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27/02/2019 | FRANCE | N°15/05508

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15e chambre, 27 février 2019, 15/05508


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



15e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 27 FEVRIER 2019



N° RG 15/05508





AFFAIRE :





SAS ADREXO





C/





[C] [M]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de RAMBOUILLET

Section : Activités diverses

N° RG : 13/

01210







Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :





AARPI ERGON Avocats





Mme [L] [P] [G]





le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





LE VINGT SEPT FEVRIER DEUX MILLE DIX NEUF,



La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arr...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 27 FEVRIER 2019

N° RG 15/05508

AFFAIRE :

SAS ADREXO

C/

[C] [M]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de RAMBOUILLET

Section : Activités diverses

N° RG : 13/01210

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

AARPI ERGON Avocats

Mme [L] [P] [G]

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SEPT FEVRIER DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant, fixé au 06 février 2019 puis prorogé au 27 février 2019, les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :

SAS ADREXO

[Adresse 5]

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET :315 549 352

représentée par Me Pauline MORDACQ de l'AARPI ERGON Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0380

APPELANTE

****************

Monsieur [C] [M]

[Adresse 2]

[Localité 2]

né le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 3], de nationalité française

représenté par Mme Claude Françoise TARDY (Délégué syndical ouvrier)

INTIME

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 04 Décembre 2018, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Maryse LESAULT, Présidente,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,

Monsieur Hubert DE BECDELIEVRE, Magistrat honoraire,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Adlyne GARCZAREK

FAITS ET PROCÉDURE,

La société ADREXO est un opérateur postal, dont l'activité principale consiste en la distribution en boîtes aux lettres d'imprimés publicitaires et de catalogues.

Elle relève de la Convention Collective étendue de la Distribution Directe du 9 février 2004.

M. [M] a été engagé par la société ADREXO en qualité de distributeur, selon contrat de vacation le 4 novembre 2004.

En application des dispositions conventionnelles, un avenant au contrat de travail devait être signé chaque année pour faire le point sur la durée annuelle modulée de l'année écoulée et comporter un planning prévisionnel au titre de l'année à venir. Ces plannings indiquaient pour chaque mois un nombre d'heures pouvant varier de 15%, outre la possibilité prévue par la convention collective d'une variation de plus ou mois 1/3.

Par lettre du 12 décembre 2013, M. [M] a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société en raison du non respect des règles conventionnelles et du non paiement du travail effectivement réalisé.

Par lettre du 13 décembre 2013, la société a répondu à son courrier et il a reçu ses documents de fin de contrat à la fin du mois de décembre.

Par requête du 31 décembre 2013, M. [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Rambouillet aux fins de voir requalifier sa prise d'acte en rupture aux torts de la société produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Lors de l'audience de jugement, M. [M] a demandé au conseil de prud'hommes de :

- condamner la société ADREXO à lui payer les sommes suivantes :

- 2.251,20 euros d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 750,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 858,37 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 75,40 euros de congés payés afférents

- 894,52 euros à titre de rappel de salaire par rapport au salaire minimum

garanti,

- 89,94 euros au titre des congés payés afférents,

- 202,20 euros à titre de rappel d'heures complémentaires

- 234,41 euros à titre de rappel de remboursement de frais kilométriques,

- 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non exécution de bonne foi du contrat de travail du fait du non respect des dispositions légales et conventionnelles,

- 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour la période prescrite,

- 900 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

A titre reconventionnel, la société a demandé au conseil de le condamner à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de donner acte à la société qu'elle reconnaît devoir la somme de 929,98 euros.

Par jugement du 30 octobre 2015, le conseil de prud'hommes de Rambouillet a :

- dit et jugé que les dispositions conventionnelles se rapportant aux modalités de rémunération des distributeurs n'ont pas été respectées par la société SAS ADREXO à l'égard de M. [M], à savoir :

Les dispositions des articles 4 et 5 du chapitre ID,

Les dispositions des articles let 2 chapitre IV et l'annexe HI,

Les modalités d'application de la modulation,

- dit et jugé que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail effectuée par M. [M] doit être requalifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison des manquements suffisamment graves de l'employeur pré-cités,

- fixé la moyenne des salaires à la somme de 431,55 euros bruts,

- condamné la SAS ADREXO à verser à M. [M] les sommes de :

- 894,52 euros à titre de rappel de salaire par rapport au salaire minimum

garanti quand le travail réalisé n'a pas atteint le temps prévu contractuellement pour la période allant d'août 2011 à juillet 2013,

- 89,45 euros au titre des congés payés afférents,

- 202,20 euros à titre de rappel de salaire pour les heures effectuées au-delà du

temps contractuel prévu pour la période de 2009 à 2014,

- 20,22 euros euros au titre des congés payés afférents,

- 9.120,42 euros à titre de rappel de salaire résultant de la différence entre la

pré-quantification et le temps réel de distribution pour la période courant de

2009 à 2014,

- 912,04 euros au titre des congés payés afférents,

- 223,41 euros à titre de rappel de remboursement de frais kilométriques de

2009 à 2014,

- 5.000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 963,11 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 96,31 euros de congés payés afférents,

- 1.070,45 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non exécution de bonne foi du contrat de travail du fait du non respect des dispositions légales et conventionnelles,

- 900 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- ordonné à la SAS ADREXO de remettre à M. [M] ses documents sociaux rectifiés et conformes au présent jugement,

- débouté M. [M] du surplus de ses demandes,

- donné acte à la société SAS ADREXO qu'elle reconnaît devoir à M. [M] la somme de 929,98 euros,

- dit que cette somme, si elle est versée par la société, viendra en compensation des condamnations du présent jugement,

- débouté la SAS ADREXO de sa demande reconventionnelle d'article 700 du code de procédure civile,

- dit que l'exécution provisoire est de droit sur les salaires et accessoires de salaires,

- condamné la SAS ADREXO aux entiers dépens y compris les frais éventuels d'exécution du présent jugement.

