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28/02/2017 | FRANCE | N°15/07207

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12e chambre section 2, 28 février 2017, 15/07207


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES



SM

Code nac : 56B



12e chambre section 2



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 28 FEVRIER 2017



R.G. N° 15/07207



AFFAIRE :



SAS ELLIPSA





C/

SAS SOGEDEV SOCIETE DE GESTION ET DE DEVELOPPEMENT





SA GENERALI IARD





Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 29 Septembre 2015 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section : r>
N° RG : 2014F00361



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Margaret BENITAH



Me Bertrand ROL



Me Denis SOLANET





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT HUIT FEVRIER DEUX MILLE DI...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

SM

Code nac : 56B

12e chambre section 2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 28 FEVRIER 2017

R.G. N° 15/07207

AFFAIRE :

SAS ELLIPSA

C/

SAS SOGEDEV SOCIETE DE GESTION ET DE DEVELOPPEMENT

SA GENERALI IARD

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 29 Septembre 2015 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2014F00361

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Margaret BENITAH

Me Bertrand ROL

Me Denis SOLANET

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT HUIT FEVRIER DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

SAS ELLIPSA

N° SIRET : 384 972 212

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentant : Me Margaret BENITAH, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.409

Représentant : Me Bruno ANGER de la SELASU AB ASSOCIES - SOCIETE D'AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0040

APPELANTE

****************

SAS SOGEDEV SOCIETE DE GESTION ET DE DEVELOPPEMENT

N° SIRET : 443 022 280

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentant : Me Bertrand ROL de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20150765

Représentant : Me Caroline SIMON de la SCP FISCHER TANDEAU DE MARSAC SUR & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0147 - substituée par Me SZKOLNIK

INTIMEE

****************

SA GENERALI IARD

N° SIRET : 552 062 663

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentant : Me Denis SOLANET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 384

Représentant : Me Alexis ULCAKAR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1823

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Janvier 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvie MESLIN, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie MESLIN, Président,

Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,

Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller,

Greffier F.F., lors des débats : Monsieur James BOUTEMY,

Vu l'appel déclaré le 19 octobre 2015 par la société par actions simplifiée Ellipsa (société Ellipsa.), contre le jugement prononcé le 29 septembre 2015 par le tribunal de commerce de Nanterre dans l'affaire qui l'oppose à la société par actions simplifiée Société de Gestion et de Développement (société Sogedev.), en présence de la société anonyme Generali (société Generali.), intervenante volontaire ès qualités d'assureur responsabilité civile professionnelle de la société Sogedev ;

Vu le jugement entrepris ;

Vu, enregistrées par ordre chronologique, les ultimes écritures notifiées par le réseau privé virtuel des avocats et présentées le :

- 15 mars 2016 par la société Sogedev, intimée à titre principal et appelante à titre incident;

- 14 mai 2016 par la société Ellipsa, appelante à titre principal et intimée à titre incident ;

- 30 septembre 2016 par la société Generali, intimée et intervenante volontaire en appel ;

Vu l'ensemble des actes de procédure ainsi que les pièces et éléments du dossier présentés par les parties.

SUR CE,

La Cour, se réfère au jugement entrepris pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales de chaque partie. Il suffit, en synthèse, de rappeler les éléments constants suivants tirés des écritures d'appel.

1. données analytiques, factuelles et procédurales, du litige

La société Sogedev, créée en 2002, a pour activité la prestation de conseil en gestion des entreprises, principalement dans le domaine du financement public. La société Ellipsa pour sa part, spécialisée dans la stratégie distributive et le digital marketing, accompagne ses clients dans leur stratégie de distribution et se présente sur son site internet, comme une société spécialiste dans le domaine de l'appréhension des comportements des consommateurs et de la personnalisation de la relation, s'appuyant sur des expertises en «'vente et enrichissement de données, analyse géomarketing, sémantique, datamining, Bl, scoring, segmentation, communication one2one, analyse de chalandise, CRM, technologies vocales, web 2.0 (')'» ; elle a une importante activité «'recherche et développement'» et plus particulièrement, pour ses produits dénommés «Visiomap'» et «'Visiobase'».

