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22/02/2018 | FRANCE | N°17/03986

France | France, Cour d'appel de Versailles, 14e chambre, 22 février 2018, 17/03986


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 64B



14e chambre



ARRÊT N°



contradictoire



DU 22 FÉVRIER 2018



N° RG 17/03986



AFFAIRE :



SAS MDY prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège





C/



A.ST.A. WORLD-WIDE association internationale agissant en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siège









Décision déférée

à la cour : Ordonnance rendue le 10 Mai 2017 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES





N° RG : 2017R00099



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Michèle DE KERCKHOVE



Me Martine DUPUIS

EXPER...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 64B

14e chambre

ARRÊT N°

contradictoire

DU 22 FÉVRIER 2018

N° RG 17/03986

AFFAIRE :

SAS MDY prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

C/

A.ST.A. WORLD-WIDE association internationale agissant en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siège

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 10 Mai 2017 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° RG : 2017R00099

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Michèle DE KERCKHOVE

Me Martine DUPUIS

EXPERTISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT-DEUX FÉVRIER DEUX MILLE DIX HUIT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SAS MDY prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 775 708 415

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Michèle DE KERCKHOVE de la SELARL BVK AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.26 - N° du dossier 17518225 -

assistée de Me Urielle SEBIRE, avocat au barreau de LISIEUX

APPELANTE

****************

A.ST.A. WORLD-WIDE association internationale agissant en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1757827

assistée de Me Jean-Dominique TOURAILLE de la SCP BAKER & MC KENZIE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0445 -

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 décembre 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Maïté GRISON-PASCAIL, conseiller chargé du rapport et Madame Odette-Luce BOUVIER, président,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Odette-Luce BOUVIER, président,

Madame Maïté GRISON-PASCAIL, conseiller,

Madame Florence SOULMAGNON, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Agnès MARIE,

EXPOSE DU LITIGE

L'association A.St.A World-Wide est une association internationale regroupant des fabricants de pierres agglomérées aux fins de représentation et de promotion de l'activité de ses membres et en particulier de la fabrication de plans de travail en quartz.

La SAS MDYexploite une société de marbrerie spécialisée dans la création et la fourniture de matériaux et autres aménagements intérieurs et extérieurs. Elle fabrique notamment des plans de travail en marbre, granit et pierre naturelle et quartz de synthèse.

Alertée sur les dangers que pourraient présenter les quartz de synthèse pour la santé de ses employés qui les façonnent, la société MDY a sollicité une étude auprès de l'Institut de recherche et d'expertise scientifique de [Localité 1] (IRES), lequel a rendu deux rapports les 9 décembre 2016 et 25 janvier 2017, confirmant la présence de composants dangereux dans ce matériau.

Le président de la société MDY, M. [E], a alors publié sur le site de la société ainsi que sur les réseaux sociaux les résultats de ces rapports.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 2 mars 2017, l'association A.St.A World-Wide a mis en demeure la société MDY de retirer du site internet et des réseaux sociaux 'les propos dénigrant le quartz et en particulier tout article et toute information faisant état directement ou indirectement aux études scientifiques susvisées'.

La société MDY n'a pas satisfait à la mise en demeure, contestant publier de fausses informations concernant la nocivité du quartz.

Face au refus opposé par la société MDY de cesser sa campagne qu'elle qualifie de dénigrement constitutif de concurrence déloyale, l'association A.St.A World-Wide, autorisée par requête du 13 avril 2017, a fait assigner en référé à heure indiquée la société MDY pour l'audience du 19 avril 2017 afin d'obtenir sous astreinte des mesures conservatoires de retrait et d'interdiction de diffusion de ces informations au visa de l'article 873, alinéa 1, du code de procédure civile et subsidiairement, la désignation d'un expert judiciaire.