Par déclaration du 25 novembre 2015, la société a relevé appel de cette décision.

Par conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, la société ADREXO demande à la cour de :

- dire et juger la société ADREXO recevable et bien fondé en son appel,

- infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

- dire et juger que la société ADREXO a appliqué les modalités de pré-quantification du temps de travail de M. [M] conformément aux dispositions de la Convention Collective de la Distribution Directe,

- dire et juger que M. [M] n'a pas travaillé plus que le temps stipulé aux termes de son contrat de travail et les avenants successifs,

- dire et juger que M. [M] ne rapporte pas la preuve des heures complémentaires

qu'il a allègue avoir effectuées,

- dire et juger que les listes détaillées des salaires reflètent l'exacte quantification et rémunération du temps de travail de M. [M],

- dire et juger que M. [M] ne rapporte pas la preuve de son préjudice moral et financier,

- dire et juger que la prise d'acte de rupture du contrat de travail s'analyse en une démission,

- débouter M. [M] de l'intégralité de ses demandes,

- donner acte à la société ADREXO qu'elle reconnait devoir à M. [M], la somme totale 929,98 euros,

- condamner M. [M] à payer à la société ADREXO la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

A l'appui de ses demandes, elle fait valoir que :

Sur la décision entreprise,

- la définition de la durée de travail des salariés n'était pas le résultat d'une décision unilatérale de l'employeur mais que ce dernier était tenu par les termes de la convention collective.

- la préquantification n'a pas été remise en cause par l'annulation de deux décrets de 2007 et 2010 par le Conseil d'Etat, ces derniers ne portant pas sur ce point.

Sur la sous ou sur modulation,

- en fonction de l'activité, il lui est possible de faire varier la durée du travail tout en maintenant un volume horaire minimum pour les salariés, ces variations sur l'année étant récapitulées sur les plannings individuels de modulation.

- de même la durée réelle du travail et l'éventuelle sous ou sur modulation doit être mesurée en tenant compte des heures d'absences pour congé payé, maladie ou injustifiées.

- ainsi en tenant compte de ces heures d'absence, les décomptes produits au débat par le salarié s'avèrent erronés et donc que la somme de 929,98 euros, congés payés inclus, est due au titre de la sur et de la sous modulation.

Sur la demande de rappels de salaire postérieure au 1er janvier 2009,

- sur l'absence de preuve

La société soutient que la charge de la preuve du temps de travail est partagée et que M. [M] n'apporte aucune pièce concrète à l'appui de sa demande, se contentant d'affirmations générales et succinctes.

Elle ajoute que les attestations produites au débat sont faites par des salariés d'autres secteurs.

La société conteste de plus la valeur probante des feuilles de route versées au débat effectuées a posteriori.

- sur les preuves de la société ADEXO

La société produit les avenants récapitulatifs, les listes détaillées des salaires et les feuilles de route signées et ne portant pas de mention spécifique.

Sur le temps de travail de M. [M],

- sur le temps de distribution

La société soutient que M. [M] a reçu et signé tous les ans les avenants récapitulatifs de modulation accompagnés des plannings individuels conclus courant mai outre ceux intervenant en cours de période. Elle soutient qu'ils sont la preuve du temps de travail effectué pour la période antérieure, temps reconnu par le salarié lui-même par sa signature.

- sur les feuilles de route et listes détaillés des salaires

La société fait valoir que M. [M] n'a jamais contesté ses feuilles de route et les a pour la plupart signées.

Elle soutient de plus que le salarié recevait après chaque distribution des listes détaillées des salaires récapitulant chaque mois les temps de distribution retenus et les indemnités kilométriques, constituant validation a posteriori du temps de travail réellement effectué.

La société fait valoir que M. [M] n'a jamais formulé de contestations, ni de réclamations à leur sujet.

- sur l'imprécision des calculs de M. [M]

La société conteste les calculs produits au débat, soutenant qu'ils reposent sur les annotations sur les feuilles de route qui ne sont pas claires, inexactes et injustifiées. Elle soutient que le salarié est de mauvaise foi et doit être débouté de ses demandes.

- sur l'organisation de M. [M]

La société soutient que le salarié remplissait ses missions en toute indépendance en-dehors des locaux de l'entreprise et que de ce fait, elle ne disposait d'aucun moyen de vérification du déroulement de chaque distribution.

Elle soutient de plus que le choix de la cadence de distribution appliquée aux secteurs de M. [M] reposait sur une analyse topographique précise si bien que ces cadences de distribution sont exactes. Elle ajoute que M. [M] ne justifie pas du surcroît de temps invoqué dans la réalisation des distributions.

Sur le manquement de l'employeur à son obligation de bonne foi,

La société soutient que M. [M] ne peut pas prétendre qu'elle aurait commis une exécution déloyale du contrat de travail et conclut au rejet de cette demande.

Sur la prise d'acte de rupture

La société soutient que M. [M] n'établit pas de grief et relève qu'au contraire il a exécuté son contrat de travail pendant plusieurs années sans émettre aucune réclamation et qu'il n'existait par conséquent aucun manquement de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

La société fait valoir que le grief tiré d'un temps de distribution inexact n'est pas fondé, M. [M] ne devant pas traverser la nationale 10, comme le révèle l'analyse du plan de secteur.

S'agissant du désaccord sur la rémunération de M. [M], la société soutient que les secteurs considérés ont été bien classés et que les rémunérations sur les feuilles de route sont exactes.

S'agissant de la date de communication des avenants de modulation, la société fait valoir que, quand bien même certains avenants ont été communiqués hors date prévue, l'essentiel est qu'ils aient été conclus avec l'accord de M. [M] et qu'ils n'ont pas eu de conséquence en terme de rémunération pour ce dernier.

