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15/01/2019 | FRANCE | N°18/02460

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 15 janvier 2019, 18/02460


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 4IA



13e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 15 JANVIER 2019



N° RG 18/02460 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SJSL



AFFAIRE :





Société AIG EUROPE LIMITED





C/



[J] [A]



Société ML CONSEILS



LE PROCUREUR GENERAL





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Mars 2018 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

chambre :

N° Section :

N° RG : 2016L02067



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 15/01/2019



à :



Me Julie GOURION,



Me Mélina PEDROLETTI,



Me Franck LAFON,



TC VERSAILLES



MP





REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 4IA

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 JANVIER 2019

N° RG 18/02460 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SJSL

AFFAIRE :

Société AIG EUROPE LIMITED

C/

[J] [A]

Société ML CONSEILS

LE PROCUREUR GENERAL

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Mars 2018 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 2016L02067

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 15/01/2019

à :

Me Julie GOURION,

Me Mélina PEDROLETTI,

Me Franck LAFON,

TC VERSAILLES

MP

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE QUINZE JANVIER DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Société AIG EUROPE LIMITED société de courtages et d'assurances de droit britannique, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1] - ROYAUME UNI

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 18/02562 (Fond)

Représentée par Maître Julie GOURION, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 51 - N° du dossier 218559, et par Maître Arnaud MOLINIER de la SELAS LPA-CGR, avocat plaidant au barreau de PARIS, vestiaire : C0428

APPELANTE

****************

Monsieur [J] [A]

[Adresse 2]

Autre(s) qualité(s) : Appelant dans 18/02562 (Fond)

Représenté par Maître Mélina PEDROLETTI, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : V 626, et par Maître Betty ADDA, avocat plaidant au barreau de PARIS, vestiaire : R22

- Société ML CONSEILS société de mandataires judiciaires agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. représentée par Maître [H] [Z] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS ACE

[Adresse 3]

- Société ML CONSEILS société de mandataires judiciaires agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège représentée par Maître [H] [Z] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS AIRWELL INDUSTRIE FRANCE

[Adresse 3]

- Société ML CONSEILS société de mandataires judiciaires agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. représentée par Maître [H] [Z] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS AIRWELL FRANCE

[Adresse 3]

- Société ML CONSEILS société de mandataires judiciaires agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. représentée par Maître [H] [Z] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS WESPER INDUSTRIE FRANCE

[Adresse 3]

Représentées par Maître Franck LAFON, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20180188, et par Maître Reinhard DAMMANN du PARTNERSHIPS CLIFFORD CHANCE EUROPE LLP, avocat plaidant au barreau de PARIS, vestiaire : K0112

INTIMES

****************

LE PROCUREUR GENERAL

POLE ECOFI - COUR D'APPEL

5, rue Carnot - 78000 VERSAILLES

PARTIE INTERVENANTE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Novembre 2018, Madame Sophie VALAY-BRIERE, présidente, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Nathalie MULOT

En la présence du Ministère Public, représenté par Monsieur Fabien BONAN, Avocat Général dont l'avis du 20 septembre 2018 a été transmis le 21 septembre 2018 au greffe par la voie électronique.

Le groupe Airwell, qui a pour activité le développement, la production et la commercialisation de systèmes de climatisation à destination de particuliers et de professionnels, détenait plusieurs sociétés en France, soit une société holding, ACE SAS, ainsi que trois sociétés opérationnelles, Airwell France SAS, Airwell Industrie France SAS et Wesper Industrie France SAS.

Le 29 mai 2013, la société Elco, actionnaire du groupe depuis 1994, a cédé ses titres à la société AC Beteiligungen Gmbh, détenue par le fonds d'investissement allemand Dubag, lequel les a lui-même revendus dès le 28 juin 2013 à la société AW Industrie Gmbh (AWI) détenue par M. [O] [O], laquelle a ensuite cédé 20 % du capital à la société The Gap consultants AG, détenue par M. [G] [U], et 20% à la société Gramax AG, détenue par M. [J] [A].

Dirigeant de la société AC Beteiligungen Gmbh, M. [A] a été désigné le 8 juillet 2013 président des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell Industrie France SAS et Wesper Industrie France SAS.

Face aux difficultés financières rencontrées par ces sociétés, et sur requête du dirigeant, le président du tribunal de commerce de Versailles a, par ordonnances datées du 6 mars 2014, désigné maître [F] [V] en qualité de mandataire ad hoc des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell Industrie France SAS et Wesper Industrie France SAS.

Selon jugements en date du 1er avril 2014, le tribunal de commerce de Versailles a ouvert des procédures de redressement judiciaire au profit de ces mêmes sociétés et désigné la SELARL [V] en qualité d'administrateur judiciaire avec mission de représentation.

Par un jugement rendu le 15 juillet 2014, ce même tribunal a arrêté un plan de cession des entreprises du groupe Airwell, converti les procédures en liquidations judiciaires et désigné la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Maître [H] [Z], en qualité de liquidateur judiciaire.

Le 9 novembre 2016, Me [Z], ès qualités, estimant que M. [A] avait commis des fautes de gestion en sa qualité de dirigeant, l'a assigné ainsi que son assureur, la société de droit britannique AIG Europe Limited, aux fins de les voir condamnés solidairement au comblement du passif des sociétés du groupe Airwell.

Par jugement contradictoire rendu le 27 mars 2018, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Versailles, a notamment :

- débouté Monsieur [J] [A] et la société AIG Europe limited de leur demande de sursis à statuer,

- donné acte à la société AIG de l'abandon de sa demande de fin de non recevoir,

- dit que Monsieur [J] [A] a commis des fautes de gestion ayant contribué à l'augmentation de l'insuffisance d'actif des sociétés du groupe Airwell, et l'a condamné à payer la somme totale de 8 000 000 euros, entre les mains de la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], ès qualités, pour être affectée à l'apurement du passif social des sociétés, soit :

* la somme de 1 600 000 euros pour chacune des sociétés ACE SAS, Airwell Industrie SAS et Wesper Industrie SAS,

* la somme de 3 200 000 euros pour la société Airwell France SAS,

en sus les intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2016 ;

- dit que la garantie de la société AIG Europe Limited est acquise à M. [A] à hauteur de 1 000 000 d'euros pour chacune des quatre sociétés impliquées du Groupe Airwell et l'a condamnée à le garantir à hauteur de la somme totale de 4 000 000 d'euros ;

- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article L.1343-2 du code civil (sic), la première capitalisation intervenant le 9 novembre 2017 et les capitalisations ultérieures le 9 novembre de chaque année jusqu'à parfait paiement ;

- débouté M. [A] et la société AIG Europe Limited du surplus de leurs demandes ;

- les a condamnés solidairement à payer à la SELARL ML Conseils, ès qualités, la somme de 40 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Le tribunal de commerce a retenu au titre des fautes de gestion commises par M. [A] :

* la poursuite abusive d'une activité déficitaire notamment par son inaction (s'être abstenu de faire procéder à un audit des comptes des sociétés, de solliciter une recapitalisation, de mettre en oeuvre un plan de réduction des charges, de solliciter l'ouverture d'une procédure de sauvegarde à un moment où les sociétés disposaient encore de liquidités),

* l'utilisation de la trésorerie des sociétés du groupe pour la rémunération de contrats de prestations de service sans contrepartie ou sans intérêts pour elles et conclus auprès de sociétés dont M. [A] était directement ou indirectement partenaire.

Il a rejeté le grief de tentative de cessions d'actifs douteuses dès lors que celles-ci ne s'étant pas réalisées n'ont pas eu de répercussion sur l'insuffisance d'actif des sociétés.

La société AIG Europe Limited et M. [A] ont interjeté appel de cette décision, respectivement les 6 et 11 avril 2018.

Par ordonnance du 30 avril 2018, le magistrat désigné par le premier président, constatant la connexité entre les deux procédures, les a jointes sous le n° RG 18/2460.

Le 12 juin 2018 la juridiction du Premier président de la cour de céans, saisi en référé par la société AIG Europe Limited, a rendu une ordonnance suspendant l'exécution provisoire attachée au jugement du 27 mars 2018.

Par ailleurs, dans le cadre d'une action en responsabilité délictuelle engagée parallèlement par la SELARL ML Conseils, ès qualités, à l'encontre des sociétés Dubag, Elco Holland et Elco Ltd, le tribunal de commerce de Versailles a, par jugement du 29 juin 2018, rejeté les demandes du liquidateur judiciaire en réparation du préjudice causé par l'opération de cession du contrôle du groupe Airwell.