Les deux sociétés ont le 12 février 2010, signé un contrat sous signatures privées intitulé «'mandat Aides et Subventions'» aux termes duquel la société Ellipsa demande à la société Sogedev de l'assister en qualité de conseil et de prestataire extérieur et indépendant et au titre tant de l'exercice fiscal en cours que pour les deux exercices suivants, dans l'identification et la justification de projets d'innovation susceptibles d'être éligibles aux dispositions du «'Crédit Impôt Recherche'» ou CIR lequel constitue, l'un des principaux outils de financement de l'innovation se trouvant à la disposition des entreprises.

Mise en demeure par la société Sogedev de régler la facture n° 01261211 du 26 décembre 2011 portant sur 111 528, 32€ au titre du conseil et de l'accompagnement dans la justification et l'obtention du CIR 2010, la société Ellipsa a dénoncé le contrat précité selon lettre recommandée du 30 septembre 2012 avec accusé de réception du 9 octobre suivant en précisant, ne pas souhaiter le reconduire à son échéance.

La société Sogedev a subséquemment, selon acte du 7 février 2014, fait assigner la société Ellipsa devant le tribunal de commerce de Nanterre en paiement, sous exécution provisoire et avec capitalisation des intérêts, au visa des anciens articles 1134 et 1147 du code civil devenus les articles 1103, 1193, 1104 et 1231-1 du même code, de la somme de 111 528, 32€ outre, les intérêts légaux applicables, les intérêts au taux de trois fois le taux légal prévu conformément à l'article L.441-6 du code de commerce, 5 000€ à titre de frais irrépétibles ainsi que les dépens.

Elle a dans le dernier état de ses prétentions, conclu à la nullité du contrat litigieux pour dol au sens de l'ancien article 1116 du code civil, devenu article 1137 du même code, et subsidiairement sollicité, la résolution judiciaire du contrat aux torts de la société Sogedev ainsi que la condamnation de cette dernière au paiement de 1 000 000€ à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.

La société Generali est intervenue volontairement à l'instance en qualité d'assureur responsabilité civile professionnelle de la société Sogedev.

Par jugement du 29 septembre 2015, le tribunal de commerce de Nanterre a tranché le litige dans les termes qui suivent :

- dit la SA Generali recevable en sa demande d'intervention volontaire à la cause.

- condamne la SAS Ellipsa à payer à la SAS Sogedev la somme de 111 528, 32€ avec intérêts au taux de trois fois le taux légal à compter de la date d'échéance de la facture du 26 décembre 2011.

- ordonne la capitalisation des intérêts par année entière en application des dispositions de l'article 1154 du code civil.

- déboute la SAS Sogedev de ses demandes au titre de dommages et intérêts.

- déboute la SAS Ellipsa de l'ensemble de ses demandes.

- condamne la SAS Ellipsa à payer à la SA Generali la somme de 2 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamne la SAS Ellipsa à payer à la SAS Sogedev la somme de 3 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- ordonne l'exécution provisoire de ce jugement sans constitution de garantie.

- condamne la SAS Ellipsa aux dépens.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont retenu en substance que : - le mandat litigieux a été valablement conclu dès lors que la société Ellipsa qui se prévaut d'un dol au sens de l'ancien article 1116 du code civil devenu article 1137 du même code, se borne à invoquer une présentation fallacieuse par la société Sogedev de son expertise, sans apporter la moindre preuve de la réalité de man'uvres dolosives ; - les missions données à la société Sogedev sont des obligations de moyens ; - la société Sogedev n'apparaît pas avoir failli à son obligation d'assistance ; - les conditions d'une résolution du contrat aux torts de la société Sogedev pour exécution fautive, ne sont donc pas remplies.

La société Ellipsa a déclaré appel de sa décision. La société Generali est ensuite intervenue volontairement à hauteur d'appel. La clôture de l'instruction a été ordonnée le 6 décembre 2016 et l'affaire a été renvoyée pour être plaidée à l'audience tenue en formation de juge rapporteur du 10 janvier 2017. A cette date, les débats ont été ouverts et l'affaire a été plaidée à ce jour.