La société conclut qu'à défaut de pièces venant démontrer un manquement réel de l'employeur, M. [M] doit être débouté de sa demande de requalification de la prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, M. [M] demande à la cour de :

-confirmer le jugement en ce qu'il a dit et jugé que les dispositions conventionnelles se rapportant aux modalités de rémunération des distributeurs n'ont pas été respectées par la société SAS ADREXO,

- confirmer la décision en ce qui concerne les rappels de salaire et en conséquence condamner la société ADREXO à lui payer les sommes suivantes :

- 894,52 euros à titre de rappel de salaire par rapport au salaire minimum garanti,

- 89,45 euros au titre des congés payés afférents,

- 202,20 euros à titre de rappel d'heures complémentaires,

- 20,22 euros au titre des congés payés afférents,

- 9.120,42 euros à titre de rappel de salaire par rapport au temps réel de travail,

- 912,04 euros au titre des congés payés afférents,

- prendre acte du paiement par la société de 4.813,93 euros bruts ou 3.749,59 euros nets et dire et juger que les rappels de salaires demandés s'entendent sous déduction de cette somme brute déjà versée au titre de l'exécution provisoire,

- confirmer la décision en ce qui concerne les frais kilométriques et condamner la société au paiement de la somme de 223,41 euros à titre de rappel de remboursement de frais kilométriques,

- confirmer la décision en ce qui concerne la non exécution de bonne foi du contrat de travail et condamner la société au paiement de 5.000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour non exécution de bonne foi du contrat de travail du fait du non respect des dispositions légales et conventionnelles,

- fixer le salaire moyen mensuel de référence à la somme de 481,55 euros,

- confirmer que la prise d'acte de la rupture doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

en conséquence,

- condamner la société à lui verser les sommes suivantes :

- 5.000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et

sérieuse,

- 963,11 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 96,31 euros de congés payés afférents,

- 1.070,45 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- confirmer le jugement en ce qui concerne le paiement de 900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamner la société au paiement de 900 euros à ce titre pour la première instance et y ajouter 900 euros au titre de la procédure en appel,

- infirmer le jugement pour les dommages et intérêts pour la période prescrite antérieure au 1er janvier 2009 et condamner la société au paiement de 2.500 euros,

- ordonner à la SAS ADREXO de lui remettre ses documents sociaux rectifiés et conformes au jugement à intervenir,

- dire et juger que ces sommes seront assortis des intérêts légaux sur les condamnations à venir et comptabilisés à compter de la date de saisine du conseil de prud'hommes.

A l'appui de ses demandes, il fait valoir que :

Sur la prescription

M. [M] soutient qu'en raison des dispositions transitoires prévues par la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi quant à l'application de la prescription triennale sur les créances salariales, les créances à compter du 1er janvier 2009 ne sont prescrites qu'au 1er janvier 2014. Il fait valoir qu'ayant saisi le conseil de prud'hommes le 31 décembre 2013, il est bien fondé en sa demande.

Sur les rappels de salaire

- S'agissant du non respect des règles légales et conventionnelles en vigueur et les rappels de salaire y afférents

M. [M] soutient qu'il était soumis par contrat à la pré-quantification du temps de travail et à un temps partiel modulé ; que la période prévue de modulation devait se dérouler de mi-avril à mi-mars de l'année suivante et qu'à cette occasion, un avenant devait prévoir un planning prévisionnel pour l'année à venir ; que toutefois l'employeur ne respectait pas ces dispositions car :

- la période de modulation annuelle n'était pas respectée,

- les avenants étaient conclus à tout moment de l'année, lorsque des avenants de modulation étaient conclus pour l'année,

- les plannings prévisionnels n'était pas établis pour l'année,

- les heures travaillées ne correspondaient pas à celles figurant sur les avenants,

- lorsque les heures réalisées étaient inférieures au nombre prévu par contrat, le différentiel n'était pas payé, de même que les majorations n'étaient pas appliquées lorsque le nombre d'heures réalisées était supérieur à celui prévu par contrat.

- Sur les rappels de salaire au titre des heures prévues par le contrat et non réalisées,

Il soutient que sur la période d'août 2011 à juillet 2012, il a effectué 374,31 heures de travail quand son contrat prévoyait la réalisation de 468 heures. Il demande un rappel de salaire de 852,80 euros à ce titre, outre les congés payés afférents.

Pour la période de juillet 2012 à juillet 2013, M. [M] soutient qu'il a effectué 359,49 heures de travail quand son contrat prévoyait la réalisation de 363,96 heures. Il demande un rappel de salaire de 42 euros à ce titre, outre les congés payés afférents.

Il conteste l'affirmation de la société selon laquelle il existait des heures d'absence valorisées, lesquelles ne figurent pas sur le bulletin de paie.

- S'agissant des rappels de salaire au titre des heures effectuées au-delà du temps prévu contractuellement

Le salarié soutient :

- que la convention collective prévoit que la durée hebdomadaire ou mensuelle peut varie d'1/3 voire de 45% dans la limite du temps annuel contractuellement prévu selon les avenants de modulation.

- que la société n'a pas respecté cette disposition et sollicite des rappels de salaire au titre de ces heures, majorées de 25% pour les heures effectuées au delà du dixième des heures contractuellement prévues, en application des dispositions du contrat de travail, faute de dispositif prévu pour ces situations dans la convention collective.

Il sollicite à ce titre le paiement de rappels de salaire à hauteur de 202,20 euros, outre les congés payés afférents.

- s'agissant des rappels de salaire nés du différentiel entre pré-quantification et temps réel de distribution

M. [M] soutient avoir contesté la quantification de son temps de travail par courriers et avoir détaillé son temps de travail sur ses feuilles de route. Il sollicite à ce titre un rappel de salaire à hauteur de 9.120 euros, outre les congés payés afférents.

Il indique apporter un commencement de preuve et que la société ne démontre pas le contraire.

Sur les dommages et intérêts pour non respect des règles contractuelles,

M. [M] soutient que les manquements de l'employeur à ces règles lui ont causé un préjudice dont il sollicite la réparation à hauteur de 5.000 euros.

