COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 22G
2e chambre 3e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 17 JUILLET 2018
N° RG 17/08854 - N° Portalis DBV3-V-B7B-SA35
AFFAIRE :
Malika X...
C/
Mohammed Y...
Décision déférée à la cour: Arrêt rendu le 13 Décembre 2017 par le Cour de Cassation de
N° Chambre : 1
N° Section :
N° RG : P16-27.216
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies délivrées le : 17.07.18
à :
Me Michèle D...
Me Claire Z...
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE DIX SEPT JUILLET DEUX MILLE DIX HUIT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre:
DEMANDERESSE devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation du 13 décembre 2017 cassant et annulant l'arrêt rendu par la cour d'appel de ROUEN le 6 octobre 2016
Madame Malika X...
née le [...] à ARCOLE CANASTEL (ORAN)
de nationalité Française
[...]
assistée de Me Michèle D... de la SELARL BVK AVOCATS ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.26 - N° du dossier 17128400, Me Jérôme A... de la B... - MARCILLE - POIROT-BOURDAIN, Plaidant, avocat au barreau de ROUEN
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DEFENDEUR DEVANT LA COUR DE RENVOI
Monsieur Mohammed Y...
né le [...] à ORAN (ALGERIE)
de nationalité Française
[...]
assisté de Me Claire Z..., Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 - N° du dossier 2018044, Me Karine E... (CONIL-ROPERS-E...-ROGOWSKI-SEVESTRE-BEDARD), Plaidant, avocat au barreau de ROUEN
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 07 Juin 2018 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne MOLINA, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Odile DEGRELLE-CROISSANT, Président,
Madame Anne MOLINA, Conseiller,
Mme Estelle JOND-NECAND, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Marine MARCOTTE,
M. Mohammed Y..., né le [...] à Oran (Algérie) et Mme Malika X..., née le [...] à Bir El Jir (Algérie) se sont mariés à Oran le 13 juin 1982, sans contrat de mariage.
Sur requête de Mme X... et par ordonnance de non conciliation en date du 11 août 2009, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Rouen a constaté le principe de la rupture du mariage par les époux et autorisé la poursuite de la procédure.
Par jugement en date du 11 mai 2012, le divorce des époux a été prononcé, auquel les parties ont acquiescé, le président de la chambre des notaires de Seine-Maritime étant chargé de désigner un notaire pour procéder à la liquidation et au partage de leur régime matrimonial.
Le 24 octobre 2012, Maître C... désigné à cet effet, a procédé à l'ouverture des opérations de liquidation du régime matrimonial de Mme X... et de M. Y....
Le 24 avril 2013, le notaire a constaté l'impossibilité de concilier les parties sur le projet de liquidation soumis, Mme X... se prévalant du régime légal algérien, alors que M. Y... estimait que le couple était soumis au régime légal français de la communauté de biens réduite aux acquêts, qui correspond au régime choisi par les époux depuis leur installation en France.
Par assignation en date du 17 juillet 2014, Mme X... a fait assigner M. Y... devant le tribunal de grande instance de Rouen afin qu'il dise que la loi applicable est la loi algérienne et, à défaut de contrat de mariage, le régime légal algérien de la séparation des biens, et qu'il écarte en conséquence de la liquidation le bien dont elle est propriétaire à Canastel près d'Oran, et tout autre bien le cas échéant et qu'il fixe à la somme de 600 euros par mois le montant de l'indemnité d'occupation due à l'indivision pour l'immeuble de Saint-Martin du Vivier et qu'il condamne à ce titre M. Y... au paiement d'une provision de 28 000 euros, outre la somme de 8 000 euros au titre des loyers perçus par M. Y... sur un local commercial situé à Toulouse.
