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26/03/2019 | FRANCE | N°17/08953

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 26 mars 2019, 17/08953


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 53I



13e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 26 MARS 2019



N° RG 17/08953 - N° Portalis DBV3-V-B7B-SBGC



AFFAIRE :



[N] [E]



C/



CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE NORM ANDIE Société coopérative à capital variable, établissement de crédit immatriculée au RCS DE CAEN,





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Novembre 2017 par le Tribu

nal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 2

N° Section :

N° RG : 2016F02071



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 26.03.19



à :



Me Michelle DERVIEUX,



Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA,

...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53I

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 26 MARS 2019

N° RG 17/08953 - N° Portalis DBV3-V-B7B-SBGC

AFFAIRE :

[N] [E]

C/

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE NORM ANDIE Société coopérative à capital variable, établissement de crédit immatriculée au RCS DE CAEN,

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Novembre 2017 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 2

N° Section :

N° RG : 2016F02071

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 26.03.19

à :

Me Michelle DERVIEUX,

Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA,

TC NANTERRE.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SIX MARS DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [N] [E]

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représenté par Maître Michelle DERVIEUX, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 276 - N° du dossier 17MD2742, et par Maître P.ROBIN, avocat plaidant au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE NORM ANDIE Société coopérative à capital variable, établissement de crédit immatriculée au RCS DE CAEN, société de courtage d'assurances immatriculée au Registre des Intermédiaires en Assurances (O.R.I.A.S.) sous le N° 07 022 868, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège. N° SIRET : 478 83 4 9 30

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représenté par Maître Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 - N° du dossier 019635

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 05 Février 2019 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Delphine BONNET, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER,

Par acte sous seing privé du 30 juin 2009, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de [Localité 1] (le Crédit agricole) a consenti à la SARL [R] un prêt d'un montant de 150 000 euros avec un taux d'intérêt annuel révisable de 3,85% pour une durée de 60 mois avec un différé d'amortissement de 59 mois, soit 59 échéances de 481,25 euros et une de 150 481,25 euros.

Par le même acte, Mme [N] [E], en sa qualité de gérante, s'est portée caution solidaire des engagements de la société [R] au profit du Crédit agricole pour une durée de 84 mois et dans la limite de 195 000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts conventionnels et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard.

Suivant jugement du 9 octobre 2013, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société [R].

Le 28 novembre 2013, le Crédit agricole a déclaré sa créance entre les mains du liquidateur judiciaire pour la somme de 152 231,53 euros laquelle a été admise pour 150 271 euros à titre chirographaire outre intérêts.

Puis, le 5 mars 2015, ce même tribunal a prononcé la clôture de la procédure collective pour insuffisance d'actifs.

Le Crédit agricole, après avoir vainement mis en demeure Mme [E], en sa qualité de caution, de lui régler les sommes dues au titre du prêt, l'a assignée en paiement par acte du 19 octobre 2016 devant le tribunal de commerce de Nanterre, lequel par jugement contradictoire assorti de l'exécution provisoire du 23 novembre 2017, a :

- débouté Mme [E] de sa demande en nullité de l'acte de cautionnement,

- débouté Mme [E] de sa demande en irrecevabilité pour forclusion de l'action introduite par le Crédit agricole,

- rejeté la demande en responsabilité pour disproportion au visa de l'article 341-4 du code de la consommation,

- rejeté la demande en responsabilité pour défaut de mise en garde,

- rejeté la demande en responsabilité pour octroi de crédit manifestement excessif,

- rejeté la demande en nullité pour garantie disproportionnée au concours,

- condamné Mme [E], en qualité de caution solidaire de la société [R], à payer au Crédit agricole la somme de 167 719,18 euros en principal, majorée des intérêts au taux de 5,71 % l'an à compter du 16 juin 2016 jusqu'à parfait paiement, dans la limite de 195 000 euros,

- ordonné la capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an,

- condamné Mme [E], ès qualités, à payer au Crédit agricole la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Mme [E] a interjeté appel de cette décision le 22 décembre 2017. Dans ses dernières conclusions, déposées au greffe et notifiées par RPVA le 4 janvier 2019, elle demande à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement,

en conséquence et statuant à nouveau,

à titre principal :

- dire irrecevable le Crédit agricole qui a introduit une action judiciaire au-delà du terme extinctif contenu au sein de l'acte de cautionnement fixé au 30 juin 2016,

- dire nul l'acte de cautionnement non daté qu'elle a signé adossé à l'emprunt consenti par le Crédit agricole à la société [R] le 30 juin 2009,

