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09/06/2016 | FRANCE | N°14/01314

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 09 juin 2016, 14/01314


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 28A



1re chambre 1re section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 09 JUIN 2016



R.G. N° 14/01314



AFFAIRE :



[Q] [B]





C/

[T] [B] épouse [K]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Février 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 01

N° Section :

N° RG : 2012/0081



Expéditions

exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :





- Me Franck LAFON, avocat au barreau de VERSAILLES,



Me Fanny CHARPENTIER, avocat au barreau de VERSAILLES,





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







LE NEUF JUIN DEUX MILLE SE...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 28A

1re chambre 1re section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 09 JUIN 2016

R.G. N° 14/01314

AFFAIRE :

[Q] [B]

C/

[T] [B] épouse [K]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Février 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 01

N° Section :

N° RG : 2012/0081

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

- Me Franck LAFON, avocat au barreau de VERSAILLES,

Me Fanny CHARPENTIER, avocat au barreau de VERSAILLES,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF JUIN DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant après prorogation dans l'affaire entre :

Madame [Q] [B]

née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 1] (72)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

- Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20140082

Représentant : Me Emmanuel SYNAVE, avocat plaidant, au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 193

Madame [C] [B]

née le [Date naissance 2] 1946 à [Localité 1] (72)

[Adresse 2]

[Adresse 3]

- Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20140082

Représentant : Me Emmanuel SYNAVE, avocat plaidant, au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 193

APPELANTES

****************

Madame [T] [B] épouse [K]

née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 1] (72)

[Adresse 4]

[Adresse 5]

Représentant : Me Fanny CHARPENTIER, membre de la SCP GRAS ROBERT CHARPENTIER avocat postulant et plaidant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 92

Madame [O] [B] épouse [E]

née le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 1] (72)

[Adresse 6]

[Adresse 7]

Représentant : Me Fanny CHARPENTIER, membre de la SCP GRAS ROBERT CHARPENTIER avocat postulant et plaidant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 92

Madame [R] [B] épouse [G]

née le [Date naissance 4] 1939 à [Localité 1] (72)

[Adresse 8]

[Adresse 9]

Représentant : Me Fanny CHARPENTIER, membre de la SCP GRAS ROBERT CHARPENTIER avocat postulant et plaidant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 92

Madame [K] [B]

née le [Date naissance 5] 1962 à [Localité 1] (72)

[Adresse 10]

[Adresse 11]

Représentant : Me Fanny CHARPENTIER, membre de la SCP GRAS ROBERT CHARPENTIER avocat postulant et plaidant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 92

Madame [I] [B]

née le [Date naissance 6] 1972 à [Localité 2] (61)

[Adresse 12]

[Adresse 13]

Représentant : Me Fanny CHARPENTIER, membre de la SCP GRAS ROBERT CHARPENTIER avocat postulant et plaidant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 92

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 Mars 2016 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne LELIEVRE, conseiller, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Odile BLUM, Président

Madame Anne LELIEVRE, Conseiller,

Monsieur Dominique PONSOT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame [K] RENOULT,

Vu le jugement rendu le 11 février 2014 par le tribunal de grande instance de Versailles qui a :

- débouté Mmes [C] et [Q] [B] de leur fin de non recevoir,

- ordonné qu'il soit procédé aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [F] [R], veuve [B], et en tant que de besoin, au préalable, de son régime matrimonial avec [H] [B],

- désigné pour y procéder dans le cadre des dispositions des articles 1364 et suivants du code de procédure civile Maître [T], notaire à [Localité 3],

- désigné le président de la première chambre civile du tribunal de grande instance de Versailles ou son délégataire pour suivre les opérations de partage et faire rapport en cas de difficulté,

- dit qu'en cas d'empêchement du magistrat ou du notaire commis il sera procédé à son remplacement par ordonnance rendue sur simple requête de la partie la plus diligente,

- condamné Mme [C] [B] à rapporter à la succession de sa mère, pour la période allant de février 1992 à décembre 2001, une indemnité d'occupation pour la maison sise [Adresse 14] dont le montant sera fixé par le notaire assisté en tant que de besoin par un expert,