Sur la demande de dommages et intérêts pour la période prescrite,

Il soutient qu'en 2007 et 2008, elle a travaillé près du double de ce que prévoyait son contrat. Elle sollicite à ce titre des dommages et intérêts.

Sur la demande de remboursement des frais kilométriques,

M. [M] soutient avoir demandé par courriers la révision de l'évaluation kilométrique, demandes laissées sans réponse. Elle sollicite à ce titre le paiement de la somme de 223,41 euros.

Sur le bien fondé de la prise d'acte

M. [M] soutient qu'en dépit de ses courriers répétés, l'employeur n'a pas mis en oeuvre de modifications ni de réajustements.

Il fait valoir que sa prise d'acte est justifiée en raison des griefs liés au non respect des dispositions conventionnelles et de l'absence de concordance entre le travail réalisé et les versements des rémunérations.

Il en conclut que cette prise d'acte doit prendre les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et sollicite les indemnités de rupture à ce titre.

MOTIFS DE LA DÉCISION,

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel interjeté dans les formes et délais légaux est recevable en la forme.

Sur la demande de rappel de salaires nés du différentiel entre préquantification et temps réel de distribution pour la période de janvier 2009 à décembre 2013

M. [M] rappelle les motifs de la décision du Conseil d'Etat ayant annulé le décret du 08 juillet 2010 suivant lesquels le mécanisme de préquantification ne dispense pas l'employeur et le salarié de fournir au juge du contrat de travail conformément à l'article L. 3171-4 du code du travail tous les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés. Il expose que le temps réel ne correspondait pas à celui défini par la préquantification par suite de mauvaise classification des secteurs, d'évaluation insuffisante du poids des poignées, de non prise en compte des aléas, du défaut d'actualisation de état du réseau routier etc...

Il a donc détaillé son temps réel sur chaque feuille de route et a repris ces mentions manuscrites sur les états récapitulatifs mensuels accompagnant les feuilles de paie. Les temps portés sur ces récapitulatifs ont été totalisés pour chaque année. Il apporte ainsi les éléments de preuve mis à sa charge par le texte susévoqué et la société ADREXO ne fournit aucun élément de nature à les remettre en cause.

La société ADREXO fait valoir que :

Compte tenu des particularités de l'activité de distributeur, les éléments relatifs à la préquantification du temps de travail constituent des éléments précis et circonstanciés dont il convient de tenir compte, étant précisé que les cadences ont été fixées par les partenaires sociaux.

M. [M] n'apporte aucun élément relatif à la réalité du temps de travail qu'il prétend avoir effectué et ne produit aucune pièce concrète.

Il lui était possible de se faire accompagner d'un délégué du personnel pour effectuer sa tournée, de faire constater par huissier la réalité des distances et des temps de travail qu'il invoque, ou encore de saisir la DIRECCTE qui dispose d'un pouvoir de contrôle sur les conditions de travail mais il n'a rien fait de tout cela.

Il n'a adressé aucune réclamation avant début 2010 soit 6 années après le début des relations contractuelles. Les attestations qu'il produit émanent de 4 collègues opérant sur d'autres secteurs qui n'attestent que pour eux-mêmes et n'ont formulé aucune demande en justice.

Les feuilles de route prévoient un rapport de distribution sur lequel le distributeur peut faire ses observations mais M. [M] n'y a jamais porté aucune mention.

Il s'est contenté de porter a posteriori sur les feuilles de route des mentions manuscrites très difficiles à déchiffrer pour les seuls besoins de la cause. Les tableaux qu'il a établis au mois le mois, faute de se référer à une distribution précise semaine par semaine, ne permettent pas à la cour d'apprécier le bien fondé de sa demande. Il n'a même pas établi de récapitulatif.

Les avenants récapitulatifs de modulation, signés sans réserve à la mi-mai de chaque année, aux termes desquels la salariée reconnaît la durée du travail effectuée sur les périodes antérieures notamment les années 2009 à 2013, font également la preuve du temps de travail.

La société ADREXO quant à elle, établit d'abord la préquantification des tâches à effectuer, en vertu des critères conventionnels, qui constitue une analyse a priori du temps de travail, et ensuite, établit les listes détaillées des salaires, lesquelles, lorsqu'elles n'ont pas été contestées dans le délai imparti, constituent un récapitulatif à posteriori du temps de travail réellement effectué par le salarié.

Les distributeurs effectuent leurs tournées dans des secteurs dont les spécificités sont prises en compte pour quantifier le temps nécessaire à la distribution. Le classement de ces secteurs en fonction de la densité de l'habitat et des pourcentages d'habitat collectif et individuel est déterminé par la convention collective. A partir de ces éléments, la société ADREXO analyse le secteur, les configuration des habitations, le caractère éloigné ou rapproché des boîtes aux lettres, et calcule la distance moyenne reliant les boîtes afin de déterminer sa typologie.

Sur ce,

Aux termes de l'article D 3171-8 du code du travail ' lorsque le salarié d'un atelier, d'un service ou d'une équipe ne travaillent pas selon le même horaire collectif de travail affiché, la durée de travail de chaque salarié concerné est décomptée selon les modalités suivantes :

1) quotidiennement, par enregistrement, selon tous moyens, des heures de début et de fin de chaque période de travail ou par le relevé du nombre d'heures accomplies.

2) chaque semaine, par récapitulation selon tous moyens, du nombre d'heures de travail accomplies par le salarié.'

Aux termes de l'article R.3171 9-1 du code du travail ' les dispositions de l'article D.3171-8 ne sont pas applicables aux salariés exerçant une activité de distribution ou de portage de documents. Le temps de travail de ces salariés fait l'objet d'une quantification préalable selon des modalités établies par convention ou accord collectif de branche étendu, en fonction du secteur géographique sur lequel s'effectue le travail, de la part relative dans ce secteur de l'habitat collectif ou de l'habitat individuel du nombre de documents à distribuer et du poids total à emporter;(....) L'employeur remet au salarié avant chacune de ses missions, le document qui évalue à priori sa durée de travail à partir des critères susmentionnés.'

