Mélanie avaient effectivement été transférés à celle-ci.
Interjetant appel de cette décision, Me K... a déposé le 16 janvier 2013 un recours valant mémoire devant la cour administrative d'appel de Versailles, faisant à nouveau valoir le défaut de motivation de la rectification proposée faute de précision sur les modalités de sa détermination, ainsi que les mêmes arguments au fond.
Le 20 mars 2014, un procès-verbal de saisie-vente a été signifié à M. B... à la demande de l'administration fiscale pour recouvrement des sommes mises à sa charge. Me K... a été déchargé de son mandat au profit de Me J... selon télécopie de ce dernier adressée le 15 juillet 2014.
Le 8 août 2014, Me J... a transmis une requête en suspension du recouvrement des sommes ainsi qu'un mémoire complémentaire à la cour administrative d'appel de Versailles contenant de nouveaux arguments tenant à des contradictions entre les motifs de la rectification adressée à M. B... et celle visant la société Mélanie et a versé à cette occasion de nouvelles pièces pour justifier de l'existence des comptes-courants d'associés de M. B... auprès des sociétés Avner et MJJS et de leur transfert au bénéfice de la société Mélanie.
M. B... a exposé que c'est à cette occasion que son nouvel avocat a appris que l'audience des plaidoiries devant ladite cour s'était tenue le 1er juillet 2014 et que le délibéré avait été prononcé le 18 juillet 2014.
Par arrêt du 18 juillet 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a confirmé le jugement rendu par le tribunal administratif de Montreuil, au motif, d'une part, que M. B... ne justifiait d'aucune contrepartie au titre des avances consenties par la société Mélanie en 2006, 2007 et 2008, d'autre part, qu'il n'était pas établi que les sommes enregistrées dans son compte-courant d'associé en 2008 provenaient d'un transfert des soldes créditeurs des comptes-courants dont il disposait auprès de sociétés Avner et MJJS et cédés à la société Mélanie.
La demande de réouverture des débats devant la cour administrative d'appel ayant été rejetée, M. B... a formé un pourvoi devant le Conseil d'État le 3 novembre 2014, lequel n'a pas été admis par arrêt du 28 avril 2015.
M. B... a obtenu la suspension à titre gracieux de la procédure de recouvrement de sa dette fiscale.
C'est dans ces circonstances qu'il a fait assigner Me K... devant le tribunal de grande instance de Nanterre par acte délivré le 3 juillet 2015, pour voir engager sa responsabilité civile professionnelle en raison de son défaut de diligence dans la gestion de son dossier et de son manquement à son devoir de conseil, et obtenir réparation de son préjudice.
Mme H..., épouse B..., est intervenue volontairement à l'instance, se joignant aux demandes formulées par son époux.
Par le jugement dont appel, M. et Mme B... ont été déboutés de leurs demandes respectives.
SUR CE , LA COUR,
Considérant que, par application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément référé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens ;
Sur l'intervention volontaire de Mme B...
Considérant que Me K... conteste la recevabilité de l'intervention volontaire de Mme B... et par conséquent de son appel ; qu'à l'appui, il fait essentiellement valoir qu'il n'a jamais eu de lien de droit avec celle-ci ; que seul son époux est redevable de la dette fiscale ; qu'en l'absence de préjudice, sa responsabilité délictuelle n'est pas plus engagée ;
Considérant que Mme B... réplique qu'elle est bien fondée à se prévaloir des fautes délictuelles commises par Me K... dès lors en particulier que l'administration fiscale a exercé des poursuites notamment sur le domicile conjugal ;
Considérant ceci exposé que le jugement déféré relève exactement que des avis d'imposition au titre des contributions sociales et de l'impôt sur le revenu ont été notifiés par l'administration fiscale à M. et Mme B... U..., notifié à ces derniers un avis à tiers détenteur, pris une inscription hypothécaire sur le bien immobilier qui constitue la résidence principale des époux et notifié à ceux-ci un procès-verbal de saisie vente de biens mobiliers corporels ; que, par conséquent, pour le surplus, c'est par de justes motifs expressément adoptés par la cour que le tribunal a jugé que Mme B... avait qualité à intervenir à la procédure en responsabilité civile professionnelle engagée par son époux à l'encontre de Me K... ; que le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point ; que, par voie de conséquence, la recevabilité de son appel n'est pas contestable ;
Sur les fautes reprochées à Me K...
