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14/12/2018 | FRANCE | N°17/02208

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 14 décembre 2018, 17/02208


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 28A



1ère chambre

1ère section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 14 DECEMBRE 2018



N° RG 17/02208





AFFAIRE :



[I] [C] épouse [U]

C/

[K] [C] épouse [X]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Novembre 2016 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

POLE FAMILLE

N° Section : 3

N° RG : 13/14331



Expéditions exécu

toires

Expéditions

délivrées le :

à :

Me Bénédicte FLECHELLES-DELAFOSSE



SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES



Me [J] [I], notaire



















REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE QUATORZE DECEMBRE DEUX MILLE DIX HUIT,
...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 28A

1ère chambre

1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 14 DECEMBRE 2018

N° RG 17/02208

AFFAIRE :

[I] [C] épouse [U]

C/

[K] [C] épouse [X]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Novembre 2016 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

POLE FAMILLE

N° Section : 3

N° RG : 13/14331

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

Me Bénédicte FLECHELLES-DELAFOSSE

SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES

Me [J] [I], notaire

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE QUATORZE DECEMBRE DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant après prorogation les 16 novembre et 07 décembre 2018 les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :

Madame [I] [C] épouse [U]

née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Bénédicte FLECHELLES-DELAFOSSE, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 428 - N° du dossier 17-121 - Représentant : Me [I] [U], Plaidant, avocat au barreau de STRASBOURG

APPELANTE

****************

Madame [K] [C] épouse [X]

née le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1757933 - Représentant : Me Daniel FAUQUET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Septembre 2018, Madame Anne LELIEVRE, conseiller, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Alain PALAU, président,

Madame Anne LELIEVRE, conseiller,

Madame Nathalie LAUER, conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE

Vu le jugement rendu le 17 novembre 2016 par le tribunal de grande instance de Nanterre qui a :

- débouté Mme [I] [C] épouse [U] de toutes ses demandes,

- rejeté la demande reconventionnelle de Mme [K] [C] épouse [X] en dommages-intérêts pour abus de droit,

- rejeté toute autre demande des parties,

- condamné Mme [I] [C] épouse [U] à régler à Mme [K] [C] épouse [X] la somme de 3 000 euros au titre de ses frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [I] [C] épouse [U] aux dépens ;

Vu l'appel relevé le 17 mars 2017 par Mme [I] [C] qui, dans ses dernières conclusions notifiées le 6 juin 2018 demande à la cour de :

Vu les articles 815, 815-9, 815-10, 815-11, 816, 829, 840, 841, 883, 890, 891 1154 et 1686 du code civil,

- infirmer le jugement entrepris sur le tout sauf en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de Mme [K] [C] de dommages et intérêts pour abus de droit,

- dire que la cession de droits indivis du 26 décembre 2011 par laquelle Mme [K] [C], intimée, a acquis l'intégralité des droits indivis de sa s'ur Bénédicte et de son frère [C] dans l'immeuble n°1 est définitive,

- constater consécutivement que Mmes [K] et [I] [C] sont seules propriétaires indivises de l'immeuble n°1 à savoir le lot n°7 dépendant de l'ensemble immobilier situé au [Adresse 2],

- ordonner le partage de cette indivision spécifique,

- fixer la date de jouissance divise à la date du partage à intervenir,

- fixer la valeur de ce bien immobilier à 1 353 400 euros pour l'appartement et 80 000 euros pour la chambre de bonne, à défaut désigner un expert avec pour mission d'estimer ledit bien immobilier,

- le cas échéant, subordonner l'attribution préférentielle au profit de Mme [K] [C], si celle-ci en fait la demande, au paiement de la quote-part de 17 % revenant à Mme [I] [C],

- à défaut, ordonner la vente sur licitation du bien immobilier,

- fixer la mise à prix à 1 100 000 euros sans faculté de baisse en cas d'enchères désertes,

- dire que le cahier des conditions de la vente devra faire mention des droits de substitution, conformément aux dispositions de l'article 815-15 dernier alinéa du code civil,

