COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 72A
4e chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 09 OCTOBRE 2017
R.G. N° 16/04710
AFFAIRE :
Mme [L] [P]
C/
SDC DU [Adresse 1]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Mai 2016 par le Tribunal d'Instance de COURBEVOIE
N° Chambre : A
N° RG : 11-15-000230
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Eric AZOULAY
Me Anne-Florence MERCILLON
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE NEUF OCTOBRE DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [L] [P]
[Adresse 2]
[Adresse 3]
Représentant : Maître Eric AZOULAY de la SCP d'Avocats FEDARC avocat postulant (ayant dégagé sa responsabilité) du barreau du VAL D'OISE, vestiaire : 10
APPELANTE
****************
SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 1]) représenté par son syndic la société FONCIA MARCEAU
Ayant son siège [Adresse 4]
[Adresse 5]
elle-même prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Anne-Florence MERCILLON, avocat postulant du barreau de VERSAILLES, N° du dossier 473 vestiaire : C.473
Représentant : Maître Rémy HUERRE de la SELARL HP & Associés, avocat plaidant du barreau de PARIS, vestiaire : J 109
INTIME
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Juin 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle BROGLY, président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Michèle TIMBERT, Président,
Madame Isabelle BROGLY, Président,
Madame Anna MANES, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Nathalie MULOT,
FAITS ET PROCEDURE,
Mme [P] est propriétaire des lots numéros 131 et 133, constitués de deux chambres et d'un cagibi, au 7ème étage de l'immeuble situé [Adresse 2]) soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis.
Par acte d'huissier de justice en date du 2 mars 2015, le syndicat des copropriétaires de cet immeuble l'a fait assigner en paiement de diverses sommes représentant les charges de copropriété impayées, des dommages et intérêts et en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement contradictoire du 17 mai 2016, le tribunal d'instance de Courbevoie a :
- Condamné Mme [P] à payer au syndicat des copropriétaires de 'immeuble situé [Adresse 2]) la somme de 7.895,11 euros avec intérêts légaux à compter du 4 novembre 2014 sur la somme de 3.752,44 euros et à compter du 24 mars 2016 sur le surplus au titre des charges et des frais.
- Ordonné la capitalisation des intérêts.
- Débouté Mme [P] de sa demande de consignation des sommes dues au syndicat des copropriétaires.
- Débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts.
- Condamné Mme [P] aux dépens et l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Par déclaration du 22 juin 2017, Mme [P] a interjeté appel de cette décision à l'encontre du syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé au [Adresse 2]).
Par dernières conclusions du 19 septembre 2016, Mme [P] demande à la cour, au fondement des articles 10 de la loi du 10 juillet 1965, 564 et 565 du code de procédure civile, 1382 du code civil, de :
- Infirmer la décision entreprise.
Statuant de nouveau :
- Constater que :
* elle ne s'oppose pas au règlement de ses charges de copropriété pour un montant de 7.895,11 €,
* le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2], représenté par son syndic, n'a pas effectué la remise en état des logements du 7ème lui appartenant.
- Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2], représenté par
son syndic, à lui régler les sommes de :
* 5.000 € au titre des travaux de remise en état de ses lots,
* 15.000 € au titre de la perte de chance de percevoir des loyers locatifs,
* 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions signifiées le 11 mai 2017, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2]) invite cette cour, au fondement des articles 564 et 700 du code de procédure civile, articles 1291 (devenu 1347-1), 1154 et 1382 du code civil, 10 et 10-1 de la Loi du 10 juillet 1965, de :
A titre liminaire
- Dire et arrêter que :
* les demandes de condamnation formulées par Mme [P] à son encontre au titre de la remise en état de ses lots et au titre de la perte de chance de percevoir des loyers sont des demandes nouvelles au sens de l'article 564 du code de procédure civile,
* ces préjudices ne sont pas certains, liquides et exigibles.
En conséquence,
- Dire et arrêter que :
* il n'y a lieu à compensation,
* les demandes de condamnations formulées à son encontre de 5.000 € pour la remise en état des lots de Mme [P] et à hauteur de 15.000 € au titre de la perte de chance de percevoir des loyers sont irrecevables.
A titre principal,
- Confirmer le jugement de 1ère instance en ce que :
* il a condamné Mme [P] à lui verser la somme de 7.895,11 € au titre des charges de copropriété arrêtées à la date du 1er octobre 2015, assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 2014 sur la somme de 3.752,44 € et à compter du 24 mars 2016 pour le surplus,
* il a ordonné la capitalisation des intérêts selon les modalités prévues par l'article 1154 du code civil,
* il a jugé qu'il n'avait pas engagé sa responsabilité.