Par ordonnance contradictoire rendue le 10 mai 2017, le juge des référés du tribunal de commerce de Versailles a :

- ordonné la cessation par la société MDY de la diffusion, sous quelque forme que ce soit, de tout propos dénigrant le quartz,

- ordonné la suppression de tout article et toute information faisant état directement ou indirectement des études scientifiques menées par l'IRES ainsi qu'à une prétendue nocivité du quartz publiés sur le site internet de la SAS MDY (www.mdy-france.com), sur le ' blog' de M. [Y] [E] (http://.mdy-france.com/blog-[Y]-[E]/) ainsi que sur tous Îes réseaux sociaux et professionnels à compter de la signification de l'ordonnance et ce, sous astreinte provisoire de 2 000 euros par jour de retard et pour une durée de trente jours à l'issue de laquelle la demanderesse en demandera le renouvellement au juge de l'exécution si nécessaire,

- ordonné la publication du dispositif de l'ordonnance à intervenir sur la page d'accueil du site internet de la société MDY, sur la page d'accueil du 'blog' de M. [E] et ce pendant une durée d'un mois ininterrompue ainsi que dans le prochain magazine 60 millions de consommateurs à paraître, sous le titre « condamnation de la société MDY pour dénigrement à l'encontre des fabricants de quartz » aux frais avancés de la société MDY, dans un délai de huit jours à compter de la signification de l'ordonnance et sous astreinte provisoire de 2 000 euros par jour de retard, pour une durée de trente jours à l'issue de laquelle la demanderesse en demandera le renouvellement au juge de l'exécution si nécessaire,

- dit que la liquidation de l'astreinte reviendra au juge de l'exécution,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la société MDY à payer à l'association A.St.A World-Wide la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société MDY aux dépens.

Le 24 mai 2017, la société MDY a relevé appel de la décision.

Dans ses conclusions reçues au greffe le 23 novembre 2017, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société MDY, appelante, demande à la cour de :

- réformer cette décision en toutes ses dispositions,

Sur la demande principale

- débouter l'association A.St.A World-Wide de l'ensemble de ses demandes,

Sur l'expertise

- ordonner une mesure d'expertise aux frais avancés de l'association A.St.A World-Wide,

- désigner en qualité d'expert un laboratoire national indépendant, avec pour mission de :

*se faire remettre les échantillons de quartz de synthèse objet des analyses de l'IRES et tous autres échantillons de quartz de synthèse pouvant servir à la fabrication de plans de cuisine, échantillons recueillis par l'expert lui-même au sein des fabricants,

*en identifier le contenu et distinguer chaque matériau le composant,

*déterminer la concentration en arsenic, zinc, plomb, et autres substances du groupe 1, 2a, 2b, 3 et 4, en quelle quantité et préciser les substances avec effet perturbateur endocriniens, ainsi que les effets mutagènes et reprotoxique outre les effets cocktail,

- déterminer la dangerosité de ces produits au contact des aliments et leur mutabilité dans le cadre d'une utilisation en plan de cuisine,

En tout état de cause,

- réformer l'ordonnance de référé en ce qu'elle l'a condamnée à verser à l'association A.St.A World-Wide la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'association A.St.A World-Wide à lui verser la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'association A.St.A World-Wide aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, la société MDY fait valoir esssentiellement :

- que les conditions de l'article 873, alinéa 1, du code de procédure civile ne sont pas remplies, en l'absence d'urgence et de trouble caractérisé ;

- qu'elle n'est pas une concurrente des fabricants de quartz de synthèse mais distribue différents matériaux ; qu'il n'existe pas d'actes de dénigrement, puisque l'information donnée est exacte ; qu'elle se doit, au nom du principe de précaution, d'alerter le consommateur de la nocivité de certains quartz utilisés pour les plans de travail de cuisine qu'elle commercialise ; qu'elle entend alerter non pas sur tous les quartz mais sur ceux destinés à la réalisation de plans de cuisine susceptibles d'être en contact avec les aliments consommés ;

- que l'information diffusée est objective en ce qu'elle émane d'un institut scientifique régulièrement choisi par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (la DGCCRF) pour ses propres contrôles ; que l'association World Wide diffuse elle-même aux distributeurs des informations sécurité sur les risques encourus par certains produits ; qu'il n'en est rien concernant le quartz de synthèse qui contient pourtant des produits cancérigènes, tels que le cadmium ;

- que l'analyse critique des rapports de l'IRES faite par un expert mandaté par World Wide, M. [U], est discutable, en ce qu'il prétend que le matériau n'est pas dangereux avec une utilisation normale; qu'elle ne porte que sur la méthode qui a été suivie par le laboratoire ; que seule la composition du matériau importe, sachant que les consommateurs sont amenés à découper eux-mêmes les plaques de quartz pour réaliser leur plan de travail de cuisine ou de salle de bain ;