Dans ses dernières conclusions d'appelant et d'intimé déposées au greffe et notifiées par RPVA le 27 septembre 2018, M. [A] demande à la cour de :

- le déclarer recevable et bien fondé en ses appels principal et incident ;

Y faisant droit,

- déclarer irrecevable l'action formée par Me [Z] en sa qualité de liquidateur des sociétés ACE, Airwell France, Airwell industrie France, Wesper industrie France, et en conséquence, le débouter de l'ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire, si Me [Z], ès qualités, devait être déclaré recevable :

- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Versailles en ce qu'il a :

* dit qu'il a commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif des sociétés du groupe Airwell et l'a condamné à payer la somme totale de 8 000 000 euros entre les mains de la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], ès qualités, pour être affectée à l'apurement du passif social des sociétés ACE SAS, Airwell industrie France SAS et Wesper Industrie SAS pour un montant de 1 600 000 euros pour chacune d'entre elles, et Airwell France SAS pour un montant de 3 200 000 euros en sus les intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2016,

* ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil, la première capitalisation intervenant le 9 novembre 2017 et les capitalisations ultérieures le 9 novembre de chaque année jusqu'à parfait paiement,

- l'a débouté de ses demandes et l'a condamné au paiement de la somme de 40 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau,

- prononcer l'annulation du jugement rendu par le tribunal de commerce de Versailles le 27

mars 2018 en ce qu'il n'a pas visé le rapport du juge commissaire et/ou en ce que le rapport

existant du juge commissaire devait être considéré comme inexistant au vu de son absence

totale de motivation ;

- ordonner le sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive à rendre dans le cadre de l'action engagée par la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], ès qualités,

contre les sociétés Elco Holland BV, Elco Ltd et Dubag et de la communication complète des éléments relatifs à ces actions ;

Subsidiairement sur le fond :

- réformer le jugement en ce qu'il a retenu sa responsabilité et l'a condamné à prendre en charge 8 000 000 euros, et plus précisément :

* dire que la preuve du montant de l'insuffisance d'actif n'est pas rapportée,

* dire que l'existence de l'aggravation du passif n'est ni chiffrée ni caractérisée et ce pour aucune des sociétés,

* dire que la preuve d'une faute de gestion n'est pas rapportée et n'est pas caractérisée ;

En conséquence,

- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions formées par la SELARL ML Conseils prise en la personne de Me [Z], ès qualités, à son encontre ;

Subsidiairement, en cas de constatation de l'existence d'une faute de gestion par M. [A] :

- en application du principe de proportionnalité, de ses capacités contributives, de la situation économique de la société au jour de sa prise de fonction, du contexte social au jour de son arrivée (démission des dirigeants), de la nature des fautes éventuellement constatées, des actions qu'il a menées, renoncer à prononcer une condamnation pécuniaire à son encontre ;

Plus subsidiairement encore, en cas de condamnation :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que la garantie de la société AIG Europe Limited lui est acquise à hauteur de la somme totale de 4 000 000 euros ;

- réformer le jugement en ce qu'il a dit que les intérêts de retard commençaient à courir au 9 novembre 2016 et déclarer que les intérêts de retard ne peuvent courir qu'à compter du prononcé de la décision à intervenir ;

En tout état de cause :

- condamner la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], ès qualités, au paiement d'une indemnité de 15 000 euros en application de I'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions d'appelante et d'intimée déposées au greffe et notifiées par RPVA le 22 octobre 2018, la société AIG Europe Limited demande à la cour de :

- la déclarer recevable et fondée en ses appels principal, provoqué et incident ;

Y faisant droit,

- annuler et/ou réformer le jugement dont appel, en ce qu'il :

* l'a déboutée de sa demande de sursis à statuer,

* dit que M. [A] avait commis des fautes de gestion ayant contribué à l'augmentation de l'insuffisance d'actif des sociétés du groupe Airwell, et l'a condamnée à payer la somme totale de 8 000 000 euros, entre les mains de la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], ès qualités, pour être affectée à l'apurement du passif social des sociétés Airwell France SAS, ACE SAS, Airwell Industrie SAS et Wesper Industrie SAS en sus les intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2016,

* dit que sa garantie est acquise à M. [A] à hauteur de 1 000 000 euros pour chacune des quatre sociétés impliquées du groupe Airwell et l'a condamnée à le garantir à hauteur de la somme totale de 4 000 000 euros,

* ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article L.1343-2 du code civil,

* l'a déboutée du surplus de ses demandes,

* l'a condamnée solidairement avec M. [A] à payer à la SELARL ML Conseils, ès qualités, la somme de 40 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Statuant à nouveau,

In limine litis :

- prononcer l'annulation du jugement en ce qu'il n'a pas visé le rapport du juge-commissaire, lequel n'a pas fait de rapport oral à l'audience ;

- ordonner le sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive à rendre dans le cadre de l'action engagée par la SELARL ML Conseils prise en la personne de Me [Z], ès qualités, contre les sociétés Elco Holland Bv, Elco Ltd et Dubag et de la communication complète des éléments relatifs à cette action ;

Subsidiairement, sur la recevabilité et le mal fondé de l'action et des demandes adverses :

- déclarer irrecevable la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell Industrie France SAS et Wesper Industrie France SAS en son action engagée en sa qualité de liquidateur, représentant légal des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell Industrie France SAS et Wesper Industrie France SAS ;

- déclarer irrecevable la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell Industrie France SAS et Wesper Industrie France SAS en son action dirigée à son encontre en qualité d'assureur de la responsabilité de Monsieur [A] ;

Sur le fond,

- réformer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de M. [A] ;

- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions formées par la SELARL ML Conseils prise en la personne de Me [Z], ès qualités, contre M. [A] et elle-même ;

- réformer le jugement en ce qu'il a fait une fausse application du contrat d'assurance ;

- déclarer qu'elle ne peut être tenue au-delà de la prestation déterminée au contrat d'assurance qui est soumise à un plafond de garantie de 1 000 000 euros, sous déduction des indemnités d'un montant de 170 437,24 euros versées au titre des frais de défense exposés par M.[A] ;

- déclarer que les intérêts de retard ne peuvent courir qu'à compter du prononcé de la décision à intervenir ;

- déclarer que l'action engagée par la SELARL ML Conseils prise en la personne de Me [Z], ès qualités, à son encontre constitue une action abusive ;

Sur les frais irrépétibles et les dépens,

- condamner la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], ès qualités, à verser l'amende civile de 3 000 euros et à lui payer une somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- condamner la SELARL ML Conseils prise en la personne de Me [Z], ès qualités, aux entiers dépens de première instance et d'appel et dire que ceux d'appel pourront être recouvrés par Me Julie Gourion, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 10 octobre 2018, la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], en ses qualités de liquidateur judiciaire des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell industrie France SAS et Wesper industrie France SAS, demande à la cour de :

- dire que M. [A] et la société AIG Europe Limited sont irrecevables et mal fondés dans leur demande d'annulation du jugement, et en conséquence les en débouter ;

- les débouter de leur demande de sursis à statuer;

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

* débouté M. [A] et la société AIG Europe Limited de leur demande de sursis à statuer,

* jugé recevables ses demandes à leur encontre,

* dit que M. [A] a commis des fautes de gestion ayant contribué à l'augmentation de l'insuffisance d'actif des sociétés ACE SAS, Airwell Industrie SAS, Airwell France SAS et Wesper Industrie SAS,

* condamné M. [A] à lui payer les sommes suivantes, d'un montant total de 8 000 000 euros, soit 3 200 000 euros en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwell France SAS, 1 600 000 euros en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société ACE SAS, 1 600 000 euros en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwell Industrie SAS, 1 600 000 euros en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Wesper Industrie SAS, en sus les intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2016, avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article L.1343-2 (sic) du code civil, la première capitalisation intervenant le 9 novembre 2017 et les capitalisations ultérieures le 9 novembre de chaque année jusqu'à parfait paiement,

* débouté M. [A] et la société AIG Europe Limited du surplus de leurs demandes,

* condamné solidairement M. [A] et la société AIG Europe Limited à lui payer la somme de 40 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance ;

- réformer le jugement en ce qu'il a dit que la garantie de la société AIG Europe Limited est acquise à M. [A] à hauteur de 1 000 000 euros pour chacune des quatre sociétés impliquées du groupe Airwell et condamné la société AIG Europe Limited à le garantir à hauteur de la somme totale de 4 000 000 euros ;

Et, statuant à nouveau sur ce point,

- dire et juger que la société AIG Europe Limited sera débitrice in solidum avec M. [A] :

* à concurrence de 1 000 000 euros seulement de la condamnation de ce dernier à lui payer la somme de 3 200 000 euros en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwell France SAS,

* à concurrence de 1 000 000 euros seulement de la condamnation de ce dernier à lui payer la somme de 1 600 000 euros en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société ACE SAS,

* à concurrence de 1 000 000 euros seulement de la condamnation de ce dernier à lui payer la somme de 1 600 000 euros en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwell Industrie SAS,

* à concurrence de 1 000 000 euros seulement de la condamnation de ce dernier à lui payer la somme de 1 600 000 euros en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société WESPER Industrie SAS,

- débouter M. [A] et la société AIG Europe Limited de l'intégralité de leurs prétentions, y compris la demande de condamnation "pour procédure abusive";

- les condamner in solidum à lui payer au titre des frais irrépétibles d'appel la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour chacune des quatre sociétés ainsi qu'aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de Me Franck Lafon, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

Dans son avis communiqué par RPVA le 21 septembre 2018, le ministère public recommande l'infirmation du jugement déféré s'agissant de la société AIG Europe Limited et sa confirmation s'agissant de M. [A].

Concernant la première, il fait observer que seul le dirigeant de droit ou de fait d'une société peut faire l'objet d'une condamnation en comblement de passif, de sorte que le tribunal de commerce a fait une mauvaise application des dispositions de l'article L.651-2 du code de commerce.