Par jugement du 13 février 2015, le tribunal de grande instance de Rouen a notamment :
- dit que le régime matrimonial des époux était le régime français de la communauté réduite aux acquêts et que les biens dépendant de la communauté, aujourd'hui dissoute, comportent l'immeuble de Saint-Martin du Vivier (76), les murs commerciaux du local de Toulouse et l'immeuble de Canastel à Oran (Algérie),
- précisé que l'éventuelle créance de M. Y... sur le frère de Mme X... est hors masse et hors partage,
- dit que M. Y... devra verser une provision de 20 000 euros à Malika X... à valoir sur la liquidation et ce, en quatre mensualités de 5 000 euros, la 1ère ayant été réglée le 28 juillet 2014, la 2ème le 8 janvier 2015, la 3ème le 1er juillet 2015, et la 4ème le 1er janvier 2016,
- dit que M. Y... versera, en sus, 600 euros par mois à compter de septembre 2014, à titre d'indemnité d'occupation pour l'immeuble de Saint-Martin du Vivier,
- dit que M. Y... devra également reverser la moitié des loyers nets du bien de Toulouse,
- dit que la somme à inclure dans la masse à partager au titre de l'immeuble de Saint-Martin du Vivier est de 2 000 euros à compter du premier juillet 2010 et jusqu'au 31 décembre 2014, soit 60 000 euros,
- dit que la somme à inclure dans la masse à partager au titre des loyers du local de Toulouse sont les loyers nets de toutes charges et notamment des frais de gestion versés au cabinet AGEI,
- renvoyé les parties devant le notaire chargé de la liquidation.
Mme X... a formé appel de ce jugement, par déclaration reçue le 10 mars 2015 au greffe de la cour.
Par arrêt prononcé le 06 octobre 2016, la cour d'appel de Rouen a notamment :
- débouté Mme X... de son appel,
- confirmé le jugement du 13 février 2015 en toutes ses dispositions,
- renvoyé M. Y... à produire tous justificatifs des charges qu'il prétend avoir réglé seul entre le 11 août 2009 et le 30 juin 2010 entre les mains du notaire chargé de la liquidation.
Sur pourvoi formé par Mme X..., la Cour de cassation, par arrêt du 13 décembre 2017, a cassé et annulé en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 octobre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remis, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyé devant la cour d'appel de Versailles.
Au visa des articles 6, alinéa 1, et 11 de la Convention de La Haye du du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux, ensemble l'article 21 de cette Convention ; la Cour de cassation a retenu que, selon le premier de ces textes, les époux peuvent, au cours du mariage, soumettre leur régime matrimonial à une loin interne autre que celle jusqu'alors applicable ; que, selon le deuxième, cette désignation doit faire l'objet d'une stipulation expresse; que, selon l'arrêt attaqué, M. Y... et Mme X... se sont mariés en 1982, sans contrat préalable, en Algérie, où sont nés leurs trois enfants ; qu'ils se sont installés en France [...] et ont acquis la nationalité française ; qu'ils se sont opposés, après le prononcé de leur divorce, sur la détermination de leur régime matrimonial ; que, pour dire que le régime matrimonial des époux est le régime français de la communauté réduite aux acquêts, après avoir énoncé qu'au regard du lieu de leur mariage et de leur premier domicile conjugal, le droit applicable à leur régime matrimonial est le droit algérien, leur installation en France et le changement de nationalité étant sans incidence, l'arrêt retient qu'il ressort de la déclaration de M. Y... et Mme X... contenue dans un acte d'achat d'un bien immobilier du 15 septembre 2000 et dans un acte de donation entre eux du 7 septembre 2001, selon laquelle ils sont 'soumis au régime de la communauté, selon le droit français', que ceux-ci ont, en cours de mariage, désigné leur régime matrimonial comme étant le régime français de la communauté des biens, comme les y autorise l'article 6 de la Convention de La Haye du 14 mars 1978, applicable avec effet rétroactif ; et qu'en statuant ainsi, alors que cette déclaration, mentionnée dans des actes notariés poursuivant un autre objet, ne traduisait pas la volonté non équivoque des époux de soumettre leur régime matrimonial à une loi interne autre que celle le régissant jusqu'alors et ne pouvait constituer une stipulation expresse portant désignation de la loi applicable, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Mme X... a procédé à une déclaration de saisine en date du 15 décembre 2017.
Aux termes de ses dernières conclusions, transmises par RPVA le 25 mai 2018, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, Mme X... demande à la cour de:
- la déclarer recevable en son appel,
- écarter comme non conforme aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile la pièce n°7 de l'intimé,
- réformer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
- dire que le régime matrimonial applicable aux époux X... /Y... pour la liquidation de leur patrimoine indivis est un régime de séparation,
- renvoyer les parties vers Maître C..., notaire désigné par le jugement de divorce, afin qu'il soit procédé à la poursuite des opérations de liquidation-partage du régime matrimonial selon les règles de la séparation des biens,
- condamner M. Y... au paiement d'une somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens.
