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04/07/2018 | FRANCE | N°17/02345

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 04 juillet 2018, 17/02345


COUR D'APPEL


DE


VERSAILLES








Code nac : 56C





13e chambre





ARRET N°





CONTRADICTOIRE





DU 04 JUILLET 2018





N° RG 17/02345





AFFAIRE :





SCS SOLAGRI ENERGIES








C/


SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE


...











Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 02 Mars 2017 par le Tribunal de Comm

erce de NANTERRE


N° chambre : 03


N° Section :


N° RG : 2014F0121





Expéditions exécutoires


Expéditions


Copies


délivrées le : 04.07.18


à :


Me Stéphane X...





Me Christophe DEBRAY,





Me Martine Z...





Me Pierre A...





Me Bertrand B...





TC NANTERRE





MP





RÉPUBLIQ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 56C

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 JUILLET 2018

N° RG 17/02345

AFFAIRE :

SCS SOLAGRI ENERGIES

C/

SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE

...

Décision déférée à la cour: Jugement rendu le 02 Mars 2017 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° chambre : 03

N° Section :

N° RG : 2014F0121

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 04.07.18

à :

Me Stéphane X...

Me Christophe DEBRAY,

Me Martine Z...

Me Pierre A...

Me Bertrand B...

TC NANTERRE

MP

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE JUILLET DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre:

SCS SOLAGRI ENERGIES

[...]

[...]

Représentée par Me Stéphane X... de l'ASSOCIATION AVOCALYS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 et par Me Jean-Baptiste C..., avocat plaidant au barreau de BORDEAUX.

APPELANTE

****************

SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE

N° SIRET : 399 22 7 3 54

[...]

Représentée par Maître Christophe DEBRAY, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - et par Maîtres O.LOIZON, L-A. MONTIGNY et D..., avocats plaidants au barreau de PARIS

Société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY SE

[...]

[...]

Représentée par Maître Martine Z... de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1656077 et par Maître A. E... - JONATHAN avocat plaidant au barreau de PARIS

Société AIG EUROPE LIMITED

N° SIRET : 552 128 795

The AIG Building, [...]

Représentée par Me Pierre A..., avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 et par Me Valérie F..., avocat plaidant au barreau de PARIS P.443.

SA ENEDIS anciennement ERDF

N° SIRET : 444 608 442

[...]

Représentée par Maître Bertrand B... L... K...-J... G... AVOCATS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 et par Maître H... O. avocat plaidant au barreau de TOULOUSE

INTIMÉES

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Mars 2018, Madame Sophie M..., présidente ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Sophie M..., Présidente,

Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,

Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE

L'avis du Ministère Public, représenté par Monsieur Fabien BONAN, Avocat Général a été transmis le 10 janvier 2018 au greffe par la voie électronique

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Solagri Energies (ci-après 'la société Solagri') a pour activité la production d'électricité d'origine renouvelable.

Afin de favoriser le développement des énergies renouvelables en France, la loi du 10 février 2000 a notamment organisé les modalités de conclusion des contrats d'achat de l'électricité ainsi produite entre la société Electricité de France (ci-après EDF) et les producteurs de celle-ci.

Cette loi a donné lieu aux décrets d'application du 6 décembre 2000 et du 10 mai 2001 et aux arrêtés des 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010 qui fixent les prix d'achat.

Il est ainsi fait obligation à la société EDF de conclure avec les producteurs intéressés un contrat pour l'achat de l'électricité produite par les installations de production d'électricité qui utilisent des énergies renouvelables à un prix supérieur au prix auquel la société EDF vend son énergie aux consommateurs.

Le raccordement de ces installations au réseau de distribution est réalisé par la société Électricité Réseau de France, devenue Enedis (ci-après 'la société Enedis').

Dans le cadre de cette réglementation, la société Solagri a décidé de l'implantation d'une centrale photovoltaïque d'une puissance de 12 MW, sur la commune de Soyaux. Son projet étant soumis à proposition technique et financière de raccordement au réseau (ci-après 'PTF'), le délai d'instruction de la demande de raccordement était de trois mois à compter de la date de réception de la demande complète.

Elle a ainsi envoyé, par l'intermédiaire de son mandataire, la société Ineo Réseaux Centre Ouest, une demande de raccordement. La société Enedis l'a reçue et l'a déclarée complète au 27 août 2010.

En l'absence de PTF reçue, le 4 décembre 2010, la société Solagri a spontanément envoyé un chèque d'acompte à valoir sur le montant des travaux de raccordement.

La PTF a été envoyée par la société Enedis le 10 décembre 2010. Elle a été acceptée par la société Solagri et renvoyée à la société Enedis le même jour, accompagnée du chèque d'acompte correspondant à la différence restant due.

