COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 63B
1re chambre 1re section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 23 JUIN 2016
R.G. N° 14/04700
AFFAIRE :
[R] [N]
C/
SCP ANCELET DOUCHIN ELIE [T]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Février 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
N° chambre : 01
N° Section :
N° RG : 11/04635
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
- Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, avocat au barreau de VERSAILLES
-Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES,
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LE VINGT TROIS JUIN DEUX MILLE SEIZE,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [R] [W] [C] [N]
né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 6] (95)
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentant :- Représentant : Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 17314
et Me Marie-Claude ALEXIS de la SELASU SAINT-ADAM, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0194
APPELANT
****************
SCP ANCELET DOUCHIN ELIE SAUDUBRAY Société civile professionnelle d'Avocats exerçant sous l'enseigne 'ADES', agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés au siège en cette qualité
RCS de Paris numéro 439 052 564
[Adresse 3]
[Localité 3]
Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA membre de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 - N° du dossier 017274 -
Représentant : Me [R] LATASTE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R137
INTIMEE
MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
venant aux droits de COVEA RISKS INTIMEE, siren 775 652 126 dont le siège social est situé
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentant : Maitre Isabelle DELORME- MUNIGLIA membre de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C 52
- Représentant : Me [R] LATASTE de l'AARPI Chatain & Associés, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R137
MMA IARD
venant aux droits de COVEA RISKS INTIMEE
siren 440 048 882 dont le siège social est situé
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentant : Maitre Isabelle DELORME-MINIGLIAS , membre de la SCP COURTAIGNE AVOCATS Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C 52
- Représentant : Me [R] LATASTE de l'AARPI Chatain & Associés, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R137
PARTIES INTERVENANTES (conclusions du 4 janvier 2016)
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 09 Mai 2016, Monsieur Dominique PONSOT, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Odile BLUM, Président,
Madame Anne LELIEVRE, Conseiller,
Monsieur Dominique PONSOT, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT
*
Vu le jugement du tribunal de grande instance de Versailles du 11 février 2014 ayant, notamment :
- débouté M. [N] de l'intégralité de ses demandes,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné le demandeur aux entiers dépens ;
Vu la déclaration du 19 juin 2014 par laquelle M. [N] a formé à l'encontre de cette décision un appel de portée générale ;
Vu les dernières conclusions notifiées le 2 mars 2016, aux termes desquelles M. [N] demande à la cour de :
- condamner in solidum la SCP Ancelet [I] [L] [T] ainsi que les sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD à lui payer la somme de 150.000 euros à titre de dommages-intérêts pour les préjudices matériels et moraux,
- dire que cette condamnation portera intérêt au taux légal à compter de la date introductive d'instance,
- dire que les intérêts seront capitalisés pour chaque période de douze mois écoulés,
- condamner in solidum la SCP Ancelet [I] [L] [T] ainsi que les sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD à lui payer la somme de 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter la SCP Ancelet [I] [L] [T] ainsi que les sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD de toutes leurs demandes,
- condamner in solidum la SCP Ancelet [I] [L] [T] ainsi que les sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD aux dépens,
Vu les dernières conclusions notifiées le 7 novembre 2014, aux termes desquelles la société Covea Risks demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
- débouter purement et simplement l'appelant de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions ;
