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19/05/2017 | FRANCE | N°15/02661

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 19 mai 2017, 15/02661


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 63C



1ère chambre

1ère section





ARRET N°



par défaut



DU 19 MAI 2017



R.G. N° 15/02661



AFFAIRE :



SCI CJM ILE DE FRANCE



C/



[Z] [L]

Société CREDIT COOPERATIF

SARL [F]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Mars 2015 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE

N° Chambre : 01

N° RG : 12/05897
>

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

AARPI JRF AVOCATS



Me Pierre GUTTIN



SCP DIEMUNSCH FEYEREISEN RUBIN





REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE DIX NEUF MAI DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de Versailles,...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 63C

1ère chambre

1ère section

ARRET N°

par défaut

DU 19 MAI 2017

R.G. N° 15/02661

AFFAIRE :

SCI CJM ILE DE FRANCE

C/

[Z] [L]

Société CREDIT COOPERATIF

SARL [F]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Mars 2015 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE

N° Chambre : 01

N° RG : 12/05897

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

AARPI JRF AVOCATS

Me Pierre GUTTIN

SCP DIEMUNSCH FEYEREISEN RUBIN

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DIX NEUF MAI DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SCI CJM ILE DE FRANCE

N° SIRET : 333 750 446

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentant : Me Bertrand ROL de l'AARPI JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - Représentant : Me SEGARD de la SCP UGGC AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Madame [Z] [L]

née le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Assignation avec signification de la déclaration d'appel par acte en date du 29 mai 2015 remis en l'étude de l'huissier de justice

Notificaiton des conclusions de la partie appelante par acte en date du 16 juillet 2015 remis en l'étude de l'huissier de justice

Société CREDIT COOPERATIF

N° SIRET : 349 974 931

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentant : Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - N° du dossier 15000136 - Représentant : Me Magali TARDIEU-CONFAVREUX de l'ASSOCIATION TARDIEU GALTIER LAURENT DARMON associés, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

SARL [F]

N° SIRET : [F]7

Siège social

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Prise en son établissement secondaire

situé [Adresse 5]

[Localité 1]

Représentant : Me Claire RUBIN de la SCP DIEMUNSCH FEYEREISEN RUBIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 482 - Représentant : Me LALOUX de la SCP RAFFIN & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Mars 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain PALAU, président, chargé du rapport, et Madame Anne LELIEVRE, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, président,

Madame Anne LELIEVRE, conseiller,

Madame Nathalie LAUER, conseiller

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

****************

La Sci CJM Ile de France est propriétaire de divers biens immobiliers commerciaux et était gérée par M. [J] [T].

Celui-ci possédait également à titre personnel des biens locatifs.

Mme [L] a exercé l'activité de secrétaire comptable au sein de la SCI CJM Ile de France du 17 juillet 2000 au 14 novembre 2011, date de sa mise à pied conservatoire avant son licenciement intervenu le 26 décembre 2011.

La banque Crédit Coopératif est l'établissement bancaire dans les livres duquel la société CJM Ile de France détenait un compte.

La Sarl [F] est le cabinet d'expertise comptable de la société CJM Ile de France.

Mme [L] a procédé à des détournements tant sur les comptes personnels de M. [T] que sur ceux de la société de septembre 2002 à novembre 2011.

Elle a établi de faux ordres de virement reproduisant la signature de M. [T] afin de procéder à des règlements du compte de la société auprès du Crédit Coopératif à son compte personnel. Elle a, pour masquer ces détournements, établi de fausses écritures en comptabilité notamment en augmentant les sommes réellement facturées par les fournisseurs et celles réellement payées au Trésor public.

Elle a également, à compter du 30 septembre 2010, émis des chèques à son ordre.

Par jugement définitif du 9 avril 2013, le tribunal correctionnel de Pontoise l'a reconnue coupable des faits d'escroqueries, abus de confiance et altération frauduleuse de la vérité dans un écrit commis entre le 1er octobre 2008 et le 30 octobre 2011.

Par lettre du 25 janvier 2012, la société a mis en demeure le Crédit Coopératif de lui restituer les sommes de 29.385,74 euros détournée au moyen de faux chèques émis par Mme [L] et de 163.506,71 euros détournée au moyen de faux ordres de virements.

Par lettre du 17 avril 2012, elle a résilié le contrat conclu avec le cabinet [F].

Par actes des 3 et 6 août 2012, la Sci CJM Ile de France a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Pontoise Mme [L], le Crédit Coopératif et la Sarl Cabinet [F] pour que ceux-ci soient condamnés solidairement à lui payer la somme principale de 194.723,61 euros.

Par jugement du 3 mars 2015, le tribunal a':

- condamné Mme [L] à payer à la Sci CJM Ile de France la somme principale de 194.723,61 euros et celle de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné de ce chef l'exécution provisoire du jugement,

- débouté la Sci CJM Ile de France de ses autres demandes,

- condamné la Sci CJM Ile de France à payer à la société Cabinet [F] la somme principale de 3.946,80 euros portant intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2014 avec capitalisation selon les modalités prévues par l'article 1154 du code civil et celle de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Sci CJM Ile de France à payer au Crédit Coopératif une indemnité de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [L] aux dépens.

Par déclaration du 9 avril 2015, la Sci CJM Ile de France a interjeté appel.