S'agissant du second, il considère que les fautes d'inaction et de commission retenues sont constituées et par suite la condamnation justifiée.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 octobre 2018.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures signifiées conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

Aucun moyen n'étant susceptible d'être relevé d'office, il convient de déclarer les appels formés par M. [A] et la société AIG recevables.

1- Sur l'irrecevabilité tirée de la violation de l'article L.653-7 du code de commerce

M. [A] soutient que l'assignation a été délivrée par Me [Z] en sa qualité de liquidateur judiciaire des sociétés ACE, Airwell France, Airwell industrie France et Wesper industrie France, donc de représentant légal de ces sociétés, et non en sa qualité de liquidateur à titre personnel, en tant qu'organe de la procédure, alors qu'agissant sur le fondement de l'article L.652-2 du code de commerce, le liquidateur n'agit pas en sa qualité de liquidateur des sociétés mais au vu du pouvoir et du mandat de justice qui lui sont conférés en application de l'article L.651-3 dudit code, de sorte que lorsqu'il a intenté son action en sa qualité de liquidateur des différentes sociétés, il n'avait pas qualité à agir. Il précise que toute régularisation est désormais impossible puisque l'action est désormais prescrite et qu'il s'agit d'une fin de non recevoir qui peut être invoquée en tout état de cause.

La société AIG prétend que lorsqu'il engage une action aux fins de sanctions patrimoniales ou personnelles, le liquidateur n'agit pas ès qualités de liquidateur de la société débitrice représentant l'intérêt collectif des créanciers, mais en qualité de représentant de l'intérêt général ; or en l'espèce Me [Z] a engagé l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif à l'encontre de M. [A] en se prévalant de sa qualité de représentant légal des sociétés du groupe Airwell et non d'organe de la procédure exerçant sa profession de mandataire judiciaire, de sorte qu'il est irrecevable à agir. Elle précise que cette irrecevabilité tirée du défaut de droit d'agir constitue une fin de non-recevoir qui peut être soulevée en tout état de cause et qui est susceptible d'être relevée d'office par le juge et qu'il ne s'agit pas d'une prétention nouvelle au sens de l'article 910-4 du code de procédure civile, ou d'une demande nouvelle en appel au sens de l'article 564 du code de procédure civile, mais d'un moyen de défense au fond, qu'elle peut proposer en tout état de cause.

La SELARL ML Conseils réplique en premier lieu que la prétention relative à la qualité du liquidateur pour agir, sans fondement juridique clair, est irrecevable comme nouvelle au sens des articles 564 et 910-4 du code de procédure civile et en second lieu qu'elle est infondée dès lors que c'est le liquidateur ès qualités qui a engagé l'action.

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de qualité et de droit à agir.

L'article 123 du même code précisant que les fins de non recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, celles formées par M. [A] et la société AIG en cause d'appel sont recevables.

Selon les articles L.651-3 et L.653-7 du code de commerce, dans les cas prévus aux articles L.651-2, L.653-3 à L.653-6 et L.653-8, le tribunal est saisi par le mandataire judiciaire, le liquidateur ou le ministère public.

Les assignations délivrées à M. [A] et à la société AIG à comparaître devant le tribunal de commerce de Versailles, au visa des articles L.651-2 et suivants du code de commerce, l'ont été à la requête de Maître [H] [Z], mandataire judiciaire, né le [Date naissance 1] 1959 au [Localité 2], de nationalité française, domicilié [Adresse 3], en sa qualité de liquidateur des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell Industrie France SAS et Wesper Industrie France SAS, désigné à ces fonctions par le tribunal de commerce de Versailles le 15 juillet 2014.

Contrairement à ce qui est vainement soutenu il en résulte que les actions ont été engagées par le liquidateur judiciaire de chacune des sociétés, organe de la procédure collective régulièrement désigné, et non comme représentant légal de chacune d'entre elles, en sorte que le liquidateur avait qualité et droit à agir.

La fin de non recevoir sera donc écartée.

2- Sur l'irrecevabilité tirée du défaut de qualité à agir de maître [H] [Z]

M. [A] et la société AIG prétendent que Me [Z] ayant été remplacé par la SELARL ML Conseils en qualité de liquidateur judiciaire des sociétés du groupe Airwell par une ordonnance du président du tribunal de commerce de Versailles du 11 avril 2016, il n'avait plus par conséquent, à la date de l'assignation, qualité à agir, ce qui rend son action irrecevable.

La SELARL ML Conseils fait valoir que la fin de non-recevoir soulevée, de manière déloyale trois jours avant la clôture, au titre de la distinction entre Maître [Z] et la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Maître [Z], est irrecevable comme nouvelle, et erronée en droit dans la mesure où c'est la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], en qualité de liquidateur de chacune des sociétés, qui est mentionnée comme partie au jugement du tribunal de commerce et qui s'est constituée dans la présente procédure, en sorte que ni son action ni ses demandes ne sauraient être déclarées irrecevables.

Il est constant d'une part que par décision du 27 janvier 2016, la Commission nationale d'inscription et de discipline des mandataires judiciaires a inscrit sur la liste nationale des mandataires judiciaires, à effet du 1er avril 2016, la SELARL ML Conseils, dont maître [H] [Z], mandataire judiciaire, est le gérant et l'associé unique et, d'autre part, que par ordonnance rendue le 11 avril 2016, le président du tribunal de commerce de Versailles a ordonné le remplacement de ce dernier par la SELARL ML Conseils dans les mandats concernant les quatre sociétés du groupe Airwell.

Dès lors qu'un mandataire judiciaire exerçant au sein d'une société ne peut exercer sa profession qu'au sein de la société et non à titre individuel, Me [Z] a nécessairement agi au nom de la société dont il était membre. L'absence du nom de celle-ci dans l'assignation ne constitue donc qu'une irrégularité de forme, laquelle n'est pas sanctionnée par une irrecevabilité à agir pour défaut de qualité mais par une nullité de l'acte.

Outre qu'aucun grief en résultant n'est démontré, la nullité des actes de procédure est couverte, en application de l'article 112 du code de procédure civile, si celui qui l'invoque a, postérieurement à l'acte critiqué, fait valoir des défenses au fond ou opposé une fin de non recevoir sans soulever la nullité.

Tel est le cas en l'espèce, puisque cette nullité n'a pas été soulevée en première instance par les appelants mais seulement en cause d'appel dans les conclusions n°4 de M. [A] et les conclusions n°2 de la société AIG.

Le moyen sera donc rejeté.

3- Sur la nullité du jugement pour violation de l'article R.661-12 du code de commerce

M. [A] et la société AIG soutiennent que le jugement déféré encourt la nullité en ce qu'il ne mentionne pas le rapport du juge-commissaire, ce qui est d'ailleurs relevé dans l'ordonnance du Premier président de la cour d'appel de céans en date du 12 juin 2018 suspendant l'exécution provisoire attachée à cette décision. Ils ajoutent que le rapport versé à l'audience devant le tribunal ne satisfait pas aux exigences de l'article R. 662-12 du code de commerce, ce qui équivaut à une absence de rapport, que contrairement aux allégations de Me [Z], ès qualités, ce moyen de nullité a été soulevé in limine litis, tant dans la déclaration d'appel que dans les conclusions de la société AIG et qu'en tout état de cause, il s'agit d'une fin de non recevoir qui peut être soulevée à tout moment.

La SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], ès qualités, fait d'abord valoir que le moyen relatif à la nullité du jugement en ce qu'il ne vise pas le rapport du juge-commissaire est irrecevable car ni Monsieur [A] ni la société AIG Europe Limited ne l'ont soulevé in limine litis comme ils auraient dû le faire en application de l'article 74 du code de procédure civile. Elle ajoute qu'en tout état de cause une telle annulation n'aurait aucune conséquence pratique car la cour serait alors saisie du litige par l'effet dévolutif de l'appel, que l'objet de l'article R.662-12 du code de commerce n'est pas de sanctionner l'absence de mention du rapport du juge-commissaire dans le jugement et que l'existence de ce rapport n'étant pas contestée par les parties, la nullité du jugement n'est pas encourue, enfin que la nullité du rapport tirée de son caractère succinct n'ayant été demandée ni en première instance ni in limine litis n'est pas une prétention recevable.

Le rapport du juge-commissaire est une formalité substantielle dont l'absence emporte la nullité du jugement.

En disposant que le tribunal statue sur rapport du juge-commissaire sur tout ce qui concerne la sauvegarde, le redressement et la liquidation judiciaires, l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, la faillite personnelle ou l'interdiction prévue à l'article L. 653-8, l'article R.662-12 du code de commerce impose au juge-commissaire d'établir un exposé objectif, en fait et en droit, des éléments en sa possession susceptibles d'éclairer le tribunal sur les demandes dont il est saisi.

En l'espèce, bien que le jugement déféré ne porte pas mention d'un rapport oral ou écrit du juge-commissaire, il n'est pas contesté que ce dernier a rédigé un rapport daté du 20 septembre 2017, lequel a été porté à la connaissance des parties en première instance.

Cependant, ayant uniquement visé les rapports du liquidateur judiciaire sans faire état des éléments relatifs à la procédure et aux demandes, le juge-commissaire n'a pas établi un rapport conforme aux prescriptions légales, ce qui équivaut à une absence de rapport.

Le jugement doit, par conséquent, être annulé.

