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07/11/2017 | FRANCE | N°14/03506

France | France, Cour d'appel de Versailles, 07 novembre 2017, 14/03506


COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80C

6e chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 07 NOVEMBRE 2017

R. G. No 16/ 03160

AFFAIRE :

Etienne X...


C/

SAS MANPOWER FRANCE

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 02 Juin 2016 par le Conseil de prud'hommes-Formation de départage de NANTERRE
Section : Activités diverses
No RG : 14/ 03506

Copies exécutoires délivrées à :

la SELAS VIVANT CHISS FROMENT-MEURICE JAGLIN
Etienne X...


Copies certifiées conf

ormes délivrées à :

SAS MANPOWER FRANCE

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de VERSAI...

COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES

Code nac : 80C

6e chambre

ARRET No

CONTRADICTOIRE

DU 07 NOVEMBRE 2017

R. G. No 16/ 03160

AFFAIRE :

Etienne X...

C/

SAS MANPOWER FRANCE

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 02 Juin 2016 par le Conseil de prud'hommes-Formation de départage de NANTERRE
Section : Activités diverses
No RG : 14/ 03506

Copies exécutoires délivrées à :

la SELAS VIVANT CHISS FROMENT-MEURICE JAGLIN
Etienne X...

Copies certifiées conformes délivrées à :

SAS MANPOWER FRANCE

le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur Etienne X...

...

comparant en personne

APPELANT
****************
SAS MANPOWER FRANCE
13 rue Ernest Renan
92723 NANTERRE CEDEX
représentée par Me Romain CHISS de la SELAS VIVANT CHISS FROMENT-MEURICE JAGLIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R059

INTIMEE
****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 27 Juin 2017, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, Président,
Madame Sylvie BORREL, Conseiller,
Monsieur Patrice DUSAUSOY, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Marion GONORDFAITS ET PROCÉDURE,

Monsieur X..., délégué syndical central du S yndicat National du travail Temporaire, (SNTT) CFTC, a été convoqué le 27 février 2014 par le directeur des affaires sociales de MANPOWER, à une réunion prévue le 11 mars 2014 en vue de « formaliser dans un cadre négocié les dispositions de prise en charge des frais liés à l'exercice des mandats » ;

La convocation précisait qu'il s'agissait d'une réunion technique et non d'une négociation, chaque délégation devant se limiter à deux personnes.

La direction constatant la présence de quatre personnes et non deux pour le syndicat SNTT-CFTC a indiqué que les frais de déplacement et les heures de délégation ne seraient pas pris en charge par la société pour Messieurs X...et Y....

Le 10 octobre 2014, le conseil de prud'hommes de Nanterre a rendu une ordonnance déboutant Monsieur Y...de sa demande de remboursement, confirmée par la Cour de cassation le 12 avril 2016.

Le 7 novembre 2014, Monsieur X...a exercé son droit d'alerte, en qualité de délégué du personnel, au visa de l'article L. 2313-2 du code du travail relatif à la situation de Monsieur Y...au titre du trouble subi par tous les salariés susceptibles d'être désignés syndicalement.

Par requête du 1er décembre 2014, au visa de l'article L. 2313-2 du code du travail, Monsieur X...a saisi directement le bureau de jugement en la forme des référés, section encadrement, du conseil de prud'hommes de Nanterre pour voir reconnaître un délit d'entrave à l'exercice de l'activité syndicale de Monsieur Y..., commis le 11 mars 2014, pour non paiement de frais et rémunérations dans le cadre de l'exercice de son activité syndicale, donner injonction à l'employeur de régler à ce dernier les sommes de 175, 45 € à titre de rappel de salaires, 309, 90 € à titre de remboursement de frais et 500 € d'indemnité de procédure, sous astreinte de 50 € par jour de retard, condamner l'employeur à 1 € au profit du SNTT-CFTC avec astreinte de 50 € par jour de retard avec possibilité de liquider laissée à la juridiction, pour atteinte à l'intérêt collectif de la profession.

Par décision du 13 février 2015, le président du conseil de prud'hommes de Nanterre a renvoyé l'affaire devant la section activités diverses, au 12 mai 2015. La formation s'est mise en partage de voix le 30 juin 2015. L'audience de départage s'est tenue le 1er avril 2016.