2. dispositifs des conclusions des parties

Vu les articles 455 et 954 du code de procédure civile ;

La société Ellipsa prie la Cour de :

- vu les articles 330 du code de procédure civile, 1116 et 1184 et suivants du code civil,

- juger Generali IARD tant irrecevable que mal fondée en son exception d'irrecevabilité,

- l'en débouter,

- prononcer la nullité de la convention intervenue entre les parties,

- subsidiairement,

- prononcer la résolution aux torts de la société Sogedev des conventions intervenues entre les parties,

- en tout état de cause,

- condamner la société Sogedev à rembourser à la société Ellipsa les sommes de 95 228, 39€ et de 111 528, 32€ représentant le montant des factures et de la condamnation pour lequel le contrat sera résolu et la décision infirmée,

- débouter la société Sogedev de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner la société Sogedev à payer à la société Ellipsa la somme de 500 000€ montant du préjudice réellement subi,

- condamner la société Sogedev à payer à la société Ellipsa la somme de 30 000€ HT au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Sogedev aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Magaret Benitah, avocat aux offres de droit.

La société Sogedev demande de son côté, qu'il plaise à la Cour de :

- vu les articles 1134, 1147, 1153 et 1154 du code civil

- vu l'article L.441-6 du code de commerce

- dire et juger la société Ellipsa mal fondée en son appel et la débouter de ses demandes

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté la société Sogedev de la demande de dommages-intérêts du fait de l'inexécution fautive de la société Ellipsa

- statuant à nouveau sur ce dernier point :

- condamner la société Ellipsa à payer à la société Sogedev la somme de 334 746, 96€ à titre de dommages et intérêts du fait de l'inexécution fautive de la société Ellipsa,

- condamner la société Ellipsa à payer à la société Sogedev la somme de 15 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens dont le recouvrement sera effectué par Maître Bertrand Rol, de l'AARPI JRF conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Generali IARD, assureur responsabilité civile professionnelle de la société Sogedev et intervenante volontaire, demande à la Cour de :

- vu l'article 553 du code de procédure civile,

- vu l'article 1147 du code civil,

- vu les pièces versées aux débats,

- à titre liminaire,

- recevoir la société Generali Iard en son intervention volontaire,

- à titre principal,

- constater que la société Ellipsa a formé appel contre la seule société Sogedev et que les sociétés Sogedev et Generali étaient parties à la procédure de première instance,

- dire qu'il y a indivisibilité du litige à l'égard de la société Sogedev et de son assureur,

- en conséquence,

- dire et juger irrecevable l'appel de la société Ellipsa, notamment pour ce qui concerne sa demande de dommages-intérêts,

- à titre subsidiaire,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Ellipsa de ses demandes et plus particulièrement,

- dire et juger que les allégations de la société Ellipsa et les pièces versées ne sont pas de nature à engager la responsabilité civile professionnelle de la société Sogedev, en l'absence de tout manquement commis par cette dernière, subsidiairement en l'absence de tout préjudice indemnisable, plus subsidiairement encore en l'absence de lien de causalité,

- en conséquence,

- débouter la société Ellipsa de l'ensemble de ses demandes et prétentions formulées à l'encontre de la société Sogedev,

- à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire le tribunal recevait la société Ellipsa en sa demande de dommages et intérêts,

- dire et juger que la garantie de Generali serait donnée moyennant application d'une franchise de 7 500 euros,

- en toute hypothèse, concernant les demandes visant les honoraires,

- dire et juger que la garantie donnée par Generali ne couvre pas les demandes de la société Ellipsa et de la société Sogedev relatives au paiement ou au remboursement des honoraires de la société Sogedev,

- en toutes hypothèse encore,

- condamner la société Ellipsa à payer à la société Generali la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a dû engager,

- la condamner aux entiers dépens.

La Cour renvoie à chacune de ces écritures pour une synthèse argumentative de la position de chaque partie dont l'essentiel sera développé dans le cadre des motifs de cet arrêt.