Considérant que Me K... a formé appel incident du jugement en ce qu'il a retenu à son encontre divers manquements à l'occasion de la phase judiciaire du contentieux ayant opposé M. B... à l'administration fiscale ; qu'à l'appui, il fait valoir qu'au cours de la phase contentieuse, il a été dessaisi du dossier et n'a pas été en mesure de remplir sa mission ; que certaines affirmations de M. B... sont inexactes ; que la lettre du 15 mai 2014 de son nouveau conseil l'a simplement informé de son intervention ; que le dossier a été transmis à celui-ci le 29 juillet suivant ; que les pièces qu'il lui est reproché de ne pas avoir présentées n'étaient autres que des pièces qui figuraient dans la comptabilité de la société Mélanie ; que serait-il prétendu que les pièces invoquées par l'appelant faisaient la preuve d'un transfert de fonds de deux sociétés civiles à une société commerciale, la société Mélanie, le refus de l'administration fiscale de dispenser le contribuable d'un impôt qu'il n'a pas payé, n'engage pas la responsabilité de l'avocat ; que les pièces dont se prévalent les appelants devant la cour étaient connues du juge fiscal ainsi qu'il en résulte du propre mémoire du conseil de M. B... devant le conseil d'État ; que la procédure devant le juge administratif est écrite ; que toutes les écritures échangées avec l'administration fiscale figuraient dans le dossier de son successeur ainsi que confirmé par la production par le demandeur notamment de la requête présentée au juge administratif ; que l'avocat est seulement tenu à une obligation de moyens ; que devant le tribunal administratif de Montreuil puis devant la cour administrative d'appel de Versailles, il a développé tous les moyens de procédure et de fond que le contribuable pouvait faire valoir ; que ces moyens sont d'ailleurs repris dans le mémoire complémentaire de son successeur ; que le changement d'avocat est intervenu alors que l'affaire avait été appelée à l'audience le 1er juillet 2014 ; que toutes les informations sur l'état d'une procédure en cours sont relatées sur le site de la juridiction saisie qui peut être consulté à tout moment par l'avocat de la partie ; que toujours est-il que la connaissance par le nouvel avocat du demandeur des échanges entre les parties et de la date d'audience fixée au 1er juillet 2014, avant son intervention remontant au 15 juillet suivant ne changeait rien à l'état de l'affaire ; que c'est bien l'entier dossier qui a été transmis le 29 juillet 2014 ; que s'agissant de l'absence de pièces suffisantes qui lui est reprochée, celles produites devant la présente cour n'établissent pas que M. B... aurait pu obtenir gain de cause ; que d'ailleurs, la cour administrative d'appel de Versailles n'a rien ignoré de l'existence des comptes courants et de la provenance des sommes qui motivent le redressement opéré par l'administration fiscale et vainement contesté par le contribuable ; que les pièces relatives aux cessions de créance n'ont pas été considérées comme probantes par la juridiction administrative ; qu'il n'est ni démontré, ni même allégué que d'autres pièces, dont il n'est fait aucune mention, auraient en particulier permis de pallier l'absence de l'accomplissement des formalités prévues à l'article 1690 du code civil ; que surtout, le juge de la responsabilité ne pourra ignorer que c'est au stade de la procédure de contrôle que le dossier présenté à l'administration est instruit ; que toutes les pièces justifiant selon le contribuable la régularisation des opérations critiquées ont nécessairement été communiquées au contrôleur ; que les pièces présentées devant la présente cour ne sont constituées que par une cession de quelques parts de deux SCI et des déclarations ISF des époux B... qui ne font pas apparaître l'existence des fonds transférés ; que, produites devant le juge de l'impôt, ces pièces n'auraient pas dispensé le contribuable du paiement de l'impôt qu'il cherche à faire payer par un tiers ; que les comptes courants sont des sources de revenus qui relèvent du régime général de l'impôt ; que dans le cas particulier, il n'est donné à la cour aucune information sur l'origine des fonds figurant au crédit du compte détenu par la société Mélanie et dont était titulaire M. U... B... ; que, faute d'accomplissement des formalités prévues à l'article 1690 du code civil, les cessions n'étaient pas opposables aux tiers et en particulier pas à l'administration fiscale ; que le mémoire de l'administration fiscale enregistré le 