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15/01/2019 | FRANCE | N°18/01831

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 15 janvier 2019, 18/01831


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 53H



13e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 15 JANVIER 2019



N° RG 18/01831 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SIAK



AFFAIRE :





SAS DANONE PRODUITS FRAIS FRANCE



SA DANONE



C/



Société INTERNATIONAL SPORT SUPPLEMENT COMPANY LIMITED



SAS INTELEASE





Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 09 Mai 2014 par le Tribunal de Commerce de

NANTERRE

N° Chambre : 3

N° Section :

N° RG : 2013F01378





Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 15/01/2019



à :



Me Catherine X...,



Me Laurent Y...,



TC NANTERRE,



C.CASS,





REPUBLIQUE FRANCAISE


...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53H

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 JANVIER 2019

N° RG 18/01831 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SIAK

AFFAIRE :

SAS DANONE PRODUITS FRAIS FRANCE

SA DANONE

C/

Société INTERNATIONAL SPORT SUPPLEMENT COMPANY LIMITED

SAS INTELEASE

Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 09 Mai 2014 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 3

N° Section :

N° RG : 2013F01378

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 15/01/2019

à :

Me Catherine X...,

Me Laurent Y...,

TC NANTERRE,

C.CASS,

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE QUINZE JANVIER DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre:

DEMANDERESSES devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation du 17 janvier 2018 cassant et annulant partiellement l'arrêt rendu par la cour d'appel de Céans le 26 mai 2016

- SAS DANONE PRODUITS FRAIS FRANCE

prise en la personne de son représentant légal, domicilié [...]

- SA DANONE

prise en la personne de son représentant légal, domicilié [...]

Représentées par Maître Catherine X..., avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 391, et par Maître Jean-christophe Z..., avocat plaidant au barreau de PARIS, vestiaire : A0410

****************

DEFENDERESSES DEVANT LA COUR DE RENVOI

Société INTERNATIONAL SPORT SUPPLEMENT COMPANY LIMITED

venant aux droits de la société INTELEASE suite à une transmission universelle du patrimoine

[...], Covent Garden LONDON United Kingdom

WC 2B 5 AH - LONDON ROYAUME UNI

Représentée par Maître Laurent Y..., avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 155, et par Maître A... B... C... de la SELEURL SELARL SKILLS, avocat plaidant au barreau de PARIS

SAS INTELEASE

agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié [...]

- Défaillante

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Novembre 2018, Madame Delphine BONNET, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de:

Madame Sophie D..., Présidente,

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Nathalie MULOT ;

La société Intelease, anciennement dénommée Allianthis, a conclu les 16 mai 2006 et 23 juillet 2007 avec la société Danone, anciennement dénommée Groupe Danone, deux contrats de location de matériels vidéo respectivement pour des durées de seize et douze trimestres et des loyers trimestriels de 6 849,40 euros HT (contrat n°1) et 1 240,90 euros HT (contrat n°2).

Elle a également conclu les 16 mai 2006 et 3 juillet 2006 deux contrats de location de matériels vidéo avec la société Danone produits frais France, anciennement dénommée société Danone France, pour une durée pour chacun d'eux de seize trimestres et des loyers trimestriels respectifs de 7 658,33 euros HT (contrat n°3) et 950,15 euros HT (contrat n°4).

Par courriers des 3 mai 2010, 10 mai 2010 et 20 janvier 2011, les sociétés Danone ont informé la société de location de la non-reconduction de ces contrats. La société de location a pris acte de ces résiliations et rappelé aux sociétés locataires l'obligation de restituer le matériel loué ; les sociétés Danone ont alors indiqué se trouver dans l'impossibilité de restituer les matériels loués soit parce que certains ne pouvaient plus être démontés, soit parce que d'autres étaient devenus obsolètes, détruits, recyclés ou jetés.

La société de location a transmis aux sociétés Danone des propositions de rachat des matériels loués. Des pourparlers se sont alors engagés lesquels n'ont pas abouti.

C'est dans ces conditions que la société Intelease a assigné les sociétés Danone et Danone produits frais France en paiement d'indemnités de jouissance et de dommages-intérêts.