Dans ses dernières conclusions portant le numéro 3 en date du 23 décembre 2016, la Sci CJM Ile de France demande à la cour de':

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [L] à lui payer la somme principale de 194.723,61 euros et celle de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il a ordonné de ce chef l'exécution provisoire du jugement,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté le cabinet Cabinet [F] de sa demande de paiement d'une facture d'un montant de 8.718,84 euros et de sa demande de dommages intérêts pour procédure abusive,

- infirmer le jugement pour le surplus,

- condamner Mme [L] à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages intérêt en réparation de son préjudice économique,

- condamner solidairement le Cabinet [F] et la banque Crédit Coopératif à lui payer à titre de dommages intérêts la somme de 194.723,61 euros correspondant au montant total des sommes détournées,

- condamner solidairement le Cabinet [F] et la banque Crédit Coopératif à lui payer à titre de dommages intérêts la somme de 50.000 euros au titre du préjudice économique subi par elle,

- débouter les parties intimées de toutes leurs demandes, fins et conclusions, ou à défaut, ordonner la compensation judiciaire entre toutes sommes éventuellement dues par elle au Cabinet [F] et le montant des condamnations prononcées contre ce cabinet au profit de la SCI CJM dans la limite du montant le plus faible,

- condamner in solidum Mme [L], le Cabinet [F] et la banque Crédit Coopératif à lui payer la somme de 6.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La société rappelle le jugement et demande sa confirmation en ce qui concerne la condamnation prononcée contre Mme [L] et, en outre, la condamnation de celle-ci à lui payer la somme de 50.000 euros.

Elle déclare que cette somme correspond à son préjudice économique consécutif aux détournements. Elle fait état des conséquences du contrôle de comptabilité qu'elle a dû réaliser.

Elle invoque la responsabilité de son expert-comptable.

Elle rappelle l'article 2 de l'ordonnance du 19 septembre 1945 relatif aux experts-comptables, l'obligation pour l'expert-comptable d'établir une lettre de mission, la mission de contrôle qui lui incombe et ses diligences à accomplir quelle que soit sa mission, celui-ci n'étant pas un simple transcripteur. Elle cite également un arrêt sur sa responsabilité en cas de détournements.

Elle indique que, petite société familiale n'ayant la gestion que de quelques immeubles, sa comptabilité était simple avec peu d'écritures comptables, les flux financiers représentant en moyenne 3,3 pages de relevés de compte bancaire par mois et environ 40 opérations mensuelles.

Elle indique également que la mission de Mme [L] était celle d'une secrétaire comptable et non d'un comptable. Elle déclare qu'elle effectuait une simple mission de saisie en comptabilité informatique des opérations financières relatives à la SCI et non une mission de tenue de la comptabilité qui comprendrait notamment des diligences de contrôle. Elle affirme qu'elle n'avait pas à vérifier la conformité des écritures à des pièces comptables ou à procéder à des rapprochements bancaires.

Elle fait valoir qu'il n'existait en son sein aucune procédure de contrôle de la comptabilité ou d'établissement de rapprochement bancaire.

Elle affirme que le cabinet avait connaissance de cette situation dans la mesure où il ne lui était communiqué ni rapprochement bancaire ni diligence de contrôle de la comptabilité.

Elle lui fait donc grief de n'avoir pas constaté l'inexistence des états de rapprochement bancaire et de n'avoir tiré aucune conséquence de ce défaut soit l'impossibilité d'effectuer des contrôles et de ne pas s'être alarmé de cette carence.

La société soutient que le cabinet [F] devait à tout le moins, fût-ce par sondages, procéder au contrôle des états de rapprochements bancaires.

Elle fait valoir qu'afin d'établir les comptes annuels et les déclarations y afférentes, l'expert-comptable doit demander la comptabilité complète de l'entreprise en ce compris les états de rapprochements bancaires pour procéder à leur contrôle.

Elle considère que lorsque les opérations de saisie sont effectuées par son client, l'essentiel du temps de la mission de l'expert-comptable consiste à contrôler la comptabilité et les comptes correspondants qui en découlent directement.

Elle considère également que l'établissement des comptes annuels et des déclarations fiscales ne peut être séparé d'opérations de rapprochements bancaires ou de contrôle de ceux-ci pour s'assurer de l'exactitude de la comptabilité qui sert de support à l'établissement de comptes annuels sincères.

Elle estime qu'il doit effectuer des contrôles des opérations financières, au moins par sondages, et dresser les rapprochements bancaires ou, à défaut, contrôler les états de rapprochements bancaires établis par son client.

Elle fait valoir qu'indépendamment de cette obligation de procéder en toute hypothèse à ces opérations, le nombre limité des flux lui permettait de réaliser un contrôle complet de comptabilité.

Elle estime que le coût facturé par le cabinet confirme que sa mission était d'effectuer tous les contrôles nécessaires à vérifier l'exactitude de l'ensemble de la comptabilité et reproche au tribunal d'avoir écarté ce moyen au nom de la liberté des prix.

Elle considère qu'en l'absence de lettre de mission, ce coût est un indice important de la mission du cabinet.

Elle se prévaut du contenu de la lettre de mission de son successeur et de son coût, relève que la mission retenue par le tribunal dans son jugement correspond à un coût de 6.000 euros et souligne que le cabinet [F] lui facturait en moyenne de 9.800 euros à 10.800 euros par an ce qui correspond à la somme réclamée par son nouvel expert-comptable, 11.200 euros. Elle en infère qu'il avait une mission de contrôle général de la comptabilité.

