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12/03/2019 | FRANCE | N°18/02567

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 12 mars 2019, 18/02567


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



Code nac : 53H



13e chambre



ARRÊT N°





CONTRADICTOIRE



DU 12 MARS 2019



N° RG 18/02567 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SJ6K





AFFAIRE :



SA UNIFERGIE - UNION POUR LE FINANCEMENT DES ECONOMIES D'ENERGIE



C/



Me [C] [T]



...



SELARL MARS







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Septembre 2014 par le Tribunal de Commerce de VERSAI

LLES

N° Chambre : 04

N° Section :

N° RG : 2009F02823





Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 12-03-2019





à :





Me Martine DUPUIS



Me Christophe DEBRAY



Me Valérie LEGER,



TC VERSAILLES





RÉPUBLIQUE FRAN...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53H

13e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 12 MARS 2019

N° RG 18/02567 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SJ6K

AFFAIRE :

SA UNIFERGIE - UNION POUR LE FINANCEMENT DES ECONOMIES D'ENERGIE

C/

Me [C] [T]

...

SELARL MARS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Septembre 2014 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° Chambre : 04

N° Section :

N° RG : 2009F02823

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 12-03-2019

à :

Me Martine DUPUIS

Me Christophe DEBRAY

Me Valérie LEGER,

TC VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DOUZE MARS DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

La SA UNIFERGIE - UNION POUR LE FINANCEMENT DES ECONOMIES D'ENERGIE - N° SIRET : 326 .36 7.6 20

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Maître Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 et par Maître Quentin SIGRIST, avocat plaidant au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

- La SELARL MARS, prise en la personne de Maître [C] [T] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société REKA FRANCE SARL désigné par jugement du TC de Versailles en date du 7 janvier 2016

[Adresse 2]

[Localité 3]

INTERVENANT FORCE

- La SARL REKA FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 4]

INTIMEE

Représenté(e)s par Maître Christophe DEBRAY avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - N° du dossier 14425 et par Maître DE GAUDRIC, avocat plaidant au barreau de NANTERRE

La SARL [E] - N° SIRET : 421 10 5 1 64

[Adresse 7]

[Localité 8]

Représentée par Maître Valérie LEGER de la SELARL CABINET DE L'ORANGERIE avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 404 - N° du dossier 090603 et par Maître Claude REYNAUDI avocat plaidant au barreau de LA ROCHELLE.

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 18 Décembre 2018 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER,

La SARL [E] exerce notamment une activité de culture de tomates sous serre à [Localité 8] (17).

La société Reka France a pour activité la revente de chaudières automatiques biomasse fabriquées par la société danoise Masinfabrikken reka A/S, dont la société Reka France est la filiale.

Le 3 décembre 2007 la société [E] a conclu un contrat de crédit-bail n°164765 avec la société Unifergie - Union pour le financement des économies d'énergie (Unifergie) aux fins de financer une chaudière et son installation pour un montant de 1 600 000 euros HT.

Le 19 mars 2008, la société [E] a commandé à la société Reka France une chaudière eau chaude automatique Reka à combustible à paille d'une puissance maximale de 2 800 kW et ses périphériques moyennant le prix de 538 858 euros HT.

La maîtrise d'oeuvre a été confiée à Monsieur [K] [U], architecte.

La chaudière a été mise en service courant novembre 2008, la société Unifergie ayant payé à la société Reka france 80 % du prix.

Se plaignant de dysfonctionnements affectant la chaudière, la société [E] a refusé de réceptionner cette dernière et la société Unifergie n'a pas réglé les 20% du prix restant dus, soit la somme de 128 894,83 euros.

La société Reka France a alors assigné la société [E] et la société Unifergie devant le tribunal de commerce de Versailles en paiement solidaire de cette somme.

Par jugement avant dire droit du 17 décembre 2010, le tribunal a ordonné une mesure d'expertise et désigné M. [W] pour y procéder.

L'expert a déposé son rapport le 11 mai 2012.