Ce texte a été annulé pour incompétence par décision du Conseil d'Etat en date du 28 mars 2012 au motif que ' la possibilité de recourir à un tel mécanisme qui déroge à la règle de décompte de la durée de travail effectif ne pouvait être prévue, le cas échéant, que par le législateur'.

Les motifs de cette décision précisent que ' le mécanisme de quantification préalable du temps de travail retenu par le décret attaqué ne dispense pas l'employeur et le salarié de fournir au juge du contrat de travail, conformément à l'article L. 3171-4 du code du travail, tous les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés '.

Contrairement à ce qui a été jugé en première instance l'annulation des dispositions de l'article R.3171 9-1 du code du travail par le Conseil d'Etat, n'affecte que la preuve du temps de travail à laquelle restent applicables les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail et non le système de préquantification institué par la convention collective.

Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail ' en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles (....).'

Selon une jurisprudence constante ( soc 24 septembre 2014), la quantification préalable de l'ensemble des missions confiées et accomplies par les distributeurs de journaux dans le cadre de l'exécution de leur métier, en fonction des critères associés à un référencement horaire du temps de travail prévue par l'article 2.2.1.2 du chapitre 4 de la convention collective nationale de la distribution directe ne saurait, à elle seule, satisfaire aux exigences de l'article L. 3171-4 du code du travail. En cas de litige, relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

En l'espèce, M. [M] produit l'ensemble des feuilles de route établies quotidiennement pendant la durée du contrat ainsi que des récapitulatifs mensuels de ces feuilles de route désignés sous l'appellation de ' liste détaillée des salaires des distributeurs ' qui reprennent, pour chaque tournée de la période, le temps consacré à chaque opération (temps d'attente, temps de préparation, temps de distribution, temps de trajet), ainsi que les kilomètres parcourus et totalisent le nombre d'heures, le total des frais kilométriques et des sommes dues au salarié.

Il est également précisé sur ces récapitulatifs qu'' en application de l'article 7 du contrat de travail, le salarié déclare que la rémunération ci-dessus correspond à la rémunération des heures de travail effectuées pendant la période de paie considérée'.

Le salarié a la possibilité de contester les mentions de la 'liste détaillée' pendant un délai déterminé (qui toutefois, n'est précisé ni sur lesdites listes ni dans le contrat de travail) à défaut de quoi, ces mentions sont reprises telles quelles pour l'établissement de son bulletin de paie.

Les contestations de M. [M] ont été formulées postérieurement à l'expiration de ce délai.

Elles reposent sur les annotations manuscrites portées par le salarié sur toutes les feuilles de routes et les listes détaillées mensuelles.

La date à laquelle les annotations manuscrites servant de base aux demandes du salarié ont été portées sur les feuilles de route et sur les listes détaillées n'a pas été précisée.

Or, dans le courrier adressé par le salarié à M. [O] cadre dirigeant de la société ADREXO le 26 mars 2012, M. [M] déclare que le temps de préparation est le ' seul point sur lequel le distributeur se trouve être rémunéré avec un avantage minime de 5 à 8 centimes d'euros'.

Les demandes substantielles de majoration de ce poste que l'on trouve dans toutes les feuilles de routes de 2008 à 2013 ne sont pas cohérentes avec cette appréciation.

Dans ce même courrier, M. [M] indique que ' il se dégage un manque à gagner sur les 5 dernières années ( 2011, 2010, 2009, 2008, 2007) pour les trois secteurs compris en salaire brut 4.317,22 € et en indemnités kilométriques : 533,39 €'.

Or, le seul manque à gagner des années 2009, 2010 et 2011 s'élève à 6.948 euros dans le tableau reproduit dans les écritures du salarié.

Cette différence dont aucune explication n'est donnée, confirme que les majorations du temps de préparation, ont été introduites postérieurement au courrier précité et ne correspondent pas à la réalité.

De plus, comme le relève l'employeur, des incohérences apparaissent entre le montant des demandes indiqué dans les écritures et le manque à gagner qui résulte des annotations manuscrites du salarié sur les feuilles de route et les 'listes détaillées des salaires' qui en constituent la récapitulation.

Si une cohérence apparaît entre les annotations portées sur ces deux types de documents, malgré quelques erreurs d'addition peu significatives, en revanche les totaux fournis ne correspondent pas aux montants des demandes formées dans les écritures.

Ainsi, à titre d'exemple, le manque à gagner de l'année 2011 obtenu par addition des chiffres indiqués à la main sur les feuilles de route et sur les listes détaillées ressort à 3.537 euros pour 2010 et à 2.035 euros pour 2011 alors que M. [M] réclame pour ces mêmes années les sommes de 2.691,04 euros et de 1.733,06 euros sans que ces écarts substantiels soient explicités.

Cela démontre que les annotations portées sur les feuilles de route parfois plusieurs années après l'établissement de celles-ci ne représentent pas le temps réellement passé par M. [M] dans l'accomplissement de ses tournées de distribution.

Les attestations produites par MM.[E], [X], [Q] dont il résulte que le temps porté sur les feuilles de route était largement inférieur au temps réel lequel représentait prés du double du temps préquantifié ne permettent pas de déterminer le temps réellement effectué par M. [M].

Il est d'ailleurs à observer qu'aucun horaire n'était imposé et que chaque distributeur pouvait prendre le temps qu'il voulait pour effectuer sa tournée la seule exigence de l'employeur étant que les documents soient distribués avant une date limite.

M. [M] n'a donc pas fourni d'éléments crédibles du temps réellement passé à ses distributions ni du temps strictement nécessaire à ses tournées.

Sa demande tendant au paiement de rappels de salaires sur les années 2009 à 2013 ne peut être accueillie.