Elle relève que le cabinet [F] n'a procédé à aucune opération de contrôle des états de rapprochements bancaires. Elle affirme que s'il n'avait pas la mission d'établir ces états de rapprochement bancaire, il devait les contrôler et donc se faire communiquer ces états par elle.

Elle déclare qu'au moment de la découverte de la fraude, il n'existait aucun état de rapprochement bancaire et en conclut que le cabinet n'a jamais eu entre les mains de tels états et, donc, n'a jamais pu les contrôler.

Elle lui fait grief de ne jamais les avoir réclamés à défaut de les avoir produits lui-même.

Elle soutient que cette carence a empêché de mettre à jour la fraude et a permis sa réalisation durant plusieurs exercices.

Elle affirme que le cabinet ne produit aucun justificatif des contrôles et diligences qu'il prétend avoir effectués.

Elle ajoute que le simple établissement des rapprochements bancaires a permis de mettre à jour l'ensemble de la fraude.

Elle estime incompréhensible l'argumentation du cabinet sur la complexité de la falsification opérée, invoque ses carences et affirme que le simple contrôle des états de rapprochements bancaires aurait permis d'y mettre fin.

Elle estime inopérante l'argumentation tirée de la prétendue négligence de son gérant.

Elle souligne que celui-ci avait délégué la saisie comptable à la secrétaire et les autres missions comptables au cabinet et en conclut que la mission de contrôle revenait à celui-ci.

Elle ajoute, citant un arrêt, que cette négligence serait impropre à écarter la responsabilité de l'expert-comptable.

Elle soutient que son préjudice correspond au montant des sommes détournées en l'absence de remboursement par Mme [L].

Elle soutient également que le contrôle fiscal est la conséquence des détournements, les sommes prélevées ayant été saisies en charges injustifiées et, donc, réduisant son bénéfice. Elle déclare qu'elle a dû réintégrer ce montant ce qui a augmenté son imposition alors qu'elle n'a pas bénéficié de ces sommes.

Elle réfute toute perte de chance, les détournements ayant été commis sur une longue période alors que si le cabinet avait correctement effectué son travail, ils auraient été décelés dès la première année.

Elle ajoute qu'ils n'ont été rendus possibles que par la faute du cabinet, Mme [L] sachant que les états de rapprochement bancaires ne lui seraient jamais réclamés ce qui empêcherait tout contrôle.

La société invoque la responsabilité du Crédit Coopératif.

Elle rappelle la responsabilité de la banque en cas de paiement d'un chèque faux ou de l'exécution de faux ordres de virement soit d'un ordre donné par une personne non habilitée. Elle rappelle également qu'en sa qualité de dépositaire, le banquier n'est libéré que s'il a remis les fonds au créancier déposant ou à une personne désignée par lui.

Elle conteste tout mandat tacite et estime non transposables les arrêts invoqués, Mme [L] n'étant pas associée de la société, n'ayant pas de fonction de gestion et n'étant pas titulaire des comptes bancaires de la société.

Elle estime inapplicable l'article L 133-24 du code monétaire et financier, entré en vigueur en 2009, qui ne concerne ni les chèques ni les ordres de virement émis sur un support papier.

Elle déclare verser en cause d'appel la copie des faux chèques émis et estime que leur signature n'est pas identique à celle de M. [T].

Elle rappelle que la banque a l'obligation de vérifier la conformité de la signature des chèques avec celle du titulaire du compte et fait valoir que rien ne peut l'exonérer de cette obligation même la négligence prétendue de son gérant qu'elle conteste.

En ce qui concerne les ordres de virement, elle relève que certains ordres présentaient une signature identique et donc scannée.

Elle déclare que la signature n'est pas suffisante et que la banque procédait à une confirmation systématique de ces ordres en téléphonant à Mme [L].

Elle souligne que ces ordres étaient libellés au profit de celle-ci.

Elle lui reproche donc d'avoir sollicité la confirmation de ces ordres auprès de leur bénéficiaire.

Elle ajoute que la banque savait que Mme [L] ne pouvait émettre ces ordres - et donc les confirmer - car ils étaient émis sous la signature de M. [T]. Elle souligne qu'est en cause non la probité de la salariée mais son absence de pouvoir pour confirmer les ordres de paiement émis par la société ce que la banque ne pouvait ignorer.

Elle en conclut qu'elle a procédé à des contrôles formels manifestement inopérants auprès d'une personne non habilitée et qui plus est bénéficiaire desdits ordres ce qui ne saurait lui permettre de se prévaloir d'avoir effectué les contrôles normalement requis.

Elle estime qu'il ne peut être reproché à son gérant de ne pas avoir effectué de contrôle alors que la faute de la banque est à l'origine de l'exécution de ces faux ordres.

Elle conteste pour les mêmes raisons l'argument tiré de son devoir de non immixtion ou celui d'une acceptation tacite.

En ce qui concerne les deux factures dont le paiement est réclamé par le cabinet d'expertise comptable, elle se prévaut des motifs du jugement ayant rejeté la réclamation de la somme de 8.718,84 euros.

Elle fait valoir que le taux horaire a été doublé sans explication ou accord et que les diligences concernées ne sont que la poursuite des recherches de détournements déjà facturées.