L'annulation du jugement n'étant pas prononcée en raison d'une irrégularité affectant la saisine du tribunal et le jugement annulé n'ayant ni ordonné une mesure d'instruction ni mis fin à l'instance après avoir statué sur une exception de procédure, la cour, saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, doit se prononcer sur le fond.

4- Sur les demandes de sursis à statuer

M. [A] soutient qu'il est pertinent que la cour sursoit à statuer dans l'attente de l'issue de l'action engagée par Me [Z] à l'encontre des sociétés Elco Holland Bv, Elco Limited et Dubag, en raison de l'existence d'un lien entre les deux instances qui tendent à la même indemnisation et qu'une condamnation de celles-ci aurait nécessairement une incidence sur le montant de l'insuffisance d'actif et les sommes susceptibles d'être mises à sa charge.

La société AIG considère également que l'issue de la procédure en responsabilité civile délictuelle engagée par Me [Z], ès qualités, à l'encontre des sociétés Elco Holland Bv, Elco Ltd et Dubag est de nature à influer sur la responsabilité alléguée de M. [A] et pourrait conduire à une double indemnisation. Elle demande également qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de la communication par l'intimée des pièces relatives à cette action qu'elle l'a sommée en vain de lui communiquer. Elle précise que le tribunal, qui n'a pas statué sur ce moyen, a violé les articles 6, 9 et 132 du code de procédure civile et les droits de la défense.

La SELARL ML Conseils, ès qualités, fait valoir que les demandes de sursis à statuer formées par la société AIG ne sont pas fondées car les deux actions sont engagées contre des défendeurs différents et sur des fondements juridiques distincts et qu'en outre la juridiction saisie d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif n'a pas à prendre en compte l'éventualité d'une condamnation contre un tiers qui aurait pour conséquence de diminuer le passif dès lors que l'insuffisance d'actif est certaine à concurrence au moins du montant de la condamnation prononcée. Précisant qu'elle n'a reçu aucune injonction de communiquer de la part du tribunal, elle ajoute que la société AIG n'indique pas en quoi les pièces dont elle sollicitait la communication auraient été utiles à l'examen de l'affaire.

Concernant la demande de monsieur [A], elle soutient qu'elle est irrecevable pour ne pas avoir été formulée in limine litis, et qui plus est mal fondée.

L'instance en responsabilité et en paiement engagée selon assignations délivrées les 30 septembre et 29 octobre 2015 par le liquidateur judiciaire des sociétés du groupe Airwell contre les anciens actionnaires de ces dernières, actuellement en cours devant la cour d'appel, diffère de la présente procédure par son objet, son fondement et les parties en cause et son issue ne peut avoir d'incidence sur les fautes reprochées personnellement à M. [A].

Pour les mêmes raisons, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente de la communication des pièces par le liquidateur judiciaire des 'écritures et pièces' échangées dans cette procédure, tel que demandé dans la sommation du 16 novembre 2017 que la société AIG a fait délivrer à maître [Z], ès qualités.

En outre, il n'est pas contesté que le passif des sociétés a été vérifié en sorte que la cour doit uniquement s'assurer que l'insuffisance d'actif est certaine à concurrence au moins du montant de la condamnation qui pourrait être prononcée.

Les demandes de sursis à statuer présentées par la société AIG seront donc rejetées.

La demande de sursis à statuer formée par M. [A] après qu'il ait soulevé des fins de non recevoir et sollicité l'annulation du jugement est irrecevable.

5- Sur l'insuffisance d'actif

M. [A] critique le défaut de motivation du tribunal quand au montant de l'insuffisance d'actif et à l'aggravation de celui-ci pour chacune des sociétés en lien avec les fautes reprochées dont la preuve n'est pas rapportée par la SELARL ML Conseils, ès qualités. Il expose que pour l'insuffisance d'actif les comptes doivent être arrêtés au jour de l'ouverture de la procédure collective, que le liquidateur judiciaire a pris en compte des créances postérieures alors que seules les créances antérieures et les créances hors dettes intragroupes sont pertinentes, que l'insuffisance d'actif a été ramenée à 38 513 914,52 euros au lieu de 94 000 000 euros, que le liquidateur judiciaire ne produit pas les comptes 2013 et 2014 permettant de déduire quoique ce soit de la gestion du dirigeant sur cette période ; que le liquidateur judiciaire, qui a sollicité une expertise devant le tribunal de commerce de Versailles dans l'affaire l'opposant aux sociétés Dubag et Elco, pour déterminer l'aggravation de l'insuffisance d'actif entre le 31 juillet 2012 et le 1er avril 2014 et entre le 11 juin 2013 et le 1er avril 2014, ne prouve pas l'existence d'une aggravation du passif durant son mandat.

La société AIG prétend également que Me [Z], ès qualités, ne caractérise pas, société par société, le quantum du passif qui serait apparu sous la gestion de monsieur [A].

La SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], ès qualités, fait valoir que l'insuffisance d'actif de chacune des sociétés est établi et a été calculé en ne prenant en compte que le passif antérieur à l'ouverture de la procédure collective et définitivement admis, qu'il s'élève à 19 897 420,45 euros pour la société ACE SAS, 38 995 682,94 euros pour la société Airwell France SAS, 17 435 800,30 euros pour la société Airwell Industrie France SAS, et 17 826 080,15 euros pour la société Wesper Industrie France SAS, soit un montant total de plus de 94 millions d'euros dès lors qu'il n'y a pas lieu d'exclure les dettes intra-groupe.

L'insuffisance d'actif est égale à la différence entre le montant du passif antérieur admis définitivement et le montant de l'actif réalisé de la personne morale débitrice. Elle s'apprécie à la date à laquelle le juge statue.

L'insuffisance d'actif d'une société qui peut être mise à la charge d'un dirigeant s'apprécie au regard de son actif et de son passif propres sans référence aux comptes consolidés du groupe et sans qu'il y ait lieu d'en exclure les dettes intra-groupe.

En revanche, en l'absence de production des déclarations de créance du CGEA, il convient de déduire du passif retenu par le liquidateur judiciaire les sommes dues au titre du super privilège des salaires, qui peuvent être nées postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective, en sorte qu'au vu des pièces produites (compte-rendus de fin de mission de l'administrateur judiciaire du 29 août 2016, synthèse du passif L.622-24, liste des créances déclarées L.622-24) l'insuffisance d'actif s'élève désormais pour chacune des sociétés à la somme de :

*SAS ACE : 19 673 578,95 euros (26 093 540,50 - 223 841,50 - 6 196 120,05),

*SAS Airwell France : 38 340 273,95 euros (43 972 148,18 - 655 408,99 - 4 976 465,24),

*SAS Airwell Industrie France : 16 284 210,31 euros (19 973 572,87 - 1 151 589,99 - 2 537 772,57),

*SAS Wesper Industrie France : 16 643 110 euros (19 828 305,97 - 1 182 969,39 - 2 002 225,82).

6- Sur la direction des sociétés

Aux termes de l'article L.651-1 du code de commerce, les dispositions relatives à la responsabilité pour insuffisance d'actif s'appliquent aux dirigeants d'une personne morale de droit privé soumise à une procédure collective.

Il est établi et non contesté que le 8 juillet 2013 Monsieur [A] a été nommé dirigeant de la SAS ACE et de ses filiales et qu'il l'est resté jusqu'à l'ouverture des procédures de liquidation judiciaire.

Les procès-verbaux d'assemblée générale de démission datés du 26 août 2014, invoqués dans ses écritures, ne sont pas produits.

7- Sur les fautes de gestion

Monsieur [A] rappelle qu'il incombe à la demanderesse de rapporter la preuve des fautes de gestion qui lui sont reprochées et ce pour chacune des sociétés ainsi que leur contribution à l'augmentation du passif et fait valoir que le tribunal de commerce a renversé la charge de la preuve en exigeant qu'il démontre la réalité des prestations facturées par les sociétés de conseil et s'est contredit en retenant au titre des fautes de gestion tout à la fois une activité non fautive et une passivité.

A titre subsidiaire, il soutient que l'ajout dans l'article L.651-2 du code de commerce relatif à la négligence du dirigeant lui est applicable et conteste avoir, par son inaction, poursuivi abusivement une activité déficitaire considérant que lors de sa prise de fonction il était trop tard pour faire procéder à un audit des comptes, que l'absence de recapitalisation immédiate du groupe ne lui est pas imputable et que la preuve n'est pas rapportée qu'il n'en a pas fait la demande auprès des actionnaires, qu'il n'est pas plus prouvé que l'absence de mise en place immédiate d'une sauvegarde aurait contribué à l'aggravation du passif, que contrairement à ce qui est prétendu il a fait son possible pour mettre en oeuvre des mesures de restructuration du groupe, notamment des tentatives de cession des sociétés Wesper et Airwell deutschland Gmbh pour lesquelles il a notamment missionné la société Callista private equity Gmbh, dont la preuve n'est pas rapportée qu'elles auraient été 'douteuses' et des projets de fusion des sociétés pour opérer des économies administratives. Il liste ainsi diverses mesures qu'il affirme avoir initiées. Il ajoute que la conclusion de contrats de prestations de service, respectant les règles de gouvernance, n'est pas plus fautive dès lors d'une part que n'ayant jamais été salarié d'aucune des sociétés du groupe Airwell, il a facturé des honoraires rémunérant ses prestations à travers la société Gramax AG dont il est actionnaire et, d'autre part, qu'il est normal de s'entourer de conseils dans la recherche de solutions.

