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23/05/2017 | FRANCE | N°16/03787

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre section 2, 23 mai 2017, 16/03787


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



SM

Code nac : 59B



12e chambre section 2



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 23 MAI 2017



R.G. N° 16/03787



AFFAIRE :



SA EGETRA





C/

SAS LEASECOM









Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 13 Avril 2016 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2012F0190



Expéditions exécutoires
>Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Anne laure DUMEAU



Me Bertrand ROL





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT TROIS MAI DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

SM

Code nac : 59B

12e chambre section 2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 23 MAI 2017

R.G. N° 16/03787

AFFAIRE :

SA EGETRA

C/

SAS LEASECOM

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 13 Avril 2016 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2012F0190

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Anne laure DUMEAU

Me Bertrand ROL

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT TROIS MAI DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SA EGETRA

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Anne laure DUMEAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 - N° du dossier 41850

Représentant : Me Cécile PION-SEBBAN de la SCP GOBERT ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

APPELANTE

****************

SAS LEASECOM

N° SIRET : 331 554 071

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Bertrand ROL de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20160433

Représentant : Me Patrick DE LA GRANGE, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Mars 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvie MESLIN, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie MESLIN, Président,

Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,

Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller,

Greffier F.F., lors des débats : Monsieur James BOUTEMY,

Vu l'appel déclaré le 20 mai 2016 par la société anonyme Egetra (société Egetra.) contre le jugement prononcé le 13 avril 2016 par le tribunal de commerce de Pontoise, dans l'affaire qui l'oppose à la société par actions simplifiée Leasecom (société Leasecom.);

Vu le jugement entrepris ;

Vu, enregistrées par ordre chronologique, les ultimes écritures notifiées par le réseau privé virtuel des avocats et présentées le :

- 21 février 2017 par la société Leasecom, intimée sur appel principal et appelante sur appel incident ;

- 24 février 2017 par la société Egetra, appelante à titre principal et intimée sur appel incident ;

Vu l'ensemble des actes de procédure ainsi que les éléments du dossier et pièces, transmises par chacune des parties.

SUR CE,

La Cour se réfère au jugement entrepris pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales de chaque partie. Il suffit, en synthèse, de rappeler les éléments constants suivants tirés des écritures d'appel.

1. données analytiques, factuelles et procédurales du litige

La société Egetra a le 21 juillet 2004, acheté plusieurs matériels informatiques auprès de la société Netcom laquelle lui a proposé de financer cette acquisition par l'intermédiaire d'un contrat de location. La société Netcom a mis la société Egetra en relation avec la société Leasecom, société de location financière ayant pour activité, l'acquisition, la location ainsi que la revente de matériels professionnels, notamment informatiques et bureautiques laquelle a ainsi,financé l'achat du matériel litigieux au travers un contrat de location mis en place le 21 juillet 2004 avant de re-financer ce matériel en le revendant au prix de 72 220, 21€ toutes taxes comprises à la société de crédit-bail CM-CIC selon facture du 31 décembre 2004. Le contrat de location a pris effet le 1er janvier 2005 pour 5 ans et 3 mois (21 trimestres) et est venu à échéance le 30 mars 2010. A cette date, la société CM-CIC a cédé le bien à la société Leasecom qui en est redevenue propriétaire.

La société Egetra ayant cessé de régler les loyers au-delà de la période initiale avant de dénoncer ce contrat le 12 mai 2011, a été assignée le 15 mars 2012 par la société Leasecom devant le tribunal de commerce de Pontoise à l'effet d'être condamnée, sous exécution provisoire, à payer à celle-ci les arriérés de loyers fixés à 31 057, 76€ toutes taxes comprises à titre d'arriérés de loyers outre, les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 17 mai 2011, 4 000€ à titre de frais irrépétibles ainsi que les entiers dépens.