Dans ses dernières conclusions, notifiées par RPVA le 04 juin 2018, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des moyens, M. Y... demande à la cour de:
- dire Mme X... mal fondée en son appel, l'en débouter,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le régime matrimonial des époux X...enzohra est le régime français de la communauté réduite aux acquêts,
- Y ajoutant,
- dire que les charges qu'il a réglées seul pour la période du 11 août 2009 au 30 juin 2010 devront être comprises dans la masse à partager au même titre que celles réglées par Mme X... seule,
- condamner Mme X... à lui payer une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 5 juin 2018.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la demande de Mme X... tendant à écarter la pièce n°7 produite par M. Y...:
Mme X... expose que la pièce n°7 produite par M. Y... est dépourvue de force probatoire et ne répond pas aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile.
M. Y... soutient que son ex-épouse croit pouvoir contester l'attestation de son père sachant que ce dernier est décédé alors que ce document est revêtu du tampon officiel des services algériens.
Selon l'article 202 du code de procédure civile, 'L'attestation contient la relation des faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constatés.
Elle mentionne les nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur ainsi que, s'il y a lieu, son lien de parenté ou d'alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d'intérêts avec elles.
Elle indique en outre qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur a connaissance qu'une fausse attestation de sa part l'expose à des sanctions pénales.
L'attestation est écrite, datée et signée de la main de son auteur. Celui-ci doit lui annexer, en original ou en photocopie, tout document officiel justifiant de son identité et comportant sa signature'.
En l'espèce, la pièce n°7 produite par M. Y... est un document nommé 'attestation' au nom de M. G... Y.... Le document ne comporte pas la mention selon laquelle l'attestation est établie en vue de sa production en justice et que son auteur a connaissance qu'une fausse attestation de sa part l'expose à des sanctions pénales et aucun document officiel justifiant de l'identité de son auteur n'y est annexé. Toutefois, il n'y a pas lieu d'écarter cette attestation des débats en l'absence de grief établi par Mme X.... Il appartiendra à la cour, si elle s'appuie sur ce document, de préciser la valeur probante qu'elle y accorde en considération du non respect des exigences de l'article 202 du code de procédure civile.
Sur le régime matrimonial applicable aux époux X... / Y... :
Mme X... expose que le régime matrimonial applicable aux ex-époux est celui de la séparation de biens car :
- selon son article 21, la Convention de La Haye du 14 mars 1978 n'est applicable au'aux époux qui se sont mariés ou qui désignent la loi applicable à leur régime matrimonial après son entrée en vigueur ;
- l'article 7 de la Convention de La Haye de 1978 relatif au changement automatique de loi applicable ne concerne que les époux mariés après le 1er septembre 1992 ;
- avant l'entrée de la Convention de La Haye de 1978, en l'absence de choix des époux au moment de leur mariage quant à leur régime matrimonial, il convient de se référer à la fixation du premier domicile commun stable et effectif des époux et que si cet élément ne constitue qu'une présomption simple, en l'espèce les mentions dans les actes notariés de 2000 et de 2001 selon lesquelles les époux se sont déclarés soumis au régime de la communauté ne suffisent pas établir que les époux avaient la volonté de localiser le centre de leurs intérêts pécuniaires en France au moment de la célébration de leur mariage en 1982;
- si par application de l'article 6 de la Convention de La Haye de 1978, les époux peuvent choisir au cours du mariage de soumettre leur régime matrimonial à une loi autre que celle jusqu'alors applicable, la désignation de la loi applicable doit faire l'objet d'une stipulation expresse ou résulter indubitablement des dispositions d'un contrat de mariage en application de l'article 11 de la Convention mais qu'en l'espèce les actes notariés de 2000 et 2001 poursuivaient un autre but que la détermination du régime matrimonial des époux et ne pouvaient donc pas traduire la volonté non équivoque des époux de soumettre leur régime matrimonial à une nouvelle loi.
