COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
SM
Code nac : 39H
12e chambre section 2
ARRET No
CONTRADICTOIRE
DU 10 JANVIER 2017
R.G. No 02/08371
AFFAIRE :
LE SYNDICAT NATIONAL DES FABRICANTS D'ISOLANTS EN LAINES MINERALES MANUFACTUREES
C/
S.A ACTIS venant aux droits de la Société ACTIS CORPORATE venant aux droits de la S.A ACTISO et de la S.A.R.L ACTIS - SA ACTIS a été radiée du RCS le 17 septembre 2009 après fusion absorption par la SA LAURENT THIERRY, immatriculée au RCS de PARIS sous le No 380 986 265 et dénommée ACTIS SA, le tout selon Procès Verbal d'Assemblée Générale du 30 juin 2009.
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Septembre 2002 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES
No chambre : 4
No Section :
No RG : 730F/99
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Vincent LECOURT
Me Bertrand LISSARRAGUE
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE DIX JANVIER DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
LE SYNDICAT NATIONAL DES FABRICANTS D'ISOLANTS EN LAINES MINERALES MANUFACTUREES
1 rue du Cardinal Mercier
75009 PARIS
Représentant : Me Vincent LECOURT, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 218
APPELANTE
****************
S.A ACTIS venant aux droits de la Société ACTIS CORPORATE venant aux droits de la S.A ACTISO et de la S.A.R.L ACTIS - SA ACTIS a été radiée du RCS le 17 septembre 2009 après fusion absorption par la SA LAURENT THIERRY, immatriculée au RCS de PARIS sous le No 380 986 265 et dénommée ACTIS SA, le tout selon Procès Verbal d'Assemblée Générale du 30 juin 2009.
Avenue de Catalogne
11300 LIMOUX
Représentant : Me Bertrand LISSARRAGUE de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : T.625 - No du dossier 0338284
Représentant : Me Xavier LACAZE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : T07
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 04 Octobre 2016, Madame Sylvie MESLIN, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Sylvie MESLIN, Président,
Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,
Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier f.f., lors des débats : Monsieur James BOUTEMY
Vu l'appel déclaré le 19 décembre 2002 par le syndicat professionnel dénommé Syndicat National des Fabricants d'Isolants en Laines Minérales Manufacturées (S.N. FILMM.) contre le jugement prononcé le 20 septembre 2002 par le tribunal de commerce de Versailles dans l'affaire l'opposant à la société anonyme Actiso, d'une part ainsi qu'à la société à responsabilité limitée Actis, d'autre part ;
Vu le jugement entrepris ;
Vu l'arrêt préparatoire de la cour de céans du 17 juin 2004 décidant notamment, l'organisation d'une mesure d'expertise judiciaire ;
Vu le second arrêt préparatoire du 11 mars 2010 prescrivant une mesure d'expertise complémentaire ;
Vu, enregistrées par ordre chronologique, les ultimes conclusions notifiées par le réseau privé virtuel des avocats et présentées le :
- 2 août 2016 par le S.N. FILMM ou FILMM, appelant à titre principal et intimé sur appel incident,
- 2 septembre 2016 par la société anonyme Actis (société Actis) venant aux droits de la société Actis Corporate se trouvant elle-même aux droits de la société anonyme Actiso et de la société à responsabilité limitée Actis, intimée à titre principal et appelante sur appel incident ;
Vu l'ensemble des actes de procédure ainsi que des éléments et pièces présentés par chacune des parties.
SUR CE
La Cour se réfère au jugement entrepris pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales. Il suffit, en synthèse, de rappeler les éléments constants suivants tirés des écritures d'appel.
1. données analytiques, factuelles et procédurales, du présent litige
Les industriels adhérents du S.N.FILMM produisent et commercialisent des isolants en laines minérales regroupant les isolants en laine de verre et en laine de roche. Ces matériaux qui, sous les références NF X 10-021 et NF X 10-022, font l'objet de normes techniques NF P 75-101, figurent parmi les produits traditionnels et occupent une part de marché importante dès lors, qu'ils constituent des solutions éprouvées permettant de satisfaire, dans le respect de la réglementation, le besoin d'isolation des bâtiments.
Sont ensuite apparus sur le marché, des produits " isolants minces réfléchissants » constitués d'une alternance de films métallisés et de couches de matériaux minces, principalement fabriqués et commercialisés en France par la société Actis, notamment sous la dénomination " TRI-ISO Super 9 " et " TRISO-Laine".
Faisant grief aux sociétés Actis et Actiso, d'avoir dans la presse et dans la documentation commerciale diffusée, présenté leurs produits comme autant ou plus performants que les isolants traditionnels en laines minérales, le S.N. FILMM a fait assigner ces sociétés par acte d'huissier du 2 mars 1999 devant le tribunal de commerce de Versailles en cessation, sous astreinte, de toute publicité faisant état d'une comparaison entre isolants réfléchissants et isolants traditionnels ainsi qu'en paiement de dommages-intérêts pour actes de concurrence déloyale et dénigrement.
Par jugement avant dire droit du 22 septembre 2000, le tribunal de commerce de Versailles a ordonné une mesure d'expertise et désigné à cette fin M. Christian X... en qualité d'expert avec pour mission, de procéder à une étude contradictoire des caractéristiques propres de chaque produit, de comparer ainsi les résultats obtenus à chacun des tests effectués à fin, de déterminer si le produit des sociétés Actis et Actiso est aussi efficace qu'un isolant de 20 cm de laine de verre.
Saisi d'une demande tendant à autoriser le S.N FILMM a interjeter appel de ce jugement, le premier président de la cour d'appel de Versailles, retenant qu'il n'était pas démontré que l'expertise prescrite était inutile, a rejeté cette demande par ordonnance du 15 décembre 2000. Le S.N FILMM, nonobstant cette ordonnance, avait interjeté un appel immédiat de la décision de première instance au motif qu'il s'agissait d'un jugement mixte: il s'est ultérieurement désisté de son appel. La consignation aux fins d'expertise n'a cependant jamais été versée par le S.N FILMM qui, par lettre du 22 décembre 2000, a sollicité la suspension des opérations expertales.
Saisi de conclusions de reprise d'instance déposées le 6 septembre 2001 par les sociétés Actis et Actiso, le tribunal de commerce de Versailles, statuant par jugement du 20 septembre 2002, a tranché le litige en ces termes :
- dit la mission d'expertise judiciaire de Monsieur Christian X... décidée par jugement du 22 septembre 2000 caduque,
- déboute le Syndicat National des Fabricants d'Isolants en Laines Minérales Manufacturées S.N. FILMM ou FILMM de l'ensemble de ses demandes,
- reçoit la société Actiso en sa demande reconventionnelle [tendant à obtenir l'indemnisation du préjudice subi par suite de prétendus actes de dénigrement la visant], l'y dit mal fondée et l'en déboute,
- condamne le Syndicat National des Fabricants d'Isolants en Laines Minérales Manufacturées (S.N. FILMM ou FILMM) à payer solidairement aux Sociétés Actis et Actiso la somme de 30000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamne le FILMM aux dépens.