Sur les demandes au titre de la sous modulation

a) Période du 11 juillet 2011 au 08 juillet 2012

M. [M] indique qu'il a été payé pour 374,41 heures de travail entre ' août 2011 et juillet 2012" alors que l'avenant en cours prévoyait une durée annuelle de 468 heures, qu'il n'a perçu que 3.458,56 euros au lieu des 4.311,36 euros attendus soit une différence de 852,80 euros somme à laquelle s'ajoutent les congés payés y afférents.

La société ADEXO soutient qu'elle n'a donné au salarié que 422,26 heures en ce compris 47 heures d''absences valorisées' sur les 488 heures prévues à l'avenant du 15 octobre 2012 et que de ce fait elle ne doit à M. [M] que la somme de 617,02 euros.

Sur ce,

Les absences valorisées apparaissent dans les tableaux produits par l'employeur en pièce n°23 ainsi que dans les bulletins de salaire.

Elles correspondent exclusivement à des congés payés.

Or, l'employeur ne peut compter comme heures de travail fourni les congés payés générés par les heures fournies.

Il y a donc lieu d'exclure ces 47 heures de congés payés des heures travaillées, ce qui accroît d'autant la surmodulation et la somme due par la société ADREXO à ce titre qui ressort ainsi à 1.050,36 €, somme supérieure à la demande de M. [M].

Il sera donc fait droit à celle-ci.

b) Période de juillet 2012 à juillet 2013

Le salarié allègue qu'il n'a été payé que pour 359,49 heures au lieu des 363,96 heures contractuellement prévues par l'avenant et qu'il a subi de ce fait un manque à gagner de 42,02 euros somme à laquelle s'ajoutent les congés payés y afférents.

L'employeur déclare que du fait de l'inclusion dans le décompte de 35 heures d' 'absence valorisées' M. [M] a effectué 406,37 heures, qu'il se trouve ainsi en surmodulation et créancier à ce titre de la somme de 48,40 euros somme à laquelle s'ajoutent les congés payés y afférents.

La somme offerte par l'employeur est donc supérieure au montant de la demande.

Il sera donc fait droit à celle-ci.

Sur les demandes au titre de la surmodulation (dépassements des prévisions contractuelles)

a) Période de janvier à juillet 2009

M. [M] soutient avoir été payé 3h51 au delà du seuil de 10 % des heures contractuellement prévues. Il réclame les majorations de 25 % dues au titre de ces heures soit la somme de 7,74 € somme à laquelle s'ajoutent les congés payés y afférents.

La société ADREXO ne formule aucune objection à l'encontre de cette demande.

Il y sera fait droit.

b) Période de août 2009 à juillet 2010

M. [M] soutient avoir été payé pour 660,04 h au lieu des 572 h contractuellement prévues et bénéficie de majorations au taux de 25 % sur 30,84 h soit une créance de 68,31 euros somme à laquelle s'ajoutent les congés payés y afférents.

L'employeur ne fournit aucun élément de nature à contredire ces allégations. Il sera également fait droit à cette demande.

c) Période de août 2010 à juillet 2011.

M. [M] déclare avoir été payé pour 675,34 heures au lieu des 572 heures prévues par l'avenant en vigueur. Il réclame en conséquence les majorations des 46 h effectuées au delà du seuil de 10 % soit 105,80 euros somme à laquelle s'ajoutent les congés payés y afférents.

L'employeur déclare qu'il aurait en réalité payé à M. [M] 795,12 h de travail dont 88 h d''absences valorisées' et resterait ainsi devoir au salarié la somme de 180,02 euros au titre des majorations d'heures complémentaires.

La somme que la société ADREXO reconnaît devoir de ce chef est là encore supérieure à celle demandée par le salarié au même titre.

Il sera donc fait droit à la demande du salarié.

d) Période 2013/2014

M. [M] déclare avoir été payé 142,01 heures au lieu des 121 heures prévues à l'avenant, soit 8 h 56 au delà des 10 % majorées de 25 %. Il réclame à ce titre 20,35 euros somme à laquelle s'ajoutent les congés payés y afférents.

La société ADREXO ne fait aucune observation sur ce point.

Il y a lieu de faire droit à cette demande.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a fait droit aux demandes du salarié relatives au rappel de salaire par rapport au minimum garanti à hauteur de 894,52 euros somme à laquelle s'ajoutent les congés payés y afférents ainsi qu'aux rappels de majoration d'heures complémentaires pour 202,20 € somme à laquelle s'ajoutent les congés payés y afférents.

Sur les indemnités kilométriques

M. [M] indique qu'il a souvent réclamé par courrier la révision de l'évaluation du kilométrage secteur/centre et intra secteurs sans recevoir de réponse de l'employeur, et qu'il a établi sur les feuilles de route un décompte précis des kilomètres parcourus qu'il a reporté sur les listes mensuelles de salaires. Il a également produit un plan des secteurs concernés. Ces documents montrent à l'évidence que le kilométrage de ses secteurs a été sous évalué.

Il réclame à ce titre pour le total des années 2009 à 2012 la somme de 223,41 euros.

La société ADREXO réplique que le salarié réclame dans ses écritures la somme de 112,89 euros au titre des frais kilométriques 'au réel' alors qu'un manque à gagner de 131,21euros de ce chef ressort des annotations portées sur les documents contractuels et qu'il sollicite par ailleurs une somme de 55,34 euros au motif qu'il aurait effectué 5,5 kms au lieu des 5 kms comptabilisés par la société ADREXO du fait de la présence de la Nationale 10 qui coupe en deux un de ses secteurs et l'oblige à faire un détour, ce qui est inexact car la [Adresse 4] qui est la seule à être coupée du reste du secteur 113 par la RN10 est aisément accessible depuis le secteur 114 en empruntant [Adresse 3].

Sur ce,

Les demandes formées au titre des indemnités kilométriques ne sont pas cohérentes avec les données fournies par les feuilles de routes et les listes de salaires. Ainsi à titre d'exemple, il est demandé la somme de 64,68 euros au titre de l'année 2010 et celle de 39,73 euros au titre de l'année 2011. Les feuilles de route totalisent pour ces années respectivement les sommes de 139,91 euros et de 55,78 euros.