M. Y... soutient que le régime matrimonial applicable aux ex-époux est celui de la communauté légale réduite aux acquêts car :
- selon l'article 21 de la Convention de La Haye du 14 mars 1978, celle-ci s'applique dès lors qu'il y a eu manifestation de volonté quant à la loi applicable postérieurement au 1er septembre 1992 et qu'en l'espèce les époux ont fait le choix de la loi française en estimant qu'ils étaient soumis au régime matrimonial français et ce, le 15 septembre 2000 dans le cadre d'un acte de vente, puis le 7 septembre 2001, dans le cadre d'une donation ;
- l'article 7 de la Convention de La Haye peut s'appliquer pour des époux mariés avant son entrée en vigueur ;
- par application de l'article 7 de la Convention de La Haye, si les époux n'ont pas désigné la loi applicable ni fait de contrat de mariage, il est prévu que la loi de résidence habituelle est applicable qu'elle qu'ai été la loi initialement applicable et que les époux ont eu leur résidence habituelle en France à compter de 1995 ainsi que le centre de leurs intérêts économiques et que les époux avaient la nationalité française en 2000 ;
- si la cour devait rejeter l'application de la Convention de La Haye pour retenir l'application du droit français, celui-ci sera appliqué au regard des règles de conflit de loi et que si une jurisprudence traditionnelle a toujours instauré une présomption simple de fixation du premier domicile des époux pour déterminer leur régime matrimonial, la jurisprudence récente a ajouté qu'il convient d'apprécier tout autre élément de preuve pertinent tiré notamment de l'attitude des époux après leur mariage ; qu'en l'espèce les ex-époux avaient fixé leur domicile [...] où la famille a vécu, que lui-même a réintégré la nationalité française à compter de 1999, que son ex-épouse a la nationalité française depuis 2000, qu'il assurait des missions en France dès avant 1995, que les époux ont développé une carrière professionnelle en France et qu'ils y ont leurs intérêts économiques, qu'ils y ont acquis des biens immobiliers, que les époux ont mentionné le régime matrimonial de la communauté réduite aux acquêts comme étant le leur dans deux actes notariés de 2000 et 2001 et que dans un formulaire du ministère du développement industriel et scientifique à remplir en vue d'être autorisé à exercer en France une activité commerciale, Mme X... a répondu par la négative à la question de savoir si elle était mariée sous le régime de la séparation de biens.
En l'espèce, Mme X... et M. Y... se sont mariés le 13 juin 1982 à Oran, soit avant l'entrée en vigueur le 1er septembre 1992 de la Convention de La Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux. Le couple n'a pas conclu de contrat de mariage, ni désigné avant leur mariage, de manière certaine et non équivoque, la loi applicable à leur régime matrimonial.
Par ailleurs, selon l'article 21 alinéa 1 de la Convention de La Haye de 1978, 'La Convention ne s'applique, dans chaque Etat contractant, qu'aux époux qui se sont mariés ou qui désignent la loi applicable à leur régime matrimonial après son entrée en vigueur pour cet Etat'. Par conséquent, contrairement à ce que soutient M. Y..., l'article 7 de la Convention relatif à la mutabilité automatique du régime matrimonial n'est pas applicable aux parties.
Si, avant le 1er septembre 1992, la loi applicable au régime matrimonial des époux est déterminée, à défaut de choix de leur part, en considération, principalement, du lieu de leur premier domicile matrimonial, cette règle ne constitue qu'une présomption simple qui peut être détruite par tout autre élément de preuve pertinent, tiré notamment de l'attitude des époux après leur mariage. Ainsi, il convient de rechercher, d'après les faits et circonstances, le régime matrimonial que les époux ont implicitement eu la volonté d'adopter au jour de leur mariage. A cette fin, pour éclairer la volonté des parties, il convient de prendre en compte tant les circonstances ayant entouré le mariage que les circonstances postérieures qui éclairent la volonté des époux quant à la localisation de leurs intérêts pécuniaires au moment du mariage.