Par ordonnance du 2 juin 2016, la formation de départage a rejeté le sursis à statuer, devenu sans objet, l'arrêt attendu de la Cour de cassation ayant été rendu le 16 avril 2016 ; a déclaré irrecevable la requête de Monsieur X...au motif que l'action du délégué du personnel ne peut intéresser que les salariés qui ont élu ce délégué du personnel, or Monsieur Y...est salarié d'un autre établissement ; a reconnu la recevabilité de l'action du syndicat SNTT-CFTC, mais l'a débouté de sa demande au visa de l'art L 2232-17 du contrat de travail, conférant à une organisation syndicale le droit de négocier toute disposition applicable à la catégorie de salariés qu'elle représente, or la réunion n'avait pour pas pour objet de négocier un accord mais de formaliser les dispositions de prise en charge des frais liés à l'exercice des mandats ainsi que l'employeur l'avait précisé préventivement.

L'ordonnance a été notifiée à Monsieur X...le 8 juin 2016 lequel en a régulièrement interjeté appel, en qualité de délégué du personnel, le 14 juin, reçu par le greffe le 16 juin 2016.

Par écritures, visées par le greffe et soutenues oralement à l'audience du 27 juin 2017, auxquelles la cour se réfère en application de l'article 455 du code de procédure civile, les parties ont conclu comme suit :

Monsieur X..., ès qualités de délégué du personnel, avec l'intervention volontaire du syndicat, sollicite les mêmes demandes qu'en première instance tant pour lui même que pour le syndicat.

Les appelants font valoir, au visa de l'article L. 2313-2 du code du travail, que le périmètre de l'action du délégué du personnel ne se limite pas à l'établissement mais à l'entreprise ; que, au visa de l'article L. 2332-17 du même code, que la convocation adressée aux syndicats à la réunion du 11 mars 2013 supposait nécessairement qu'elle s'inscrivait dans le cadre d'une négociation autorisant la composition de la délégation de l'organisation d'au moins deux délégués avec possibilité de la compléter de deux autres personnes ; qu'il existe un trouble manifestement illicite causé par le refus de l'employeur (i) d'accepter, au visa de l'article L. 2232-17 du code du travail, la composition de la délégation de l'organisation syndicale, dont Monsieur Y..., à la réunion du 11 mars 2014, et (ii) de prendre en charge, au visa de l'article L. 2146-1 du même code, les heures de délégation et le remboursement des frais ; qu'il existe, au visa de l'article L. 2132-3 une atteinte à l'intérêt collectif de la profession du travail temporaire ; sollicitent les mêmes demandes qu'en première instance.

La société fait valoir que la requête de Monsieur X...est irrecevable, non seulement à cause du périmètre limité de son champ d'action en sa qualité de délégué du personnel : l'établissement et non l'entreprise, mais aussi parce que le droit d'alerte, prévu par l'article L. 2313-2 du code du travail, ne peut s'exercer que pour des atteintes aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles et non pour des remboursement de frais et de salaires ; qu'au surplus la réunion du 11 mars 2014 n'était pas une réunion de négociation d'une convention ou d'un accord collectif de sorte que les dispositions de l'article L. 2232-17 du code du travail ne sont pas applicables à la composition de la délégation syndicale ; à titre subsidiaire, l'intervention volontaire du syndicat à agir sur le fondement de l'article L. 2313-2 du code du travail, n'est pas recevable ; sollicite, à titre principal, la confirmation de l'ordonnance entreprise, à titre subsidiaire, la réformation de l'ordonnance, en ce qu'elle a déclaré recevable l'intervention volontaire du syndicat, mais sa confirmation sur le débouté de ses demandes, en tout état de cause, débouté les appelants de leurs demandes, les condamner à 1 000 € au titre de l'article 700 ainsi qu'aux dépens.

MOTIFS

Aux termes de l'article 492-1 du code de procédure civile, lorsque le juge statue en la forme des référés, ce dernier exerce les pouvoirs dont dispose la juridiction au fond et statue par une ordonnance ayant l'autorité de la chose jugée relativement aux contestations qu'elle tranche.

Le délégué du personnel tient des dispositions de l'article L. 2313-2 du code du travail le pouvoir de saisir le juge de demandes aux fins de mesures propres à faire cesser une atteinte aux droits de la personne ou aux libertés individuelles.

Sur l'irrecevabilité de l'action de Monsieur X..., ès qualité de délégué du personnel

-Sur l'irrecevabilité tirée de l'objet de l'article L. 2313-2 du code du travail

L'action de Monsieur X...vise à voir constater l'existence d'un délit d'entrave caractérisé par le refus par l'employeur d'accepter une composition de quatre personnes formant la délégation syndicale à la réunion du 11 mars 2014 et de prendre en charge les heures de délégation et frais exposés dans le cadre de cette réunion, et à condamner l'employeur à un rappel de salaires et des remboursements de frais.