Dans le dernier état de ses écritures, la société Leasecom a réitéré cette demande en la complétant, priant finalement les premiers juges de :

- vu les articles 1134 et 1147 du Code Civil ;

- constatant que la société Egetra a résilié le contrat de location 204L23589 le 12 mai 2011 ;

- constatant, conformément à l'article 11 des conditions générales, que le contrat qui s'est prorogé pour deux périodes d'un an (du 1er avril 2010 au 1er janvier 2012), arrivera à son terme 1e 30 mars 2012 ;

- constatant que les loyers ne sont plus payés depuis le 1er avril 2010 ;

- condamner la société Egetra à payer à la société Leasecom la somme de 31 057, 76 € TTC augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de la mise en demeure (17 mai 2011) capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;

- constatant que les équipements loués n'ont jamais été restitués à leur légitime propriétaire,

- condamner la société Egetra à verser à la société Leasecom la somme de 27 060 euros au titre des indemnités d'utilisation, à parfaire à la date de restitution effective du bien,

- condamner la société Egetra à restituer les équipements loués, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, à compter de la signification de la décision à intervenir

- prononcer 1'exécution provisoire de la décision à intervenir ;

- condamner la société Egetra à payer à la société Leasecom la somme de 4 000 € an titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par jugement contradictoire du 13 avril 2016, le tribunal de commerce de Pontoise a tranché le litige en ces termes :

- constate que la société Egetra renonce à sa 'n de non-recevoir ;

- condamne la société Egetra à payer à la société Leasecom la somme de 31 057,76 euros avec intérêts au taux légal à compter du 17 mai 2011 ;

- déclare la société Egetra mal fondée en sa demande reconventionnelle, l'en déboute ;

- déclare la société Leasecom mal fondée en sa demande de règlement d'indemnités d'utilisation du matériel concerné, l'en déboute ;

- ordonne à la société Egetra de restituer les matériels au siège de la société Leasecom sous astreinte de 30 euros par jour de retard, passé un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement et pour une durée d'un mois, après quoi il appartiendra à la société Leasecom de saisir le juge de l'exécution d'une nouvelle demande, le cas échéant ;

- ordonne la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

- condamne la société Egetra à payer à la société Leasecom la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- déclare la société Egetra mal fondée en sa demande en paiement sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civi1e, l'en déboute ;

- condamne la société Egetra aux dépens de l'instance, liquidés à la somme de 92,04 euros, ainsi qu'aux frais d'acte et de procédure d'exécution, s'il y a lieu ;

- ordonne l'exécution provisoire du présent jugement.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont retenu que : - la société Egetra n'a émis aucune critique ou réclamation concernant le matériel, sa contenance ainsi que ses modalités de livraison ; - la société Leasecom n'est pas partie prenante à la commande de matériel informatique puisqu'elle n'est intervenue que dans le cadre du contrat de financement conclu entre elle et la société Egetra ; - le contrat de location signé le 21 juillet 2004 n'est pas un contrat de crédit-bail ; - il s'est appliqué sans incident durant la période initiale, le locataire s'étant régulièrement acquitté du paiement des loyers ; - à l'issue de la période initiale de location, le matériel litigieux et le bail ont été cédés à la société Leasecom ; - la société Egetra a cessé le paiement des loyers en avril 2010 et a finalement, dénoncé le contrat de location le 12 mai 2011 ; - ce contrat ayant donc été tacitement reconduit du 1er avril 2010 au 30 mars 2011 et du 1er avril 2011 au 30 mars 2012, la société Egetra reste cependant redevable du paiement des loyers dûs pour 8 trimestres (période du 1er avril 2010 au 30 mars 2012) ; - aucune circonstance d'enrichissement sans cause soit établie ; - la société Leasecom n'ayant pas indiqué de manière suffisamment précise lors de la mise en demeure du 29 novembre 2011, l'adresse et les conditions auxquelles la restitution du matériel devait se faire, sera déboutée de sa demande en paiement d'indemnités d'utilisation ; - le contrat litigieux étant un contrat de location et non pas un contrat de crédit-bail, la société Egetra doit enfin, être condamnée sous astreinte, à restituer le matériel à la société Leasecom.

La société Egetra a déclaré appel de cette décision. La clôture de l'instruction a été ordonnée le 7 mars 2017 et l'affaire, a été renvoyée à l'audience du 21 mars 2017 tenue en formation de juge rapporteur pour y être plaidée. A cette date, les débats ont été ouverts et l'affaire, renvoyée à l'audience de ce jour pour plus ample délibéré.