Les points essentiels de cette décision sont les suivants : - les parties commercialisent chacune des produits qui, bien que participant tous à l'isolation de bâtiments, sont fondamentalement différents ; - seul l'un de ces produits, la laine minérale, fait l'objet de normes techniques sous les références NF ; - selon le S.N FILMM, l'appréciation des deux produits doit s'effectuer en considération de leur seule conductivité et résistance thermique en référence au coefficient R des laines minérales ; - ces fonctions caractérisent les principes physiques déterminants des produits des adhérents du S.N FILMM mais les produits iso-réflectifs Polystratés font en sus, intervenir les principes physiques de rayonnement et de convection ainsi que de stabilité du produit dans le temps et de résistance à l'humidité ; - l'ensemble de ces principes physiques permet de déterminer si l'efficacité de ces produits est « équivalente » ou « isole mieux » que ceux des adhérents du S.N FILMM ; - selon ce dernier, les références mentionnées dans les publicités des défenderesses sont une référence, directe ou indirecte, au coefficient R des produits de ses adhérents ; - le tribunal a décidé de prescrire une mesure d'expertise judiciaire au visa de l'article 144 du code de procédure civile mais cette expertise n'a pu être menée à bien, la consignation de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert n'ayant pas été versée; - chaque partie se bornant donc à présenter ses propres affirmations techniques sans les assortir de l'avis d'un technicien, le tribunal ne peut se déterminer objectivement et le S.N FILMM sera débouté de l'ensemble de ses demandes.
Le S.N. FILMM a déclaré appel de cette décision mixte. En cours d'instance d'appel, l'appelant a saisi le conseiller de la mise en état d'une demande tendant à voir ordonner une mesure d'expertise comportant une mission différente de celle précédemment instituée puis s'est par conclusions déposées le 15 octobre 2003, désisté sans motif de son incident. Il lui en a été donné acte.
Par arrêt du 17 juin 2004, la cour de céans a décidé de surseoir à statuer sur les demandes respectives des parties et a, avant dire-droit, prescrit une mesure d'expertise pour: - procéder, si nécessaire avec le concours d'un laboratoire indépendant ainsi que de tout sachant, à la comparaison des produits commercialisés par la société Actis, en particulier le TRI-ISO-Super 9, avec les produits en laines minérales manufacturées commercialisées par les sociétés adhérentes du S.N FILMM ; - donner toutes informations de caractère scientifique, susceptibles d'éclairer la juridiction saisie sur la pertinence d'une telle comparaison ; - fournir tous éléments techniques permettant de déterminer si les produits ainsi comparés peuvent être considérés comme équivalents et notamment, si le TRI-ISO-Super 9 isole autant ou mieux que 20 cm d'isolant en laine minérale.
Pour statuer ainsi, la Cour a retenu que : - les adhérents du S.N FILMM reprochent essentiellement à la société Actis de se livrer à une comparaison avec les produits qu'ils commercialisent sans avoir effectué de contrôle scientifique sérieux des performances de ses produits et sans donc, être en mesure de prouver la véracité de son message publicitaire; - il ressort de plusieurs lettres produites aux débats que la société Actis qui, le 12 juin 1996, a sollicité le bénéfice de la certification de l'Association Française pour la Certification des Matériaux Isolants ou ACERMI, s'est vue refuser cette certification au motif que les revêtements métalliques ou métallisés ne sont pas des isolants thermiques au sens de la norme NF P 75-101 ; - la société Actis, faute de réglementation française applicable au produit TRI-ISO Super 9, a donc sollicité un agrément technique européen (ETA.) auprès de l'organisme de certification belge UBAtc ; - cet organisme a par lettre du 8 février 2002, confirmé la particularité de son produit « travaillant principalement par rayonnement, impliquant que les conditions d'utilisation sont très importantes (présence de lame d'air, air en mouvement, jonctions, durabilité du film métallique, etc.) » et a invité la société Actis, à « procéder à une pré-étude consacrée notamment à des mesures de performances thermiques in situ dans des constructions existantes et à un examen sur la faisabilité et la durabilité en œuvre, les calculs et essais normalisés de déperditions thermiques ne s'y appliquant pas »; - le recours à des explorations in situ doit être qualifié de moyen de preuve admissible dès lors qu'il ressort de l'article 2.4 de l'arrêté du 2 décembre 1969 relatif à « la commission chargée de formuler des avis techniques sur des procédés, matériaux, éléments ou équipements utilisés dans la construction », qu'au nombre des justifications devant constituer le sous-dossier technique peuvent notamment figurer « les comptes rendus d'observations ou d'expérimentation en temps réel » ; - ces expériences « in situ », critiquées par le syndicat FILMM en tant qu'elles comportent des variables non maîtrisables, ne sauraient prévaloir sur des tests scientifiques réalisés par des laboratoires indépendants permettant seuls, de parvenir à des résultats objectifs et vérifiables ; - en raison du caractère non contradictoire des tests d'isolation réalisés par la société Actis, le tribunal de commerce de Versailles a donc prescrit une mesure d'expertise judiciaire ; - le FILMM produit devant la Cour un rapport du Laboratoire National d'Essais (LNE.) duquel il ressort que la résistance thermique R du TRI-ISO Super 9 s'élève à 0, 86 alors que celle de l'isolant Uniroll (isolant traditionnel) est de 2, 57, ce résultat venant contredire l'allégation de la société Actis, reprise dans son message publicitaire litigieux, suivant laquelle son produit aurait une performance thermique égale voire supérieure à celle des isolants commercialisés par les adhérents du FILMM ; - la société Actis établit pour sa part que les tests in situ réalisés par elle en 1997 ont été vérifiés par constats d'huissier et contrôlés par l'organisme anglais de certification BM TRADA ayant abouti à la conclusion que « le matériau d'isolation pour toit TRI-ISO Super 9 possédait des propriétés isolantes équivalentes à la laine de roche de 200 mm d'épaisseur » ; - la société Actis justifie également, avoir déposé auprès de l'UBAtc un dossier pour l'obtention de l'agrément technique européen de son produit TRI-ISO Super 9 ; - il ressort de cette demande d'agrément, alors en cours d'instruction, qu'il n'existe pas de normes applicables au produit TRI-ISO Super 9 et que ce produit bénéficie déjà d'un « National Technical Approval » délivré par l'organisme BM TRADA.
La Cour a finalement estimé que, eu égard aux conclusions opposées auxquelles les documents techniques respectivement communiqués par chacune des parties parviennent, une expertise judiciaire comportant une mission plus large que celle instituée par le jugement du 22 septembre 2000 devait être ordonnée pour permettre à la Cour de disposer d'éléments objectifs de comparaison entre les produits commercialisés par la société Actis et ceux en laines minérales manufacturées commercialisés par les adhérents du FILMM.
Le technicien désigné, M. Christian X..., a exécuté la mission confiée et a déposé son rapport le 27 février 2009. Il conclut ainsi que, « à l'exception d'une situation résultant d'une mise en œuvre inadéquate de la laine minérale dont les propriétés se trouvent alors dégradées, le TRI ISO Super 9 n'isole pas autant ou mieux que 200 mm de laine minérale et que ces deux produits ne peuvent être considérés comme équivalents. ».
Les parties ont donc conclu en ouverture de ce rapport. L'expert, M. Christian X..., assisté de M. Gilbert Y..., expert agréé à la Cour de cassation, a été entendu à l'audience du 3 décembre 2008 pour préciser et expliquer ses constatations et conclusions.