CELA ETANT EXPOSE,

La Cour statue, sur appel principal, sur la validité du contrat dit de «'mandat'», souscrit entre elles par deux sociétés commerciales (sociétés Sogedev et Ellipsa.) et subsidiairement, sur le bien-fondé tant de la demande en résolution de ce même contrat aux torts de la société Sogedev que de celle, tendant à la condamnation subséquente de cette société au paiement de dommages-intérêts, d'une part et sur le mérite de la demande en paiement de la facture des prestations réalisées au cours de l'année 2010 par cette dernière société, d'autre part ainsi que, sur appel incident, sur le bien-fondé de la demande présentée à front renversé par la société Sogedev pour voir prononcer de résiliation judiciaire du contrat litigieux aux torts de la société Ellipsa et entendre condamner cette dernière société, au paiement de dommages et intérêts pour indemnisation du préjudice corrélatif.

Sur la recevabilité de l'appel de la société Ellipsa

La société Générali conclut à l'irrecevabilité de cet appel en ce sens que cette dernière société ne l'a pas intimé à la cause en sa qualité d'assureur de la société Sogedev alors qu'elle était partie au procès devant les premiers juges et alors qu'il a y nécessairement indivisibilité du litige entre elle et son assuré, la société Sogedev.

La société Ellipsa s'oppose à cette irrecevabilité, observant que l'intervention volontaire de la société Generali devant les premiers juges s'analysait en une intervention accessoire au sens de l'article 330 du code de procédure civile ne visant qu'à appuyer les prétentions de l'assurée de cette société, la société Sogedev, afin d'éviter la mise en 'uvre des obligations nées du contrat d'assurances en cause.

Elle précise que le tribunal s'étant borné à constater l'intervention volontaire de cet assureur, celui-ci doit être déclaré irrecevable en son grief d'irrecevabilité d'appel.

Vu les articles 330 et 31 du code de procédure civile ;

Il est exact que l'intervention volontaire de la société Generali tant devant les premiers juges que devant la Cour s'analyse en une intervention accessoire au sens de l'article 330 du code de procédure civile.

Recevable en son intervention volontaire en appel, elle ne peut cependant qu'être déclarée irrecevable en son grief d'irrecevabilité d'appel pour défaut d'intérêt à agir dès lors qu'elle ne justifie pas de l'indivisibilité du litige la concernant et dès lors que la société Sogedev ne forme contre elle aucune demande.

Elle ne saurait également pour cette raison être déclarée recevable à voir statuer sur son obligation à garantie.

Sur la prétention de nullité du contrat litigieux, pour dol

La société Ellipsa observe à l'appui de sa demande de réformation, que : - l'ensemble des documents commerciaux présentés par son partenaire, son site web et la teneur des échanges ayant précédé la signature du contrat litigieux, ont été de nature à tromper sa religion en ce sens qu'ils l'ont naturellement conduit à considérer que la société Sogedev disposait, en interne, de toutes les ressources techniques et scientifiques nécessaires à la bonne mise en 'uvre d'un dossier de Crédit Impôt Recherche mais également, des compétences techniques indispensables à la défense et au soutien d'un dossier, généralement réclamé dans le cadre de contrôles a posteriori entrepris par l'administration et notamment, le ministère de la recherche ; - la société Sogedev ne disposait en réalité que de la maîtrise purement administrative se rapportant à la présentation d'un dossier, dont dans un premier temps, seule la forme était exigée ; - les arguments avancés pour obtenir la signature de la convention s'étant avérés erronés, elle est d'autant plus fondée à en obtenir la nullité pour dol, que son adversaire n'a jamais justifié des compétences de ses collaborateurs en la matière et que quoi qu'il en soit, non seulement des contrôles fiscaux sont intervenus mais le dossier technique, présenté et rédigé par la société Sogedev en 2009, purement et simplement rejeté, a du être repris par ses propres experts tandis que celui présenté pour l'exercice annuel suivant sur les bases de ce premier document, a également été écarté lors du contrôle fiscal pour cet exercice.

La société Sogedev s'oppose à cette prétention, répondant qu'aucune condition du dol n'est remplie.

Elle précise que : - l'argumentation de la société Ellipsa repose sur de simples allégations qui ne sont étayées d'aucune pièce ; - la preuve de man'uvres dolosives n'est donc pas établie ; - au demeurant, les allégations de la partie adverse sont fausses puisqu'elle dispose bien d'une équipe compétente composée de professionnels, justifiant des qualifications requises et nécessaires pour l'exercice de la mission en cause ; - tous les courriels adressés à la partie adverse l'ont ainsi été par Mme [N], titulaire d'un diplôme Bac +5 scientifique, sous l'autorité de M. [F] [Y] consultant senior ainsi que de M. [K] [I], directeur de la société qui était en copie de tous les courriels transmis.