Par un jugement contradictoire du 9 mai 2014, le tribunal de commerce de Nanterre a :

- condamné la société Danone à payer à la société Intelease les sommes de :

- 27 579,76 euros TTC au titre des indemnités de jouissance afférentes aux contrats de location en cours (contrats n° 1 et 2) échues au 31 décembre 2011, augmentée du taux d'intérêt légal majoré de cinq points, et ce de la mise en demeure du 06 octobre 2011 à la date du présent exploit (sic),

- 32 815,36 euros TTC au titre des indemnités de jouissance afférentes au contrat de location en cours (contrat n° 1), à échoir du 1er janvier 2012 jusqu'à la date du présent exploit (sic), majorée des intérêts contractuels courant sur la même période,

- 5 936,48 euros TTC au titre des indemnités de jouissance afférentes au contrat de location en cours (contrat n°2), à échoir du 1er janvier 2012 jusqu'à la date du présent exploit (sic), majorée des intérêts contractuels courant sur la même période,

- condamné la société Danone produits frais France à payer à la société Intelease les sommes de:

- 28 614,46 euros TTC au titre des indemnités de jouissance afférentes aux contrats de location en cours (contrats n° 3 et 4), échues au 31 octobre 2011, augmentée du taux d'intérêt légal majoré de cinq points, à compter de la mise en demeure du 6 octobre 2011,

- 36 637,44 euros TTC au titre des indemnités de jouissance afférentes au contrat de location en cours (contrat n°3), à échoir du 1er novembre 2011 jusqu'à la date du présent exploit (sic), majorée des intérêts contractuels courant sur la même période,

- 4 545,52 euros TTC au titre des indemnités de jouissance afférentes au contrat de location en cours (contrat n°4), à échoir du 1er novembre 2011 jusqu'à la date du présent exploit (sic), majorée des intérêts contractuels courant sur la même période,

- donné acte à la société Intelease de ce qu'elle s'engageait à l'avenir à n'engager aucune nouvelle procédure concernant les contrats en cours sur les mêmes fondements,

- débouté la société Intelease de sa demande de condamnation au titre de la perte de marge,

- condamner solidairement les sociétés Danone et Danone produits frais France à payer à la société Intelease la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Les sociétés Danone et Danone produits frais France ont interjeté appel de cette décision le 30 juin 2014.

Par arrêt contradictoire du 26 mai 2016, la cour d'appel a :

- confirmé la décision en ce qu'elle a débouté la société Intelease de sa demande relative à des dommages et intérêts pour perte de marge,

- infirmé pour le surplus,

et statuant à nouveau,

- condamné la société Danone à payer à la société Intelesase la somme de 3 600 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts à compter du jugement,

- condamné la société Danone produits frais France à payer à la société Intelesase la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts à compter du jugement,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné les sociétés Danone et Danone produits frais France aux dépens et accordé aux avocats de la cause pouvant y prétendre le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Statuant sur le pourvoi formé par la société Interlease, par arrêt du 17 janvier 2018, la Cour de cassation, au visa de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, a cassé et annulé cet arrêt mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande en paiement des indemnités contractuelles de jouissance du matériel loué de la société Intelease et limité la condamnation des sociétés Danone et Danone produits frais France à lui payer, respectivement, les sommes de 3 600 euros et 4 000 euros et renvoyé la cause et les parties devant la cour de céans, autrement composée.

La Cour de cassation, après avoir relevé que la cour d'appel, pour rejeter la demande en paiement d'indemnités contractuelles de jouissance de la société Intelease et condamner les sociétés Danone à lui payer des dommages-intérêts, a retenu que les articles 11 des contrats étaient inapplicables puisque la société Intelease avait renoncé à obtenir leur restitution forcée et que l'indemnisation ne pouvait dès lors qu'être fixée en application de l'article 1142 du code civil, a dit que 'en statuant ainsi, alors que les articles 11 des contrats litigieux stipulaient un droit à indemnité en cas de non-restitution immédiate et de son propre chef du matériel au bailleur par le locataire à l'expiration du contrat, sans le subordonner à d'autres conditions, et qu'elle avait constaté que tel avait été le cas des sociétés Danone, qui n'y avaient pas procédé après que la société lntelease, qui n'avait pas renoncé à cette indemnité, leur eut demandé de restituer les matériels loués, la cour d'appel a violé le texte susvisé'.

