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23/01/2019 | FRANCE | N°16/02448

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15e chambre, 23 janvier 2019, 16/02448


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



15e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 23 JANVIER 2019



N° RG 16/02448



AFFAIRE :



[H] [U]





C/





SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDIND AND CO

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Mars 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY

Section : Encadrement

° RG : 15/00729





Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Magali LAUBIES

Me Sébastien CAP



le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUP

LE FRANÇAIS



LE VINGT TROIS JANVIER DEUX MILLE DIX NEUF,



La cour d'appel de VERSAILLES, a...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 23 JANVIER 2019

N° RG 16/02448

AFFAIRE :

[H] [U]

C/

SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDIND AND CO

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Mars 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY

Section : Encadrement

N° RG : 15/00729

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Magali LAUBIES

Me Sébastien CAP

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUP

LE FRANÇAIS

LE VINGT TROIS JANVIER DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant, fixé au 9 janvier 2019 puis prorogé au 16 janvier 2019, et au 23 janvier 2019 les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Monsieur [H] [U]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Magali LAUBIES, avocat au barreau de TOULOUSE

APPELANT

****************

SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDIND AND CO

[Adresse 2]

[Adresse 3]

[Localité 1]

N° SIRET : 412 468 811

représentée par Me Sébastien CAP, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1460

SAS FLASH TRANSPORTS

[Adresse 2]

[Adresse 3]

[Localité 1]

N° SIRET : 333 075 828

représentée par Me Sébastien CAP, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1460

INTIMÉES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Octobre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Maryse LESAULT, Présidente chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Maryse LESAULT, Présidente,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,

Monsieur Hubert DE BECDELIEVRE, Magistrat honoraire,

Greffier, lors des débats : Madame Adlyne GARCZAREK,

FAITS ET PROCÉDURE,

M. [U] a été engagé par contrat écrit à durée indéterminée par la société MT TRANS en date du 1er octobre 1988, avant transfert du contrat de travail auprès de la SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING and CO en qualité de responsable de parc. Sa rémunération mensuelle brute en dernier état est de 5.061 euros.

La société emploie plus de 11 salariés.

La convention collective applicable est discutée.

M. [U] avait signé une rupture conventionnelle de son contrat de travail le 4 décembre 2014 puis s'est rétracté le 17 décembre 2014.

Il a été mis en arrêt maladie le 20 janvier 2015 puis a été licencié pour inaptitude le 30 juillet 2015.

Par requête enregistrée au greffe le 4 mars 2015, M. [U] il a saisi le conseil de prud'hommes de Montmorency aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur et de le voir condamner au paiement de diverses indemnités.

Lors de l'audience de jugement, M. [U] a demandé au conseil de prud'hommes de :

- condamner solidairement la SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS à lui verser :

- 4.571,98 euros à titre d'indemnité de congés payés pour le solde de 23,08 jours figurant sur le bulletin de salaire de mai 2013,

- 8.108,92 euros à titre de rappel de rémunération sur salaire brut de base et 810,89 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents,

- 220.615,29 euros bruts à titre de rappels de salaires pour heures supplémentaires sur la période de février 2010 à janvier 2015

- 22.061,53 euros bruts à titre de congés payés afférents,

- 56.984,28 euros pour indemnisation du préjudice subi au titre du travail dissimulé (article L 8223-1 du code du travail),

- 34.806,30 euros à titre de rappels de compléments d'Indemnités journalières de Sécurité Sociale sur la période courant du 20 janvier 2015 au 16 juillet 2015.

- constater qu'il a subi des faits caractérisant la déloyauté, le harcèlement moral et le non-respect de l'obligation de sécurité. En conséquence :

- condamner solidairement la société SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la société FLASH TRANSPORTS à lui verser la somme de 60.000 euros à titre de dommages et intérêts pour déloyauté, harcèlement moral et non-respect de l'obligation de sécurité de résultat,

Sur la rupture du contrat de travail,

A titre principal,

- constater que les employeurs ont commis de graves fautes et défaillances à son préjudice qui justifient la résiliation judiciaire du contrat de travail,

En conséquence,

- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs des employeurs.

- condamner solidairement la SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS à lui verser :

- 28.492,14 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 2.849,21 euros à titre de congés payés afférents (10 %)

- 64.728,62 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement

- 2.494,80 euros à titre de reprise du versement de salaire pour la période courant du 17 au 30 juillet 2015, conformément aux dispositions de l'article L.1226-14 du code du travail,

- 249,48 euros à titre de congés payés afférents,

-180.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou à tout le moins dépourvu de cause réelle et sérieuse.

A titre subsidiaire,

- constater que l'inaptitude de M. [U] trouve son origine dans les comportements de l'employeur caractérisant notamment le harcèlement moral, le non-respect de l'obligation de sécurité de résultat,

En conséquence,

- déclarer le licenciement nul et condamner solidairement la SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS à verser à Monsieur [H] [U] :

- 28.492,14 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 2.849,21 euros à titre de congés payés afférents (10 %)

- 64.728,62 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement

- 2 494,80 euros à titre de reprise du versement de salaire pour la période courant du 17 au 30 juillet 2015, conformément aux dispositions de l'article L.1226-14 du code du travail,

- 249,48 euros à titre de congés payés afférents

- 180.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.

A titre infiniment subsidiaire,

- constater que le licenciement se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse, les efforts de recherche de reclassement entrepris par l'employeur ayant été partiels et insuffisants.

En conséquence,

- condamner solidairement la SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS à verser à M. [U] les dites sommes,

- condamner solidairement la SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure

- condamner SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS à lui remettre les bulletins de paie rectifiés, l'attestation Pôle emploi, le certificat de travail et le reçu pour solde de tout compte régularisés,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à venir,

- statuer ce que de droit quant aux dépens.

La société a conclu au rejet de ses demandes.

Par jugement du 23 mars 2016, le conseil de prud'hommes de Montmorency a :

- dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,

- débouté M. [U] de l'ensemble de ses demandes.

M. [U] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 16 avril 2016.

Par conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, M. [U] demande à la cour de :

- rejeter toutes conclusions contraires ou du moins mal fondées,

- réformer le jugement de première instance,

- déclarer recevables ses demandes,

- condamner solidairement la SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS à verser à lui verser :

- 4.571,98 euros à titre d'indemnité de congés payés pour le solde de 23,08 jours figurant sur le bulletin de salaire de mai 2013,

- 8.108,92 euros à titre de rappel de rémunération sur salaire brut de base et 810,89 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents,

- 220.615,29 euros bruts à titre de rappels de salaires pour heures supplémentaires sur la période de février 2010 à janvier 2015,

- 22.061,53 euros bruts à titre de congés payés afférents,

- 56.984,28 euros pour indemnisation du préjudice subi au titre du travail dissimulé (article L 8223-1 du code du travail),

- 34.806,30 euros à titre de rappels de compléments d'indemnités journalières de sécurité sociale sur la période courant du 20 janvier 2015 au 16 juillet 2015,

- constater que le salarié a subi des faits caractérisant la déloyauté, le harcèlement moral et le non-respect de l'obligation de sécurité,

En conséquence,

- condamner solidairement la société SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la société FLASH TRANSPORTS à lui verser 60.000 euros à titre de dommages et intérêts pour déloyauté, harcèlement moral et non-respect de l'obligation de sécurité de résultat,

Sur la rupture du contrat de travail,

A titre principal,

- constater que les employeurs ont commis de graves fautes et défaillances à son préjudice qui justifient la résiliation judiciaire du contrat de travail,

En conséquence,

- prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs des employeurs.