Vu l'ancien article 1116 du code civil devenu article 1137 du même code ;

C'est à raison, que les premiers juges ont écarté cette première prétention en tant qu'ayant constitué des man'uvres ayant vicié le consentement de cette société lors de la conclusion de l'acte sous signatures privées du 12 février 2010 dès lors, que cette prétention apparaît n'être assortie d'aucune pièce et qu'elle repose donc sur de simples allégations.

La seule circonstance tirée de l'intervention d'un contrôle fiscal n'est pas à ce titre opératoire. Le moyen sera écarté.

Sur la résolution du contrat litigieux aux torts de la société Sogedev

La société Ellipsa soutient que : - son adversaire lui a permis en contrepartie de la perception d'honoraires substantiels, de déposer un dossier de pure forme tendant à lui permettre d'obtenir un Crédit Impôt Recherche (CIR.) ; - ce dossier n'a jamais été étayé au fond par la présentation d'un dossier technique scientifique, justificatif des dépenses éligibles aux aides concernées ; - elle s'est ainsi trouvée être dans l'embarras, pour faire face aux contrôles dont elle a fait l'objet ensuite ; - la société Sogedev avait certes une obligation de moyens mais, l'absence d'exécution des obligations qui étaient à sa charge et dont elle n'a pas pu justifier la réalité devant le tribunal, a eu à terme pour conséquence, de la mettre en péril ; - les demandes d'obtention du CIR ont été faites dans des conditions critiquables, la société Sogedev apparaissant ne pas avoir satisfait à plusieurs de ses obligations contractuelles à telle enseigne qu'elle se trouve être dans l'incapacité de présenter, tant pour le CIR 2009 que pour le CIR 2010, une documentation rigoureuse et scientifique permettant de poser et de proposer, tant à l'administration fiscale, qu'à l'administration en général, des justificatifs consistants ; - elle a donc souhaité mettre un terme à la relation contractuelle sauf, à pouvoir la poursuivre dans des conditions conformes à ses attentes, à la convention et à la sécurité juridique et s'est trouvée contrainte de choisir de nouveaux conseils, pour remettre à plat l'intégralité du dossier tel qu'il avait été présenté et bâtir un ensemble du corpus technique nécessaire ; - elle est fondée à solliciter pour ces raisons, la résolution judiciaire de la convention litigieuse aux torts de la société Sogedev et partant, à obtenir la condamnation de cette dernière à lui rembourser la somme de 95 128, 39€ correspondant aux factures établies au titre du CIR 2009 et quoi qu'il en soit, le débouté de la société Sogedev de toutes ses demandes, fins et conclusions.