Le décret du 9 décembre 2010 entré en vigueur le 10 décembre 2010 a suspendu pour une durée de trois mois à compter de son entrée en vigueur l'obligation de conclure un contrat d'achat de l'électricité produite par certaines installations photovoltaïques, aucune demande de contrat d'achat ne pouvant être déposée durant la période de suspension et les demandes suspendues devant faire l'objet, à l'issue de la période de suspension, d'une nouvelle demande complète de raccordement au réseau. Cette suspension ne s'applique toutefois pas aux installations dont le producteur a notifié au gestionnaire de réseau, avant le 2 décembre 2010, son acceptation de la PTF. A l'issue de ce moratoire, un arrêté du 4 mars 2011 a fixé le prix d'achat de cette électricité à des tarifs inférieurs à ceux prévus par les arrêtés antérieurs et exclu du bénéfice de l'obligation d'achat les installations d'une puissance supérieure à 100 kWc, désormais soumises à une procédure d'appel d'offres.

A la fin de la période de suspension, la société Solagri n'a pas déposé de nouvelle demande de raccordement.

Soutenant que la société Enedis avait commis des fautes, la société Solagri l'a fait assigner, ainsi que la société Axa corporate solutions assurances (ci-après 'la société Axa'), devant le tribunal de commerce de Nanterre en réparation de son préjudice.

La société Enedis a appelé en garantie les sociétés Allianz global corporate et speciality (ci-après 'la société Allianz') et AIG Europe Limited (ci-après 'la société AIG').

Par jugement contradictoire du 2 mars 2017, le tribunal de commerce de Nanterre a:

- ordonné la jonction des instances ;

- débouté la société Solagri de toutes ses demandes ;

- dit n'y avoir lieu à statuer sur les appels en garantie formés par la société Enedis à l'encontre des sociétés de droit étranger Allianz et AIG ;

- dit n'y avoir lieu à statuer sur les demandes de la société Enedis, de la société Axa, de la société Allianz et de la société AIG de surseoir à statuer dans l'attente de la réponse au fond de la Cour de justice de l'Union européenne à la question préjudicielle dont l'a saisie la cour d'appel de Versailles dans le cadre de la procédure n° 14/2549 ;

- condamné la société Solagri à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile:

- à la société Enedis la somme de 5 000 euros ;

- à la société Axa la somme de 2 000 euros ;

- à la société Allianz la somme de 2 000 euros ;

- à la société AIG la somme de 2 000 euros ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

- condamné la société Solagri aux dépens de l'instance.

Par déclaration reçue le 21 mars 2017, la société Solagri a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 12 février 2018, la société Solagri demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau,

Au principal,

- condamner solidairement entre elles les sociétés Enedis, Axa, Allianz et AIG à payer à la société Solagri :

- la somme de 60 147 675,37 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la signification de l'assignation (12 mai 2014) et avec anatocisme ;

- la somme de 50 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Subsidiairement,

- condamner solidairement entre elles les sociétés Enedis, Axa, Allianz et AIG à payer à la société Solagri :

- la somme de 120 354 892,47 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la signification de l'assignation (12 mai 2014) et avec anatocisme;

- la somme de 50 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

En tout état de cause,

- débouter les défenderesses de leurs demandes reconventionnelles ou incidentes ;

- condamner sous la même solidarité les sociétés Enedis, Axa, Allianz et AIG aux entiers dépens, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire de Monsieur Bernard Y....

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 5 février 2018, la société Enedis demande à la cour de :

- dire et juger irrecevable comme étant nouvelle la demande subsidiaire additionnelle formée à hauteur de cour par la société Solagri ;

Et sur la demande principale de la société Solagri,

A titre principal,

Sur la faute,

- dire et juger que les allégations de pratiques discriminatoires ne sont ni démontrées, ni sérieuses ni fondées ;

Sur l'absence de lien de causalité,

- dire et juger qu'il n'existe pas de lien de causalité entre le dépassement de délai reproché à la société Enedis et le préjudice allégué ;

- dire et juger que le préjudice allégué trouve sa cause dans un triple état de faits et/ou de droit :

- à titre principal, dans la combinaison, d'une part, entre la nécessité dans laquelle se serait trouvée la société Solagri de représenter une nouvelle demande de raccordement et, d'autre part, dans la survenance du décret moratoire du 9 décembre 2010 qui la privait de pouvoir bénéficier des tarifs ante-moratoire ;

- à titre subsidiaire, dans l'impossibilité matérielle d'échapper aux effets du moratoire, dans laquelle se serait trouvée la société Solagri si la PTF avait été transmise le 29 novembre 2010 ;

- enfin, le choix discrétionnaire par la société Solagri d'abandonner son projet alors que l'article 5 du décret du 9 décembre 2010 l'invitait à représenter sa demande de raccordement ;

Subsidiairement sur le préjudice,

- dire et juger que l'arrêté du 12 janvier 2010, a instauré une aide d'Etat ;

- constater que ledit arrêté n'a pas été notifié préalablement à la Commission européenne en violation de l'article 108 paragraphe 3 du TFUE ;