23 juillet 2012, en substance, ne nécessitait pas de réplique ; que la constatation par le contrôleur des avances dont avait bénéficié M. B... pouvait difficilement être combattue ; qu'en fait, M. B... n'avait pas mieux à dire qu'il s'agissait de fonds provenant d'un compte courant, c'est-à-dire de revenus au sens de la loi fiscale ; que les écritures échangées devant la cour administrative d'appel ont été transmises avec le dossier à son successeur ; que le mémoire en défense du ministère de l'économie et des finances enregistré le 18 septembre 2013 présente pour seul intérêt de faire référence aux pièces dont il est prétendu qu'elle n'aurait pas figuré dans les débats ;
Considérant sur ce et en préambule que Me K... s'explique davantage sur, en substance, l'absence de chance de M. B... d'obtenir gain de cause devant le juge de l'impôt que sur les manquements qui lui sont reprochés ; qu'il indique essentiellement que cette juridiction avait connaissance de l'existence des comptes courants et que son successeur était nécessairement au courant du déroulement de la procédure suivie devant la cour administrative d'appel par la consultation du site Internet de celle-ci ; que néanmoins si, ainsi qu'il sera vu ultérieurement, le juge de l'impôt avait bien connaissance des comptes courants de M. B... transférés à la SARL Mélanie, c'est par de justes motifs qui sont adoptés par la cour que le tribunal a reproché à Me K... d'avoir manqué à son devoir de conseil et de diligence durant la procédure judiciaire en ne visant aucune pièce à l'appui de sa requête au tribunal administratif de Montreuil du 9 janvier 2012 ; qu'il lui a tout aussi justement reproché de ne pas avoir transmis au tribunal administratif les actes de cession des parts sociales que les époux B... détenaient dans les sociétés Avner et MJJS, les actes de délégation des créances des comptes courants d'associés dans lesdites sociétés au profit de la société Mélanie, les différents déclarations fiscales et balance comptable des sociétés régularisées pour les années ayant fait l'objet du redressement fiscal ainsi que les déclarations ISF de M. B... ; que c'est en particulier à juste titre que le tribunal a retenu que Me K... ne pouvait se borner à faire valoir que l'administration fiscale avait nécessairement eu connaissance de ces pièces ; qu'il est établi que M. et Mme B... avaient ces pièces en leur possession ; qu'il appartenait donc à Me K... d'en solliciter la communication auprès de son client au titre de son devoir de conseil, diligence dont il ne justifie toujours pas ; que le manquement au devoir de conseil est ainsi établi en ce que Me K... n'a pas produit toutes les pièces nécessaires à la défense de son client devant le tribunal administratif ; que, s'agissant du déroulement de la procédure, Me K... ne peut se contenter d'affirmer que les mémoires de l'administration fiscale ne méritaient pas réponse ; qu'il devait s'en entretenir avec son client afin d'en juger et donc les communiquer à celui-ci ; que le manquement au devoir de diligence est ainsi caractérisé tout comme il l'est devant la cour administrative d'appel pour les mêmes circonstances ; qu'enfin, il ne saurait être admis de justifier l'absence d'information de son successeur de l'état de la procédure devant la cour administrative d'appel de Versailles par l'existence d'un site Internet permettant d'obtenir les informations nécessaires ; qu'il appartenait par conséquent à Me K... d'informer lui-même son successeur de ce que l'affaire devait être appelée à l'audience du 1er juillet 2014 et était mise en délibéré le 18 juillet suivant, ce qu'il ne conteste pas avoir omis de faire ; que c'est donc à juste titre que le tribunal a retenu que le dossier transmis à son successeur était incomplet dès lors qu'il ne contenait pas la date de convocation à l'audience adressée elle-même à Me K... le 16 juin 2014 ; que, pour le surplus, la cour s'en réfère aux motifs parfaitement circonstanciés énoncés dans le jugement déféré qu'aucun élément pertinent transmis à la cour ne permet d'infirmer ;
Sur le préjudice et le lien de causalité
Considérant ceci exposé que le jugement déféré est confirmé en ce qu'il n'a pas retenu la faute de Me K... au cours de la procédure contentieuse fiscale ; que c'est donc à tort que M. U... B... prétend que son préjudice est constitué d'une imposition qu'il n'aurait pas dû subir ; qu'au contraire, c'est à raison que le tribunal a retenu qu'il lui appartenait d'établir que, mieux défendu par Me K... au cours de la phase judiciaire, il aurait eu la chance d'obtenir du juge administratif l'annulation des impositions mises en recouvrement le 31 juillet 2010 ;