Elle réfute toute procédure abusive.

Dans ses dernières écritures portant le numéro 2 en date du 25 mars 2016, la Sarl [F] conclut à la confirmation du jugement sauf en ce qu'il a rejeté sa demande au titre de la seconde facture.

Elle réclame la condamnation de la Sci CJM Ile de France à lui payer la somme de 7.290 euros HT outre intérêts à compter du 1er décembre 2014 et capitalisation de ceux-ci.

Elle sollicite également sa condamnation à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société expose que M. [T] avait deux sources de revenus provenant de deux activités distinctes, la Sci CJM Ile de France avec un chiffre d'affaires d'environ 3.000.000 euros et un résultat d'environ 1.500.000 euros et des revenus fonciers personnels provenant de la possession de divers biens propres et souligne qu'elle n'a jamais eu à connaître de ses comptes personnels.

Elle expose également qu'il a découvert dans le cadre de son activité en nom propre puis dans le cadre de l'informatisation de sa gestion locative personnelle que Mme [L] - qui s'occupait des comptes de cette activité - avait procédé à des détournements ce qui l'a conduit à s'inquiéter de détournements commis par elle dans son activité au sein de la Sci.

Elle indique qu'il lui a confié, le 11 novembre 2011, une mission de recherche de fraudes commises au préjudice de la société qui aboutira à un rapport chiffrant à la somme de 194.723,61 euros le montant des détournements réalisés au préjudice de celle-ci de 2002 à 2011.

Le cabinet rappelle que l'expert-comptable a une obligation de moyens et que sa responsabilité s'apprécie à l'aune de la mission qui lui a été confiée et qu'elle doit être prouvée.

Il souligne que l'exigence d'une lettre de mission a été prévue par le code de déontologie entré en vigueur le 1er décembre 2007 qui a accordé un délai d'un an aux experts-comptables pour y procéder et affirme qu'il leur a donné un délai supplémentaire à l'égard de clients anciens. Il déclare que tel était le cas.

Il considère qu'en tout état de cause, cette absence de lettre de mission ne constitue pas une faute contractuelle.

Il considère également qu'elle n'aurait pu ni prévenir ni éviter la perpétuation des détournements.

Il précise qu'il n'a jamais eu de mission relative à l'activité personnelle de M. [T].

Il soutient qu'il n'avait pas de mission de tenue de comptabilité étant rappelé que la Sci était importante et détenait une succursale en Belgique ce qui imposait une externalisation des comptes annuels et leur consolidation dans les comptes de la Sci en France.

Il souligne que la comptabilité était tenue en interne par Mme [L], relève que le nouvel expert-comptable est désormais en charge d'une telle mission - la société n'ayant plus de comptable - et affirme que l'existence d'une mission de tenue de la comptabilité ne peut s'évincer du seul coût de sa prestation globale. Il ajoute que l'attestation annuelle délivrée aux services fiscaux mentionne qu'il était uniquement chargé d'élaborer les comptes annuels.

Il indique que la mission de tenue de la comptabilité consiste en l'inscription des écritures, en la vérification par pointage systématique que chaque écriture est justifiée par une pièce comptable et en un rapprochement bancaire soit un pointage des écritures inscrites en comptabilité avec celles figurant sur les relevés de banque.

Il déclare que le rapprochement bancaire permet de vérifier l'exhaustivité des opérations passées et de relever les débits non encore passés en banque et les crédits non encore inscrits en comptabilité.

Il soutient qu'il est l'apanage de celui qui est en charge de la tenue de la comptabilité et, se prévalant d'arrêts, estime obsolète la jurisprudence invoquée par l'appelante.

Il en conclut qu'il appartenait à Mme [L] - sous le contrôle de son employeur - de procéder à ces contrôles systématiques et aux rapprochements bancaires et non à lui.

Il fait valoir qu'il avait pour seule mission de s'assurer que les rapprochements étaient faits par la cliente et de procéder à des contrôles par voie de sondages aléatoires.

Il affirme que les rapprochements bancaires étaient effectivement réalisés dans l'entreprise mais par l'auteur des détournements.

Il estime qu'en tout état de cause, les rapprochements bancaires ne permettent de découvrir la fraude qu'en cas de distorsion entre la comptabilité de l'entreprise et le compte bancaire et déclare qu'en l'espèce, Mme [L] a fait en sorte que la comptabilité soit toujours cohérente avec la banque. Il affirme qu'elle n'a jamais, jusqu'en 2011, falsifié de relevé de banque de sorte que les rapprochements présentés étaient toujours justes.

Il soutient qu'il n'avait pas de mission de surveillance, de présentation des comptes annuels ou d'audit.

Il déclare que la mission de présentation des comptes annuels consiste à s'assurer de la régularité en la forme de la comptabilité et de la cohérence et de vraisemblance des comptes annuels et à procéder à un examen analytique et à un contrôle approfondi des pièces.

Il prétend que ces diligences ne relevaient pas de sa mission puisqu'il indiquait dans ses attestations annuelles qu'il n'exprimait pas d'opinion sur les comptes établis.

Il ajoute qu'aucune pièce ne démontre qu'il avait une mission de surveillance de la comptabilité ou d'audit.

Il conclut que la comptabilité était enregistrée et tenue tout au long de l'année par Mme [L] sous le seul contrôle et la seule surveillance de son employeur et qu'il appartenait à celui-ci d'assurer la surveillance de sa comptabilité et de sa comptable.