- que l'analyse de M. [U] a été soumise à l'IRES, qui est un laboratoire spécialisé dans les domaines de la santé et de l'environnement et certifié ;

- qu'elle a saisi le ministère de la santé par lettre du 2 mars 2017, lequel a saisi l'Agence française de sécurité sanitaire (ANSES) qui diligente actuellement une enquête ; que le journal '60 millions de consommateurs' a fait un article sur cette question ;

- qu'il n'existe pas plus de dommage imminent pour World Wide de voir des retombées sur la commercialisation de ses produits, alors qu'il existe un risque sanitaire que les sociétés membres de l'association ont bien perçu puisqu'elles retirent actuellement chez leurs dépositaires les plans de cuisine en quartz de synthèse ;

- qu'une mesure d'expertise judiciaire, aux frais avancés de World Wide, doit être ordonnée.

Dans ses conclusions reçues le 6 décembre 2017, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, l'association A.St.A World-Wide, intimée, demande à la cour de :

A titre principal :

- confirmer l'ordonnance de référé du président du tribunal de commerce de Versailles du 10 mai 2017 en toutes ses dispositions,

A titre subsidiaire :

- désigner tel expert judiciaire qu'il plaira à la cour de nommer, avec pour mission de :

*se faire communiquer tous documents et pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,

*entendre les parties en leurs dires et observations, et éventuellement tout sachant dont l'audition serait utile,

*donner son avis sur la qualité des plans de travail à base de quartz,

*dire si le quartz présente une quelconque dangerosité,

*effectuer si nécessaire tout test et vérification à cet effet sur un échantillon,

*dresser un constat précis après ces premières constatations et observations sous forme d'un pré-rapport qui devra être adressé aux parties dans un délai d'un mois à compter de la date de sa saisine afin de lui permettre de prendre toutes mesures pour faire suspendre la campagne de dénigrement lancée par la SAS MDY,

*fournir d'une façon générale tous éléments techniques ou de fait de nature à permettre à la juridiction du fond éventuellement saisie de se prononcer sur les responsabilités encourues et les préjudices subis,

- dire que l'expert pourra s'adjoindre tous sapiteurs s'il l'estime nécessaire à l'accomplissement de sa mission,

- fixer la provision à valoir sur les frais afférents à la mesure d'instruction sollicitée dont la requérante fera l'avance,

- renvoyer la présente affaire à six semaines pour voir ordonner toute mesure utile au regard du pré-rapport remis entretemps par l'expert judiciaire désigné,

- réserver les dépens.

En tout état de cause :

- débouter la société MDY de ses demandes,

- condamner la société MDY à lui verser la somme de 40 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société MDY aux entiers dépens.

L'association World Wide soutient essentiellement :

- que l'urgence n'est pas requise pour l'application de l'article 873, alinéa 1, du code de procédure civile ;

- que le comportement déloyal de la société MDY est constitutif d'un trouble manifestement illicite; que le dénigrement consiste à jeter le discrédit non seulement sur la personnalité d'un concurrent mais également sur un produit pour en tirer un profit ; que la société MDY a diffusé les rapports de l'IRES précisément pour jeter le discrédit sur les plans de travail en quartz fabriqués par les membres de l'association World Wide ;

- que l'origine des échantillons de matériau à base de quartz fournis par la société MDY à l'IRES n'est pas établie ; que le procédé utilisé, consistant à marteler chaque échantillon avec un burin et un marteau en acier inoxydable afin d'obtenir une poudre n'est pas usuel et risque de contaminer l'échantillon par des particules d'acier ; qu'en outre, cette méthode est sans lien avec les conditions normales et réelles d'utilisation d'un plan de travail, ce qui a été confirmé par la DGCCRF au journal '60 millions de consommateurs' ;

- que les deux expertises techniques qu'elle a diligentées révèlent que les études de l'IRES sont hautement critiquables, dès lors que l'utilisation faite des plans de travail est déterminante ; que les produits critiqués font l'objet de nombreuses certifications ; que les produits commercialisés sont notamment conformes à la réglementation européenne REACH et certifiés NSF pour toutes sortes d'aliments pour des températures allant jusqu'à 149°C ; que des analyses régulières sont faites pour permettre de continuer à bénéficier des certifications ;