- Infirmer le jugement de 1ère instance en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages- intérêts à l'encontre de Mme [P],
Statuant à nouveau sur ce point
- Condamner Mme [P] à lui verser la somme de 2.000 € à titre de dommages-intérêts,
Et, y ajoutant, sur le jugement de 1ère instance :
- Condamner Mme [P] à lui verser la somme de 2.284,61 € au titre des charges de
copropriété dues pour la période du 1er octobre 2015 au 18 avril 2017,
A titre subsidiaire, et si par extraordinaire la Cour déclarait les demandes pécuniaires de
Mme [P] recevables
- Dire et arrêter que Mme [P] ne démontre pas détenir une créance certaine, liquide et exigible à son encontre,
En conséquence,
- Débouter Mme [P] de ses demandes de dommages et intérêts à hauteur de :
* 5.000 € au titre des travaux de remise en état de ses lots,
* 15.000 € au titre de la perte de chance de percevoir des loyers.
En tout état de cause,
- Condamner Mme [P] à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction,
- Dire et juger que Mme [P] sera condamnée à prendre à sa charge l'intégralité des frais exposés par lui, depuis la signification du commandement de payer, et ce, en application de l'article 10-1 de la Loi du 10 juillet 1965.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 16 mai 2017.
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SUR CE,
Sur la recevabilité des demandes de Mme [P] au titre de la remise en état de ses lots et au titre de la perte de chance de percevoir des loyers
Le syndicat des copropriétaires, se fondant sur les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, soutient que la demande de Mme [P] tendant à sa condamnation à lui verser diverses sommes au titre des travaux de remise en état de ses lots et de la perte de chance de percevoir des loyers locatifs est nouvelle en cause d'appel et, partant, irrecevable.
Comme le relève fort justement Mme [P], l'article 564 du code de procédure civile dispose que ne sont pas nouvelles les prétentions qui visent à opposer compensation ou faire écarter les prétentions adverses. De même, conformément aux dispositions des articles 565 et 566, ne sont pas nouvelles des prétentions qui tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent, qui explicitent des demandes virtuellement comprises dans les demandes soumises au premier juge ou qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément.
En l'espèce, Mme [P], défenderesse, entend faire écarter les prétentions adverses ou opposer compensation aux demandes formulées en première instance par le syndicat de sorte qu'elles ne sont pas irrecevables.
Il y a dès lors lieu de rejeter le moyen soulevé par le syndicat des copropriétaires.
Sur l'insalubrité des lots de Mme [P]
Mme [P] développe les mêmes arguments et produit les mêmes pièces qu'en première instance au soutient de ses nouvelles prétentions. Cependant, c'est par d'exacts motifs que cette cour adopte que les premiers juges ont retenu que Mme [P] ne démontrait pas que les désordres et préjudices allégués étaient imputables au syndicat de sorte que sa demande de dommages et intérêts au titre des travaux de remise en état de ses lots ne saurait être accueillie.
En outre, force est de constater que Mme [P] ne produit aucun élément nouveau, ni devis relatifs à la réparation des désordres qu'elle invoque de sorte qu'elle est défaillante dans l'administration de la preuve de la réalité et l'actualité tant des préjudices qu'elle invoque que de leur imputabilité au syndicat des copropriétaires.
De plus, comme l'ont relevé fort justement les premiers juges, peu important l'existence de ces désordres, il est patent qu'ils ne la dispenseraient pas de régler régulièrement les charges de copropriété.
Enfin, l'article 1347-1 du code civil dispose que la compensation ne peut avoir lieu qu'entre deux obligations certaines, liquides et exigibles ce que n'établit pas Mme [P].
Il découle de l'ensemble des développements qui précèdent que la demande de dommages et intérêts au titre des travaux de remise en état qui n'est pas justifiée ne sera pas accueillie.
Sur le préjudice résultant d'une perte de chance de percevoir des revenus locatifs
Mme [P] se borne à soutenir que l'absence de mesure prise par le syndicat à faire face à la sauvegarde de l'immeuble et compte tenu de l'état de vétusté avancée de ses logements, elle n'a pu procéder à leur location et que, si elle avait pu les louer au cours de ces cinq dernières années, elle aurait pu percevoir 13.620 euros pour le lot n° 131 et 17.160 euros pour le lot n° 133 de sorte que le syndicat devra, selon elle, être condamné à lui verser 15.000 euros en réparation de la perte de chance de percevoir ces revenus locatifs.
Seule constitue une perte de chance réparable, la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable.
En l'espèce, Mme [P] ne démontre nullement que ces lots étaient destinés à être loués ni qu'ils n'ont pu l'être en raison du comportement condamnable du syndicat des copropriétaires. En d'autres termes, elle ne rapporte pas la preuve de la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable imputable au syndicat.