- condamner solidairement la SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS à lui verser les sommes de :

- 28.492,14 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 2.849,21 euros à titre de congés payés afférents (10 %)

- 64.728,62 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement

- 2.494,80 euros à titre de reprise du versement de salaire pour la période courant du 17 au 30 juillet 2015, conformément aux dispositions de l'article L.1226-14 du code du travail,

- 249,48 euros à titre de congés payés afférents,

-180.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou à tout le moins dépourvu de cause réelle et sérieuse.

A titre subsidiaire,

- constater que l'inaptitude de M. [U] trouve son origine dans les comportements de l'employeur caractérisant notamment le harcèlement moral, le non-respect de l'obligation de sécurité de résultat, En conséquence, déclarer le licenciement nul et condamner solidairement la SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS à verser à M. [U] lesdites sommes.

A titre infiniment subsidiaire,

- constater que le licenciement se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse, les efforts de recherche de reclassement entrepris par l'employeur ayant été partiels et insuffisants.

En conséquence,

- condamner solidairement la SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS à verser à M. [U] lesdites sommes.

- condamner solidairement la SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS à verser à M. [U] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure

- condamner SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS à remettre à M. [U] les bulletins de paie rectifiés, l'attestation Pôle emploi, le certificat de travail et le reçu pour solde de tout compte régularisés,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à venir,

- statuer ce que de droit quant aux dépens.

Par conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, les sociétés SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS demandent à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris,

- débouter M. [U] de l'intégrité de ses demandes,

- condamner M. [U] à lui verser la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner M. [U] aux entiers dépens.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

La Cour,

1-Le contrat de travail de M. [U] et des demandes y afférentes

a-Sur le co-emploi

M. [U] demande la condamnation solidaire des sociétés SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORTS en invoquant le co-emploi et la dissimulation d'emploi.

Il fait valoir qu'il a été engagé par la société SOFITRANS mais qu'il travaillait en réalité pour la société FLASH TRANSPORT sans qu'aucune convention de mise à disposition n'ait été signée entre les deux sociétés et sans que M. [U] n'ait été déclaré salarié de FLASH TRANSPORTS. Il soutient avoir été soumis à un double lien de subordination envers SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORT et que malgré l'absence de formalisation par écrit de ce lien envers SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO, cette dernière a été l'émettrice de tous ses bulletins de paie. Faisant valoir qu'il n'avait jamais été placé auprès de celle-ci par contrat de prêt de main d''uvre, il ajoute qu'en tel cas il aurait été nécessaire de respecter les dispositions de l'article L8241-2 du code du travail, si bien que FLASH TRANSPORT ne peut se prévaloir d'une telle mise à disposition.

Il précise avoir eu en conséquence deux employeurs simultanés avec la double fonction de responsable de parc automobile et d'agent d'exploitation cariste tout en n'ayant jamais été déclaré par FLASH TRANSPORT ce qui l'a conduit à devoir travailler en moyenne 11h30 par jour dans des conditions l'ayant privé de la possibilité de prendre ses congés payés.

Il fait ainsi valoir que son travail a été dissimulé et que le caractère intentionnel de cette dissimulation est établi.

Les sociétés SOFITRANS et FLASH TRANSPORT exposent que M. [U] est le fondateur, associé et gérant de la société MT TRANS qui a été rachetée en 2005 par la société SOFITRANS et que celle-ci est la holding du groupe composé des sociétés : MT TRANS, FLASH TRANSPORTS et EURO-COURSIERS.

Elles rappellent qu'en 2005, la société SOFITRANS, s'est rapprochée via sa filiale la société FLASH TRANSPORTS de la société MT TRANS aux fins de l'acquérir [pièce 1] et que dès le début des négociations, il a été prévu qu'en cas de rachat, M. [U] serait conservé « au sein du groupe [SOFITRANS], tant pour MT TRANS, EUROCOURSIERS et FLASH TRANSPORTS » [pièce 1].

Elles ajoutent que dans le cadre du rachat de MT TRANS, M. [U] a conservé 10% des parts sociales de la société jusqu'au 20 décembre 2006, date à laquelle il a cédé lesdites parts à la société FLASH TRANSPORTS [pièces 1 et 2], puis qu'à compter du 1er janvier 2007, MT TRANS a donné à bail son fonds de commerce à FLASH TRANSPORTS [pièce 3] : elle (MT TRANS) n'a plus pour activité que la location de terrains et n'emploie plus aucun salarié, alors que l'activité de transport de fret routier est dorénavant exclusivement exercée par la société FLASH TRANSPORTS [pièce 4].

Elles précisent encore que :

- M. [U] est devenu salarié de la société MT TRANS [pièce 5] par contrat à durée indéterminée, à effet du 1er juillet 2005, avec reprise d'ancienneté au 1er octobre 1988, en tant que Responsable de parc chauffeur, statut Cadre Dirigeant, pour un salaire mensuel de 3.500 € et une prime mensuelle de suivi du parc de 1.000 €, avec comme lieu d'affection le site [Localité 2] dans le Val d'Oise.

- le contrat de travail de M. [U] a été transféré à la maison mère SOFITRANS à compter du 1er janvier 2007, date à laquelle la société MT TRANS a donné à bail son fonds de commerce à la société FLASH TRANSPORTS [pièce 3].

Les sociétés soutiennent que M. [U] après avoir cédé ses parts sociales a conservé son activité en tant que cadre dirigeant salarié et intégré la société SOFITRANS, au sein de laquelle il a assuré les fonctions de responsable de parc chauffeur au sein des trois filiales. Elles dénient toute dissimulation d'emploi.

Sur ce,

Le jugement entrepris a rappelé que M. [U] avait été embauché le 1er juillet 2005 par MT TRANS puis, par transfert de contrat, par SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO, et qu'il partageait semble-t-il son temps entre celle-ci et FLASH TRANSPORTS. Toutefois les premiers juges n'ont pas statué sur le moyen tiré du co-emploi.

En droit, hors l'existence d'un lien de subordination, pour que la qualité de co-employeur puisse être reconnue à l'égard d'une société, tierce à la relation de travail liant un salarié à son employeur tel qu'identifié par le contrat de travail, la réunion de trois critères est nécessaire, à savoir la confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre les entités concernées, qui caractérise une immixtion directe dans la gestion du personnel et de l'activité de l'employeur par le co-employeur.

En l'espèce M. [U] est entré dans le groupe SOFITRANS lors de la cession de sa société MT TRANS à la société FLASH TRANSPORTS, l'une des filiales du Groupe dont SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO est la société mère.

Il ressort des éléments versés aux débats que l'entrée de MT TRANS dans le groupe a été décidée dans le contexte des difficultés financières de cette société, comme cela résulte de la lettre qui lui a été adressée le 28 mai 2005, à l'attention de M. [U], par SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO (pièce 1) proposant un rapprochement dans les conditions suivantes :

- la structure juridique MT TRANS demeure,

- M. [U] sera affecté à la plate-forme Exploitation au sein du Groupe, tant pour MT TRANS, EUROCOURSIERS que FLASH TRANSPORTS,

- la totalité des dettes engagées par la société MT TRANS sera reprise à la charge du groupe à l'exclusion de tout passif caché résultant d'une faute éventuelle de gestion antérieure,

- la gestion des besoins de trésorerie sera assurée par le Groupe,

- l'ensemble des emplois sera maintenu tant pour le personnel roulant que sédentaire,

- 10% des parts sociales de MT TRANS seront conservés par M. [U],

- 90% de ces parts seront cédées à SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO pour 1 euro.