Considérant que M. U... B... fait essentiellement valoir que si son conseil avait produit devant le juge de l'impôt les documents qu'il était en mesure de lui fournir et qu'il ne lui a pas réclamés, les impositions contestées auraient été annulées ; qu'il soutient en effet que les créances en compte courant d'associé dont il disposait respectivement auprès des SCI MJJS et Avner ont été déléguées à la SARL Mélanie suite à la cession de parts sociales dont il disposait au sein de ces deux SCI au profit de cette SARL ; que par conséquent ces sommes avaient d'une part déjà été assujetties à l'impôt et d'autre part déclarées au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune ; qu'il verse en ce sens les cessions de parts sociales des SCI intervenues le 20 juin 2008, les deux actes de délégation signés par les SCI Avner et MJJS, les déclarations n° 2072 des deux SCI pour 2007 et 2008, les balances des comptes des SCI au 31 décembre 2007, au 31 décembre 2008 et au 31 décembre 2009, l'édition du compte courant de M. U... B... ouvert dans les livres de la SARL Mélanie, les éditions du compte courant ouvert au nom de M. U... B... dans les écritures des deux ,SCI les déclarations ISF 2008, 2009 et 2010 du couple B... et deux attestations du commissaire aux comptes des deux SCI Avner et MJJS datées du 28 janvier 2015 ;
Considérant sur ce que les attestations du commissaire aux comptes sont datées du 28 janvier 2015 ; que, comme l'observe Me K..., elles ne pouvaient donc être produites ni devant le tribunal d'instance de Montreuil qui a rendu son jugement le 16 novembre 2012 ni devant la cour administrative d'appel de Versailles qui a rendu son arrêt le 18 juillet 2014 ; que, quoiqu'il en soit, ces attestations (pièce n° 20 de M. U... B...) ne font que confirmer ce qu'enseigne la lecture des comptes, à savoir que M. U... B... avait bien en compte courant une créance exigible et liquide sur la SCI MJJS d'un montant de 127013,29 € et d'un montant de 126856,71 € sur la SCI Avner au moment des cessions des dits comptes au profit de la SARL Mélanie ; que tout au plus ajoutent-t-elles que la réalité et l'origine des comptes courants d'associés de U... B... dans les SCI a été contrôlée ; que cette origine n'est toutefois nullement dévoilée par ces documents ; que, néanmoins, il résulte du mémoire adressé par le conseil de M. U... B... au conseil d'État (pièce n°3 de M. U... B...) que le ministre de l'économie et des finances dans son mémoire en défense indiquait que M. B... avait produit en première instance des «copies de ces comptes courants, extraits du grand livre des sociétés MJJS et Avner qui présentaient au 31 décembre 2007 un solde créditeur de 127011,29 € pour la société MJJS et 126856,71 € pour la société Avner» ; qu'il en résulte que ces pièces, qui établissent à suffisance la réalité des comptes courants d'associé de M. B... dans les deux SCI, déjà produites depuis l'instance devant le tribunal administratif de Montreuil n'ont pas permis à M. B... d'obtenir gain de cause devant le juge de l'impôt qui a confirmé, en première instance puis en appel, les redressements émis par l'administration fiscale ;
Considérant qu'il est reproché à Me K... de ne pas avoir produit devant le juge de l'impôt les actes de cession des parts sociales que les époux B... détenaient dans les sociétés Avner et MJJS au bénéfice de la société Mélanie, les actes de délégation des créances des comptes courants d'associé de M. B... dans lesdites sociétés au profit de la société Mélanie, les différentes déclarations fiscales des sociétés régularisées pour les années ayant fait l'objet du redressement fiscal et les déclarations ISF du couple B... ;
Considérant, sachant que l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 18 juillet 2014 produit devant la présente cour concerne la SARL Mélanie et non M. B..., il résulte néanmoins des motifs de cet arrêt rappelés par le premier juge que ce transfert de créance n'avait fait l'objet ni des formalités prévues à l'article 1690 du code civil ni d'un enregistrement auprès de l'administration fiscale et que la cour administrative d'appel de Versailles avait considéré que M. B... n'apportait aucun autre élément pour en justifier ;
