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08/09/2017 | FRANCE | N°15/07650

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 08 septembre 2017, 15/07650


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 56C



1ère chambre 1ère section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 08 SEPTEMBRE 2017



R.G. N° 15/07650



AFFAIRE :



[G] [U]

[B] [Y] épouse [U]

C/

SAS AUDIT ET SOLUTIONS







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Avril 2012 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS

N° Chambre : 9

N° Section : 2

N° RG : 10/03398



Expéditi

ons exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

Me Julie GOURION-LEVY



Me Philippe CHATEAUNEUF





REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt sui...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 56C

1ère chambre 1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 08 SEPTEMBRE 2017

R.G. N° 15/07650

AFFAIRE :

[G] [U]

[B] [Y] épouse [U]

C/

SAS AUDIT ET SOLUTIONS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Avril 2012 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS

N° Chambre : 9

N° Section : 2

N° RG : 10/03398

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

Me Julie GOURION-LEVY

Me Philippe CHATEAUNEUF

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [G] [U]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Julie GOURION-LEVY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 51 - N° du dossier 215249 et Me Agnès LASKAR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Madame [B] [Y] épouse [U]

née le [Date naissance 2] 1969 à [Localité 2]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Julie GOURION-LEVY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 51 - N° du dossier 215249 et Me Agnès LASKAR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

DEMANDEURS devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation (1ère chambre civile) du 09 juillet 2015 cassant et annulant l'arrêt rendu par la cour d'appel de PARIS (pôle 5 - chambre 5) le 15 mai 2014

****************

SAS AUDIT ET SOLUTIONS

N° SIRET : B 4 10 518 13838

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Rfeprésentée par Me Philippe CHATEAUNEUF, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 643 - N° du dossier 2016028, Me Thomas RIVIERE, Plaidant, avocat au barreau de BORDEAUX

DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 Juin 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain PALAU, président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, président,

Madame Anne LELIEVRE, conseiller,

Madame Nathalie LAUER, conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE,

M. et Mme [U] sont ingénieurs et cadre informatiques.

Par acte du 30 décembre 2005, les époux ont acquis auprès de la SNC Euro Parc de Cannes un bien type T2, en état futur d'achèvement, et un emplacement de parking à Cannes dans le cadre de la loi Robien permettant une défiscalisation.

Le prix de vente s'est élevé à 263.800 euros, soit un «'prix total packagé de 290.457 euros'» financé par l'emprunt d'une somme de 290.457 euros auprès de la banque Crédit agricole du midi.

Par acte du 8 février 2010, M. et Mme [U] ont fait assigner la société Audit et Solutions devant le tribunal de grande instance de Paris.

Par jugement du 6 avril 2012, le tribunal a rejeté leurs demandes et les a condamnés à payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 15 mai 2014, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement.

Par arrêt du 9 juillet 2015, la Cour de cassation a cassé l'arrêt.

Elle a constaté que, pour exclure toute faute de la société, la cour d'appel a relevé que la valeur locative d'un bien immobilier constituait une donnée incertaine et fluctuante et que les époux ne pouvaient se méprendre sur le fait que le calcul du bénéfice ne tenait pas compte de tous les frais afférents à l'investissement immobilier dont les intérêts.

Elle a jugé qu'après avoir constaté une différence de plus de 27 % entre le loyer annoncé par la société et celui perçu et relevé le caractère approximatif du calcul du bénéfice escompté de l'opération immobilière, la cour d'appel n'avait pas tiré les conséquences légales qui découlaient de ses constatations et avait violé l'article 1147 du code civil.

Par déclaration du 4 novembre 2015, M. et Mme [U] ont saisi la cour d'appel de Versailles, cour de renvoi.

Dans leurs dernières conclusions en date du 5 avril 2016, M. et Mme [U] demandent à la cour d'infirmer le jugement.