Par jugement contradictoire assorti de l'exécution provisoire rendu le 19 septembre 2014, le tribunal de commerce de Versailles a :

- condamné la société [E] à payer à la société Reka France la somme de 128 894,83 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2009 ;

- condamné la société Reka France à payer à la société [E] la somme de 16 964,22 euros;

- débouté la société [E] de ses autres demandes ;

- débouté la société Unifergie de sa demande en résiliation du contrat de crédit bail ;

- prononcé la réception judiciaire de la chaudière eau chaude à combustible paille à la date du 21 août 2009 ;

- débouté la société Unifergie du surplus de leurs demandes,

- condamné les sociétés Reka France, Unifergie et [E] chacune par tiers aux dépens.

La société Unifergie a régulièrement interjeté appel de cette décision le 14 octobre 2014.

Selon jugement du 7 janvier 2016, le tribunal de commerce de Versailles a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Reka France, et désigné la Selarl Mars, prise en la personne de Me [T], en qualité de liquidateur judiciaire.

La société Unifergie a alors attrait la Selarl Mars, prise en la personne de Me [T], ès qualités, en intervention forcée.

Par arrêt contradictoire en date du 3 novembre 2016 la cour de céans, retenant que les instances en cours sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant procède à la déclaration de sa créance et que la société [E] justifie avoir saisi le juge commissaire d'une demande de relevé de forclusion pour pouvoir déclarer sa créance, a :

- constaté l'interruption de l'instance ;

- dit qu'elle reprendra de plein droit après déclaration de créance de la société [E] ;

- réservé les dépens.

Par courrier au greffe du 5 avril 2018, la société Unifergie a demandé le rétablissement de l'affaire au rôle afin qu'il soit statué sur ses demandes, indiquant que la société [E] ne justifiait pas avoir été relevée de la forclusion et déclaré sa créance au passif de la société Reka France.

L'affaire a été réinscrite sous le numéro de RG 18/02567.

Dans ses conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 5 mai 2015, puis signifiées le 13 juillet 2016 à la Selarl Mars prise en la personne de Me [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Reka France, la société Unifergie sollicite de la cour qu'elle :

- déboute la société [E] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

- confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a refusé de tirer les conséquences juridiques de la réception de la chaudière, objet du contrat de crédit-bail conclu entre les sociétés Unifergie et [E] ;

En conséquence,

- réforme le jugement en condamnant la société [E] à lui payer la somme de 774 410,69 euros HT correspondant aux loyers échus du contrat de crédit-bail depuis le 21 août 2009, avec intérêts et capitalisation de ces derniers, outre les loyers courants à venir, les taxes et les frais ;

- condamne tout succombant à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement au profit de la Selarl Lexavoué Paris-Versailles.

Elle rappelle qu'elle s'est acquittée auprès de la société Reka d'une somme de 1 523 014,12 euros HT pour le compte de la société [E], que cette dernière n'a pas demandé la résolution de la vente mais la réfaction du prix à hauteur de 20% et que la chaufferie fonctionne. Elle prétend qu'aux termes des conditions générales du contrat de crédit-bail les loyers sont devenus exigibles pour une durée de dix années à compter de la réception de la chaudière litigieuse, qui a été prononcée judiciairement le 21 août 2009, mais qu'elle n'a perçu aucun loyer. Elle précise que sa créance est établie par la mise en loyers, tout en tenant compte de l'amortissement des subventions allouées matérialisé par la compensation qui intervient mensuellement sur les loyers.

Dans ses conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 29 août 2016, la Selarl Mars, prise en la personne de Me [T], ès qualités, demande à la cour de :

- déclarer la société Unifergie irrecevable en son appel et, en tout cas, mal fondée en l'ensemble de ses demandes ;

- confirmer partiellement le jugement rendu le 19 septembre 2014 par le tribunal de commerce

de Versailles en ce qu'il a condamné la société [E] ;

mais y ajoutant,

- condamner in solidum la société Unifergie, propriétaire de la chaudière biomasse, à payer la somme de 128 894,83 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2009 ;

- déclarer la société [E] mal fondée en ses demandes à l'encontre de la société Reka France sans la présence de Me [T], ès qualités, et l'en débouter ;

En tout état de cause :