- dire et juger en conséquence que cet arrêté illégal ne saurait fonder un préjudice licite;

- dire et juger irrecevable et en tous cas mal fondée la demande subsidiaire de condamnation d'Enedis a paiement d'une somme supérieure à 120 millions d'euros;

- dire et juger au surplus que la perte de chance, seul préjudice indemnisable, est en l'occurrence nulle ;

- dire et juger enfin et à titre plus subsidiaire encore, qu'à supposer même qu'une perte de chance infime ait existé, le préjudice tel que chiffré par la société Solagri est fantaisiste, non démontré et extrêmement surévalué ;

En conséquence,

- confirmer le jugement entrepris ;

- débouter la société Solagri de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions contraires;

- condamner la société Solagri au paiement d'une somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître B... ;

A titre infiniment subsidiaire,

- condamner solidairement les compagnies Axa, AIG et Allianz, en leur qualité d'assureurs de responsabilité civile professionnelle d'Enedis, à la garantir pour l'ensemble des condamnations mises à sa charge en principal, frais, intérêts et accessoires ;

En toutes hypothèses,

- condamner la société Solagri au paiement d'une somme de 25 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, dont le recouvrement sera effectué pour ceux la concernant par l'AARPI G... Avocats représentée par Maître Bertrand B... conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 12 janvier 2018, la société Axa demande à la cour de :

A titre principal,

- dire et juger que la demande de Solagri est sans objet ;

- dire et juger que Solagri ne justifie pas du lien de causalité entre la faute imputée à Enedis et le préjudice allégué, ni de l'existence de ce préjudice ;

- dire et juger que le préjudice allégué par Solagri n'est pas réparable dès lors que l'arrêté du 12 janvier 2010 fondant le calcul de ce préjudice est illégal pour défaut de notification préalable à la Commission européenne ;

- en conséquence, confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nanterre le 2 mars 2017 Solagri de toutes ses demandes ;

A titre subsidiaire, et si, par extraordinaire, la cour reconnaissait l'existence d'un préjudice réparable,

- ordonner une expertise et désigner un expert afin que ce dernier donne à la cour les éléments nécessaires pour apprécier la réalité et le quantum de l'éventuel préjudice subi par Solagri ;

En tout état de cause,

- rejeter l'ensemble des demandes de Solagri ;

- débouter Solagri et Enedis de leurs demandes à l'égard d'Axa et, à défaut, faire application du seuil d'intervention de 1 500 000 euros ;

- subsidiairement, donner acte à Axa qu'elle se réserve le droit de refuser sa garantie dans l'hypothèse où des pratiques anti-concurrentielles étaient retenues;

- condamner la partie succombante à verser à Axa la somme de 10 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Christophe Y..., avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 13 janvier 2018, la société Allianz demande à la cour de :

A titre liminaire, sur les demandes directes formées à l'encontre d'Allianz pour la première fois en cause d'appel,

- dire que les demandes nouvelles de Solagri contre Allianz formées pour la première fois en cause d'appel sont irrecevables ;

En conséquence,

- dire et juger irrecevables les demandes de Solagri formées à l'encontre d'Allianz et l'en débouter ;

- dire et juger irrecevables les demandes subsidiaires formées par Solagri et l'en débouter;

A titre principal,

- confirmer la décision du tribunal de commerce de Nanterre du 2 mars 2017;

En conséquence,

- dire et juger que la responsabilité délictuelle d'Enedis ne peut pas être engagée ;

- débouter Solagri de ses demandes, fins et conclusions ;

- dire et juger sans objet la demande de garantie d'Enedis contre Allianz ;

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour ne confirmait pas la décision du 2 mars 2017 sur l'absence de responsabilité délictuelle d'Enedis, il est demandé à la cour de,

A titre principal,

- constater l'absence de conformité au droit de l'Union européenne des divers arrêtés - dont l'arrêté ministériel du 12 janvier 2010 - fixant les tarifs d'achat d'énergie radiative ;

- constater en conséquence que l'arrêté ministériel du 12 janvier 2010 - et le cas échéant tous autres arrêtés antérieurs - fixant les tarifs d'achat d'énergie radiative est illégal par voie d'exception, pour défaut de notification préalable à la Commission européenne ;

- dire et juger que Solagri ne peut justifier d'un dommage réparable dès lors que le texte sur lequel elle fonde l'existence de ce dommage est entaché d'illégalité ;

- dire et juger qu'en tout état de cause, le préjudice n'est ni certain, ni direct;

- en conséquence, déclarer Solagri mal fondée en ses demandes et l'en débouter; déclarer en conséquence sans objet l'appel en garantie d'Enedis contre Allianz ;

À titre subsidiaire,

- dire et juger que Solagri ne justifie pas ni d'une faute ni d'un lien de causalité entre la faute imputée à Enedis et le préjudice allégué ;

- en conséquence, déclarer Solagri mal fondée en ses demandes et l'en débouter ; déclarer en conséquence sans objet l'appel en garantie d'Enedis contre Allianz;