La société AIG prétend que les motifs du jugement se contredisent en ce que le tribunal a reproché à M. [A] tout à la fois d'être resté inactif et d'avoir mandaté des sociétés de conseil et qu'il a renversé la charge de la preuve. Reprenant les arguments de Monsieur [A], il soutient qu'aucune faute n'est démontrée à l'encontre de ce dernier qui a pris des mesures sans que l'absence de résultat de celles-ci ne puisse lui être reprochée, et que l'existence d'un lien de causalité entre les fautes alléguées et l'insuffisance d'actif n'est pas établi.

La SELARL ML Conseils, ès qualités, réplique au contraire que chacune des fautes de gestion retenues par le tribunal est caractérisée et que l'objectif de Monsieur [A] était en réalité d'appréhender, avant le dépôt de bilan, une partie de la trésorerie et les derniers actifs du groupe, au profit notamment de sa propre société de conseil, se plaçant ainsi en situation de conflit d'intérêts avérée. Elle explique qu'il a poursuivi abusivement pendant neuf mois l'activité déficitaire des sociétés, dont la situation était irrémédiablement compromise, en masquant la gravité de la situation aux commissaires aux comptes et au comité d'entreprise tout en engageant des frais de conseil dont il faisait bénéficier des sociétés dans lesquelles lui-même ou ses co-actionnaires étaient intéressés. Elle prétend que ce faisant Monsieur [A] a commis une grave faute de gestion par omission. Elle lui reproche également de ne pas avoir sollicité l'ouverture de procédures de sauvegarde à un moment où les sociétés disposaient encore d'importantes liquidités, de ne pas avoir pris des mesures de restructuration efficaces, de ne pas avoir fait auditer les comptes ce qui aurait permis de mettre à jour la situation réelle des sociétés et de ne pas avoir tenté d'obtenir des actionnaires qu'ils procèdent à l'augmentation de capital annoncée et, bien que non retenu par le tribunal de commerce, d'avoir tenté de céder des actifs en contradiction avec l'intérêt social des sociétés concernées, cette dernière faute ayant également contribué à l'insuffisance d'actif.

Elle considère que la brièveté de la période écoulée entre la prise de fonction de Monsieur [A] le 8 juillet 2013, la désignation d'un mandataire ad hoc, et l'ouverture de la procédure collective, le 1er avril 2014 n'est pas de nature à l'exonérer de sa responsabilité.

Elle conclut que les fautes, qui sont caractérisées pour chacune des quatre sociétés, ont contribué à l'insuffisance d'actif.

L'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 9 décembre 2016 applicable immédiatement aux procédures collectives et aux instances en responsabilité en cours, dispose notamment que lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée.

Chaque faute de gestion doit être appréciée au regard de chacune des sociétés et non du groupe.

Néanmoins, l'interdépendance des sociétés, qui résulte de la structure même du groupe et de l'activité de chacune des quatre sociétés, n'est pas contestée.

* Sur la poursuite abusive d'une activité déficitaire

Les comptes annuels de la société ACE communiqués pour l'exercice clos au 31 décembre 2012 montrent que les capitaux propres qui étaient de 31 932 931 euros au 31 décembre 2011 avaient diminué à 11 879 158 euros au 31 décembre 2012, que les pertes étaient de 12 130 248 euros au 31 décembre 2011 pour un chiffre d'affaires net de 9 423 126 euros et de 21 197 478 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d'affaires de 9 141 057 euros.

D'après les soldes intermédiaires de gestion au 31 décembre 2013, joints au bilan économique dressé par l'administrateur judiciaire le 25 avril 2014, le chiffre d'affaires n'était plus à cette date que de 5 993 295 euros pour un résultat déficitaire de 10 173 644 euros. Ce dernier a relevé que 'aucune mesure significative ne semble avoir été prise...Il semble que les principales mesures prises pour réduire la perte de trésorerie aient été une diminution des délais de règlement des clients, voire le recours accru à l'affacturage, et une augmentation des délais de règlement des fournisseurs...Les nouveaux actionnaires d'ACE depuis mi-2013 n'ont apporté aucune solution aux difficultés du groupe. Ils ont poursuivi une activité déficitaire sans prendre de mesures de restructuration.'

Les comptes annuels de la société Airwell industrie France communiqués pour l'exercice clos au 31 décembre 2012 montrent que les capitaux propres qui étaient de 15 543 861 euros au 31 décembre 2011 avaient diminué à 10 308 607 euros au 31 décembre 2012, que les pertes étaient de 4 579 836 euros au 31 décembre 2011 pour un chiffre d'affaires net de 25 999 417 euros et de 5 217 170 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d'affaires de 23 685 726 euros.

D'après les soldes intermédiaires de gestion au 31 décembre 2013, joints au bilan économique dressé par l'administrateur judiciaire le 25 avril 2014, le chiffre d'affaires n'était plus que de 19 781 155 euros pour un résultat déficitaire de 320 560 euros. L'administrateur judiciaire a noté que 'la perte d'exploitation s'élève donc à plus de 5,4 Meuros chaque année sur les deux derniers exercices, pour atteindre 16 Meuros sur cinq ans.[...]Les dettes ne sont plus du tout proportionnelles au niveau d'activité ; elles passent de 3 à 7 fois le chiffre d'affaires moyen mensuel, le délai de règlement des fournisseurs étant plus que doublé pour atteindre 152 jours au 31/12/2013".

Les comptes annuels de la société Airwell France communiqués pour l'exercice clos au 31 décembre 2012 montrent que les capitaux propres qui étaient de 2 690 229 euros au 31 décembre 2011 sont devenus négatifs à hauteur de 4 975 489 euros au 31 décembre 2012, que les pertes étaient de 2 309 773 euros au 31 décembre 2011 pour un chiffre d'affaires net de 135 672 751 euros et de 7 665 718 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d'affaires en baisse de 85 154 557 euros.

D'après les soldes intermédiaires de gestion au 31 décembre 2013, joints au bilan économique dressé par l'administrateur judiciaire le 25 avril 2014, le chiffre d'affaires n'était plus à cette date que de 47 579 216 euros pour un résultat pourtant bénéficiaire de 972 910 euros. L'observation relative aux dettes et au délai de règlement des fournisseurs est sensiblement la même que pour les sociétés précédentes.

Les comptes annuels de la société Wesper industrie France communiqués pour l'exercice clos au 31 décembre 2012 montrent que les capitaux propres qui étaient de 1 923 467 euros au 31 décembre 2011 sont devenus négatifs à hauteur de 532 349 euros au 31 décembre 2012, que les bénéfices qui étaient de 835 782 euros au 31 décembre 2011 pour un chiffre d'affaires net de 12 495 657 euros sont devenus des pertes de 2 440 575 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d'affaires de 12 915 523 euros.

D'après les soldes intermédiaires de gestion au 31 décembre 2013, joints au bilan économique dressé par l'administrateur judiciaire le 25 avril 2014, le chiffre d'affaires n'était plus que de 7 036 612 euros et les pertes avaient augmenté à 3 392 724 euros. Ce dernier a relevé que 'la perte d'exploitation s'élève donc à presque 3Meuros par an sur les trois derniers exercices, pour atteindre 11 Meuros sur cinq ans.[...] Déjà élevées, les dettes fin 2013 ne sont plus du tout proportionnelles au niveau d'activité ; elles passent de 2-3 à 6 fois le chiffre d'affaires moyen mensuel, le délai de règlement des fournisseurs étant plus que doublé pour atteindre 176 jours au 31/12/2013".

Il est également constant que par lettre recommandée avec avis de réception en date du 26 novembre 2013, le cabinet Ernst et Young, commissaire aux comptes de chacune des sociétés, a engagé une procédure d'alerte en sollicitant les explications de M. [A] sur les faits qu'il avait relevé susceptibles de compromettre la continuité d'exploitation de celles-ci. Selon courrier en date du 20 décembre 2013, il a informé le dirigeant que les réponses apportées n'étaient pas de nature à permettre la continuité de l'exploitation et a relevé : un écart important entre la position de trésorerie du groupe telle que reprise par le dirigeant dans sa présentation du 5 décembre 2013 (Financial Forecast 2014 - 7,9 millions d'euros) et celle qu'il avait lui-même observée dans le suivi hebdomadaire préparé en interne (entre 3,5 et 4 millions d'euros) ; des prévisions de revenus en progression en contradiction avec les tendances des années précédentes ; des éléments positifs liés à des opérations envisagées mais non finalisées et l'absence de prise en compte pour le groupe de l'effet négatif en trésorerie, de l'ordre de 2 millions d'euros, concernant la cession envisagée de l'usine de la société Wesper industrie. La procédure d'alerte a ainsi été poursuivie après l'assemblée générale du 23 janvier 2014.