- que la campagne de dénigrement de la société MDY est totalement infondée en ce qu'elle vise, non pas à informer le consommateur sur un danger, mais à l'orienter, par des méthodes déloyales, vers les produits qu'elle commercialise, notamment le granit ;

- que malgré l'interdiction prononcée par le premier juge, la société MDY a continué ses agissements en publiant un article 'Alerte sanitaire' en mai 2017 ;

- qu'il est mensonger de prétendre que les consommateurs vont découper des plaques de quartz, seuls les professionnels qualifiés manipulant et installant ces plans de travail ; que la société MDY tente ainsi de changer de débat en se prévalant désormais des risques professionnels qui ne sont pas plus démontrés ;

- que la campagne de dénigrement est menée depuis plus d'un an et vise expressément les consommateurs en créant une alerte sanitaire artificielle ; qu'il n'existe aucun retrait des ventes par les sociétés membres de World Wide comme allégué par l'appelante ; que les informations diffusées par la société MDY sont susceptibles de porter une atteinte irrémédiable à la réputation commerciale de ses membres et à la pérennité de leur activité économique ; que déjà, certains ditributeurs ont suspendu la distribution de leurs produits ;

- que malgré ses messages alarmants, la société MDY a continué à commander des plans de travail à base de quartz auprès des membres de l'association, ce qui démontre le caractère artificiel de l'alerte sanitaire qui a été créée ;

- que c'est à bon droit que le premier juge a ordonné des mesures destinées à faire cesser le trouble subi par World Wide ;

- que subsidiairement, si la cour venait à 'réformer' l'ordonnance, il conviendrait de désigner un expert judiciaire en lui demandant d'établir un pré-rapport dans le délai d'un mois à compter de sa saisine afin de permettre à World Wide de faire cesser la campagne de dénigrement lancée par la société MDY.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 7 décembre 2017.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon l'article 873, alinéa 1, du code de procédure civile, 'le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.'

Le dommage imminent s'entend du dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer  et le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

Il s'ensuit que pour que la mesure sollicitée soit prononcée, il doit nécessairement être constaté, à la date à laquelle le premier juge a statué et avec l'évidence qui s'impose à la juridiction des référés, l'imminence d'un dommage, d'un préjudice ou la méconnaissance d'un droit, sur le point de se réaliser et dont la survenance et la réalité sont certaines, qu'un dommage purement éventuel ne saurait donc être retenu pour fonder l'intervention du juge des référés ; la constatation de l'imminence du dommage suffit à caractériser l'urgence afin d'en éviter les effets.

Ainsi, contrairement à ce qui est soutenu par la société MDY, l'urgence n'a pas à être caractérisée pour l'application des dispositions susvisées.

Selon une définition couramment admise, le dénigrement consiste à jeter publiquement le discrédit sur les produits, l'entreprise ou la personnalité d'un concurrent pour en tirer profit.

La chambre commerciale de la Cour de cassation a encore défini le dénigrement comme 'la divulgation d'une information de nature à jeter le discrédit sur un concurrent, peu important qu'elle soit exacte' (Com, 24 septembre 2013, n° 12-19.790), le dénigrement constituant un moyen concurrentiel déloyal, constitutif d'une faute délictuelle ouvrant droit à réparation dans les conditions de l'article 1240 du code civil (anciennement 1382 du code civil).

Le dénigrement peut encore être collectif et atteindre un ensemble de commerçants ou d'industriels, une profession toute entière ou même un secteur entier de l'économie.

Le dénigrement suppose un message critique qui soit diffusé, impliquant la connaissance des faits reprochés par la clientèle. L'exactitude des propos tenus ne fait pas disparaître leur caractère éventuellement malveillant.

Il en résulte qu'il est inopérant en l'espèce pour la société MDY de contester les actes de dénigrement qui lui sont imputés aux motifs d'une part, qu'elle n'est pas une concurrente directe de l'association World Wide et de ses membres, fabricants de quartz de synthèse, puisque le message litigieux porte, en l'espèce, sur un produit et d'autre part, que les informations publiées seraient exactes.