Par ailleurs, le salarié ne fournit aucun élément objectif tel qu'un relevé kilométrique de nature à contredire l'évaluation portée sur les feuilles de route.

Compte tenu de ces incohérences et des incertitudes sur la date à laquelle ont été collectées les données invoquées au soutien de cette demande, elle sera également rejetée.

Sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail

M. [M] fait valoir qu'il n'a cessé de dénoncer le non-respect des règles conventionnelles en vigueur ainsi que le système de pré quantification du temps de travail, et d'écrire que le temps réel ne correspondait pas à la rétribution servie, que le kilométrage était sous évalué, que l'employeur s'est toujours retranché derrière la préquantification du temps de travail et n'a entrepris aucune modification ou réajustement; qu'il a donc été contraint de quitter cet emploi qui lui a coûté du temps et de la disponibilité, sans même parler de l'usure de son véhicule, que l'employeur a commis de nombreux et graves manquements à ses obligations contractuelles ( modification substantielle du contrat sans son accord, non respect des règles conventionnelles et contractuelles, non respect des règles de modulation du temps de travail, non paiement des salaires garantis etc...) qui justifient sa décision de prendre acte de la rupture du contrat de travail.

La société ADREXO soutient que M. [M] a exécuté son travail durant 7 ans sans émettre la moindre réclamation à son encontre, que s'il affirme s'être rendu compte très rapidement de ce qu'il effectuait plus d'heures que prévu dans la quantification, il a attendu la fin de l'année 2013 pour chiffrer ses demandes, ce qui montre que les heures complémentaires prétendument impayées ne présentaient pas l'importance alléguée et n'ont donc jamais empêché la poursuite du contrat de travail, que dans la plupart des cas, il a conservé le nombre d'heures d'une période à l'autre, sans demander de modification de durée, qu'il a été rémunéré conformément aux stipulations contractuelles puisque il a toujours effectué en moyenne sur l'année les horaires de référence fixés d'un commun accord avec l'entreprise.

La prise d'acte du salarié n'était donc pas justifiée et doit produire les effets d'une démission.

Sur ce,

Il résulte de ce qui précède que l'employeur a commis des manquements en ne payant pas les majorations d'heures effectuées au delà des prévisions contractuelles ni le différentiel par rapport au minimum garanti. Il est également reproché à la société ADREXO d'avoir soumis au salarié des avenants supplémentaires en cours de période de modulation remettant en cause les conditions en cours telles que fixées par l'avenant récapitulatif du début de période, d'avoir omis de conclure des avenants aux dates prévues et de n'avoir pas toujours établi les plannings prévisionnels pour l'année à la date attendue.

Pour autant, ainsi que le relève la société ADREXO, lorsque les manquements de l'employeur ont perduré de nombreuses années sans que le salarié n'en ait tiré aucune conséquence, il faut considérer qu'ils n'étaient pas de nature à perturber la relation de travail et ne sont pas d'une gravité suffisante pour rendre la rupture du contrat imputable à l'employeur.

En l'espèce, les manquements invoqués par le salarié durent depuis le début de la relation contractuelle en 2005 et n'ont fait l'objet de remarques qu'à partir de 2010 et de demandes précises qu'en 2013.

Par ailleurs le manque à gagner prouvé était relativement modeste par rapport au temps écoulé et aux sommes versées au salarié.

À chacun des avenants récapitulatifs de fin de période produits au dossier par le salarié est annexé un programme indicatif de modulation des heures de chaque mois de la période suivante. Aucun manquement ne peut être relevé contre l'employeur sur ce point.

Si des avenants modificatifs ont été conclus en cours de période, ils ont été acceptés par le salarié et des avenants récapitulatifs, indiquant le nombre d'heures travaillées au cours de la période écoulée, ont été néanmoins envoyés au salarié à chaque terme de période conformément aux dispositions de la convention collective hormis pour les périodes du 16/07/2007 au 13/07/2008 et du 13/01/2010 au 12/07/2011 pour lesquelles aucun avenant n'a été produit, comme indiqué dans le tableau établi par le salarié en page 12 de ses écritures.

Il n'en demeure pas moins que la relation contractuelle s'est poursuivie jusqu'au 12 décembre 2013, date du courrier de prise d'acte du salarié, sans qu'aucune réclamation n'ait été élevée par M. [M] sur ce point dans les trois courriers de réclamation envoyés à l'employeur depuis 2010.

Selon une jurisprudence constante, la prise d'acte ne permet au salarié de rompre le contrat de travail au torts de l'employeur qu'en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail.

Les manquements pouvant être retenus n'ont pas empêché la poursuite du contrat de travail et ne sont donc pas d'une gravité suffisante pour justifier la rupture du contrat dont le salarié a pris l'initiative.

Cette rupture ne peut être imputée à l'employeur et produit donc les effets d'une démission.

Les demandes formées par le salarié au titre de la rupture du contrat de travail seront en conséquence rejetées.

Sur les dommages et intérêts concernant la période prescrite

M. [M] allègue avoir subi un manque à gagner supérieur à 3.500 euros pendant les années 2007 et 2008 uniquement en différentiel entre le temps pré quantifié et le temps réel. Il demande réparation de ce préjudice à hauteur de 2.500 euros nonobstant la prescription de sa créance pour la période concernée.

La société ADREXO réplique que le salarié tente ainsi de contourner l'ancienne prescription quinquennale applicable au paiement des salaires en oubliant qu'en matière de dommages et intérêts, la durée de la prescription est également de 5 ans.

Sur ce,

L'écoulement du délai de prescription met fin à toute demande concernant le paiement des salaires de sorte que doit être rejetée une demande qui tend, sous couvert de dommages et intérêts, à obtenir le paiement des salaires prescrits (soc 27/03/2001).

