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02/06/2016 | FRANCE | N°15/00384

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 02 juin 2016, 15/00384


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 53F



13e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 02 JUIN 2016



R.G. N° 15/00384



AFFAIRE :



Société TF [R] D.O.O





C/



SAS ING LEASING FRANCE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Juillet 2014 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 04

N° Section :

N° RG : 2013F3524-



Expéditio

ns exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 02.06.2016

à :



Me Pierre GUTTIN,



Me Bertrand ROL de L'AARPI JRF



TC NANTERRE

REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE DEUX JUIN DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53F

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 02 JUIN 2016

R.G. N° 15/00384

AFFAIRE :

Société TF [R] D.O.O

C/

SAS ING LEASING FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Juillet 2014 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 04

N° Section :

N° RG : 2013F3524-

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 02.06.2016

à :

Me Pierre GUTTIN,

Me Bertrand ROL de L'AARPI JRF

TC NANTERRE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DEUX JUIN DEUX MILLE SEIZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Société TF [R] D.O.O société de droit slovène, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés de droit en cette qualité au siège social sis

[Adresse 1]

[Localité 1]

. SLOVENIE

Représentée par Me Pierre GUTTIN, avocat Postulant, au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - N° du dossier 15000014 et par Me Constantin ACHILLAS, avocat plaidant au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

SAS ING LEASING FRANCE Agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 380 311 407

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par Me Bertrand ROL de l'AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat Postulant, au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20150059 et par Me Florent ELLIA, avocat plaidant au barreau d'ANTIBES

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 04 Avril 2016 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène GUILLOU, conseiller et Madame Aude RACHOU, présidente, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Aude RACHOU, Présidente,

Madame Hélène GUILLOU, Conseiller,

Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Carole GIBOT-PINSARD,

FAITS ET PROCEDURE,

Le 27 juin 2006, la société ING leasing France a conclu un contrat de crédit-bail concernant un navire avec la société de droit slovène TF [R] D.O.O. (La société [R]). Celle-ci n'honorant plus les échéances du contrat, la société ING leasing France l'a mise en demeure le 6 novembre 2012 d'avoir à lui payer la somme de 754 949,78 euros puis lui a notifié le 13 novembre 2012 la résiliation du contrat avec demande de payer la somme de 1 104 336,32 euros.

Par ordonnance du 23 août 2013, le président du tribunal de commerce d'Antibes a autorisé la société [R] à procéder à une saisie-conservatoire du navire pour empêcher sa vente. Par arrêt du 7 novembre 2013, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a ordonné la mainlevée de la saisie conservatoire ; la société ING leasing France a procédé à la vente du navire pour un prix que la société [R] estime dérisoire.

La société ING leasing France a assigné la société [R] devant le tribunal de commerce de Nanterre, lequel, par jugement rendu le 4 juillet 2014, a :

- débouté la société [R] de sa demande de résolution du contrat en date du 27 juin 2006,

- dit que le contrat en date du 27 juin 2006 entre la société ING leasing France et [R] a été résilié le 13 novembre 2012,

- condamné la société [R] à payer la somme de 754 949,60 euros à la société ING leasing France majorée des intérêts calculés au taux légal à compter du 13 novembre 2012,

- débouté la société [R] de l'ensemble de ses demandes,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la société [R] à payer à la société ING leasing France la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La société [R] a fait appel du jugement le 13 janvier 2015.

Dans ses dernières conclusions du 3 août 2015, la société [R] demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nanterre le 4 juillet 2014 en ce qu'il a jugé n'y avoir lieu à paiement d'une clause pénale, 'débouté la société ING de sa demande d'indemnité de résiliation, débouté la société ING de sa demande de remboursement au titre de frais,

- réformer le jugement entrepris s'agissant de la condamnation de la société [R] au paiement de la somme de 754 949,60 euros à la société ING majorée des intérêts calculés au taux légal à compter du 13 novembre 2012,

- dire abusive la saisie conservatoire du navire «'ANITA'» pratiquée par la société ING selon exploit du 6 décembre 2012, ainsi que la non-restitution du navire à la'société [R] en dépit de la mainlevée de saisie conservatoire ordonnée le 27'juin'2013 par le tribunal de commerce de Cannes,