Il convient toutefois d'examiner, dans le présent litige, l'existence d'un trouble manifestement illicite ou d'un dommage imminent tiré du dénigrement allégué à la lumière des principes sus mentionnés mais également de ceux régissant l'affirmation par le législateur d'un droit d'alerte en matière de santé publique et d'environnement, l'appelante se prévalant expressément d'une 'alerte sanitaire' que conteste l'intimée.

Il est acquis aux débats :

- qu'à compter du mois de janvier 2017, la société MDY a publié sur son site internet ainsi que sur les réseaux sociaux tels que 'Facebook' les résultats des deux rapports établis par l'IRES tendant à démontrer que l'utilisation du quartz de synthèse exposerait le consommateur à des risques pour sa santé ; que de même, M. [E], président directeur général de la société MDY, a publié sur son compte 'Twitter' et sur son 'blog', des articles faisant état du danger présenté par les plans de cuisine en quartz de synthèse, qui ont des composants cancérigènes et mutagènes, tel un article intitulé 'Alerte de nocivité : les plans de cuisine en quartz de synthèse sont dangereux' publié le 2 février 2017 (pièces 5-6-7 intimée), relayé dans le magazine '60 millions de consommateurs' du 8 mars 2017 par l'affirmation que 'cette matière est non seulement dangereuse pour la santé lors du façonnage mais également lors de l'utilisation quotidienne en cuisine',

- que la société MDY a cessé de vendre des plans de travail de cuisine en quartz pour privilégier des matériaux naturels, tels que le granit, dont M. [E] souligne sur son 'blog' sur ses comptes 'Twitter', 'Facebook,' et sur le site internet MDY les qualités et l'absence de nocivité,

- que depuis cette alerte 'nocivité' comme l'intitule M. [E] lui-même, plusieurs de ses distributeurs ont suspendu la commercialisation de ce matériau, en application du principe de précaution (pièces 17 et 18 intimée).

Si des risques professionnels ont été mis en évidence dans plusieurs pays pour la santé de ceux qui travaillent le quartz de synthèse, liés à la présence importante de silice cristalline dans le matériau, la cour relève que le message diffusé publiquement par la société MDY porte exclusivement sur les dangers que présenterait l'utilisation au quotidien par les consommateurs de plans de travail de cuisine en quartz de synthèse.

L'appelante se fonde sur les deux rapports établis les 9 décembre 2016 et 25 janvier 2017 qu'elle a commandés auprès de l'IRES, qui concluent en ces termes :

'Un nombre important de substances potentiellement dangereuses pour la santé a été mise en évidence dans le matériau soumis à l'essai.

Les COV [composés organiques volatils] et les COSV [composés organiques semi-volatils] (HAP, phtalates...) sont susceptibles de contaminer l'air ambiant par simple chauffage du matériau. De plus, en raison de sa teneur élevée en métaux lourds (cadmium), il ne peut pas être considéré comme un déchet inerte/non dangereux.

En conséquence, il est recommandé :

* de limiter l'utilisation du matériau ;

* d'éviter une utilisation domestique ou professionnelle du matériau ;

* de porter des équipements de protection individuels (EPI) adaptés lors de la manipulation et du travail du matériau (découpe) ;

* de considérer le matériau comme un déchet dangereux.'

Toutefois, est contestée par l'intimée l'utilisation de ces conclusions par la société MDY pour dénoncer le danger que représenterait l'exposition du consommateur à un risque sanitaire par l'utilisation d'un plan de travail de cuisine en quartz de synthèse, l'Association A.St.A World-Wide critiquant la méthodologie suivie par l'institut, les scientifiques de l'IRES ayant broyé des échantillons solides de quartz de synthèse fournis par la société MDY pour les réduire en poudre fine et procéder à l'analyse de leurs composants.