A titre plus subsidiaire,

- dire et juger que le préjudice ne peut s'analyser qu'en une perte de chance infime;

- écarter le rapport d'expertise et constater que Solagri ne justifie pas des sommes auxquelles elle aurait pu prétendre ;

- débouter de plus fort Solagri de ses demandes et déclarer en conséquence sans objet l'appel en garantie d'Enedis contre Allianz ;

A titre infiniment subsidiaire,

- désigner un tel expert financier qu'il lui plaira, avec pour mission de:

- convoquer les parties, leurs conseils convoqués et entendus ;

- se rendre dans tous lieux nécessaires à l'accomplissement de sa mission ;

- recueillir de Solagri spontanément ou sur sa demande, tous documents - notamment financiers ou comptables - ou pièces et toutes explications utiles à l'exécution de sa mission ;

- établir tous éléments factuels susceptibles de permettre par la suite à la juridiction compétente de se prononcer sur l'ensemble des préjudices allégués par Solagri ;

- évaluer les préjudices réellement subis par la société Solagri et directement causés par l'impossibilité de vendre l'électricité au tarif fixé par l'arrêté du 12 janvier 2010 ;

- évaluer les préjudices réellement subis par la société Solagri liés à la perte des prétendus bénéfices retirés de l'exploitation de la centrale durant les 10 années suivant la fin de l'obligation d'achat ;

- recueillir tous éléments sur les économies réalisées, les réemplois mis en oeuvre ou possible ;

- dire que la consignation sur frais d'expertise sera mise à charge de Solagri;

En tout état de cause sur la garantie,

- constater qu'Enedis ne rapporte pas la preuve de l'existence, de la nature et des conditions de la garantie qu'elle revendique auprès d'Allianz, ni du fait que sa responsabilité au cas d'espèce relèverait d'une telle garantie ;

- constater qu'Enedis ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un accord de solidarité entre AIG, Axa et Allianz ;

- constater plus généralement qu'Enedis ne fonde ni ne précise aucunement sa demande contre Allianz ;

- en conséquence, débouter Enedis de ses demandes dirigées contre Allianz; A titre subsidiaire sur la garantie,

- dire qu'Allianz ne saurait être tenue que dans les termes, limites et conditions des garanties d'assurance dont Enedis sollicite le bénéfice ;

- et constater qu'Allianz est susceptible, en fonction d'évolutions d'autres procédures en cours, d'opposer à Enedis le fait qu'elle aurait commis, dans sa relation avec les assureurs de sa responsabilité civile, une faute dolosive exclusive de garantie ; constater en conséquence qu'Allianz se réserve le droit d'opposer une exclusion de garantie ;

En tout état de cause,

- condamner la partie succombante à verser à Allianz la somme de 15 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, distraits au profit du de la SELARL Lexavoue Paris-Versailles, conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

- débouter les autres parties de leurs demandes dirigées contre Allianz faites au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 16 février 2018, la société AIG demande à la cour de :

I. Sur le fond du litige,

A titre principal :

1. Sur les demandes directes formées à l'encontre d'AIG pour la première fois en cause d'appel,

- dire que les demandes nouvelles de Solagri contre AIG Europe formée pour la première fois en cause d'appel sont irrecevables ; et

Par conséquent,

- dire et juger irrecevables les demandes de Solagri formées à l'encontre d'AIG et l'en débouter ;

- dire et juger irrecevables les demandes subisidiaires formées par Solagri et l'en débouter ;

2.En toute hypothèse,

- dire et juger que la société Solagri ne justifie pas du lien de causalité entre la faute imputée à Enedis et le préjudice allégué ni même d'un préjudice réparable ;

- dire et juger que la société Solagri ne justifie pas d'un dommage réparable dès lors les arrêtés ministériels du 10 juillet 2006 et du 12 janvier 2010 fixant les tarifs d'achat d'énergie radiative fondant son préjudice sont entachés d'illégalité faute d'avoir été notifiés à la Commission Européenne ;

En conséquence :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Solagri de l'intégralité des demandes formées à l'encontre d'Enedis ;

- débouter Solagri de l'intégralité de ses demandes formées à l'encontre d'Enedis et d'AIG en ce compris ses demandes subsidiaires;

A titre subsidiaire, si la responsabilité d'Enedis était retenue:

- dire et juger que le préjudice de Solagri ne peut être le bénéfice attendu du contrat ;

- dire et juger que le rapport d'expertise de Monsieur Y... doit être écarté;

- dire et juger que le préjudice de Solagri ne peut porter que sur sa part dans le projet (soit la moitié des revenus) ;

- dire que, compte tenu des nombreuses incertitudes sur la réalisation et l'exploitation du projet, la perte de chance ne saurait excéder 1% ;

En conséquence,

- dire et juger que le montant des dommages et intérêts ne saurait excéder 1% de la perte de marge dont seulement 50 % serait revenue à Solagri et débouter Solagri du surplus de ses demandes ;