Par déclaration du 20 mars 2018, les sociétés Danone et Danone produits frais France ont régularisé la saisine de la cour après cassation.

Le 5 avril 2018 la société de droit britannique International sport supplement company limited a notifié par RPVA son intervention aux droits de la société Intelease à la suite de la transmission universelle du patrimoine de cette dernière à son profit.

Dans leurs dernières conclusions, déposées au greffe et notifiées par RPVA le 7 septembre 2018, les sociétés Danone et Danone produits frais France demandent à la cour de :

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- condamné la société Danone à payer à la société Intelease les sommes de :

- 27 579,76 euros TTC au titre des indemnités de jouissance afférentes aux contrats de location en cours (contrats n° 1 et 2), échues au 31 décembre 2011, augmentée du taux d'intérêt légal majoré de cinq points en application de l'article 2 desdits contrats, et ce de la mise en demeure du 6 octobre 2011 à la date du présent exploit,

- 32 815,36 euros TTC au titre des indemnités de jouissance afférentes au contrat de location en cours (contrat n°1), à échoir du 1er janvier 2012 jusqu'à la date du présent exploit, majorée des intérêts contractuels ci-dessus courant sur la même période,

- 5 936,48 euros TTC au titre des indemnités de jouissance afférentes au contrat de location en cours (contrat n°2), à échoir du 1er janvier 2012 jusqu'à la date du présent exploit, majorée des intérêts contractuels ci-dessus courant sur la même période,

- condamné la société Danone produits frais France à payer à la société Intelease les sommes de :

- 28 614,46 euros TTC au titre des indemnités de jouissance afférentes aux contrats de location en cours (contrats n° 3 et 4), échues au 31 octobre 2011, augmentée du taux d'intérêts légal majoré de cinq points en application de l'article 2 desdits contrats, et ce de la mise en demeure du 06 octobre 2011 à la date du présent exploit,

- 36 637,44 euros TTC au titre des indemnités de jouissance afférentes au contrat de location en cours (contrat n°3), à échoir du 1er novembre 2011 jusqu'à la date du présent exploit, majorée des intérêts contractuels ci-dessus courant sur la même période,

- 4 545,52 euros TTC au titre des indemnités de jouissance afférentes au contrat de location en cours (contrat n°4), à échoir du 1er novembre 2011 jusqu'à la date du présent exploit, majorée des intérêts contractuels ci-dessus courant sur la même période,

- condamné solidairement les sociétés Danone et Danone produits frais France à payer à la société Intelease la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné solidairement les sociétés Danone et Danone produits frais France aux entiers dépens,

et statuant à nouveau,

- débouter la société International sport supplement company limited de toutes ses demandes à l'encontre de la société Danone au titre du contrat de location AK-J-0086 du 23 juillet 2007,

- dire irrecevables les demandes nouvelles de condamnation au paiement d'indemnités de jouissance sur la période du 11 mars 2013 au 31 décembre 2017 présentées pour la première fois devant la cour d'appel de renvoi par la société International sport supplement company limited à leur encontre,

- fixer à 3 600 euros, le montant des indemnités de jouissance dues par la société Danone à la société International sport supplement company limited en exécution de l'article 11 des conditions générales de location, au titre du contrat AK-D-0092 du 16 mai 2006,

- fixer à 4 000 euros le montant des indemnités de jouissance dues par la société Danone produits frais France à la International sport supplement company limited en exécution de l'article 11 des conditions générales de location, au titre des contrats de location AK-D 0079 du 16 mars 2006 et AL-J-0095 du 3 juillet 2006,

- débouter la société International sport supplement company limited de toutes ses demandes plus amples ou contraires,