En effet, les rapports de l'IRES sont fortement critiqués par deux experts mandatés par l'association World Wide, M. [P] [U], qui a établi deux rapports les 10 avril et 9 octobre 2017 (pièces 11 et 33 intimée) et M. [J] [J] dans un rapport du 21 novembre 2017 (pièce 34 intimée), qui soulignent notamment le caractère totalement subjectif des conclusions qui ne reposent sur aucun test de risque de contamination des aliments et de l'air par le matériau, l'absence de certification de l'IRES pour l'analyse de matériaux solides et de compétence pour juger de l'adaptation du matériau à son usage et l'extrapolation qui est faite des résultats d'analyse effectués sur des échantillons broyés, et qui précisent encore qu'à supposer que les résultats soient fiables, ils ne permettent pas en tout état de cause de caractériser la dangerosité alléguée, 'des composés 'emprisonnés' dans la masse y restant à jamais et d'autres pouvant s'en échapper extrêmement lentement, en restant en dessous des seuils de toxicité définis par les normes et réglementations'.

M. [J] indique notamment que les essais doivent être conduits sur des plaques afin de tenir compte du phénomène essentiel d'échanges entre la surface de la plaque et le milieu extérieur et que les méthodes d'analyse de l'IRES sont totalement inadaptées pour démontrer qu'il existe un danger potentiel sur la santé ; que ses conclusions et recommandations sont 'inutilement alarmistes et fortement excessives'.

Quant à la DGCCRF, interrogée par le magazine '60 millions de consommateurs' le 8 mars 2017, elle qualifie également les conditions dans lesquelles ont été menés les tests de l'IRES de 'drastiques' et 'non comparables avec les conditions réelles d'utilisation', ajoutant 'qu'il n'est pas certain que le quartz [naturel] ou le granit extraits ne conduisent pas à des résultats similaires en termes de composition, avec de telles conditions d'extraction, sans que leur sécurité ait été remise en cause'.

M. [D] de l'IRES, lui-même, dans sa réponse aux critiques faites par M. [U], mandaté par l'association World Wide, ne contredit pas cette critique car il rappelle expressément qu'il ne s'est agi nullement de réaliser des tests de conformité dans 'des conditions normales d'utilisation' mais simplement de déterminer la composition des matériaux analysés (pièce 8 MDY) ; que l'étude 'n'a pas été orientée pour évaluer les migrations des substances, contenues dans les matériaux, dans l'air ou dans les denrées alimentaires en contact avec les matériaux'

La cour relève qu'il résulte néanmoins de ces analyses techniques que le matériau de quartz de synthèse comporte de nombreuses substances potentiellement dangereuses pour la santé, tel le cadmium retrouvé en concentration importante ; qu'en dépit des critiques concernant la méthodologie enployée par l'IRES pour émettre ses conclusions et des diverses certifications requises obtenues par les fabricants pour ce matériau, le risque d'un danger pour la santé des consommateurs qui utilisent au quotidien un plan de travail de cuisine en quartz de synthèse ne peut être écarté, en l'état actuel des connaissances scientifiques sur la question.

Ce risque pour la santé peut être d'autant moins écarté qu'il est à ce jour démontré que des salariés de différents pays qui façonnent et découpent les plaques de quartz de synthèse, et les installent chez des particuliers, dont il ne peut être exclu qu'ils procèdent par eux-mêmes à ces découpes, ont présenté des troubles graves et pour certains, sont atteints de silicose, l'Agence nationale de la santé et de la sécurité alimentaire (l'ANSES) s'étant autosaisie de la question des

dangers et risques relatifs à la silice cristalline, menant actuellement une étude de filière afin d'identifier les différents usages de cette substance, y compris au stade de la commercialisation de produits en contenant et à l'égard du consommateur.

La cour observe également que si l'association World Wide produit aux débats des analyses critiques des rapports de l'IRES, elle ne fournit aucune expertise en condition d'utilisation réelle qui permettrait d'écarter tout risque sanitaire pour les consommateurs.

Il ne peut donc être reproché, en l'état, au dirigeant de la société MDY, M. [E], d'avoir diffusé, à la lumière des rapports de l'IRES, une mise en garde publique sur un matériau que la société a cessé de vendre, convaincue du risque de sa nocivité, en alertant parallèlement la ministre des affaires sociales et de la santé, par un courrier du 1er février 2017, et la direction de l'évaluation des risques de l'ANSES.

Cette démarche relève de la nécessaire information du consommateur que la société MDY et M. [E] estiment de leur devoir de donner, qui doit être mise en regard avec le droit d'alerte en matière de santé publique et d'environnement reconnu par la loi à toute personne physique et morale qui estime de bonne foi devoir diffuser une information concernant un fait, une donnée ou une action dont la méconnaissance lui paraît faire peser un risque grave sur la santé publique ou l'environnement.