En l'espèce, les ex-époux se sont mariés à Oran, en Algérie, le 13 juin 1982 et de leur union sont nés trois enfants à Oran le [...], le [...] et le [...]. M. Y... s'est fait réintégrer dans la nationalité française par Décret du 6 mai 1999 tandis que Mme X... déclare avoir été naturalisée française en 2000. Le mariage des époux a été transcrit sur les registres d'état civil au ministère des Affaires Etrangères le 12 juillet 1999. Le couple a vécu en Algérie jusqu'en 1994 et M. Y... produit un contrat de bail pour un bien situé à Toulouse, conclu par le couple le 21 décembre 1995 pour une location à compter du 1er janvier 1996. Il n'est pas contesté que les époux ne sont pas retournés vivre en Algérie pendant leur mariage qui a duré 30 ans, ni qu'ils ont exercé leur profession en France, ni qu'ils ont acquis un bien immobilier situé à Saint-Martin du Vivier le 15 septembre 2000 ainsi qu'un local à Toulouse. Par ailleurs, dans un acte notarié du 15 septembre 2000 portant acquisition d'un bien immobilier à Saint-Martin du Vivier, Mme X... et M. Y... se sont déclarés mariés à Oran le 13 juin 1982 et 'soumis au régime de la communauté, selon le droit français' (page 2 de l'acte). De même, dans un acte de donation entre époux du 7 septembre 2001, Mme X... et M. Y... se sont encore déclarés mariés à Oran le 13 juin 1982 et 'soumis au régime de la communauté, selon le droit français' (1ère page de l'acte). Enfin, M. Y... produit un questionnaire CERFA n° 900013 du Ministère du développement industriel et scientifique à remplir en vue d'être autorisé à exercer en France une activité commerciale, industrielle, ou du secteur des métiers, avec ou sans résidence en France, établi par Mme X... le 24 septembre 1996 et portant la mention 'Je certifie que toutes mes déclarations sont exactes et je sais qu'en cas de fausses déclarations je m'expose aux poursuites prévues par la loi (Article 154 du Code Pénal)' dans lequel l'ex-épouse a déclaré résider en France sans interruption depuis le 29 novembre 1994 et a barré la mention 'OUI' et répondu 'NON' à la question 8 'Si vous êtes marié, est-ce sous le régime de la séparation de biens ''.
En l'espèce, il convient de constater que si les époux se sont mariés en Algérie où ils ont fixé leur premier domicile matrimonial jusqu'à la fin de l'année 1994, sans avoir fait expressément choix, au moment du mariage, de la loi applicable à leur régime matrimonial, ils ont, pendant le mariage, établi en France leurs intérêts personnels et pécuniaires en y travaillant, y élevant leurs enfants, y acquérant des biens immobiliers, et se sont en outre toujours présentés, lors des différents actes de leur vie privée, comme mariés sous le régime français de la communauté légale, tant pour le couple dans deux actes notariés de 2000 et 2001, que pour Mme X... dans un questionnaire officiel du Ministère du développement industriel et scientifique. Par conséquent, il se déduit de ces circonstances que les époux ont eu, au moment du mariage, la volonté d'adopter ce régime et non celui de la séparation de biens prévu par la loi algérienne.
Dès lors, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit que le régime matrimonial applicable aux parties est celui de la communauté réduite aux acquêts.
Sur la demande de M. Y... relative aux charges qu'il a réglées au cours de la période du 11 août 2009 au 30 juin 2010 :
M. Y... soutient avoir demandé la réformation du jugement en ce qu'il a considéré que les sommes qu'il avait payées, et dépassant sa participation au prorata des revenus des époux, ne sauraient être comprises dans la masse à partager. Il prétend que les charges qu'il a payées seul doivent être comprises dans la masse à partager au même titre que celles réglées par Mme X... seule (y compris pour les enfants) et inclues par le notaire. M. Y... expose que le compte établi par le notaire est incomplet puisque ce dernier n'a pas intégré les charges qu'il a payées sur la période allant du 11 août 2009 date de l'ordonnance de non conciliation au 1er août 2010, date de départ de Mme X... après l'ordonnance du juge de la mise en état alors qu'il était stipulé dans l'ordonnance de non conciliation que la contribution aux charges du logement serait assumée par chacun des époux au prorata de ses revenus.
Mme X... fait valoir que par deux reprises depuis les tentatives de partage amiable M. Y... a tenté en vain d'intégrer dans les comptes de l'indivision ce qui correspondait en fait à l'ensemble de ses dépenses personnelles et que cette demande doit être écartée.