- débouter Solagri de sa demande relative à la perte de marge au-delà de 20 ans;

- ordonner une nouvelle expertise qui sera confiée à tout expert judiciaire spécialisé en évaluation d'entreprises qu'il plaira à la cour avec pour mission de :

- convoquer les parties,

- se faire remettre tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission,

- entendre les parties ainsi que tous sachants,

- donner son avis sur le manque à gagner éventuel qui aurait été réalisé selon le tarif de l'arrêté du 12 janvier 2010, et celui qui aurait été réalisé selon le tarif de l'arrêté du 4 mars 2011, en tenant compte des économies générées par l'abandon du projet et le réemploi des fonds économisés,

- déterminer le taux d'actualisation applicable et procéder au calcul actualisé des éventuels et futurs manques à gagner,

- dire que l'expert devra adresser aux parties un projet de rapport auquel elles pourront répondre par des derniers dires dans le délai de six semaines et traiter spécifiquement, conformément aux dispositions de l'article 276 du code de procédure civile, les réponses à ces dires dans le rapport final devant être déposé;

- dire que l'expert déposera l'original de son rapport au greffe du tribunal de céans dans les six mois de sa saisine ;

- dire que cette expertise sera effectuée aux frais avancés de la société Solagri;

II. Sur l'appel en garantie d'Enedis à l'égard d'AIG,

A titre principal,

- dire et juger que les conditions de la garantie d'AIG ne sont pas réunies et, en conséquence, débouter Enedis de toute demande qui pourrait être dirigée contre AIG en ce compris dans l'hypothèse où des pratiques anti-concurrentielles étaient retenues à l'encontre d'Enedis ;

A titre subsidiaire,

- dire et juger que la police excess follow form de deuxième ligne n'a vocation à intervenir que si les dommages et intérêts alloués à Solagri du fait de l'abandon de son projet sur le domaine de Frégeneuil excède 50 millions d'euros ;

III. En tout état de cause,

- débouter Solagri de sa demande d'intérêt légal et de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouter les autres parties de leurs demandes dirigées à l'encontre d'AIG au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la partie succombante à verser à AIG la somme de 20 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Le ministère public, dans son avis notifié aux parties le 9 janvier 2018, sollicite de la cour qu'elle tire les conséquences de l'ordonnance rendue par la Cour de justice de l'Union européenne le 15 mars 2017 dans l'affaire C-515/16 et adopte les points de droit suivants ' le mécanisme de l'obligation d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché et dont le financement est supporté par les consommateurs finals d'électricité, en application des arrêtés ministériels des 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010, doit être considéré comme une intervention de l'Etat ou au moyen de ressources d'Etat. En effet, dès lors qu'il accorde un avantage aux producteurs de cette électricité, cet avantage est susceptible d'affecter les échanges entre Etats membres et d'avoir une incidence sur la concurrence ; sont ainsi réunis les critères de l'aide d'Etat au sens de l'article 107 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Les arrêtés susvisés, pris en méconnaissance de l'obligation de notification préalable à la Commission européenne résultant de l'article 108 paragraphe 3 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, sont entachés d'illégalité, et, dès lors, ne peuvent être appliqués à la présente affaire'. Il s'en rapporte enfin à la sagesse de la cour sur le caractère juridiquement réparable d'un ou de plusieurs préjudices invoqués par l'intimée, qui pourrait reposer sur un fondement autre que les arrêtés ministériels susmentionnés.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 février 2018.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures signifiées conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

1 - Sur la faute :

La société Solagri soutient pour l'essentiel que sa demande de raccordement déclarée complète le 27 août 2010 n'a pas été instruite dans les délais, que la société Enedis ne lui a pas transmis de PTF dans le délai de trois mois soit avant le 27 novembre 2010 comme elle y était obligée et que sans cette faute la société Solagri l'aurait de manière certaine acceptée avant le 1er décembre 2010, avant l'entrée en vigueur du moratoire, qu'aucune force majeure ne peut être invoquée par la société Enedis pour échapper à sa responsabilité, que la faute commise est même volontaire, le groupe EDF ayant par tous moyens veillé à protéger ses propres intérêts, qu'il a ainsi favorisé les PTF concernant EDF EN au détriment de ceux des producteurs privés, que son préjudice consiste en la perte de chance d'avoir réalisé un gain en construisant et exploitant une centrale bénéficiant du tarif de rachat de l'électricité produite fixé par l'arrêté du 12 janvier 2010, que l'indemnisation doit donc être égale au gain manqué pondéré par un coefficient de perte de chance qu'elle évalue à 90%. Elle conteste que l'arrêté préfectoral du 30 septembre 2010 ait imposé une modification du permis de construire et fait valoir au contraire que cet arrêté autorisait la construction sous la seule réserve du respect du plan d'implantation initial et du permis de construire précédemment accordé. Elle précise que les parties avaient d'ailleurs convenu de supprimer la mention du dépôt d'un nouveau permis de construire des versions ultérieures.