Le 20 juin 2005 SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO a donné à bail à MT TRANS un espace de bureaux situés à Taverny, pour un mois renouvelable par tacite reconduction à compter du 1er juillet 2005.

Le 26 juin 2005, soit peu après l'offre de la holding, un contrat de travail à durée indéterminée est établi entre MT TRANS dont M. [U] était le gérant, et lui-même, à effet au 1er juillet 2005 décrivant ses fonctions et attributions comme suit :

«vous exercerez pour le compte de notre société, compte tenu des directives particulières qui vous seront données, les fonctions de Responsable de parc chauffeur, statut Cadre Dirigeant, ceci impliquant une grande autonomie, pouvant vous amener à prendre des décisions stratégiques de votre part »

La cession de la totalité (et non 90%) des parts sociales de MT TRANS est ensuite intervenue entre M. [U] et FLASH TRANSPORTS selon acte du 20 décembre 2006.

Puis, le 28 décembre 2006 la société MT TRANS, « loueur » a concédé à FLASH TRANSPORTS un contrat de location gérance de son fonds de commerce de transports par coursiers et de transports routiers de marchandises en tous genres, en poids lourds et en poids légers pour le compte d'autrui et par tous moyens. Ce fonds de commerce comprend notamment un bail dont MT TRANS est titulaire, pour des bureaux lui appartenant.

Il résulte de ces actes que l'entreprise MT TRANS a été cédée à FLASH TRANSPORTS, dans des conditions caractérisant la cession d'une entité économique autonome, avec poursuite de l'activité antérieure par la cessionnaire. Le contrat de travail de M. [U] a de ce fait été transféré de plein droit à la société cessionnaire, et il est fondé à se prévaloir de sa qualité de salarié de cette société.

Le lien contractuel de subordination est conforté par les pièces produites par le salarié qui permettent d'établir que son identification professionnelle le présente expressément comme tel : il est mentionné dans l'organigramme de FLASH TRANSPORTS, dispose d'une adresse et d'une signature électroniques au nom de cette société. Il est sous le contrôle de M. [Y] président de la société exerçant ce contrôle sous signature électronique de FLASH TRANSPORTS (pièce 42).

Il est rappelé que la preuve du contrat de travail n'est pas soumise à l'établissement d'un écrit.

Dans ce contexte la dénégation par SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO de sa qualité de co-employeur est inopérante dès lors qu'elle se prétend elle-même l'employeur de M. [U]. En effet :

- si le transfert du contrat de travail de M. [U] en application de l'article L1224-1 du code du travail s'est opéré vers la seule société FLASH TRANSPORTS et si aucune convention de modification d'employeur au sein du groupe SOFITRANS n'est intervenue il demeure que SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO a, de fait exercé un pouvoir de contrôle sur l'exécution par le salarié des missions qui lui ont été confiées, qu'elle lui a versé des salaires comme cela résulte des bulletins de salaire. Les bulletins par elle délivrés pour l'année 2010 à 2012 le sont avec l'en-tête SOFITRANS (pièces 16 À 17) et, sous cotes N 15 et 19 le salarié produit les bulletins délivrés par celle-ci à son en-tête SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING du 1er janvier au 31 décembre 2013 puis du 1er janvier au 30 novembre 2014 qui mentionnent tous la qualité de responsable de parc pour une ancienneté au 1er octobre 1988 et une entrée dans la société au 1er janvier 2007.

- de plus il est rappelé que M. [C] [Y] est à la fois le président de FLASH TRANSPORTS et le gérant de la Holding, créant ainsi une confusion d'intérêts d'activités et de direction entre les deux entités puisque la holding a financé le travail fourni par M. [U] non seulement à son profit, mais également au profit de FLASH TRANSPORTS dont M. [Y] est le dirigeant. Si le salarié est mentionné être responsable du parc chauffeur par les différentes filiales, comme annoncé dans la lettre du 28 mai 2005 précitée, ce qui peut expliquer une rémunération de cette fonction mutualisée par la holding, il apparaît avoir cependant exercé des fonctions certes au service d'une activité de transporteur comme cela résulte des attestations produites et conformes aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile, mais comportant également des tâches de chargeur et manutentionnaire lorsqu'il y avait lieu (pièce 28), donc d'un autre ordre que celle de « cadre dirigeant » annoncée lors de l'entrée de MT TRANS dans le Groupe.

La Cour retient en conséquence que ces circonstances et en particulier la double casquette de M. [Y] caractérisent une immixtion directe dans la gestion du personnel et de l'activité de l'employeur FLASH TRANSPORTS par le co-employeur SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO.

b-sur l'application à M. [U] du statut de cadre dirigeant

M. [U] conteste avoir eu la qualité de cadre dirigeant tout en admettant que sa rémunération a été parmi les plus élevées de l'entreprise.

Les sociétés invoquent au contraire ce statut en rappelant que l'intéressé était gérant de MT TRANS avant son rachat par FLASH TRANSPORTS. Elles indiquent que son contrat de travail le désigne comme responsable de parc chauffeur, statut Cadre dirigeant et qu'à ce titre il dispose d'une grande autonomie, pouvant l'amener à prendre des décisions stratégiques. Elles rappellent les fonctions très larges qui lui ont été confiées par le contrat de travail :

« Suivi et gestion techniques des ve'hicules poids lourds, ve'hicules le'gers et mate'riel de levage et de manutention,

Organisation de l'e'tat des re'visions, passage aux mines et documents et e'tat ge'ne'ral de proprete', Organisation et Contrôle des documents concernant les ve'hicules : cartes grises, attestation d'assurance et licence de transports,

Organisation et mise en 'uvre des mesures ne'cessaires au respect des normes et dispositions re'glementaires de la profession et du code de la Route, Recherche et ne'gociation des financements des ve'hicules et de tout mate'riel accessoire tel que le mate'riel de levage, Chauffeur sur les ve'hicules poids lourds ; cependant, en fonction de la demande, M .[U] peut e'être amené a' effectuer des courses sur des ve'hicules le'gers, ainsi que des travaux de manutention, chargement et de'chargement, sans que cela puisse alte'rer votre autonomie, Relation commerciale et entretien avec la cliente'le, Etc. »

Le contrat précisant que « Cette liste n'est pas limitative. »

Elles ajoutent qu'en raison de ce statut il a conservé les bips et clefs lui donnant accès au site à toute heure et a pu bénéficier d'avantages comme d'aller jouer au golf dans la journée. Les sociétés en concluent que M. [U] ne peut en raison de ce statut se prévaloir d'heures supplémentaires ou prétendre à un travail dissimulé.

Sur ce,

Selon les dispositions de l'article L3111-2 alinéa 2 du code du travail :

Sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement.

Si la qualité de cadre dirigeant ne requiert pas l'existence d'un accord particulier entre l'employeur et le salarié (Cass. soc. 30 novembre 2011 n 09-67798), il appartient toutefois à l'employeur qui invoque ce statut de démontrer que les conditions caractérisant ce statut sont réunies.

S'agissant de l'importance des responsabilités confiées à M. [U], les sociétés font valoir que le salarié a eu un rôle central dans l'entreprise et a été amené à travailler tant avec les salariés de SOFITRANS qu'avec ceux de FLASH TRANSPORTS, et qu'il a notamment été partie à des négociations contractuelles concernant un contrat de transport vers l'Allemagne entre FLASH TRANSPORTS et GEODIS.

Toutefois selon l'échange de courriels produit aux débats sur ce point (pièce 8) la négociation, dont la dimension stratégique est à démontrer, est intervenue entre l'interlocutrice de Geodis et M. [Y] seuls (celui-ci sous la signature [Courriel 1] ), et M .[U] n'est que mis en copie de ces échanges.