2. dispositifs des conclusions des parties

Vu les articles 455 et 954 du code de procédure civile ;

La société Egetra prie la Cour de :

- dire et juger la société Egetra recevable et bien fondée en son appel du jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 13 avril 2016 ;

- réformer ledit jugement en toutes ses dispositions ;

1. À titre principal

- vu les articles 1108, 1126 et 1131 du code civil ;

- annuler les contrats issus de la clause de renouvellement tacite du contrat n° 204L23589 du 21 juillet 2004 et nés le 1er avril 2010 et le 1er avril 2011 ;

- en conséquence,

a) sur la demande de la société Leasecom en paiement de la somme de 31 057, 76€ au titre de la période postérieure à l'expiration du contrat 204L23589 courant du 1er avril 2010 au 31 mars 2012,

- débouter la société Leasecom de toutes ses demandes, 'ns et conclusions ;

- vu les articles 1108 et 1131 du code civil ;

- et à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article 11 du contrat 204L23589 et de l'article 1152 du code civil,

- fixer une indemnité de jouissance du fait de l'impossibilité de la restitution en nature de la mise à disposition du matériel sur la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2012, à la somme 24€ (1 € par mois) ;

b) sur la demande en restitution de matériel

- débouter la société Leasecom de sa demande de restitution en nature du matériel, lequel a perdu toute valeur marchande à la date du 31.03.2010 ;

- vu les articles 1108 et 1131 du code civil ;

- et à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article 11 du contrat 204L23589 et de l'article 1142 du code civil,

- fixer la restitution du matériel en numéraire à une somme de 15, 24€ HT à titre de dommages-intérêts ;

2. A titre subsidiaire,

- vu les articles 1377 et suivants du code civil ;

a) sur la demande de la société Leasecom en paiement de la somme de 31 057, 76€ au titre de la période postérieure à l'expiration du contrat 204L23589 courant du 1er avril 2010 au 31 mars 2012

- débouter la société Leasecom de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- fixer la contrepartie de la jouissance du matériel du 1er avril 2010 au 31 mars 2012, à la somme 24€ (1€ par mois) à titre d'indemnité ;

b) sur la demande en restitution du matériel

- débouter la société Leasecom de sa demande de restitution en nature du matériel, lequel a perdu toute valeur ;

- fixer la restitution du matériel en numéraire à une somme de 15, 24€ HT a titre de dommages-intérêts ;

3. A titre infiniment subsidiaire,

- fixer l'indemnité d'utilisation à 1€ par mois, soit sur la période du 1er avril 2012 au 1er août 2016 à la somme de 52€ ;

- condamner la société Leasecom à payer à la société Egetra la somme de 4 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Leasecom aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Anne-Laure Dumeau en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Leasecom demande à la Cour de :

- vu les articles 1134, 1147 et suivants du code civil ;

- vu le jugement du Tribunal de commerce de Pontoise du 13 avril 2016 ;

- constatant que la société Egetra a résilié le contrat de location 204L23589, le 12 mai 2011 ;

- constatant, conformément à l'article 11 des conditions générales, que le contrat s'est prorogé pour deux périodes d'un an (du 1er avril 2010 au 1er janvier 2012), et est arrivé à son terme le 30 mars 2012 ;

- constatant que les loyers ne sont plus payés depuis le 1er avril 2010 ;

- confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné la société Egetra à payer à la société Leasecom la somme de 31 057, 76 € TTC, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de la mise en demeure (17 mai 2011), capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;

- constatant que les équipements loués n'ont jamais été restitués à leur légitime propriétaire ;

- confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné la société Egetra à restituer les équipements loués, sous astreinte de 30€ par jour de retard, à compter de la signification de la décision à intervenir ;

- sur les indemnités d'utilisation (appel incident) ;

- réformer la décision entreprise en ce qu'elle n'a pas fait droit à la demande de Leasecom sur ce point ;

- statuant de nouveau ;

- condamner la société Egetra à verser à la société Leasecom la somme de 51 182€ au titre des indemnités d'utilisation, à parfaire à la date de restitution effective du bien ;

- condamner la société Egetra à payer à la société Leasecom la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction pour ceux le concernant au profit de Maître Bertrand Rol, AARPI-JRF avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC [code de procédure civile].