La société Sogedev répond que : - elle avait pour obligation principale, de conseiller et d'assister la société Ellipsa dans différentes phases du processus permettant d'identifier les projets susceptibles d'être éligibles au CIR, d'en calculer le montant et de l'assister dans la justification de l'éligibilité des dépenses déclarées ; - sa mission s'étendait certes à l'assistance de sa cliente en cas de contrôle fiscal mais relevait d'une simple obligation de moyens de sorte, qu'elle ne peut être tenue pour responsable de la mauvaise utilisation ou de la non-utilisation par son client, des conseils et recommandations qu'il a été amené à donner ou des services qu'il a été amené à rendre ; - aucun délai ne lui était imparti pour la réalisation de ses prestations, notamment pour établir et communiquer à la société Ellipsa le dossier justificatif des dépenses, le CIR procédant d'un simple régime déclaratif dont l'obtention est subordonnée au dépôt d'une déclaration spéciale sur formulaire, sans qu'aucune pièce ou dossier justifiant de la réalité des dépenses de recherche doive être produit à l'appui de ce formulaire ; - elle n'a jamais été mandatée pour solliciter un avis préalable ou rescrit fiscal auprès de l'administration fiscale, préalablement à la déclaration des CIR de la société Ellipsa ; - au demeurant, cette diligence n'était pas prévue, le rescrit en matière de CIR n'étant ni obligatoire, ni recommandé et étant par surcroît, très peu pratiqué ; - les délais de réponse de l'administration à une demande de rescrit étant de trois mois, il était quoi qu'il en soit, dans les circonstances de cette espèce, impossible de solliciter un rescrit le 12 février 2010 pour une déclaration qui devait être déposée deux mois plus tard ; - elle a tenté de réaliser toutes les diligences qui lui étaient imparties aux termes de la convention conclue mais elle s'est heurtée, à l'absence de coopération de la société Ellipsa qui n'a pas répondu immédiatement à la première demande d'information de la société Sogedev du 8 décembre 2010 mais seulement à l'issue d'une relance en mars 2011 et n'a pas communiqué les éléments administratifs et financiers demandés dès le 6 avril 2011 ; - la société Ellipsa a en réalité, au mépris du mandat litigieux, calculé et déclaré seule le montant du CIR 2010 en s'appuyant, ainsi qu'elle le reconnaît dans ses propres écritures, sur le travail qu'elle avait elle-même réalisé ; - en dépit de ce comportement fautif et injustifié de la société cocontractante, elle a tenté, en vain, de poursuivre utilement sa mission de conseil et d'assistance ; - la société Ellipsa ne saurait davantage être déclarée fondée en sa demande de dommages-intérêts, pour défaut d'assistance dans le cadre du contrôle fiscal dont elle a ensuite fait l'objet.

Vu l'ancien article 1184 du code civil devenu articles 1217, 1221, 1227 et 1228 du même code ;

Il est constant au vu des documents versés aux débats et de la discussion entre les parties que le contrat souscrit le 12 février 2010 est venu à terme le 31 décembre 2015 et qu'il n'a pas été reconduit.

Il est tout aussi constant que la société Ellipsa a été destinataire d'une lettre du 26 novembre 2012 du Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche accompagnée d'un rapport d'analyse concluant à la non-éligibilité des dépenses litigieuses dans le cadre du dispositif du CIR au titre de l'exercice 2009. Les motifs invoqués à l'appui de cette décision ' voir cote 6 du dossier de la société Ellipsa, sont énoncés en ces termes, notamment tirés du rapport d'expertise «'Crédit Impôt Recherche'» établi par le Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche le 10 décembre 2012 au titre des années 2010 et 2011, : «(') le projet invoqué par Ellipsa concerne un outil de maillage géographique à des fins commerciales élaboré dès 2009.'»/Cet outil relève de la recherche «'uniquement si l'atteinte de l'objectif est conditionnée à la création de nouvelles connaissances situées au-delà de l'état des connaissances dans les domaines techniques concernés./(') A aucun moment, on peut noter que l'absence de savoir-faire limite la progression vers l'objectif. La société n'a pas présenté le progrès né tiré de cette opération, c'est à dire la connaissance située au-delà de l'état de l'art'»,[souligné par la Cour].

Le rapport d'expertise «'Crédit Impôt Recherche'» du 10 décembre 2012 conclut par ailleurs de manière précise : «'La société mène un travail de fonds dans la collecte et le traitement de données afin de proposer à ses clients des analyses. Les difficultés rencontrées par la société sont de deux types, d'une part l'accès aux données, et d'autre part l'incertitude sur la pertinence du résultat. La définition de la recherche nous enseigne que la présence de tels problèmes ne permet pas de qualifier l'appartenance des opérations au champ de la recherche, en effet, seule l'incertitude sur le chemin à suivre et la dépendances de l'atteinte de l'objectif à la création de connaissance située au-delà de l'état de l'art permet de valider l'appartenance d'une opération au champ de la recherche./Dans ce contexte nous avons émis un avis défavorable à l'éligibilité au CIR.'» [souligné par la Cour] - voir cote 7 du dossier de la société Ellipsa.

C'est partant à raison, eu égard à la nature du motif qui la fonde, que la société Ellipsa impute à faute de la société Sogedev cette décision d'inégibilité, nonobstant le fait que cette dernière société n'était tenue que d'une obligation de moyens pour la présentation du dossier permettant de solliciter le bénéfice du CIR.