Ils réclament la condamnation de la société à leur payer les sommes de':

- 67.440 euros au titre de la différence entre les loyers envisagés et les loyers réels,

- 94.075 euros au titre des intérêts non calculés,

- 19.710 euros au titre des assurances obligatoires.

Ils demandent que ces sommes portent intérêts légaux à compter du 20 décembre 2007 et que ces intérêts soient capitalisés à compter de la date anniversaire de la demande formée le 20 décembre 2007.

Ils réclament le paiement d'une somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les appelants exposent que la société Audit et Solutions est une société de conseil en gestion de patrimoine et en investissements qui propose des solutions «'clé en mains'» d'investissement dans des programmes immobiliers de défiscalisation.

Ils exposent également qu'ils se sont connectés sur le site internet d'une association d'aide aux contribuables après avoir recherché des informations sur la loi Robien et qu'après avoir rempli un questionnaire en ligne pour effectuer une simulation, ils ont été contactés par la SAS Audit et Solutions qui leur a conseillé l'achat d'un bien dans le cadre de la loi Robien.

Ils exposent enfin que cette démarche est identique à celle effectuée par la société envers d'autres personnes ayant visité le site qui ont rempli à la même époque un questionnaire avec M. [H], leur interlocuteur.

Ils déclarent que, pour les convaincre, la société a effectué deux simulations, l'une avec la charge financière occasionnée par l'achat et la démonstration que le loyer perçu «'couvrirait'» les remboursements et l'autre pour leur démontrer que l'opération serait sans risque s'ils revendaient à partir de la 9ème année.

Ils déclarent également qu'elle leur a proposé un bien à Genève mais que l'opération n'a pu se faire puis le bien faisant l'objet du litige.

Ils déclarent enfin que la société s'est occupée de trouver un financement et un notaire, de finaliser la signature et de gérer les relations avec le promoteur partenaire.

Ils lui reprochent d'avoir faussé la simulation relative à leur effort de trésorerie en surévaluant le loyer.

Ils indiquent qu'elle a envisagé un loyer mensuel de 1.011 euros hors charges alors qu'ils n'ont pu louer le bien qu'au prix de 730 euros hors charges étant précisé que la société a, quelques mois plus tard, révisé à la baisse le montant initial.

Ils lui reprochent de ne pas avoir pris en compte, dans la simulation, les intérêts du crédit - 94.075 euros - et le coût des assurances obligatoires -19.710 euros.

Ils lui reprochent enfin d'avoir affiché un faux taux de rendement en ne prenant pas en compte ces charges.

Ils rappellent l'arrêt de la cour d'appel et la cassation intervenue.

Ils indiquent qu'un autre client se plaint de la société.

Ils lui reprochent d'avoir manqué à ses obligations de conseil et d'information.

Ils estiment que ce devoir s'impose aux entreprises de conseil en patrimoine et en investissement et à celles de conseil en investissement immobilier et excipent d'un arrêt de la cour d'appel de Rennes du 4 mars 2010 et d'un arrêt de la Cour de cassation du 15 octobre 2015 qui a annulé pour dol un tel achat.

Ils soutiennent que la société Audit et Solutions est, non un agent immobilier mais un véritable conseil en gestion de patrimoine ainsi que l'a jugé le tribunal.

Ils excipent de sa brochure commerciale, de son site Internet, de ses documents promotionnels de 2009 et des courriels qu'elle leur a adressés.

Ils affirment qu'elle s'est présentée à eux en faisant valoir ses conseils en gestion de patrimoine, leur proposant non un simple logement mais un investissement immobilier dans le cadre de la loi Robien dont le dispositif est complexe et en leur présentant des programmes immobiliers avec des promoteurs «'partenaires'».

Ils affirment également qu'elle s'est présentée durant toute l'opération comme leur seul interlocuteur, s'occupant de tout et eux-mêmes ne devant que se rendre chez le notaire et n'ayant qu'un seul contact avec le promoteur, le jour de la réception des travaux. Ils précisent qu'elle a, ainsi, traité directement avec la banque et effectué les démarches hypothécaires, fiscales ou notariales.