- la condamner à verser à chacune des sociétés Danone et Danone produits frais France la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans ses dernières conclusions, déposées au greffe et notifiées par RPVA le 3 septembre 2018, la société International sport supplement company limited, venant aux droits de la société Intelease, demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ses chefs de condamnation des sociétés Danone et Danone produits frais France,

y ajoutant,

- condamner la société Danone à lui payer la somme de 250 402,81 euros TTC,

- condamner la société Danone produits frais France à lui payer la somme de 265 416,48 euros TTC,

- débouter les sociétés Danone et Danone produits frais France de toutes leurs demandes,

- condamner in solidum les sociétés Danone et Danone produits frais France à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au paiement de tous dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 octobre 2018.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures signifiées conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

Sur le contrat du 23 juillet 2007, les sociétés Danone soutiennent qu'un accord est intervenu entre les parties pour le rachat par la société Danone des matériels loués au titre de ce contrat pour un prix de 2 968,23 euros TTC, que la société Allianthis a transmis sa facture pour le rachat des matériels en date du 26 juillet 2011, que cette facture a été réglée, que ce contrat est donc soldé en sorte que la société intimée n'est pas fondée à réclamer le paiement d'une indemnité pour non restitution des matériels dont elle a cédé la propriété à la société Danone.

Ensuite, les sociétés Danone soutiennent que la société Intelease a renoncé à toute demande en paiement d'indemnités de jouissance pour la période postérieure à la délivrance de son assignation en première instance, ce qui résulte du 'donner acte' à la société Intelease figurant dans le dispositif du jugement, que devant la cour elle a sollicité la confirmation pure et simple de ce jugement notamment en ce qu'il limitait l'indemnisation susceptible d'être réclamée à la seule période séparant les termes des contrats à la date de délivrance de l'assignation. Elles estiment que la demande de condamnation au paiement des indemnités de jouissance pour la période du 1er avril 2013 au 31 décembre 2017 sont irrecevables d'une part parce que la société Intelease y a expressément renoncé devant le tribunal puis devant la cour et d'autre part parce qu'il s'agit de demandes nouvelles irrecevables en application de l'article 564 du code de procédure civile, soulignant que ces demandes ne peuvent être considérées comme virtuellement comprises dans les demandes soumises aux premiers juges puisqu'elles n'en sont ni l'accessoire, ni la conséquence, ni le complément, faute d'avoir été présentées en première instance puis devant la cour.

Puis, s'agissant des demandes au titre des trois autres contrats, les sociétés Danone demandent que l'indemnisation allouée à la société Intelease soit limitée, sur le fondement de l'article 1152 alinéa 2 du code civil, faisant valoir que l'article 11 des conditions générales de location constitue une clause pénale qui est manifestement excessive au motif que, s'agissant de matériels utilisés de façon intensive, dont techniquement la durée de vie est très brève et l'obsolescence très rapide, le préjudice subi par la société Intelease du fait de la non restitution se limite à la valeur vénale résiduelle des matériels en sorte que l'indemnisation qui pourrait être due à la société Intelease ne saurait dépasser la somme de 7 600 euros HT fixée par la société d'expertises Galtier.

La société de location, après avoir rappelé que les parties sont replacées dans l'état du jugement de première instance sur la seule question du montant des indemnités contractuellement dues, soutient qu'est hors débat, dont les limites ont été fixées par l'arrêt de cassation, toute argumentation relative à la prétendue impossibilité de restituer le matériel et à la qualification de clause pénale de l'indemnité de jouissance. Elle prétend que l'argumentation selon laquelle l'indemnité de jouissance constituerait une clause pénale pouvant être réduite par le juge d'une part se heurte à l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la Cour de cassation dans la mesure où il a été jugé que l'article 11 des conditions générales du contrat trouve à s'appliquer conformément à l'article 1134 du code civil et d'autre part constitue une argumentation nouvelle qui ne peut être présentée devant la cour de renvoi.

Ensuite, elle fait valoir en premier lieu que l'actualisation d'une créance n'est pas une demande nouvelle, en deuxième lieu qu'elle n'a pas renoncé à l'actualisation de sa créance au titre des indemnités échues postérieurement au jugement frappé d'appel, en troisième lieu que l'arrêt de cassation vise l'ensemble des contrat de location sans exclure le contrat AK-J-0086 étant précisé qu'aucune cession des matériels au titre de ce contrat n'est intervenue dès lors que la vente était subordonnée à l'exécution par la société Danone de l'ensemble de ses obligations contractuelles, ce qui n'a pas été le cas.