- constater que la société [R] a remboursé à la société ING plus de 90'% des sommes prêtées au titre du crédit-bail n° 233101-VE-0 en date du 27 juin'2006, soit 8 752 243,32'euros,

- constater que la société [R] a continué d'engager des frais au titre du navire «'Anita'» alors qu'elle n'en avait plus la jouissance et qu'elle ne pouvait plus en assurer l'exploitation du fait de la saisie conservatoire pratiquée abusivement par la société ING,

- dire abusive la résiliation unilatérale du contrat de crédit-bail par la société ING,

- constater l'enrichissement sans cause de la société ING au préjudice de la société [R],

- condamner la société ING à payer à la société [R] la somme de 650 000'euros à titre de dommages et intérêts du fait des conséquences de la saisie conservatoire et de ses suites,

- condamner la société ING à régler à la société [R] la somme de 2 500 089'euros représentant la différence entre la valeur du navire «'Anita'» (3 500 000'euros) et le solde du remboursement du crédit-bail (999 911 euros)',

- condamner la société ING à régler à la société [R] la somme de 150 000 euros au titre du préjudice moral subi par la société [R],

- condamner la société ING à régler à la société [R] la somme de la somme de 65 142,17 euros à titre de remboursement des frais d'entretien et de fonctionnement postérieurement à la saisie conservatoire du navire,

- dire que l'ensemble de ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation le 23 septembre'2013,

- ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- ordonner la remise des effets personnels présents à bord ou à défaut condamner la société ING à verser à la société [R] la somme de 87 364,49 euros à titre de dommages et intérêts pour la perte desdits effets,

- condamner la société ING à payer à la société [R] la somme de 75 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés par Maître Pierre Guttin, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 3 juin 2015, la société ING demande à la cour de :

- confirmer la décision entreprise,

Y ajoutant, par réformation partielle,

- condamner la société [R] à payer à la société ING les sommes de :

- 349 386,54 euros au titre de l'indemnité de résiliation,

- 306 964 euros au titre des frais d'entretien du navire jusqu'à la date du 7 novembre 2013,

- 1 337,10 euros en remboursement des factures d'entreposage, outre la somme de 70,71 euros par mois à compter du mois de juin 2015,

- condamner la société [R] à payer à la société ING la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société [R] à condamner la société ING aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera effectué pour ceux la concernant par l'A.A.R.P.I. JRF avocats, représentée par Maître [I] [J], et ce conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux dernières conclusions signifiées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE :

Sur la demande de résiliation de plein droit du contrat de crédit bail :

Considérant que la société [R] soutient que la société ING a manqué à son obligation de bonne foi dans l'exécution du contrat de crédit bail ; qu'en effet, alors qu'elle sollicitait un moratoire de paiement en raison des difficultés qu'elle rencontrait mais aussi parce qu'elle était en train de vendre un actif de 15 millions d'euros, la société ING lui a immédiatement notifié la résiliation du contrat de crédit bail, alors même que plus de 90% du crédit bail avait été honoré et qu'elle ne devait plus que 3 échéances ; que cette intransigeance a aggravé sa situation, la perte d'exploitation subie par la société [R] ne lui permettant plus d'honorer sa dette ; qu'elle a aussi été privée de la propriété du navire à l'issue du contrat ; que la société ING ne subit aucune perte, percevant l'intégralité du prix du navire et pouvant de surcroît le revendre ; qu'elle-même a subi un préjudice de perte d'exploitation de 650 000 euros auquel s'ajoute le préjudice moral qu'elle évalue à 150 000 euros ; qu'enfin elle n'a pu récupérer dans le yacht les biens mobiliers lui appartenant et qui ont disparu ;