- dire que la publicité aura lieu comme il est prévu en matière de saisie immobilière, aux articles R 322-30 à R 322-38 du code de procédure civile d'exécution,

- dire que Mme [K] [C] est redevable à dater du jour du décès de [Z] [C] le 07 janvier 2009 jusqu'à la date du partage, d'une indemnité d'occupation au profit de l'indivision spécifique audit bien immobilier existant entre Mmes [I] et [K] [C],

- fixer le montant de l'indemnité d'occupation à 3 363 euros par mois, à défaut désigner un expert avec pour mission d'estimer la valeur locative de l'immeuble pour la période postérieure au décès,

- dire que Mme [I] [C] en sa qualité d'indivisaire est recevable à recevoir à hauteur de sa part, soit 17 %, dans l'indivision, de cette indemnité d'occupation,

Vu l'article 1364 du code de procédure civile, désigner un notaire qui sera chargé de procéder aux opérations de liquidation et partage et de commettre un juge pour surveiller ces opérations,

- concernant les créances entre l'indivision et les parties, dire que le notaire désigné ne tiendra compte que des seules factures acquittées correspondant à des charges de copropriété non récupérables sur l'occupant ou à des dépenses valablement engagées avec l'accord des indivisaires,

- dire que le partage devra intervenir dans le délai de trois mois,

- condamner Mme [K] [C] à verser à Mme [I] [C] 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et matériel,

- condamner Mme [K] [C] à payer à Mme [I] [C] la somme de 15 000 euros à titre de participation aux frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance par devant le tribunal de grande instance de Nanterre et celle de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles pour la présente instance devant la cour d'appel de Versailles,

- condamner Mme [K] [C] aux dépens des deux instances ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 16 mai 2018 par lesquelles, Mme [K] [C] demande à la cour de :

Vu les articles 815 et suivants et 832 et suivants et 883 du code civil,

Vu l'article 32-1 code de procédure civile,

- confirmer le jugement en l'ensemble de ses dispositions,

Y ajoutant,

- déclarer irrecevables et/ou infondées les demandes relatives à l'indemnité d'occupation revendiquée par l'appelante à l'encontre de l'intimée,

- condamner l'appelante à verser à Mme [K] [C] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 32-1 code de procédure civile au titre de l'abus de procédure d'appel,

- condamner l'appelante à verser à Mme [K] [C] la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile,

- condamner l'appelante aux entiers dépens, dont distraction au profit de la Selarl Lexavoué Paris Versailles, en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

FAITS ET PROCÉDURE

[Z] [S] épouse [C], dont le dernier domicile était situé à [Localité 2] (92), est décédée le [Date décès 1] 2009, laissant pour lui succéder, suivant acte de notoriété établi le 6 mars 2009 par Me [I], notaire à [Localité 3] 16ème arrondissement (75), ses quatre enfants nés de son union avec [E] [C], pré-décédé : Bénédicte, [C], [I] et [K] [C], venant à parts égales à la succession.

Il dépend notamment de la succession de la défunte des droits et des biens immobiliers dont les 68 % en toute propriété d'un bien immobilier constitué par le lot n°7 dépendant de l'ensemble immobilier sis [Adresse 2] (75) composé d'un appartement à usage d'habitation, évalué en son entier à 691 000 euros lors de la déclaration de succession signée le 29 juillet 2009. Les 32 % restants appartenaient à Mmes Bénédicte [C] et Mme [K] [C] pour les avoir reçus, chacune par moitié par leur mère à hauteur de 16 % en nue-propriété suivant donation partage , le bien étant occupé par cette dernière.

A la suite du décès de [Z] [C], le bien appartenait donc à l'indivision successorale à hauteur de 68 % et en outre à hauteur de 16 % chacune à Mmes Bénédicte et Mme [K] [C].

Par acte reçu le 26 décembre 2011 par [J] [I], notaire associé à Paris, Mme Bénédicte [C] et M. [C] [C] ont cédé à leur s'ur Mme [K] [C] leurs droits indivis sur ce bien immobilier, à savoir, la première 33 % et le second 17 %.