Il soutient qu'il n'avait qu'une mission d'établissement des états financiers et des déclarations fiscales y afférentes et invoque la définition donnée par l'ordre des experts comptables de cette mission.

Il souligne qu'il n'intervenait qu'une fois par an, en mars ou avril après la clôture au 31 décembre, et déclare qu'il établissait les états financiers sur la base et au moyen de la comptabilité tenue dans et par l'entreprise. Il en conclut qu'il appartenait à la société de s'assurer de la qualité de la matière première qui lui était donnée.

L'intimé affirme que, dans le cadre de cette mission, il ne procède à des contrôles que par voie de sondages aléatoires pour s'assurer de la cohérence et de la vraisemblance des comptes et non de leur exactitude ou de leur sincérité.

Il chiffre à 9.800 euros ses honoraires annuels pour l'établissement des états financiers et de la liasse fiscale correspondante le chiffre invoqué incluant d'autres missions étrangères au litige.

Il indique que de 2000 à décembre 2010, Mme [L] a réalisé ses détournements uniquement par des virements.

Il précise qu'elle effectuait ces virements du compte de la Sci à son compte personnel au moyen de bordereaux sur lesquels elle reprenait une signature photocopiée du gérant et envoyait l'ordre de virement à la banque par fax.

Il fait valoir que le contrôle de la qualité de la signature ne lui incombait pas.

Il déclare que, compte tenu de la date de son intervention, elle n'opérait ces détournements que de février à octobre et mettait manuellement les écritures sur un compte d'attente avant, en octobre, de les supprimer de ce compte, d'arrondir le montant total détourné et de passer une seule écriture apparaissant comme un virement unique au compte courant du dirigeant. Il déclare qu'elle l'imputait au débit du compte courant du dirigeant moyennant une somme ronde, les centimes étant imputées en timbres-poste et pourboires. Il ajoute que le dirigeant disposait d'un important compte courant, d'environ 3.000.000 euros, et se prélevait des sommes rondes. Il souligne qu'il n'a jamais vérifié les mouvements de son compte courant.

Il en conclut que, lors de son intervention, les comptes étaient refaits depuis le mois de novembre, les relevés de banque de décembre et janvier étaient le reflet de la réalité et il n'existait aucune écriture litigieuse en novembre et décembre et une seule en octobre.

Il soutient qu'il ne pouvait rien déceler dans les comptes de la SCI.

Il fait valoir que M. [T] ne s'est jamais aperçu que son compte courant était débité de sommes qu'il n'avait pas prélevées ce qui démontre qu'en sa qualité de gérant, il ne regardait pas ses relevés de banque et qu'il ne vérifiait ni son compte courant ni son compte personnel. Il ajoute qu'il ne faisait pas davantage de contrôles sur la comptabilité de ses revenus fonciers personnels.

Il estime que le gérant - qui doit assurer le contrôle hiérarchique sur sa préposée comptable et le contrôle interne sur sa comptabilité - aurait dû effectuer un contrôle exhaustif d'une période donnée ce qui lui aurait permis de constater que la facture figurant dans les dossiers ne correspondait pas à la somme enregistrée à ce titre en comptabilité.

Il affirme que seul le contrôle interne aurait permis de déceler la seule incohérence existante soit entre la somme indiquée en comptabilité et la pièce comptable correspondante.

Il ajoute que Mme [L] a employé la même méthode dans la comptabilité personnelle de M. [T] relative à ses revenus propres.

Il indique qu'elle a émis des chèques en 2011.

Il précise qu'elle créait de fausses factures puis émettait des chèques avec une fausse signature du gérant et que les chèques étaient inscrits en comptabilité comme destinés au paiement de fournisseurs dont elle créait les factures. Il déclare que les chèques étaient bien débités du compte de la SCI. Il précise également qu'elle enregistrait en comptabilité le montant des factures non créées et encaissait le chèque correspondant.

Il en conclut que l'écriture comptable était parfaitement cohérente avec les mouvements de fonds de sorte qu'il n'existait aucune discordance avec le relevé de compte et, donc, que l'expert-comptable ne pouvait voir son attention attirée.

Il considère que seul le rapprochement bancaire pouvait révéler l'existence de débits de chèques non portés dans la comptabilité et rappelle que ces rapprochements étaient effectués par elle.

Il estime que le gérant, dans l'accomplissement du contrôle interne qui lui incombe, aurait dû et pu contrôler ses relevés de compte et constater que des chèques débités en banque ne figuraient pas dans la comptabilité ce qui est un des intérêts du rapprochement bancaire. Il fait état de l'absence d'incohérence dans les comptes.

Il soutient donc qu'il n'a commis aucune faute contrairement au gérant de la Sci qui a manqué à ses obligations d'employeur et de dirigeant.

Le cabinet invoque l'absence de lien de causalité, les carences précitées du gérant ayant permis à Mme [L] de procéder pendant plus de 10 ans aux détournements.

Il estime que la faute de la victime est la cause exclusive du dommage.

En ce qui concerne les préjudices, il reconnaît que le contrôle fiscal est en relation avec les détournements mais réfute être tenu au coût du contrôle, les détournements ayant été permis par la négligence du gérant et un contrôle fiscal pouvant être subi par tout contribuable.