Vu les dernières conclusions notifiées le 4 janvier 2016, aux termes desquelles les sociétés MMA IARD Assurances mutuelles et MMA IARD demandent à la cour de :
- leur donner acte de ce qu'elles viennent aux droits de la société Covea Risks et reprennent donc, à cette date, à l'identique, les droits et engagements souscrits par elle ;
- leur donner acte de ce qu'elles poursuivent la défense sur l'action en cours, tant au nom de MMA IARD (SA) qu'au nom de MMA IARD Assurances Mutuelles ;
SUR CE, LA COUR,
Considérant que M. [R] [N], fonctionnaire de police, a été victime le 27 novembre 1995 d'un accident de trajet imputable au service, à la suite duquel il a sollicité à plusieurs reprises une mutation à caractère dérogatoire, les séquelles de son accident l'empêchant, selon lui, de conduire un véhicule automobile sur de grands axes routiers ; qu'étant domicilié à proximité de [Localité 4], il estimait son état incompatible avec son affectation à [Localité 5] ;
Que le 24 janvier 2004, un arrêté a été pris par le préfet des Yvelines le réintégrant à la DPAF de Roissy à compter du 8 janvier 2004 avec le bénéfice d'un mi-temps thérapeutique en catégorisation C2 pour une période de trois mois dès la reprise de ses fonctions et plein traitement ;
Que par courrier du 19 août 2004, il a été mis en demeure de rependre ses fonctions sous peine de voir sa rémunération interrompue rétroactivement à compter du 13 février 2004 et une procédure de radiation des cadres engagée à son encontre ;
Qu'un arrêté du 14 septembre 2004 a maintenu les dispositions de l'arrêté du 24 janvier 2004, l'a placé en position d'absence irrégulière à compter du 13 février 2004 et a suspendu son traitement à compter de cette date ;
Qu'il a fait appel à Me [T], avocat, membre de la SCP Ancelet [I] [L] [T], pour assurer sa défense, lequel a formé un recours hiérarchique le 22 novembre 2004, puis un recours pour excès de pouvoir le 25 mars 2005, au motif que l'arrêté du 14 septembre 2004 était illégal, devant le tribunal administratif de Versailles qui, par ordonnance du 12 avril 2005 s'est déclaré incompétent au profit du tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
Que le 13 juillet 2005 Me [T] a sollicité du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise la suspension de l'exécution de l'arrêté du 14 septembre 2004 ; que sa demande a été rejetée par ordonnance du 25 juillet 2005 ;
Que M. [R] [N] a finalement obtenu une affectation à caractère dérogatoire à [Localité 4] qui lui a permis de reprendre son travail à compter de la mi-octobre 2005 ;
Qu'il a reçu le 3 juin 2005 un commandement de payer la somme de 16.778,97 euros correspondant au rappel des traitements qui lui avaient été versés entre le 13 février et le 30 septembre 2004 ;
Que le 5 juillet 2007, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 14 septembre 2004 pour absence de délégation de signature, moyen qui n'avait pas été présenté par l'avocat de M. [N] et qui a été soulevé d'office par le tribunal, mais a refusé de faire droit aux conclusions d'injonction de lui verser les sommes correspondant à l'intégralité de son traitement pour la période du 13 février 2004 au 15 octobre 2005 ;
Que le 19 juillet 2007, un nouvel arrêté a été pris réitérant les dispositions de l'arrêté du 14 septembre 2004 mais respectant les règles de légalité externe ;
Qu'un pourvoi en cassation formé devant le Conseil d'Etat contre le jugement du 5 juillet 2007 par le ministère de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano a été déclaré non-admis le 30 novembre 2009 ;
Que par acte du 12 avril 2011, M. [N] a fait assigner la SCP Ancelet [I] [L] [T] ainsi que son assureur la société Covea Risks aux droits de laquelle viennent les sociétés MMA IARD SA et MMA IARD Assurances Mutuelles (la MMA) devant le tribunal de grande instance de Versailles pour obtenir la réparation des préjudices causés par les manquements aux devoirs de compétence, de conseil et d'efficacité qu'il impute à Me [T], consistant dans la nécessité de devoir prendre une retraite anticipée calculée sur une base que M. [N] qualifie de dérisoire ;
Que, par le jugement entrepris, le tribunal a considéré qu'aucun des éléments du dossier ne permettait de rattacher le préjudice de carrière dont se prévaut M. [N] à la faute de Me [T] ;
Sur les manquements relatifs à la procédure au fond