- condamné Mme [Q] [B] à rapporter à la succession de sa mère, pour la période allant de avril 1994 à mars 2004, une indemnité d'occupation pour la maison sise [Adresse 1] dont le montant sera fixé par le notaire assisté en tant que de besoin par un expert,

- dit que les parties devront remettre au notaire, dès la première convocation, l'ensemble des documents intéressant le dossier,

- dit que le notaire pourra se faire communiquer tous renseignements bancaires concernant les parties et le défunt directement auprès des établissements concernés, des fichiers FICOBA ou AGIRA, sans que le secret professionnel lui soit opposé,

- dit qu'il pourra également, notamment pour fixer les indemnités d'occupation, s'adjoindre un expert dans les conditions prévues par l'article 1365 du code de procédure civile aux frais préalablement avancés par les parties au prorata de leurs droits dans l'indivision successorale, dans le délai d'un mois à compter de la demande qui leur sera adressée par le notaire,

- rappelé que, de façon générale, le notaire pourra faire usage des dispositions des articles 1365, 1366, 1371 du code de procédure civile et 841-1 du code civil,

- renvoyé les parties devant notaire pour évaluation des rapports et liquidation de leurs droits respectifs pour lesquels seront prises en compte les répartitions d'ores et déjà effectuées par le notaire,

- dit que le notaire devra dresser un état liquidatif qui établit les comptes entre les copartageants, la masse partageable, les libéralités rapportables, l'indemnité de réduction, les droits des parties et la composition des lots à répartir,

- dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute demande plus ample ou contraire des parties,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné les parties aux dépens à proportion de leur part dans l'indivision,

- dit qu'ils seront employés en frais privilégiés de partage et qu'ils pourront être recouvrés par Maître Gras, membre de la SCP Gras & Robert et Maître Synave, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Vu l'appel de cette décision relevé le 18 février 2014 et les dernières conclusions du 21 juillet 2014 par lesquelles Mmes [Q] et [C] [B] demandent à la cour de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

A titre principal,

-juger que Mmes [T], [O], [R], [K] et [I] [B], ne justifient en aucun cas avoir élevé une quelconque contestation sur la manière de procéder au partage ou de le terminer auprès du notaire en charge de procéder aux opérations amiables de comptes liquidation et partage, et notamment pour ce qui concerne leur souhait manifesté pour la première fois dans un cadre judiciaire, de voir rapporter à la masse successorale un avantage qui aurait été reçu par Mmes [Q] et [C] [B] en raison d'une occupation déclarée gratuite de leurs immeubles sis respectivement à [Localité 4] et à [Localité 5],

En conséquence,

- déclarer irrecevable, sur le fondement des articles sus énoncés, la demande judiciaire d'ouverture des opérations de compte et liquidation partage formulée par Mmes [T], [O], [R], [K] et [I] [B], et les en débouter,

A titre subsidiaire,

- juger qu'un même bien ne saurait faire l'objet de deux donations distinctes, l'une de fruits échus avant l'ouverture de la succession au titre de l'occupation gratuite de l'immeuble soumise au rapport, l'autre au titre de la donation qui a suivi portant sur la pleine propriété dudit immeuble faite hors parts successorales et donc soumise à réduction,

- dire que le rapport n'est pas dû des fruits échus avant l'ouverture d'une succession et que tel est le cas de l'occupation gratuite d'un immeuble consentie par la défunte dans un premier temps, donné en pleine propriété par cette dernière dans un second temps,

- débouter en conséquence et en tout état de cause Mmes [T], [O], [R], [K] et [I] [B] de l'intégralité de leurs demandes,

- condamner solidairement Mmes [T], [O], [R], [K] et [I] [B], à leur payer à chacune d'entre elles, une somme de 5'000'euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction.