à titre subsidiaire :

- dire que le Crédit agricole ne pourra se prévaloir de l'acte de cautionnement dont s'agit en raison de son caractère disproportionné et le débouter de l'intégralité de ses demandes,

à titre infiniment subsidiaire, et pour l'hypothèse où par extraordinaire la cour la considérerait tenue par l'acte de cautionnement au paiement d'une somme d'un montant 167 719,18 euros en principal :

- condamner le Crédit agricole au paiement de cette même somme de 167 719,18 euros à titre de dommages intérêts en compensation du préjudice par elle subi en relation avec les fautes de l'établissement bancaire,

- condamner le Crédit agricole au paiement d'une somme d'un montant de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens dont distraction sera ordonnée au profit de maître Dervieux.

Dans ses conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 9 mai 2018, le Crédit agricole demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

- condamner Mme [E] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [E] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 janvier 2019.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE

1) sur la recevabilité de l'action de la banque

Mme [E] relève que son engagement de caution était limité dans le temps à une durée de 84 mois soit sept années et a trouvé son terme le 30 juin 2016. Elle soutient que la banque est irrecevable à la poursuivre au-delà de ce délai faisant valoir que son engagement a pris fin au terme convenu, que la durée limitée de son engagement s'applique non seulement à l'obligation de couverture mais aussi à l'obligation de règlement et qu'il s'agit d'un délai de forclusion. Elle affirme qu'à la lecture du texte du cautionnement qu'elle a signé, elle a eu la conviction que son obligation de règlement cesserait, à défaut d'action de la banque au-delà de ce délai de 84 mois, alors que la durée du prêt était de 60 mois.

Le Crédit agricole répond que la durée prévue à un contrat de cautionnement ne porte que sur l'obligation de couverture qui pèse sur la caution. Il relève que la liquidation judiciaire de la société [R] prononcée le 9 octobre 2013, a eu pour effet de rendre exigible les sommes dues au titre du contrat de prêt, que l'obligation de couverture au titre de l'engagement de caution souscrit par Mme [E] était alors en cours, qu'elle en a été informée par courrier recommandé avec accusé de réception du 29 novembre 2013 puis par courrier du 16 juin 2016, qu'elle est donc tenue de garantir les sommes dues.

La clause manuscrite qui précède la signature de la caution est ainsi libellée : 'en me portant caution de la Sarl [R] dans la limite de la somme de 195 000 euros (cent quatre-vingt-quinze mille euros) couvrant le paiement du principal des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée 84 mois, je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si la Sarl [R] n'y satisfait pas elle-même'.

Contrairement à ce que soutient Mme [E] cette clause ne fixe aucun délai au créancier pour agir en recouvrement contre la caution ou un terme au-delà duquel il ne peut plus agir. La durée prévue dans ce contrat de cautionnement ne porte que sur l'obligation de couverture qui pèse sur la caution et non sur l'obligation de règlement.

Les sommes dues au titre du contrat de prêt sont devenues exigibles en suite de la liquidation judiciaire de la société [R] le 9 octobre 2013, date à laquelle l'obligation de couverture au titre de l'engagement de caution souscrit par Mme [E] était toujours en cours puisque le terme du cautionnement était fixé au 30 juin 2016, étant souligné que la banque a adressé à la caution une mise en demeure de régler les sommes dues par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 novembre 2013, mise en demeure réitérée par lettre recommandée du 16 juin 2016.

C'est donc à juste titre que le tribunal a déclaré l'action de la banque recevable.

2) sur la demande de nullité de l'acte de cautionnement

Mme [E] soutient que l'acte litigieux comporte de graves anomalies puisqu'il n'est pas daté et que ne se trouve pas évoquée l'opération à laquelle le cautionnement est adossé et qui lie le débiteur principal, à savoir le prêt.

La banque réplique que le cautionnement fait partie du contrat de prêt que Mme [E] a elle-même signé.

L'engagement de caution de Mme [E] figure à la page 11 du contrat de prêt consenti à la société [R], après la page 10, qui comporte la date et la signature de Mme [E] en qualité de représentante légale de la société [R], étant relevée que celle-ci a paraphé toutes les pages du contrat de prêt. C'est donc de manière totalement inopérante que Mme [E] invoque l'absence de date de son engagement de caution et l'absence de référence au contrat de prêt. La nullité de l'acte ne saurait être encourue pour ce motif en sorte que c'est à bon droit que le tribunal a rejeté cette demande.