Il résulte en outre du rapport dressé le 28 mars 2014 par la société d'expertise comptable Secafi, à la demande de la Délégation unique du personnel (DUP) des sociétés du groupe Airwell, que la trésorerie disponible pour les sociétés françaises étaient de 7 800 000 euros au 18 juin 2013 et de 2 000 000 euros au 20 février 2014, outre 2 400 000 euros de créances échues, démontrant ainsi une forte dégradation. Il en ressort également que la cession envisagée de la société Airwell deutschland est contraire à l'intérêt social des sociétés Ace et Airwell France

Le bilan économique de l'administrateur judiciaire pour la société Ace rappelle également que le mandataire ad hoc a dû mettre en garde le dirigeant contre les projets de cession d'une part de la filiale Airwell deutschland à sa société mère AC Beitilegungun Gmbh, sans le moindre apport financier, et d'autre part de la société Wesper industrie France à un prix négatif de 1,6 Meuros que la société ACE n'avait pas les moyens de payer et à une société récemment créée à l'Île Maurice et dont les actionnaires étaient les consultants allemands mandatés pour trouver un acquéreur.

En outre, le reproche fait par le liquidateur judiciaire et repris par le tribunal selon lequel M. [A] aurait dû solliciter une procédure de sauvegarde est justifié par le mandataire ad hoc qui souligne dans son rapport que cette 'solution aurait pu être envisagée il y a plusieurs mois'.

Il se déduit de ces éléments qu'entre sa nomination et l'ouverture des procédures collectives, M. [A] a poursuivi abusivement, pour chacune des sociétés, une activité déficitaire sans que cette faute ne puisse être assimilée à une simple négligence au regard des chiffres repris ci-dessus et des procès-verbaux des assemblées générales extraordinaires, tenues le 23 janvier 2014 pour chacune des sociétés qui concluent que 'M. Monsieur [J] [A],[et pour ACE SAS, Monsieur [U]], en sa qualité de représentant de l'associée unique [...] se déclare parfaitement informé des difficultés rencontrées par la Société, mais estime que les mesures proposées sont de nature à envisager le redressement de la Société avec confiance'. Elle a nécessairement contribué à l'insuffisance d'actif et diminué le gage des créanciers pour chacune des quatre sociétés, sans augmentation corrélative de l'actif.

Ni les mesures envisagées ni la désignation d'un mandataire comme en l'espèce n'exonèrent le dirigeant de ses fautes dès lors que les premières, qui n'ont pour l'essentiel pas été prises ou n'ont abouti qu'à rallonger les délais de paiement, étaient à tout le moins très 'risquées' et que la seconde ne le privait pas de l'exercice de ses pouvoirs ni ne le dispensait de ses obligations alors au demeurant que celle-ci n'est intervenue que le 6 mars 2014, soit tardivement, et alors que M. [A], nommé depuis plusieurs mois, ne pouvait ignorer la baisse de chiffre d'affaires et l'augmentation des pertes communes aux quatre sociétés. Dans le rapport dressé le 28 mars 2014, le mandataire ad'hoc relève 'Il ressort de ces éléments que, probablement sans être en état de cessation des paiements, le groupe connaît une situation de trésorerie particulièrement tendue puisque sa trésorerie disponible augmentée de ses créances clients (+/- 16Meuros) ne couvre qu'à hauteur de 66% ses dettes à court terme (24Meuros). L'appréciation d'un éventuel état de cessation des paiements supposerait de vérifier la part des dettes fournisseurs qui aurait dépassé le délai de règlement contractuel. Dès le début de sa mission, l'exposant a insisté auprès de ses interlocuteurs sur la fragilité des solutions qu'ils projetaient et sur les risques qu'ils faisaient courir, d'une part aux mandataires sociaux qui les mettraient en oeuvre, d'autre part aux sociétés concernées, tant cédées que cédantes'.

La faute de gestion est donc caractérisée pour les sociétés ACE, Airwell France, Airwell industrie France, Wesper industrie France.

* Sur l'utilisation de la trésorerie des sociétés

Il est établi que par actes sous seing privé en date des :

- 22 novembre 2013, la société ACE a régularisé un contrat de prestations de service aux fins notamment de recherches 'd'investisseurs potentiels' et 'd'organisation de la vente structurée de filiales et/ou d'actifs' avec la société Callista management Gmbh, société de droit allemand, moyennant des tarifs journaliers de 1 200 euros à 2 400 euros selon la qualité du consultant outre des primes de succès et les frais (déplacements, hôtel 4 étoiles). Le rapport du mandataire ad'hoc précise que deux mois plus tard, cette mission débouchait sur une offre d'acquisition émanant d'une société Turnaround capital partners, constituée à l'Île Maurice, par les associés du cabinet Callista management, postérieurement à la formulation de cette offre, et que ce cabinet aurait facturé, conjointement avec les avocats de la société, la somme de 328 000 euros.

- 17 juin 2013, 9 juillet 2013 et 27 novembre 2013, la société ACE a conclu deux contrats de 'consulting' et un amendement avec la société Gramax AG, présidée par M. [J] [A], afin d'être assistée 'dans le domaine de l'optimisation de l'efficacité organisationnelle et afin d'identifier les mesures permettant d'augmenter la valeur de l'entreprise', moyennant un prix de 900 euros puis de 1 450 euros par jour, frais de transport en sus, porté aux termes de l'amendement à 31 900 euros par mois, hors frais, payable d'avance pour vingt-deux jours de travail ouvrés, sans obligation de résultat quantifiable. L'amendement précise 'Au delà de ces vingt-deux jours, chaque journée supplémentaire de travail sera facturée 1 450 euros. Dans l'éventualité où le consultant travaillerait moins de vingt jours par mois, aucune compensation n'est prévue sur la rémunération du mois suivant',

- 9 juillet 2013, 12 et 25 août 2013, 11 et 27 novembre 2013, la société ACE a conclu un contrat de 'consulting', suivi de quatre amendements, avec la société The Gap Consultants AG (devenue Gramax Capital AG), dirigée par M. [G] [U], afin d'être assistée notamment 'dans le domaine de l'optimisation de l'efficacité organisationnelle et afin d'identifier les mesures permettant d'augmenter la valeur de l'entreprise' et 'dans le domaine de l'optimisation des chaînes d'approvisionnement, de la réduction des coûts et de l'optimisation des stocks', moyennant un prix de 900 euros et 800 € par jour, frais de transport en sus, porté aux termes des amendements à 19 800 euros et 17 600 par mois, puis à 26 400 euros pour le premier, hors frais, payable d'avance pour vingt-deux jours de travail ouvrés, sans obligation de résultat quantifiable. L'amendement précise 'Au delà de ces vingt-deux jours, chaque journée de supplémentaire de travail sera facturée 900 euros. Dans l'éventualité où le consultant travaillerait moins de vingt jours par mois, aucune compensation n'est prévue sur la rémunération du mois suivant',

- 1er juillet 2013, la société ACE a régularisé un contrat de prestations de service avec la société [O] consulting afin de 'fournir à Airwell les services de gestion et de conseil suivants : assistance dans le repositionnement et la réorganisation d'Airwell, y compris de toutes les filiales,[...]négociations avec l'ancien actionnaire, Elco', moyennant une rémunération mensuelle de 50 000 euros, hors taxes et hors frais,

- 11 juin 2013, la société ACE a conclu un contrat de consulting avec la société [O] [O] Unternehmensberatung afin d'être assistée notamment 'dans le domaine de l'optimisation de l'efficacité organisationnelle et afin d'identifier les mesures permettant d'augmenter la valeur de l'entreprise' moyennant une rémunération de 900 euros par jour, hors frais,

- 1er septembre 2013, la société ACE a régularisé un contrat de prestations de service avec la société LLS Management & consulting Gmbh afin d'être assistée dans la 'vente des outils de contrôle financiers appropriés, tels que : Assistance dans la réorganisation et la restructuration du client et de toutes ses filiales, [...], préparation d'un plan de restructuration,[...] recherches de fusions et acquisitions...', moyennant une rémunération de 2 000 euros par jour, hors frais.

Le rapport Secafi relève que 'la trésorerie disponible en juin 2013 était de 7,8 Meuros en France et 0,6 Meuros en Allemagne alors qu'en février 2014 cette trésorerie n'était plus que de 2Meuros en France avec 2,4 Meuros de créances échues [...]Des honoraires significatifs de consultants au bénéfice des actionnaires ont été versés, pour 853 keuros entre juillet 2013 et janvier 2014. D'autre part, des honoraires ont aussi été versés à des conseils pour 328 keuros sur la même période (Callista private equity, Heiss Kursawe Eversheds, Zschunke Ulrich Avocats), ainsi que près de 188 keuros de frais de déplacement et divers sur 2013".

Il est établi par l'extrait du site internet Gramax capital AG que cette société a été créée en 2011 par MM. [J] [A] et [G] [U], que les sociétés [O] consulting et [O] [O] Unternehmensberatung ont pour actionnaire et dirigeant M. [O] [O], tous trois actionnaires directement ou à travers leur société de la société AC Beteiligungen Gmbh, laquelle détenait entièrement la SAS ACE.

Compte tenu du nombre des conventions susvisées, la production d'une facture émise par la société LLS, à hauteur de 44 000 euros pour vingt-deux jours de travail, et de quelques mails ou lettres est très insuffisante à rapporter la preuve qui incombe au dirigeant, dès lors que le liquidateur judiciaire ne peut pas rapporter une preuve négative, de l'existence de réelles prestations dont l'intérêt au demeurant pour les sociétés liquidées n'est pas avéré.