Vu les dernières conclusions signifiées le 13 juin 2014 par Mmes [T], [O], [R], [K] et [I] [B] qui demandent à la cour de :

- confirmer le jugement en l'ensemble de ses dispositions sauf en ce qu'il a jugé n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

- condamner Mmes [Q] et [C] [B] à leur verser une somme de 6.000'euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure de première instance et celle encore de 6.000'euros en cause d'appel,

-condamner Mmes [Q] et [C] [B] aux entiers dépens ;

SUR CE, LA COUR,

Considérant que [F] [R] veuve [B] est décédée le [Date décès 1] 2009 laissant pour lui succéder, ses 5 filles issues de son union avec son époux prédécédé :

Mme [R] [B],

Mme [C] [B],

Mme [O] [B],

Mme [Q] [B],

Mme [T] [B],

Et ses 2 petites-filles, venant par représentation de [L] [B], leur père prédécédé :

Mme [K] [B],

Mme [I] [B] ;

Qu'aux termes d'un acte authentique passé le 17 mars 2004, [F] [B] a fait donation par préciput et hors part, à Mme [C] [B] des 27'433/36'580èmes en toute propriété d'une maison et d'un terrain sis à [Localité 5] et à Mme [Q] [B] de la toute propriété d'une maison sise à [Adresse 1] ;

Qu'un projet de déclaration de succession a été établi par Maître [T], mais n'a pas été signé par les parties ;

Que par actes d'huissier des 2 et 6 janvier 2012, Mmes [T], [O], [R], [K] et [I] [B] ont fait assigner Mmes [Q] et [C] [B] sur le fondement des articles 815, 840, 843 et 860 du code civil et 1364 du code procédure civile afin principalement de voir ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage en tant que de besoin du régime matrimonial ayant existé entre [F] [B] et son défunt mari et de la succession de la première et dans cette perspective, de renvoyer les parties devant le notaire et qu'il soit statué sur le rapport d'indemnités d'occupation respectivement dues par Mmes [Q] et [C] [B] ;

Sur l'irrecevabilité de la demande en partage judiciaire

Considérant que Mmes [Q] et [C] [B] concluent , sur le fondement de l'article 1360 du code de procédure civile, à l'irrecevabilité de la demande de partage judiciaire au motif que les intimées n'ont jamais fait part au notaire ni à elles-mêmes, préalablement à la délivrance de l'assignation, de leur intention de faire rapporter à la succession l'avantage tiré de l'occupation des deux immeubles à une période antérieure à la donation dont ils ont fait l'objet le 17 mars 2004 ; qu'elles prétendent n'avoir pas été informées du rendez-vous fixé par le notaire en son étude le 11 avril 2011 ; qu'il ne peut être prétendu que les diligences en vue de parvenir à un partage amiable n'auraient pas abouti au simple motif que Mme [Q] [B] sollicitait de pouvoir s'acquitter de la soulte dont elle se reconnaissait redevable en deux versements ; qu'en réalité les intimées qui demandent aujourd'hui le rapport d'indemnités d'occupation en en tant qu'avantages dont les appelantes ont bénéficié, n'avaient jamais formulé une telle demande devant le notaire, et ne justifient donc pas de diligence en vue d'aboutir au partage amiable ; qu'elles font observer qu'elles ne refusaient pas de consentir au partage amiable et prétendent que les conditions posées par les articles 840 du code civil et 1360 du code de procédure civile ne sont pas réunies ;

Que Mmes [T], [O], [R], [K] et [I] [B] répliquent qu'elles avaient expressément conditionné la ratification d'un partage amiable au paiement de l'indemnité de réduction mise à la charge des appelantes au plus tard le 2 novembre 2011, et que celles-si étaient prévenues qu'à défaut, le partage serait judiciaire ; qu'elles soutiennent avoir été diligentes et que leurs propositions de partage n'ont pas été suivies d'effet par les appelantes ;

Que s'agissant de leur demande de rapport, celle-ci n'est que l'application de la règle de droit, de sorte que les appelantes ne pouvaient pas ne pas en avoir connaissance ; que si elles étaient prêtes à y renoncer dans le cadre d'un accord amiable, elles sont désormais fondées à former de telles prétentions en l'absence de ratification de cet accord du seul fait des appelantes,;