Par acte d'huissier du 2 décembre 2013, Mme [I] [C] épouse [U] a fait assigner devant le tribunal de céans Mme [K] [C] épouse [X] aux fins d'ordonner le partage judiciaire de l'indivision relativement au bien immobilier de la [Adresse 2].

Elle a par ailleurs fait citer Mmes Bénédicte et [K] [C] et M. [C] [C] devant ce même tribunal afin qu'il soit procédé aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession de leur mère.

Par la décision entreprise, le tribunal de grande instance de Nanterre a considéré que la cession de droits intervenue le 26 décembre 2011 entre Mme Bénédicte [C] et M. [C] [C] d'une part et Mme [K] [C] d'autre part, demeurait subordonnée à l'aléa du partage de la succession, de sorte qu'elle ne pouvait être considérée comme une opération de partage partiel définitif ayant fait cesser l'indivision successorale existante entre tous les membres de la fratrie ; qu'il n'existait pas sur le bien, objet de la cession, une indivision spécifique distincte de l'indivision successorale qui pourrait dés à présent donner lieu à partage entre Mme [I] [C] et Mme [K] [C] seulement ; que c'est ainsi que Mme [I] [C] a été déboutée de l'ensemble de ses demandes tendant essentiellement au partage du bien immobilier situé [Adresse 2] ;

MOYENS DES PARTIES

Considérant que Mme [I] [C] soutient que les motifs du tribunal sont erronés en droit, toute cession de droits indivis étant une vente définitive et que dès lors qu'elle intervient entre indivisaires sans que tous y aient concouru, elle constitue un acte de partage ; qu'elle en déduit qu'il existe une indivision avec le cessionnaire des droits indivis, soit Mme [K] [C], dont il peut être demandé le partage avant et indépendamment du partage successoral à intervenir ;

Qu'elle prétend que l'acte notarié du 26 décembre 2011 mentionne clairement que la cession dont s'agit est une cession à titre de licitation faisant cesser l'indivision sur la part licitée entre indivisaires ; que cette cession est définitive et met fin à l'indivision à l'égard des cédants sur les droits licités ; que cet acte constitue un acte de partage définitif entre indivisaires sur le fondement de l'article 815-14 du code civil ; que la cession de droits indivis n'est pas soumise à l'aléa du partage à venir de la succession ; que le code civil ne prévoirait ni droit de préemption ni acte de vente si l'efficacité de la cession pouvait être remise en cause par le partage à venir ; que la cession de droits indivis entre indivisaires a le caractère de partage ouvrant droit à ce titre à la revalorisation de la soulte prévue par l'article 828 du code civil ; qu'elle fonde également sa demande sur l'article 891 du code civil relatif à l'action en complément de part ; qu'elle affirme que la cession de droits indivis entre indivisaires a le caractère de partage, même si tous les indivisaires n'y ont pas concouru, dès lors qu'elle met fin à l'indivision entre les cocontractants ; qu'elle cite au soutien de sa démonstration divers arrêts , selon elle, significatifs, de la Cour de cassation et notamment un arrêt du 21 septembre 2016 ainsi que des arrêts de cette cour et des arrêts émanant d'autres cours d'appel ; qu'elle conteste l'affirmation de l'intimée selon laquelle il n'y a sortie de l'indivision que s'il y a partage partiel lequel pour exister doit recueillir l'accord de tous les indivisaires, et faire sortir de l'indivision globale, soit un bien, soit un indivisaire ; qu'elle observe que pendant les années qui ont suivi les cessions de droits indivis du 26 décembre 2011, Mme [K] [C] n'a jamais contesté leur efficacité et que ce n'est qu'à compter de la demande en partage judiciaire qu'elle a argué de leur inefficacité avant tout partage global de la succession ; qu'il résulte de l'article 883 du code civil qui pose le principe de l'effet déclaratif du partage, que compte tenu de ses termes extrêmement larges, tout acte qui met fin à l'indivision à l'égard du cédant est un acte de partage ; qu'il s'agit d'une évolution du code civil depuis la loi du 31 décembre 1976 ; qu'elle précise que ce qui importe , c'est davantage le caractère définitif de la cession de droits indivis que le fait qu'elle ait ou non le caractère de partage, et qu'elle a mis définitivement fin à l'égard des cédants à l'indivision qui se poursuit entre elle et Mme [K] [C] ; qu'elle prétend que l'intimée élude sa référence à l'article 815-14 du code civil ; que personne ne prétend que l'indivision initiale a disparu et qu' elle est seulement modifiée par les partages amiables entre les indivisaires ; qu'elle ajoute que toutes les donations effectuées par la défunte sont des donations partages égalitaires entre les héritiers, sans atteinte à la réserve ou à la quotité disponible et que si l'intimée à des revendications à faire à ce sujet, elle ne peut le faire que dans le cadre d'une procédure impliquant l'ensemble des héritiers ; qu'elle prétend que ce moyen ne vise qu'à " compliquer le débat" et que l'intimée espère retarder davantage le partage de l'immeuble n°1 - celui qui fait l'objet de l'instance- alors que c'est elle qui a bénéficié de libéralité rapportable et qu'une requalification des donations partage lui serait préjudiciable ;