La société Enedis réplique qu'aucune faute ne peut lui être reprochée avant le 29 novembre 2010, qu'en effet, le 27 novembre 2010 étant un samedi, elle pouvait, sans commettre de faute, adresser la PTF le premier jour ouvrable suivant soit le 29 novembre 2010, que l'allégation selon laquelle elle aurait favorisé ses propres intérêts est mensongère, que la société Solagri confond Enedis et RTE et se fonde sur une correspondance dont elle dénature les termes.

Elle conteste tout lien de causalité entre sa prétendue faute et le préjudice allégué faisant valoir que le dépassement du délai pour transmettre la PTF aurait été sans conséquences dommageables si le décret du 9 décembre 2010 n'avait pas été pris, qu'en effet l'évolution du projet aurait nécessité de représenter une nouvelle demande de raccordement, que la nécessité de modifier le permis de construire et d'en obtenir un nouveau rendait obsolète la demande de raccordement en application de l'article 10 du référentiel Enedis, de sorte qu'elle n'aurait pas pu échapper au moratoire. Subsidiairement elle soutient que la société Solagri n'aurait jamais pu retourner la PTF avant le 1er décembre 2010, qu'enfin l'abandon du projet et la perte des revenus tirés d'un contrat d'achat conclu avec la société EDF relèvent du choix discrétionnaire et libre de la société Solagri, la société Enedis contestant que les projets aient perdu leur rentabilité en raison de la baisse des tarifs fixés à l'issue du moratoire.

La société Axa considère que le projet de la société Solagri devait faire l'objet d'une demande de modification auprès de la société Enedis, assimilable à une nouvelle demande de raccordement soumise à un nouveau délai de trois mois, de sorte que le délai de la société Enedis n'a pas commencé à courir. Elle ajoute que c'est la date de dépôt de la demande de raccordement qui est la cause du préjudice allégué par la société Solagri dès lors que si elle avait reçu une PTF le samedi 27novembre 2010, elle n'aurait eu que quatre jours, dont un week-end pour étudier la PTF et que son acceptation n'aurait pas pu parvenir à la société Enedis avant le 1er décembre 2010, que ce prétendu dommage résulte de l'instauration du moratoire puis d'un nouveau tarif par arrêté du 4 mars2011 et que la société Solagri a elle-même pris la décision d'abandonner ce projet et de se priver ainsi de toute possibilité de gain.

La société Allianz soulève à titre liminaire l'irrecevabilité des demandes subsidiaires de la société Solagri qu'aucune évolution du litige ne justifie et notamment sa mise en cause.

Elle soutient que la preuve d'un retard de la société Enedis n'est pas rapportée puisque le projet d'installation de la centrale de la société Solagri a fait l'objet de modifications successives qui auraient justifié une nouvelle demande de PTF et en conséquence un nouveau délai de trois mois, que la demande de PTF qui supposait un nouveau permis de construire ne pouvait intervenir avant le 30 septembre 2010 de sorte que la société Enedis aurait disposé d'un délai jusqu'au 30 décembre 2010 pour adresser une PTF. Elle ajoute que même à supposer que la faute de la société Enedis soit retenue, le retard dans la délivrance de la PTF ne peut être la cause de la perte alléguée, que la société Solagri n'aurait pu retourner celle-ci avant l'entrée en vigueur du moratoire et n'avait d'ailleurs aucune raison de le faire, qu'en tout état de cause le dommage a pour cause sa décision propre de ne pas poursuivre ce projet ensuite et le fait de l'Etat qui a adopté le décret du 9décembre2010.

La société AIG soulève également à titre liminaire l'irrecevabilité des nouvelles demandes formées par la société Solagri pour la première fois en cause d'appel à son encontre. Elle soutient que la date de qualification du 27 août 2010 est inapplicable à la demande de raccordement, le projet d'installation de la centrale devant faire l'objet de modifications substantielles pour pouvoir être réalisé, que la société Solagri reconnaît elle-même que le 13 décembre 2010 elle en était à la cinquième version du projet de contrat de conception et de construction de la centrale, que le projet n'était donc pas finalisé à cette date, que le délai de trois mois n'a donc jamais commencé à courir. Elle ajoute que la société Solagri ne démontre pas qu'elle aurait pu échapper au moratoire en acceptant la PTF avant le 1er décembre 2010, que la célérité dont elle a fait preuve après le communiqué de presse du 2 décembre 2010 s'explique seulement par l'annonce du moratoire, que le lien de causalité entre la prétendue faute et le préjudice n'est donc pas démontré.