3) sur la disproportion de l'engagement de caution

Mme [E] prétend que l'établissement bancaire connaissait parfaitement sa situation à la date du cautionnement pour avoir analysé au même moment sa situation personnelle dans le cadre de concours privés signés dans les semaines suivant le prêt consenti à la société [R]. Elle affirme que les informations contenues dans la fiche de renseignements dont se prévaut la banque ont été complétées par celle-ci et sont erronées, ce qu'elle savait. Après avoir détaillé sa situation d'endettement, ses engagements personnels, ses revenus, et la valeur de son bien immobilier au moment de la souscription de son engagement de caution, Mme [E] soutient que cet engagement était totalement disproportionné au regard de ses revenus, de son patrimoine et des prêts déjà contractés.

La banque fait valoir qu'au vu des éléments portés sur la fiche de renseignements signée par Mme [E] lors de son engagement de caution celle-ci avait les capacités nécessaires pour s'engager pour la somme de 195 000 euros, rappelant que hormis anomalie apparente et grossière, l'établissement de crédit est en droit de se fier aux informations communiquées par la caution. Elle soutient qu'en toute hypothèse, grâce à son patrimoine immobilier, Mme [E] est en mesure de rembourser ses prêts les plus importants, étant précisé que celui contracté auprès de M. [I] [S] ne saurait être pris en compte au même titre qu'un prêt octroyé par un établissement de crédit.

Il résulte des dispositions de l'article L. 341-4 ancien du code de la consommation reprises aux articles L. 332-1 et L. 343-4 du même code qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. Ces dispositions s'appliquent à toute caution qu'elle soit avertie ou non.

Il appartient à la caution qui invoque la disproportion de son engagement d'en apporter la preuve ; celle-ci s'apprécie à la date de la conclusion du cautionnement sur la base des éléments alors connus au vu des déclarations de la caution concernant ses biens et revenus que le créancier, en l'absence d'anomalies apparentes, n'a pas à vérifier ; la caution n'est alors pas admise à établir devant le juge que sa situation financière était en réalité moins favorable sauf si le créancier a eu connaissance de l'existence d'autres charges pesant sur la caution ou si la déclaration effectuée par la caution est trop ancienne.

La charge de la preuve du retour à meilleure fortune de la caution incombe au créancier.

En l'espèce, sur la fiche de renseignements que Mme [E] a signée le 10 juin 2009, étant souligné qu'elle ne remet pas en cause l'authenticité de sa signature, il est mentionné que Mme [E] :

est divorcée, chef d'entreprise, et perçoit un revenu mensuel de 4 000 euros,

a des charges de crédits mensuelles de 1 700 euros,

est propriétaire d'un bien immobilier situé à Saint Jouin d'une valeur brute de 500 000 euros

l'encours de ses emprunts est de 150 000 euros.

Cette fiche ne comporte aucune anomalie apparente. Il n'est pas établi par Mme [E], qu'à la date du cautionnement, le 30 juin 2009, la banque avait connaissance de l'existence d'autres charges pesant sur elle, informations qu'elle aurait recueillies dans le cadre du financement sollicité par Mme [E] pour la reprise de son prêt immobilier et de crédits à la consommation. En effet, l'offre de prêt immobilier a été éditée le 15 juillet 2009, les fonds y afférents,167 238 euros, ayant été débloqués le 7 août 2009 et l'offre préalable de prêt personnel de 21 000 euros a été établie le 11 juillet 2009. Ni le mail que lui a adressé la responsable de l'agence de [Localité 2] le 16 juin 2009 relatif à l'étude faite pour la reprise du prêt sur la résidence principale ni l'attestation établie le 9 juillet 2009 par M. [V], chargé de clientèle pour les professionnels au sein du Crédit agricole [Localité 1], indiquant que le financement sollicité par Mme [E] d'un montant de 188 000 euros pour la reprise d'un encours d'un prêt immobilier et d'un encours de crédit à la consommation a été accepté, ne permettent de démontrer qu'avaient été portées à la connaissance de la banque d'autres charges d'emprunt que celle mentionnée dans la fiche de renseignements, notamment le prêt contracté auprès de M. [O] à hauteur de 173 800 euros pour financer l'acquisition en 2004 par Mme [E] de son bien immobilier.

En l'état des éléments figurant sur la fiche de renseignements signée par Mme [E], l'engagement de caution de 195 000 euros en date du 30 juin 2009, n'était pas

manifestement disproportionné à ses biens et revenus, peu important que ses revenus aient diminué au cours de l'année 2009. C'est donc à juste titre que le tribunal a rejeté la demande formée à ce titre par Mme [E].