Ils soutiennent que la société a violé ses obligations de conseil et d'information alors que ses conseils ont été déterminants dans leur consentement.

Ils invoquent de graves erreurs dans les simulations.

Ils font valoir que la société a fourni la simulation litigieuse.

Ils observent qu'elle ne le niait pas en première instance, contestant uniquement son caractère contractuel et faisant état d'un sous agent, et excipent d'un aveu judiciaire.

Ils relèvent qu'une même simulation a été faite pour un autre bien et faxée par la société.

Ils déclarent qu'il résulte de courriels que [N] [H] dont l'adresse est «'nicolasFRANCK@audit-solution.com'» a été leur interlocuteur pour le compte de la société Audit et Solutions et non d'un sous agent qui serait la société Patrimonia Consulting et observent qu'il a été parfois remplacé par son assistante, Mme [A], dont l'adresse courriels est «'[Courriel 1]'»'et l'adresse postale celle de la société intimée.

Ils déclarent également que M. [H] est intervenu pour le compte de la société Audit et Solutions pour d'autres acquéreurs.

En ce qui concerne la mention «'non contractuel'» apposée sur le document, ils se prévalent de décisions ayant considéré ce type de mentions comme de simples réserves de style et de l'arrêt du 15 octobre 2015 qui a annulé pour dol un achat fondé sur une étude de rentabilité portant la mention «'non contractuel'».

Ils comparent l'étude aux simulations de prêt effectuées par les banques et soulignent que la simulation de l'économie réalisée est déterminante de leur consentement.

Ils affirment que sont en cause non les données du crédit mais les données financières de l'opération en général et, surtout, le montant du loyer.

Ils font valoir que la simulation est faussement alléchante.

Ils rappellent que la société a fait état d'un loyer mensuel de 1.011 euros alors qu'ils n'ont pu louer le bien qu'au prix de 730 euros et relèvent que le promoteur a évoqué un loyer de 798 euros et que la société leur a annoncé en février 2007 que le loyer serait vraisemblablement de 715 euros. Ils déclarent qu'elle ne produit aucun document justifiant cette simulation. Ils réitèrent qu'elle devait fournir un estimatif du loyer et que c'est en fonction de cet estimatif qu'ils se sont engagés.

Ils considèrent qu'il ne s'agit pas de maîtriser un aléa mais d'une surestimation par rapport au marché que la société devait connaître et même par rapport à l'estimation du promoteur.

Ils ajoutent qu'en tout état de cause, elle devait les informer du caractère aléatoire du loyer et du fait que le montage financier pouvait ne pas être représentatif. Ils invoquent donc un défaut d'alerte.

Ils affirment qu'elle ne prouve pas qu'elle a recopié une simulation du promoteur, relèvent que les fourchettes de loyers prévues par lui sont inférieures et soutiennent qu'il est de sa responsabilité de présenter un montage réaliste - et donc de s'informer - et que c'est elle qui a présenté ces loyers - à charge pour elle d'appeler le promoteur en garantie.

Ils rappellent que la société a fait état, dans une simulation qu'elle ne conteste pas avoir présenté, d'un «'bénéfice'» calculé uniquement sur la différence entre le prix de vente du bien et le capital encore dû sans tenir compte des intérêts payés.

Ils indiquent qu'elle ne prend en compte que deux ans d'intérêts intercalaires mais ni les intérêts de l'emprunt ni le coût des assurances obligatoires.

Ils observent qu'en 2006, la société a cessé d'user l'expression «'bénéfice'» pour utiliser celle de «'résultat'».

Ils indiquent produire les actes de prêt et déclarent que le crédit a été trouvé par la société.

Ils soulignent que la Cour de cassation a relevé le caractère «'approximatif'» du calcul du bénéfice escompté.

Les appelants font également grief à la société de son inertie et de son silence.