Par arrêt du 11 mars 2010, la cour d'appel de céans, a énoncé sa décision sous forme de dispositif dans les termes qui suivent :
- dit que le simple fait que les publicités incriminées ne correspondent pas aux résultats obtenus dans les conditions de laboratoire de la boîte chaude gardée n'est pas, en soi, trompeur,
- ordonne un complément d'expertise,
Avec pour mission complémentaire à l'expert :
- réunir les parties et les entendre, se faire communiquer tous documents nécessaires à l'accomplissement de la mission, élaborer, avec les parties, un protocole d'essais in situ, en cas d'échec de l'élaboration commune d'un tel protocole, en référer au président de la chambre qui statuera sur les conditions à respecter pour le déroulement de l'essai,
- organiser et contrôler la mise en œuvre de ces essais, si nécessaire avec le concours d'un laboratoire indépendant ainsi que de tout sachant, afin de comparer les produits commercialisés par la société ACTIS, en particulier le TRI-ISO Super 9, avec les produits en laines minérales manufacturées commercialisés par les sociétés adhérentes du FILMM,
- fournir tous éléments techniques permettant de déterminer si, employés dans des conditions normales d'utilisation, les produits ainsi comparés peuvent être considérés comme équivalents, et notamment si le TRI-ISO Super 9 isole autant ou mieux que 20 cm d'isolant en laine minérale,
- fixe à 15 000€ la consignation qui devra être effectuée par le FILMM dans le délai de trois mois à compter du prononcé du présent arrêt,
- dit qu'à défaut de consignation dans le délai imparti, la mesure d'expertise sera caduque, sauf prorogation du délai ou relevé de forclusion conformément aux dispositions de l'article 271 du code de procédure civile,
- dit que l'expert devra déposer son rapport complémentaire dans le délai de deux ans à compter de l'avis de versement de la consignation (...).
- réserve les dépens.
Les points essentiels de cette décision sont les suivants : - la société Actis justifie de ce que le Comité Européen de Normalisation (CEN.) dont le rôle est d'élaborer des normes techniques, s'est intéressé à la situation des isolants minces multi-couches réflecteurs du type du produit TRI-ISO Super 9 ne faisant pas encore l'objet de normes harmonisées ; - un groupe de travail (WORK Group 12 ou WG 12.) a ainsi été crée en 2007, au sein du CEN TC 89 (Thermal performance of buildings and buildings components.) pour déterminer les méthodes appropriées de mesure des performances thermiques des produits isolants comportant des caractéristiques réfléchissantes ; - les tests in situ sur lesquels la société Actis fonde les comparaisons incriminées par le S.N FILMM, ne sauraient être écartés de plano car ils sont nécessaires à la complète information de la Cour ; - de tels tests ont été estimés utiles durant les opérations d'expertise mais le technicien désigné en a écarté les résultats aux motifs notamment, que « l'égalité de consommation constatée tient à la réduction de la résistance thermique de laine minérale, qui tient elle-même à l'in-étanchéité importante et inhabituelle des bâtiments ayant servi aux essais, à Limoux, ainsi que l'expose M. Y... dans son rapport figurant en annexe. Le niveau d'isolation ainsi obtenu dans les deux bâtiments lors des essais réalisés à Limoux est totalement insuffisant au regard des dispositions réglementaires actuelles et des règles de l'art en la matière, connues de longue date. »; - ces affirmations de l'expert ne suffisent cependant pas à invalider les résultats obtenus ; - le test de la boîte chaude gardée, méthode normalisée de mesure de la résistance thermique par un laboratoire agréé, présente un intérêt scientifique majeur pour connaître, dans des conditions strictement définies et contrôlées, les propriétés de conductibilité thermique des différents matériaux concernés mais diffère de manière radicale, des conditions d'une utilisation réelle de ces produits par le consommateur désireux d'isoler un bâtiment ; - les tests in situ apparaissent comme pertinents, pour apporter au consommateur des données correspondant à ses attentes ; - le simple fait que la comparaison effectuée par la société Actis, dans ses publicités incriminées, soit invalidée dans des conditions de laboratoire ne saurait nécessairement conduire à juger que ces publicités sont trompeuses sur les qualités essentielles de ses produits.
Saisi par voie d'incident, le magistrat de la mise en état a selon ordonnance du 20 octobre 2011 désigné M. Gilbert Y..., ingénieur expert-isolation thermique constructions frigorifiques, expert agréé par la Cour de cassation, en qualité de co-expert avec la même mission que celle définie par l'arrêt du 11 mars 2010. Il a par ailleurs dit que les essais in situ ordonnés par l'arrêt du 11 mars 2010 seraient réalisés par une société indépendante, la société Neotim.
Il a rappelé dans les motifs de sa décision les points suivants : - les essais menés pour permettre à la Cour de se prononcer, doivent permettre de déterminer si, employés dans des conditions normales d'utilisation, les produits comparés peuvent être considérés comme équivalents et notamment si le TRI-ISO Super 9 isole autant ou mieux que 20 cm d'isolant en laine minérale ; - les conditions définies par l'expert dans ses notes pour ces essais in situ sont suffisamment proches des conditions normales d'utilisation pour être significatives mais ne peuvent à l'évidence reproduire complètement la multiplicité possible de la réalité de mise en œuvre des produits comparés, en fonction de la taille des bâtiments, de leur exposition aux intempéries, de leur mode de construction lesquels varient selon les époques et les normes imposées ; - s'agissant de la présence d'un écran sous-toiture en particulier, dès lors que celui-ci n'était pas obligatoire en 1997/1998, l'expert a justement répondu qu'il procéderait à un essai sans écran, ce qui ne préjuge pas des résultats ; - l'expert mènera donc les essais in situ selon les dispositions prévisionnelles figurant dans ses notes 5 et 6 ainsi que dans sa note 7 répondant aux dires des parties, sauf autre accord entre les parties ou modification imposées par des contraintes techniques ; - il appartiendra quoi qu'il en soit à l'expert, comme il s'en est d'ailleurs réservé la faculté dans cette dernière note, d'apprécier, au cours des opérations, la nécessité de procéder à de nouveaux essais et en référer en cas de difficultés.
Le magistrat chargé du contrôle des expertises a ensuite selon ordonnance du 3 juillet 2014, rejeté la demande de la société Actis fondée sur les articles 167 et 168 du code de procédure civile tendant à voir constater que la laine de verre mise en œuvre par le S.N FILMM pour la phase 1 et 2 des tests in situ, ne correspondait pas à la laine minérale de 200 mm de dénomination IBR ayant fait l'objet des mesures en 2007 par l'Ecole des Mines ainsi que cela avait été exigé par l'arrêt du 11 mars 2010 et l'ordonnance du 20 octobre 2011.
Pour statuer ainsi, le magistrat chargé du contrôle des expertises a retenu que dès lors, que la demande présentée n'avait pas pour objet de le saisir ès qualités d'une difficulté à laquelle se heurtait l'exécution de la mesure d'instruction prescrite judiciairement, mais de contester les résultats de l'expertise déjà réalisée au motif que la laine de verre mise en œuvre durant les tests in situ ne correspondrait pas à celle qui aurait dû être testée et que ainsi, les tests ne se seraient pas déroulés dans les conditions fixées par la Cour, cette dernière était seule, habilitée à se prononcer sur la question posée. Il a in fine rappelé, qu'il n'appartient pas au conseiller chargé du contrôle des expertises d'apprécier la pertinence et/ou la validité des résultats de l'expertise aujourd'hui terminée au regard des conditions dans lesquelles cette mesure d'investigation s'est déroulée et que quoi qu'il en soit, la société Actis pourra faire valoir ses observations, contestations et critiques dans ses écritures au fond devant la Cour pour que celle-ci puisse apprécier la valeur à accorder aux résultats obtenus.