Il affirme que seule l'indemnisation d'une perte de chance pourrait lui être réclamée et fait valoir qu'il ne pouvait, pour les motifs précités, découvrir les détournements ce dont il résulte qu'il n'existe aucune perte de chance.

Il réitère que la chance perdue par la société trouve sa cause dans les carences fautives de son dirigeant.

Il forme une demande reconventionnelle en paiement d'une facture 5224 du 16 mai 2012 relative aux travaux et états financiers de l'exercice 2011 de 3.300 euros et d'une facture 5223 du 16 mai 2012 relative aux travaux spéciaux d'assistance et de recherche des détournements d'un montant de 7.290 euros.

Il sollicite la confirmation du jugement qui a accueilli sa demande au titre de la première facture.

Il affirme que la seconde doit être accueillie, les prestations facturées - 11 h50 pour la mise au point des procédures contre Mme [L] et 29 heures pour le recensement des détournements et la régularisation de la comptabilité - étant détaillées et justifiées. Il précise que le taux horaire usuel de 90 euros est appliqué pour des travaux purement techniques confiés aux collaborateurs mais que la mission de recherche a été menée par M. [F] lui-même ce qui justifie un taux horaire de 180 euros.

Dans ses dernières écritures en date du 25 août 2015, la banque Crédit Coopératif conclut à la confirmation du jugement.

Elle réclame le paiement par l'appelante d'une somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La banque se prévaut d'arrêts en matière de faux ordres de paiement et soutient qu'elle est exonérée de sa responsabilité de dépositaire des fonds lorsqu'il existe une faute commise par le déposant à l'origine des détournements ou lorsque ceux-ci ont été opérés par un préposé du déposant dans l'exercice de ses fonctions.

Elle rappelle ses obligations et divers arrêts retenant un mandat tacite.

Elle relève que Mme [L] a été engagée en qualité de secrétaire-comptable et que les détournements ont duré dix ans.

Elle estime qu'un contrôle minimum consistant à rapprocher les factures et les règlements aurait évité ces détournements et invoque donc une faute de la SCI.

Elle observe également que Mme [L] a indiqué que M. [T] ne vérifiait rien et n'avait probablement pas constaté qu'il manquait un locataire.

Elle fait valoir que les quelques relevés de compte produits pour 2008 sont grossièrement falsifiés ainsi que l'a jugé le tribunal et que les relevés de l'année 2010 ne sont même pas falsifiés.

Elle fait également valoir qu'ils font apparaître un virement au profit de Mme [L] d'un montant fixe de 2.019,22 euros quasi mensuellement.

Elle en conclut que son nom était explicitement mentionné sur les relevés comme bénéficiaire des virements, que son employeur ne vérifiait pas les relevés de compte et qu'à l'inverse, les virements litigieux pouvaient légitimement passer inaperçus pour elle compte tenu de leur régularité et de leur montant.

Elle ajoute que le chiffre d'affaires de la société est passé de 1.800.000 euros en 2003 à 2.800.000 euros en 2010 et conteste qu'elle soit une petite société familiale et profane.

Elle invoque donc une négligence caractérisée de la victime.

Elle excipe également d'un mandat apparent de Mme [L] qui, selon M. [T], gérait tout le domaine financier et de l'absence de contestation à la réception des relevés.

Elle se prévaut également, citant des arrêts, de son devoir de non immixtion.

Enfin, elle rappelle que la responsabilité de la société est également engagée en tant que commettant et conteste avoir commis une faute.

Elle soutient que les falsifications étaient indécelables en ce qui concerne les chèques pour un employé normalement diligent et compare leur signature avec celle apposée sur le carton de signature.

Elle observe qu'aucun formalisme n'est requis pour les ordres de virement et affirme que la falsification de signature était indécelable.

Elle affirme que, bien qu'un contre appel ne soit ni obligatoire ni systématique, elle procédait régulièrement à une telle vérification.

Elle relève que l'article L 133-24 du CMF prévoit que le titulaire du compte dispose d'un délai de 13 mois pour contester les opérations, admet que ces dispositions datent du 15 juillet 2009 mais se prévaut de décisions antérieures aux termes desquelles l'absence de protestation à réception des relevés vaut acceptation tacite.

Elle conteste le préjudice invoqué notamment celui au titre du contrôle fiscal qui n'a pas été causé par les détournements.

La Sci CJM Ile de France a signifié sa déclaration d'appel et ses conclusions à Mme [L] par des actes d'huissier déposés à l'étude.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 26 janvier 2017.

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Sur les demandes formées contre la Sarl [F]

Considérant que, compte tenu du manquement du cabinet à son obligation de rédiger une lettre de mission avec son client, il est nécessaire de rechercher la mission effectivement confiée à celui-ci'; qu'il ne peut se retrancher derrière l'absence d'une diligence pour conclure que celle-ci n'entrait pas dans sa mission';

Considérant qu'il ne peut toutefois résulter, en raison de la liberté des prix, du coût de la mission confiée au nouvel expert-comptable de la société que, compte tenu de ses honoraires, l'intimé avait une mission d'analyse de l'intégralité des comptes comptables correspondant à un contrôle de l'ensemble de la comptabilité';

Considérant que, dans son attestation annuelle destinée à la société, le cabinet déclarait «'avoir procédé à l'établissement des comptes annuels'» ... «'sur la base de pièces, documents et informations portés à notre connaissance par le dirigeant de la société'» et précisait que «'les contrôles réalisés ne constituent pas un audit et en conséquence, nous n'exprimons pas d'opinion sur les comptes ci-dessus'»';