- débouter tous contestants de toutes demandes, fins et conclusions contraires ;

- condamner in solidum la société [E] et la société Unifergie à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, incluant les frais et honoraires d'expertise, dont distraction au profit de Me Debray, en vertu des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle soutient que la chaudière ayant été mise en exploitation le 1er décembre 2008, la société [E] ne peut pas s'opposer au paiement du solde dû mais que du fait du contrat de crédit-bail conclu entre cette dernière et la société Unifergie c'est en réalité la crédit-bailleresse qui est propriétaire de la chaudière tant que le contrat n'est pas arrivé à son terme, de sorte que c'est à celle-ci qu'il incombe de procéder au paiement du solde des factures relatives à la construction et l'installation de l'équipement.

Considérant que les conclusions de l'expert sont insuffisantes pour répondre aux questions posées elle fait valoir que la société [E] ne démontre pas le défaut de conformité qu'elle allègue pour refuser de payer le solde de la dette alors au demeurant qu'elle poursuit l'exploitation de ses serres avec cette chaudière depuis 2008.

S'agissant de l'évaluation du préjudice allégué par la société [E], elle rappelle qu'elle ne peut être tenue que dans les limites de sa garantie contractuelle et développe chacun des dysfonctionnements.

Dans ses conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 5 décembre 2018, la société [E] demande à la cour de :

- la recevoir en ses demandes et l'y dire bien fondée ;

- réformer le jugement ;

- débouter la Selarl Mars, représentée par Me [T], ès qualités, de l'intégralité de ses prétentions ;

- ordonner à la Selarl Mars, représentée par Me [T], ès qualités, et à sa seule diligence, d'attraire à la cause l'assureur de la société Reka France ;

- enjoindre à la Selarl Mars, représentée par Me [T], ès qualités, d'avoir à communiquer les coordonnées de l'assureur de la société Reka France à la société [E] sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

En tout état de cause :

- voir homologués les deux rapports d'expertise en date du 11 mai 2012, intitulés respectivement 'Mémoire d'évaluation et de rémunération' et 'Rapport d'expertise à Monsieur le Président du Tribunal de Commerce de Versailles' ;

- voir inscrite au passif de la liquidation judiciaire de la société Reka France représentée par la Selarl Mars, prise en la personne de Me [T], la somme de 97 481,16 euros TTC, soit 81 505,99 euros HT, telle que détaillée suivant rapport de l'expert judiciaire sur le préjudice page 50/50, se détaillant comme suit :

- pièces et interventions : 44 472,76 euros,

- surcoût de chauffage au gaz lors des arrêts de la chaudière, du 1er décembre 2008 au 29 février 2011 : 38 752,79 euros,

- remboursement du filtre à manche : 143 150,44 euros,

- facture définitive de la société Reka France : - 128 894,83 euros,

soit au total 97 481,16 euros ;

- voir inscrite au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Reka France représentée par la Selarl Mars, prise en la personne de Me [T], la somme correspondant au surcoût de chauffage, soit la somme de 63 853,27 euros TTC (175 648,99 euros TTC x 36,39%), ou 52 296,29 euros HT (143 710,61 euros HT x 36,39%), représentant le total des factures de février à décembre 2012 ;

- voir inscrite au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Reka France, représentée par la Selarl Mars, prise en la personne de Me [T], la somme de 49 355,80 euros correspondant aux réparations effectuées par la société Mir ;

- enjoindre la Selarl Mars, prise en la personne de Me [T], ès qualités, à réaliser les travaux nécessaires à la conformité de la chaudière et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification du présent jugement (sic) ;

- débouter la société Unifergie de l'intégralité de ses prétentions en l'absence de réception comme indiqué dans le rapport d'expertise ;

Au vu de l'importance du litige et de son ancienneté,

- voir inscrite au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Reka France, représentée par la Selarl Mars, prise en la personne de Me [T], la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à verser à la société [E] (sic);

- condamner la société Unifergie à lui verser la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- voir inscrite au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Reka France, représentée par la Selarl Mars, prise en la personne de Me [T], la somme représentant les entiers dépens en ce compris le coût des opérations d'expertise.