4) sur la demande de dommages et intérêts

Mme [E] reproche à la banque un manquement à son obligation de mise en garde soutenant qu'elle ne peut être considérée comme une caution avertie dès lors qu'elle s'est lancée pour la première fois dans la constitution de la société [R] après avoir effectué sa carrière professionnelle comme salariée en qualité de directrice des ressources humaines. Elle affirme qu'elle n'avait aucune expérience en matière commerciale et financière et que le temps qui s'est écoulé entre la création de la société [R] et la souscription du prêt dont elle s'est porté caution ne fait pas d'elle une caution avertie.

Elle fait valoir que le crédit était inadapté aux capacités de la société [R] ce qui résulte de l'analyse du bilan 2008, que cet emprunt, qui comportait un différé d'amortissement de cinq ans, était particulièrement risqué, que son montant était totalement disproportionné aux capacités de la société [R] et qu'il existait donc un risque sérieux de défaut de remboursement, et que la banque ne l'a pas éclairée sur la portée de son engagement.

La banque réplique que Mme [E] est une caution avertie puisque lors de la conclusion du contrat de cautionnement en juin 2009, elle était gérante de la société [R] depuis six années, qu'en outre il résulte de son curriculum vitae, qu'elle a été membre de comités de direction de grandes entreprises, en sorte qu'elle ne peut soutenir qu'aucun élément ne vient corroborer son caractère de caution avertie, outre sa seule qualité de dirigeant. La banque relève que Mme [E] était associée majoritaire et gérante de la société [R], structure familiale, dans la vie sociale de laquelle elle était nécessairement très impliquée, qu'elle avait manifestement des connaissances sur l'activité et sur la situation financière de la société [R] aussi complètes voire plus que les informations dont elle-même disposait.

Le banquier dispensateur de crédit est tenu d'un devoir de mise en garde à l'égard de la caution non avertie lorsque, au jour de son engagement, celui-ci n'est pas adapté aux capacités financières de la caution ou il existe un risque d'endettement né de l'octroi du prêt garanti, lequel résulte de l'inadaptation du prêt aux capacités financières de l'emprunteur.

Mme [E] qui a créé la société [R] en août 2003 en détenait 75 % des parts ; elle gérait cette société dont le chiffre d'affaires s'élevait en 2008 à 500 000 euros depuis près de six ans à la date du cautionnement litigieux. Auparavant, de 1986 à 2003, tel que cela résulte de son curriculum vitae, elle avait été membre successivement, en qualité de directrice des ressources humaines, de comités de direction d'importantes sociétés (PJB conseils : 1 800 salariés, Prodim groupes : 3 000 salariés, Coppa/MG/LGM groupe intermarché : 1 500 salariés). Elle était depuis décembre 2002 'présidente' au conseil des prud'hommes de [Localité 3] section employeur. Ces différentes expériences professionnelles et son implication dans l'animation de la société [R] lui permettaient largement de mesurer les risques encourus par le crédit cautionné quand bien même il s'agissait d'un crédit avec un amortissement différé. La cour approuve donc les premiers juges d'avoir considéré que Mme [E] était une caution avertie.

En tout état de cause, eu égard aux éléments rapportés ci-dessus sur la situation financière de Mme [E], l'engagement du 30 juin 2009 était adapté à ses capacités financières. En outre, cette dernière ne démontre pas l'existence d'un risque d'endettement résultant de l'octroi du prêt garanti à la société [R]. En effet, le bilan 2008 de la société

[R] versé aux débats ne permet pas de démontrer que le crédit qui lui a été consenti en 2009 créait un risque caractérisé d'endettement.

Aucun devoir de mise en garde n'était donc dû par la banque à Mme [E].

Enfin, Mme [E] invoque les dispositions de l'article L. 650-1 du code de commerce de manière totalement inopérante dès lors qu'elle n'allègue ni fraude ni immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ni que les garanties prises en contrepartie de ce prêt étaient disproportionnées à celui-ci, conditions posées par cet article pour mettre en oeuvre la responsabilité d'un créancier.

C'est donc également à bon droit que le tribunal a débouté Mme [E] de sa demande au titre de la responsabilité de la banque.

Le montant de la condamnation n'étant pas critiqué, il y a lieu de confirmer le jugement en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Condamne Mme [E] aux dépens d'appel,

Condamne Mme [E] à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de [Localité 1] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 17/08953
Date de la décision : 26/03/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 13, arrêt n°17/08953 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-26;17.08953 ?
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