Considérant que M. [N] reproche en premier lieu à son avocat d'avoir déposé une requête inefficace faute d'avoir sollicité immédiatement la condamnation de l'administration au paiement de dommages-intérêts, ce que cet avocat reconnaîtrait selon lui ; que, pareillement, son avocat aurait dû présenter une demande de reconstitution de carrière ou de réintégration, ce qui n'a pas été le cas ; que cette omission lui a, en outre, fermé la voie de l'appel ;
Que les moyens développés par son avocat aux Conseils, quoique pertinents, n'ont pu prospérer, étant invoqués pour la première fois devant le Conseil d'Etat et donc irrecevables ; que M. [N] indique qu'il ignorait que son conseil aurait dû soumettre l'ensemble des moyens dès le premier acte de procédure, de sorte que la poursuite de l'action était nécessairement compromise ;
Qu'il estime, en second lieu, que Me [T] n'a pas transmis au tribunal administratif des pièces très importantes qui démontraient qu'il se trouvait en arrêt maladie après l'arrêté du 24 janvier 2004, de sorte qu'il ne pouvait, dans le même temps, être considéré comme ayant abandonné son poste ;
Qu'en réponse, la MMA et la SCP Ancelet [I] [L] [T] font valoir que Me [T] n'a jamais reconnu avoir commis une faute, mais a simplement rappelé qu'il n'était pas possible de solliciter du tribunal saisi d'un recours pour excès de pouvoir une condamnation de l'Etat à des dommages-intérêts, compte tenu de la nécessité d'une demande préalable ;
Qu'elles estiment à cet égard que M. [N] confond deux règles du contentieux administratif, à savoir la règle de la cristallisation du débat contentieux, qui interdit de modifier la nature de recours après l'expiration du délai de recours contentieux et l'impossibilité d'assortir un recours en annulation d'une demande indemnitaire, dès lors que le contentieux n'était pas lié par le recours hiérarchique ; qu'elles notent que des prétentions indemnitaires ont bien été formulées mais le juge administratif n'y a pas fait droit dans le jugement du 5 juillet 2007 au motif que le requérant n'a volontairement pas repris son travail et qu'il se trouvait donc en situation d'abandon de poste ;
*
Considérant que, quand bien même Me [T] aurait, dès l'acte introductif d'instance, présenté l'ensemble des demandes relevant du plein contentieux, il demeure que leur succès nécessitait de démontrer que le refus de M. [N] de reprendre son travail en janvier 2004 ne constitutait pas un abandon de poste, mais était médicalement justifié, et que, par suite, l'arrêté du 14 septembre 2004 était entaché d'une erreur de droit ou de fait ;
Qu'il ne peut, tout d'abord, être fait reproche à Me [T] de ne pas avoir produit, au soutien de ce recours, des éléments médicaux postérieurs à cet arrêté, selon lesquels la solution d'une reprise d'activité en mi-temps thérapeutique à la DPAF de [Localité 5] n'était pas adaptée et qui préconisaient une reprise à temps plein n'exposant pas l'intéressé à la conduite sur autoroute ;
Qu'il n'est pas discutable qu'ont, en revanche, été produits aux débats par Me [T] lors du dépôt, le 25 mars 2005, d'un mémoire en réplique devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, les éléments médicaux au vu desquels ont été pris, tant l'arrêté du 24 janvier 2004 portant réintégration de M. [N] à compter du 8 janvier 2004 à la DPAF de [Localité 5] en mi-temps thérapeutique, catégorie C2, que l'arrêté du 14 septembre 2004 le plaçant en position d'abandon de poste, à savoir, en particulier, l'expertise médicale rendue par le Dr [E] du 27 décembre 2001, des certificats médicaux du Dr [E] des 23 août 2002 et 27 février 2003, un certificat médical du Dr [Y] du 17 décembre 2003, ainsi qu'un échange de correspondance avec le Dr [E] ; que ces différents avis médicaux étaient concordants avec les avis de l'inspecteur régional du Secrétariat régional pour l'administration de la police (SGAP), de la commission du SGAP et du comité interdépartemental de la police, lesquels soulignaient, en faveur d'une reprise en mi-temps thérapeutique, la longueur de l'arrêt de travail et le 'cadre phobique' des troubles de M. [N] en général ;