Ils font état de leurs démarches pour recevoir le contrat de réservation alors qu'ils avaient signé une procuration chez le notaire et que la banque avait viré les fonds, pour recevoir l'acte de vente signé, pour obtenir des informations sur les travaux et la date de fin de ceux-ci, reportée de deux mois.

Ils ajoutent qu'ils lui ont demandé en vain début décembre 2006 son avis sur la possibilité de défiscaliser des sommes payées au titre de leur achat et que celle-ci a répondu, le 23 février 2007, à un nouveau courrier de leur part du 5 février 2007 que leur agacement était dû à une situation conflictuelle entre le promoteur et les intervenants, ne répondant donc pas à leur courrier.

Ils contestent «'rouler sur l'or'».

Ils réclament le paiement de la somme de 67.440 euros au titre des loyers soit la différence entre le loyer annoncé et le loyer perçu durant les 20 ans de la simulation.

Ils affirment devoir conserver le bien pour éviter une perte financière importante et, donc, rembourser le crédit.

Ils réclament la somme de 94.705 euros pour la période comprise entre novembre 2006 et janvier 2016 correspondant «'aux années de la simulation censée prouver l'absence de risque, au coût des intérêts non calculés'» dans cette simulation et payés par eux.

Ils ajoutent le coût des assurances obligatoires sur la durée du prêt, 27 ans.

Ils se prévalent d'une mise en demeure du 20 décembre 2007.

Dans ses dernières écritures en date du 30 juin 2016, la société Audit et Solutions conclut à la confirmation du jugement.

Subsidiairement, en ce qui concerne le loyer, elle demande de prendre en compte l'impact fiscal de loyers supplémentaires au taux marginal de 45 % et de procéder à un abattement sur la somme réclamée compte tenu de l'existence d'une seule perte de chance et de la capitalisation demandée.

La société expose que les époux avaient déjà choisi le principe d'un achat immobilier dans le cadre de la loi Robien dont le mécanisme est simple et qui n'excède pas les obligations d'information d'un agent immobilier.

Elle expose que si le groupe Audit et Solutions a une branche de gestion de patrimoine, il s'agit d'une autre société qui n'a pas été en relation avec M. et Mme [U] et qui n'est pas partie à la procédure. Elle leur reproche de présenter un document publicitaire postérieur. Elle conteste être conseil en gestion de patrimoine.

Elle soutient qu'elle a agi comme agent immobilier au travers d'un sous agent, M. [H].

Elle déclare qu'elle est spécialisée dans la vente d'immobilier neuf bénéficiant d'optimisation fiscale et qu'elle intervenait en sous agent de la société Mirabeau Valley, détenteur d'un mandat de vente du promoteur.

Elle déclare également que M. [H] agissait pour le compte de la société Patrimonia Consulting à l'enseigne Audit et Solutions, sous agent d'Audit et Solutions.

Elle déclare enfin que, comme tout agent immobilier, elle offre souvent un service de suivi pour la recherche de crédit et suit ses clients jusqu'à la signature de l'acte.

Elle affirme donc que le sous agent de la société Audit et Solutions a rencontré à leur demande M. et Mme [U] et leur a présenté des projets.

Elle affirme ainsi être intervenue comme agent immobilier qui, dans le cadre de ses fonctions, peut valider le principe et le choix de ses clients de procéder à un achat avec une défiscalisation. Elle souligne qu'aucune étude de patrimoine ne lui a été demandée.

Elle indique être intervenue comme intermédiaire de la vente mais sans mandat de location ou de gestion, les époux ayant contracté des agents immobiliers sans lien avec elle pour mettre leur bien en location. Elle fait état d'interventions après la livraison à titre purement commercial.

Elle conteste tout manquement à son devoir de conseil.

Elle déclare que les époux ont souhaité effectuer un investissement dans le cadre de la loi Robien, qu'ils ne contestent pas la valeur du bien acquis et indique qu'ils ont eu connaissance de toutes les caractéristiques des offres de prêt ayant même fait jouer la concurrence avant de souscrire à l'offre du Crédit agricole qu'ils ont eux-mêmes choisi.