Saisi d'un nouvel incident, le conseiller de la mise en état a par ordonnance du 20 octobre 2011, statué dans les termes du dispositif ci-après :
- disons que les essais in situ ordonnés par l'arrêt du 11 mars 2010 seront réalisés par la société Neotim.
- déboutons la société Actis de sa demande tendant à y voir procéder dans ses locaux de Saint-Andrieux.
- disons que le coût de ces essais réalisés par la société Neotim sera supporté par moitié par le S.N FILMM et la société Actis pour le compte de qui il appartiendra.
- disons que l'expert mènera les essais in situ selon les dispositions prévisionnelles figurant dans ses notes 5 et 6 ainsi que dans sa note 7 répondant aux dires des parties, sauf autre accord entre l'expert et les parties ou modification imposée par des contraintes technique.
- disons qu'il appartiendra à l'expert d'apprécier, au cours des opérations, la nécessité de procéder à de nouveaux essais, à expérimenter et d'en référer en cas de difficultés.
- déboutons les parties de toute autre demande.
- disons que les dépens du présent incident suivront le sort des dépens lorsque la cour statuera au fond.
Les points essentiels de cette décision sont les suivants : - il est indispensable au bon déroulement des opérations d'expertise qu'aucune des parties ne puisse mettre en cause l'impartialité de l'organisme technique amené à effectuer les essais in situ quand bien même ces essais seraient conduits sous le contrôle de l'expert ; - il ne saurait donc être choisi, à défaut d'accord des parties, un organisme qui a déjà été missionné par l'une d'entre elles pour mener des opérations destinées à venir à l'appui de ses prétentions ou qui serait en litige avec l'une des parties ou qui ne serait pas indépendant des intérêts commerciaux de l'une des parties ; - quelle que soit la notoriété reconnue et non discutée de IBP et de BM TRADA, il n'y a donc pas lieu de les désigner pour procéder aux essais in situ, même sous le contrôle des experts ; - la solution proposée par ces derniers, le choix de la société Neodim, est donc, au vu des gages donnés de compétence technique et d'impartialité de celle-ci, approprié et sera retenu d'autant qu'il n'est pas formellement établi qu'il s'agit d'un choix nettement plus couteux que celui d'IBP, lequel nécessite le déplacement des experts en Allemagne pour le suivi des opérations ; - pour les mêmes motifs que ceux conduisant à écarter IBP et BM TRADA, les essais ne sauraient avoir lieu dans les bâtiments construits par la société Actis à Saint-Andrieux près de Limoux ; - les conditions définies par l'expert dans ses notes 5 et 6 puis, en réponse aux dires des parties dans sa note 7 détaillée et motivée, sont suffisamment proches des conditions normales d'utilisation pour être significatives ainsi que rappelé dans l'ordonnance du 20 octobre 2011.
Les experts désignés ont fait procéder par la société Neotim, à l'édification de deux bâtiments en bois sur un terrain situé à Castanet, à la périphérie d'Albi. Cette même société a été chargée des opérations techniques et notamment, de la métrologie (science de la mesure.) et des différents tests organisés par les experts, sous le contrôle de ces derniers. Ces techniciens ont finalement déposé le complément du rapport d'expertise le 25 février 2015, en concluant que : « Les résultats de toutes les campagnes d'essais effectués ont été parfaitement cohérents entre eux, laissant toujours apparaître des écarts très importants et constants entre le TRI ISO Super 9 et l'isolant en laine minérale épaisseur 20 cm : les deux produits employés dans des conditions normales d'utilisation et ainsi comparés, ne peuvent pas être considérés comme équivalents car le chalet isolé avec l'isolant TRI ISO Super 9 a consommé plus de kWh que le chalet isolé avec l'isolant laine minérale 20 cm./A l'évidence, l'isolant dénommé TRI ISO Super 9 n'isole pas autant et n'isole pas mieux que 20 cm d'isolant en laine minérale. »
Par ordonnance du 6 juin 2016, le magistrat de la mise en état a débouté la société Actis de sa demande de sursis à statuer visant à lui permettre de communiquer au cours de la présente instance, des pièces saisies dans le cadre d'une procédure actuellement pendante devant l'Autorité de la Concurrence.
Pour se prononcer ainsi, le conseiller de la mise en état a énoncé que : - la société Actis, pour conclure au sursis à statuer, soutient que le calendrier de procédure ne lui permettra pas de se défendre alors qu'elle entend communiquer des pièces saisies dans le cadre d'une procédure pendante devant l'Autorité de la concurrence dans laquelle elle est opposée au S.N FILMM ; - sur la base de la notification de griefs et des pièces saisies ou collectées par le service d'instruction de l'Autorité de la Concurrence, dont la société Actis prétend qu'elles ont un lien direct avec le litige dévolu à la Cour, il serait révélé que le S.N FILMM, le Centre Scientifique et Technique du Bâtiment et la société Saint Gobain Isover savaient depuis longtemps qu'en situation réelle et dans des conditions normales d'utilisation, la laine minérale a des capacités d'isolation thermique inférieures à celles mesurées en laboratoire et qui sont équivalentes à celles du produit commercialisé par la société Actis;
- si cette dernière société soutient que ces documents sont de nature à infirmer le bien-fondé des résultats de l'expertise exécutée à la demande de la Cour, en affirmant que « les experts n'ont pas suffisamment veillé à ce que l'expertise respecte le principe des conditions normales d'utilisation de l'isolant en situation réelle, telles qu'exigées par la Cour » et si elle prétend que ces pièces tendent à démontrer que le S.N FILMM a méconnu le cadre de l'expertise pour mieux masquer cette altération des capacités thermiques de la laine minérale, cette société est mal fondée à dénoncer, a priori et dans le cadre d'un incident, que les experts ont méconnu le respect de leur art dans l'exécution de la mission que la Cour leur a confiée ; - il ressort quoi qu'il en soit des éléments du dossier que l'audience devant l'Autorité de la concurrence s'étant tenue le 11 mai 2016, une décision devrait intervenir avant le 6 octobre 2016, jour de l'audience devant la Cour et en tous cas, avant la date à laquelle l'arrêt de la Cour est susceptible d'être rendu.
La clôture de l'instruction a finalement été ordonnée le 6 septembre 2016 et l'affaire a été renvoyée à l'audience de plaidoiries tenue en formation collégiale le 4 octobre suivant pour y être plaidée. A cette date, les débats ont été ouverts et l'affaire a été mise en délibéré à ce jour.
2. les dispositifs des conclusions des parties
Vu les articles 455 et 954 du code de procédure civile ;
Le S.N FILMM demande qu'il plaise à la Cour de :
- vu l'article 1382 du Code Civil,
- vu le code de la consommation et notamment les articles précités,
- vu les articles L.131-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution.
- vu le rapport d'expertise de Monsieur X... déposé le 27 février 2009,
- vu le complément au rapport d'expertise de MM. X... et Y... déposé le 25 février 2015,
- vu les pièces produites aux débats tant en première instance qu'en appel,
- entendre, de manière préliminaire aux explications fournies par les parties, par application de l'article 245 du CPC, les experts sur les résultats de leur rapport.