Considérant que selon l'article 840 du code civil, le partage est fait en justice lorsque l'un des indivisaires refuse de consentir au partage amiable ou s'il s'élève des contestations sur la manière d'y procéder ou de le terminer ;

Que l'article 1360 du code de procédure civile prévoit qu'à peine d'irrecevabilité, l'assignation en partage contient un descriptif sommaire du patrimoine à partager et précise les intentions du demandeur quant à la répartition des biens ainsi que les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable ;

Considérant que les premiers juges ont exactement constaté, par des motifs pertinents que la cour adopte, que les termes de l'assignation aux fins de partage satisfaisaient pleinement aux exigences de l'article 1360 du code civil ;

Qu'il suffit d'ajouter que les appelantes, qui ne s'étaient pas présentées au rendez-vous de signature de l'acte de partage organisé par le notaire le 11 avril 2011, avaient obtenu de leurs copartageants un délai pour signer le partage amiable sous condition de versement des soultes, allant jusqu'au 2 novembre 2011 ; qu'il ne peut qu'être constaté que le partage n'a pu aboutir en raison de l'impossibilité soulignée par Mme [Q] [B] elle-même, dans une lettre du 7 décembre 2011, de s'acquitter de la totalité de la soulte de 64.971,86 € ; qu'elle proposait de verser un acompte de 30.000 € et le solde lors de la vente de sa maison, soit à une date indéterminée, ce que les copartageantes n'étaient nullement tenues d'accepter ;

Que si Mmes [T], [O], [R], [K] et [I] [B] entendent solliciter dans le cadre du partage judiciaire, la prise en considération d'avantages indirects dont elles demandent qu'ils soient soumis à la règle du rapport, ces prétentions sont expressément formulées dans l'assignation ; que la nouveauté de cette demande est inopérante au soutien de la fin de non-recevoir, les textes susvisés ne faisant pas interdiction aux parties de formuler les prétentions de leur choix, peu important que celles-ci ne l' aient pas été dans le cadre de la tentative de partage amiable ;

Que la décision déférée est confirmée en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir ;

Sur l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage

Considérant que les parties n'ayant pu s'entendre sur le projet de partage proposé par Me [T] du fait de l'impossibilité pour Mme [Q] [B] de s'acquitter de la totalité de la soulte dont elle était redevable et compte tenu du désaccord existant sur le bien fondé de la demande de rapport au titre de l'occupation des biens immobiliers, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [F] [B] et au besoin de son régime matrimonial avec [H] [B] ;

Sur les rapports à succession

Considérant que Mmes [Q] et [C] [B] soutiennent qu'elles ne sont pas tenues au rapport au titre de l'occupation des biens immobiliers antérieurement à la date de leur donation, le 17 mars 2004 ; que l'occupation des biens dont elles ne contestent pas le caractère gratuit, se justifiait, pour [C] par les soins prodigués à sa mère qu'elle avait prise à son domicile pendant plusieurs années, et pour [Q], par la prise en charge d'importants travaux de rénovation dans le pavillon occupé auparavant par un locataire ;

Que l'occupation de ces biens à titre gratuit avant la donation constituait un avantage indirect mais non une donation qui supposerait la preuve de l'appauvrissement de leur mère procédant d'une intention libérale et alors que la mise à disposition d'un appartement ou d'une maison ne peut donner lieu à rapport que si elle est une donation ;

Que pour leur part, Mmes [T], [O], [R], [K] et [I] [B] font valoir que les appelantes ne justifient pas de la réalité des soins apportés à leur mère ou des travaux qu'elles auraient entrepris et affirment produire des éléments apportant la preuve contraire s'agissant des travaux ;

Que l'occupation des biens antérieure aux actes de donation s'analyse en un avantage indirect constituant nécessairement une libéralité rapportable dès lors que leur mère s'est volontairement appauvrie au profit de [C] et [Q], sans que ces dernières justifient d'un état de besoin et sans contrepartie et qu'elle était animée d'une intention libérale à leur égard ;