Il résulte de la délibération de la commission de régulation de l'énergie du 11 juin 2009 portant décision sur les règles d'élaboration des procédures de traitement des demandes de raccordement au réseau public de distribution d'électricité et le suivi de leur mise en oeuvre et de son annexe 1 que la société ERDF, devenue Enedis, avait l'obligation de transmettre aux demandeurs une PTF dans un délai n'excédant pas trois mois à compter de la réception de sa demande de raccordement complète.

L'article 7.2.3 de la procédure de traitement des demandes de raccordement individuel d'Enedis applicable à compter du 3 juillet 2010 (ERDF-PRO-RAC 14E version v.o.) pour les installations d'une puissance supérieure à 36 va, prévoit que ' A l'issue de cet examen et lorsque le dossier est complet, la demande de raccordement est qualifiée. La date de qualification de la demande de raccordement est fixée à la date de réception du dossier lorsque celui-ci est complet ou à la date de réception de la dernière pièce manquante. ERDF confirme par courrier postal ou électronique au demandeur que son dossier est complet. A cette occasion, ERDF communique également la date de qualification de sa demande de raccordement... ainsi que le délai d'envoi de l'offre de raccordement'.

L'article 8.2.1 de ce document précise qu' 'à compter de la date de qualification de la demande de raccordement, le délai de transmission au demandeur de l'offre de raccordement... n'excédera pas trois mois quel que soit le domaine de tension de raccordement'.

Ainsi, sur le fondement des dispositions de l'article 1382, devenu 1240, du code civil, la société Enedis commet une faute délictuelle lorsque le délai de trois mois dont elle dispose pour adresser une PTF à un candidat au raccordement au réseau électrique n'est pas respecté.

Ce délai maximum de trois mois se calcule à partir de la date de la réception par la société Enedis du dossier complet de demande de raccordement et s'apprécie à la date de réception de la PTF par le demandeur.

En l'espèce, les pièces versées aux débats établissent que la société Solagri a confié à la société Ineo réseaux centre ouest (la société IRCO) la conception et la construction d'un parc photovoltaïque, que la société Enedis a adressé le 27 août 2010 à M. Jérôme I..., représentant la société IRCO un courriel validant le dossier et fixant la date de complétude au 27 août 2010, que le 4 décembre 2010, en l'absence de réception d'une PTF la société Solagri a adressé à la société Enedis un courrier se plaignant de ce retard et accompagné d'un chèque de 13 000 euros, qu'après réception d'une PTF le 10 décembre 2010, la société Solagri a retourné la PTF le 11 décembre et adressé un chèque complémentaire.

Il est donc constant que la société Enedis n'a pas envoyé de PTF à la société Solagri dans le délai de trois mois ayant commencé à courir le 27 août2010, date à laquelle la société Enedis a considéré que la demande de raccordement était complète.

En manquant à son obligation d'adresser une PTF à la société Solagri dans le délai de trois mois prévu par les textes, soit le samedi 27novembre2010 minuit au plus tard, la société Enedis a commis une faute.

Les moyens relatifs au caractère volontaire de la faute n'étant développés que 'surabondamment et pour simple illustration', il n'y a pas lieu d'y répondre.

2-Sur le lien de causalité :

L'article 1er du décret du 9 décembre 2010 a suspendu l'obligation de conclure un contrat d'achat à compter de l'entrée en vigueur de ce décret, soit le 10 décembre 2010. L'article 3 écarte l'application de cette suspension pour les producteurs ayant notifié leur acceptation de la PTF avant le 2 décembre 2010.

La faute de la société Enedis n'est constituée qu'à l'expiration du délai de trois mois dont elle disposait pour envoyer une PTF, soit le 27 novembre2010 à minuit.

En l'absence de retard de la société Enedis dans l'envoi de la PTF, la société Solagri aurait dû renvoyer la PTF complétée de l'acompte avant le mercredi 1er décembre 2010 minuit pour échapper au moratoire et ne pas subir le préjudice allégué. Elle aurait donc disposé de quatre jours pour procéder à cette formalité. Elle justifie qu'elle aurait été en mesure de le faire puisque, ayant reçu le 10 décembre 2010 la PTF, elle l'a retournée le lendemain.

Cependant, il ressort des pièces versées aux débats et notamment de l'arrêté du préfet de la région Poitou-Charente du 30 septembre 2010, que si un permis de construire a bien été accordé le 16 juin 2010, sous réserve de la réalisation d'un diagnostic archéologique, la société Solagri a écrit le 22 septembre 2010 au préfet 'en précisant le dernier état du dossier technique concernant son projet de centrale, réduisant de façon notable l'impact au sol du projet d'aménagement', ce qui a justifié l'abrogation par le préfet de l'arrêté du 23 février 2010 prescrivant ce diagnostique, 'sous réserve du respect du mode opératoire proposé pour les travaux à réaliser dans le courrier de l'aménageur du 22 septembre 2010".