En ce qui concerne les loyers, elle indique qu'ils justifient eux-mêmes d'annonces de loyers de 920 et 950 euros et déclare qu'un écart de 10 % ne caractérise pas une faute.

Elle conteste que la simulation évoquée émane d'elle et considère qu'une simulation n'est qu'un document de travail non abouti et non une étude.

Elle ajoute qu'il y a eu plusieurs simulations.

Elle souligne le caractère aléatoire des éléments du document invoqué, le taux du crédit et sa durée, la valeur locative réelle et la valeur de revente. Elle en conclut que chaque modification entraîne d'importantes conséquences sur le résultat et observe que les époux n'ont pas acheté des obligations à taux fixe.

Elle souligne également la mention «'document non contractuel'» apposée. Elle déclare que le document démontre clairement la nécessité d'un effort mensuel moyen de centaines d'euros et donc nullement l'existence d'une opération auto financée. Elle estime non transposable l'arrêt de la cour d'appel de Rennes fondé sur une étude.

Elle fait valoir que la valeur mentionnée est le montant maximum du loyer fixé par la loi Robien et que les appelants le savaient ainsi qu'il résulte d'un courrier de leur part en date du 13 septembre 2006. Elle fait état d'un élément non débattu et soutient que les époux ne peuvent prétendre que le prix indiqué correspondait à la valeur locative du marché.

Elle fait valoir que cette valeur locative est celle indiquée par le vendeur et son mandant, la société Mirabeau Valley. Elle déclare qu'elle a repris ces valeurs sans les certifier ainsi qu'il résulte de la mention «'non contractuel'».

Elle ajoute que le mandat de gestion donné par les époux ne comporte pas de valeur indicative et en infère qu'ils ont été informés qu'il existait un doute sur la valeur et qu'ils ont validé, en dehors d'elle, un montant de loyer après avoir réclamé un montant supérieur. Elle en conclut que l'évaluation jugée trop optimiste émane d'un tiers.

Elle conteste que le promoteur ait envisagé un loyer inférieur, le montant invoqué correspondant à une moyenne et étant estimé à la date de la réception, deux ans plus tard.

La société fait état de préjudices liés aux retards et à une qualité insuffisante du bien dont elle n'est pas responsable.

Elle affirme que le tableau de simulation du crédit inclut le remboursement en capital et en intérêts.

Elle estime que les époux ne peuvent prétendre ignorer qu'une simulation en matière d'investissements immobiliers intègre les revenus et les intérêts payés.

Elle déclare que le terme de «'bénéfice'» n'est que le résultat du calcul du tableau ce que les époux ont compris. Elle décrit la simulation.

Elle souligne que les mensualités réelles de l'emprunt, 1.509,19 euros, qui incluent les intérêts et assurances sont inférieures aux échéances prises en compte dans les simulations ce qui démontre que celles-ci n'ont pas été tronquées.

En ce qui concerne le préjudice locatif, elle soutient qu'il ne peut s'agir que d'une perte de chance et qu'il existe toujours un risque locatif sur le prix et la vacance. Elle considère que le préjudice réside dans la perte de chance de percevoir durant l'investissement un loyer plus élevé. Elle estime prématuré d'indemniser un préjudice futur éventuel sur les 10 prochaines années et rappelle les conséquences de la capitalisation. Elle considère que l'indemnité ne peut excéder 30 % et rappelle que les loyers supplémentaires génèrent des impôts supplémentaires.

En ce qui concerne le préjudice lié aux intérêts et à l'assurance, elle réfute toute faute et tout dommage, la simulation ayant prévu un montant à rembourser supérieur au montant dû. Elle ajoute que les appelants ne justifient pas avoir voulu vendre le bien rapidement et avoir été trompés par le tableau.

Elle affirme également qu'ils oublient la réévaluation indiciaire des loyers et les avantages fiscaux. Elle relève que le prix de vente dans dix ans n'est pas connu.