L'article 11 des conditions générales de location stipule que dès la fin de location le locataire devra restituer au bailleur le matériel en parfait état d'entretien et de fonctionnement. Si le locataire ne restitue pas immédiatement et de son propre chef le matériel au bailleur à l'expiration du contrat il est redevable d'une indemnité égale aux loyers jusqu'à la restitution effective du matériel.

Dès lors que l'arrêt de la cour d'appel a été cassé en ce qu'il rejette la demande en paiement des indemnités contractuelles de jouissance du matériel loué de la société Intelease et limite la condamnation des sociétés Danone à lui payer les sommes de 3 600 euros et 4 000 euros, la cassation vise l'ensemble des contrats litigieux et remet les parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt cassé.

* sur la demande formée au titre du contrat n° AK-J-0086 du 23 juillet 2007

Les premiers juges avaient fait droit à la demande de la société Intelease au titre du contrat n° 2 (AK-J-0086) du 23 juillet 2007 en condamnant la société Danone au paiement des indemnités de jouissance échues et à échoir jusqu'à la date de l'assignation.

Les sociétés Danone justifient par la production d'un échange de mails, de la proposition d'achat de la société de location et de la commande de la société Danone, qu'à l'expiration de ce contrat de location, un accord est intervenu entre les parties pour le rachat par la société Danone des matériels loués au titre de ce contrat pour un montant de 2 968,23 euros.

Si effectivement la cession des matériels portés par ce contrat était subordonnée à l'exécution par la société Danone de l'ensemble de ses obligations contractuelles, celles-ci ne concernaient que le contrat n° AK-J-0086 puisque seules les références de ce contrat figurent sur la proposition d'achat émise par la société Allianthis le 30 juin 2011comportant la mention 'sous réserve du respect de l'ensemble de vos obligations contractuelles'. Au demeurant, la société Allianthis a transmis sa facture pour le rachat du matériel au titre du contrat n° AK-J-0086 en date du 25 juillet 2011 d'un montant de 2 968,23 euros TTC que la société Danone justifie avoir réglée en sorte que la société intimée ne peut sérieusement soutenir qu'il n'y a pas eu cession au motif que la société Danone n'a pas rempli ses obligations contractuelles au titre du contrat n° AK-D-00922. Dès lors qu'il y a bien eu cession des matériels objets du contrat de location, la société de location, qui n'est plus propriétaire des biens loués, ne peut réclamer à la société Danone le paiement d'indemnités de jouissance afférentes à ce contrat.

* sur les demandes formées au titre des trois autres contrats

L'arrêt a été cassé au motif que la cour d'appel a écarté l'application de l'article 11 des conditions générales de location. Contrairement à ce que soutient la société intimée, les termes de cet arrêt de cassation n'interdisent nullement aux sociétés Danone de soutenir que l'article 11 constitue une clause pénale et de demander la limitation de l'indemnisation de la société de location en application de l'article 1152 du code civil dans sa version applicable au présent litige.

L'indemnité de jouissance prévue par le contrat représente pour le bailleur une contrepartie du service dont le locataire continue de bénéficier après le terme de la location en conservant les matériels loués ; cette indemnité vise également à contraindre le locataire à restituer le matériel loué et constitue une évaluation forfaitaire et anticipée du montant du préjudice résultant de l'inexécution de l'obligation de restitution et qui s'applique du seul fait de celle-ci. Elle remplit donc une fonction tant comminatoire que réparatrice et doit dès lors être qualifiée de clause pénale.

Il en est de même des stipulations selon lesquelles les indemnités de jouissance sont elles-mêmes majorées d'intérêts conventionnels de 1 % par mois ou d'intérêt au taux légal majoré de 5 points suivant les contrats.

Ces indemnités peuvent donc donner lieu à modération dans les conditions de l'ancien article 1152 du code civil.