Le droit d'alerte prévue par les dispositions de l'article L. 2313-2 du code du travail sur lesquelles les appelants ont fondé leur action, réserve au délégué du personnel la possibilité d'initier une procédure rapide d'enquête dans le but de voir cesser une éventuelle atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles qu'il a pu constater dans l'entreprise et qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnée au but recherché ; cette atteinte pouvant résulter notamment de faits de harcèlement sexuel ou moral ou de toute mesure discriminatoire en matière d'embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de classification, de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement.

Il en résulte que l'exercice du droit d'alerte conféré aux délégués du personnel implique que les conditions prévues par l'article susvisé soient réunies et ne saurait avoir pour effet ou pour objet de faire constater un délit d'entrave et d'ordonner, en conséquence, la condamnation de l'employeur à un remboursement d'heures de délégation et de frais.
Monsieur X...ne met pas en évidence d'atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l'entreprise ou des faits de harcèlement ou toute autre mesure discriminatoire qu'aurait subis Monsieur Y....

Il n'établit pas, en l'espèce, que le délit d'entrave qui vise à sanctionner une obstruction de l'employeur à l'exercice de l'activité syndicale entrerait dans les prévisions de l'article L. 2313-2 du code du travail dont l'objet vise à prévenir et à faire cesser toute atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique ou mentale ou aux libertés individuelles.

L'action de Monsieur X...sera déclarée irrecevable sans qu'il soit nécessaire d'examiner la question de l'irrecevabilité tirée du périmètre d'action du délégué du personnel dans le cadre de l'article L. 2313-2 du code du travail.

L'ordonnance sera confirmée sur ce point.

Sur l'irrecevabilité de l'action du syndicat, intervenant volontaire

Si les dispositions de l'article L. 2313-2 du code du travail prévoient que le droit d'alerte est réservé au seul délégué du personnel et n'autorise donc pas une organisation syndicale à s'en prévaloir, il n'en résulte pas moins que les dispositions de l'article L. 2132-3, sur lesquelles le syndicat fonde sa demande, autorisent tout syndicat professionnel à exercer les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice, direct ou indirect, à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente.

Le syndicat sera déclaré recevable en son intervention volontaire mais mal fondé au regard de la solution retenue par la cour sur l'irrecevabilité de l'action de Monsieur X....

L'ordonnance sera confirmée sur ce point.

Sur les demandes accessoires

L'équité commande d'allouer à la société MANPOWER FRANCE qui a été contrainte d'engager des frais non compris dans les dépens, tant en première instance qu'en cause d'appel, une indemnité de procédure qui sera mise, par moitié, à la charge de Monsieur X..., en sa qualité de délégué du personnel et à celle du syndicat SNTT-CFTC ; Monsieur X...sera débouté de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure.
L es dépens de première et d'appel seront mis, par moitié, à la charge de Monsieur X..., en sa qualité de délégué du personnel, et à la charge du syndicat SNTT-CFTC.
L'ordonnance sera infirmée sur ce point.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant contradictoirement, en la forme des référés, par arrêt mis à la disposition des parties au greffe :

CONFIRME l'ordonnance entreprise, sauf en ce qu'elle a débouté la société MANPOWER FRANCE de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et a dit que chaque partie conserverait la charge de ses propres dépens.
Statuant des chefs réformés,

CONDAMNE Monsieur X..., en sa qualité de délégué du personnel, et le syndicat SNTT-CFTC à verser, chacun à une indemnité de 150 €, à la société MANPOWER FRANCE en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Y ajoutant

CONDAMNE Monsieur X..., en sa qualité de délégué du personnel, et le syndicat SNTT-CFTC à verser, chacun une indemnité de 150 €, en cause d'appel, à la société MANPOWER FRANCE au titre des frais irrépétibles exposés par cette dernière,

DÉBOUTE Monsieur X...de sa demande au titre des frais irrépétibles,

DIT que Monsieur X..., en, et le syndicat SNTT-CFTC supporteront, par moitié, la charge des dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me Chritophe Debray, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, Président et par Madame HAMIDI, Greffier en pré-affectation, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 14/03506
Date de la décision : 07/11/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-07;14.03506 ?
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