Au demeurant, cette stratégie ne présente plus d'intérêt dans la mesure où, depuis la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, le délai de prescription en matière de dommages et intérêts a été aligné sur celui des salaires.

Cette demande sera en conséquence rejetée.

Sur le non respect par l'employeur de son obligation de bonne foi

M. [M] demande paiement d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour 'non exécution de bonne foi du contrat de travail et non respect des règles légales conventionnelles et contractuelles'.

Il allègue le préjudice que lui ont causé le non respect des règles de modulation contractuelles, l'absence de régularisation en fin de période de modulation, les avenants de modulation conclus à n'importe quel moment de l'année, l'insuffisance des plannings de modulation incomplets ou absents, le non respect des dispositions légales concernant la majoration des heures complémentaires et le salaire minimum garanti, l'absence de mention sur les bulletins de paie des heures effectuées par le distributeur, l'utilisation d'un système de préquantification invalidé par le Conseil d'Etat et relève que l'employeur a délibérément organisé le détournement de ces règles et dispositions, et qu'il s'agit là d'une pratique habituelle que l'on retrouve dans de nombreux dossiers.

La société ADREXO réplique que l'ensemble des critères conventionnels ont été respectés, que le quantum des sommes demandées n'est pas explicité, qu'au vu des pièces produites, M. [M] ne peut prétendre qu'elle aurait été déloyale dans l'exécution du contrat de travail, que le maintien de la préquantification qui résulte de la convention collective n'est nullement une faute et que le salarié ne saurait lui reprocher à la fois ce maintien et le non respect des règles de modulation qui en découlent.

Sur ce,

Il incombe au salarié de démontrer que l'employeur a intentionnellement manqué à ses obligations contractuelles et qu' il a subi de ce fait un préjudice distinct de l'objet de ses autres demandes.

L'annulation par le Conseil d'Etat du décret du 08 juillet 2010 n'a pas eu pour conséquence de rendre illicite la préquantification et le maintien de ce procédé prévu par la convention collective qui constituait à l'époque le seul moyen de quantifier et de rémunérer l'activité des distributeurs, ne constitue pas une faute de l'employeur.

L'absence du nombre d'heures sur le bulletin de salaire n'entraîne pas de préjudice dès lors que ce nombre est indiqué sur les listes détaillées de salaire établies chaque mois et peut être retrouvé aisément à partir des données figurant sur le bulletin de salaire lui-même en divisant le salaire mensuel par le taux horaire l'un et l'autre étant mentionnés sur chaque bulletin.

M. [M] ne démontre pas par des faits précis que l'employeur aurait sciemment détourné des règles concernant l'établissement de la modulation et de la préquantification.

En revanche, la société ADREXO a délibérément manqué à son obligation de payer toutes les heures prévues contractuellement à la fin de chaque période de modulation comme stipulé à l'article 2-1 de la convention collective suivant lequel ' en fin de période annuelle de modulation, si la durée de travail effectif n'atteint pas la durée contractuelle du fait que l'entreprise n'a pas fourni au distributeur une quantité de travail suffisante, l'entreprise est tenue de régulariser la situation en payant le différentiel de salaire dans le mois qui suit la fin de la période de modulation, après avoir respecté la procédure de révision prévue à l'article 2.2.3"

Elle a également omis d'établir des avenants récapitulatifs des périodes du 16/07/2007 au 13/07/2008 et du 13/01/2010 au 12/07/2011 et de régulariser les sommes éventuellement dues à la fin de ces périodes sans fournir d'explication à ce manquement.

La société ADREXO a également failli à l'obligation posée par l'article L.3123-19 du code du travail suivant lequel ' lorsque la limite dans laquelle peuvent être accomplies des heures complémentaires au delà du dixième de la durée hebdomadaire ou mensuelle fixée au contrat de travail calculée le cas échéant, sur la période prévue par un accord collectif conclu sur le fondement de l'article L. 3122-2, chacune des heures complémentaires accomplies au delà de cette durée donne lieu à une majoration de salaire de 25 %'

Si le salarié a été dédommagé de son manque à gagner prouvé, la réparation de ce préjudice n'est intervenue qu'après plusieurs années par l'effet de sa demande en justice. Il existe de ce fait un préjudice distinct de ceux qui ont été indemnisés ci-avant.

Il sera réparé par une indemnité de 1.500 euros.

Sur la remise des documents de fin de contrat

La société ADREXO devra remettre à M. [M] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi ainsi qu'un bulletin de salaire rectifié conformes aux dispositions du présent arrêt.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il n'est pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles et de ses dépens.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant contradictoirement,

RÉFORME le jugement déféré en ce qu'il a fait droit aux demandes de rappel de salaire sur le différentiel entre préquantification et temps de travail réel et congés payés y afférents, aux demandes d'indemnité kilométrique, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, d'indemnité de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de frais irrépétibles ;

RÉFORME le jugement déféré sur le montant des dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à l'obligation de bonne foi dans l'exécution du contrat de travail ;

Statuant à nouveau de ces chefs,

DÉBOUTE le salarié de ces demandes ;

CONDAMNE la société ADREXO à verser à M. [M] la somme de 1.500 euros en réparation du préjudice causé par son manquement à l'obligation de bonne foi ;

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus ;

DIT que les sommes dues à M. [M] porteront intérêt au taux légal à compter de la première convocation de l'employeur devant le conseil de prud'hommes pour les créances salariales et à compter de la date de mise à disposition au greffe de la présente décision pour la créance indemnitaire ;

Y ajoutant,

DIT que la société ADREXO devra remettre à M. [M] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi ainsi qu'un bulletin de salaire rectifié conformes aux dispositions du présent arrêt ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses dépens.

- Prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- Signé par Madame Maryse LESAULT, Présidente et par Madame Carine DJELLAL, Greffier en pré-affectation, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15e chambre
Numéro d'arrêt : 15/05508
Date de la décision : 27/02/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 15, arrêt n°15/05508 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-27;15.05508 ?
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