Considérant que ces attestations visaient «'nos accords'» et étaient adressées à la société';

Considérant qu'en l'absence de toute contestation de celles-ci, elles établissent l'étendue de la mission confiée à l'expert-comptable';

Considérant que cet établissement des comptes n'est pas une mission d'audit, d'examen ou de présentation de ceux-ci'; qu'elle ne comporte pas le contrôle de la matérialité des opérations'; que, comme précisé dans l'attestation, le cabinet n'exprime pas d'opinion'; qu'il n'a pas à s'assurer de l'exactitude et de la sincérité des comptes'; qu'il n'intervient qu'une fois par an';

Considérant que la mission du cabinet [F] était donc limitée';

Considérant, toutefois, qu'il doit pour s'assurer de la cohérence des comptes' procéder à des contrôles par voie de sondages aléatoires';

Considérant que s'il n'a pas à procéder lui-même aux états de rapprochement bancaire - qui relèvent de la responsabilité de la secrétaire- comptable employée par la société -, il doit procéder à des sondages de ces états afin de s'assurer de la cohérence et de la vraisemblance des comptes';

Considérant qu'il est constant que la Sci n'a remis au cabinet [F] aucun état de rapprochement bancaire'; que celui-ci n'a donc pu procéder à des contrôles de ces états';

Considérant qu'il appartenait dès lors au cabinet d'appeler l'attention de la société sur cette absence'; qu'en n'y procédant pas, le cabinet a manqué à son obligation et commis une faute';

Considérant qu'il incombe à la société de démontrer qu'une telle demande et qu'un contrôle aléatoire de ces états auraient permis de révéler les détournements';

Considérant que ces états auraient été effectués par Mme [L]';

Considérant que compte tenu de l'absence de tout contrôle hiérarchique de M. [T] sur son employée, celui-ci n'aurait pas vérifié leur conformité';

Considérant que les détournements ont été effectués au moyen d'ordres de virement falsifiés et, à compter de septembre 2010, de chèques falsifiés';

Considérant que le rapprochement bancaire consiste à pointer les écritures inscrites en comptabilité et celles figurant sur les relevés bancaires'; qu'il permet donc de vérifier l'exhaustivité des opérations passées et, ainsi, de constater l'existence de débits non encore passés en banque ou de crédits non encore inscrits en comptabilité';

Considérant que de tels états ne permettent, en conséquence, de découvrir une fraude que s'il existe une distorsion entre la comptabilité de la société et le compte bancaire'; que le contrôle de ces états par le cabinet comptable n'aurait donc permis de découvrir une fraude qu'en cas de distorsion'soit d'incohérence entre la comptabilité de la société et le compte bancaire';

Considérant que la société CJM établit que 4 relevés bancaires ont été falsifiés en 2008 avec un espace blanc correspondant à l'écriture biffée et une discordance quant aux soldes de début et fin de mois'; que les relevés produits en 2010 démontrent l'absence de falsification'; qu'elle ne justifie pas, par la production des relevés d'autres exercices, l'existence d'une falsification';

Considérant qu'il résulte de l'extrait du grand livre global provisoire de la société et des explications non contestées du cabinet que Mme [L], en ce qui concerne les virements, opérait ses détournements et procédait à des écritures d'équilibrage de février à octobre, inscrivant ces écritures dans un compte d'attente puis supprimant celles-ci en octobre et passant une écriture au compte courant de la société qu'elle débitait ensuite'en l'arrondissant ;

Considérant que, lorsque l'expert-comptable intervenait, en mars, les comptes étaient ainsi refaits,'sans incohérence ;

Considérant qu'il en résulte que la vérification par sondage des états de rapprochement bancaire qu'aurait réalisés Mme [L] n'aurait pas permis de révéler la fraude';

Considérant que la circonstance que celle-ci ait été démontrée ensuite par la réalisation systématique de ces états de rapprochement bancaire est sans incidence à cet égard, ceux-ci ayant été alors effectués, aux termes d'une mission spéciale, de manière exhaustive par le cabinet d'expertise-comptable tiers aux détournements';

Considérant qu'il ressort de ces éléments que la vérification aléatoire par le cabinet des états de rapprochement bancaire qu'aurait réalisés l'auteur des détournements ainsi opérés n'aurait pas permis de déceler les virements irréguliers';

Considérant que Mme [L] n'a procédé à des falsifications de chèques qu'à compter de juillet 2010'; que les chèques étaient débités du compte de la société';

Considérant qu'elle inscrivait ces chèques en comptabilité comme destinés au paiement de fournisseurs et créait les factures correspondantes'qu'elle enregistrait en comptabilité';

Considérant que les écritures comptables étaient ainsi cohérentes avec les mouvements et aucune discordance avec les relevés bancaires ne ressortait';

Considérant, dès lors, qu'un contrôle aléatoire des états de rapprochement bancaires n'aurait pas permis, au surplus sur le seul exercice concerné compte tenu de la date de découverte des détournements, de découvrir ces irrégularités';

Considérant que, compte tenu de la mission limitée du cabinet, aucune autre faute ne peut lui être reprochée';

Considérant par conséquent que la seule faute du cabinet n'a pas de lien de causalité avec les détournements'; que les demandes formées contre lui seront rejetées et le jugement confirmé de ce chef';