Considérant que s'il apparaît qu'en ne présentant pas de demandes indemnitaires à l'encontre de l'Etat dès la requête introductive d'instance, Me [T] a privé son client de la possibilité d'un réexamen de l'affaire par la juridiction du second degré, il doit néanmoins être souligné que le moyen tiré ce que l'arrêté du 14 septembre 2004 aurait procédé à une erreur de qualification en qualifiant le refus de M. [N] de reprendre son poste en abandon de poste, a été examiné par le tribunal administratif et, à sa suite, par le Conseil d'Etat, qui a déclaré le recours non-admis ; que, sur ce point, le rapporteur public a conclu devant le Conseil d'Etat en faveur de l'absence d'inexactitude de cette qualification, en relevant que M. [N] avait bénéficié d'un arrangement thérapeutique pris sur l'avis de plusieurs experts, d'un mi-temps thérapeutique depuis 2003, de sorte qu'il devait s'attendre à une décision administrative, dès lors qu'il ne s'était pas présenté à son poste alors qu'il y était attendu ;
Qu'étant rappelé que l'arrêté du 24 janvier 2004 n'a pas été contesté par M. [N] et n'était plus susceptible de l'être lorsque ce dernier a fait appel à Me [T], il apparaît que cette décision était en adéquation avec les constatations et avis médicaux existant au moment où elle a été prise ; qu'il en est de même de l'arrêté du 14 septembre 2004, étant précisé que M. [N] ne produit aucun certificat médical pour la période comprise entre le 23 janvier et le 14 septembre 2004 justifiant d'une absence à son poste pour raison médicale ;
Qu'il résulte de ce qui précède que M. [N] ne démontre pas la réalité de la perte de chance de voir juger que son refus de reprendre son poste à [Localité 5] n'était pas, à la date de l'arrêté du 14 septembre 2004, irrégulière mais médicalement justifiée ;
Que le jugement sera confirmé sur ce point ;
Sur la procédure de référé
Considérant que M. [N] soutient qu'en assignant en référé devant le juge administratif le 13 juillet 2005 pour solliciter la suspension de l'arrêté litigieux, Me [T] aurait agi tardivement ;
Qu'il expose que si son avocat avait assigné en référé dans le mois qui a suivi l'arrêté du 14 septembre 2004, et en invoquant le moyen d'illégalité tiré de l'irrégularité de la délégation de signature, l'administration l'aurait reclassé sans attendre une année de plus ;
Qu'en réponse, les intimées font valoir que la requête en référé de M. [N] a été rejetée pour 'absence de moyen sérieux' et non pour défaut d'urgence ;
*
Considérant que s'il est constant que la requête en référé a été rejetée au motif qu'aucun des moyens invoqués n'était de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée, c'est à juste titre que M. [N] fait valoir que si son avocat avait, simultanément au recours hiérarchique qu'il a introduit, présenté cette requête et qu'il avait soulevé le moyen tiré de l'absence de délégation de signature, il aurait pu obtenir gain de cause ; qu'en effet, les circonstances invoquées au soutien de la requête, tenant à la situation financière précaire de M. [N] et de sa famille compte tenu de l'arrêt du versement de son traitement, étaient de nature à caractériser la condition d'urgence ; que faute d'y avoir procédé, Me [T] a privé son client d'une chance sérieuse d'obtenir l'arrêt de la suspension de son traitement et celle de ne pas avoir à restituer le trop versé ;
Que, certes, il demeure que nonobstant une telle décision, l'administration conservait la possibilité de rapporter son arrêté et en reprendre un nouveau satisfaisant aux conditions de légalité externe, comme elle l'a fait en prenant, le 19 juillet 2007, un nouvel arrêté ; qu'ainsi, il est hautement vraisemblable que l'administration aurait à nouveau décidé l'interruption du traitement et le rappel du trop versé à compter du 13 février 2004 ; qu'il n'en reste pas moins que M. [N] a été privé de l'éventualité favorable que constituait, aussi longtemps qu'un nouvel arrêté n'avait pas été pris, une décision de suspension d'exécution de l'arrêté litigieux du 14 septembre 2004 ;
Que le jugement sera infirmé de ce chef ;
Que le préjudice découlant de cette perte de chance sera entièrement réparé par l'allocation, toutes causes confondues, de la somme de 3.000 euros au paiement de laquelle seront condamnées les intimées avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente décision et capitalisation de ces intérêts dès lors qu'ils seront dus pour une année entière conformément à l'article 1154 du code civil ;
Sur le défaut de contestation de l'arrêté du 19 juillet 2007