En ce qui concerne l'assurance, elle soutient que celle-ci est la contrepartie d'une garantie effective qui n'entre pas dans le conseil de l'agent immobilier.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 janvier 2017.

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Sur la nature de l'intervention de la société Audit et Solutions

Considérant que, dans sa brochure commerciale au nom du «'Groupe Audit et Solutions'» datée de 2007, «'Audit et Solutions'» se présente comme une entreprise conseil dans le secteur de la «'stratégie financière et immobilière'», proposant «'clefs en mains'» des solutions d'investissement patrimoniales et fiscales'; que son associé fondateur dans une rubrique intitulée «'avis de l'expert'» expose que «'Audit et Solutions'sélectionne en toute objectivité des programmes immobiliers répondant à un ensemble de critères stricts qui vous permettra d'appréhender avec sérénité votre investissement immobilier'»'; qu'il est mentionné, notamment, qu'«'Audit & Solutions vous accompagne dans toutes vos démarches'»';

Considérant que si la brochure est au nom du «'groupe'», l'exposé de ses prestations ne distingue pas les sociétés qui les effectueraient';

Considérant que, sur son site Internet, «'Audit & Solutions'» se présente comme «'une société indépendante qui se développe selon deux axes, les solutions d'investissement immobilier d'une part et de gestion de capitaux d'autre part'»'; qu'elle y présente le dispositif de la loi Robien en précisant « qu'un conseiller en gestion de patrimoine ... vous apportera des conseils, montera le dossier Robien'»';

Considérant que ces brochures et ce site décrivent son métier qui consiste à «'alléger sa fiscalité ... se constituer un patrimoine ...'» et ses moyens soit, notamment, dresser un bilan de votre situation personnelle, présenter les solutions d'investissement qui vous correspondent le mieux, réaliser des simulations chiffrées afin d'évaluer l'impact financier et fiscal de vos projets'; qu'Audit & Solutions promet d'assister le client potentiel avant l'opération grâce à un consultant personnel qui sélectionne le programme immobilier le mieux adapté, recherche le financement et met en place la gestion locative et pendant l'opération, facilitant toutes les démarches pour remplir la déclaration d'impôts ou gérer le bien';

Considérant qu'ils décrivent ainsi une activité de conseil en gestion de patrimoine sans distinguer les différentes structures d'Audit & Solutions';

Considérant que si les éléments figurant dans ces brochures et sur ce site sont postérieurs à l'opération, la société intimée ne démontre pas qu'elle exerce depuis celle-ci d'autres activités';

Considérant que 4 personnes au nom d'une association de défense font état de conseils émanant de la société identiques à ceux mentionnés par M. et Mme [U] et décrivant des diligences excédant celles d'un agent immobilier';

Considérant que M. et Mme [U] versent aux débats deux simulations';

Considérant que la société conteste en être l'auteur';

Mais considérant, d'une part, qu'elle n'avait pas nié en être l'auteur dans ses conclusions devant le tribunal';

Considérant, d'autre part, que M. et Mme [U] produisent également deux simulations rédigées en termes identiques - portant d'autre biens et d'autres sommes - adressées par télécopie par la société Audit & Solutions';

Considérant que M. et Mme [U] démontrent donc que les simulations produites émanent de la société';

Considérant, enfin, qu'il résulte des échanges de courriels produits - dont certains ont pour objet «'projet de défiscalisation'» - que M. et Mme [U] ont eu comme interlocuteur M. [H] dont l'adresse courriel est «'NicolasFranck@auditsolution.com'»'; que celui-ci n'a nullement précisé que, nonobstant son adresse courriel, il n'intervenait pas pour la société Audit & Solutions notamment lorsque les époux se sont plaints de cette société';

Considérant en outre que l'adresse courriel de l'assistante de M. [H], qui l'a remplacée à certains moments, est «'kelly. marchini@auditsolution.com'» et son adresse postale figurant sur un de ses courriels l'adresse de la société Audit &Solutions';