Faisant état de constats d'huissier ayant relevé des vices et défaillances affectant la chaudière installée par la SARL Reka France, la société [E] prétend qu'aux termes de l'article 1604 du code civil la société Reka France était tenue d'une obligation de délivrance conforme de la chaudière, qui n'a jamais été respectée, et qu'elle est dès lors manifestement bien fondée à opposer à la société Reka l'exception d'inexécution de son obligation de délivrance et par suite à refuser de donner son accord pour une réception sans réserve et un paiement intégral du fabriquant.

Elle expose que les dysfonctionnements lui ont causé un préjudice financier constaté par l'expert judiciaire dans son rapport, et notamment un surcoût en gaz dû à l'impossibilité d'utiliser de la paille comme mode de chauffe, auquel s'ajoutent le non-fonctionnement du filtre à manche, ainsi que le coût des interventions de maintien, pour un préjudice total s'élevant à la somme de 226 375,99 euros TTC, de sorte que déduction faite de la somme de 128 894,83 euros TTC, elle est fondée à réclamer la somme de 97 481,16 euros à laquelle il convient d'ajouter le remplacement d'un certain nombre de pièces de l'installation.

S'agissant des demandes formées à l'encontre de la société Unifergie, elle soutient qu'à défaut de réception, le crédit-preneur ne peut solliciter aucun paiement et qu'il était impossible pour le tribunal de commerce de Versailles de fixer une date de réception au 21 août 2009 dès lors que le matériel n'est pas en état d'être reçu, ce qui est le cas compte tenu des désordres affectant la chaufferie, de sorte qu'aucune réception n'a pu intervenir et que la société Unifergie doit être déboutée de sa demande en paiement de la somme de 774 410,69 euros HT. Elle ajoute qu'à défaut la cour constatera que la société Unifergie ne produit aucun élément permettant de déterminer le quantum de la créance sollicitée avec imputation des subventions perçues.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, il est renvoyé aux écritures des parties conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

La Selarl Mars, ès qualités, soulève l'irrecevabilité de l'appel de la société Unifergie sans soutenir aucun moyen au soutien de sa fin de non-recevoir. Aucun moyen n'étant susceptible d'être relevé d'office, il convient de déclarer l'appel de la société Unifergie recevable.

La cour relève au préalable qu'en dépit des demandes qu'elle a adressées au tribunal de commerce le 24 janvier 2019, et à Me Debray, conseil de la Selarl Mars, ès qualités, les 10 octobre 2016 et 16 janvier 2019, elle n'a pas été rendue destinataire du rapport d'expertise judiciaire (pièce n°28 sur le bordereau de communication de pièces de la Selarl Mars) en sorte qu'elle ne peut tenir compte que des extraits cités dans le jugement et les écritures des parties et non contestés.

L'instance ayant été introduite devant la juridiction de première instance par la Selarl Mars, ès qualités, il convient d'examiner sa demande en paiement avant celle relative au paiement des loyers formulée par l'appelante.

Sur la demande en paiement formée par la Selarl Mars, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Reka

La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable soit à défaut judiciairement. Elle doit, en tout état de cause, être prononcée contradictoirement.

Le devis budgétaire établi les 23 avril 2007 et 16 mai 2008 par la société Reka France, à l'attention des sociétés [E] et Unifergie, signé le 19 mai suivant par la société [E], précise que le paiement interviendra dans les conditions suivantes :

'- 10% à la signature de la commande

- 20% trois mois avant la livraison prévue, soit le 15 juin 2008

- 50% à la livraison de matériel sur chantier, avant que le montage commence

- 20% après démarrage du matériel, ou bien 45 jours après la livraison sur chantier, même si votre installation/chantier n'est pas encore terminé'.

Il est constant que la chaudière a été installée et mise en service le 6 novembre 2008.

La facture correspondant aux derniers 20%, soit le solde du prix, libellée au nom de la société Unifergie, a été établie le 18 novembre 2008 et adressée à la société [E] afin qu'elle la vise puis la transmette pour règlement à la société Unifergie.