Considérant que les pièces que M. B... verse aux présents débats et que Me K... aurait dû lui réclamer étaient de nature à justifier le transfert à la SARL Mélanie des soldes créditeurs des comptes courants dont M. B... disposait auprès des sociétés civiles immobilières MJJS et Avner ; que, néanmoins, faute d'accomplissement des formalités prévues à l'article 1690 du code civil et d'enregistrement auprès de l'administration fiscale, les délégations de créance, bien qu'établies, étaient inopposables aux tiers et en particulier à l'administration fiscale de sorte qu'il n'est pas établi que, correctement justifiées devant le juge de l'impôt, elles auraient permis à M. B... d'obtenir gain de cause devant celui-ci ;
Considérant en tout état de cause qu'il convient de revenir sur les motifs du redressement tels qu'énoncés dans la proposition de rectification adressée le 17 décembre 2009 par l'administration fiscale à M. B... (pièce n° 22) ; que l'administration indique en premier lieu que M. Y... Q... a déclaré que M. U... B... était le seul à utiliser le compte courant d'associé de la SARL Mélanie et qu'au cours des exercices clos en 2006, 2007 et 2008, la SARL Mélanie avait effectué des avances en compte à M. U... B... pour différents montants ainsi que le montraient les différents soldes du compte 455 ; que ce compte est un compte de tiers qui enregistre les avances à court terme en compte courant faites par les associés; que celles-ci sont portées au crédit de ce compte par le débit d'un compte financier de la classe 5, généralement le compte «banque» ; que, dans sa proposition de rectification, l'administration constate toutefois que des avances ont été consenties à M. U... B..., ce qui signifie au contraire que celles-ci ont été portées au débit du compte 455 ; qu'elle a donc fait application de l'article 111.a du code général des impôts qui dispose que sont notamment considérés comme revenus distribués sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes et considéré que ces avances auraient dû générer des intérêts non perçus par la société, lesquels constituaient donc des revenus réputés distribués selon l'article 111.a du code général des impôts ; que, force est de constater que si M. B... justifie amplement de ce qu'il disposait de créances en compte courant d'associé provenant des SCI Avner et MJJS lesquelles ont été transférées à la SARL Mélanie, il ne justifie toujours pas de la contrepartie supposée compenser l'absence de comptabilisation d'intérêts au profit de la SARL Mélanie ; qu'au demeurant, il ne justifie pas plus du traitement comptable de ces sommes par la dite SARL Mélanie ; que, plus précisément, il ne justifie ni de l'origine ni du devenir des fonds correspondants ; que les déclarations n° 2072 des SCI Avner et MJJS ne font état que de faibles revenus à répartir entre les associés et en tout état de cause, sans commune mesure avec le montant retrouvé par l'administration fiscale sur le compte courant d'associé de M. B... dans les livres de la SARL Mélanie au 31 décembre 2008 ; qu'il s'en déduit que, comme l'a très exactement retenu le premier juge, la seule justification complète de ce transfert de créances n'aurait de toute évidence pas permis à M. B... d'obtenir gain de cause devant le juge de l'impôt, s'agissant de ce premier motif de redressement ;
Considérant en outre que l'administration fiscale a retenu une distribution du passif injustifié et fait application des dispositions de l'article 109.1.2 du code général des impôts aux termes duquel sont considérés comme revenus distribués :1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital et 2° toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ; que ce chef de redressement est fondé sur les montants portés cette fois au crédit du compte 455 «compte courant d'associé - B... U...» présentant un solde créditeur de 253870 € au 31 décembre 2008 ;
Considérant qu'une fois encore M. B... invoque les créances qu'il détenait sur les SCI Avner et MJJS transférées le 20 juin 2008 à la SARL Mélanie ; qu'il reproche plus précisément au tribunal d'avoir considéré qu'il n'était produit aucun document comptable et fiscal, en particulier le grand livre et la balance des comptes généraux, les relevés bancaires et les déclarations fiscales de la société Mélanie justifiant que ces sommes ont effectivement été incorporées dans son capital social ; qu'à l'appui, il fait valoir que ces avances lui ont été remboursées ; qu'elles n'ont donc pas été incorporées au capital social et qu'elles ne pouvaient pas non plus figurer sur les relevés bancaires ; qu'or, précisément, si