Qu'elle sollicite si nécessaire, si la cour estimait que la question de droit pur qui lui est posée, n'est pas tranchée, qu'elle demande l'avis de la Cour de cassation dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice , d'autant que la question se pose non seulement dans la présente instance mais également dans celle figurant sous le N°RG 14/14925 pendante devant le tribunal de grande instance de Nanterre ;

Qu'elle sollicite, à titre accessoire, la fixation d'une indemnité d'occupation à la charge de Mme [K] [C] à compter du [Date décès 1] 2009 jusqu'à la date du partage ;

Que Mme [K] [C] réplique que l'indivision successorale était notamment constituée de huit biens immobiliers, dont fait partie le bien immobilier litigieux ; que des conventions réciproques de cessions de droits indivis portant sur certains biens afin de s'en tenir entre eux, à l'exception de Mme [I] [C], aux valeurs déclarées à la succession des biens immobiliers, ont été signées ; que Mme [I] [C] a contesté les bases d'un partage sur les valeurs déclarées ;

Qu'elle fait valoir que la cession de droits invoquée portant sur l'immeuble sis [Adresse 2], constitue une cession des droits indivis des cédants sur l'un des biens de la masse et non une cession de leur part indivise dans la masse ; que l'indivision successorale n'a pas disparu pour se transformer en quatre indivisions distinctes, alors qu'aucun partage n'est intervenu puisque Mme [I] [C] n'est pas partie aux actes de cession de droits indivis ; qu'à suivre Mme [I] [C] on ne sait pas ce qu'il en serait des opérations de liquidation concernant notamment le rapport des dettes ou des fruits de l'indivision, si l'on devait raisonner par indivisions distinctes ; que la règle selon laquelle toute cession portant sur un bien dépendant d'une indivision plus vaste est aléatoire tant que le partage de l'indivision dont dépend le bien n'est pas intervenu, est connue et incontestable ; que ce point largement admis par la doctrine ne peut faire débat, celui-ci s'expliquant par le fait qu'un indivisaire n'a sur les biens dépendant d'une indivision plus large qu'un droit théorique et que nul ne peut céder plus de droits qu'il n'en a, l'indivisaire n'ayant qu'une vocation à la propriété de chaque bien dépendant de l'indivision ;

Qu'elle fait encore valoir que l'appelante n'ayant participé à aucune des cessions, ses droits dans l'indivision sont demeurés inchangés pour la simple raison qu'il n'y a pas eu de partage partiel ; qu'elle ajoute que les références jurisprudentielles citées par l'appelante ne sont pas pertinentes, aucune ne traitant de la question posée et qu'elles ne remettent pas en cause le principe selon lequel la cession produira effet ou non selon que le bien est attribué au cessionnaire ou pas, lors du partage de l'indivision ; que bien que valable et opposable, la cession de droits intervenue n'en est pas moins aléatoire ;

SUR CE, LA COUR

Sur la demande de partage du bien immobilier situé [Adresse 2]