Recevant le Filmm en son appel et l'y déclarant fondé :
- infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Versailles le 20 septembre 2002
Et, statuant à nouveau
- dire et juger que la société Actis a trompé les consommateurs sur les qualités essentielles de ses produits et s'est livré à une comparaison sur la base d'un test non pertinent et faussé de ses produits avec les laines minérales,
- déclarer les pratiques commerciales d'Actis illicites,
- condamner la société Actis à réparer les préjudices portés aux intérêts de la profession des fabricants de laines minérales et par le FILMM du fait de ces pratiques.
En conséquence
- ordonner à Actis de cesser toute comparaison de ses produits avec les laines minérales qui ne soit pas objective de la capacité d'isolation de chacun de ses produits, notamment réalisés à partir de tests non pertinents, non vérifiables ou non représentatifs et ce, sous astreinte de 15 000 euros par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ;
- condamner la société Actis à verser la somme de 70 000 000 euros au FILMM en réparation du préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession du fait des actes de concurrence déloyale et de dénigrement visant les laines minérales pour la période courant du début de sa première campagne publicitaire illicite au 31 décembre 2008,
- condamner la société Actis à verser la somme de 15 000 000 euros au FILMM en réparation du préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession du fait des actes de concurrence déloyale et de dénigrement visant les laines minérales pour la période courant du 1er janvier 2009 à la date de l'arrêt à intervenir, sauf à parfaire,
- condamner la société Actis à verser la somme de 300 000 euros au FILMM en réparation du préjudice subi par le FILMM au titre de son préjudice direct ;
- ordonner, et ce, à titre de réparation en nature :
- la publication par la société Actis du dispositif de l'arrêt à intervenir par extraits dans la limite de 5 000 euros hors taxes par publication, dans les périodiques suivants :
- Négoce,
- Cahiers techniques du bâtiment,
- Le Moniteur,
- 60 millions de consommateurs,
- Le Particulier,
- UFC Que choisir,
Et ce, sous astreinte provisoire de 10 000 euros par titre et par mois de retard, et ce, passé un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir.
- la publication par la société Actis de l'arrêt à intervenir par extraits en page d'accueil de son site internet pendant une durée d'un mois, sous astreinte à 100 000 euros par mois de retard, et ce, passé un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir.
En tout état de cause,
- condamner la société Actis au paiement de la somme de 190 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société Actis aux entiers dépens d'instance, d'appel et d'expertise, y compris le complément d'expertise et dire qu'ils seront recouvrés directement par Maître Vincent Lecourt, conformément aux dispositions des articles 695 et suivants du CPC [code de procédure civile].
La société Actis prie pour sa part la Cour de :
- à titre principal
1 - Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté le FILMM de ses demandes
- dire que le FILMM ne rapporte pas la preuve de ses demandes ;
En conséquence,
- dire et juger que les publicités « TRISO Laine isole mieux que 25 cm de laine de verre » sont loyales, véridiques et n'induisent pas en erreur
- dire et juger que les demandes du FILMM concernant l'existence d'une concurrence déloyale de la part de la société ACTISO doivent être déboutées ;
- dire et juger que les demandes du FILMM concernant l'existence d'un dénigrement doivent être déboutées ;
2 - Infirmer le jugement en qu'il a débouté la société ACTIS de ses demandes reconventionnelles
- dire et juger que les indications du FILMM contenues dans le livret « gardons les pieds sur terre » sont fausses et ou de nature à induire en erreur et qu'elles ne sont pas loyales et qu'en conséquence le FILMM s'est livré à des actes de concurrence déloyale et de dénigrement au préjudice de la société ACTIS ;
- ordonner la publication par le FILMM de l'arrêt à intervenir par extraits dans la limite de 3 500 euros HT par publication dans les cinq périodiques suivants : - Négoce ; - Cahiers Techniques du bâtiment ; - Le Moniteur ; - 60 millions de consommateurs ; - Le Particulier ;
- ordonner la publication par le FILMM du communiqué suivant dans les cinq périodiques suivants - Négoce ; - Cahiers Techniques du bâtiment ; - Le Moniteur ; - 60 millions de consommateurs ; - Le Particulier :
Pour rétablir la confiance qui a pu être durablement atteinte à l'endroit des produits d'isolation mince multicouches, La Cour d'appel de Versailles a ordonné la présente publication qui rappelle que :
- les capacités d'isolation de la laine minérale sont altérées en conditions normales d'utilisation;
- les résultats des performances thermiques de la laine minérale IBR mesurées en laboratoire ne sont pas retrouvées en conditions normales d'utilisation ;
En conclusion, l'affirmation selon laquelle « Lorsqu'il est mis sur ou dans une paroi, un isolant traditionnel apporte la performance thermique correspondant à sa résistance certifiée, et ce, quelque soit son environnement, compte tenu de ses seules caractéristiques intrinsèques. » est inexacte et est de nature à induire en erreur sur les réelles capacités d'isolation de la laine minérale IBR de 200 mm d'épaisseur et de 0,04.
A titre subsidiaire,
- dire que le FILMM n'établit pas l'existence de ses préjudices et le débouter en conséquence,
En tout état de cause,
- condamner le FILMM à régler à la société Actis la somme de 500 000 euros au titre de l'article 700 du CPC.
- le condamner aux dépens.
-dire qu'ils pourront être directement recouvrés par Selarl Lexavoué Paris-Versailles conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
La Cour renvoie à chacune de ces écritures pour un exposé complet des positions de chaque partie dont l'essentiel sera développé dans le cadre des motifs de cet arrêt.
CELA ETANT EXPOSE,
1. La Cour statue sur la recevabilité et le bien-fondé de demandes indemnitaires croisées pour concurrence déloyale fondée sur l'article 1382 ancien du code civil, la demande principale étant présentée par un syndicat national chargé de la défense de l'intérêt collectif des fabricants de laine minérale - le S.N FILMM -, contre une société commerciale, spécialisée dans la conception et la fabrication d'isolants minces multi-couches réflecteurs pour le bâtiment (toitures, combles, murs et sols.) - société Actis -, à qui celui-là, impute notamment à faute, des actes de parasitisme commis au cours d'une période comprise entre 1995 et 2005 en raison, de comportements constitutifs de tromperie au sens de l'article L.213-1 du code de la consommation, de pratiques commerciales trompeuses au sens de l'article L.121-1 du dit code et encore, de publicité comparative illicite au sens de l'article L.121-8 du même code en raison notamment, de la mise sur le marché, à partir de 1996, de plusieurs produits d'isolation intérieure, notamment celui dénommé TRI ISO Super 9, présentés comme produits innovants doté d'un pouvoir isolant, équivalant à celui des laines minérales traditionnelles fabriquées et commercialisées par les adhérents du S.N FILMM.
Sur le bien-fondé de l'appel principal
2. La Cour a par arrêts préparatoires des 17 juin 2004 et 11 mars 2010, prescrit l'exécution de deux mesures d'expertises. Elle a en effet, pour pouvoir disposer d'éléments objectifs de comparaison entre les produits commercialisés par la société Actis et ceux en laines minérales manufacturées commercialisés par les adhérents du FILMM et être ainsi en mesure de trancher le point litigieux se rapportant à leurs qualités isolantes respectives, estimé nécessaire de recourir à des investigations confiées à un technicien s'analysant en un processus exploratoire qui, par nature, comporte des inconnues devant être révélées et peut donc conduire l'expert à s'écarter du schéma initialement prévu dans le déroulement de ses travaux voire, à reconsidérer totalement ces derniers.
3. A l'issue de ces opérations ayant notamment donné lieu à des mesures comparatives réalisées in situ, en conditions réelles d'utilisation, selon un protocole précis convenu entre elles, les parties restent aujourd'hui sur des positions opposées.
