COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 38B
13e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 22 SEPTEMBRE 2016
R.G. N° 14/08415
AFFAIRE :
[F] [V]
C/
SA BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Octobre 2014 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES
N° Chambre : 4
N° Section : 0
N° RG : 13F00006
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 22.09.2016
à :
Me Bertrand ROL
Me Martine DUPUIS
TC VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT DEUX SEPTEMBRE DEUX MILLE SEIZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [F] [V]
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représenté par Me Bertrand ROL de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat Postulant, au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20140854 et par Me Stéphane CATHELY, avocat plaidant
APPELANT
****************
SA BANQUE POPULAIRE RIVES DE PARIS agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 2]
Représentée par Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat Postulant, au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1453983 et par Me ANCEL de la SELARL RAVET & Associés, avocat plaidant au barreau de PARIS
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 Juin 2016 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène GUILLOU, conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Aude RACHOU, Présidente,
Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,
Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Séverine ALEGRE,
FAITS ET PROCEDURE,
La Banque populaire rives de Paris (la Banque populaire) a consenti à la Société [V] World automobile (la société DWA), un crédit de trésorerie d'un montant de 270 000 euros garanti par un billet à ordre de même montant souscrit le 28 septembre 2012 par la société DWA à échéance du 17 octobre 2012. Ce billet à ordre, qui n'a pas été payé à son échéance, avait été avalisé le même jour par M. [F] [V] Président de la société DWA, avec, sous la signature de celui-ci, la mention suivante: 'en tant que président de la société DWA'.
Les 18 octobre 2012 et 7 février 2013, la société DWA a été mise en redressement puis liquidation judiciaires.
Le 12 novembre 2012, la Banque populaire a mis en demeure M. [V] en sa qualité d'avaliste puis l'a assigné en exécution de son engagement le 17 décembre 2012.
Par jugement du 17 octobre 2014, le tribunal de commerce de Versailles a, avec le bénéfice de l'exécution provisoire :
- condamné M. [F] [V] à payer la somme de 270 000 euros à la Banque populaire outre intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2012,
- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil, la première capitalisation intervenant le 17 octobre 2013 et les capitalisations ultérieures au 17 octobre de chaque année jusqu'à parfait paiement,
- reçu M. [F] [V] en sa demande reconventionnelle, l'a dit mal fondée et l'en a débouté,
- débouté M. [F] [V] de sa demande de mainlevée de l'hypothèque conservatoire,
- débouté M. [V] à payer à la Banque populaire la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Le 24 novembre 2014, M. [V] a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 11 mai 2016 M. [F] [V] demande à la cour de :
à titre liminaire :
- enjoindre le cas échéant à la Banque populaire de communiquer la convention par laquelle elle s'est engagée à consentir à la société DWA SAS et à toutes sociétés du groupe Auto Consult une facilité de trésorerie d'une durée de 3 mois, la dernière d'une durée de 19 jours,
sur le fond,
- constater que M. [F] [V] n'a pas donné son aval à titre personnel mais en qualité de président de la société DWA,
- constater que la Banque populaire aurait dû s'assurer que M. [V] avait conscience qu'il ne s'engageait pas en qualité de président de la société DWA mais à titre personnel au regard de l'incohérence des mentions figurant sous ses signatures avant de valider le billet à ordre et de débloquer les fonds,
- constater que la Banque populaire qui était en relation de longue date avec les sociétés du groupe auquel appartient la société DWA a en toute connaissance de cause substitué une garantie personnelle à une garantie d'une société qu'elle savait illusoire,
- dire qu'en agissant ainsi, la Banque populaire a fait preuve de mauvaise foi contractuelle et a nécessairement causé un préjudice à M. [V],
En conséquence,
- réformer le jugement,
- débouter la Banque populaire de toutes ses demandes,
- condamner la Banque populaire à indemniser M. [V] du préjudice qu'il a subi et qui ne peut être inférieur aux sommes qu'elle lui réclame soit 270 283,61 euros date du dernier décompte outre intérêts de retard depuis le 11 décembre 2012,
- ordonner la main levée aux frais de la Banque populaire de l'hypothèque conservatoire inscrite en date du 12 décembre 2012 à la requête de la Banque populaire sur le bien immobilier situé [Adresse 1],
A titre subsidiaire,
Vu 1244-1 et 1244-2 du code civil,
- constater que la situation financière de M. [V] ne lui permet pas de faire face au paiement de la dette contractée à l'égard de la Banque populaire en sa qualité d'aval,
En conséquence,
- accorder les plus larges délais à M. [V] dans la limite de deux années,
- dire que le taux d'intérêt sur les sommes dues sera réduit au taux d'intérêt légal,
- dire et juger que les paiements opérés par M. [V] s'imputeront en priorité sur le capital.
En toute hypothèse :
- condamner la Banque populaire à payer à M. [V] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la Banque populaire aux dépens de l'instance avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de maître Rol.
Aux termes des dernières conclusions en date du 10 mai 2016, la Banque populaire demande à la cour de :
- dire M. [F] [V], mal fondé en son appel, en toutes fins qu'il comporte,
- l'en débouter,
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- faire en cause d'appel une nouvelle application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [F] [V] à payer à l'intimé la somme de 5 000 euros,
- condamner M. [F] [V] aux entiers dépens d'appel dont distraction, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile, au profit de la SELARL, Lexavoue Paris-Versailles.
La clôture a été prononcée le 2 juin 2016.