Considérant que la question posée est celle de savoir si la cession de droits intervenue le 26 décembre 2011 sur le bien immobilier situé [Adresse 2] a fait sortir ledit bien de l'indivision successorale et aurait d'ores et déjà produit effet avant tout acte de partage, et ainsi créé une nouvelle indivision entre seulement Mme [I] [C] et Mme [K] [C], permettant à la première de solliciter des opérations de partage entre elles deux exclusivement sur ce bien, indépendamment des opérations de compte, liquidation et partage de la succession ;

Considérant que l'appelante rappelle que l'actif successoral est complexe et tient à ce que la succession de leur père, [Q] [C] décédé le [Date décès 2] 1981 n'a pas été liquidée et au fait que [Z] [S] épouse [C] avait acquis de son vivant deux biens immobiliers en indivision avec certains de ses enfants et procédé par ailleurs à diverses donations partages au profit de ses enfants en 1988, 1998 et 2007 portant sur certains biens ;

Qu'il ne peut pour autant être soutenu que les indivisions conventionnelles ainsi constituées ne sont pas incluses dans l'indivision successorale plus large, chacun des biens pris séparément, ayant appartenu pour partie à la défunte ;

Que l'actif successoral immobilier comporte en effet sept biens immobiliers de nature diverse ; que seul l'appartement sis à [Localité 2] situé [Adresse 3], qui appartenait à hauteur de 5/8ème à [Z] [S] épouse [C] en toute propriété et pour le reste à ses quatre héritiers, a fait l'objet d'une vente dont le prix a été partagé entre ces derniers ;

Considérant que l'impossibilité pour les parties de s'accorder sur un partage amiable provient de leur désaccord sur la détermination de l'évaluation des biens immobiliers restants, eu égard à la hausse du prix de l'immobilier depuis la déclaration de succession, étant précisé que deux biens immobiliers, dont celui objet du litige sont situés à [Localité 3], et un troisième à [Localité 2] ;

Considérant cependant que les quote -parts des droits des héritiers dans le bien considéré ne sont pas contestées ; qu'il résulte de l'article 815-3 du code civil que la vente d'un immeuble indivis faite par un ou plusieurs indivisaires est valable pour la portion indivise qui lui revient ;

Qu'au demeurant, la validité de cet acte n'est contestée ni par l'appelante, ni par l'intimée ;

Que selon l'article 883 du code civil , chaque cohéritier est censé avoir succédé seul et immédiatement à tous les effets compris dans son lot ou "à lui échus sur licitation" ; que l'alinéa 2 ajoute qu'il en est de même des biens qui lui sont advenus par tout autre acte ayant pour effet de faire cesser l'indivision et qu'il n'est pas distingué selon que l'acte fait cesser l'indivision en tout ou en partie, à l'égard de certains biens ou de certains héritiers seulement ; que l'effet déclaratif peut ainsi s'attacher à un acte qui n'emporte pas attribution de droits privatifs ;

Considérant que l'acte de cession du 26 décembre 2011 est intitulé "Cession à titre de licitation faisant cesser l'indivision sur la part licitée" ; que les droits cédés ont été évalués et payés par Mme [K] [C] aux cédants, à savoir Mme Bénédicte [C] et M. [C] [C] ;

Qu'il est précisé aux paragraphes relatifs à la propriété et à la jouissance qu'"au moyen des présentes et conformément à l'article 883 du code civil, le cessionnaire sera seul propriétaire de la totalité du bien licité, à compter rétroactivement de la date de naissance de l'indivision entre cédant et cessionnaire, soit le [Date décès 1] 2009" ; "que le cédant transmet au cessionnaire la jouissance du bien licité, par la confusion sur sa tête des qualités de propriétaire et d'occupant" ;

Que s'agissant du compte d'indivision, "les parties déclarent qu'elles n'ont ni compte ni aucune réclamation à faire en ce qui concerne la période d'indivision" ;