Il est en conséquence inexact de parler de participation à une négociation. Il n'est pas produit d'autre exemple de mission exécutée par le salarié de nature à corroborer les hautes responsabilités prétendues. La gestion du parc chauffeur représente certes une fonction de responsabilité interne à l'entreprise qui suppose certainement une relative indépendance dans l'organisation de l'emploi du temps mais ne relevant pas spécifiquement d'une fonction de direction d'entreprise.

S'agissant de l'habilitation à prendre des décisions de façon largement autonome, il ressort des pièces produites que M. [U] était placé sous l'autorité de M. [Y] président de FLASH TRANSPORTS à qui il en référait en cas de difficultés, comme tel a été le cas lors des incidents relationnels avec des collègues. Aucune pièce n'étaye l'affirmation d'un poste associé à la direction et aux choix stratégiques de l'entreprise.

En ces circonstances le fait que M. [U] ait bénéficié d'une rémunération parmi les plus élevées de l'entreprise (selon le contrat transféré 3.500 euros brut par mois + une prime de suivi du parc de 1.000 euros) ne suffit pas à retenir le statut de cadre dirigeant.

En conséquence M. [U] est recevable à invoquer les dispositions des titres II et III du code du travail.

c-sur le régime conventionnel applicable

Les sociétés intimées font valoir que le contrat de travail de M. [U] n'est soumis à aucune convention collective alors que ce dernier se prévaut de la convention des chauffeurs routiers.

La convention collective des transports routiers et activités auxiliaires des transports (brochure JO n 3085 - IDCC 16) s'applique aux entreprises dont l'activité principale est : le transport de marchandises, le transport de voyageurs, le transport sanitaire, le déménagement, la messagerie et le fret express, ainsi que les entreprises de location de matériels de transport terrestre.

La société FLASH TRANSPORTS premier et principal employeur de M.[U] ayant pour activité déclarée celle de « transports routiers » il convient de dire que le contrat relève de cette convention collective.

d-sur les demandes lies à la rémunération du contrat de travail

d1-sur la baisse unilatérale de son salaire

M. [U] invoque une baisse unilatérale par l'employeur de sa rémunération de février à août 2013, de 3.980 euros à 3.491,89 euros, et sollicite un rappel de salaire de 8.108,92 euros outre congés payés y afférents en contestant l'argumentation de l'employeur et en soulignant n'avoir jamais donné son accord, pourtant nécessaire, à la rémunération par compensation de ses congés non pris.

Les sociétés exposent qu'il s'est agi d'une erreur du service comptable chargé de l'établissement des paies qui a donné lieu à un trop versé à M. [U] et qu'il a été décidé en septembre d'effectuer unilatéralement une régularisation. Elles ajoutent que pour compenser cette régularisation particulièrement importante il lui a été offert le paiement de 23 jours de congés payés dont il avait perdu le bénéfice en juin précédent, à concurrence de 3.520,76 euros.

Il est justifié par l'employeur, par la production aux débats de l'attestation émanant de la société de comptabilité ADEX (pièce 6) de ce que « par erreur le salaire de M .[U] [a été porté ] à la somme de 3980 euros pour 152 heures et 556, 42 euros pour les 17 heures supplémentaires [soit 4636,42 euros] au lieu de répartir les 3980 euros entre 152 heures à 3892 euros et 17 heures supplémentaires à 488 euros pour aboutir à un total de 3980 euros » de sorte que M. [U] a perçu 556,42 euros en trop par mois de février 2013 jusqu'à la découverte de l'erreur en décembre 2013, soit un montant total de 3.894,94 euros .

Si M. [U] conteste cette offre de compensation dont il ne soutient pas ne pas avoir bénéficié, force est de constater qu'il n'y a pas eu de réduction unilatérale de son salaire, mais d'une majoration erronée ensuite corrigée comptablement.

La discussion sur ce point est sans en conséquence sans intérêt et inopérante à établir un manquement de l'employeur.

d2- sur l'absence de rémunération d'heures supplémentaires

Selon les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail,

En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

La charge de la preuve des heures supplémentaires relève ainsi d'un régime de preuve partagé et il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

En l'espèce M. [U] rappelle que SOFITRANS INTERNATIONAL qui le désigne d'ailleurs « chauffeur sur les véhicules lourds » dans ses conclusions, admet avoir appliqué 17 heures supplémentaires par mois pendant toute la durée de la relation de travail. Il évalue sa part à 57,50 heures sa durée de travail hebdomadaire (11heures 30 par jour) soit 22,50 supplémentaires dont 4 seulement lui ont été rémunérées. Il rappelle ses contraintes de travail, souligne que par courriel du 15 janvier 2015 l'employeur lui imposait de limiter désormais son temps de travail à 7,8 heures par jour (39 heures par semaine) ce qui est une reconnaissance implicite de ce qu'il accomplissait auparavant et de manière habituelle de nombreuses heures supplémentaires.

Il sollicite le paiement de 220 615,29 euros bruts à ce titre de rappel de salaires de février 2010 à janvier 2015, outre congés payés y afférents.

Sur la prescription alléguée, M. [U] fait valoir que les dispositions de la loi 2013-504 du 14 juin 2013 qui a réduit de 5 à 3 ans la prescription applicable aux salaires, ne peuvent rétroagir et que les salaires exigibles avant la promulgation de cette loi demeurent soumises à une durée de prescription quinquennale.

L'employeur soulève la prescription de cette demande au motif que le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de sa demande le 4 mars 2015 pour un rappel d'heures supplémentaires portant sur la période comprise entre février 2010 et janvier 2015.

Sur le fond l'employeur soutient que M. [U] est défaillant à démontrer que son amplitude horaire ait été contrainte par ses missions professionnelles et que s'il prétend être venu en dehors de ses horaires de travail pour effectuer des tâches de manutention, celles-ci ne relevaient pas de son contrat de travail et étaient confiées spécialement à des caristes (M.[H] puis M.[E]). L'employeur ajoute que les horaires auxquels s'astreignait M. [U] ne correspondaient nullement à sa charge de travail comme en attestent plusieurs salariés de l'entreprise, et qu'il lui arrivait, aux heures où il prétend avoir travaillé, de recevoir des personnes sans lien avec l'entreprise ou les fonctions qu'il occupait. Enfin l'employeur rappelle que M. [U] avait été auparavant le gérant de MT TRANS et qu'il avait dans le groupe SOFITRANS le statut de cadre dirigeant.

Sur ce,

Sur la prescription,

Le point de départ d'un délai de prescription d'une créance salariale est le jour de son exigibilité soit lorsqu'il s'agit de salaire mensuel, le jour habituel du paiement fixé à la fin du mois.

La demande en paiement porte sur les heures supplémentaires alléguées pour la période de février 2010 à janvier 2015.

Selon les dispositions transitoires édictées par l'article 21 de la loi 2013-504 dont la promulgation interruptive de prescription est intervenue le 17 juin 2013,  « Les dispositions du code du travail prévues aux III et IV du présent article s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. »

Compte tenu du régime antérieur de prescription quinquennale, au jour de saisine du conseil de prud'hommes, le 4 mars 2015 la créance alléguée au titre du mois de février 2010 était prescrite pour avoir expiré fin février.

S'agissant de la créance alléguée au titre des mois suivants, le délai applicable aux échéances antérieures au jour de la promulgation (17 juin 2013) soit jusqu'à mai 2013 inclus, a été interrompu à cette date puis a recommencé à courir dans la limite d'une durée totale de 5 années.