En réponse, Monsieur [K] [U], architecte, a indiqué par télécopie du 20 novembre 2008, que la réception des travaux ne serait acceptée qu'après la résolution de quatre points. Puis arguant de dysfonctionnements persistants et s'appuyant sur des constats d'huissier de justice en date du 29 décembre 2008, 20 janvier 2009, 19 mars 2009 et 23 avril 2009, la société [E] a refusé de viser cette facture et de réceptionner les travaux.

Il ressort de la lettre de la société Reka du 9 février 2009, non critiquée, que le bureau de contrôle Apave a déclaré le 9 décembre 2008, en présence de MM. [E] et [U], dans son rapport de visite n°187457, que le chantier était terminé et que la mise en service du filtre a été effectuée en semaine 51-2008. Par lettres du 2 février 2009 et du 22 janvier 2010, la société Reka relevait également que la chaudière affichait 1 500 heures de chauffe puis 5 272 heures au 19 janvier 2010, ce dernier élément ayant été relevé par huissier de justice selon constat daté du même jour.

En outre, le jugement indique que 'M. l'expert affirme qu'au 10 février 2011, la machine a comptabilisé plus de 10 000 heures de fonctionnement'.

Compte tenu de ces éléments, le tribunal a justement retenu une date de mise en exploitation au 1er décembre 2008 rendant le solde du prix exigible.

En application du contrat de crédit bail dont l'objet est d'assurer le financement du bien, c'est au crédit-bailleur, qui a déjà réglé les premiers acomptes, et non au crédit-preneur de payer le solde du prix.

Il y a lieu, par suite, d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société [E] à ce titre, de condamner la société Unifergie à payer à la Selarl Mars, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Reka, la somme de 128 894,83 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 28 avril 2009 et de rejeter la demande de solidarité entre les sociétés [E] et Unifergie.

Sur la demande en paiement de la société Unifergie

Selon les conditions particulières du contrat de crédit bail, 'la location prendra effet à la date de réception sans réserve majeure des biens financés par le présent contrat prévue le 01 novembre 2008" et ce pour une durée de dix ans.

Aucun cahier des charges n'a été établi et ni le bon de commande ni le devis budgétaire ne précisent les conditions de la réception du matériel, laquelle est prévue par les conditions générales de vente de la société Reka, dont il n'est toutefois pas démontré par les copies des pièces produites qu'elles auraient été portées à la connaissance de la société [E]. Il est relevé au demeurant que la photocopie produite en cause d'appel est illisible.

La réception judiciaire suppose de déterminer la date à laquelle l'ouvrage était en état d'être reçu.

Nonobstant le retard apporté à la mise en service du filtre et les dysfonctionnements relevés par l'expert, il résulte des mentions du jugement que par conclusions déposées le 30 juin 2009, en vue de l'audience du 21 août 2009, la société [E] sollicitait une réfaction du prix de 20%.

Il s'en déduit que l'ouvrage était donc en état d'être reçu le 21 août 2009. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a fixé la réception judiciaire à cette date.

En application de l'article 6 des conditions générales du contrat de crédit-bail, 'la location prend effet à compter de la date de réception...'.

Selon les conditions particulières du contrat, d'une part quarante redevances de 54 006 euros HT sont payables trimestriellement à terme échu et d'autre part les investissements financés sont susceptibles de faire l'objet de subventions.

La société Unifergie produit un décompte de loyers du 21 août 2009 au 21 février 2015 faisant état de vingt-trois loyers de 48 862,28 euros chacun, dont à déduire une subvention de 15 192,25 euros par loyer.

La société [E], qui allègue que ce décompte ne serait pas justifié, ne produit aucun élément démontrant notamment que les subventions qu'elle a obtenues seraient insuffisamment prises en compte.

Il convient, en conséquence, de condamner la société [E] à payer à la société Unifergie la somme de 774 410,69 euros outre les loyers à venir, mais non les taxes et frais non précisés, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt en l'absence d'autre demande et capitalisation dès que les conditions en seront remplies.