Les contrats de location financière qui sont proposés comme en l'espèce pour des biens d'équipement professionnels à forte obsolescence et qui ont vocation à être renouvelés régulièrement, sont établis en fonction d'une valeur d'achat et d'un taux d'intérêt, de manière à ce qu'au dernier loyer contractuel, capital et intérêts soient entièrement remboursés, permettant au loueur d'amortir ainsi le coût du financement du matériel acquis et de percevoir son gain sur la durée initiale de la location.

Les sociétés Danone ont exécuté les contrats de location en payant les loyers convenus pendant la durée de chacun des contrats et la société Intelease a donc perçu la totalité des loyers qu'elle était en droit d'attendre.

Dès lors, au vu de l'équilibre économique général de ces contrats, des modalités financières qui les gouvernent, des conditions dans lesquelles les contrats ont été exécutés jusqu'à leur terme normal, de la nature des équipements financés à forte obsolescence dont la valeur décroît très rapidement, l'indemnité forfaitaire stipulée aux contrats, égale au montant du loyer auquel s'ajoutent les intérêts moratoires conventionnels, jusqu'à la restitution effective du matériel, est manifestement excessive au regard du préjudice effectivement subi par la société Intelease du fait de la non restitution de ses matériels et de la privation de jouissance qui en résulte pour elle.

Les matériels, qui certes n'avaient plus beaucoup de valeur en fin de contrat, n'ont pas été restitués et ne le seront pas du fait des sociétés Danone ; c'est au jour où la cour statue qu'elle apprécie le caractère manifestement excessif de la peine prévue aux contrats qui ont pris fin entre avril 2011 et octobre 2011 soit depuis plus de sept ans.

Ainsi, usant de son pouvoir de modération, la cour fixera les indemnités de jouissance dues par chacune des sociétés appelantes à la société intimée en considération du préjudice effectivement subi par la société Intelease du fait de la non restitution de ces équipements devenus obsolètes à un montant, définitivement arrêté, équivalent à une année de loyers pour chacun des contrats.

En conséquence, la cour infirmera les condamnations prononcées par les premiers juges et statuant à nouveau, déboutera la société intimée de ses demandes au titre du contrat n° 2 et condamnera la société Danone à payer la somme de 27 400 euros pour le contrat n° 1 (référencé 2203DAG01) et la société Danone produits frais France pour le contrat n°3 (référencé 2203DAF01) à payer la somme 30 600 euros et pour le contrat n° 4 (référencé AL-G-0095) la somme de 3 800 euros, la société Intelease étant déboutée du surplus de ses demandes, sans qu'il soit nécessaire de répondre aux moyens relatifs à l'actualisation des demandes de la société intimée devant la cour de renvoi.

Succombant partiellement en leur recours, les sociétés Danone seront condamnées aux dépens d'appel et garderont à leur charge les frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées. Il sera fait droit à la demande de la société intimée formée au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 9 mai 2014 en ce qui concerne le montant des condamnations prononcées à l'encontre des sociétés Danone et Danone produits frais France en faveur de la société Intelease,

Statuant de nouveau de ces chefs :

Déboute la société International sport supplement company limited, venant aux droits de la société Intelease, de ses demandes formées au titre du contrat n° 2,

Condamne la société Danone à payer à la société International sport supplement company limited, venant aux droits de la société Intelease, la somme de 27 400 euros au titre du contrat n° 1,

Condamne la société Danone produits frais France à payer à la société International sport supplement company limited, venant aux droits de la société Intelease, les sommes de 30 600 euros au titre du contrat n° 3 et de 3 800 euros au titre du contrat n° 4,

Confirme le jugement en ce qui concerne les dépens et les frais irrépétibles,

y ajoutant,

Déboute la société International sport supplement company limited, venant aux droits de la société Intelease, de ses autres demandes,

Condamne in solidum la société Danone et la société Danone produits frais France aux dépens de la procédure d'appel,

Condamne in solidum la société Danone et la société Danone produits frais France à payer à la société International sport supplement company limited la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sophie D..., Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 18/01831
Date de la décision : 15/01/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 13, arrêt n°18/01831 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-15;18.01831 ?
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