Il est ainsi établi que M. [A] a utilisé la trésorerie des sociétés ACE et de ses filiales qu'il dirigeait pour favoriser d'autres sociétés dans lesquelles lui-même ou ses associés étaient intéressés au détriment des premières. Le nombre de conventions et les rémunérations fixées démontrent à l'évidence qu'il ne peut s'agir d'une négligence.

Le grief est donc caractérisé. Il a contribué à l'insuffisance d'actif en ce qu'à l'ouverture du redressement judiciaire, les trésoreries étaient asséchées au point d'être absorbées en totalité par le paiement des salaires du mois de mars 2014.

* Sur l'absence de recapitalisation

Le 13 décembre 2013, la DUP des sociétés ACE et Airwell France a saisi le Cabinet Ernst et Young, commissaire aux comptes, de ses inquiétudes face à la situation de ACE SAS et de ses trois filiales, à la chute du chiffre d'affaires, à l'absence de garantie quant aux actions engagées, à la crédibilité des données sur la situation de trésorerie et sur les pertes du groupe. A cette lettre était jointe la présentation faite par la direction de la société le 5 décembre 2013, laquelle indique notamment que 'les actionnaires vont en outre s'engager à une injection de liquidités d'un montant maximal de 5 millions d'euros'. Cette information a également été renouvelée dans la réponse apportée le 11 décembre 2013 à la DUP en suite de la réunion du 5 décembre 2013, en sorte que M. [A] ne peut prétendre qu'il s'agit d'un engagement antérieur à sa prise de fonction.

Si la reconstitution des capitaux propres appartient aux actionnaires et non au dirigeant, il appartient en revanche à ce dernier de tirer les conséquences d'un défaut de reconstitution. En l'espèce, M. [A], dirigeant et actionnaire des sociétés via la société AC Beteiligungen Gmbh, ne démontre pas, alors que la charge de la preuve lui appartient, qu'il a convoqué des assemblées générales à cette fin ou tenté de recouvrer les investissements annoncés alors que ceux-ci étaient nécessaires à la survie des sociétés, ce faisant il a commis une faute de gestion. Sa responsabilité est donc également engagée à ce titre, sans que cette abstention ne puisse être là encore qualifiée de négligence.

Elle a nécessairement contribué à l'insuffisance d'actif de la société Ace, holding, mais également de ses filiales qui devaient être financées grâce à cet apport.

* Sur les tentatives de cessions non conformes à l'intérêt social des sociétés

Les rapports du commissaire aux comptes, de l'administrateur judiciaire et du cabinet Secafi démontrent de façon concordante que les cessions d'une part de la société Wesper industrie France à la société Turnaround capital partners pour un prix négatif, d'autre part de la société Airwell Deutschland à la société AC Beteiligungen étaient contraires à l'intérêt social des sociétés liquidées.

Outre que ces opérations projetées, en violation pour la première des dispositions de l'article 1596 du code civil qui interdit aux mandataires d'acheter les biens qu'ils sont chargés de vendre, interrogent sur les objectifs réellement poursuivis par M. [A], il est certain qu'elles ont prolongé de plusieurs semaines voire mois la poursuite de l'activité déficitaire de la holding et de ses filiales et par conséquent contribué à l'insuffisance d'actif de celles-ci.

Le grief est donc caractérisé nonobstant l'absence de réalisation effective des cessions, étant précisé que la cour n'a pas à déterminer la part de l'insuffisance d'actif imputable à chacune des fautes de gestion.

8- Sur les sanctions

Monsieur [A] soutient que quand bien même ces prétendues fautes de gestion seraient avérées, la sanction prononcée à son encontre est disproportionnée au regard de la situation des sociétés au jour de son entrée en fonction, des fautes constatées et de ses capacités contributives.

Il ajoute que du fait de la nullité du jugement, la capitalisation des intérêts à compter du 9 novembre 2016 ne peut s'appliquer, de sorte que ceux-ci ne peuvent courir qu'à compter du prononcé de la décision à intervenir.

La société AIG fait valoir que le tribunal n'a pas respecté le principe de proportionnalité de la sanction en ce qu'il a condamné le dirigeant dans des proportions injustifiées et démesurées au regard de ses facultés contributives et que les intérêts ne pouvaient courir que du jugement et non de l'assignation.

La SELARL ML Conseils, ès qualités, rappelle que pour calculer le quantum de la condamnation le juge dispose d'un pouvoir d'appréciation en fonction notamment de la gravité des fautes commises. Elle considère que la condamnation est justifiée car le tribunal de commerce a tenu compte de la brièveté des fonctions de dirigeant de Monsieur [A] pour le condamner à une somme représentant moins de 10% de l'insuffisance d'actif totale. Soutenant que les intérêts ont un caractère compensatoire, il prétend que leur point de départ doit être fixé au 9 novembre 2016.

Le nombre de fautes retenues à l'encontre de M. [A] ainsi que leur contribution à l'insuffisance d'actif justifient sa condamnation à supporter une partie de l'insuffisance d'actif de chacune des quatre sociétés, étant observé que le principe de proportionnalité ne porte pas sur la proportionnalité de la condamnation au montant du patrimoine du dirigeant mais au nombre de fautes, à leur gravité et au montant de l'insuffisance d'actif qu'elles ont contribué à créer.

M. [A] est âgé de 50 ans ; il a un enfant à charge. Il produit deux avis d'imposition suisses pour 2015 et 2016, lesquels mentionnent notamment qu'il est employé par la société Gramax capital AG, dont il détient des titres, qu'il a des revenus professionnels annuels de 113 960 francs suisses, des revenus mobiliers à hauteur de 100 000 francs suisses et des biens imposables en Suisse d'une valeur dettes déduites de 481 360 francs suisses pour la première année, puis de 150 056 francs suisses et 1 franc suisse ainsi que des biens imposables en Suisse d'une valeur dettes déduites de 436 250 francs suisses pour la seconde.

Outre qu'il n'a pas actualisé sa situation, ces éléments sont insuffisants à déterminer la consistance complète de son patrimoine.

Compte tenu de la durée des mandats exercées par M. [A], du caractère déficitaire ancien des activités des sociétés du groupe Airwell et du fait que le groupe a connu plusieurs dirigeants entre 2007 et 2014, il convient de condamner M. [A] à supporter une partie de l'insuffisance d'actif à hauteur de 1 600 000 euros pour chacune des SAS ACE, Airwell industrie France et Wesper industrie France et de 3 200 000 euros pour la SAS Airwell France.

En application de l'article 1231-7 du code civil les intérêts sont dus à compter de la présente décision, le jugement ayant été annulé.

9- Sur l'action en garantie

M. [A] sollicite, à supposer que la cour d'appel soit bien compétente pour traiter dans la même instance de la question de l'interprétation de la clause d'assurance dans le contrat le liant à la société AIG, la confirmation du jugement en ce qu'il considéré que la garantie de l'assureur lui était acquise à hauteur de 4 000 000 euros.

La société AIG soutient que le jugement a omis de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée tirée de l'irrecevabilité de l'action dirigée contre elle. Au soutien de celle-ci, elle explique, en premier lieu, que l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif ne peut être dirigée que contre un dirigeant de droit ou de fait, de sorte que le liquidateur agissant dans le cadre de l'action spécifique de l'article L.651-2 du code de commerce ne peut ni appeler l'assureur en garantie ni exercer d'action directe contre lui, et que le dirigeant assigné à ce titre ne peut appeler un tiers en garantie, par suite que Me [Z], ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés du groupe Airwell, est dépourvu de droit d'agir à son encontre dans le cadre de l'action spécifique de l'article L.651-2 du code de commerce ; en deuxième lieu, que l'action directe de l'article L.124-3 du code des assurances ne permet pas de déroger à la liste limitative des personnes pouvant faire l'objet d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif, que les principes dégagés par la jurisprudence du Tribunal des conflits et par la Cour de cassation, fondés sur le caractére distinct de l'action en responsabilité contre l'assuré et de l'action directe du tiers victime contre l'assureur, sont transposables, de sorte que Me [Z], ès qualités, est irrecevable à solliciter la condamnation in solidum de la concluante avec Monsieur [A] ; en troisième lieu, que lorsqu'il exerce l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, le liquidateur judiciaire agit dans le cadre de sa fonction de représentant de la société débitrice et exerce les droits et actions du patrimoine de cette dernière, laquelle est à la fois victime du dirigeant (tiers lésé) et souscripteur du contrat d'assurance, de sorte qu'il ne peut, en tant que représentant de la société, exercer d'action directe à l'encontre de l'assureur ; en quatrième et dernier lieu que l'action du liquidateur contre l'assureur est contraire à la finalité de l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, qui a un caractère 'sanctionnateur' avant d'être réparateur.

Subsidiairement et sur le fond, elle expose que le jugement a fait une fausse application du contrat d'assurance et violé l'article II des conditions particulières du contrat relatif au plafond de la garantie, qui fixe un double plafond par période d'assurance - 5 000 000 euros - et pour un certain type de sinistre - en l'espèce les frais de défense et conséquences pécuniaires mis à la charge d'un dirigeant dans le cadre d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif- dans la limite de 1 000 000 euros. Elle en déduit qu'au sens de la police d'assurance, le litige, bien que concernant l'insuffisance d'actif de plusieurs sociétés en liquidation d'un même groupe, constitue une action unique, exercée à l'encontre d'un même dirigeant et qu'elle ne peut donc être tenue au-delà d'un montant de 1 000 000 euros. Elle ajoute que le juge de première instance a violé les stipulations relatives à l'épuisement de la garantie en ne tenant pas compte des indemnités déjà versées au titre de la prise en charge des frais de défense de son assuré, et qu'elle est en droit d'opposer au tiers lésé.