Considérant que l'acte de cession susvisé est définitif et ne prévoit pas que son effectivité est soumise à l'aléa du partage de l'indivision successorale dans son ensemble ; qu'il traduit de la part des parties à cet acte leur volonté claire de liquider une partie des droits indivis selon la valeur de l'immeuble déclarée lors de l'ouverture de la succession, ce qu'ils n'entendaient pas remettre en question ; qu'ils ont expressément entendu faire cesser l'indivision entre eux sur la part licitée, ce qui est permis par le texte susvisé ;

Qu'il en résulte que l'indivision litigieuse a cessé à l'égard des cohéritiers cédants, pour ne se poursuivre qu'entre Mme [I] [C] d'une part et Mme [K] [C] d'autre part et n'a plus lieu d'être prise en compte dans le partage global de la succession ;

Qu'il est ajouté que le moyen invoqué par l'intimée relatif à l'existence de diverses donations partage de la part de [Z] [S] épouse [C] et à la nécessité pour liquider l'indivision successorale de procéder aux rapports desdites donations est inopérant, les donations partage n'étant pas rapportables ; qu'il n'est pas soutenu que les donations partage intervenues seraient susceptibles en l'espèce, de porter atteinte à la réserve ;

Considérant dès lors que la demande en partage de Mme [I] [C] sur ce bien dirigée à l'encontre de Mme [K] [C] est recevable et bien fondée, sur le fondement de l'article 815 du code civil ;

Considérant en application de l'article 1364 du code de procédure civile que les parties seront renvoyées devant leur notaire, Maître [I], aux fins d'effectuer les opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision relative au bien considéré ;

Qu'il incombera notamment au notaire désigné, au besoin en s'adjoignant un expert, de donner un avis sur la valeur du bien, à la date la plus proche du partage et d'établir un état liquidatif et le cas échéant un acte de partage ;

Que la surveillance des opérations susdites sera confiée au magistrat chargé de la mise en état de la première chambre première section de cette cour ;

Considérant que la demande de licitation formée dans le dispositif des conclusions de l'appelante est en l'état prématurée ;

Sur la demande d'indemnité d'occupation

Considérant que Mme [I] [C] sollicite la fixation d'une indemnité d'occupation à la charge de Mme [K] [C], à hauteur de 3 363 euros par mois, à compter du décès de [Z] [S] épouse [C] jusqu'au partage effectif, ou à défaut de désigner un expert avec pour mission d'estimer la valeur locative de l'immeuble pour la période postérieure au décès ;

Considérant que Mme [K] [C] invoque l'irrecevabilité de la demande d' indemnité d'occupation au motif de sa nouveauté tirée de ce que devant les premiers juges, Mme [I] [C] sollicitait sa condamnation à lui verser directement ladite indemnité alors qu'elle n'est pas créancière à titre personnel de celle-ci ; qu'elle sollicite subsidiairement de la voir déclarer mal fondée dans la mesure où l'indivision spécifique n'existe pas faisant au surplus observer que l'appelante sollicite une indemnité d'occupation à compter du décès soit à une époque où l'indivision nouvelle qu'elle invoque ne pouvait exister ;

Considérant que la demande tendant à voir statuer sur le principe et le montant de l'indemnité d'occupation constitue le complément ou l'accessoire de la demande principale en partage de l'indivision litigieuse ; qu'elle doit être déclarée recevable en application de l'article 566 du code de procédure civile ;

Considérant que selon l'article 815-9 du code civil, l'indivisaire qui jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité ;

Que l'indemnité d'occupation constitue une créance envers l'indivision, qui devra être prise en compte dans le cadre des comptes d'indivision à faire entre les parties ;

Que si les cohéritiers qu'étaient Mme Bénédicte [C] et M. [C] [C] ont renoncé à tout droit à ce titre, il en va différemment de Mme [I] [C] qui a toujours figuré dans l'indivision à hauteur de la même quote-part ; que Mme [K] [C] ne conteste pas occuper l'immeuble depuis le décès de [Z] [S] épouse [C] ; que l'indemnité d'occupation due à compter du [Date décès 1] 2009 figurera à l'actif du compte d'administration ; que le notaire sera chargé d'établir un état liquidatif en fixant le montant de l' indemnité d'occupation au besoin avec le concours d'un expert, choisi d'un commun accord entre les parties ou à défaut désigné par le magistrat chargé de la mise en état , conformément à l'article 1365 du code de procédure civile ;