4. Les experts mentionnent en p. 41 du dernier rapport établi, que des investigations ont été pratiquées durant près de cinq ans « pour la réalisation de quatre essais qui n'ont pas été des simulations mais bien au contraire des applications en situation normale dont le protocole a été défini et accepté avec l'accord unanime des parties, applications qui ont duré au total 66 jours, expertise qui a fait l'objet de 11 réunions contradictoires et de 26 notes aux parties. ». Ils concluent « avoir organisé et contrôlé, en présence des parties, la mise en œuvre des essais avec le concours du Laboratoire Néotim (laboratoire proposé par les experts, accepté par les parties et retenu par ordonnance du 20 octobre 2011 du conseiller de la mise en état.) » et précisent « que les résultats de toutes les campagnes d'essais effectués ont été parfaitement cohérents entre eux, laissant toujours apparaître des écarts très importants et constants entre l'isolant TRI-ISO Super 9 et l'isolant en laine minérale épaisseur 20 cm./Les deux produits employés dans des conditions normales d'utilisation et ainsi comparés ne peuvent pas être considérés comme équivalents car le chalet isolé avec l'isolant TR-ISO Super 9 a consommé plus de kWh que le chalet isolé avec l'isolant laine minérale 20 cm./A l'évidence, l'isolant dénommé TRI-ISO Super 9 n'isole pas autant et n'isole pas mieux que 20 cm d'isolant en laine minérale. ».
5. Le premier rapport d'expertise établi à partir du résultat de tests uniquement pratiqués en laboratoire, a conduit au même résultat.
6. Le S.N FILMM fonde l'essentiel de son argumentaire sur ces conclusions expertales, observant que celles-ci permettent en effet d'affirmer, sans erreur possible, que les prétentions de la société Actis sont mensongères, que cette société n'a ainsi été, ni loyale, ni objective et que « sa publicité est bel et bien le fruit de manipulations qui ne pouvaient échapper à un professionnel. ». Il souligne tout particulièrement que dès les années 1990, ainsi que rappelé dans le cadre du premier rapport d'expertise, la pose d'écran sous toiture est retenue comme une bonne pratique largement répandue chez les constructeurs bien que non obligatoire et rappelle que dès les années 1970, les « écrans sous toiture » ou « pare vapeurs » sont déjà mentionnés dans les DTU toiture de la série 40 et qu'ils figurent dans la documentation technique relative à la mise en œuvre des laines minérales, publiés par la documentation française du bâtiment et adressés aux professionnels – voir documents de 1979, 2004 et 1983 en cotes 125 à 127 produites par la partie appelante. Il affirme que le complément d'expertise a clairement permis : - de démontrer par les faits, que les facteurs d'échange dans des conditions normales d'utilisation soumises au contradictoire, inspectées par les parties et les experts, ne permettent pas aux isolants minces, d'atteindre les performances des laines minérales ; - de confirmer que les tests en laboratoire prennent en compte les échanges thermiques dans toutes leurs composantes et enfin, - de démontrer que la norme existante qui s'applique aux laines minérales et les tests de laboratoire servant à exprimer la valeur intrinsèque de ces dernières, dans des conditions prédéfinies, maîtrisées et communes à tous les produits qui en relèvent, autorisent une comparaison de manière totalement objective. Il ajoute que la société Actis admet elle-même que dans une démarche d'isolation, le bon sens est d'isoler le bâtiment et qu'ainsi cette société, professionnelle de l'isolation, ne pouvait ignorer le résultat qu'elle obtiendrait sur l'expression des performances de la laine minérale, en n'assurant pas l'étanchéité à l'air de son installation. Il soutient que quoi qu'il en soit, la société Actis ne peut ignorer davantage que son test, loin de reproduire les conditions réelles d'utilisation, exploite en réalité une situation anormale d'étanchéité à l'air, ce qui explique que les essais qu'elle a réalisés se trouvent être les seuls différents de l'ensemble des publications scientifiques existant sur le sujet. Il observe enfin que la lecture des pièces produites par son adversaire, tirées de la procédure soumise à l'Autorité de la concurrence, permet de comprendre le montage que cette société a organisé de parfaite mauvaise foi, ces documents témoignant notamment de sa connaissance de la nécessité d'assurer l'étanchéité à l'air de l'installation dans le cadre d'une démarche d'isolation thermique.
7. La société Actis conteste pour sa part la crédibilité et la fiabilité des derniers résultats obtenus in situ par les techniciens commis en se prévalant, d'anomalies constatées lors de l'exécution des opérations expertales dont, selon ses dires, les experts judiciaires n'ont pas souhaité vérifier les causes alors que d'évidence, ces anomalies étaient de nature à fausser le résultat de leurs investigations. Elle précise, que ces anomalies se rapportent à l'épaisseur de la laine minérale posée dans le cadre des derniers tests ainsi qu'aux conditions d'étanchéité retenues pour la pose de celle-ci et en conclut, que ces tests ne sont pas conformes aux conditions normales d'utilisation des produits concernés correspondant à l'époque en cause et que les experts n'ont donc pas respecté les préconisations de l'arrêt du 11 mars 2010. Elle précise fonder ses propres assertions sur les résultats des tests certifiés par l'organisme anglais BM Trada, accrédité depuis 2011 en tant qu'organisme d'évaluation de la conformité par l'organisme d'accréditation britannique UJKAS, équivalent de la COFRAC, ainsi que sur des documents saisis dans le cadre d'une procédure d'instruction actuellement pendante devant l'Autorité de la Concurrence, régulièrement produits aux débats pour l'exercice nécessaire des droits de la défense.
8. Au regard de la précision descriptive et de la clarté du rapport d'expertise complémentaire ainsi que de l'ensemble des éléments soumis à l'appréciation de la Cour, il n'apparaît, ni nécessaire, ni utile à la solution du litige, de faire droit à la demande liminaire du S.N FILMM d'entendre les experts, sur les résultats de leurs investigations.
9. La comparaison devant être effectuée entre un produit commercialisé entre 1995 et 2005 (TRI-ISO Super 9) et la laine minérale, c'est à juste titre, et en toute cohérence logique, que la société Actis fait de prime abord observer, que les tests réalisés devaient se faire, en référence aux conditions normales d'utilisation suivies à cette période.
10. Or, il est constant qu'au début des années 2000, la réglementation thermique n'avait pas pris en compte les problématiques d'étanchéité ou de calfeutrage des habitations. L'écran sous toiture n'était alors pas obligatoire et par ailleurs, la norme européenne NFEN 13829 permettant de déterminer la perméabilité à l'air des bâtiments, n'a pris effet en France que le 5 février 2001 et n'a, d'un point de vue réglementaire, été rendue obligatoire qu'à partir de l'arrêté du 26 octobre 2010 ou de l'arrêté du 28 décembre 2012.
11. Il en résulte, nonobstant les affirmations du S.N FILMM, que dans les prescriptions de pose de laines minérales données à l'époque, le recours à des joints, pare-vapeur ou écrans sous toitures n'est pas présenté comme systématique et ne peut donc, être estimé comme répondant aux conditions normales d'utilisation. La laine minérale posée pouvait donc être ventilée, ainsi qu'en témoigne par exemple le Guide Pratique Isover 1998 de la société Saint-Gobain Isover, société adhérente du S.N FILMM et leader sur le marché des isolants en laine de verre, préconisant : « les lés se posent à joint vif, l'élasticité de la laine préserve la continuité gage d'une isolation performante.» [souligné par la Cour], mais également la pièce 131 produite aux débats par la société Actis, correspondant à un courriel adressé en interne par la société Saint-Gobain Isover énonçant : « Nous ne pouvons plus rester sur une solution classique Type IBR (sans pare-vapeur indépendant et sans écran de sous-toiture). » [souligné par la Cour].