La SELARL ML Conseils, ès qualités, répond d'une part que l'action, qui n'est pas un appel en garantie mais une action directe consacrée à l'article L.124-3 du code des assurances, est recevable car elle puise sa source dans le contrat d'assurance dont la couverture s'étend aux actions en responsabilité pour insuffisance d'actif, et n'est pas fondée, à l'égard de l'assureur, sur l'article L.651-2 du code de commerce ; d'autre part qu'elle agit dans le cadre des actions en responsabilité pour insuffisance d'actif en qualité de représentant de l'intérêt collectif des créanciers des sociétés, et non pour le compte des sociétés elles-mêmes, et doit dès lors être considérée comme un tiers aux dites sociétés.

Sur le fond, il rappelle que le contrat d'assurance prévoit un plafond de garantie de 1 000 000 euros par action en responsabilité pour insuffisance d'actif, et par période d'assurance, dans la limite d'un plafond global de 5 000 000 euros par période d'assurance et qu'il a initié quatre actions en responsabilité pour insuffisance d'actif pour chacune des sociétés, peu important à cet égard, que le dirigeant de chaque société se trouve être la même personne physique et que les quatre actions aient été jointes en une même instance. Elle ajoute qu'en application de l'article L.124-3 alinéa 2 du code de commerce les sommes qui devraient, selon l'assureur, être déduites du montant de sa condamnation au titre des frais de défense sont insusceptibles de venir grever les sommes pouvant revenir au liquidateur au titre de son action directe, de sorte qu'il convient de condamner la société AIG, assureur, in solidum avec M. [A], son assuré, à la somme totale de 4 000 000 euros.

Contrairement à ce qui est vainement soutenu par la société AIG, il est clair à la lecture de l'assignation qui lui a été délivrée et des écritures de la SELARL ML Conseils, que cette dernière agit, ès qualités de liquidateur judiciaire de chacune des sociétés, représentant de l'intérêt collectif des créanciers aux fins de réparation du préjudice subi par ceux-ci et non pour le compte de celles-ci, à l'encontre de l'assureur ni sur le fondement de l'article L.651-2 du code de commerce, ce dernier n'étant pas un dirigeant, ni dans le cadre d'un appel en garantie, cette voie étant fermée tant au dirigeant qu'au liquidateur, mais dans le cadre de l'action directe formée par le tiers lésé.

Ainsi l'article L.124-3 du code des assurances prévoit que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable. L'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré.

Cette action suppose seulement que le tiers lésé établisse l'existence du contrat d'assurance souscrit et la responsabilité de l'assuré. Par ailleurs aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au liquidateur judiciaire d'agir dans le cadre d'une action distincte de celle exercée contre le dirigeant sur le fondement de l'article L.651-2 du code de commerce.

L'action directe de la SELARL ML Conseils, ès qualités, est par conséquent recevable.

L'existence de la police n°7.917.883 'Responsabilité des dirigeants' souscrite à effet du 29 août 2013 par la SAS ACE auprès de la société AIG pour ses dirigeants 'passé, présent ou futur' mais également pour tout dirigeant 'passé, présent ou futur' de chacune de ses filiales, n'est pas contestée.

Aux termes de l'article II des conditions particulières de celle-ci, le plafond de garantie est fixé à 5 000 000 euros par période d'assurance, 'Ce plafond est sous-limité à 1 000 000 euros par période d'assurance pour les frais de défense, et/ou les conséquences pécuniaires engagés ou mis à la charge d'un dirigeant de la société souscriptrice dans le cadre d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif, y compris tout ou partie des dettes de la société souscriptrice mise à la charge de l'assuré'.

Contrairement là encore à ce qui est allégué par l'assureur, le liquidateur, ès qualités, n'a pas engagé une action en responsabilité pour insuffisance d'actif mais quatre actions distinctes à l'égard de la société ACE et de trois de ses filiales, peu important à cet égard qu'elle les ait regroupées en une seule instance. En outre M. [A] ayant commis des fautes de gestion pour chacune des quatre sociétés qu'il dirigeait, comme démontré ci-dessus, il y a bien quatre sinistres résultant que faits dommageables distincts.

La société AIG est donc tenue au titre du contrat d'une obligation en paiement de 1 000 000 euros pour chacun de ces quatre sinistres.

L'article 6.1 relatif au plafond des garanties précise d'une part que le montant des garanties s'appliquant aux frais de défense n'est pas sous-limité et fait partie intégrante du plafond des garanties fixé au II des conditions particulières et d'autre part que ce plafond s'épuise par tous règlements faits au titre du présent contrat et/ou de ses extensions selon l'ordre chronologique de leur exigibilité.

En outre, l'article 8 de la police d'assurance stipule notamment que l'assureur avance avant l'issue définitive de la réclamation et dans la limite du montant des garanties disponibles, les frais de défense selon les modalités d'une convention préalable établie entre l'assureur et la société souscriptrice ou les assurés ainsi que les frais annexes.

L'article L.113-5 du code des assurances, invoqué par la société AIG, dispose que lors de la réalisation du risque ou à l'échéance du contrat, l'assureur doit exécuter dans le délai convenu la prestation déterminée par le contrat et ne peut être tenu au-delà.

Il s'en déduit que c'est au moment de la réalisation du risque que l'assureur doit payer l'indemnité dont il est tenu en vertu du contrat, la décision judiciaire condamnant l'assuré à raison de sa responsabilité constituant pour l'assureur qui a garanti cette responsabilité, dans ses rapports avec la victime, la réalisation du risque, tant dans son principe que dans son étendue. Il convient de relever, toutefois, que le paiement allégué d'une avance par la société AIG envers son assuré, en exécution de son obligation de garantie, ne peut être libératoire envers la SELARL ML Conseils, ès qualités, au regard du droit de créance direct dont elle est investie contre cet assureur. Ce dernier ne peut donc pas lui opposer l'épuisement partiel de la garantie au motif qu'il aurait avancé des frais de défense, dont le paiement au surplus n'est pas établi par les seuls mails produits, en l'absence de production de la convention mentionnée à l'article 8 et de justificatifs de paiement.

Dès lors que c'est demandé, l'assureur doit être tenu in solidum avec l'assuré dans les limites de la somme garantie par le contrat.

Il convient, par conséquent, de condamner la société AIG dans les termes du dispositif ci-après.

10- Sur les autres demandes

La société AIG fait valoir que Maître [Z], ès-qualités, doit être condamné pour procédure abusive car il n'a pas rapporté la preuve de la triple condition relative à l'engagement de la responsabilité de Monsieur [A], il n'est pas animé par la volonté de sanctionner les fautes de gestion ayant contribué à la prétendue insuffisance d'actif des sociétés du groupe Airwell, et ne s'est pas expliqué sur son choix procédural de ne pas agir contre les anciens dirigeants du groupe. Elle ajoute qu'il a également méconnu volontairement et gravement les limites de son engagement ce qui est constitutif d'un abus de droit.

La SELARL ML Conseils, ès qualités, conteste tout abus.

Au regard du succès des prétentions de l'intimée, la société AIG qui succombe sera déboutée de ce chef et condamnée in solidum avec M. [J] [A] au paiement d'une indemnité procédurale.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition,

Déclare recevables les appels formés par M. [J] [A] et la société AIG Europe limited ;

Rejette les fins de non recevoir soulevées par M. [J] [A] et la société AIG Europe limited ;

Annule le jugement déféré ;

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevable la demande de sursis à statuer formée par monsieur [A] ;

Rejette les demandes de sursis à statuer formées par la société AIG Europe limited ;

Déclare recevable l'action directe exercée par la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], en ses qualités de liquidateur judiciaire des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell industrie France SAS et Wesper industrie France SAS à l'encontre de la société AIG Europe limited ;

Condamne in solidum M. [J] [A], né le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 3] (RFA), domicilié à [Adresse 4], et la société AIG Europe limited, dans la limite de la somme globale de 4 000 000 € pour cette dernière, à payer à la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], en ses qualités de liquidateur judiciaire des sociétés ACE SAS, Airwell industrie France SAS et Wesper industrie France SAS la somme de 1 600 000 euros pour chacune des trois premières et celle de 3 200 000 euros pour la SAS Airwell France avec intérêts à compter de la présente décision ;

Condamne in solidum M. [J] [A] et la société AIG Europe limited à payer à la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me [Z], en ses qualités de liquidateur judiciaire des sociétés ACE SAS, Airwell industrie France SAS et Wesper industrie France SAS et Airwell France SAS la somme de 6 000 euros pour chacune des sociétés, soit la somme globale de 24 000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [J] [A] et la société AIG Europe limited aux dépens de première instance et d'appel ;

Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 18/02460
Date de la décision : 15/01/2019
Sens de l'arrêt : Annulation

Références :

Cour d'appel de Versailles 13, arrêt n°18/02460 : Annule la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-15;18.02460 ?
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