Le délai applicable aux échéances postérieures à cette date, soit de juin 2013 à janvier 2015 a été celui triennal nouvellement en vigueur. La demande de paiement des heures supplémentaires pour les mois de mars 2010 jusqu'à janvier 2015 n'est pas prescrite.

Sur le fond,

S'agissant des éléments d'étaiement de sa demande M. [U] présente dans le corps de ses conclusions:

- un tableau établissant, pour chaque mois sur la période concernée un nombre d'heures supplémentaires calculé sur l'hypothèse d'une durée quotidienne de travail effectif systématiquement de 11heures 30 (7h-19h30) représentant 22h30 supplémentaires par semaines soit 8 heures majorées de 25% et 14h30 majorées de 50%,

-une description de ses tâches journalières soit :

- distribution des clés des véhicules et répartition des ordres de transports (carnets de bordereaux) aux intérimaires, quelques tâches de manutention de chargement et de déchargement et réception de marchandises du 1er juin 2011 au 1er avril 2014 car il n'y avait pas d'autres réceptionnaires que lui ses collègues arrivant plus tard (entre 8h30 et 8h50)

- pause déjeuner ne durant jamais plus d'une heure, précision apportée que c'est lui-même qui préparait les repas consommés sur place par la direction et le personnel d'exploitation (4-5 personnes)

- le soir il ne quittait jamais avant 19h30 et la communication aux chauffeurs de l'organisation du travail du lendemain après le chargement de tous les camions.

Il produit en outre des attestations de salariés ou de collègues témoignant de ses horaires et de sa grande disponibilité et son courrier adressé à son employeur le 19 décembre 2014 justifiant de ses horaires, ajoutant que si l'employeur lui a imposé par courriel du 15 janvier 2015 de limiter son temps de travail à 7,8 heures/jour soit à 39 heures par semaines cela valait reconnaissance des heures supplémentaires habituelles et nombreuses avant cette date.

Ces éléments constituent des éléments étayant la demande. Leur examen, confronté aux arguments de l'employeur appelle les observations suivantes :

- le contrat de travail produit est celui établi entre MT TRANS et M. [U] et fait référence à un statut de cadre dirigeant, qu'il avait alors, pour avoir été le gérant de cette société.

Le transfert du contrat à la société FLASH TRANSPORTS lors de la cession de MT TRANS, s'il s'est accompagné d'un statut particulier tenant compte de ces fonctions antérieures ne s'est cependant pas accompagné d'une formalisation des nouvelles conditions de travail alors, comme il a été dit qu'il se trouvait désormais sous l'autorité et le contrôle de M .[Y] à la fois président de FLASH TRANSPORTS et gérant de SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING.

- contrairement à ce qui était annoncé dans l'offre de rachat faite par SOFITRANS, il ne ressort pas des pièces versées que la société MT TRANS ait été conservée comme entité ou filiale autonome dont M. [U] aurait conservé la direction. En effet la cession de la totalité des parts est intervenue et l'activité de MT TRANS s'est ensuite limitée à la location de terrains et d'autres biens immobiliers (pièce SOFITRANS n°4).

- il n'est pas contesté qu'aucun contrat de travail n'a été formalisé après l'arrivée de M .[U] dans l'entreprise FLASH TRANSPORTS, de sorte qu'il convient de retenir que la durée contractuelle de travail est réputée être la durée légale, ce que confirment les bulletins de salaires comportant systématiquement 17 heures supplémentaires mensuelles majorées de 25% soit une durée de 39 heures.

- il n'est pas produit par le salarié de décompte précis et concret du surplus d'heures travaillées.

- cependant il n'est pas contesté que son rôle de chef de parc chauffeur le conduisait à organiser le service d'exploitation de FLASH TRANSPORTS et à être effectivement présent tôt le matin pour donner l'accès aux véhicules et distribuer les missions de transport, ou assez tard dans l'après-midi et le début de soirée pour gérer les retours des transporteurs, sans que le caractère systématique de cette contrainte ne soit toutefois établi par les pièces communiquées.

- la pause repas ne peut être comptabilisée en temps effectif de travail. Il est au surplus observé que M. [U] percevait une indemnité de repas.

- si l'employeur expose ne pas avoir demandé à celui-ci d'effectuer des heures supplémentaires, il n'a pu cependant méconnaître que la spécificité des fonctions confiées commandait une souplesse d'horaires qui, dès lors que le statut de cadre dirigeant est écarté, ne peut que se traduire en heures supplémentaires excédant le nombre retenu par mois.

La Cour retient toutefois à cet égard que la spécificité des missions confiées à M. [U] a donné lieu à une prime mensuelle de 1.000 euros. Si cette prime mensuelle de 1.000 euros n'était pas assujettie aux charges salariales et ne peut de se fait être analysée comme une rémunération de possibles heures supplémentaires, elle a cependant nécessairement correspondu aux sujétions attachés à ses missions et, en conséquence, à l'exigence et contrainte plus particulière de début et de fin de journée, pour organiser et coordonner le « parc chauffeur », alors qu'il disposait d'une certaine souplesse dans son emploi du temps, comme la possibilité notamment de pouvoir à fréquence régulière aller au golf ainsi qu'il est justifié et admis.

Il a par ailleurs bénéficié d'un paiement d'heures supplémentaires de 17h par mois soit une durée de travail hebdomadaire de 39 heures.

Il en résulte que déduction devant être faite des pauses repas, M. [U], qui n'avait formé aucune réclamation à ce titre avant novembre 2014, période contemporaine des incidents relationnels au travail, soit pendant les 9 années de sa présence dans le groupe SOFITRANS, ne justifie pas de sa demande en paiement d'heures supplémentaires dont il sera débouté par confirmation du jugement entrepris.

Il en sera de même de sa demande au titre du travail dissimulé qui en est le corollaire.

2-Les demandes de M. [U] liées à la rupture du contrat de travail

M. [U] invoque la nullité du licenciement en raison du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et des agissements de sa part ayant constitué des faits de harcèlement moral, (2-1). Il demande de retenir ces manquements de l'employeur et de prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts de celui-ci (2-2), formant en tout état de cause des demandes à son encontre (2-3).

2-1-demande tendant au constat de la nullité du contrat de travail

M. [U] demande la condamnation solidaire de la société SARL SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la société FLASH TRANSPORTS à lui verser 60.000 euros à titre de dommages et intérêts pour déloyauté, harcèlement moral et non-respect de l'obligation de sécurité de résultat,

2-1-1-sur le manquement allégué de l'employeur à son obligation de sécurité

a-l'indifférence de la direction en présence de menaces l' égard du salarié

M. [U] invoque les propos insultants, l'insubordination et les menaces d'un collègue cariste M. [E] en octobre et novembre 2014, dont il a toujours tenu la direction informée sans qu'elle ne réagisse, celle-ci ayant au contraire selon lui laissé s'exprimer ce comportement grossier et irrespectueux à son égard et donc à le favoriser. Il évoque une agression survenue le 7 novembre 2014 avec menaces physiques qui l'ont conduit à déposer une main courante, à alerter officiellement son employeur, et il souligne le lourd retentissement de cet incident sur sa santé.

Les sociétés démentent la version des faits et exposent avoir fait le nécessaire pour mettre fin à cette situation. Elles rappellent que le salarié en cause dans l'incident, M. [E], a effectivement menacé M. [U] de lui « éclater la gueule sur l'imprimante », s'en était excusé et avait en tout état de cause reçu un avertissement écrit le 24 novembre 2014.