ces avances avaient effectivement été remboursées par la SARL Mélanie à M. B..., le compte 45501 aurait été apuré par le crédit du compte du «banque» de sorte que la trace de ce mouvement bancaire en aurait nécessairement été retrouvée ; que c'est donc dans ces conditions que l'administration a considéré devoir faire application des dispositions de l'article 109.1.2 du code général des impôts, la société Mélanie elle-même, comme l'a exactement retenu le tribunal, n'ayant pas justifié les sommes de 127013,29 € et 126856,71 € alors que leur inscription au crédit du compte 455 «U... B...» rendait celui-ci créditeur à hauteur de 97093,70 € à la clôture de l'exercice clos en 2008 ; que c'est bien précisément parce que ce compte était créditeur et n'avait par conséquent pas été apuré par le remboursement justifié des dites sommes à M. B... que le redressement est intervenu ; que, s'agissant des déclarations ISF du couple B..., sont produites la déclaration ISF 2008 du couple qui mentionne 126920 € de liquidités pour la SCI Avner et 127013 € pour la SCI MJJS et -178893 pour la SARL Mélanie ; que ce document n'est donc pas de nature à expliquer les mouvements créditeurs sur le compte 45501 de la SARL Mélanie ; qu'il en est de même de la déclaration ISF 2009 qui porte pour la SCI Avner 148920 € de liquidités, 22900 € de liquidités pour la SCI MJJS et 4237 € de liquidités pour la SARL Mélanie ; qu'il en est de même de la déclaration ISF 2010 supposée justifier du transfert des comptes à la SARL Mélanie, lequel n'est pas contesté puisque l'administration a bien constaté l'existence d'un solde créditeur au compte 45501, la problématique étant celle de l'origine des fonds qui n'est toujours pas expliquée ;
Considérant que c'est tout aussi vainement que M. B... reproche au tribunal d'avoir retenu qu'il ne justifiait pas que ces sommes avaient effectivement été incorporées dans le capital social de la SARL Mélanie ; qu'en effet, comme rappelé ci-dessus, il n'était pas inconcevable que les sommes portées au crédit du compte 45501, qui enregistre les avances à court terme, soient consolidées et donc incorporées au capital social de la SARL Mélanie ; qu'aucune justification de cette nature n'a jamais été apportée ; que M. B... se borne à expliquer que ces avances lui ont été remboursées mais il n'en justifie d'aucune manière ;
Considérant en résumé que la seule justification complète par Me K... devant le juge de l'impôt des cessions de créances au profit de la SARL Mélanie n'était pas de nature à permettre à M. B... d'obtenir ni du tribunal administratif de Montreuil ni de la cour administrative d'appel de Versailles une décision plus favorable en l'absence de toute justification desdites sommes dans la comptabilité de la SARL Mélanie vérifiée par l'administration fiscale ; que force est de constater qu'au dernier état de la procédure, ni M. ni Mme B... n'ont versé le moindre document concernant la SARL Mélanie ;
Considérant en conséquence qu'ils ne justifient pas d'une perte de chance d'avoir pu obtenir gain de cause devant le juge de l'impôt si les diligences de Me K... avaient été complètes ; que le lien de causalité entre les fautes reprochées à l'avocat et le préjudice invoqué n'est donc pas établi ; que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. et Mme B... de toutes leurs demandes indemnitaires ;
Sur les demandes accessoires
Considérant que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a exactement statué sur les dépens ainsi que sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en tant que parties perdantes et comme telles tenues aux dépens, M. et Mme B... seront déboutés de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en outre, aucune considération d'équité ne mérite de faire application des dites dispositions au bénéfice de Me K... ; que celui-ci sera donc également débouté de sa demande en ce sens ;
Considérant que les dépens pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
la cour statuant contradictoirement par arrêt mis à disposition,
DIT que l'appel interjeté par Mme B... recevable,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 15 juin 2017 par le tribunal de grande instance de Nanterre,
Et, y ajoutant,
DÉBOUTE chaque partie de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE in solidum M. et Mme B... aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Madame Anne LELIEVRE, conseiller, pour le président empêché, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Conseiller,