Au regard de ce droit d'alerte et des interrogations persistantes et légitimes sur la nocivité pour la santé du consommateur du quartz de synthèse utilisé pour les plans de travail de cuisine, n'est pas établi, avec l'évidence requise en référé, le caractère manifeste du dénigrement reproché à la société MDY par l'association intimée, qui soutient que la société, dont la mauvaise foi ou la déloyauté est manifeste, n'aurait pour seul but que de nuire à ses concurrents pour promouvoir ses propres produits, en raison notamment de l'éventuelle inexactitude des dangers dénoncés du quartz de synthèse, tels que révélés par les rapports de l'IRES,

En effet, si M. [E], après avoir modifié l'axe commercial de la société MDY en 2013 compte tenu du doute qu'il avait de l'inocuité des produits en quartz de synthèse, évoque dans son 'blog' des alternatives au matériau décrié, en recommandant notamment le granit 'aujourd'hui plébiscité par tous les grands chefs étoilés qui ne trouvent pas mieux pour faire la cuisine sainement', ses propos ne dépassent pas pour autant, avec l'évidence requise en référé, le droit de la libre critique, le fait de défendre ses produits dits 'naturels' n'étant pas en soi déloyal en ce qu'il répond à des intérêts légitimes de défense du consommateur.

En outre, l'information qui a pu être dispensée ponctuellement par des représentants de la société MDY, qui se sont rendus chez ses distributeurs, ne peut être qualifiée, de manière incontestable, de démarche s'inscrivant dans une campagne de dénigrement, mais au contraire relever d'un devoir de conseil à l'égard des distributeurs, dès lors qu'il apparaît à la société MDY, qu'à la lumière des rapports de l'IRES, la dangerosité du quartz de synthèse fait peser un risque grave sur la santé publique et l'environnement, étant rappelé que l'IRES estime que ce matériau doit être considéré comme un déchet dangereux lors de sa dépose.

Ainsi au regard des éléments produits, en l'état, il n'y a pas lieu de retenir, contrairement à ce que soutient l'association World Wide, que, de toute évidence, M. [E] a entendu créer une 'alerte sanitaire artificielle' en manipulant les faits et données qu'il a recueillis à des fins purement commerciales, pour convaincre le consommateur de substituer au quartz de synthèse les matériaux que la société MDY commercialise, et qu'il s'est ainsi rendu coupable d'agissements concurrentiels fautifs, constitutifs d'un trouble manifestement illicite.

N'est pas plus démontrée l'imminence certaine d'un dommage pour l'association World Wide, qui invoque des retombées commerciales résultant de la mise en garde adressée par la société MDY aux consommateurs, alors même que l'existence d'un risque sanitaire justifie en soi l'information qui est donnée et que le préjudice allégué n'étant nullement établi.

Il résulte de l'ensemble de ces constatations et énonciations que l'alerte sanitaire lancée par la société MDY, bien que n'étant pas justifiée en l'état avec la rigueur scientifique requise, ne peut être qualifiée d'acte de dénigrement, caractérisant une concurrence déloyale constitutive d'un trouble manifestement illicite.

Si les mesures d'interdiction prononcées par le premier juge doivent dès lors être infirmées, en l'absence de trouble manifestement illicite et de dommage imminent caractérisés, en revanche, il existe un motif légitime, au sens des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile, d'ordonner une mesure mesure d'expertise au regard des conclusions divergentes des experts mandatés par chacune des parties, afin de rechercher si la composition du quarz de synthèse engendre un risque pour la santé des consommateurs dans des conditions d'utilisation normale et recueillir les éléments nécessaires pour trancher le débat technique qui oppose les parties.

Cette mesure qui est expressément sollicitée en appel par la société MDY et subsidiairement par l'association World Wide sera donc ordonnée dans les termes du dispositif ci-après.

L'ordonnance déférée sera donc infirmée en toutes ses dispositions.

Il n' y a pas lieu de faire application en l'espèce des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les parties seront déboutées de leurs prétentions à ce titre.