Elles ajoutent qu'elles auraient pu retenir une part de responsabilité de M. [U] dont elles évoquent le comportement irrévérencieux à plusieurs reprises. Il avait, selon elles, menacé physiquement un autre délégué du personnel, M. [G] le 14 novembre 2010, et avait tenu à l'égard de celui-ci le 17 novembre 2013 des propos homophobes, de même qu'il avait manqué de respect à d'autres salariés, MM. [V], [S] ou encore [J].

Sur ce,

La Cour retient que les sociétés justifient par les pièces produites être intervenues à la suite de l'incident du 7 novembre 2014 et avoir notifié un avertissement à M. [E]. Elles ont ainsi satisfait à leur obligation de moyen de sécurité.

La Cour observe que M. [U] avait pour sa part présenté ses excuses pour sa propre attitude le 17 novembre 2013 et qu'il ressort des pièces versées aux débats qu'il ne faisait pas preuve lui-même d'un comportement constamment respectueux envers les salariés et chauffeurs relevant de sa responsabilité.

b-une charge de travail ayant conduit à l'épuisement

Le salarié expose avoir cumulé les missions de responsable de parc chauffeur pour la holding avec celle de cariste car si celle-ci avait deux caristes, en revanche FLASH TRANSPORTS n'en avait qu'un seul, M. [H] qui ne travaillait pas le matin, et qui a été remplacé ensuite par M. [E] à compter du 3 avril 2014. Le salarié ajoute la contrainte des périodes d'astreinte l'ayant obligé à tenir une permanence téléphonique du vendredi soir au lundi matin. Il fait grief à l'employeur à qui en incombe la preuve, de ne pas justifier des mesures qu'il aurait prises pour mettre fin à cette situation, et au conseil de prud'hommes d'avoir inversé la charge de la preuve.

Les sociétés font valoir que M. [U] a décidé seul de ses horaires et qu'il ne s'est plaint pour la première fois de leur amplitude que le 13 novembre 2014 ; qu'il lui a a alors été proposé de réduire son temps de travail à 35 heures ce qu'il a refusé par lettre du 19 décembre 2014 au motif de ses contraintes professionnelles. Sur ce point elles contestent la nécessité pour lui d'avoir dû être présent au travail dès 7 heures du matin, ajoutant qu'il avait l'habitude de faire venir des personnes étrangères à la société, alors que son statut de cadre dirigeant et de responsable de parc chauffeur relevait de la gestion et non de tâches matérielles.

Sur ce,

La Cour rappelle que le statut de cadre dirigeant de M. [U] n'est pas établi et que le contrat de travail qui était le sien, et qui a été transféré à prévu qu'il pourrait « en fonction de la demande, être amené à effectuer des courses sur des véhicules légers, ainsi que des travaux de manutention, ainsi que des travaux de chargement et de déchargement ». Si le contrat ajoute « sans que cela puisse altérer votre autonomie », force et de constater qu'étant le subordonné de M. [Y] l'argument de l'autonomie se trouvait vidé de son contenu.

Sur l'amplitude horaire de ses fonctions, il a été retenu qu'elle nécessitait une présence tôt dans l'entreprise et pouvait justifier un départ retardé en fonction des mouvements du parc chauffeur sous sa responsabilité.

Les sociétés ne pouvaient méconnaître que l'offre de réduire ses horaires à 35 heures risquait de ne plus satisfaire à cette contrainte. Mais M. [U] ne pouvait à la fois estimer la charge de son travail épuisante et en refuser l'allègement ce qui aurait pu appeler une modification de son contrat.

Le grief de manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de ce chef sera écarté.

c-l'impossibilité d'avoir pu prendre ses congés

M. [U] indique avoir disposé d'un solde de jours de congés payés de 23,08 jours faute d'avoir pu les prendre, et il prétend qu'ils ont été inexplicablement retirés de ses bulletins de paie entre mai et juin 2013. Il sollicite 4.571, 98 euros à ce titre.

Les sociétés contestent cette allégation en indiquant que le Salarié pouvait prendre des congés quand il le voulait, comme en justifient les nombreux formulaires de demandes produits aux débats et les bulletins de salaire correspondant. Elles précisent qu'il avait l'habitude de ne pas prendre tous ses congés et rappellent que le Salarié qui ne prend pas ses congés en fin de période de prise de ces congés il manque la fin .

Sur ce,

La Cour relève que M. [U] ne justifie pas avoir été empêché de pouvoir prendre ses congés payés alors que l'employeur démontre qu'il était fait droit aux demandes formées (pièces 39 à 43)

En conséquence le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de ce chef sera écarté.

Il n'est en définitive pas établi que les co-employeurs de M. [U] aient manqué à leur obligation de sécurité.

En conséquence M. [U] sera débouté de sa demande de condamnation de ses co-employeurs à lui payer des dommages intérêts.

2-2-2-sur les faits constitutifs de harcèlement allégués

M. [U] reproche à son employeur un acharnement à son encontre pendant sa période d'absence maladie en ayant :

- tenté par tout moyen de s'exonérer de ses obligations déclaratives et pécuniaires relatives au traitement de son arrêt de travail,

- supprimé sa ligne téléphonique,

- tenté de lui retirer le véhicule de fonction sans proposer de contrepartie

a-le grief d'un acharnement de l'employeur pendant la période d'arrêt maladie

M. [U] fait valoir que lors de son arrêt de travail du 20 janvier 2015 pour une durée d'un mois, pour raison de maladie, l'employeur a mis en doute la réalité de l'affection dont il souffrait en diligentant une contre-visite, laquelle a toutefois abouti à confirmer que l'arrêt était médicalement justifié. Il soutient qu'à cette occasion l'employeur a tout tenté pour retarder la procédure de prise en charge de son arrêt par la CPAM et le versement des indemnités journalières, en remplissant de manière incomplète l'attestation de salaire destinée à la CPAM, d'où un retard de deux mois, et en renonçant à l'usage de la subrogation et du maintien du salaire ce qui constituait pourtant des droits acquis pour lui. Il produit sur ce point les bulletins de paie correspondant à de précédents arrêts maladie.

Il ajoute qu'il aurait en outre dû bénéficier de la convention collective des transports routiers selon laquelle les cadres de plus de 10 ans d'ancienneté bénéficient d'un maintien à 100% du salaire du 1er au 120ème jour de maladie, puis à 75% du 121ème au 240ème jour.

Il indique ainsi, selon le tableau dans ses conclusions (pages 28-29) que l'employeur reste lui devoir une somme de 34 806,30 euros pour la période comprise entre le 20 janvier et le 16 juillet 2016.

Son calcul repose sur la reconstitution de salaire qu'il opère en intégrant les heures supplémentaires par lui alléguées et en appliquant le rappel de complément d'indemnités journalières de sécurité sociale qu'il estime dû.

SOFITRANS indique avoir rempli l'ensemble de ses obligations en temps utile et, conformément à ses usages, ne pas avoir procédé à une subrogation dans le versement des indemnités journalières auxquelles elle a appliqué le régime légal de la sécurité sociale.

Elle précise avoir aussitôt renvoyé une attestation de salaire complétée sur la rubrique « 6 », seule incomplète, ajoutant que le non renseignement de cette case sur une déclaration précédente n'avait pas créé de difficulté.

S'agissant de la subrogation dans le règlement des indemnités, SOFITRANS fait valoir qu'elle ne peut constituer un usage d'entreprise que lorsqu'elle est générale et est accordée à tout personnel ou à tout le moins à une catégorie de personnel, qu'elle est constante et fixée par des règles précises. Elle indique que tel n'a pas été le cas, que si M. [U] a pu en bénéficier en janvier 2014, et pas en novembre 2014, et que certains salariés seulement en ont bénéficié, mais d'autres pas.