Il doit être renvoyé à chacune de ces écritures pour un exposé complet de la synthèse argumentative de la position de chacune des parties, dont l'essentiel sera développé dans le cadre des motifs de cet arrêt.

CELA ETANT EXPOSE,

La Cour statue sur le mérite d'une demande en paiement d'un solde impayé de loyers impayés, prétendument dûs à la société Leasecom en application d'un contrat de location financière conclu entre les parties le 21 juillet 2004 pour 63 mois et tacitement renouvelable, afin de permettre à la société Egetra de disposer d'un matériel informatique professionnel adapté à ses besoins.

La société Egetra s'oppose à cette réclamation, en arguant de la nullité des contrats nés de la tacite reconduction du contrat initial pour absence de cause, d'une part et d'un enrichissement sans cause, d'autre part.

Sur la nullité des contrats des 1er avril 2010 et 1er avril 2011

La société Egetra expose que : - un contrat de location financière ayant lors de son renouvellement tacite, donné naissance à un nouveau contrat, ce dernier doit à cette date, répondre aux conditions habituelles de validité des contrats et ainsi, avoir une cause ; - les paramètres sur la base desquels le loyer d'origine a été fixé ayant en effet alors disparu, il doit en être tenu compte dans la fixation du nouveau loyer ; - la cause du contrat de location financière ne se réduit d'ailleurs pas à la mise à disposition du matériel laquelle au demeurant évolue, puisqu'elle ne correspond alors plus à du matériel neuf, mais à un matériel en état d'usage ayant donc une valeur marchande moindre ; - en l'espèce, compte tenu des termes de la clause de reconduction tacite, la société Egetra n'ayant pas dénoncé le contrat pour le 31 mars 2010, un nouveau contrat est né le [Date naissance 1] 2010 puis un second, le 1er avril 2011; - dans le contrat initial, le loyer intègre nécessairement le coût de la rémunération de la société Leasecom en contrepartie du service rendu à la société Egetra et donc, celui d'avoir acheté le matériel commandé et choisi par celle-ci auprès de la société Netcom pour répondre à ses besoins particuliers ; - arrivé à terme, le contrat a produit l'intégralité de ses effets et la société Egetra a acquitté à cette date, le prix d'acquisition du matériel ainsi que la rémunération de la société Leasecom ; - le loyer trimestriel de 3 882, 22€ toutes taxes comprises n'a donc plus aucune contrepartie lors de la formation du nouveau contrat issu de la reconduction, le matériel mis à disposition n'ayant plus de valeur marchande et étant totalement amorti dans la comptabilité de la société Leasecom ; - les contrats nés les 1er avril 2010 et 1er avril 2011 sont donc nuls au visa des articles 1108, 1126 et 1131 du code civil, le loyer réclamé ne rémunérant plus rien; - le contrat litigieux est un contrat de financement même si au final, il n'y a pas d'option d'achat dès lors que le bailleur n'est pas un établissement de crédit ; - le loyer du contrat issu de la clause de reconduction tacite ne peut donc correspondre qu'à la valeur du matériel à cette période qui au bout de 5 ans d'utilisation, ne peut être que résiduelle ; - le contrat de bail entre la société Egetra et Leasecom n'est en réalité que l'habillage d'un financement du matériel litigieux concernant la société Egetra et la société CM-CIC.

La société Leasecom répond que : - après renouvellement de la durée du bail, les loyers sont dûs en contrepartie de la mise à disposition du matériel litigieux; - le contrat de location financière litigieux ayant été dénoncé le 12 mai 2011, a par application stricte de la clause de renouvellement tacite qui y est insérée, été prorogé à deux reprises et cette reconduction oblige au paiement des sommes réclamées ; - le contrat renouvelé est au demeurant parfaitement causé en ce sens que le matériel concerné conserve une valeur d'usage et marchande ; - le montant de la cession entre celui qui re-finance et la société Leasecom est purement conventionnel et ne traduit en rien, la valeur marchande du bien ; - du propre aveu de la société Egetra, les équipements sont en l'espèce au demeurant toujours en exploitation en 2016 ; - ces équipements bureautiques, possèdent une valeur de revente d'environ 25 à 35 % du prix neuf après 5 ans et donc un utilité économique forte ; - la société Egetra met en réalité en cause le montant des loyers qu'elle considère comme étant trop élevé et non pas la cause, contrepartie du bail mais il est constant que l'appréciation 'économique' d'une partie ne justifie pas ' en soi ' la nullité du contrat.