Sur les demandes reconventionnelles de la société [E]

La SARL [E] produit l'ordonnance du juge-commissaire en date du 3 novembre 2016 l'ayant relevée de la forclusion et la déclaration de créance qu'elle a adressée par lettre recommandée avec avis de réception à la Selarl Mars, ès qualités, le 16 novembre suivant à hauteur de 220 690,23 euros soit :

* 97 481,16 euros TTC au titre du préjudice subi,

* 63 853,27 euros TTC correspondant au surcoût de chauffage,

* 49 355,80 euros au titre des réparations effectuées par la MIR

* 10 000 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* mémoire pour les dépens en ce compris le coût de l'expertise.

Dès lors qu'ils ne sont pas versés aux débats, la cour ne peut pas homologuer les deux rapports d'expertise en date du 11 mai 2012, intitulés respectivement 'Mémoire d'évaluation et de rémunération' et 'Rapport d'expertise à Monsieur le Président du Tribunal de Commerce de Versailles'. La demande sera donc rejetée.

Outre qu'en l'absence de cahier des clauses techniques particulières et au regard du fonctionnement rappelé ci-dessus la société [E] ne rapporte pas la preuve de la non conformité du matériel livré au matériel commandé, ni la société Reka France en liquidation judiciaire ni la Selarl Mars, ès qualités, dont ce n'est pas le métier, ne peuvent réaliser de travaux de mise en conformité de la chaudière, en sorte que cette demande assortie d'une astreinte sera rejetée.

La prétention tendant à obliger le liquidateur judiciaire à attraire à la cause l'assureur de la société Reka France est tardive et aurait due être présentée au conseiller de la mise en état. Elle sera donc également rejetée.

En revanche, l'existence de dysfonctionnements sur le matériel litigieux justifie qu'il soit ordonné à la Selarl Mars, ès qualités, de communiquer à la société [E] les coordonnées de l'assureur de la société Reka France, sans qu'il soit besoin en revanche de prononcer une astreinte provisoire.

Les 97 481,16 euros TTC sollicités correspondent à la somme de 44 472,76 euros TTC (frais engagés par la société [E] selon l'expert), 38 752,79 euros ( surcoût dû au gaz) et coût du filtre à manche (143 150,44 euros), déduction faite de 128 894,83 euros TTC (facture du solde).

En l'état des pièces produites devant la cour, il convient de retenir la somme de 44 472,76 euros TTC, l'expert indiquant, selon les écritures de la société [E] non critiquées sur ce point, que celle-ci 'a fait faire à ses frais un certain nombre d'interventions pour maintenir l'installation en marche : coût 44 472,76 euros TTC'.

S'agissant du filtre à manches, selon les conclusions de la société [E], l'expert a précisé que 'Ce filtre fourni par un sous-traitant de la société Reka a posé des problèmes lors de sa mise en service et ne marchait plus correctement le 18 mars 2009 (constat d'huissier) et était endommagé le 25 novembre 2009 (constat d'huissier). Il a été cependant facturé 119 691 euros HT, soit 143 150,44 euros TTC'.

La facturation relevée par l'expert est conforme au devis.

La mise en service du filtre à manches a été retardée en raison d'un joint qui s'est révélé défaillant à la livraison, empêchant de ce fait la réception de l'ouvrage comme initialement convenu. Cependant, l'utilisation de la chaudière montre que celui-ci a été changé en sorte que la mise en exploitation a pu débuter. Il résulte toutefois des interventions sur site de la société Reka en janvier 2010 que la chaudière, prévue pour une puissance de 2 800kW, fournissait à la demande de la société exploitante, une puissance de l'ordre de 3 100kW, surcharge dont elle indique dans sa réponse à l'expert, en suite de la note aux parties du 19 février 2011, qu'elle fait souffrir le matériel dont ledit filtre, et selon sa lettre du 22 janvier 2010 adressée à Me [M], 'qu'une partie des manches du filtre des gaz des fumées sont brûlées au centre du filtre, et qu'il existe un court circuit électrique au niveau des composants chauffants du filtre à manches. Ces dégâts sont du ressort de l'assurance incendie de la société [E], et doivent être gérés entre la compagnie d'assurance et la société [E]'.