Sur ce,

La Cour relève que SOFITRANS a régularisé l'attestation destinée à la CPAM lorsqu'elle a été retournée comme incomplète, et que le grief d'acharnement de ce chef n'est pas établi.

S'agissant des dispositions applicables, le contrat de travail de M. [U] relève comme il a été dit précédemment de la convention collective des transports routiers.

L'article 21 bis de cette convention dispose, qu'en cas d'arrêt pour maladies (2b) « Chaque maladie constatée conformément aux dispositions du paragraphe 1 du présent article donne lieu, sans application d'un délai de franchise, au versement d'un complément de rémunération assurant les garanties de ressources suivantes :( )en ce qui concerne les cadres ayant dix ans d'ancienneté :

- 100 p. 100 de la rémunération du 1er au 120ème jour d'arrêt ;

- 75 p. 100 de la rémunération du 121ème au 240ème jour d'arrêt. »

M. [U] est fondé en conséquence en sa demande tendant à se voir verser par son employeur le complément de ces indemnités et salaire pour la période litigieuse.

Le décompte produit par M. [U] ne permet pas à la Cour de recalculer ce complément. Il convient d'ordonner la production d'un décompte intégrant les termes du présent arrêt qui a rejeté la demande de paiement d'heures supplémentaires, d'ordonner une disjonction de l'instance relative à ce seul chef de demande, avec renvoi à l'audience selon calendrier précisé au dispositif.

S'agissant de l'usage de la subrogation au sein de l'entreprise SOFITRANS, l'usage d'entreprise est un avantage accordé librement et de manière répétée par un employeur à ses salariés, sans que le code du travail ou une convention ou accord collectif ne l'impose. Pour être qualifié d'usage, l'avantage accordé doit remplir les conditions cumulatives suivantes : premièrement, être général, c'est-à-dire qu'il doit être accordé à tout le personnel ou au moins à une catégorie du personnel (par exemple, ouvriers de la maintenance). Deuxièmement, être , attribué régulièrement (exemple : une prime versée depuis plusieurs années). Troisièmement être , déterminé selon des règles précises.

Force est de constater que M. [U] ne justifie pas de ce que ces conditions soient réunies à son bénéfice, l'employeur justifiant par les pièces produites aux débats de pratiques différenciées selon les salariés.

Rappelant que selon les dispositions de l'article L1152 -1 du code du travail « Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, la Cour retient que l'inexactitude de la rémunération appliquée pendant l'arrêt maladie de M. [U] ne constitue pas un fait ayant eu pour objet ou effet de dégrader ses conditions de travail de nature à avoir porté ses droits et à sa dignité, ni d'avoir altéré sa santé physique ou mentale ou compromis son avenir professionnel.

b-Sur la tentative de l'employeur de retirer le véhicule de fonction sans proposer de contrepartie

M. [U] expose avoir bénéficié d'un véhicule de fonction à savoir une Mégane de 5 places dont il soutient qu'il ne s'est agi en aucun cas d'un véhicule de service qui ne pouvait en aucun cas lui être retiré pendant son arrêt.

L'employeur soutient au contraire qu'il s'est agi d'un véhicule de service dès lors que le salarié ne peut l'utiliser que pour des trajets professionnels ce qu'il estime avoir été le cas en l'espèce car il s'agit d'un véhicule utilitaire qui ne constitue pas un avantage en nature, comme cela a été rappelé au salarié à 3 reprises les 29 janvier, 2 février et 23 février 2015. L'employeur indique que le véhicule en cause a fait l'objet d'une contravention pour stationnement gênant de son salarié le 3 février 2015.

Sur ce,

La cour retient que les éléments d'identification du véhicule produits aux débats désignent un véhicule de type particulier (VP) dont rien n'empêche l'utilisation dans le cadre d'un usage professionnel, et non un utilitaire fourgonnette comme le soutient l'employeur.

Le contrat établi entre MT TRANS et M. [U] ne mentionne pas de véhicule de fonction mais il n'est pas contesté que celui en cause a été mis à sa disposition par SOFITRANS après le rachat de MT TRANS et le transfert de ce contrat (Cf bon de commande du 16 septembre 2010).

Les nouvelles conditions de travail de M. [U] n'ont pas donné lieu à un contrat écrit alors que SOFITRANS nouvel employeur pouvait parfaitement formaliser cette donnée contractuelle avérée. Dès lors, n'étant pas établi qu'il se soit agi d'un avantage en nature, l'employeur ne pouvait pas le remettre en cause dans accord du salarié.

Pour autant le salarié n'évoque qu'une tentative de retrait de cette mise à disposition, de sorte qu'en l'absence de fait établissant que l'employeur ait exécuté cette demande de restitution, il ne être retenu de ce chef un fait porté atteinte à ses droits dans les conditions ci-rappelées.

c ' sur la suppression de la ligne téléphonique pendant l'arrêt maladie

M. [U] explique qu'il bénéficiait d'une ligne téléphonique qu'il utilisait dans le passé à titre personnel puis professionnel, ligne ayant préexisté au transfert de son contrat auprès du Groupe SOFITRANS. Il indique que cette ligne a été brusquement supprimée par M. [Y] à la suite de leur entretien téléphonique du 22 janvier 2015, alors que son contrat de travail était toujours en cours bien que suspendu par l'arrêt maladie, et qu'il en a fait établir le constat par Huissier, soulignant le préjudice que cela lui a causé.

L'employeur fait valoir qu'il s'agit d'un téléphone portable mis à sa disposition par la société, qui tout comme un ordinateur portable n'est jamais valorisé dans la paie du salarié comme avantage en nature, et qui n'est d'ailleurs pas contractualisé.

Sur ce,

La Cour, constatant que le contrat n'est que suspendu pendant la durée de l'arrêt maladie ne peut que constater que la suppression de cette ligne peu après le début de l'arrêt maladie de son salarié a constitué un manquement à l'obligation de bonne foi dans l'exécution du contrat , d'autant que la société admet qu'il s'agissait d'une ligne qui avait un usage à la fois privé et professionnel avant le transfert du contrat de M. [U]. De ce fait la suppression de cet instrument de travail a constitué une dégradation des conditions de travail du salarié et la manière dont elle a été opérée à la faveur d'un arrêt de travail et sans la moindre justification une atteinte à sa dignité.

En conséquence la Cour retient, alors qu'un fait unique ne peut à soi seul caractériser un harcèlement moral, étant au surplus observé le retrait du téléphone est intervenu dans un contexte qui peut être qualifié de pré-rupture du contrat puisque M. [U] avait signé une rupture conventionnelle le 4 décembre 2014 avant de se rétracter le 17 décembre, que le comportement de l'employeur susévoqué se fondait ainsi sur des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral.

Il convient de retenir un préjudice pour le salarié de s'être vu supprimer sa ligne téléphonique et de condamner solidairement les deux sociétés à payer à M.[U] une somme de 5000 euros à titre de dommages-intérêts de ce chef.

Dès lors qu'il n'est pas justifié de ce que l'état d'inaptitude de M. [U] ait été causé par le comportement de l'employeur, le moyen tiré de la nullité du licenciement sera écarté par confirmation du jugement entrepris.

2-2-demande de résiliation du contrat aux torts de l'employeur

Comme rappelé, M. [U] avait signé un acte de rupture conventionnelle de son contrat de travail le 4 décembre 2014 avant de se rétracter dans le délai légal le 17 décembre 2014, puis d'engager une procédure de licenciement devant le conseil de prud'hommes le 4 mars 2015.