Il est constant que le contrat litigieux s'analyse en un contrat de location financière simple sans option d'achat, aux termes duquel, la société Leasecom, bailleresse, s'est engagée à mettre en location auprès de la société Egetra un équipement précisément désigné (6 imprimantes Laserjet Multifonctions 4100 et 1 Netcom Server RAID 16 voies.) à compter du 1er janvier 2005, durant 63 mois et en contrepartie du versement selon termes à échoir, de 21 loyers trimestriels de 3 246 euros hors taxes.

Il est tout aussi constant constant que la société Egetra a dénoncé le contrat de location financière litigieux selon lettre du 12 mai 2011 - voir cote 4 de la société Leasecom.

Ce contrat a donc été reconduit à deux reprises pour 12 mois à compter du 1er avril 2010 par stricte application de l'article 11 des conditions générales de location qui se trouve être ainsi libellé : 'Au delà de la durée prévue aux conditions particulières, le Contrat sera tacitement reconduit aux mêmes conditions par périodes successives de 12 mois, sauf pour l'une des parties à notifier à l'autre par lettre recommandée avec accusé de réception en respectant un préavis de 6 mois au moins avant la date d'échéance, son intention de ne pas reconduire le contrat.'.

La société Egetra qui ne conteste pas avoir eu, au cours de la période alléguée de reconduction, l'usage du matériel concerné par ce contrat de location financière simple sans option d'achat, est donc nécessairement tenue de régler les loyers correspondants à cette période de mise à disposition sans pouvoir sérieusement se prévaloir d'une absence de cause du fait que le matériel dont s'agit serait prétendument dénué de tout valeur marchande et de toute utilité économique.

La cause du contrat litigieux réside dans cette mise à disposition du matériel désigné par celui-ci dont l'absence de toute valeur marchande n'est au demeurant nullement établie par quel qu'élément précis et circonstancié que ce soit, peu important son obsolescence supposée. La facture produite aux débats par la société Egetra à l'appui de ses dires - voir pièce 5, correspond en effet, au prix de rétrocession convenu entre le refinanceur (CM-CIC) et le bailleur et ne peut pour cette raison, en l'absence de toute autre justification, justifier à elle seule de manière sérieuse, de la valeur marchande réelle de l'équipement litigieux.

Aucun élément du dossier ne justifie au demeurant que cet équipement est, ainsi que le soutient la société Egetra, impossible à restituer en nature.

La Cour relève par ailleurs, à l'instar de la société Leasecom, que la société Egetra a lors de la délivrance de l'assignation en référé du 27 mai 2016 tendant à obtenir la suspension de l'exécution provisoire de la décision entreprise, indiqué de manière précise qu'elle avait 'besoin de ce matériel pour son activité', à telle enseigne que sa restitution 'entravera son activité'.

Il suit de tout ce qui précède que la société Egetra doit être déboutée de sa demande en nullité de contrat pour absence de cause.

Sur l'enrichissement sans cause

La société Leasecom souligne à juste titre, pour des raisons identiques à celles ayant conduit la Cour à écarter le grief de nullité pour absence de cause qu'aucune des conditions d'un enrichissement sans cause ne se trouve réunie dans les circonstances précises de la présente espèce.

L'enrichissement procuré par la perception des loyers trouve ainsi sa contrepartie, dans l'utilisation du matériel par la société Egetra qui n'a pas restitué celui-ci.

Ce grief sera écarté.

Sur la demande de restitution du matériel

La société Leasecom observe être demeurée propriétaire du matériel litigieux tout au long de la période de location et se trouver subséquemment fondée du fait de la résiliation du contrat litigieux, à en obtenir la restitution sous astreinte.