Or la société [E] ne s'explique pas sur la prise en charge du sinistre par son assureur. Il n'y a pas lieu, par suite, de faire supporter le coût du filtre à la société Reka France.

Il résulte des écritures des parties que la chaudière était vendue pour utiliser indifféremment de la paille ou des granulats mais que la machine à granulats n'a jamais été montée sur la chaudière, empêchant ainsi toute utilisation avec ce mode de chauffe. Le devis montre que le silo à grains n'était pas compris dans l'estimation. Dans sa réponse à l'expert, la société Reka explique que le système d'alimentation pour granulats a été livré et installé électroniquement mais que la vis d'alimentation du granulat n'a pas été installée à la demande de la société [E] dès lors que le silo avait été oublié lors de la demande de permis de construire, ce qui n'est pas démenti.

Dans ses conditions, l'utilisation du gaz au lieu et place des granulats et le surcoût qui en est résulté, qui relève d'un choix de la société [E], ne peut être mis à la charge de la société Reka. Les demandes de 38 752,79 euros et de 63 853,27 euros TTC à ce titre seront rejetées.

A l'appui de sa demande au titre des réparations effectuées par la société Maintenance Industrielle Rochefortaise (MIR), la société [E] produit quatorze factures, datées du 19 octobre 2011 au 10 janvier 2013, d'un montant total de 41 267,40 euros HT, dont deux (n°1056/11 du 19 octobre 2011 de 8 623,16 euros TTC et 1062/11 du 20 octobre 2011 de 1 417,26 euros TTC) sont déjà incluses dans la somme de 44 472,76 euros TTC (frais engagés par la société [E] selon l'expert). Il se déduit de l'intitulé des douze autres factures qu'elles sont relatives à de menues réparations, alors qu'aucun contrat d'entretien n'est fourni par ailleurs, ou au remplacement de broyeur et couteaux, alors qu'il ressort notamment du constat d'huissier du 18 mars 2009 que des pierres se trouvent dans la paille utilisée par la société [E]. En outre, le 20 mars 2009, la société Reka France a, en application du contrat 7-3 de ses conditions générales, annulé toute garantie concernant ' ce broyeur à paille, toutes les vis de transport, l'écluse d'étanchéité et le système de décendrage' compte tenu des pierres se trouvant dans la paille utilisée par la société [E].

La demande sera par conséquent également rejetée.

Il convient, par suite, de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Reka France la somme de 44 472,76 euros TTC au titre des préjudices subis.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Déclare recevable l'appel formé par la société Unifergie ;

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a prononcé au 21 août 2009 la réception judiciaire de la chaudière eau chaude automatique Reka à combustible à paille ;

Statuant à nouveau,

Condamne la société Unifergie à payer à la Selarl Mars, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Reka France, la somme de 128 894,83 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2009 ;

Rejette la demande de solidarité entre les sociétés [E] et Unifergie ;

Condamne la société [E] à payer à la société Unifergie la somme de 774 410,69 euros outre les loyers à venir, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Ordonne la capitalisation des intérêts échus pour une année entière ;

Déboute la société Unifergie de sa demande au titre des taxes et frais ;

Rejette la demande d'homologation des rapports d'expertise ;

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société Reka France les sommes dues à la société [E] de 44 472,76 euros TTC au titre du préjudice subi et de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne à la Selarl Mars, ès qualités, de communiquer à la société [E] les coordonnées de l'assureur de la société Reka France ;

Rejette la demande d'astreinte provisoire formée par la société [E] ;

Déboute la SARL [E] du surplus de ses prétentions à l'égard de la Selarl Mars, ès qualités ;

Condamne la SARL [E] à payer à la société Unifergie la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette les autres demandes d'indemnité procédurale ;

Rejette la demande d'indemnité procédurale formée par la SARL [E] à l'encontre de la société Unifergie ;

Condamne par moitié les sociétés [E] et Reka France, en procédure collective, aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris le coût de l'expertise, avec droit de recouvrement au profit des avocats pour les frais dont ils auraient fait l'avance, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 18/02567
Date de la décision : 12/03/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 13, arrêt n°18/02567 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-12;18.02567 ?
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