2-2-1-Résiliation en raison des manquements contractuels de l'employeur

Il résulte des motifs qui précèdent que le manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur a été écarté, et que les manquements relatifs à la charge de travail, à l'absence de rémunération supplémentaire et au harcèlement allégué pendant l'arrêt maladie du 20 janvier au 30 mai 2015 n'ont pas été retenus hormis la suppression de la ligne téléphonique qui ne constitue cependant pas, dans le contexte rappelé un acte d'une gravité telle que la poursuite du contrat aurait été impossible.

En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le M .[U] de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.

2-2-2- Résiliation en raison de la recherche insuffisante de reclassement

M. [U] a été licencié pour inaptitude par lettre recommandée du 30 juillet 2015. Il soutient que l'employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement de sorte que le licenciement est non causé.

L'employeur rappelle n'avoir qu'un seul établissement. Toutefois il expose qu'un reclassement ayant pu être envisagé sur un autre site, il a proposé au salarié le 29 juin 2015 sur la base des préconisations du médecin du travail, un poste de chauffeur poids lourd auprès d'une entreprise devenue cliente de FLASH TRANSPORT, le poste offert étant placé à l'année chez ce client. L'employeur ajoute que si cette offre n'a pas reçu de suite favorable, il justifie cependant avoir ainsi satisfait à son obligation de reclassement.

Sur ce,

Selon les dispositions de l'article L1226-2 du code du travail dans sa rédaction en vigueur au jour du licenciement :

Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

En l'espèce M. [U] a été examiné par le médecin du travail lequel a conclu à une inaptitude au poste de travail occupé, tout en retenant qu'un reclassement pourrait être envisagé sur un autre site.

Il est justifié de ce que, dans l'impossibilité de reclasser le salarié sur le site [Localité 2], siège du Groupe SOFITRANS, seule une solution « externe » pouvait être recherchée, ce que l'employeur justifie avoir fait en proposant le contrat de chauffeur de poids lourd.

Il s'agit certes d'une offre inférieure au niveau de qualification de M. [U] qui était responsable d'un parc chauffeur. Toutefois cette offre avait été communiquée au médecin du travail dont l'employeur indique sans être démenti qu'il l'avait considérée compatible avec l'état de santé du salarié.

L'obligation de rechercher un reclassement étant de moyen, la Cour retient que l'employeur y a ainsi satisfait de bonne foi.

En conséquence il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il débouté le salarié de sa demande sur ce fondement.

2-3-Sur les demandes en paiement formées par M. [U]

Les motifs qui précèdent rendent sans objet les demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement nul ou dépourvu de cause réelle et sérieuse (180 000 euros), et de complément d'indemnité de licenciement (64.728,62 euros), de rémunération d'heures supplémentaires (220 615,29 euros outre congés payés) ou encore au titre du travail dissimulé (56.984,28 euros).

2-3-0-La demande en paiement de la somme de 28.492,14 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et celle de 2.849,21 euros à titre de congés payés afférents (10 %) sont sans objet dès lors que M. [U] n'était pas en mesure, en raison de la déclaration de son inaptitude, de l'exécuter.

2-3-1- Sur la demande en paiement de la somme de 2.494,80 euros à titre de reprise du versement de salaire pour la période courant du 17 au 30 juillet 2015, formée au visa de l'article L.1226-14 du code du travail, et de celle de 249,48 euros à titre de congés payés y afférents,

La Cour rappelle que l'article L.1226-12 auquel renvoie L.1226-14 du code du travail ne s'applique qu'aux salariés inaptes par suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Dans le cas de M. [U] les conditions dans lesquelles l'employeur doit présenter une offre de reclassement au salarié déclaré inapte sont déterminées par les articles L. 1226-2 et L.1226-2-1 du code du travail.

Selon l'article L1226-12 du code du travail :

'Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement.

L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi.

L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L.1226-10, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail(... )»

Les pièces produites permettent de constater que l'employeur a respecté la procédure de licenciement et a présenté un poste de reclassement conforme avec l'état de santé du salarié et compatible, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande d'indemnité.

3-Remise de documents sociaux

Il est rappelé que l'employeur a l'obligation de délivrer au salarié un bulletin de salaire et une attestation Pôle emploi conforme à sa situation en fin de contrat, qui résultera en l'espèce des termes définitifs de la présente instance. Les sociétés SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO et la SAS FLASH TRANSPORT devront donc y satisfaire quand aura été réglée la question de la rémunération pendant l'arrêt maladie dont le maintien du salaire prévu par la convention.

4-Autres demandes

Il sera statué sur les dépens et frais irrépétibles dans les termes du dispositif.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, et ajoutant au jugement entrepris,

DIT que la société FLASH TRANSPORTS et la société SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO ont été co-employeur de M. [H] [U] après le transfert du contrat de celui-ci au sein de la société FLASH TRANSPORTS ;

DIT que M. [H] [U] n'a pas relevé du statut de cadre dirigeant salarié ;

DIT que le contrat de travail relève de la convention collective des transports routiers ;

A- Sur les demandes de M.[H] [U]

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [H] [U] de ses demandes autres que celles relatives au manquement de l'employeur pendant l'arrêt maladie de janvier 2015 à mai 2015 (1), et à la demande en paiement du rappel de rémunération de l'arrêt maladie (2) ;

1-INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté de la totalité de ses demandes de dommages-intérêts ;

Statuant à nouveau,

DIT que la société FLASH TRANSPORTS et la société SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO ont causé un préjudice pendant l'arrêt maladie du 20 janvier au 30 mai 2015 ;

CONDAMNE solidairement la société FLASH TRANSPORTS et la société SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO à payer à M.[H] [U] la somme de 5.000 euros à titre de dommages intérêts de ce chef ;

2-INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de M. [H] [U] au titre du rappel de rémunération pendant l'arrêt maladie ;

Statuant à nouveau de ce chef,

DIT que M. [H] [U] est fondé à se prévaloir de l'article 21 de la convention collective des transports routiers pour sa rémunération à 100% pendant l'arrêt maladie ordonné le 20 janvier 2015 ;

Sur le montant de la condamnation à ce titre,

ORDONNE la production par M. [U] d'un décompte actualisé de sa créance à ce titre tenant compte des termes du présent arrêt dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et sa communication concomitante à la société FLASH TRANSPORTS et à la société SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO ;

ORDONNE la disjonction des demandes relatives à ce chef de demande ;

DIT que les parties devront en tant que de besoin, et faute d'accord sur le montant et son règlement, conclure sur ce chef de demande avant le 30 avril 2019 et comparaître à l'audience de plaidoirie du 21 mai 2019 à 9 heures salle 2, l'ordonnance de clôture étant fixée au 14 mai 2019 ;

B- Sur les demandes de la société FLASH TRANSPORTS et de la société SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il rejeté les demandes de deux sociétés ;

C- Sur les frais irrépétibles et dépens

INFIRME le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau et ajoutant,

CONDAMNE solidairement la société FLASH TRANSPORTS et la société SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO à payer à M. [H] [U] la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

CONDAMNE solidairement la société FLASH TRANSPORTS et la société SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO aux dépens ;

RAPPELLE l'obligation solidaire pour la société FLASH TRANSPORTS et la société SOFITRANS INTERNATIONAL HOLDING & CO de remettre au salarié, au terme du présent litige un bulletin de salaire actualisé tenant compte des termes du présent arrêt et une attestation de Pôle emploi.

- Prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- Signé par Madame Maryse LESAULT, Présidente et par Madame Carine DJELLAL, Greffier en pré-affectation, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 15e chambre
Numéro d'arrêt : 16/02448
Date de la décision : 23/01/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 15, arrêt n°16/02448 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-23;16.02448 ?
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