Considérant que la société ING réplique que n'étant plus payée des échéances et après avoir essayé en vain de régler amiablement ce dossier, elle a été contrainte de mettre en demeure la société [R] et qu'en l'absence de proposition sérieuse de règlement, elle a été contrainte de notifier la résiliation de plein droit du crédit-bail conformément aux clauses contractuelles ; qu'il lui est dû 754 949,78 euros au titre des loyers et intérêts de retard, une indemnité de résiliation de 349 386,54 euros et le remboursement de frais qu'elle a dû assumer pour 306 964 euros ; que compte tenu des travaux nécessaires et des visites de sécurité à effectuer la société [R] n'aurait en tout état de cause pu exploiter le navire en 2013 ; que le navire n'a jamais été loué qu'au seul bénéfice de M. [A] [R] lui-même par l'intermédiaire de ses propres sociétés ; qu'enfin la récupération du mobilier et des affaires personnelles de la société [R] était particulièrement aisée puisque le navire était sous la garde du capitaine embauché par la société [R] et que tout ce qui a été récupéré à bord a été placé dans un box loué par la société ING ;

Considérant que le contrat de crédit-bail liant les parties stipule en son article 13 que 'le contrat pourra être résilié sur l'initiative du bailleur et de plein droit dès réception par le locataire d'une lettre recommandée avec accusé de réception à cet effet et sans qu'il soit besoin d'effectuer aucune autre formalité dans chacun des cas énumérés ci dessous et quelque soit le pouvoir du locataire d'en prévenir la survenance ou d'en contrôler les causes et les effets :

- le non paiement à son échéance d'un montant quelconque dû aux termes du présent contrat (...)' ;

Considérant que la société [R] ne conteste pas ne pas avoir été en mesure de payer les échéances qui lui ont été réclamées au titre du contrat par lettre recommandée du 6 novembre 2012 pour un montant de 754 949,78 euros au titre des loyers dus pour la période du 15 juillet au 15 octobre 2012 ; que le 13 novembre elle a été mise en demeure de payer la somme de 1 104 336,32 euros ;

Considérant que seule une somme de 165 000 euros a été payée le 21 décembre 2012 ; que les courriels du 12 novembre 2012 et 27 décembre 2012 ne comportent qu'une invitation à patienter et rentrer en contact pour une négociation mais ne formule aucune offre ferme de paiement ; que c'est à bon droit que la société ING s'est prévalue le 13 novembre 2012 de la résiliation du contrat conclu le 27 juin 2006 ; que la mauvaise foi de la société ING n'est pas caractérisée, pas plus qu'un abus du droit de faire application des clauses contractuelles ; que la société [R] n'a adressé aucun courrier faisant état de sa volonté de lever l'option prévue au contrat et de payer le prix résiduel pour devenir propriétaire du navire ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a constaté la résiliation du contrat de crédit bail le 13 novembre 2012 ;

Sur les demandes en paiement :

Sur la demande au titre des loyers impayés :

Considérant que la société [R] soutient qu'en l'état des sommes déjà versées, la cour, statuant en équité, devra dire que la société [R] n'est redevable d'aucune somme ;

Mais considérant que le contrat fait la loi des parties ; que la société [R] ne conteste pas ne pas s'être acquittée des loyers réclamés ; qu'aucune considération d'équité ne permet aux juges de dispenser une partie des obligations en considération desquelles l'autre partie a accepté de contracter ;

Considérant que c'est donc à juste titre que le tribunal de commerce a condamné la société [R] à payer la somme de 754 949,60 euros avec intérêts au taux légal depuis le 13 novembre 2012 date de la mise en demeure ;

Sur l'indemnité de résiliation :

Considérant que la société ING demande le paiement d'une somme de 349 386,54 euros sur le fondement de l'article 13.4 du contrat qui dispose que 'pour le cas où le contrat serait résilié pour l'une des causes visées à l'article 13.1 ci-dessus, le locataire (ou toute personne chargée de l'administration des biens du locataire) sera tenu, sans préjudice de l'exécution des obligations mises à sa charge aux termes de l'article 14 ci-dessous, de verser, en sus de toute somme exigible et à titre de réparation du préjudice subi, une indemnité de résiliation égale au montant hors taxes des loyers à échoir à la date de résiliation, majoré de la valeur résiduelle du matériel' ; qu'en application de cette disposition elle réclame le paiement d'une somme de 349 386,54 euros ;

Considérant que la société [R] réplique que cette clause peut être réduite par le juge sur le fondement de l'article 1152 du code civil, s'agissant d'une clause pénale ;