Considérant, enfin, que des échanges ont eu lieu également avec Mme [V] dont les courriels portant la mention «'Audit et Solutions'»';

Considérant que les interlocuteurs des époux [U] sont donc intervenus pour le compte de la société Audit & Solutions';

Considérant qu'il résulte de ces échanges que la société a été l'intermédiaire entre le promoteur de l'ensemble immobilier et les époux, a examiné le volet défiscalisation de l'opération et s'est chargée de trouver un financement, peu important que la banque ait in fine été choisie par M. et Mme [U]'; que ces courriels excèdent les échanges avec un agent immobilier';

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que, comme l'a jugé le tribunal, la société Audit & Solutions s'est présentée et comportée à l'égard des époux en qualité de conseiller en patrimoine et non d'agent immobilier';

Sur les fautes reprochées à la société

Considérant que la société était donc tenue de délivrer une information sincère sur les caractéristiques du produit';

Considérant que les simulations produites concernant le bien acquis émanent de la société';

Considérant que la mention «'Document non contractuel'» est une réserve de style qui ne peut exonérer son auteur';

Considérant que la première simulation mentionne un emprunt d'une durée de 20 ans à taux fixe de 4,30 % et une mensualité de 1.870 euros'; qu'elle fait état d'un remboursement sur 20 ans d'une somme annuelle de 22.435 euros, de la perception d'un loyer annuel de 12.132 euros - augmentant régulièrement -, de taxes et frais de 20 % imputant ce loyer et d'une réduction d'impôts'; qu'elle conclut à un effort de trésorerie moyen de 571 euros par mois';

Considérant qu'une seconde simulation mentionne également une épargne mensuelle de 571 euros et détaille le bénéfice enregistré en cas de revente du bien après une période de 9 à 12 ans';

Considérant que la société a également procédé à des simulations en cas d'une durée de remboursement du prêt de 25 ans';

Considérant que ces simulations prévoient un loyer mensuel hors charges de 1.011 euros';

Considérant qu'il n'est indiqué dans aucun document que le montant, de 1.117 euros, correspond au loyer maximal fixé pour obtenir le bénéfice de la loi Robien';

Considérant que le courrier postérieur de M. et Mme [U] précisant que leur bien ne pouvait être loué à un prix supérieur à 1.117 euros est sans incidence compte tenu du montant indiqué dans la simulation et de l'absence de toute mention que le loyer mentionné - inférieur à ce plafond - ne constitue qu'une valeur maximale pour bénéficier de la loi';

Considérant que le loyer mentionné n'est assorti d'aucune réserve';

Considérant que M. et Mme [U] ont donné des mandats de gestion de leur bien en 2006 et n'ont pu louer celui-ci, en 2009, que pour un loyer mensuel hors charges de 730 euros';

Considérant que la société ne justifie nullement que les époux auraient pu obtenir un prix supérieur'; que sa référence à des annonces pour la location d'appartements semblables n'est donc pas pertinente';

Considérant qu'elle n'établit pas davantage que cette différence est due au retard dans la livraison du bien ou à des désordres';

Considérant, d'une part, que si la société n'a pas à prémunir ses clients de tout aléa locatif, la différence entre la simulation et le loyer réel est particulièrement importante';

Considérant, d'autre part, qu'elle ne verse aux débats aucune pièce de nature à établir que le loyer mentionné par elle était justifié'; qu'elle n'indique pas les éléments sur lesquels était fondé ce loyer';

Considérant qu'elle a donc surestimé celui-ci'sans justifier de son calcul ;

Considérant que la société a, en conséquence, manqué à son obligation d'information sincère sur les caractéristiques du produit';

Considérant que la première simulation prend en compte le remboursement des intérêts';

Mais considérant que la simulation portant sur la revente du bien ne mentionne que le prix de vente - identique au prix d'achat - et le capital dû en fonction de l'année de revente'; qu'elle déduit de cette différence un «'bénéfice'» et, donc, un taux de rendement ; que ce bénéfice varie de 80.430 euros à 123.269 euros';