Considérant que M. [N] soutient que son avocat l'a privé de la possibilité de contester l'arrêté du 19 juillet 2007 alors même que cela lui aurait permis de former des demandes adaptées afin de faire cesser ou de limiter les préjudices qu'il supportaient, avec des chances non négligeables de succès, dès lors que l'ensemble des moyens auraient été présentés dès l'acte introductif d'instance ; qu'en outre, cet arrêté était rétroactif, ce qui était particulièrement contestable au regard du droit positif ;
Qu'il précise que son avocat n'a non seulement pas engagé de recours à l'encontre dudit arrêté mais qu'il a omis d'informer l'avocat au Conseil d'Etat de son existence ;
Qu'en réponse, les intimées font valoir qu'une fois l'arrêté annulé par le juge, il n'y a pas d'obstacle à ce que l'administration adopte un troisième arrêté allant dans le même sens ; qu'elles ajoutent que les chances de réussite restaient nulles de voir annuler l'arrêté du 8 janvier 2004 (24 janvier 2004) puisqu'il n'avait jamais fait l'objet du moindre recours utile de la part de l'appelant qui, à l'époque, n'avait pas d'avocat ;
Qu'elles ajoutent que si un recours avait été exercé contre l'arrêté du 19 juillet 2007, le grief de rétroactivité de cet arrêté n'avait aucune chance de prospérer, car la jurisprudence considère que les décisions récognitives, qui produisent leurs effets à compter de l'apparition d'une situation de fait qu'elles se bornent à constater, ne sont pas illégales bien qu'ayant une portée rétroactive ;
Que les intimées notent que Me [T] a bien essayé de soutenir que l'abandon de poste était justifié par un motif légitime de nature médicale, argumentation qui a été reprise par l'avocat aux Conseils, mais le tribunal administratif, puis le Conseil d'Etat ont considéré que cet abandon de poste n'était pas justifié par un motif légitime et sérieux ; qu'à cet égard, l'administration était liée par l'avis d'aptitude du comité médical interdépartemental ayant conduit à l'arrêté du 23 janvier 2004 (24 janvier 2004), lequel n'a fait l'objet d'une recours contentieux par M. [N] ;
Qu'elles ajoutent que le fait que M. [N] ait pu, ultérieurement, obtenir un poste de reclassement proche de son domicile sur la base d'éléments nouveaux, n'a aucun effet sur l'appréciation de son abandon de poste en janvier 2004 ;
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Considérant que pour les raisons précédemment examinées à propos du recours exercé à l'encontre de l'arrêté du 24 septembre 2004, les chances de succès d'un nouveau recours pour excès de pouvoir ne peuvent être considérées comme suffisamment sérieuses pour qu'il puisse être fait grief à Me [T] de ne pas l'avoir exercé ; que le grief tenant au caractère prétendument rétroactif de l'arrêté du 19 juillet 2007 n'aurait pas accru ces chances de succès ;
Qu'il en est de même des demandes relevant du plein contentieux dont Me [T] aurait pu assortir son recours dès l'origine ;
Que le jugement sera confirmé sur ce point ;
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Considérant que chaque partie succombant partiellement dans ses prétentions, chacune conservera la charge de ses propres dépens ;
Considérant que l'équité commande de ne pas faire application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement rendu le 11 février 2014 par le tribunal de grande instance de Versailles, sauf en ce qui concerne la responsabilité de l'avocat résultant de l'exercice d'une procédure de référé administratif ;
STATUANT à nouveau de ce chef,
-DIT que la procédure de référé introduite le 13 juillet 2005 l'a été tardivement et de façon incomplète, occasionnant à M. [N] une perte de chance d'obtenir la suspension d'exécution de l'arrêté du 14 septembre 2004 ;
-CONDAMNE in solidum la SCP Ancelet [I] [L] [T] ainsi que les sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD à verser à M. [R] [N] la somme de 3.000 euros en réparation de cette perte de chance avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;
REJETTE toute autre demande des parties, et notamment celles fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;
DIT que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d'appel ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Odile BLUM, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le président,