12. Plusieurs documents établissent qu'en conditions normales d'utilisation de l'époque, sans joint, sans membrane et sans écran de sous toiture, les produits IBR d'une épaisseur de 200 mm ont une efficacité thermique réduite comparativement à une situation où les conditions de mise en œuvre des produits se rapprochent des conditions de laboratoire – voir notamment le procès-verbal d'audition de M. Z..., maître assistant à l'Ecole des Mines de Paris du 16 juin 2010 devant l'Autorité de la Concurrence en cote 139: « la résistance thermique intrinsèque est insuffisante pour donner à l'utilisateur non spécialisé la performance finale de la paroi avec le produit. De plus, aujourd'hui, les débats ont permis de mettre en évidence que les performances des isolants laine minérale testées en laboratoire par les méthodes normalisées donnaient des performances qui étaient dégradées après mise en œuvre dans le bâti./A cet égard, la valeur du « R » faciale est rarement atteinte sans mise en œuvre de précautions et produits complémentaires tels que les membranes./En France, il n'est pas obligatoire d'associer une membrane à l'isolant laine minérale alors que cette obligation existe dans d'autres pays européens comme l'Allemagne. Les membranes sont proposées depuis une dizaine d'année mais un gros effort commercial de communication des industriels n'est apparu que récemment. Les membranes les plus performantes « HPV » sont sur le marché depuis 5 environ.(sic) ».
13. De telles assertions sont en cohérence avec les résultats des tests in situ présentés par la société Actis au premier expert, lequel a en p. 9 de son rapport, précisé : « si les essais réalisés par ACTIS [à Limoux.] montrent effectivement une égalité de performances du TRI ISO Super 9 et de la Laine Minérale, le niveau de celles-ci montre une dégradation des performances de la Laine Minérale et non pas une élévation des performances du TRI ISO Super 9 par rapport aux résultats obtenus en laboratoire. ». Elles le sont également avec les résultats des essais effectués en 2011 par IBP Fraunhofer à Holzkichen (RFA.) - voir pièce 130 du S.N FILMM, sur des bâtiments très semblables à ceux de Limoux, bénéficiant d'une étanchéité à l'air conforme aux règles de bonne pratique en usage dans la construction. Elles le sont enfin, avec ceux réalisés en laboratoire ayant tous conclu à des valeurs de résistance thermique des produits minces réfléchissants (PMR.), dont le TRI-ISO Super 9, inférieures à 2m²K/W même lorsque ceux-ci sont mis en œuvre entre deux lames d'air étanches et inférieures à 1m²K/W lorsqu'ils sont mis en œuvre sans lame d'air alors que la résistance thermique constatée de la laine minérale pour une épaisseur de 200 mm est généralement voisine de R = 5m²K/W – voir p. 7 du rapport d'expertise du 27 février 2009.
14. C'est donc avec raison que la société Actis observe que la question de l'étanchéité du bâtiment faisant l'objet d'un test, influe sur la crédibilité des opérations expertales ayant pour objet, d'apporter à la Cour les éléments techniques permettant de déterminer si, employés dans des conditions normales d'utilisation, les produits ainsi comparés peuvent être considérés comme équivalents.
15. Faute d'avoir pris en considération le dire de la société Actis du 9 décembre 2010 rappelant cette problématique, les experts ne peuvent ainsi être considérés comme ayant respecté l'exactitude de la mission confiée par arrêt du 11 mars 2010. Ils se sont en effet bornés à écarter la demande de l'intimée par des affirmations générales, énoncées dans les termes suivants : « Dans le cas présent, les mesures de perméabilité ont été réalisées à l'issue de chaque série d'essais et rien ne justifie de se référer à des valeurs par défaut./Le fait que le résultat de ces mesures n'aille pas dans le sens espéré par une des parties, ne justifie pas que les mesures soient à rejeter, et ce d'autant moins que la perméabilité ne joue qu'un rôle infime dans la comparaison des résultats de consommation électrique que nous avons enregistrées et qui découlent du protocole d'essai élaboré contradictoirement. » [souligné par la Cour], sans étayer cette assertion par quelque considération technique que ce soit et en toute contradiction avec les constatations de M. Gilbert Y..., sapiteur, expert agréé auprès de la Cour de cassation, dans la note du 19 décembre 2008 - voir cote 118 du dossier de l'intimée.
16. Selon cette note en effet : « En fait, la campagne de mesure qui a été réalisée sur le site de Limoux a mis en évidence l'insensibilité de l'isolant mince Tri-Iso Super 9 - par rapport à l'isolant laine minérale [d'épaisseur 200 mm] - face aux effets de la convection surfacique ou de toute pression d'air qui s'exerce sur la surface de l'isolant, effets qui réduisent le pouvoir d'isolation. Cette propriété de l'isolant Tri-Iso Super 9 lui est donnée par enveloppe extérieure constituée d'un film relativement étanche. En outre, les propriétés de réflexion (réflectance) de cette enveloppe améliorent le pouvoir d'isolation du produit Tri-Iso Super 9 » [souligné par la Cour]. Cet expert sapiteur a par ailleurs également pu constater, en synthèse des investigations comparatives alors effectuées sur le site de Limoux, « que lorsque la vitesse du vent avoisine voire dépasse 15km/H, la consommation en kWh dans le bâtiment isolé en laine minérale augmente » pour en conclure : « Certes, le FILMM a émis des observations sur la campagne de mesures effectuée par la société Actis, notamment par Dire du 1er octobre 2008. Toutefois nous considérons ces campagnes de mesures analysées globalement, comme étant très instructives sur l'analyse comparative entre les deux isolants dans la situation d'une application réelle (hors toute notion de laboratoire) car cette investigation nous permet de constater que l'influence des mouvements d'air voire d'une pression d'air qui s'exerce sur l'isolant en laine minérale (IBR de 200mm revêtu de kraft), réduit la résistance thermique de cet isolant. » [souligné par la Cour]. Il ajoute : « En effet, l'isolant en laine minérale est un matelas constitué de fibres enchevêtrées emprisonnant le milieu gazeux (air). Or, lorsque l'air est maintenu inerte au sein de la masse fibreuse, l'isolant en laine minérale possède des caractéristiques de conductivité thermique globales plus satisfaisantes que celles de l'isolant Tri-Iso Super 9 (investigations de laboratoire)./En revanche, lorsqu'une pression d'air significative s'exerce sur l'isolant en fibre minérale, créant ainsi des mouvements de convection dans l'isolant, les caractéristiques de conductivité thermique se dégradent au point de rendre 200 mm de laine minérale thermiquement moins performants que l'isolant Tri Iso Super 9 (investigations sur site-isolation de bâtiments.)».
17. Le premier test réalisé en situation réelle à Castanet près d'Albi par le laboratoire Néotim, du 3 novembre au 1er décembre 2013, avec pose d'un parement composé de plaques de plâtre jointes, ne saurait donc être estimé significatif et pertinent et permettre de répondre à la question posée puisqu'il n'a pas été pratiqué dans les conditions réelles de l'époque.