Il découle de ce qui précède que sa demandes, injustifiée, ne sera pas accueillie.
Sur la créance du syndicat des copropriétaires
Le syndicat des copropriétaires sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il condamne Mme [P] à lui verser la somme de 7.895,11 euros au titre des charges de copropriété selon décompte arrêté au 1er octobre 2015.
Il demande en outre l'actualisation de sa créance qui a augmenté depuis la première instance en ce que Mme [P] lui doit désormais la somme supplémentaire de 1.540,71 euros au titre des charges de copropriété et travaux outre 743,90 euros au titre des frais.
Mme [P] ne conteste pas devoir ces sommes, mais sollicite la compensation entre ses créances et celles du syndicat.
Le jugement en ce qu'il condamne Mme [P] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 7.895,11 euros n'étant pas contesté, il sera confirmé.
S'agissant de la somme supplémentaire de 1.540 euros au titre des charges de copropriété pour la période du 1er trimestre 2016 au 18 avril 2017, force est de constater que le syndicat justifie du bien-fondé de cette demande par les pièces produites, à savoir, les décomptes des sommes dues au 18 avril 2017, les appels de charges de la période allant du 1er trimestre 2016 au 18 avril 2017, les procès-verbaux des assemblées générales des 21 janvier 2016 et 29 mars 2017.
S'agissant des frais réclamés à hauteur de la somme de 743,90 euros, force est de constater que le syndicat produit seulement des factures de frais de gestion relatifs à des vacations de suivi et de recouvrement privé émis par le syndic.
Cependant, il convient de rappeler qu'aux termes des dispositions de l'article 10-1 de la loi précitée, sont imputables au seul copropriétaire concerné les frais nécessaires exposés par le syndicat, notamment les frais de mise en demeure, de relance et de prise d'hypothèque à compter de la mise en demeure, pour le recouvrement d'une créance justifiée à l'encontre d'un copropriétaire ainsi que les droits et émoluments des actes des huissiers de justice et le droit de recouvrement et d'encaissement à la charge du débiteur.
Par 'frais nécessaires' au sens de cette disposition, il faut entendre les diligences efficientes qui marquent une étape indispensable dans le processus de recouvrement, comme la mise en demeure, prélude obligé à l'article 19-1 de la loi ou au cours des intérêts.
Ne relèvent donc pas des dispositions de l'article 10-1 précité, les frais de suivi de procédure et de recouvrement, les honoraires du syndic pour transmission du dossier à l'huissier ou à l'avocat, qui font partie des frais d'administration courante entrant dans la mission de base de tout syndic et répartis entre tous les copropriétaires au prorata des tantièmes.
Il conviendra dès lors de rejeter la demande du syndicat en paiement de la somme de 743,90 euros qui ne relève ni des dispositions de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 ni de l'article 10-1 de cette même loi.
Sur la demande de dommages et intérêts
Se fondant sur les dispositions de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016, le syndicat sollicite la condamnation de Mme [P] à lui verser 2.000 euros à titre de dommages et intérêts.
Toutefois, le syndicat se borne à alléguer l'existence de son préjudice sans en justifier l'existence.
Le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il rejette cette demande.
Sur les autres demandes
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement déféré en ce qui concerne le sort des dépens de première instance, mais à l'infirmer en ce qui concerne l'application qui y a été faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il apparaît équitable d'allouer la somme de 3.000 euros au syndicat sur le fondement des frais irrépétibles qu'il a dû engager pour assurer sa défense en première instance et en appel.
Mme [P] sera condamnée au paiement de cette somme et déboutés de sa demande au titre des frais irrépétibles.
Elle sera en outre condamnée aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant contradictoirement,
Dans les limites de l'appel,
Infirme le jugement en ce qu'il rejette la demande du syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 2]) au titre des frais irrépétibles.
Le confirme pour le surplus.
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déclare recevable Mme [P] en sa demande de condamnation du syndicat à lui verser diverses sommes au titre des travaux de remise en état de ses lots et de la perte de chance de percevoir des loyers locatifs.
Condamne Mme [P] à verser au syndicat des copropriétaires la somme supplémentaire de 1.540 euros au titre des charges de copropriété pour la période du 1er trimestre 2016 au 18 avril 2017.
Condamne Mme [P] à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Rejette toutes autres demandes présentées tant par le syndicat des copropriétaires que par Mme [P].
Condamne Mme [P] aux dépens d'appel.
Dit qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anna MANES Conseiller en raison de l'empêchement de Madame Michèle TIMBERT, Président, et par Madame MULOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,