Elles conserveront chacune la charge des dépens de première instance et d'appel par elle exposés.

PAR CES MOTIFS LA COUR

STATUANT par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME l'ordonnance rendue le 10 mai 2017 en toutes ses dispositions,

STATUANT à nouveau et y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à référé sur les demandes de l'Association A.St.A World Wide,

ORDONNE une mesure d'expertise et désigne à cet effet un collège d'experts :

Mme [C] [G]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Port : XXXXXXXXXX Email : [Courriel 1]

ET

M. [K] [H]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Tél : XXXXXXXXXX

Port. : XXXXXXXXXX

Email : [Courriel 2]

qui pourrront s'adjoindre tout sapiteur de leur choix si nécessaire,

avec mission de :

* Convoquer les parties et leurs conseils, les entendre, ainsi qu'éventuellement tout sachant dont l'audition serait utile ;

* se faire remettre tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission, en particulier les deux rapports établis par l'IRES de [Localité 1] les 9 décembre 2016 et 25 janvier 2017 ainsi que les rapports établis par M. [J] [U] et M. [J] ;

* vérifier, à partir des échantillons de quartz de synthèse, objet des analyses de l'IRES et de tous autres échantillons de quartz de synthèse qui pourront être recueillis, pouvant servir à la fabrication de plans de cuisine, la composition de ce matériau ; indiquer s'il contient des substances dangereuses pour la santé humaine et donner un avis sur les analyses réalisées par l'IRES ;

* rechercher si les plans de travail en quartz de synthèse présentent un danger pour la santé des consommateurs, notamment dans leur utilisation en plan de travail de cuisine ; rappeler à quel usage ces plans de travail en quartz de synthèse sont destinés (cuisine, salle de bains...) et préciser si le consommateur peut être amené à découper ou façonner lui-même des plaques de ce matériau, en identifiant alors les conséquences particulières qui peuvent en découler ;

* indiquer pécisément s'il existe des risques de contamination de l'air ambiant ou de contamination des aliments qui seraient en contact avec le plan de travail ;

* à cet effet, effectuer tout test nécessaire et vérification sur des plaques de quartz de synthèse dans des conditions aussi proches que possible de leur utilisation réelle par le consommateur ;

* plus généralement, fournir tous éléments techniques ou de fait de nature à permettre à la juridiction qui serait éventuellement saisie de se prononcer sur les responsabilités encourues et les préjudices subis ;

DIT que le collège d'experts sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu'il déposera son rapport en un exemplaire original au greffe de la 14ème chambre de la cour d'appel de Versailles dans le délai de six mois à compter de la date de l'avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile auprès du magistrat chargé du contrôle des expertises,

DIT que le collège d'experts devra, lors de l'établissement de sa première note aux parties, indiquer les pièces nécessaires à l'exercice de sa mission, la calendrier de ses opérations et le coût prévisionnel de la mesure d'expertise,

DIT qu'après avoir rédigé un document de synthèse, le collège d'experts devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l'article 276 du code de procédure civile et rappelle qu'il ne sera pas tenu de prendre en compte les observations ou réclamations tardives,

DÉSIGNE Mme Odette-Luce BOUVIER, présidente de la 14ème chambre de la cour d'appel de Versailles, pour suivre la mesure d'instruction et statuer sur les incidents,

DIT que le collège d'experts devra rendre compte à ce magistrat de l'avancement de ses travaux d'expertise et des diligences accomplies et qu'il devra l'informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l'exécution de sa mission, conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile,

FIXE à la somme de 10 000 euros (dix mille euros) la provision à valoir sur la rémunération de l'expert qui devra être consignée par l'association A.St.A World-Wide entre les mains du régisseur d'avances et de recettes de la cour d'appel de Versailles, dans le délai de six semaines à compter du prononcé de l'arrêt, sans autre avis,

DIT que faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l'expert sera caduque et privée de tout effet,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que chacune des parties conservera à sa charge les dépens de première instance et d'appel par elle exposés.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Madame Odette-Luce BOUVIER, président et par Madame Agnès MARIE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 14e chambre
Numéro d'arrêt : 17/03986
Date de la décision : 22/02/2018

Références :

Cour d'appel de Versailles 14, arrêt n°17/03986 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-22;17.03986 ?
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