Considérant que l'article 13.4 du contrat constitue une clause pénale, entraînant l'exigibilité immédiate des loyers dès la date de la résiliation et le paiement de la valeur résiduelle du bien alors même que le locataire ne peut plus l'acquérir ; qu'elle a été stipulée à la fois comme un moyen de contraindre le locataire à l'exécution et comme l'évaluation conventionnelle et forfaitaire du préjudice futur subi par le crédit-bailleur du fait de l'accroissement de ses frais et risques à cause de l'interruption des paiements prévus, qu'elle constitue donc une clause pénale que le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; que la clause peut notamment s'avérer manifestement excessive au regard du préjudice effectivement subi par le créancier ;

Considérant qu'en l'espèce, seul un dernier trimestre était dû, soit 330 075,94 euros HT ; qu'au terme de cette dernière échéance le locataire pouvait acquérir le navire pour 19 310,60 euros ; que le bailleur est resté propriétaire du navire et l'a revendu après avoir fait procéder à sa saisie ; que le prix de revente n'est pas précisé ; que la société [R] soutient, sans être contredite qu'il a été mis en vente pour un prix de 2,4 millions d'euros ; que la société ING qui a revendu un navire qui avait été en grande partie payé a donc subi en l'espèce un préjudice sans commune mesure avec le montant de l'indemnité de résiliation ; que la clause pénale constitue donc une peine manifestement excessive qui sera réduite à 10 000 euros ;

Sur le remboursement des frais d'entretien du navire:

Considérant que la société ING demande le remboursement de frais d'entretien du navire qu'elle a supportés alors qu'ils incombaient au locataire ;

Considérant qu'aux termes du contrat les frais d'entretien du navire incombent au locataire ; qu'il en est ainsi, selon l'article 14.4, lorsque des frais sont nécessaires à expiration du contrat lorsque le locataire n'a pas levé l'option ;

Considérant que la société [R] soutient que le navire a été restitué en bon état et qu'aucun défaut d'entretien ne peut lui être reproché ;

Considérant cependant que les devis produits par la société [R] démontrent que des travaux de maintenance étaient nécessaires pour un montant d'au moins 50 000 euros en 2013 mais également que d'autres travaux étaient à prévoir comme en attestent le mail échangé le 15 janvier 2013 avec M. [K] et le devis fait par l'entreprise Rodriguez qui préconise d'autres réparations ; que les factures versées aux débats datent de 2010, 2011 et 2012 ;

Considérant que la société ING établit diverses dépenses, de contrôle ou d'entretien, d'équipage de réfection, de prime d'assurances pour un montant total de 306 963 euros ; qu'elle est bien fondée à demander le paiement de ces dépenses ; qu'en effet, si le crédit bail prenait fin à compter du 2nd trimestre 2012, à défaut d'exercice de l'option d'achat, la société [R] aurait dû supporter les frais jusqu'à cette date en sa qualité de locataire, puis la société ING, à défaut de vendre ce navire au preneur, aurait dû pouvoir le vendre à l'issue du contrat, ce qu'elle n'a pas été mise en mesure de faire rapidement compte tenu des procédures intentées par la société [R] pour s'y opposer ; que la société [R] n'est pas fondée à demander le remboursement des frais qu'elle a payés pour l'entretien et la conservation du navire et le salaire du personnel au premier trimestre 2013, soit 65 142,17 euros, puisque le contrat aurait dû être encore en cours à cette date et que les frais devaient être supportés par le locataire ;

Considérant en outre que les biens de la société [R] encore présents sur le bateau lors de la saisie et non récupérés par leur propriétaire sont stockés moyennant un loyer de 70,71 euros que la société [R] devra rembourser à la société ING ; que cette location sera cependant due seulement à compter du 3 mars 2015, la société ING n'établissant pas en avoir averti auparavant la société [R] ;

Sur les demandes reconventionnelles de la société [R] :

Considérant que la société [R] demande la réparation d'un préjudice financier à raison de la perte d'exploitation subie du fait qu'elle a été privée du navire pendant une saison (650 000 euros de perte subi et gain manqué), du vol d'effets restés sur le navire (87 364,49 euros) et du préjudice moral subi (150 000 euros) ; qu'elle demande également une indemnité 'au regard de la vente à vil prix du navire par la société ING', qu'elle évalue à 2 500 089 euros (3 500 000 euros représentant la valeur estimée du navire - 999 911 euros représentant le solde dû au titre du crédit bail) ;