18. La société Actis critique par ailleurs les résultats du second test pratiqué dans la même configuration que celle retenue pour le premier, mais sans parement en plaque de plâtre. Elle soutient que l'identité de résultats constatée lors du premier et second essai, ne peut s'expliquer que par la pose par le S.N FILMM, d'une laine minérale de plus grosse épaisseur et de plus forte densité. Elle en veut pour preuve, le fait d'avoir pu constater une différence, entre la dénomination figurant sur l'étiquette CE de laine minérale mise en œuvre par le S.N FILMM pour chacune des phases des tests litigieux et celle, figurant sur la sache sur laquelle était apposée cette étiquette faisant mention du terme « IBR ». Elle ajoute, avoir pu constater que l'échantillon de laine minérale prélevée lors de l'expertise était, d'une plus forte épaisseur que celles achetées dans le commerce et quoi qu'il en soit, supérieure à 200 mm, ce qui n'a pu, qu'avoir un impact direct sur la performance thermique de l'isolant et donc, sur sur celle obtenue lors du second et dernier essai in situ.
19. Il est constant, que les experts n'ont pratiqué aucune mesure effective et concrète de l'épaisseur de la laine minérale posée dans le cadre de ce second test, à partir de l'échantillon prélevé, sous le contrôle d'un huissier, par la société intimée au centre du rouleau alors que cette anomalie, si elle est exacte, peut laisser penser, ainsi que le rappelle la société Actis, que la laine minérale posée à cette occasion n'a pas été une laine minérale IBR de type de celle utilisée en 2007.
20. Les techniciens mis en cause par la société intimée se sont bornés à rappeler dans leur note récapitulative : « L'épaisseur supérieur à 20 cm de laine minérale que la société Actis a déclaré avoir mesuré le 17 février 2014, alors que nous ne relevions aucune anomalie – voir note aux parties no 22, pages 3 et 4 -, ne peut être que le fait d'un gonflement de la laine minérale. Ce gonflement est bien connu par les isoleurs, qui provient de la texture du produit, en effet, il suffit de le dérouler, de le manipuler, voire de le découper pour observer une légère expansion de la laine, notamment sur les bords. Ce fait ne bonifie pas la performance de l'isolant car la masse ne varie pas. Au contraire, ce fait a tendance à réduire les performances de l'isolant car les espaces d'air libre qui existent entre les films des produits isolants sont plus grands et créent incontestablement des phénomènes de convexion dans l'épaisseur : dès lors, la convexion interne qui se forme diminue le pouvoir d'isolation de la laine minérale. ».
21. En l'absence sur ce point, de toute mesure effective pratiquée dans des conditions objectives et de manière contradictoire, le résultat du dernier test réalisé doit être écarté d'autant que le pare-vapeur de la laine minérale testé s'est avéré avoir un poids beaucoup plus lourd qu'un pare-valeur habituel pour un isolant IBR, ce qui à tout le moins, tend à établir le caractère plausible des allégations de la société Actis.
22. Ces circonstances découlant notamment d'un manque de rigueur des opérations d'expertise, s'ajoutant aux pièces saisies lors de l'instruction diligentée par l'Autorité de la Concurrence établissant la crainte du S.N FILMM de voir révéler que les performances thermiques de la laine minérale sont fortement altérées sous l'effet d'un manque d'étanchéité à l'air et encore, aux appréciations portées par M. Gilbert Y..., sapiteur, expert agréé auprès de la Cour de cassation, dans sa note du 19 décembre 2008, conduisent à écarter les griefs imputés à la société Actis de concurrence déloyale par tromperie sur les qualités substantielles de son produit d'isolation interne, publicité mensongère et publicité comparative fausse.
23. Sur ces constatations et pour l'ensemble de ces raisons, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté le S.N FILMM de sa demande indemnitaire.
Sur le mérite de l'appel incident
24. La société Actis fait reproche au jugement attaqué, d'avoir écarté sa demande de réparation pour concurrence déloyale par dénigrement, par publication du présent arrêt ordonnée à titre principal alors que les mentions contenues dans le livret publié à grande échelle en 1997 par le S.N FILMM intitulé « En isolation, restons les pieds sur terre » porte des informations prétendument trompeuses, laissant croire que les laines minérales ont des performances thermiques supérieures aux isolants minces multicouches réflecteurs qui, pour cette raison, n'auraient pas fait l'objet d'une certification ACERMI.
25. Le S.N FILMM s'oppose à cette réclamation, observant que la brochure litigieuse ne présente que des faits objectifs et véridiques et que, quoi qu'il en soit, des isolants minces ont pu obtenir des agréments techniques européens. Elle précise que la brochure incriminée fait référence à une norme qui existe.
26 Le dénigrement est juridiquement appréhendé comme un acte consistant à porter atteinte à l'image de marque d'une entreprise ou d'un produit désigné ou identifiable afin de détourner la clientèle en usant de propos ou d'arguments répréhensibles ayant ou non une base exacte, diffusés ou émis de manière à toucher les clients de l'entreprise visée, concurrente ou non de celle qui en est l'auteur. La victime doit ainsi établir l'influence de l'acte de dénigrement sur le volume d'affaires liée à son activité professionnelle et sur sa capacité de concurrence, pour permettre au juge, d'apprécier si une mesure de publication de la décision de justice est de nature à informer les personnes détournées en raison de l'agissement incriminé.
27. En l'espèce, la mention critiquée par la société Actis est la suivante : « Compte tenu de leurs performances thermiques, les produits réfléchissants ne répondent pas tous à la définition normalisée des isolants thermiques./Il n'existe pas à ce jour, en France, de produit réfléchissant faisant l'objet d'une certification ACERMI [Association pour la Certification des Matériaux Isolants]. »
28. Si en matière de dénigrement, la manière de dire est aussi importante que ce qui est dit, force est de relever au cas présent que cette énonciation, nonobstant les allégations présentées par la société Actis, n'est en elle-même aucunement défavorable et ne fait que se rapporter à des produits d'isolation interne innovants dont les caractérisques thermiques n'ont pas encore été validées par un organisme officiel. Au demeurant, l'influence négative qu'a pu avoir une telle assertion sur le volume d'affaires de la société Actis n'est absolument pas établi.
29. Sur ces constatations et pour ces raisons, l'appel incident sera déclaré mal-fondé et le jugement entrepris sera de ce chef également, confirmé.
Sur les autres demandes
30. Vu les articles 696 et 699 du code de procédure civile ;
31. Le S.N FILMM, partie perdante au sens de ces dispositions, sera condamné aux entiers dépens d'appel, avec faculté de recouvrement direct en faveur de la Selarl Lexavoué Paris-Versailles.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire.
DIT n'y avoir lieu à entendre par application de l'article 245 du code de procédure civile, les experts sur les résultats de leur rapport.
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Y ajoutant :
CONDAMNE le Syndicat National des Fabricants d'Isolants en Laines Minérales Manufacturées aux entiers dépens d'appel avec faculté de recouvrement direct en faveur de la Selarl Lexavoué Paris-Versailles, avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu l'article 700 du code de procédure civile ; CONDAMNE le Syndicat National des Fabricants d'Isolants en Laines Minérales Manufacturées à verser à la société anonyme Actis une somme de trente mille euros (30 000€.) à titre de frais irrépétibles d'appel.
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Sylvie MESLIN, Président et par Monsieur BOUTEMY, Faisant Fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier f.f., Le président,