Sur les demandes de dommages et intérêts

Considérant que Mme [I] [C] sollicite l'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 50 000 euros en réparation de son préjudice matériel et moral découlant du non-respect par Mme [K] [C] de l'engagement pris dans le cadre d'un accord amiable consistant en deux étapes, dont la seconde n'a jamais abouti ; qu'elle fait valoir que l'harmonie familiale a été détruite et qu'elle s'est trouvée contrainte de souscrire un emprunt de 300 000 euros pour acquérir sa résidence principale alors qu'elle aurait dû percevoir des liquidités de la liquidation de l'indivision dès la fin de l'année 2011;

Considérant cependant que le désaccord de Mme [K] [C] sur l'évaluation du bien immobilier objet de la présente instance constitue une revendication de sa part et non une faute, d'autant que les "deux étapes" du processus de partage amiable décrites par l'appelante ont échoué en raison des intérêts divergents des parties, sans qu'il soit établi qu'elles se seraient mises d'accord sur un partage en fonction de la valeur déclarée des biens lors de la déclaration de succession ; que l'existence même du litige ne constitue pas la preuve d'une faute de la part de Mme [K] [C] ;

Que Mme [I] [C] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;

Considérant que Mme [K] [C] sollicite pour sa part l'allocation de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile pour abus de la procédure d'appel ; que le sens de la présente décision conduit à rejeter cette demande ;

Sur les dépens et sur les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile

Considérant que les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de partage et seront supportés par chacune des parties à concurrence de leurs droits dans ledit partage ;

Qu'il n'y a pas lieu, compte tenu de la nature du litige, de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; que les demandes présentées à ce titre sont rejetées ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [K] [C] de sa demande de dommages et intérêts pour abus de droit,

L'infirme en toutes ses autres dispositions,

Statuant à nouveau et ajoutant au jugement entrepris,

Ordonne le partage de l'indivision existant entre Mme [I] [C] et Mme [K] [C] sur le bien immobilier sis [Adresse 2],

Commet pour procéder aux opérations de compte liquidation et partage de l'indivision susvisée, Me [J] [I], notaire associé à Paris au sein d'une SCP titulaire d'un office notarial sis [Adresse 4],

Désigne le magistrat chargé de la mise en état de la première chambre première section de la cour d'appel de Versailles pour surveiller les opérations de compte, liquidation et partage,

Dit qu'en cas d'empêchement du notaire , il sera procédé à son remplacement par ordonnance rendue sur requête,

Dit que le notaire désigné établira un état liquidatif et procédera au partage après avoir estimé la valeur du bien immobilier et fixé l' indemnité d'occupation due par Mme [K] [C] à compter du [Date décès 1] 2009, les parties pouvant en référer au juge commis,

Dit que le notaire pourra s'adjoindre un expert aux fins d'estimation du bien immobilier et du montant de l' indemnité d'occupation,

Dit que l'état liquidatif et le cas échéant le projet d'acte de partage amiable sera établi conformément aux dispositions des articles 1368 et suivants du code de procédure civile,

Dit que le notaire informera le magistrat chargé de suivre les opérations, si un acte de partage est établi afin que la procédure puisse être clôturée,

Dit qu'en cas de désaccord des copartageants sur le projet d'état liquidatif dressé par le notaire, celui-ci transmettra au magistrat chargé de suivre les opérations de partage un procès-verbal reprenant les dires respectifs des parties ainsi que le projet d'état liquidatif,

Renvoie l'affaire à l'audience de mise en état du 26 septembre 2019,

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,

Dit que les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de partage et seront supportés par chacune des parties à concurrence de leurs droits dans ledit partage.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Monsieur Alain PALAU, président, et par Madame Sabine MARÉVILLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 17/02208
Date de la décision : 14/12/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°17/02208 : Décision tranchant pour partie le principal


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-14;17.02208 ?
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