Considérant que la société [R] ne produit aux débats aucune réservation du navire Anita pour les mois à venir dont elle aurait été brutalement privée ; que le courriel du 27 décembre 2012 que M. [R] a adressé à la société ING fait état de ce qu'il était nécessaire de faire environ 330 000 euros de 'travaux hivernaux et de réparations', ce qui est corroboré par les photographies versées aux débats par la société ING ; qu'enfin et surtout la résiliation du contrat de crédit bail la privant du droit de louer ce navire lui est imputable ; qu'elle ne peut réclamer d'indemnisation ni au titre d'un préjudice financier ni d'un préjudice moral ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Considérant que des sommes étant dues par le locataire la société ING était bien fondée à vendre le navire, n'ayant pas vocation à l'exploiter elle-même ; que la saisie du navire en vue de sa vente n'est donc pas abusive ; qu'après avoir obtenu la mainlevée de la saisie opérée par la société ING, la société [R] a obtenu le 23 août 2013 le droit de procéder à la saisie conservatoire du navire Anita, par une ordonnance qui a été rétractée le 7 novembre 2013 ; qu'il a cependant été procédé à la saisie le 23 août 2013, l'huissier ayant seulement constaté que le navire ne pouvait être enchaîné ; qu'aucun élément ne démontre que la société ING aurait refusé sa restitution, quoiqu'elle ait immédiatement saisi le juge des référés d'une demande de mainlevée de cette saisie, avant de saisir le juge du fond ; que l'abus des recours exercés par la société ING pour obtenir la mainlevée de la saisie d'un navire dont elle était seule propriétaire n'est pas démontré par la société [R] ; que la demande de dommages-intérêts qu'elle a formée sera rejetée ;

Considérant quant aux effets personnels laissés sur le navire par la société [R] et qui auraient disparu, que ceux-ci auraient dû être récupérés sur le navire et qu'à défaut ils ont été mis en garde meuble ; que la société [R] en a été avertie par courriel du 3 mars 2015 précisant que ces objets pouvaient être récupérés dans un box situé à [Localité 3] ; que la société [R] produit diverses factures mais ne justifie pas de la présence à bord lorsque le bateau a été saisi des objets dont elle demande l'indemnisation de la perte ni de ce qu'ils seraient manquants parmi les objets stockés dans le box loué par la société ING ; que la société [R] sera déboutée de sa demande en paiement à ce titre, le jugement étant confirmé ;

Considérant enfin qu'aucun enrichissement sans cause ne bénéficie à la société ING qui, étant bailleur et donc propriétaire du navire, était naturellement destinée à en tirer les bénéfices ; qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir que le navire ait été vendu à vil prix ;

PAR CES MOTIFS :

La COUR,

Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de la société ING Lease France concernant l'indemnité de résiliation, le remboursement des frais et des factures de location d'un box,

Et, statuant à nouveau de ces chefs,

Dit que l'indemnité de résiliation constitue une clause pénale manifestement excessive et réduit à 10 000 euros les sommes dues à ce titre,

Condamne la société T.F. [R] D.O.O à payer à la société ING Lease France les sommes de :

- 306 964 euros au titre des frais engagés pour le navire jusqu'au 7 novembre 2013,

- 70,71 euros par mois à compter du 3 mars 2015, au titre des frais de location d'un box pour l'entreposage des biens devant être restitués à la société T.F. [R] D.O.O, et ce jusqu'à leur récupération ou la déclaration de leur abandon par la société [R],

Y ajoutant,

Condamne la société T.F. [R] D.O.O à payer à la société ING Lease France la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société T.F. [R] D.O.O aux dépens d'appel et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre le droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Aude RACHOU, Présidente et par Madame Karine MOONEESAWMY, adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 15/00384
Date de la décision : 02/06/2016

Références :

Cour d'appel de Versailles 13, arrêt n°15/00384 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-02;15.00384 ?
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