Considérant que, dans cette simulation, la société calcule donc un «'bénéfice'» fondé uniquement sur la différence entre le prix de revente et le capital restant dû'; qu'elle ne fait pas état des intérêts payés par les emprunteurs pendant 9 à 12 ans'ou des cotisations d'assurances ;

Considérant que le calcul d'un «'bénéfice'» sans prendre en compte les sommes réellement payées est faux';

Considérant que, par cette présentation, la société a donc fait croire à ses clients qu'ils percevraient un «'bénéfice'» dont le montant est erroné';

Considérant que le calcul effectué par les époux, justifié par les caractéristiques du prêt et le loyer perçu, démontre que l'opération est déficitaire de 6.144 euros après neuf ans et positive de 736 euros à la 12ème année'; que si ce calcul ne prend pas en compte les réductions d'impôts, l'impact de celles-ci ne compense pas la différence entre cette simulation et le résultat réel';

Considérant que ce document est donc faux et particulièrement sommaire'; qu'il émane d'un professionnel'; qu'il n'appartient pas aux clients potentiels de le compléter en fonction de leurs compétences propres';

Considérant qu'il incombe à la société, au titre de son devoir d'information, de fournir des renseignements utiles permettant à ses clients potentiels de se prononcer';

Considérant qu'elle a donc, également, manqué à ses obligations';

Considérant, enfin, qu'il résulte des courriels échangés que, postérieurement à la conclusion de l'opération, la société n'a pas répondu à leurs demandes d'information sur le report des travaux ou sur la possibilité de défiscalisation des sommes versées au titre de l'emprunt';

Considérant qu'elle a donc manqué à son obligation de diligence';

Sur les préjudices

Considérant que le préjudice subi par M. et Mme [U] ne peut être égal à la différence entre les loyers, la société ne pouvant être responsable des aléas locatifs, ou au coût des intérêts et assurances non inclus dans la seconde simulation, les époux ne justifiant ni de la revente du bien ni d'un préjudice causé par sa conservation';

Considérant que le manquement de la société à ses obligations a privé M. et Mme [U] des conseils et informations auxquels ils avaient droit';

Considérant que leur préjudice réside donc dans le fait que, mieux informés et conseillés, ils auraient pu renoncer à l'opération ou réaliser celle-ci à d'autres conditions';

Considérant que ce préjudice est donc constitué par cette perte de chance ;

Considérant que la finalité de l'opération conclue est la défiscalisation'; que l'opération elle-même est à longue échéance';

Considérant que les simulations proposées comportent d'importantes déficiences sur les calcul des bénéfices escomptés de l'acquisition litigieuse';

Considérant qu'au vu de l'ensemble des développements ci-dessus, la perte de chance des époux sera indemnisée par l'allocation d'une somme de 95.000 euros';

Considérant que, compte tenu de la nature de cette somme, les intérêts courront à compter du présent arrêt'; qu'ils seront capitalisés';

Considérant que le jugement sera donc infirmé en toutes ses dispositions';

Considérant que la société devra payer la somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens y compris ceux afférents aux procédures ayant donné lieu au jugement et à l'arrêt cassé';

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant de nouveau et y ajoutant,

Condamne la SAS Audit et Solutions à payer à M. et Mme [U] la somme de 95.000 euros à titre de dommages et intérêts,

Ordonne la capitalisation des intérêts,

Condamne la SAS Audit et Solutions à payer à M. et Mme [U] la somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la SAS Audit et Solutions aux dépens qui incluront ceux exposés devant le tribunal et la cour d'appel de Paris,

Autorise Maître Gourion-Levy à recouvrer directement à son encontre ceux des dépens qu'elle a exposés sans avoir reçu provision.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Monsieur Alain PALAU, président, et par Madame Sabine MARÉVILLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 15/07650
Date de la décision : 08/09/2017

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°15/07650 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-09-08;15.07650 ?
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