Selon l'article 1476 alinéa 1 du code civil, le partage de la communauté, pour tout ce qui concerne ses formes, le maintien de l'indivision et l'attribution préférentielle, la licitation des biens, les effets du partage, la garantie et les soultes, est soumis à toutes les règles qui sont établies au titre 'Des successions' pour les partages entre cohéritiers.
Il résulte de l'article 815-13 alinéa 1 du code civil que lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui en être pareillement tenu comptes des 'dépenses' nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elle ne les aient point améliorés.
En l'espèce, il convient de rappeler que le jugement déféré a retenu que pour la période entre l'ordonnance de non conciliation du 11 août 2009 et l'ordonnance du juge de la mise en état du 30 juin 2010, M. Y... ne justifie pas de ce qu'un solde de dépenses liées uniquement à l'entretien de la maison et dépassant sa participation au prorata des revenus des époux soit resté impayé et que sa prétention sur ce point doit être écartée, aucune somme ne devant être comprise dans la masse à partager.
La répartition de la prise en charge des frais relatifs à l'indivision post-communautaire au titre des mesures provisoires ne saurait faire obstacle à l'application de l'article 815-13 alinéa 1 du code civil, sauf à ce que la prise en charge attribuée à l'un des époux s'inscrive dans le cadre du devoir de secours, ce qui n'était pas le cas en l'espèce dans l'ordonnance de non conciliation du 11 août 2009. Dès lors, chacun des époux peut faire valoir des créances au titre de règlements effectués pour l'indivision post-communautaire.
Par conséquent, il convient d'infirmer le jugement déféré de ce chef.
Cependant, M. Y... ne présentant pas spécifiquement les créances qu'il entend revendiquer et ne les chiffrant pas, il convient de dire qu'il lui appartiendra de produire tous justificatifs des charges qu'il prétend avoir réglées seul entre le 11 août 2009 et le 30 juin 2010 pour qu'elles soient prises en compte dans le cadre de la liquidation des droits des ex-époux, sous réserve qu'elle puissent constituer des créances contre l'indivision post-communautaire au sens de l'article 815-13 du code civil ou des créances entre époux.
Sur la demande de renvoi devant le notaire :
Il convient de rappeler que le président de la chambre des notaires de Seine-Maritime a désigné Maître C..., notaire à Rouen, pour procéder à la liquidation et au partage du régime matrimonial de Mme X... et M. Y.... Ces opérations n'ayant pas été achevées, il y a lieu de renvoyer les parties devant le notaire aux fins de les poursuivre puis d'établir l'acte de partage, selon ce qui a été décidé dans la présente décision.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
Par application de l'article 696 du code de procédure civile, Mme X..., partie perdante, sera condamnée aux dépens de la présente instance d'appel.
En considération de l'équité, il convient de condamner Mme X... à verser à M. Y... la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
En la forme,
Déclare l'appel recevable ;
Au fond,
Déboute Mme X... de sa demande tendant à écarter, comme non conforme aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile, la pièce n°7 de M Y... ;
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a écarté la demande de M. Y... et dit qu'aucune somme réglée par lui seul pour la période du 11 août 2009 au 30 juin 2010 ne devra être comprise dans la masse à partager ;
Statuant à nouveau de ce chef,
Dit que M. Y... devra produire tous justificatifs des charges qu'il prétend avoir réglées seul entre le 11 août 2009 et le 30 juin 2010 pour qu'elles soient prises en compte dans le cadre de la liquidation des droits des ex-époux, sous réserve qu'elle puissent constituer des créances contre l'indivision post-communautaire au sens de l'article 815-13 du code civil ou des créances entre époux ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Renvoie Mme X... et M. Y... devant Maître C..., notaire à Rouen, aux fins de poursuivre les opérations de liquidation des intérêts patrimoniaux ayant existé entre les ex-époux, et d'établir l'acte de partage, selon ce qui a été tranché dans la présente décision ;
Condamne Mme X... à verser à M. Y... une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme X... aux dépens de la présente instance d'appel ;
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne MOLINA, Conseiller, pour le Président régulièrement empêché et par Monsieur BOUTEMY, Faisant Fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier f.f., Le Conseiller pour le Président empêché,