Sur les demandes formées contre la banque

Considérant que la banque, dépositaire des fonds, n'est pas libérée quand elle se défait de ceux-ci sur présentation d'un faux ordre de paiement';

Considérant, toutefois, que lorsque le détournement émane d'un préposé du titulaire du compte, sa responsabilité n'est engagée qu'en cas de faute de sa part';

Considérant qu'en l'espèce, les détournements ont été commis par la préposée du déposant qui, par ses fonctions de secrétaire comptable, a pu accéder aux comptes et aux chéquiers de la société'lui permettant de procéder aux détournements ; qu'au surplus, le déposant a manqué à ses obligations en ne procédant à aucun contrôle de son employée et ainsi a facilité ces détournements';

Considérant, dès lors, que la société doit démontrer une faute de la banque';

Considérant, en ce qui concerne les chèques, qu'il ne résulte pas de la comparaison des signatures portées sur le carton d'ouverture de compte et figurant sur les chèques des différences telles qu'un employé normalement avisé aurait pu les déceler';

Considérant, en ce qui concerne les virements, que ceux-ci ont été adressés par télécopie et portaient la signature de M. [T]'; que la falsification de sa signature était indétectable, la société indiquant qu'elle avait été scannée'; que d'autres ordres de virement, non contestés, sont identiques';

Considérant que la périodicité et le montant de ces ordres n'étaient pas de nature à alerter la banque';

Considérant que celle-ci a procédé à des contrôles aléatoires en appelant à plusieurs reprises Mme [L] qui a confirmé ces ordres';

Considérant, d'une part, que ces appels téléphoniques n'étaient nullement obligatoires'; qu'ils l'étaient d'autant moins que la falsification était indétectable et que le montant de ces virements et leur périodicité pouvaient correspondre à une rémunération de leur bénéficiaire';

Considérant, d'autre part, que la banque ne pouvait, compte tenu de son devoir de non immixtion et en l'absence de tout élément contraire, suspecter la probité de la salariée de la société'et demander au gérant de celle-ci de confirmer lui-même ces ordres ;

Considérant, enfin, que M. [T] n'a jamais contesté les relevés bancaires qui lui étaient adressés';

Considérant que la banque n'a ainsi commis aucun manquement à ses obligations';

Considérant que les demandes formées contre elle seront donc rejetées et le jugement confirmé';

Sur les factures de la société [F]

Considérant que la facture de 3.946,80 euros correspond au solde, non contesté, des sommes dues au cabinet au titre de sa mission annuelle'; que celle-ci est donc due'; que le jugement sera confirmé';

Considérant que la facture, en date du 16 mai 2012, de 8.718,84 euros correspond, selon son intitulé, à des «'travaux spéciaux et assistance'» dans le cadre des détournements commis'; qu'elle porte sur 40 h 50 à 180 euros HT'; qu'en annexe, est indiqué le détail des heures concernées, de novembre 2011 à février 2012';

Mais considérant, d'une part, que le cabinet ne verse aux débats aucune convention entre les parties ou aucun échange démontrant l'existence d'un accord sur ces honoraires';

Considérant, d'autre part, que deux factures intitulées «'Travaux exceptionnels, assistance et mise à jour de la comptabilité'» ont été émises les 27 janvier et 31 mars 2012 pour 2.583,36 euros et 430,56 euros en paiement de 24 et 4 heures de travail à un taux horaire de 90 euros'; que ces factures sont en lien avec les détournements';

Considérant ainsi que, comme l'a exactement relevé le tribunal, ni le doublement du taux horaire ni le détail des prestations mentionnées dans la facture litigieuse ne sont justifiés';

Considérant que la demande sera rejetée';

Sur les demandes formées contre Mme [L]

Considérant qu'il résulte notamment des propres déclarations de Mme [L], des rapprochements bancaires effectués, des chèques et des faux ordres de virement produits que celle-ci a commis des détournements au préjudice de la Sci pour un montant de 194.723,61 euros'; que le jugement sera confirmé de ce chef';

Considérant que la société justifie, par la production des factures émises les 27 janvier et 31 mars 2012, avoir exposé des frais causés par les détournements commis'; qu'elle ne rapporte pas, toutefois, la preuve de conséquences imputables à Mme [L] du contrôle de sa comptabilité'; que Mme [L] devra donc lui payer au titre de son préjudice économique la somme justifiée de 2.983,92 euros ; que le jugement sera infirmé de ce chef';

Sur les autres demandes

Considérant que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions à l'exception du chef ci-dessus';

Considérant qu'en équité, les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées';

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt par défaut et mis à disposition,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts complémentaires formé par la Sci CJM Ile de France à l'encontre de Mme [L],

Statuant de nouveau de ce chef':

Condamne Mme [L] à payer à la Sci CJM Ile de France la somme de 2.983,92 euros,

Y ajoutant':

Rejette les demandes plus amples ou contraires

Condamne la Sci CJM Ile de France aux dépens,

Autorise la Scp DFR et Maître Guttin à recouvrer à son encontre les dépens qu'ils ont exposés sans avoir reçu provision.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Monsieur Alain PALAU, président, et par Madame Sabine MARÉVILLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 15/02661
Date de la décision : 19/05/2017

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°15/02661 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-19;15.02661 ?
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