Selon l'article 11 du contrat applicable : ' Dès la fin de la location, le Locataire devra restituer au Bailleur, au lieu désigné par celui-ci, le Matériel en parfait état d'entretien et de fonctionnement, les frais de transport et de déconnexion incombant au Locataire.(...).

Dès lors qu'il est constant que la restitution du matériel n'a jamais eu lieu, ce chef de demande sera, par stricte application de ces stipulations contractuelles, accueillie dans les termes du dispositif de cette décision.

Sur la demande en paiement des indemnités d'utilisation

La société Leasecom conclut à l'appui de sa demande incidente de réformation qu'elle est en droit d'obtenir le paiement de ces indemnités par application des dispositions complétives de l'article 11 précité s'énonçant comme suit : ' Si le Locataire ne restitue pas immédiatement et de son propre chef le Matériel au Bailleur à l'expiration du Contrat, il est redevable d'une indemnité égale aux loyers jusqu'à la restitution effective du Matériel. Le Locataire ne bénéficie en vertu du Contrat d'aucun droit d'acquisition du Matériel pendant ou au terme de la période de location.'

Elle souligne avoir, par lettre du 29 novembre 2011, mis son adversaire en demeure de procéder à cette restitution et précise que : - l'indemnité de résiliation n'est pas fondée sur la valeur du bien litigieux ; - elle est due, en raison du refus de restitution de ce matériel à son légitime propriétaire ; - la facture de cession du matériel établie aux termes de la période initiale de location n'est au demeurant qu'un titre comptable faisant état d'une valeur totalement détachée de la valeur rélle de l'équipement ; - l'attitude de la société Egetra la prive, du produit qu'elle pourrait escompter de la cession de ce matériel.

Il est constant que le matériel loué n'a pas été restitué.

Outre que le locataire devait en application du contrat litigieux prendre l'initiative d'une telle restitution, la société Leasecom justifie l'avoir mise en demeure de s'exécuter selon lettre du 29 novembre 2011 - voir cote 19.

La société Egetra est donc tenue par application des stipulations contractuelles ci-dessus rappelées, auxquelles elle a valablement consenti, de verser à la partie adverse les indemnités d'utilisation réclamées par son adversaire.

Elle observe cependant à juste titre que cette indemnité qui a pour objet de la contraindre en tant que locataire à restituer le matériel au bailleur en évaluant de manière forfaitaire le préjudice consécutif à son inobservation, s'analyse en une clause pénale. La société Leasecom admettant en p. 9 de ses écritures qu'un tel équipement bureautique possède généralement au bout de cinq ans, une valeur de revente de 25 à 35 % du prix neuf, il sera après modération de cette clause au visa de l'ancien article 1152 du code civil, dans sa rédaction applicable antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, fait droit à ce chef de demande dans la limite de 30 000€.

Sur les autres demandes

Vu les articles 696 et 699 du code de procédure civile ;

La société Egetra, partie perdante au sens de ces dispositions, sera condamnée aux entiers dépens d'appel avec faculté de recouvrement direct en faveur de Maître Bertrand Rol AARPI -JRF, avocats.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire.

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions SAUF, en ce qu'il n'a pas fait droit à la demande de condamnation de la société anonyme Egetra au paiement d'une indemnité d'utilisation jusqu'à la restitution effective du matériel litigieux.

STATUANT du seul chef de cette disposition réformée et Y AJOUTANT :

CONDAMNE la société anonyme Egetra à payer à la société par actions simplifiée Leasecom, une somme de trente mille euros (30 000€) à titre d'indemnité d'utilisation.

CONDAMNE la société anonyme Egetra aux entiers dépens d'appel, avec faculté de recouvrement direct au profit de Maître Bertrand Rol, AARPI-JRF avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu l'article 700 du code de procédure civile ; CONDAMNE la société anonyme Egetra à verser à la société par actions simplifiée Leasecom une indemnité de trois mille euros (3 000€) à titre de frais irrépétibles d'appel.

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sylvie MESLIN, Président et par Monsieur BOUTEMY, Faisant Fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier f.f., Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre section 2
Numéro d'arrêt : 16/03787
Date de la décision : 23/05/2017

Références :

Cour d'appel de Versailles 2B, arrêt n°16/03787 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-23;16.03787 ?
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