SUR CE :
Sur la demande de communication de pièces
Considérant que M. [V] demande la production par la Banque populaire de 'la convention par laquelle la Banque populaire s'est engagée à consentir à la société DWA et à toutes les sociétés du Groupe Auto consult une facilité de trésorerie d'une durée de 3 mois, la dernière d'une durée de 19 jours' ; qu'il expose que cette pièce éclaire le contexte du litige et contredit l'argumentation de la banque ;
Considérant que la Banque populaire réplique qu'il n'existe pas de convention autre que les billets à ordre eux-mêmes, que M. [V] n'explique pas ce que changerait cette convention et qu'en tout état de cause la créance de la banque sur la société DWA a été admise au passif de la société, avec l'accord exprès du dirigeant et ne peut plus être remise en cause ; qu'une telle convention si elle existait, concernerait la société, tierce au litige et que sa production se heurterait au secret professionnel ;
Considérant qu'aucun élément versé aux débats ne permet ni d'établir ni même de laisser supposer l'existence d'une convention autre que les billets à ordre versés aux débats ; que la production d'un document dont l'existence n'est pas établie ne peut pas être ordonnée ; que M. [V] sera débouté de sa demande ;
Sur l'engagement de M. [V]
Considérant que M. [V] soutient qu'il n'a pas donné son aval à titre personnel mais en sa qualité de président de la société DWA, que la banque aurait dû s'assurer de ce qu'il 'avait conscience de ce qu'il ne s'engageait pas en qualité de président mais à titre personnel au regard de l'incohérence des mentions figurant sous ses signatures' avant de débloquer les fonds ; qu'il en conclut que la banque doit être déboutée de sa demande ;
Considérant que la Banque populaire réplique que M. [V] avait déjà signé de nombreux billets à ordre au profit de la banque et connaissait parfaitement les conséquences de son engagement ; que la société ne pouvait être à la fois souscripteur du billet et donneur d'aval, de sorte que M. [V] l'a nécessairement souscrit en sa qualité de représentant légal de la société DWA et que la mention de sa qualité sous sa signature en qualité d'avaliste ne retire donc rien au caractère personnel de son engagement ; que si incohérence il y avait, celle-ci ne serait due qu'à l'initiative de M. [V] ; qu'il est très averti et que la banque ne lui devait aucune mise en garde ;
Considérant que la Banque populaire est porteuse d'un billet à ordre souscrit le 28 septembre 2012 par la société DWA d'un montant de 270'000 euros ; que ce billet à ordre a été garanti par l'aval de M. [V] qui sous signature a porté la mention suivante: ' en tant que Président de DWA SAS' ;
Considérant que la validité du billet à ordre n'est pas contestée par M. [V] en ce qui concerne ses effets sur la société DWA ; que la même société ne peut être à la fois souscripteur du billet à ordre et avaliste de ce billet ; que par sa double signature M. [F] [V] l'a nécessairement avalisé en son nom personnel, comme il l'a fait à 9 reprises pour les précédents concours consentis à la société DWA depuis le 31 mars 2011, et ce nonobstant la mention portée sous sa signature ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu que M. [V] s'était personnellement engagé en qualité d'avaliste et en ce qu'il l'a débouté de sa demande de mainlevée de l'hypothèque conservatoire prise sur le bien sis à [Localité 1] ;
Considérant que M. [V] sera donc condamné au paiement des sommes demandées, les intérêts étant dus à compter de l'échéance, en application de l'article L 511-45, 2°, du code de commerce, rendu applicable par l'article L 512-3 du même code ; que la capitalisation sera ordonnée, conformément à la demande, le jugement étant confirmé de tous ces chefs ;
Sur les dommages-intérêts demandés par M. [F] [V] :
Considérant que M. [V] soutient que la Banque populaire a agi de mauvaise foi en 'substituant une garantie personnelle à une garantie d'une société qu'elle savait illusoire'; qu'elle aurait dû s'assurer qu'il avait conscience qu'il ne s'engageait pas en qualité de président de la société mais à titre personnel ;
Considérant que l'aval, en ce qu'il garantit le paiement d'un titre dont la régularité n'est pas discutée, constitue un engagement cambiaire gouverné par les règles propres du droit du change de sorte que M. [V] n'est pas fondé se prévaloir d'un devoir de mise en garde que lui devrait la banque ; que M. [V] sera donc débouté de sa demande de dommages-intérêts, le jugement étant confirmé de ce chef ;
Sur la demande de délais de paiement :
Considérant que M. [V] fait valoir qu'il s'est engagé en faveur de plusieurs sociétés et que deux d'entre elles sont en liquidation judiciaire ; que 501 714,56 euros lui sont réclamés par ailleurs à ce titre par diverses banques, qu'il est âgé de 66 ans et perçoit une retraite de 3 181 euros par mois et doit verser avec son épouse des mensualités de 3 754 euros au titre du remboursement de sa résidence principale ;
Considérant que la Banque populaire s'oppose à ces délais qui sont prohibés par les articles L. 511-81 et L.512-3 du code de commerce ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.511-81 du code de commerce, 'aucun jour de grâce ni légal ni judiciaire n'est admis sauf dans les cas prévus par les articles L. 511-38 et L. 511-50" du même code, non applicables en l'espèce ; que cette disposition, qui concerne la lettre de change, est rendue applicable au billet à ordre par l'article L 512-3 du code de commerce ; que le donneur d'aval étant tenu de la même manière que celui dont il s'est porté garant, dans le cadre d'une action cambiaire, les délais de grâce en faveur d'un donneur d'aval requis sont prohibés ; que M. [V] sera donc débouté de sa demande de délais ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 17 octobre 2014 par le tribunal de commerce de Versailles,
Y ajoutant,
Déboute M. [F] [V] de sa demande de délais de paiement,
Condamne M. [F] [V] à payer à la Banque populaire la somme supplémentaire de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [F] [V] aux entiers dépens d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, au profit de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Aude RACHOU, Présidente et par Madame Séverine ALEGRE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,La présidente,