Considérant qu'il résulte de l'article 843 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 23 juin 2006, applicable à l'espèce compte tenu de la date d'ouverture de la succession, que tout héritier, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement : il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale ;

Que seule une libéralité est rapportable , ce qui suppose, à charge pour ceux qui en allèguent l'existence, de démontrer que la mise à disposition à titre gratuit des biens considérés, a constitué un acte d'appauvrissement pour la défunte et procédait d'une intention libérale ;

Considérant que Mme [C] [B] a occupé le bien immobilier situé à Triel sur Seine, qui lui a été donné par la suite, à compter du mois de février 1992 jusqu'au mois de décembre 2001 ; que Mme [Q] [B] a pour sa part occupé le bien immobilier situé à [Localité 4] d' avril 1994 à décembre 2001 ; qu'elles ne soutiennent pas avoir payé un loyer à leur mère ;

Que comme l'ont exactement relevé les premiers juges, Mme [C] [B] ne démontre pas que pour la période antérieure à 2001, l'aide qu'elle a apportée à sa mère excédait les exigences de la piété filiale, de sorte qu'elle ne pouvait constituer une contrepartie équivalente à la mise à disposition gratuite du logement ; que Mme [Q] [B] n'établit pas, quant à elle, avoir pris en charge la rénovation du pavillon d'[Localité 4] ; que les intimés établissent au contraire, notamment au moyen de l'attestation de M.[P] [K] et de celle de M. [D] [Y], que des travaux ont été réalisés par le premier et que le coût de la rénovation du pavillon était assumé par la défunte ;

Que la mise à disposition à titre gratuit des logements considérés a constitué un appauvrissement de [F] [B] ; qu'en effet, celle-ci a dû, le 28 juin 1993, donner un congé pour reprise au locataire du bien situé à [Adresse 1] afin de permettre à [Q] de l'occuper, ce dont il se déduit qu'elle a perdu le loyer qu'elle percevait jusque là ; que le bien situé à Triel aurait tout autant pu lui procurer des revenus auxquels elle a renoncé en le mettant à la disposition de [C] ;

Qu'une mise à disposition gratuite aussi longue, suivie de la donation par préciput et hors part à chacune des deux soeurs, des biens qu'elles occupaient respectivement, traduit l'intention libérale manifeste de [F] [B] à leur égard ;

Qu'il doit enfin être rappelé à [C] [B] et à Mme [Q] [B] que le rapport n'est sollicité que pour la période antérieure aux donations dont elles ont bénéficié, de sorte que l'affirmation selon laquelle , un même bien ne pourrait avoir été donné deux fois, sous la forme d'une donation de fruits dans un premier temps, puis de la toute propriété du bien dans un second temps est dépourvue d'effet et de portée ;

Considérant que c'est donc à juste titre que le tribunal a retenu que la mise à disposition gratuite sans contrepartie, dont Mmes [C] et [Q] [B] ont bénéficié pendant une longue durée, a constitué une libéralité rapportable à la succession, conformément aux dispositions de l'article 843 du code civil ; que les indemnités d'occupation dues seront évaluées par Me [T], notaire en charge des opérations de comptes, liquidation et partage devant lequel les parties ont été renvoyées, au besoin avec l'assistance d'un expert conformément aux dispositions de l'article 1365 du code de procédure civile et du jugement déféré ;

Que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions, excepté en celles relatives à l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que Mmes [C] et Mme [Q] [B] , qui succombent en leur recours, seront condamnées aux dépens d'appel ;

Que l'équité commande d'allouer à Mmes [T], [O], [R], [K] et [I] [B] la somme de 3.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile tant au titre des frais exposés en première instance qu'en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en celles relatives à l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

Condamne solidairement Mmes [C] et Mme [Q] [B] à payer à Mmes [T], [O], [R], [K] et [I] [B] la somme de 3.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile tant au titre des frais exposés en première instance qu'en cause d'appel,

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,

Condamne solidairement Mmes [C] et [Q] [B] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile .

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Odile BLUM, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1re chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 14/01314
Date de la décision : 09/06/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°14/01314 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-09;14.01314 ?
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