Les raisons de cette inégibilité apparaissent en effet, relever d'une carence fondamentale et totale dans la méthode d'analyse utilisée comme dans la méthodologie suivie et ainsi, justifier la résiliation judiciaire du contrat aux torts de la société Sogedev.

Cette dernière société ne saurait écarter sa responsabilité en se prévalant d'un manque de coopération de la société Ellipsa dès lors que le manque de coopération allégué s'est, aux termes de ses propres écritures, surtout traduit par des réponses tardives ' voir p 24 in fine, et dès lors par ailleurs qu'elle affirme en p. 25 avoir «'grâce aux diligences accomplies, identifié les projets pouvant être éligibles au CIR 2010'» de sorte que «'il ne lui restait plus qu'à obtenir les documents demandés auprès de la société Ellipsa afin de pouvoir en calculer le montant'».

La société Sogedev sera donc en cohérence, déboutée de sa propre demande de résiliation judiciaire du contrat litigieux pour faute de la société Ellipsa

Sur le quantum de l'indemnisation de la société Ellipsa

Faute pour la société Sogedev de pouvoir justifier tant pour le CIR 2009 que pour le CIR 2010 d'une documentation rigoureuse et scientifique permettant de poser et de proposer à l'administration fiscale et au Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche de réels justificatifs, la société Ellipsa est fondée à obtenir le remboursement de la somme versée au titre des factures établies pour le CIR 2009 pour une somme totale de 95 128, 39€.

La société Ellipsa expose encore produire le justificatif de l'ensemble du temps passé par la direction générale de l'entreprise, par ses collaborateurs et par ses collaborateurs extérieurs pour remettre à plat l'ensemble des dossiers qui n'avaient pas été établis par la société Sogedev. Elle précise, que les résultats des contrôles fiscaux ayant duré quelques années avec les conséquences, ont permis de démontrer la pertinence des travaux qu'elle a réalisés, dont le quantum a pu être clairement défini puisqu'il était sollicité devant le tribunal 1 000 000€ sauf à parfaire, cette somme correspondant aux notifications de l'administration fiscale. Elle conclut finalement que si pour les années 2009 et 2010, le CIR a au regard des travaux réalisés par elle, été accepté, ce travail représente une masse pouvant être évaluée à 500 000€.

Faute cependant d'établir et de justifier, les spécificités de ce préjudice nécessairement distinct de celui réparé par le remboursement des honoraires versés à la société Sogedev et le débouté de la demande de cette dernière tendant au paiement des honoraires non perçus en raison de la prétendue reconduction tacite du contrat, ce chef de demande sera écarté.

Sur les autres demandes

Vu les articles 696 et 699 du code de procédure civile ;

La société Sogedev, partie perdante au sens de ces dispositions, sera débouté de ses demandes de première instance et d'appel, avec pour ceux d'appel, faculté de recouvrement direct en faveur de Maître Margaret Benitah, avocat.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire.

CONSTATE l'intervention volontaire à titre accessoire en appel, de la société anonyme Generali IARD, ès qualités d'assureur responsabilité civile professionnelle de la société par actions simplifiée Société de Gestion et de Développement.

DECLARE la société anonyme Generali IARD irrecevable en ses demandes.

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Statuant de nouveau et y ajoutant :

PRONONCE la résolution aux torts de la société par actions simplifiée Société de Gestion et de Développement, de la convention du 12 février 2010.

CONDAMNE la société par actions simplifiée Société de Gestion et de Développement à rembourser à la société par actions simplifiées Ellipsa la somme de quatre vingt quinze mille deux cent vingt huit euros trente neuf centimes (95 228, 39€).

CONDAMNE la société par actions simplifiée Société de Gestion et de Développement aux entiers dépens de première instance et d'appel avec pour ceux d'appel, faculté de recouvrement direct en faveur de Maître Margaret Benitah, avocat, conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu l'article 700 du code de procédure civile ; DIT n'y avoir lieu à frais irrépétibles.

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Madame Sylvie MESLIN, Président et par Monsieur BOUTEMY, Faisant Fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier f.f., Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 12e chambre section 2
Numéro d'arrêt : 15/07207
Date de la décision : 28/02/2017

Références :

Cour d'appel de Versailles 2B, arrêt n°15/07207 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-02-28;15.07207 ?
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