Si cet arrêté n'exige aucune modification du permis de construire il est cependant établi que la société Solagri et la société IRCO ont convenu de modifier ce permis de construire, pour, selon les termes même du projet de contrat de conception établi entre les sociétés Solagri et IRCO le 13 décembre 2010, prendre en compte les servitudes demandées par la société Enedis pour l'accès à la ligne HTB. M. Jérôme I... rappelle d'ailleurs dans son attestation du 14 décembre 2015 que les négociations entre la société IRCO et la société Solagri se sont prolongées jusqu'en décembre 2010 par la réalisation d'une sixième version du contrat le 17 décembre 2010.

La nécessité pour la société Solagri de présenter une demande de permis de construire modificatif est suffisamment établie par les termes de ce projet qui précise que la société Solagri a obtenu un permis de construire sur la base de plans d'implantation rédigés par elle-même, que la société IRCO a conçu le parc photovoltaïque selon un plan d'implantation différent de celui imposé par le permis de construire initial et l'arrêté du 30 septembre 2010 et que la société Solagri se fait fort d'obtenir un permis de construire modificatif 'tel que décrit en annexe 1 et notamment selon le plan d'implantation défini par le prestataire'. La modification de l'implantation nécessitait donc une nouvelle autorisation de construire, l'arrêté du 30 septembre 2010 ayant expressément soumis cette autorisation au respect de l'implantation initialement convenue.

L'attestation de M. I... directeur de la société IRCO selon laquelle 'les servitudes consistaient seulement à libérer un mince passage dns le champ de panneaux solaires pour permettre l'accès des techniciens RTE à la ligne Haute tension sans incidence technique sur l'implantation de la centrale, pas plus que sur ses capacités de production', et affirmant que 'ce point pouvait être résolu sans toucher au permis de construire' est en tout point contraire aux mentions du projet de contrat versé aux débats et n'est corroboré par aucune autre des pièces produites.

Or, ainsi que le soutient la société Enedis, le chapitre 10 du référentiel ERDF-PRO-RAC 14E, V.1.0 relatif aux demandes de modification des demandes de raccordement, dispose d'une part que la demande de modification reçue après la qualification de la demande initiale est traitée selon les dispositions définies à l'article 7.2 de la procédure de traitement des demandes de raccordement notamment quant à la date de sa qualification et d'autre part qu'à compter de la réception de l'accord du demandeur sur le devis de reprise d'étude, le délai de transmission au demandeur du résultat de la reprise d'étude ne dépassera pas trois mois quel que soit le domaine de tension de raccordement, qu'enfin 'lorsqu'une demande de modification est présentée après la qualification de la demande initiale et avant acceptation de l'offre de raccordement, ERDF met fin au traitement de la demande initiale, et la demande de modification constitue une nouvelle demande de raccordement qui recevra une nouvelle date de qualification correspondant à la date de la demande de modification'.

Il résulte de ce qui précède, d'une part que la PTF demandée le 27 août 2010, même parvenue dans le délai de trois mois ne pouvait servir pour la conclusion d'une convention de raccordement puis d'un contrat d'achat d'électricité pour la centrale à construire, et d'autre part que la modification du projet initial avec obtention d'un nouveau permis de construire aurait mis fin à la procédure de raccordement et nécessité une nouvelle demande et ce en application de la procédure de traitement des demandes de raccordement et non du décret moratoire.

Le préjudice allégué constitué d'une perte de chance d'avoir réalisé un gain en construisant et exploitant une centrale bénéficiant du tarif de rachat de l'électricité produite fixé par l'arrêté du 12 janvier 2010, à supposer qu'il soit licite, n'a donc pas pour cause déterminante le retard de la société Enedis dans l'envoi d'une PTF mais la modification du projet initial par la société Solagri, la nécessité de présenter une nouvelle demande pour l'obtention d'une nouvelle PTF laquelle aurait été soumise aux nouvelles dispositions, la suspension prévue par le décret du 9décembre2010 ainsi que la baisse des tarifs résultant de l'arrêté du 4mars2011 et la mise en place d'une procédure d'appel d'offres pour les centrales d'une puissance supérieure à 100 kW, ce qui est le cas de la centrale en cause.

Le lien de causalité entre la faute de la société Enedis et le préjudice invoqué par la société Solagri n'est donc pas établi.

Il convient en conséquence et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens et demandes de confirmer le jugement en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant contradictoirement,

Dit que la société Enedis a commis une faute à l'égard de la société Solagri;

Dit que le lien de causalité entre cette faute et le préjudice allégué par la société Solagri n'est pas établi ;

Confirme en conséquence le jugement en toutes ses dispositions;

Y ajoutant,

Condamne la société Solagri à payer à la SA Enedis la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Solagrià payer à la société Axa corporate solutions assurances la somme de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne la société Solagri à payer à la société Allianz global corporate et speciality la somme de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne la société Solagri à payer à la société AIG Europe Ltd la somme de 6000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne la société Solagri aux dépens d'appel et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre le droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sophie M..., Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 17/02345
Date de la décision : 04/07/2018

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles 13


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-07-04;17.02345 ?
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